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02/09/2021 | CJUE | N°C-579/19

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, The Queen, à la demande de : Association of Independent Meat Suppliers et Cleveland Meat Company Ltdy contre Food Standards Agency., 02/09/2021, C-579/19


 ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

2 septembre 2021 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Protection de la santé – Règlement (CE) no 854/2004 – Article 5, point 2 – Règlement (CE) no 882/2004 – Article 54, paragraphe 3 – Règles d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale – Inspection post mortem de la carcasse et des abats – Vétérinaire officiel – Marquage de salubrité – Refus – Viande déclarée impropre à la consommation humaine – Droit de recours contre une décision du vétérinaire officiel

 – Protection juridictionnelle effective – Article 47
de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne »

Dans l...

 ARRÊT DE LA COUR (quatrième chambre)

2 septembre 2021 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Protection de la santé – Règlement (CE) no 854/2004 – Article 5, point 2 – Règlement (CE) no 882/2004 – Article 54, paragraphe 3 – Règles d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale – Inspection post mortem de la carcasse et des abats – Vétérinaire officiel – Marquage de salubrité – Refus – Viande déclarée impropre à la consommation humaine – Droit de recours contre une décision du vétérinaire officiel – Protection juridictionnelle effective – Article 47
de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne »

Dans l’affaire C‑579/19,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Supreme Court of the United Kingdom (Cour suprême du Royaume-Uni), par décision du 24 juillet 2019, parvenue à la Cour le 30 juillet 2019, dans la procédure

The Queen, à la demande de :

Association of Independent Meat Suppliers,

Cleveland Meat Company Ltd,

contre

Food Standards Agency,

LA COUR (quatrième chambre),

composée de M. M. Vilaras, président de chambre, MM. N. Piçarra, D. Šváby (rapporteur), S. Rodin et Mme K. Jürimäe, juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

– pour l’Association of Independent Meat Suppliers et Cleveland Meat Company Ltd, par M. S. Hockman, QC, M. D. Hercock, barrister, et Mme H. Leese, solicitor,

– pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. S. Brandon, en qualité d’agent, assisté de M. A. Dashwood, QC, et de M. A Heppinstall, barrister,

– pour la Commission européenne, par MM. A. Dawes, W. Farrell et B. Hofstötter, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 11 février 2021,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 5, point 2, du règlement (CE) no 854/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, fixant les règles spécifiques d’organisation des contrôles officiels concernant les produits d’origine animale destinés à la consommation humaine (JO 2004, L 139, p. 206, ainsi que rectificatifs JO 2004, L 226, p. 83, et JO 2013, L 160, p. 17), tel que modifié par le règlement (CE) no 882/2004 du Parlement européen et du
Conseil, du 29 avril 2004 (JO 2004, L 165, p. 1, et rectificatif JO 2004, L 191, p. 1) (ci–après le « règlement no 854/2004 »), et sur l’interprétation du règlement no 882/2004.

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant l’Association of Independent Meat Suppliers et Cleveland Meat Company Ltd (ci–après « CMC ») à la Food Standards Agency (agence des normes alimentaires, Royaume-Uni) au sujet de la procédure à suivre à la suite d’une décision du vétérinaire officiel refusant d’apposer un marquage de salubrité sur une carcasse appartenant à CMC, déclarant cette carcasse impropre à la consommation humaine et entraînant sa destruction.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

L’accord de retrait

3 Par sa décision (UE) 2020/135, du 30 janvier 2020, relative à la conclusion de l’accord sur le retrait du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique (JO 2020, L 29, p. 1, ci–après l’« accord de retrait »), le Conseil de l’Union européenne a approuvé, au nom de l’Union européenne et de la Communauté européenne de l’énergie atomique, l’accord de retrait, qui a été joint à cette décision.

4 L’article 86 de l’accord de retrait, intitulé « Affaires en instance devant la Cour de justice de l’Union européenne », prévoit, à ses paragraphes 2 et 3 :

« 2.   La Cour de justice de l’Union européenne demeure compétente pour statuer à titre préjudiciel sur les demandes des juridictions du Royaume-Uni présentées avant la fin de la période de transition.

3.   Aux fins du présent chapitre, une procédure est considérée comme ayant été introduite devant la Cour de justice de l’Union européenne, et une demande de décision préjudicielle est considérée comme ayant été présentée, au moment où l’acte introductif d’instance a été enregistré par le greffe de la Cour de justice [...] »

5 Conformément à l’article 126 de l’accord de retrait, la période de transition a commencé à la date d’entrée en vigueur de cet accord et s’est terminée le 31 décembre 2020.

Le règlement (CE) no 178/2002

6 Le règlement (CE) no 178/2002 du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier 2002, établissant les principes généraux et les prescriptions générales de la législation alimentaire, instituant l’Autorité européenne de sécurité des aliments et fixant des procédures relatives à la sécurité des denrées alimentaires (JO 2002, L 31, p. 1), énonce, à ses considérants 2 et 10 :

« (2) Il importe d’assurer un niveau élevé de protection de la vie et de la santé humaines dans l’exécution des politiques communautaires.

[...]

(10) L’expérience a montré qu’il est nécessaire d’adopter des mesures visant à garantir que des denrées alimentaires dangereuses ne soient pas mises sur le marché et qu’il existe des systèmes permettant d’identifier les problèmes de sécurité des denrées alimentaires et d’y faire face, dans le but d’assurer le bon fonctionnement du marché intérieur et de protéger la santé humaine. Il conviendrait d’aborder les mêmes questions en ce qui concerne la sécurité des aliments pour animaux. »

7 L’article 14, paragraphes 1, 2 et 5, de ce règlement est rédigé comme suit :

« 1.   Aucune denrée alimentaire n’est mise sur le marché si elle est dangereuse.

2.   Une denrée alimentaire est dite dangereuse si elle est considérée comme :

a) préjudiciable à la santé ;

b) impropre à la consommation humaine.

[...]

5.   Pour déterminer si une denrée alimentaire est impropre à la consommation humaine, il est tenu compte de la question de savoir si cette denrée alimentaire est inacceptable pour la consommation humaine compte tenu de l’utilisation prévue, pour des raisons de contamination, d’origine externe ou autre, ou par putréfaction, détérioration ou décomposition. »

Le règlement (CE) no 853/2004

8 L’article 5 du règlement (CE) no 853/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, fixant des règles spécifiques d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale (JO 2004, L 139, p. 55, et rectificatif JO 2004, L 226, p. 22), intitulé « Marquage de salubrité et d’identification », dispose, à son paragraphe 1 :

« Les exploitants du secteur alimentaire ne procèdent à la mise sur le marché d’aucun produit d’origine animale traité dans un établissement soumis à agrément conformément à l’article 4, paragraphe 2, s’il ne porte pas :

a) soit une marque de salubrité apposée conformément au règlement (CE) no 854/2004 ;

b) soit, lorsque ledit règlement ne prévoit pas qu’une marque de salubrité doit être apposée, une marque d’identification apposée conformément aux dispositions de l’annexe II, section I, du présent règlement. »

Le règlement no 854/2004

9 Le règlement no 854/2004 énonce, à ses considérants 1, 2, 4, 6 et 9 :

« (1) Le règlement (CE) no 852/2004 du Parlement européen et du Conseil, [du 29 avril 2004, relatif à l’hygiène des denrées alimentaires (JO 2004, L 139, p. 1),] fixe les règles générales d’hygiène applicables à toutes les denrées alimentaires et le règlement [no 853/2004] définit les règles spécifiques d’hygiène applicables aux produits d’origine animale.

(2) Des règles spécifiques pour les contrôles officiels concernant les produits d’origine animale sont nécessaires pour prendre en compte des aspects spécifiques associés à ce type de produits.

[...]

(4) Les contrôles officiels des produits d’origine animale devraient porter sur tous les aspects qui revêtent de l’importance pour la protection de la santé publique et, le cas échéant, pour la santé animale et le bien–être des animaux. [...]

[...]

(6) La nature et l’intensité des contrôles officiels devraient reposer sur une évaluation des risques pour la santé publique, la santé animale et le bien–être des animaux, le cas échéant, le type de traitement effectué et la quantité produite et l’exploitant du secteur alimentaire concerné.

[...]

(9) Il convient, eu égard aux compétences spécialisées dont ils disposent, que ce soient les vétérinaires officiels qui exécutent les tâches d’audit et d’inspection dans les abattoirs, les établissements de traitement du gibier et certains ateliers de découpe. Les États membres devraient pouvoir décider à qui il convient de confier les tâches d’audit et d’inspection dans les autres types d’établissements. »

10 L’article 1er, paragraphes 1, 1 bis et 3, du règlement no 854/2004 indique :

« 1.   Le présent règlement fixe les règles spécifiques d’organisation des contrôles officiels concernant les produits d’origine animale.

1 bis   Le présent règlement s’applique en complément du règlement [no 882/2004].

[...]

3   La réalisation de contrôles officiels au titre du présent règlement est sans préjudice de la responsabilité juridique primaire des exploitants du secteur alimentaire, qui est de veiller à la sécurité des denrées alimentaires, conformément au règlement [no 178/2002], et de la responsabilité civile ou pénale découlant du non-respect de leurs obligations. »

11 Aux termes de l’article 2, paragraphe 1, sous c), f), et g), du règlement no 854/2004 :

« 1.   Aux fins du présent règlement, on entend par :

c) “autorité compétente” : l’autorité centrale d’un État membre compétente pour effectuer des contrôles vétérinaires ou toute autorité à laquelle cette compétence a été déléguée ;

f) “vétérinaire officiel” : un vétérinaire habilité, en vertu du présent règlement, à agir en cette capacité et nommé par l’autorité compétente ;

g) “vétérinaire agrée” : un vétérinaire désigné par l’autorité compétente en vue d’exécuter pour le compte de cette dernière des contrôles officiels spécifiques sur les exploitations ».

