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11/03/2021 | CJUE | N°C-66/20

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général M. M. Campos Sánchez-Bordona, présentées le 11 mars 2021., XK., 11/03/2021, C-66/20


 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA

présentées le 11 mars 2021 ( 1 )

Affaire C‑66/20

XK

en présence de

Finanzamt für Steuerstrafsachen und Steuerfahndung Münster

[demande de décision préjudicielle formée par la Procura Distrettuale della Repubblica presso il Tribunale ordinario di Trento (parquet de district de la République près le tribunal ordinaire de Trente, Italie)]

« Renvoi préjudiciel – Qualité pour saisir la Cour au titre de l’article 267 TFUE 

Coopération judiciaire en matière pénale – Directive 2014/41/UE – Décision d’enquête européenne en matière pénale – Autorité d’...

 CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA

présentées le 11 mars 2021 ( 1 )

Affaire C‑66/20

XK

en présence de

Finanzamt für Steuerstrafsachen und Steuerfahndung Münster

[demande de décision préjudicielle formée par la Procura Distrettuale della Repubblica presso il Tribunale ordinario di Trento (parquet de district de la République près le tribunal ordinaire de Trente, Italie)]

« Renvoi préjudiciel – Qualité pour saisir la Cour au titre de l’article 267 TFUE – Coopération judiciaire en matière pénale – Directive 2014/41/UE – Décision d’enquête européenne en matière pénale – Autorité d’émission – Autorité administrative désignée en tant que ministère public dans les procédures pénales liées aux infractions fiscales – Exigence de validation par une autorité judiciaire »

1. Une autorité administrative allemande ( 2 ), habilitée par l’ordre juridique interne à exercer les droits et les responsabilités du ministère public à l’égard de certaines infractions, peut-elle émettre une décision d’enquête européenne sans la validation exigée à l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41/UE ( 3 ) ?

2. Telle est, en substance, l’interrogation qu’un parquet italien ( 4 ) soumet à la Cour après avoir reçu une décision d’enquête européenne émise par une autorité allemande telle que visée au point précédent, sur la reconnaissance et l’exécution de laquelle il est chargé de se prononcer. Avant de dissiper ce doute, il convient de déterminer au préalable si le parquet de Trente est en droit de recourir au mécanisme de coopération judiciaire instauré à l’article 267 TFUE.

3. La Cour est donc à nouveau confrontée à la nature « judiciaire » du ministère public ( 5 ), cette fois sous un angle inédit. Elle devra établir : a) si cette institution est habilitée à saisir la Cour d’une question préjudicielle dans le cadre d’une décision d’enquête européenne ( 6 ), et b) si un organe administratif auquel le droit national attribue des pouvoirs appartenant au ministère public peut, pour poursuivre certaines infractions, être assimilé à ce dernier, toujours dans le cadre d’une
décision d’enquête européenne.

I. Le cadre juridique

A.   Le droit de l’Union : la directive 2014/41

4. Les considérants 12 et 15 de la directive 2014/41 sont ainsi rédigés :

« (12) Lorsqu’elle émet une décision d’enquête européenne, l’autorité d’émission devrait accorder une attention particulière au plein respect des droits consacrés par l’article 48 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après dénommée [la] “[C]harte”). La présomption d’innocence et les droits de la défense dans une procédure pénale sont des pierres angulaires des droits fondamentaux reconnus par la [C]harte dans le domaine de la justice pénale. Toute limitation de
l’exercice de ces droits par une mesure d’enquête ordonnée conformément à la présente directive devrait pleinement respecter les exigences établies à l’article 52 de la [C]harte en ce qui concerne son caractère nécessaire et proportionné et les objectifs auxquels elle devrait répondre, notamment le besoin de protection des droits et libertés d’autrui.

[...]

(15) La présente directive devrait être mise en œuvre en tenant compte des directives [...] 2010/64/UE [ ( 7 )], 2012/13/UE [ ( 8 )] et 2013/48/UE [ ( 9 )], qui concernent les droits procéduraux dans le cadre des procédures pénales. »

5. L’article 1er de la directive 2014/41 (« Décision d’enquête européenne et obligation de l’exécuter ») énonce :

« 1.   La décision d’enquête européenne est une décision judiciaire qui a été émise ou validée par une autorité judiciaire d’un État membre (ci-après dénommé “État d’émission”) afin de faire exécuter une ou plusieurs mesures d’enquête spécifiques dans un autre État membre (ci-après dénommé “État d’exécution”) en vue d’obtenir des preuves conformément à la présente directive.