12 L’article 4 de ce règlement prévoit :

« 1.   Les États membres veillent à ce que les exploitants du secteur alimentaire fournissent toute l’assistance requise pour garantir l’exécution efficace des contrôles officiels par l’autorité compétente.

Ils veillent notamment :

– à donner accès à tous bâtiments, locaux, installations ou autres infrastructures,

– à présenter tout document ou registre requis en vertu du présent règlement ou que l’autorité compétente juge nécessaire pour évaluer la situation.

2.   L’autorité compétente effectue des contrôles officiels afin de s’assurer que les exploitants du secteur alimentaire respectent les exigences prévues par :

a) le règlement (CE) no 852/2004 ;

b) le règlement (CE) no 853/2004,

et

c) le règlement (CE) no 1774/2002 [du Parlement européen et du Conseil, du 3 octobre 2002, établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à la consommation humaine (JO 2002, L 273, p. 1)].

3.   Les contrôles officiels visés au paragraphe 1 comprennent :

a) des audits concernant les bonnes pratiques d’hygiène et les procédures basées sur l’analyse des risques et la maîtrise des points critiques (HACCP) ;

b) les contrôles officiels définis aux articles 5 à 8,

et

c) toute tâche particulière d’audit définie aux annexes.

4.   Les audits concernant les bonnes pratiques d’hygiène visant à vérifier que les exploitants du secteur alimentaire appliquent d’une manière courante et correcte des procédures concernant au moins les points suivants :

a) les contrôles des informations relatives à la chaîne alimentaire ;

b) la conception et l’entretien des locaux et des équipements ;

c) l’hygiène préopérationnelle, opérationnelle et postopérationnelle ;

d) l’hygiène du personnel ;

e) la formation en matière d’hygiène et de procédures de travail ;

f) la lutte contre les nuisibles ;

g) la qualité de l’eau ;

h) le contrôle de la température,

et

i) les contrôles des denrées alimentaires entrant et sortant de l’établissement et de tout document qui les accompagne.

5.   Les audits concernant les procédures fondées sur le système HACCP visent à vérifier que les exploitants du secteur alimentaire appliquent ces procédures d’une manière permanente et correcte, en veillant tout particulièrement à faire en sorte que les procédures offrent les garanties définies à la section II de l’annexe II du règlement (CE) no 853/2004. Ils établissent notamment si les procédures garantissent, dans la mesure du possible, que les produits d’origine animale :

a) sont conformes aux critères microbiologiques fixés dans le cadre de la législation communautaire ;

b) sont conformes à la législation communautaire sur les résidus, les contaminants et les substances prohibées,

et

c) ne présentent pas de risques physiques tels que des corps étrangers.

Lorsque, conformément à l’article 5 du règlement (CE) no 852/2004, un exploitant du secteur alimentaire recourt aux procédures indiquées dans les guides pour l’application des principes du système HACCP plutôt que d’établir ses propres procédures spécifiques, le contrôle doit servir à vérifier que ces guides sont utilisés correctement.

6.   La vérification du respect des exigences du règlement (CE) no 853/2004 concernant l’application de marques d’identification s’effectue dans tous les établissements agréés conformément audit règlement, en plus du contrôle du respect d’autres exigences en matière de traçabilité.

7.   En ce qui concerne les abattoirs, les établissements de manipulation du gibier et les ateliers de découpe qui commercialisent de la viande fraîche, un vétérinaire officiel exécute les tâches d’audit visées aux paragraphes 3 et 4.

8.   Lors de l’exécution des tâches d’audit, l’autorité compétente veille tout particulièrement à :

a) déterminer si le personnel et ses activités dans l’établissement, à tous les stades du processus de production, respectent les exigences pertinentes des règlements visés au paragraphe 1, points a) et b). Pour compléter son contrôle, l’autorité compétente peut effectuer des contrôles d’aptitude afin de s’assurer que les compétences du personnel satisfont à des paramètres spécifiés ;

b) vérifier tous les enregistrements pertinents des exploitants du secteur alimentaire ;

c) prélever des échantillons pour des analyses en laboratoire, lorsque cela est nécessaire,

et

d) justifier les éléments pris en compte et les résultats de l’audit.

9.   La nature et l’intensité des tâches d’audit concernant chaque établissement sont fonction du risque estimé. À cette fin, l’autorité compétente évalue régulièrement :

a) les risques pour la santé publique et, le cas échéant, pour la santé animale ;

b) dans le cas des abattoirs, les aspects liés au bien-être des animaux ;

c) le type de traitement effectué et sa production,

et

d) les enregistrements antérieurs de l’exploitant du secteur alimentaire en ce qui concerne le respect de la législation relative aux denrées alimentaires. »

13 L’article 5 du règlement no 854/2004 est rédigé de la manière suivante :

« Les États membres veillent à ce que les contrôles officiels sur la viande fraîche soient effectués conformément à l’annexe I.

1) Le vétérinaire officiel exécute des tâches d’inspection dans les abattoirs, les établissements de traitement du gibier et les ateliers de découpe qui commercialisent de la viande fraîche, conformément aux exigences générales prévues à l’annexe I, chapitre II, section I, et aux exigences spécifiques de la section IV, notamment en ce qui concerne :

a) les informations sur la chaîne alimentaire ;

b) l’inspection ante mortem ;

c) le bien-être des animaux ;

d) l’inspection post mortem ;

e) les matériels à risques spécifiés et d’autres sous-produits animaux,

et

f) les tests en laboratoire.

2) Le marquage de salubrité des carcasses d’ongulés domestiques, de gibier d’élevage, mammifère, autre que les lagomorphes, et de gros gibier sauvage ainsi que les demi-carcasses, les quartiers et les découpes produites en découpant les demi-carcasses en trois gros morceaux s’effectue en abattoir et dans des établissements de traitement du gibier conformément à l’annexe I, chapitre III, section I. Les marques de salubrité sont apposées par le vétérinaire officiel ou sous sa responsabilité dès
lors que les contrôles officiels n’ont décelé aucune des irrégularités susceptibles de rendre la viande impropre à la consommation humaine.

3) Après avoir effectué les contrôles visés aux points 1) et 2), le vétérinaire officiel adopte les mesures appropriées énoncées à l’annexe I, section II, notamment en ce qui concerne :

a) la communication des résultats de l’inspection ;

b) les décisions concernant les informations relatives à la chaîne alimentaire ;

c) les décisions concernant les animaux vivants ;

d) les décisions concernant le bien-être des animaux ;

et

e) les décisions concernant la viande.

4) Les auxiliaires officiels peuvent assister le vétérinaire officiel dans l’exécution des contrôles officiels effectués conformément à l’annexe I, sections I et II, comme cela est spécifié à la section III, chapitre I. Dans ce cas, ils fonctionnent dans le cadre d’une équipe indépendante.

5) a) Les États membres veillent à disposer d’un nombre d’agents officiels suffisant pour effectuer les contrôles officiels exigés dans le cadre de l’annexe I avec la fréquence prévue à la section III, chapitre II.

b) Une démarche fondée sur les risques est suivie pour évaluer le nombre d’agents officiels dont la présence est nécessaire sur la chaîne d’abattage d’un abattoir donné. Ce nombre est fixé par l’autorité compétente et est suffisant pour permettre de satisfaire à toutes les exigences du présent règlement.

6) a) Les États membres peuvent autoriser le personnel des abattoirs à participer aux contrôles officiels en l’autorisant à accomplir, sous la direction du vétérinaire officiel, certaines tâches spécifiques liées à la production de viande de volaille et de lagomorphes, conformément à l’annexe I, section III, chapitre III, partie A. Dans ce cas, ils veillent à ce que le personnel exécutant ces tâches :

i) soit qualifié et suive une formation conformément à ces dispositions ;

ii) travaille indépendamment du personnel de production,

et

iii) notifie toute déficience au vétérinaire officiel.

b) Les États membres peuvent également autoriser le personnel des abattoirs à procéder à un échantillonnage spécifique et à des tests conformément à l’annexe I, section III, chapitre III, partie B.

7) Les États membres veillent à ce que les vétérinaires officiels et les auxiliaires officiels soient qualifiés et suivent une formation conformément à l’annexe I, section III, chapitre IV. »

14 À la section I de l’annexe I de ce règlement, le chapitre III, intitulé « Le marquage de salubrité », dispose, à ses points 1 et 2 :

« 1. Le vétérinaire officiel doit contrôler le marquage de salubrité et les marques utilisées.

2. Le vétérinaire officiel doit notamment veiller à ce que :

a) la marque de salubrité ne soit apposée que sur des animaux [...] ayant été soumis à une inspection ante mortem et post mortem conformément au présent règlement et lorsqu’il n’existe aucun motif de déclarer la viande impropre à la consommation humaine. [...]

[...] »

15 À la section III de l’annexe I du règlement no 854/2004, le chapitre IV, intitulé « Qualifications professionnelles », dispose, à son point A :

« Vétérinaire officiels

1. Seuls les vétérinaires ayant réussi un test répondant aux exigences du point 2 peuvent être nommés vétérinaires officiels.

2. L’autorité compétente doit prendre les dispositions nécessaires pour organiser le test. Celui–ci doit permettre de confirmer les connaissances des candidats sur les sujets suivants dans la mesure nécessaire en fonction du profil et des qualifications du vétérinaire :

a) la législation nationale et communautaire relative à la santé publique vétérinaire, à la sécurité des denrées alimentaires, à la santé animale, au bien-être des animaux et aux substances pharmaceutiques ;

b) les principes de la politique agricole commune, les mesures de soutien des marchés, les restitutions à l’exportation et la détection des fraudes [...]

c) les connaissances de base en matière de transformation des denrées alimentaires et de technologie alimentaire ;

d) les principes, concepts et méthodes des bonnes pratiques de fabrication et de gestion de la qualité ;

[...]

g) les principes, concepts et méthodes de l’analyse des risques ;

h) les principes, concepts et méthodes du système HACCP et l’utilisation de ce système tout au long de la chaîne de production alimentaire ;

i) la prévention et le contrôle des risques d’origine alimentaire pour la santé humaine ;

[...]

o) les technologies de l’information et de la communication liées aux mesures vétérinaires en rapport avec la santé publique ;

[...]

u) le principe de précaution et les préoccupations des consommateurs ;

v) les principes de la formation du personnel intervenant dans la chaîne de production.

[...]

[...]

5. Le vétérinaire officiel doit actualiser ses connaissances et se tenir au courant des nouvelles évolutions par des actions régulières de formation continue et par la lecture d’ouvrages spécialisés. Lorsque cela est possible, le vétérinaire officiel doit participer à des actions annuelles de formation continue.

6. Les vétérinaires déjà nommés au poste de vétérinaire officiel doivent avoir une connaissance suffisante des questions visées au point 2. Si nécessaire, ils devront acquérir ces connaissances dans le cadre de la formation continue. L’autorité compétente doit prendre à cet égard les dispositions appropriées.

[...] »

Le règlement no 882/2004

16 Le règlement no 882/2004 énonce, à ses considérants 1, 41 et 43 :

« (1) Les aliments pour animaux et les denrées alimentaires devraient être sûrs et sains. La législation communautaire comprend un ensemble de règles visant à faire en sorte que cet objectif soit atteint. Ces règles s’appliquent également à la production et à la mise sur le marché des aliments pour animaux et des denrées alimentaires.

[...]

(41) Les infractions à la législation relative aux aliments pour animaux et aux denrées alimentaires et aux dispositions relatives à la santé animale et au bien–être des animaux peuvent constituer une menace pour la santé humaine, la santé animale et le bien–être des animaux. [...]

[...]

(43) Les exploitants devraient avoir un droit de recours contre les décisions prises par l’autorité compétente à la suite des contrôles officiels, et être informés de ce droit. »

17 Aux termes de l’article 1er de ce règlement :

« 1.   Le présent règlement établit des règles générales applicables à la réalisation des contrôles officiels destinés à vérifier le respect des règles visant notamment :

a) à prévenir ou éliminer les risques qui pourraient survenir, soit directement, soit à travers l’environnement, pour les êtres humains et les animaux, ou à réduire ces risques à un niveau acceptable,

et

b) à garantir des pratiques loyales en ce qui concerne le commerce des aliments pour animaux et des denrées alimentaires et la protection des intérêts des consommateurs, y compris l’étiquetage des aliments pour animaux et des denrées alimentaires et toute autre forme d’information destinée aux consommateurs.

2.   Le présent règlement ne s’applique pas aux contrôles officiels visant à vérifier le respect des règles relatives aux organisations communes de marché des produits agricoles.

3.   Le présent règlement n’affecte pas les dispositions communautaires spécifiques relatives aux contrôles officiels.

4.   La réalisation de contrôles officiels au titre du présent règlement est sans préjudice de la responsabilité juridique primaire de l’exploitant du secteur de l’alimentation animale et du secteur alimentaire, qui est de veiller à la sécurité des aliments pour animaux et des denrées alimentaires, conformément au règlement (CE) no 178/2002, et de la responsabilité civile ou pénale découlant du non-respect de ses obligations. »

18 L’article 2 du règlement no 882/2004 dispose :

« Aux fins du présent règlement, les définitions figurant aux articles 2 et 3 du règlement (CE) no 178/2002 s’appliquent.

En outre, on entend par :

1) “contrôle officiel” : toute forme de contrôle effectué par l’autorité compétente ou par la Communauté pour vérifier le respect de la législation relative aux aliments pour animaux et aux denrées alimentaires ainsi que des dispositions concernant la santé animale et le bien-être des animaux ;

[...]

4) “autorité compétente” : l’autorité centrale d’un État membre compétente pour organiser les contrôles officiels ou toute autre autorité à laquelle ladite compétence a été attribuée. Cette définition inclut, le cas échéant, l’autorité correspondante d’un pays tiers ;

5) “organisme de contrôle” : tiers indépendant auquel l’autorité compétente a délégué certaines tâches de contrôle ;

[...]

10) “manquement à la législation” : le manquement à la législation relative aux aliments pour animaux ou aux denrées alimentaires, et aux dispositions relatives à la protection de la santé et du bien-être animaux ;

[...] »

19 L’article 4, paragraphe 1, du règlement no 882/2004 prévoit :

« Les États membres désignent les autorités compétentes auxquelles incombe la responsabilité des objectifs et contrôles officiels prévus par le présent règlement. »

20 Aux termes de l’article 5, paragraphe 1, de ce règlement :

« L’autorité compétente peut déléguer des tâches spécifiques liées aux contrôles officiels à un ou plusieurs organismes de contrôle, conformément aux paragraphes 2 à 4.

[...] »

21 L’article 54 du règlement no 882/2004, intitulé « Mesures en cas de manquement », indique :

« 1.   Lorsque l’autorité compétente relève un manquement, elle prend les mesures nécessaires pour que l’exploitant remédie à cette situation. Lorsqu’elle détermine les mesures à prendre, l’autorité compétente tient compte de la nature du manquement et des antécédents de cet exploitant en matière de manquements.

2.   Ces mesures comprennent, le cas échéant, les dispositions suivantes :

a) imposer des procédures sanitaires ou toute autre mesure jugée nécessaire pour garantir la sécurité des aliments pour animaux ou des denrées alimentaires ou le respect de la législation relative à ces produits et des dispositions relatives à la santé animale et au bien-être des animaux ;

b) restreindre ou interdire la mise sur le marché, l’importation ou l’exportation d’aliments pour animaux, de denrées alimentaires ou d’animaux ;

c) superviser et, si cela est nécessaire, ordonner le rappel, le retrait et/ou la destruction d’aliments pour animaux ou de denrées alimentaires ;

d) autoriser l’utilisation d’aliments pour animaux ou de denrées alimentaires à des fins autres que celles qui étaient initialement prévues ;

e) suspendre les activités ou fermer tout ou partie de l’entreprise concernée pour une durée appropriée ;

f) suspendre ou retirer l’agrément de l’établissement ;

g) prendre les dispositions relatives aux lots provenant de pays tiers visées à l’article 19 ;

h) prendre toute autre mesure jugée appropriée par l’autorité compétente.

3.   L’autorité compétente transmet à l’exploitant concerné ou à son représentant :

a) une notification écrite de sa décision concernant les mesures à prendre en vertu du paragraphe 1, ainsi que la motivation de sa décision,

et

b) des informations sur ses droits de recours contre de telles décisions, ainsi que sur la procédure et les délais applicables.

4.   Le cas échéant, l’autorité compétente informe également de sa décision l’autorité compétente de l’État membre d’expédition.

5.   Toutes les dépenses exposées en application du présent article sont à la charge de l’exploitant du secteur de l’alimentation animale ou du secteur alimentaire responsable. »

Le droit du Royaume-Uni

22 Aux termes de l’article 8, paragraphe 2, du Food Safety Act 1990 (loi sur la sécurité des aliments de 1990, ci–après la « loi de 1990 »), une denrée alimentaire ne satisfait pas aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires si elle est dangereuse au sens de l’article 14 du règlement no 178/2002.

23 L’article 9 de la loi de 1990, intitulé « Inspection et saisie de denrées alimentaires suspectes », prévoit la procédure à suivre dans le cas où un agent habilité d’une autorité de contrôle telle que l’agence des normes alimentaires estime, après une inspection, que les denrées alimentaires destinées à la consommation humaine ne sont pas conformes aux exigences de sécurité alimentaire.

24 L’article 9, paragraphes 3 et 4, de cette loi prévoit :

« 3)   L’agent habilité peut soit :

a) délivrer à la personne responsable des denrées alimentaires un avis l’informant que, jusqu’au retrait dudit avis, ces denrées ou une partie déterminée de celles-ci :

i) ne peuvent pas être utilisées pour la consommation humaine ;

et

ii) soit ne doivent pas être enlevées, soit ne doivent pas être enlevées, sauf à destination d’un lieu précisé dans l’avis ; ou

b) saisir les denrées alimentaires en question et les enlever en vue d’en référer à un juge de paix.

Toute personne qui contrevient sciemment aux exigences d’un avis visé au point a) ci-dessus se rend coupable d’une infraction.

4)   Dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont attribués par le paragraphe 3, point a), ci-dessus, l’agent habilité vérifie, dans les meilleurs délais possibles et en tout état de cause dans les 21 jours, si les denrées alimentaires en cause satisfont ou non aux exigences en matière de sécurité alimentaire, et :

a) si les denrées alimentaires sont jugées conformes, il retire l’avis,

b) si les denrées alimentaires ne sont pas jugées conformes, il les saisit et les enlève en vue de saisir un juge de paix. »

25 Aux termes de l’article 9, paragraphes 6 et 7, de ladite loi :

« 6)   S’il apparaît au juge de paix, sur la base des éléments de preuve qu’il juge appropriés dans les circonstances de l’espèce, que les denrées alimentaires qu’il doit connaître au titre du présent article ne répondent pas aux exigences de sécurité alimentaire, il doit déclarer lesdites denrées alimentaires impropres à la consommation et ordonner :

a) leur destruction ou leur élimination de manière à empêcher leur utilisation pour la consommation humaine ; et

b) que les frais raisonnablement engagés aux fins de la destruction ou de l’élimination soient supportés par le propriétaire des denrées alimentaires.