La décision d’enquête européenne peut également être émise pour l’obtention de preuves qui sont déjà en possession des autorités compétentes de l’État d’exécution.

2.   Les États membres exécutent une décision d’enquête européenne sur la base du principe de reconnaissance mutuelle et conformément à la présente directive.

[...] »

6. L’article 2, sous c), de la directive 2014/41 définit l’« autorité d’émission » en ces termes :

« [...]

i) un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur compétent(e) dans l’affaire concernée ; ou

ii) toute autre autorité compétente définie par l’État d’émission qui, dans le cas d’espèce, agit en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales, compétente pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national. En outre, avant d’être transmise à l’autorité d’exécution, la décision d’enquête européenne est validée, après examen de sa conformité aux conditions d’émission prévues par la présente directive, en particulier les conditions prévues à
l’article 6, paragraphe 1, par un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur dans l’État d’émission. Lorsque la décision d’enquête européenne a été validée par une autorité judiciaire, cette dernière peut également être considérée comme une autorité d’émission aux fins de la transmission de la décision d’enquête européenne[.] »

7. L’article 6 de cette directive (« Conditions d’émission et de transmission d’une décision d’enquête européenne ») prévoit :

« 1.   L’autorité d’émission ne peut émettre une décision d’enquête européenne que si les conditions suivantes sont réunies :

a) l’émission de la décision d’enquête européenne est nécessaire et proportionnée aux finalités des procédures visées à l’article 4, compte tenu des droits du suspect ou de la personne poursuivie ; et

b) la ou les mesures d’enquête indiquées dans la décision d’enquête européenne auraient pu être ordonnées dans les mêmes conditions dans le cadre d’une procédure nationale similaire.

2.   Dans chaque cas, le respect des conditions visées au paragraphe 1 est vérifié par l’autorité d’émission.

3.   Lorsque l’autorité d’exécution a des raisons de penser que les conditions visées au paragraphe 1 n’ont pas été respectées, elle peut consulter l’autorité d’émission sur l’importance d’exécuter la décision d’enquête européenne. Après cette consultation, l’autorité d’émission peut décider de retirer la décision d’enquête européenne. »

8. L’article 9 de la directive 2014/41 (« Reconnaissance et exécution ») dispose :

« 1.   L’autorité d’exécution reconnaît une décision d’enquête européenne, transmise conformément à la présente directive, sans qu’aucune autre formalité soit requise, et veille à ce qu’elle soit exécutée de la même manière et suivant les mêmes modalités que si la mesure d’enquête concernée avait été ordonnée par une autorité de l’État d’exécution, à moins que cette autorité ne décide de se prévaloir de l’un des motifs de non-reconnaissance ou de non-exécution ou de l’un des motifs de report
prévus par la présente directive.

2.   L’autorité d’exécution respecte les formalités et procédures expressément indiquées par l’autorité d’émission, sauf si la présente directive en dispose autrement et sous réserve que ces formalités et procédures ne soient pas contraires aux principes fondamentaux du droit de l’État d’exécution.

3.   Lorsqu’une autorité d’exécution reçoit une décision d’enquête européenne qui n’a pas été émise par une autorité d’émission telle qu’elle est définie à l’article 2, point c), l’autorité d’exécution renvoie la décision d’enquête européenne à l’État d’émission.

[...] »

9. L’article 11 de cette directive énumère les « [m]otifs de non-reconnaissance ou de non-exécution ».

B.   Le droit national

1. Le droit allemand : l’Abgabenordnung (code fiscal allemand)

10. L’article 386 du code fiscal allemand se lit comme suit :

« 1.   Lorsqu’il existe une suspicion d’infraction fiscale, l’autorité fiscale instruit les faits. Aux fins de la présente section, on entend par “autorité fiscale” le “Hauptzollamt” (bureau principal des douanes), le “Finanzamt” (centre des impôts), le “Bundeszentralamt für Steuern” (office fédéral des impôts) et la “Familienkasse” (caisse d’allocations familiales).

2.   L’autorité fiscale mène la procédure d’enquête de manière indépendante, dans le respect des limites de l’article 399, paragraphe 1, et des articles 400 et 401, lorsque les faits concernés

1) constituent exclusivement une infraction fiscale, ou

2) enfreignent également d’autres lois pénales et que cette infraction concerne des impôts sur les cultes ou d’autres recettes de droit public liées à l’assiette fiscale, au montant imposable pondéré ou au montant d’impôts.