7)   Si un avis délivré au titre du paragraphe 3, point a), ci–dessus est retiré ou que le juge de paix qui est amené à en connaître au titre du présent article refuse de déclarer les denrées alimentaires en cause impropres à la consommation, l’autorité de sécurité alimentaire indemnise le propriétaire des denrées alimentaires pour toute dépréciation de leur valeur résultant de la mesure prise par l’agent habilité. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

26 Le 11 septembre 2014, CMC a acheté un taureau vivant pour la somme de 1361,20 livres sterling (GBP) (environ 1700 euros). Le vétérinaire officiel affecté à l’abattoir de CMC l’a déclaré propre à être abattu et lui a attribué un numéro d’abattage. Après que le taureau a été abattu, un inspecteur de l’hygiène des viandes a procédé à une inspection post mortem tant de la carcasse que des abats et a constaté la présence de trois abcès dans les abats. Les abats ont été rejetés. Le même jour, le
vétérinaire officiel a procédé à l’inspection de la carcasse en cause et, après discussion avec l’inspecteur de l’hygiène des viandes, il a déclaré la viande impropre à la consommation humaine, parce qu’une pyohémie, une forme de septicémie, était suspectée. De ce fait, cette carcasse ne s’est pas vu apposer une marque de salubrité, certifiant qu’elle était propre à la consommation humaine. Par conséquent, il était interdit à CMC de vendre ladite carcasse en vertu de la disposition
réglementaire 19 des Food Safety and Hygiene (England) Regulations 2013 [règlements de 2013 sur la sécurité et l’hygiène des denrées alimentaires (Angleterre)].

27 CMC a demandé l’avis d’un autre vétérinaire et contesté l’avis du vétérinaire officiel. Elle fait valoir que, eu égard à sa contestation et à son refus de remettre la carcasse en cause volontairement, le vétérinaire officiel aurait dû procéder à la saisie de celle–ci et porter l’affaire devant un juge de paix, conformément à l’article 9 de la loi de 1990, pour qu’il soit statué sur la question de savoir si cette carcasse devait ou non être déclarée impropre à la consommation humaine. L’agence des
normes alimentaires, l’autorité compétente dans le domaine de la sécurité des aliments qui est responsable des contrôles officiels dans les abattoirs, a considéré qu’il n’était pas nécessaire de recourir à une telle procédure et que ladite carcasse, ayant été déclarée impropre à la consommation humaine par le vétérinaire officiel, devait être éliminée en tant que sous–produit animal.

28 Par la suite, le 23 septembre 2014, le vétérinaire officiel, agissant pour le compte de l’agence des normes alimentaires, a notifié à CMC un avis l’enjoignant d’éliminer la carcasse en cause en tant que sous–produit animal conformément à la disposition réglementaire 25, paragraphe 2, sous a), des Animal By–Products (Enforcement) (England) Regulations 2013 [règlement de 2013 sur les sous–produits animaux (mise en œuvre) (Angleterre)] et du règlement (CE) no 1069/2009 du Parlement européen et du
Conseil, du 21 octobre 2009, établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux et produits dérivés non destinés à la consommation humaine et abrogeant le règlement (CE) no 1774/2002 (règlement relatif aux sous-produits animaux) (JO 2009, L 300, p. 1). Cet avis informait CMC que l’inobservation de celui-ci pouvait donner lieu à ce qu’il soit procédé à l’élimination de ladite carcasse, par la personne habilitée aux frais de CMC, et que le fait d’entraver une personne habilitée
dans l’exécution des obligations imposées par ledit avis constituait une infraction. Ce même avis précisait également que CMC disposait d’un droit de recours contre la décision du vétérinaire officiel par la voie du contrôle juridictionnel et qu’un tel recours devait être introduit dans les trois mois.

29 Les requérantes au principal ont saisi la High Court of Justice (England & Wales), Queen’s Bench Division [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), division du Queen’s Bench, Royaume-Uni], d’une demande de contrôle juridictionnel, afin de contester, à titre principal, le bien–fondé de l’affirmation de l’agence des normes alimentaires selon laquelle cette dernière n’était pas tenue de recourir à la procédure prévue à l’article 9 de la loi de 1990 et, à titre subsidiaire, de faire
valoir qu’il incombe au Royaume-Uni de prévoir des voies de recours contre une décision du vétérinaire officiel concernant le caractère propre ou non à la consommation humaine d’une viande. Leur requête a été rejetée tant devant cette juridiction que devant la Court of Appeal (England & Wales) (Civil division) [Cour d’appel (Angleterre et pays de Galles) (division civile), Royaume-Uni]. Par conséquent, elles ont formé un recours devant la Supreme Court of the United Kingdom (Cour suprême du
Royaume-Uni).

30 La juridiction de renvoi expose que l’affaire dont elle est saisie soulève trois problématiques.

31 La première se rapporte à une question de droit interne, à savoir si la procédure prévue à l’article 9 de la loi 1990 est applicable dans les présentes circonstances et doit être mise en œuvre par le vétérinaire officiel ou l’agence des normes alimentaires lorsque le propriétaire de la carcasse, à savoir l’exploitant d’abattoir concerné, refuse de remettre celle–ci volontairement, de manière à aménager à cet exploitant la possibilité de contester les décisions du vétérinaire officiel avec
lesquelles il n’est pas d’accord. La deuxième problématique est celle de savoir si l’utilisation de la procédure prévue à cet article est compatible avec le régime mis en place par les règlements no 854/2004 et no 882/2004 en droit de l’Union dans le domaine de la sécurité alimentaire. La troisième problématique porte sur le point de savoir si le règlement no 882/2004 exige l’instauration d’une procédure de recours et, dans l’affirmative, si un tel recours doit permettre la contestation de la
décision du vétérinaire officiel sur le fond dans son ensemble, ou si la portée plus limitée de la contestation qu’implique le contrôle juridictionnel d’une telle décision suffit pour satisfaire aux exigences de ce règlement.

32 La juridiction de renvoi indique, notamment, que la procédure prévue à l’article 9 de la loi de 1990 n’est pas élaborée dans l’optique d’un recours contre la décision du vétérinaire officiel concernant le caractère propre ou non à la consommation humaine d’une viande. En effet, cette procédure permet à un agent habilité d’une autorité de contrôle, telle l’agence des normes alimentaires, s’il considère qu’une denrée alimentaire destinée à la consommation humaine ne satisfait pas aux prescriptions
relatives à la sécurité des denrées alimentaires, de saisir cette denrée alimentaire afin qu’un juge de paix du ressort territorial se prononce, ce dernier pouvant être soit un juge non juriste, soit un juge de district juriste de formation accessible à toute heure sans difficulté. Le juge de paix peut juger, sur la base d’éléments de preuve qu’il considère appropriés, que la carcasse en cause ne satisfait pas aux prescriptions relatives à la consommation humaine et ordonner sa destruction aux
frais du propriétaire. Par ailleurs, ce juge peut également refuser de la déclarer impropre à la consommation humaine, l’autorité de contrôle concernée devant alors indemniser le propriétaire de toute dépréciation de cette carcasse due à l’action de cet agent.

33 Dans ce contexte, la juridiction de renvoi souligne que, selon les requérantes au principal, la procédure établie à l’article 9 de la loi de 1990 prévoit la possibilité, à la fois pour le vétérinaire officiel ou l’agence des normes alimentaires, de prendre des mesures d’exécution découlant de la décision du vétérinaire officiel déclarant une carcasse impropre à la consommation humaine et, pour l’exploitant d’abattoir concerné, de soumettre cette décision à un examen judiciaire ainsi que de
demander au juge de paix de décider si la carcasse en cause satisfaisait ou non aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires.

34 Les requérantes au principal admettent que le juge de paix ne peut pas ordonner au vétérinaire officiel d’apposer une marque de salubrité, mais elles soutiennent que, d’une part, le vétérinaire officiel devrait s’incliner devant la décision du juge de paix et, en conséquence, apposer une marque de salubrité et que, d’autre part, une indemnisation peut être accordée. Par ailleurs, les requérantes au principal allèguent également une atteinte au droit de propriété garanti par l’article 17 de la
charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci–après la « Charte »), qui impose, selon elles, de prévoir un mécanisme d’examen judiciaire de la décision du vétérinaire officiel déclarant une carcasse impropre à la consommation humaine. À cet égard, elles estiment que cette disposition serait violée si, sans justification ou indemnité adéquates, l’exploitant concerné devait être privé de la propriété de la carcasse en cause ou était tenu de disposer de celle-ci de manière à lui ôter
toute valeur.

35 L’agence des normes alimentaires, en revanche, considère que la procédure prévue à l’article 9 de la loi de 1990 ne permet pas de résoudre un litige portant sur la question de savoir si une carcasse est ou non propre à la consommation humaine, car le juge de paix ne dispose pas du pouvoir d’ordonner au vétérinaire officiel d’apposer une marque de salubrité ni d’un pouvoir autre que celui de déclarer une carcasse qui ne porterait pas cette marque comme étant impropre à la consommation humaine.
L’agence des normes alimentaires estime que la carcasse en cause au principal doit donc être, dans tous les cas, éliminée comme sous-produit animal. Quant à la prétendue violation de l’article 17 de la Charte, l’agence des normes alimentaires fait valoir qu’il ressort de la jurisprudence de la Cour que cet article autorise le contrôle de l’usage des biens lorsqu’il s’agit d’un moyen proportionné pour atteindre un objectif légitime (arrêt du 10 juillet 2003, Booker Aquaculture et Hydro Seafood,
C‑20/00 et C‑64/00, EU:C:2003:397). Or, elle considère que l’objectif qui consiste à assurer, en ce qui concerne les denrées alimentaires, un niveau élevé de protection de la santé humaine et des intérêts des consommateurs est légitime et le moyen choisi est proportionné.

36 La juridiction de renvoi demande à la Cour de supposer que l’interprétation de l’article 9 de la loi de 1990 préconisée par les requérantes au principal est exacte et qu’un juge de paix est compétent pour rendre une décision pouvant entraîner l’octroi d’une indemnité si ce juge considère qu’une marque de salubrité aurait dû être apposée sur une carcasse.

37 La juridiction de renvoi observe, par ailleurs, que, bien que cela n’ait pas été mentionné par l’agence des normes alimentaires dans son argumentation, un exploitant d’abattoir a le droit d’introduire une procédure de contrôle juridictionnel devant la High Court of Justice (England & Wales) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles), Royaume-Uni] soit pour contester une décision prise par le vétérinaire officiel déclarant une carcasse impropre à la consommation humaine, soit pour faire
annuler un avis d’élimination tel que celui mentionné au point 28 du présent arrêt. Dans le cadre de cette procédure, la juridiction saisie de la demande peut annuler une telle décision pour toute cause d’illégalité, y compris dans le cas où le vétérinaire officiel a agi dans un but autre que celui pour lequel ses pouvoirs lui ont été conférés, le cas où il n’a pas appliqué le critère juridique adéquat ou le cas où sa décision est sans fondement ou non étayée par des éléments de preuve
suffisants. De plus, ladite juridiction recourt occasionnellement à une procédure orale, elle peut ordonner des mesures obligatoires et elle dispose du pouvoir d’accorder des dommages et intérêts pour violation des droits découlant de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci–après la « CEDH »).

38 Toutefois, la juridiction de renvoi précise que la procédure de contrôle juridictionnel ne constitue pas un recours sur le fond contre la décision du vétérinaire officiel déclarant une carcasse impropre à la consommation humaine.

39 Dans ces conditions, la Supreme Court of the United Kingdom (Cour suprême du Royaume–Uni) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1) Le règlement no 854/2004 et le règlement no 882/2004 s’opposent–ils à une procédure par laquelle, en vertu de l’article 9 de la loi de 1990, un juge de paix décide sur le fond et sur la base des avis techniques d’experts commis par chacune des parties si une carcasse ne satisfait pas aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires ?

2) Le règlement no 882/2004 exige–t–il l’instauration d’un droit de recours contre une décision du vétérinaire officiel, prise en application de l’article 5, point 2, du règlement no 854/2004, déclarant la viande d’une carcasse impropre à la consommation humaine et, dans l’affirmative, quelle approche doit être adoptée lors de l’examen du bien–fondé de la décision prise par le vétérinaire officiel dans le cadre d’un recours dans un tel cas ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la compétence de la Cour

40 À titre liminaire, il y a lieu de constater qu’il résulte de l’article 86, paragraphe 2, de l’accord de retrait, lequel est entré en vigueur le 1er février 2020, que la Cour demeure compétente pour statuer à titre préjudiciel sur les demandes des juridictions du Royaume-Uni présentées avant la fin de la période de transition fixée au 31 décembre 2020, ce qui est le cas de la présente demande de décision préjudicielle.

Sur la première question

41 Ainsi qu’il ressort des points 33 et 36 du présent arrêt, la juridiction de renvoi demande à la Cour de partir de la prémisse que l’interprétation de l’article 9 de la loi de 1990 préconisée par les requérantes au principal est exacte et que, dès lors, en vertu de cette disposition, dans une situation telle que celle en cause au principal où le vétérinaire officiel a refusé d’apposer sur une carcasse une marque de salubrité et le propriétaire de la carcasse en cause est en désaccord avec ce
refus, le vétérinaire officiel est tenu de saisir le juge de paix compétent afin que celui–ci se prononce sur la destruction de la carcasse en cause, de manière à aménager au propriétaire de celle–ci la possibilité de contester la décision du vétérinaire officiel.

42 Dans ces conditions, il convient de considérer que, par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les règlements no 854/2004 et no 882/2004 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle, lorsqu’un vétérinaire officiel refuse d’apposer sur une carcasse une marque de salubrité et que le propriétaire de cette carcasse n’est pas d’accord avec cette décision, le vétérinaire officiel doit saisir un juge pour que
celui–ci décide sur le fond et sur la base des avis techniques d’experts commis par chacune des parties si ladite carcasse satisfait ou non aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires, sans pouvoir formellement annuler les décisions du vétérinaire officiel ni ordonner la levée des effets de ces décisions.

43 En vue d’interpréter les dispositions des règlements no 854/2004 et no 882/2004, il y a lieu de relever que ces règlements font partie du « paquet “hygiène des denrées alimentaires” » du droit de l’Union, ainsi que l’indique la juridiction de renvoi et ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 42 de ses conclusions.

44 Or, l’objectif poursuivi par lesdits règlements est, conformément aux considérants 4 et 6 du règlement no 854/2004 et aux considérants 1 et 41 du règlement no 882/2004, d’atteindre, en ce qui concerne les denrées alimentaires, un niveau élevé de protection de la santé publique. Afin d’atteindre un tel niveau, ces règlements imposent aux États membres de réaliser des contrôles officiels destinés à vérifier que la législation relative aux denrées alimentaires soit respectée par les exploitants du
secteur alimentaire à tous les stades du processus de production (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2019, Pollo del Campo e.a., C‑199/18, C‑200/18 et C‑343/18, EU:C:2019:718, point 33).

45 Dans ce contexte, l’autorité compétente en vertu de l’article 2, paragraphe 1, sous c), du règlement no 854/2004, à savoir l’autorité centrale d’un État membre compétente pour effectuer des contrôles vétérinaires ou toute autorité à laquelle cette compétence a été déléguée, en l’occurrence l’agence des normes alimentaires, nomme, conformément à l’article 2, paragraphe 1, sous f), de ce règlement, le vétérinaire officiel satisfaisant aux exigences concernant les qualifications professionnelles
prévues à la section III, chapitre IV, point A, de l’annexe I dudit règlement en tant que vétérinaire habilité à agir en cette capacité.

46 À cet égard, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé aux points 44 à 46 de ses conclusions, il ressort du règlement no 854/2004 et de ses annexes, que dans le cadre des contrôles officiels des produits d’origine animale destinés à la consommation humaine, le législateur de l’Union a confié au vétérinaire officiel la responsabilité de veiller à ce que la viande mise sur le marché soit propre à la consommation humaine et lui a conféré, conformément à la section I de l’annexe I de ce règlement,
intitulée « Tâches du vétérinaire officiel », plusieurs tâches dans l’exercice de ce rôle. Partant, le vétérinaire officiel peut être raisonnablement considéré comme étant la personne la mieux qualifiée pour effectuer des contrôles dans les États membres (voir, par analogie, arrêt du 15 avril 1997, Bakers of Nailsea, C‑27/95, EU:C:1997:188, point 35).

47 En outre, étant donné que le domaine de la sécurité des denrées alimentaires se caractérise par une complexité présentant un niveau élevé de spécialisation, le vétérinaire officiel dispose dans le cadre de ces contrôles d’un pouvoir d’appréciation important qui est cependant encadré par les exigences définies dans les règlements dans ce domaine (voir, en ce sens, arrêt du 12 septembre 2019, A e.a., C‑347/17, EU:C:2019:720, point 69).

48 Or, le rôle important qu’occupe, conformément au règlement no 854/2004, le vétérinaire officiel en tant qu’autorité administrative et en tant qu’expert qualifié, spécialisé et responsable final en matière de sécurité des denrées alimentaires ne peut être concilié avec une réglementation nationale, telle que celle visée par la première question, selon laquelle si le vétérinaire officiel considère qu’il doit refuser d’apposer sur une carcasse une marque de salubrité et que le propriétaire de cette
carcasse conteste cette conclusion, le vétérinaire officiel doit obligatoirement saisir un juge pour que celui–ci décide si ladite carcasse satisfait ou non aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires.

49 En effet, une telle réglementation conduit au remplacement du vétérinaire officiel, en tant que responsable final en matière de sécurité des denrées alimentaires, par un juge statuant sur le fond de l’affaire.

50 Dans la mesure où, dans le cadre du litige au principal, il est allégué que pareille réglementation nationale permet d’aménager au propriétaire d’une carcasse sur laquelle le vétérinaire officiel a refusé d’apposer une marque de salubrité la possibilité de contester cette décision du vétérinaire officiel, il convient néanmoins de déterminer si les règlements no 854/2004 et no 882/2004 imposent à l’État membre concerné de prévoir une voie de recours contre une telle décision.

51 Il convient de relever que le règlement no 854/2004, portant, en vertu de son article 1er, sur les règles spécifiques d’organisation des contrôles officiels concernant les produits d’origine animale, ne contient aucune règle relative à des droits de recours contre les décisions du vétérinaire officiel. En revanche, le règlement no 882/2004, établissant des règles générales applicables à la réalisation des contrôles officiels dans ce domaine, prévoit expressément, à son article 54, paragraphe 3,
en cas de manquement de l’exploitant concerné, l’existence de droits de recours de ce dernier contre des décisions visant à remédier à ce manquement.

52 Ainsi qu’il ressort de l’article 1er, paragraphe 1 bis, du règlement no 854/2004, celui–ci s’applique en complément du règlement no 882/2004 qui, aux termes de son article 1er, paragraphe 3, n’affecte pas les dispositions spécifiques du droit de l’Union relatives aux contrôles officiels. En l’absence de dispositions spécifiques dans le règlement no 854/2004 concernant les droits de recours contre les décisions du vétérinaire officiel, il y a lieu, partant, de se référer aux dispositions générales
contenues dans le règlement no 882/2004.