3.   Le paragraphe 2 ne s’applique pas dès lors qu’un mandat d’arrêt ou d’internement est émis à l’encontre de la personne poursuivie en raison des faits concernés.

4.   L’autorité fiscale peut se dessaisir à tout moment de l’affaire pénale au profit du ministère public. Le ministère public peut se saisir à tout moment de l’affaire. Dans les deux cas, le ministère public a la faculté, en accord avec l’autorité fiscale, de se dessaisir à nouveau de l’affaire au profit de cette autorité. »

11. L’article 399, paragraphe 1, de ce code prévoit :

« Lorsque la procédure d’enquête est menée de manière indépendante par l’autorité fiscale sur le fondement de l’article 386, paragraphe 2, cette autorité exerce les droits et obligations du ministère public dans le cadre de la procédure d’enquête. »

12. Le 14 mars 2017, la Représentation permanente de la République fédérale d’Allemagne auprès de l’Union européenne a communiqué la déclaration suivante concernant les décisions d’enquête européenne émises par les autorités administratives allemandes :

« Conformément à l’article 2, sous c), de la directive [2014/41], les demandes émanant des autorités administratives allemandes doivent en principe être validées par le ministère public près le tribunal régional du ressort dans lequel l’autorité administrative est établie. Les Länder sont néanmoins libres de conférer la compétence de validation à un tribunal ou de définir de façon différente la compétence territoriale du ministère public en matière de validation. Les demandes émanant des
autorités fiscales allemandes qui sont habilitées à mener une procédure d’enquête pénale de façon autonome sur le fondement des dispositions de l’article 386, paragraphe 2, du code fiscal n’ont pas besoin d’être validées par une autorité judiciaire ou un tribunal. Dans cette hypothèse, les autorités fiscales exercent les droits et responsabilités du ministère public sur le fondement des dispositions [...] de l’article 399, paragraphe 1, du code fiscal [...] et agissent elles-mêmes en tant
qu’autorité judiciaire au sens de l’article 2, sous c) de la directive [2014/41]. »

2. Le droit italien : le decreto legislativo n. 108/17. Norme di attuazione della direttiva 2014/41/UE del Parlamento europeo e del Consiglio, del 3 aprile 2014, relativa all’ordine europeo di indagine penale (décret législatif no 108/17. Dispositions de transposition de la directive 2014/41), du 21 juin 2017 (ci-après le « décret législatif no 108/17 »)

13. L’article 4, paragraphe 1, du décret législatif no 108/17 ( 10 ) dispose que « [l]e procureur de la République près le tribunal du chef-lieu du district dans lequel les actes requis doivent être accomplis procède, par décret motivé, à la reconnaissance de la décision d’enquête dans un délai de 30 jours à compter de sa réception ou, s’il est différent, dans le délai indiqué par l’autorité d’émission et, en tout état de cause, dans un délai qui ne peut dépasser 60 jours ».

14. L’article 5, paragraphe 1, du décret législatif no 108/17 ajoute que, « [l]orsque l’autorité d’émission demande que l’acte soit accompli par le juge ou lorsque l’acte requis doit, en vertu de la loi italienne, être accompli par le juge, le procureur de la République reconnaît la décision d’enquête et en sollicite l’exécution auprès du juge des enquêtes préliminaires ».

15. Aux termes de l’article 10, paragraphe 3, du décret législatif no 108/17, « [l]a décision d’enquête émise par une autorité non judiciaire ou qui n’a pas été validée par une autorité judiciaire est renvoyée à l’autorité d’émission ».

II. Les faits, la procédure au principal et la question préjudicielle

16. Le 14 novembre 2019, le parquet de Trente a reçu une décision d’enquête européenne émise le même jour par le Finanzamt Münster, ordonnant la perquisition de locaux commerciaux dans le cadre d’une enquête pour évasion fiscale diligentée sur le fondement des articles 369 et 370 du code fiscal allemand.

17. La décision d’enquête européenne était signée par le directeur général du Finanzamt Münster et n’avait pas été validée par une autorité judiciaire.

18. Le 20 décembre 2019, le parquet de Trente a confirmé au Finanzamt Münster qu’il avait reçu la décision d’enquête européenne et lui a adressé un courrier demandant la transmission d’une copie de cette décision validée par une autorité judiciaire. Selon le parquet de Trente, la validation était nécessaire en raison de la nature administrative de l’autorité d’émission.