53 À cet égard, il convient d’examiner si l’article 54 du règlement no 882/2004, en particulier son paragraphe 3, est applicable aux décisions du vétérinaire officiel prises dans le cadre des contrôles officiels qu’il effectue, plus particulièrement aux décisions de ne pas apposer de marquage de salubrité sur une denrée alimentaire prises au titre de l’article 5, point 2, du règlement no 854/2004.

54 En vertu de l’article 54, paragraphe 3, du règlement no 882/2004, l’autorité compétente doit transmettre à l’exploitant concerné une notification écrite de sa décision concernant les mesures à prendre conformément au paragraphe 1 de cet article, la motivation de cette décision et des informations sur les droits de recours de cet exploitant contre une telle décision ainsi que sur la procédure et les délais applicables. Cette disposition doit être lue à la lumière du considérant 43 de ce règlement,
qui indique que « [l]es exploitants devraient avoir un droit de recours contre les décisions prises par l’autorité compétente à la suite des contrôles officiels, et être informés de ce droit ».

55 Conformément à son paragraphe 1, l’article 54 du règlement no 882/2004 vise les mesures que l’autorité compétente doit prendre pour que, lorsqu’elle relève un manquement, l’exploitant remédie à cette situation. Dans ces conditions, il convient de déterminer si la décision du vétérinaire officiel de ne pas apposer de marquage de salubrité sur une denrée alimentaire est susceptible de relever de la notion de « manquement », au sens de l’article 54 du règlement no 882/2004.

56 Il importe de souligner que la notion de « manquement à la législation » est définie de manière large à l’article 2, point 10, du règlement no 882/2004 et vise tout manquement à la législation relative aux aliments pour animaux ou aux denrées alimentaires ainsi qu’aux dispositions relatives à la protection de la santé et du bien-être des animaux.

57 En outre, l’article 54, paragraphe 2, sous b), de ce règlement prévoit, parmi les mesures nécessaires pour que l’exploitant remédie à un manquement relevé par l’autorité compétente, les mesures qui restreignent ou interdisent la mise sur le marché de denrées alimentaires. Or, conformément à l’article 14, paragraphe 1, du règlement no 178/2002, aucune denrée alimentaire n’est mise sur le marché si elle est considérée comme impropre à la consommation humaine.

58 Il s’ensuit que la décision du vétérinaire officiel, prise au titre de l’article 5, point 2, du règlement no 854/2004, lu conjointement avec les dispositions mentionnées aux points 56 et 57 du présent arrêt, de ne pas apposer une marque de salubrité sur une denrée alimentaire, au motif qu’une irrégularité susceptible de rendre la viande impropre à la consommation humaine a été décelée lors du contrôle officiel, a précisément pour effet d’empêcher qu’une carcasse impropre à la consommation humaine
ne soit mise sur le marché.

59 Par conséquent, l’article 54, paragraphe 3, du règlement no 882/2004 est applicable à la décision du vétérinaire officiel de ne pas apposer de marquage de salubrité sur une denrée alimentaire prise au titre de l’article 5, point 2, du règlement no 854/2004 et impose aux États membres de prévoir une voie de recours par laquelle l’exploitant d’abattoir concerné peut contester une telle décision.

60 Il convient, dès lors, d’examiner si une procédure telle que celle visée par la première question garantit à l’exploitant concerné une protection juridictionnelle effective au sens des règlements no 854/2004 et no 882/2004.

61 Il ressort de la jurisprudence de la Cour que la possibilité, pour un justiciable donné, d’agir en justice aux fins de faire constater la violation des droits qui lui sont garantis par le droit de l’Union et d’obtenir la réparation du préjudice que lui a causé cette violation assure une protection juridictionnelle effective à ce justiciable, dès lors que le tribunal saisi du litige dispose de la possibilité de contrôler l’acte ou la mesure qui est à l’origine de ladite violation et dudit
préjudice [arrêt du 6 octobre 2020, État luxembourgeois (Droit de recours contre une demande d’information en matière fiscale), C‑245/19 et C‑246/19, EU:C:2020:795, point 101].

62 Ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, la procédure prévue à l’article 9 de la loi de 1990 n’est pas élaborée dans l’optique d’un recours contre une décision du vétérinaire officiel au sens des règlements no 854/2004 et no 882/2004. S’il semble au juge saisi, sur la base d’éléments de preuve qu’il considère appropriés, que la denrée alimentaire en cause ne satisfait pas aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires, il la déclare impropre à la consommation humaine et
ordonne sa destruction aux frais du propriétaire. Par ailleurs, le juge saisi peut également refuser de déclarer la denrée alimentaire en cause impropre à la consommation humaine, l’autorité de contrôle devant alors indemniser le propriétaire de toute dépréciation due à l’action de l’agent en cause. La juridiction de renvoi fait état des allégations des requérantes au principal, selon lesquelles, dans cette dernière hypothèse, le vétérinaire officiel devrait s’incliner devant cette décision du
juge et, en conséquence, apposer une marque de salubrité sur la carcasse concernée.

63 À cet égard, il y a lieu de relever, premièrement, à l’instar de M. l’avocat général au point 88 de ses conclusions, que ladite procédure ne permet pas à l’exploitant concerné dont les droits et les intérêts sont directement affectés par une décision du vétérinaire officiel de saisir le juge compétent de sa propre initiative.

64 Deuxièmement, il convient de relever que, dans le cadre d’une telle procédure, le juge n’est pas en mesure d’imposer au vétérinaire officiel sa propre décision concernant les appréciations de fait sur lesquelles la décision du vétérinaire officiel contestée est fondée.

65 En effet, bien que ce juge semble pouvoir établir les faits quant à la question de savoir si la denrée alimentaire concernée satisfait ou non aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires sur la base d’éléments de preuve qu’il considère appropriés et qu’il puisse, à cet égard, tenir compte également de l’avis d’un autre vétérinaire qu’il a engagé à examiner la carcasse en cause, il n’est cependant pas autorisé à annuler la décision du vétérinaire officiel déclarant cette
carcasse impropre à la consommation humaine et enjoignant l’élimination de ladite carcasse en tant que sous-produit animal.

66 Par conséquent, la procédure concernée par la première question ne vise à obtenir ni l’annulation de la décision du vétérinaire officiel déclarant la carcasse en cause impropre à la consommation humaine ni la levée des effets de cette décision et, dès lors, n’aboutit pas à une décision juridictionnelle dotée d’un effet juridiquement contraignant à l’égard de l’autorité administrative concernée.

67 En ce qui concerne les allégations des requérantes au principal selon lesquelles le vétérinaire officiel devrait s’incliner devant la décision de refuser de déclarer la denrée alimentaire en cause impropre à la consommation humaine et apposer une marque de salubrité sur celle-ci, il convient de relever qu’il n’en demeure pas moins que le juge saisi ne dispose pas du pouvoir de trancher, lui-même, d’une manière définitive et contraignante une contestation des décisions du vétérinaire officiel qui
lui sont soumises.

68 De même, le fait qu’une indemnisation peut être due lorsque, dans le cadre d’une procédure telle que celle visée par la première question, le juge saisi refuse de déclarer la carcasse en cause impropre à la consommation humaine ne saurait conduire à une conclusion différente, dans la mesure où l’octroi d’une telle indemnisation ne relève pas, en tant que tel, de l’objet du litige devant ce juge.

69 Dès lors, il convient de conclure qu’une procédure telle que celle visée par la première question ne saurait fournir à un exploitant d’abattoir des garanties suffisantes contre les décisions du vétérinaire officiel et, partant, cette procédure ne satisfait pas aux exigences d’un recours effectif au sens des règlements no 854/2004 et no 882/2004.

70 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que les règlements no 854/2004 et no 882/2004 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle, lorsqu’un vétérinaire officiel refuse d’apposer sur une carcasse une marque de salubrité et que le propriétaire de cette carcasse n’est pas d’accord avec cette décision, le vétérinaire officiel doit saisir un juge pour que celui–ci décide sur le fond et sur la base des avis techniques
d’experts commis par chacune des parties si ladite carcasse satisfait ou non aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires, sans pouvoir formellement annuler les décisions du vétérinaire officiel ni ordonner la levée des effets de ces décisions.

Sur la seconde question

71 Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 54 du règlement no 882/2004, lu en combinaison avec le considérant 43 de celui–ci et à la lumière de l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation nationale selon laquelle la décision prise par le vétérinaire officiel, conformément à l’article 5, point 2, du règlement no 854/2004, de ne pas apposer une marque de salubrité sur une carcasse ne peut faire l’objet que
d’un contrôle juridictionnel restreint, dans le cadre duquel la juridiction saisie peut annuler celle-ci pour tout motif la rendant illégale, y compris si ce vétérinaire a agi dans un but autre que celui pour lequel ses pouvoirs lui ont été conférés, s’il n’a pas appliqué les critères juridiques adéquats ou si sa décision est sans fondement ou non étayée par des éléments de preuve suffisants.

72 Ainsi qu’il ressort des points 54 et 59 du présent arrêt, les règlements no 854/2004 et no 882/2004 imposent aux États membres de prévoir une voie de recours par laquelle l’exploitant d’abattoir concerné peut contester les décisions du vétérinaire officiel et que ce dernier doit, en tant qu’autorité compétente, transmettre à cet exploitant des informations sur ses droits de recours ainsi que sur la procédure et les délais applicables.

73 Il importe, à cet égard, de relever que ces règlements laissent aux États membres le soin de prévoir les règles nécessaires pour que les exploitants d’abattoir concernés puissent exercer leur droit à un recours effectif.

74 Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence bien établie de la Cour, l’article 19, paragraphe 1, second alinéa, TUE impose aux États membres d’établir les voies de recours nécessaires pour assurer une protection juridictionnelle effective dans les domaines couverts par le droit de l’Union (arrêt du 26 juin 2019, Craeynest e.a., C‑723/17, EU:C:2019:533, point 31 ainsi que jurisprudence citée). Par ailleurs, lorsqu’ils définissent les modalités procédurales des recours en justice, les
États membres doivent garantir le respect de ce droit. Ainsi, malgré l’absence de règles du droit de l’Union relatives aux modalités des recours devant les juridictions nationales, et afin de déterminer l’intensité du contrôle juridictionnel des décisions nationales adoptées en application d’un acte du droit de l’Union, il convient de tenir compte de la finalité de celui-ci et de veiller à ce qu’il ne soit pas porté atteinte à son efficacité (arrêt du 26 juin 2019, Craeynest e.a., C‑723/17,
EU:C:2019:533, points 46 et 54 ainsi que jurisprudence citée).

75 Cette obligation faite aux États membres correspond au droit consacré à l’article 47 de la Charte, intitulé « Droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial », selon lequel toute personne dont les droits et les libertés garantis par le droit de l’Union ont été violés a droit à un recours effectif devant un tribunal (arrêt du 27 septembre 2017, Puškár, C‑73/16, EU:C:2017:725, point 58 et jurisprudence citée).

76 Il s’ensuit que, lorsqu’ils définissent les modalités procédurales des recours en justice destinés à assurer la sauvegarde des droits conférés par les règlements no 854/2004 et no 882/2004 aux exploitants d’abattoir lésés par des décisions du vétérinaire officiel de ne pas apposer une marque de salubrité sur une carcasse, les États membres doivent garantir le respect du droit à un recours effectif et à accéder à un tribunal impartial, consacré à l’article 47 de la Charte, qui constitue une
réaffirmation du principe de protection juridictionnelle effective (voir, par analogie, arrêt du 27 septembre 2017, Puškár, C‑73/16, EU:C:2017:725, point 59 et jurisprudence citée).

77 À cet égard, il y a lieu de rappeler que l’article 52, paragraphe 3, de la Charte vise à assurer la cohérence nécessaire entre les droits contenus dans cette dernière et les droits correspondants garantis par la CEDH, sans porter atteinte à l’autonomie du droit de l’Union et de la Cour de justice de l’Union européenne. Il convient donc de tenir compte des droits correspondants de la CEDH en vue de l’interprétation de la Charte, en tant que seuil de protection minimale (arrêt du 6 octobre 2020, La
Quadrature du Net e.a., C‑511/18, C‑512/18 et C‑520/18, EU:C:2020:791, point 124 ainsi que jurisprudence citée).

78 Il convient de rappeler, dans ce contexte, que le respect du droit à une protection juridictionnelle effective, garanti par l’article 47 de la Charte, doit être apprécié, conformément à la jurisprudence constante, en fonction des circonstances propres spécifiques de chaque cas d’espèce, notamment de la nature de l’acte en cause, du contexte de son adoption et des règles juridiques régissant la matière concernée (voir, en ce sens, arrêt du 26 juillet 2017, Sacko, C‑348/16, EU:C:2017:591, point 41
et jurisprudence citée).

79 Il s’agit des critères qui sont, en substance, comparables à ceux appliqués par la Cour européenne des droits de l’homme. En effet, cette dernière juge de manière constante que, afin d’évaluer si, dans un cas donné, les juridictions internes ont effectué un contrôle d’une étendue suffisante, elle doit prendre en considération les compétences attribuées à la juridiction en question et des éléments tels que, premièrement, l’objet de la décision attaquée, plus particulièrement le point de savoir si
celle-ci a trait à une question spécialisée exigeant des connaissances ou une expérience professionnelles ou si, et dans quelle mesure, elle implique l’exercice du pouvoir discrétionnaire de l’administration, deuxièmement, la méthode suivie pour parvenir à cette décision et, en particulier, les garanties procédurales existant dans le cadre de la procédure devant l’autorité administrative, et, troisièmement, la teneur du litige, y compris les moyens de recours, tant souhaités que réellement
développés (Cour EDH, 6 novembre 2018, Ramos Nunes de Carvalho e Sá c. Portugal, CE:ECHR:2018:1106JUD005539113, § 179 et jurisprudence citée).

80 Il s’ensuit que la Cour et la Cour européenne des droits de l’homme adoptent la même règle selon laquelle, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 68 de ses conclusions, le droit à une protection juridictionnelle effective garanti par l’article 47 de la Charte prévoit que pour qu’une juridiction puisse décider d’une contestation sur des droits et des obligations découlant du droit de l’Union, il faut qu’elle ait compétence pour examiner toutes les questions de fait et de droit
pertinentes pour le litige dont elle se trouve saisie (arrêt du 6 novembre 2012, Otis e.a., C‑199/11, EU:C:2012:684, point 49 ainsi que jurisprudence citée).

81 Or, en l’occurrence, ainsi que le précise la juridiction de renvoi tel n’est pas le cas dans l’affaire au principal.

82 En effet, il ressort de la décision de renvoi que l’exploitant d’un abattoir a la possibilité d’introduire une procédure de contrôle juridictionnel devant la High Court of Justice (England & Wales) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles)] soit pour contester la décision prise par le vétérinaire officiel déclarant une carcasse impropre à la consommation humaine, décision comportant donc le refus d’apposer une marque de salubrité, soit pour faire annuler un avis d’élimination de cette
carcasse. Cette juridiction peut annuler la décision du vétérinaire officiel pour tout motif rendant cette décision illégale, y compris si ce vétérinaire a agi dans un but autre que celui pour lequel ses pouvoirs lui ont été conférés, s’il n’a pas appliqué les critères juridiques adéquats ou si sa décision est sans fondement ou non étayée par des éléments de preuve suffisants. Elle recourt occasionnellement à une procédure orale, ordonne des mesures obligatoires et dispose du pouvoir d’accorder
des dommages et intérêts pour violation des droits découlant de la CEDH. Toutefois, la juridiction de renvoi précise que la procédure de contrôle juridictionnel ne constitue pas un recours sur le fond contre la décision prise.

83 Il y a, dès lors, lieu de déterminer si l’étendue d’un contrôle juridictionnel d’une décision prise par le vétérinaire officiel, conformément à l’article 5, point 2, du règlement no 854/2004, de ne pas apposer une marque de salubrité sur une carcasse, tel que celui effectué par la High Court of Justice (England & Wales) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles)], satisfait aux exigences de l’article 54 du règlement no 882/2004, lu à la lumière de l’article 47 de la Charte ainsi que de
la jurisprudence citée aux points 74 à 79 du présent arrêt.

84 À cet égard, il convient de relever, en premier lieu, qu’aucune disposition des règlements no 854/2004 et no 882/2004 ne prévoit un contrôle juridictionnel complet quant au fond de la décision du vétérinaire officiel de ne pas apposer une marque de salubrité sur une carcasse.

85 En second lieu, ainsi qu’il a été rappelé au point 47 du présent arrêt, étant donné que le domaine de la sécurité des denrées alimentaires se caractérise par une complexité présentant un niveau élevé de spécialisation, le vétérinaire officiel dispose dans le cadre des contrôles officiels dont il est chargé d’un pouvoir d’appréciation important. En effet, il ressort de l’article 5, point 2, in fine, du règlement no 854/2004 que les marques de salubrité sont apposées par le vétérinaire officiel ou
sous sa responsabilité dès lors que les contrôles officiels n’ont décelé aucune des irrégularités susceptibles de rendre la viande impropre à la consommation humaine.

86 Ainsi que le prévoit la section I, chapitre II, de l’annexe I de ce règlement, relatif aux tâches d’inspection, dans le cadre des contrôles officiels, le vétérinaire officiel doit contrôler et analyser les informations pertinentes provenant des registres de l’exploitation d’origine des animaux destinés à l’abattage ainsi que prendre en compte les résultats dûment étayés de ce contrôle et de cette analyse lorsqu’il effectue des inspections ante et post mortem.

87 En outre, il ressort de la section I, chapitre III, de cette annexe que le vétérinaire officiel doit notamment veiller à ce que la marque de salubrité ne soit apposée que sur des animaux ayant été soumis à une inspection ante mortem et post mortem conformément audit règlement et lorsqu’il n’existe aucun motif de déclarer la carcasse en cause impropre à la consommation humaine.

88 Il s’ensuit que, pour décider s’il convient ou non d’apposer une marque de salubrité sur une carcasse, le vétérinaire officiel doit procéder à une appréciation technique complexe qui nécessite une qualification professionnelle appropriée ainsi qu’une expertise en la matière. C’est ainsi qu’il est pleinement responsable pour empêcher qu’aucune viande impropre à la consommation humaine ne soit mise sur le marché et que soit ainsi assuré l’objectif poursuivi par les règlements no 854/2004 et
no 882/2004.

89 Par ailleurs, sa décision doit, en vertu de l’article 54, paragraphe 3, du règlement no 882/2004, respecter certaines exigences concernant notamment sa notification écrite et sa motivation, ainsi que des informations sur les droits de recours. Parmi ces exigences, l’obligation de motivation des décisions adoptées par les autorités nationales, ainsi qu’il résulte de la jurisprudence constante de la Cour, revêt une importance toute particulière, en ce qu’elle permet aux destinataires de ces
décisions de défendre leurs droits et de décider en pleine connaissance de cause s’il y a lieu d’introduire un recours contre celles–ci. Cette obligation est également nécessaire pour permettre aux juridictions d’exercer le contrôle de légalité desdites décisions et constitue donc l’une des conditions de l’effectivité du contrôle juridictionnel garanti par l’article 47 de la Charte (voir, en ce sens, arrêts du 9 novembre 2017, LS Customs Services, C‑46/16, EU:C:2017:839, point 40, ainsi que du
15 juillet 2021, Commission/Landesbank Baden-Württemberg et CRU, C‑584/20 P et C‑621/20 P, EU:C:2021:601, point 103).