19. Le 8 janvier 2020, le Finanzamt Münster a indiqué au parquet de Trente que la décision d’enquête européenne n’avait pas à être validée par une autorité judiciaire au motif que, en vertu de l’article 399, paragraphe 1, du code fiscal allemand, le Finanzamt exerce les fonctions du ministère public dans les procédures d’infractions fiscales, et qu’il devait être considéré comme étant lui-même une autorité judiciaire au sens de l’article 2 de la directive 2014/41.

20. Dans ce contexte, le parquet de Trente a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

« L’article 2, paragraphe 1, sous c), ii), de la directive [2014/41] – en ce qu’il dispose que peut également être considérée comme une autorité d’émission “toute autre autorité compétente définie par l’État d’émission qui, dans le cas d’espèce, agit en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales, compétente pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national”, en prévoyant que dans ce cas, toutefois, “avant d’être transmise à l’autorité
d’exécution, la décision d’enquête européenne est validée, après examen de sa conformité aux conditions d’émission prévues par la présente directive, en particulier les conditions prévues à l’article 6, paragraphe 1, par un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur dans l’État d’émission” – doit-il être interprété en ce sens qu’il permet à un État membre de dispenser une autorité administrative de l’obligation de faire valider la décision d’enquête européenne en la qualifiant
d’“autorité judiciaire au sens de l’article 2 de la directive” [2014/41] ? »

21. Le parquet de Trente estime que, dans la procédure passive de reconnaissance de la décision d’enquête européenne au sens de l’article 9 de la directive 2014/41 et des articles 4 et 10 du décret législatif no 108/17, il a pour mission de « trancher en toute indépendance un litige ». Il serait, dès lors, recevable à poser une question préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE.

22. Sur le fond, le parquet de Trente indique que la décision d’enquête européenne doit nécessairement être adoptée ou validée par une autorité judiciaire. C’est ce qui ressortirait, par une analogie entre les décisions d’enquête européenne et les mandats d’arrêt européens ( 11 ), de l’arrêt du 10 novembre 2016, Özçelik ( 12 ).

23. Il convient donc de déterminer si une autorité administrative telle que le Finanzamt, qui est habilitée par le droit interne à exercer, dans certains cas, les fonctions du ministère public, peut émettre une décision d’enquête européenne sans validation judiciaire.

24. Selon le parquet de Trente, la solution doit être trouvée en extrapolant la jurisprudence de la Cour relative aux mandats d’arrêt européens, c’est-à-dire en partant du principe que : a) la notion d’« autorité judiciaire » est uniforme et ne peut dépendre des différents États membres, et b) cette notion ne recouvre que les organismes qui ne font pas l’objet d’ordres ou d’instructions extérieurs, notamment de la part du pouvoir exécutif.

III. La procédure devant la Cour

25. La demande de décision préjudicielle a été enregistrée au greffe de la Cour le 24 janvier 2020.

26. Ont déposé des observations écrites les gouvernements allemand, italien et portugais ainsi que la Commission européenne.

27. La Cour n’a pas jugé utile de tenir une audience de plaidoiries, mais a invité les parties à répondre à deux questions sur le contrôle juridictionnel des décisions d’enquête européenne ( 13 ) et sur le droit italien applicable ( 14 ).

IV. Analyse

A.   Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle

28. Conformément à l’article 267 TFUE, seules les « juridiction[s] » peuvent – ou doivent – saisir la Cour, « à titre préjudiciel », d’une question « sur l’interprétation des traités » ou « sur la validité et l’interprétation » du droit dérivé de l’Union.

29. La question de savoir ce qu’il convient d’entendre, dans ce contexte, par « juridiction » doit être tranchée sur la seule base du droit de l’Union : les exigences tenant à l’unité et à l’uniformité de l’application de ce droit en font une notion autonome, indépendante des différents ordres juridiques internes ( 15 ).

30. Pour définir les contours de cette notion, la Cour a traditionnellement tenu compte d’une série de facteurs qui ont commencé à se dessiner dans l’arrêt Vaassen-Göbbels ( 16 ). La qualité de « juridiction » est réservée aux organismes qui, institués de façon permanente par la loi, appliquent des règles de droit en suivant une procédure contradictoire, dans l’exercice d’une compétence obligatoire et en toute indépendance ( 17 ).