90 Dans ce contexte, il convient de relever que, en fonction des circonstances spécifiques du cas d’espèce, en particulier des règles en matière de sécurité des denrées alimentaires, lorsqu’elle est saisie d’un recours afin de contester des décisions du vétérinaire officiel telles que celle en cause au principal, la juridiction nationale compétente doit veiller à garantir que la procédure juridictionnelle, dans son ensemble, soit conforme tant au droit à un recours effectif, au sens de l’article 47
de la Charte, qu’à l’objectif d’atteindre un niveau élevé de protection de la santé publique poursuivi par les règlements no 854/2004 et no 882/2004, fondés sur l’article 168, paragraphe 4, sous b), TFUE.

91 Or, la responsabilité du vétérinaire officiel lorsqu’il décide qu’une carcasse est propre à la consommation humaine et ainsi susceptible d’être mise sur le marché n’exige pas, eu égard à l’objectif de la protection de la santé publique, que l’article 47 de la Charte soit interprété, dans le cadre d’une procédure de contrôle juridictionnel de décisions d’autorités administratives, comme obligeant les États membres à instaurer un contrôle juridictionnel de toutes les appréciations portées par le
vétérinaire officiel sur les faits très spécifiques constatés lors des inspections et relatifs au marquage de salubrité.

92 En l’occurrence, il ressort du dossier dont la Cour dispose que la High Court of Justice (England & Wales) [Haute Cour de justice (Angleterre et pays de Galles)], dans le cadre de l’examen d’un recours contre une décision du vétérinaire officiel telle que celle en cause au principal, est compétente pour contrôler cette décision selon les modalités précisées au point 82 du présent arrêt, notamment afin de s’assurer que le vétérinaire officiel n’a pas agi dans un but autre que celui pour lequel ses
pouvoirs lui ont été conférés et, le cas échéant, de sanctionner le fait qu’il n’a pas appliqué les critères juridiques adéquats ou que sa décision est sans fondement ou non étayée par des éléments de preuve suffisants.

93 Dans la mesure où un tel contrôle juridictionnel devant la juridiction nationale compétente s’exerce au regard de la motivation requise de la décision du vétérinaire officiel, son étendue ainsi limitée ne va pas jusqu’à compromettre l’essence même des garanties protégeant les droits de l’exploitant d’abattoir lorsqu’il conteste, conformément aux règlements no 854/2004 et no 882/2004, lus à la lumière de l’article 47 de la Charte, une décision du vétérinaire officiel refusant d’apposer une marque
de salubrité après avoir déclaré la viande en cause impropre à la consommation humaine. Dès lors, un tel contrôle est susceptible de respecter le droit d’un exploitant d’abattoir à une protection juridictionnelle effective, garanti par l’article 47 de la Charte.

94 Cette conclusion ne saurait être remise en cause par l’argument avancé par l’exploitant d’abattoir en cause au principal devant la juridiction de renvoi tiré de l’atteinte au droit de propriété.

95 À cet égard, il y a lieu de relever, d’une part, que, certes, à la suite d’une décision du vétérinaire officiel de ne pas apposer la marque de salubrité, le traitement de la carcasse concernée peut avoir pour conséquence l’obligation de sa destruction. Cependant, une telle destruction relève du traitement, conformément au règlement no 1069/2009, qui, dans l’objectif notamment de maîtriser les risques pour la santé publique et animale, établit un classement des sous-produits animaux et des
produits dérivés en trois catégories selon le degré de risque qu’ils présentent pour la santé publique et animale, sur la base de l’évaluation des risques. Il convient de rappeler, ainsi que la Cour l’a souligné dans l’arrêt de ce jour, Toropet (C‑836/19, point 45), que ce degré de risque dont dépend ce classement dans les trois catégories constitue également le critère pertinent pour l’utilisation finale des sous-produits animaux. En effet, le règlement no 1069/2009 a instauré des listes
d’utilisations et d’éliminations possibles pour chaque catégorie de matières ainsi que les règles applicables à chacune d’elles afin que ce niveau de risque soit réduit au minimum.

96 D’autre part, selon la jurisprudence constante de la Cour, le droit de propriété, qui est garanti par l’article 17 de la Charte, ne constitue pas une prérogative absolue, mais doit être pris en considération par rapport à sa fonction dans la société (voir, en ce sens, arrêt du 10 juillet 2003, Booker Aquaculture et Hydro Seafood, C‑20/00 et C‑64/00, EU:C:2003:397, point 68). Dans le contexte de l’affaire au principal, le droit de propriété doit être concilié avec l’article 38 de la Charte qui, à
l’instar de l’article 168, paragraphe 4, sous b), TFUE, tend à assurer, dans les politiques de l’Union, un niveau élevé de protection des consommateurs, en ce compris la protection de la santé publique.

97 Or, l’importance que revêt l’objectif de protection des consommateurs est susceptible de justifier des conséquences économiques négatives, même considérables, pour certains opérateurs économiques (voir, par analogie, arrêt du 23 mars 2021, Airhelp, C‑28/20, EU:C:2021:226, point 50 et jurisprudence citée). Tel est aussi le cas, en l’occurrence, dans la mesure où l’article 1er, paragraphe 3, du règlement no 854/2004 prévoit la responsabilité juridique primaire des exploitants du secteur alimentaire
de veiller, eux–mêmes, à la sécurité des denrées alimentaires, conformément au règlement no 178/2002, indépendamment des conséquences économiques que ce devoir pourrait leur causer.

98 Eu égard à toutes les considérations qui précèdent, il convient de répondre à la seconde question que l’article 54 du règlement no 882/2004, lu en combinaison avec le considérant 43 de celui–ci et à la lumière de l’article 47 de la Charte, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale selon laquelle la décision prise par le vétérinaire officiel, conformément à l’article 5, point 2, du règlement no 854/2004, tel que modifié par le règlement no 882/2004, de ne
pas apposer une marque de salubrité sur une carcasse ne peut faire l’objet que d’un contrôle juridictionnel restreint, dans le cadre duquel la juridiction saisie peut annuler celle-ci pour tout motif la rendant illégale, y compris si ce vétérinaire a agi dans un but autre que celui pour lequel ses pouvoirs lui ont été conférés, s’il n’a pas appliqué les critères juridiques adéquats ou si sa décision est sans fondement ou non étayée par des éléments de preuve suffisants.

Sur les dépens

99 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (quatrième chambre) dit pour droit :

  1) Le règlement (CE) no 854/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, fixant les règles spécifiques d’organisation des contrôles officiels concernant les produits d’origine animale destinés à la consommation humaine, tel que modifié par le règlement (CE) no 882/2004 du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, et le règlement no 882/2004 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une réglementation nationale en vertu de laquelle, lorsqu’un vétérinaire
officiel refuse d’apposer sur une carcasse une marque de salubrité et que le propriétaire de cette carcasse n’est pas d’accord avec cette décision, le vétérinaire officiel doit saisir un juge pour que celui–ci décide sur le fond et sur la base des avis techniques d’experts commis par chacune des parties si ladite carcasse satisfait ou non aux prescriptions relatives à la sécurité des denrées alimentaires, sans pouvoir formellement annuler les décisions du vétérinaire officiel ni ordonner la
levée des effets de ces décisions.

  2) L’article 54 du règlement no 882/2004, lu en combinaison avec le considérant 43 de celui–ci et à la lumière de l’article 47 de la charte des droit fondamentaux de l’Union européenne, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas à une réglementation nationale selon laquelle la décision prise par le vétérinaire officiel, conformément à l’article 5, point 2, du règlement no 854/2004, tel que modifié par le règlement no 882/2004, de ne pas apposer une marque de salubrité sur une carcasse
ne peut faire l’objet que d’un contrôle juridictionnel restreint, dans le cadre duquel la juridiction saisie peut annuler celle-ci pour tout motif la rendant illégale, y compris si ce vétérinaire a agi dans un but autre que celui pour lequel ses pouvoirs lui ont été conférés, s’il n’a pas appliqué les critères juridiques adéquats ou si sa décision est sans fondement ou non étayée par des éléments de preuve suffisants.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : l’anglais.


Synthèse
Formation : Quatrième chambre
Numéro d'arrêt : C-579/19
Date de la décision : 02/09/2021
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par la Supreme Court of the United Kingdom.

Renvoi préjudiciel – Protection de la santé – Règlement (CE) no 854/2004 – Article 5, point 2 – Règlement (CE) no 882/2004 – Article 54, paragraphe 3 – Règles d’hygiène applicables aux denrées alimentaires d’origine animale – Inspection post mortem de la carcasse et des abats – Vétérinaire officiel – Marquage de salubrité – Refus – Viande déclarée impropre à la consommation humaine – Droit de recours contre une décision du vétérinaire officiel – Protection juridictionnelle effective – Article 47 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne.

Rapprochement des législations

Santé publique

Agriculture et Pêche


Parties
Demandeurs : The Queen, à la demande de : Association of Independent Meat Suppliers et Cleveland Meat Company Ltdy
Défendeurs : Food Standards Agency.

Composition du Tribunal
Avocat général : Tanchev
Rapporteur ?: Šváby

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2021:665

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