31. En principe, seuls les juges et les juridictions faisant partie intégrante du pouvoir judiciaire de chaque État membre remplissent simultanément les conditions qui viennent d’être énumérées. Toutefois, la Cour s’est montrée relativement flexible dans l’appréciation du respect de ces conditions, ce qui lui a permis de reconnaître la qualité de « juridiction » à des institutions extérieures au pouvoir judiciaire, telles qu’une commission de recours d’un organisme professionnel ( 18 ) ou un comité
de recours communal ( 19 ).

32. L’approche non formaliste retenue par la Cour en la matière a été critiquée au motif que les exigences définies dans l’arrêt Vaassen-Göbbels ont fini par être « dénaturé[e]s » ( 20 ). Il semble néanmoins que la Cour a récemment infléchi la position, excessivement permissive, qu’elle avait adoptée ( 21 ).

33. La jurisprudence de la Cour répond en fait à la raison profonde qui sous-tend le mécanisme de coopération judiciaire prévu à l’article 267 TFUE : « garantir la préservation des caractéristiques spécifiques et de l’autonomie de [...] [l’]ordre juridique [de l’Union] » ( 22 ).

34. Cet objectif est servi par un système juridictionnel dont la « clef de voûte [...] est constituée par la procédure du renvoi préjudiciel prévue à l’article 267 TFUE qui, en instaurant un dialogue de juge à juge précisément entre la Cour et les juridictions des États membres, a pour but d’assurer l’unité d’interprétation du droit de l’Union [...], permettant ainsi d’assurer sa cohérence, son plein effet et son autonomie ainsi que, en dernière instance, le caractère propre du droit institué par
les traités » ( 23 ).

35. Si la procédure prévue à l’article 267 TFUE se présente comme un « dialogue de juge à juge », c’est parce que ce sont les juges, en règle générale, qui ont le dernier mot sur les règles qui constituent les ordres juridiques des États membres. Lorsque les règles du droit de l’Union influent sur ces ordres juridiques – et sur les litiges subséquents –, le renvoi à la Cour vise à éviter que ne se cristallisent des solutions définitives inappropriées au regard du droit de l’Union lui-même ( 24 ).

36. C’est pourquoi les juges nationaux s’adressent à la Cour en vue d’obtenir une réponse aux interrogations soulevées quant au sens exact des dispositions du droit de l’Union ayant une incidence sur un litige.

37. Les juges nationaux – grâce aux mécanismes de recours – uniformisent les différentes interprétations du droit retenues par les organes non juridictionnels (y compris administratifs) qui appliquent l’ordre juridique interne. En dernière analyse, seules les interprétations confirmées par les juridictions sont valides, de sorte qu’il est logique que l’article 267 TFUE en fasse les interlocutrices naturelles (et exclusives) de la Cour.

38. Néanmoins, ce n’est pas tout. Comme je viens de le souligner, l’objectif est de sauvegarder « l’unité d’interprétation du droit de l’Union » ( 25 ). L’article 267 TFUE sert bien sûr à aider les juges nationaux à interpréter les dispositions du droit de l’Union qu’ils doivent appliquer pour trancher les litiges dont ils sont saisis. Toutefois, il tend également à assurer qu’aucune disposition du droit de l’Union n’échappe à l’interprétation autorisée de la Cour.

39. L’article 267 TFUE a pour objectif d’éviter que ne s’enracinent dans les ordres juridiques internes des interprétations du droit de l’Union qui n’auraient pas pu être validées par la Cour. S’il en était ainsi, s’ajouterait au risque d’une interprétation erronée la pluralité quasiment inévitable de lectures des règles de l’Union dans les différents États membres, ce qui porterait préjudice à l’unité du droit de l’Union. C’est la raison pour laquelle l’article 267 TFUE non seulement habilite les
juridictions nationales de dernière instance à poser des questions préjudicielles, mais les oblige à le faire.

40. Si, au fil de sa jurisprudence, la Cour a opté pour une approche fonctionnelle en admettant des renvois préjudiciels émanant d’institutions qui n’étaient pas strictement judiciaires, je crois que cela est dû à ce même objectif. Lorsque les actes de ces institutions ne sont pas susceptibles de recours juridictionnel sur le plan interne, ils font courir le risque d’une consolidation d’interprétations définitives du droit de l’Union sans l’intervention de la Cour.

41. En effet, comme je l’ai indiqué précédemment, ce sont les juges qui, en règle générale, ont le dernier mot dans les ordres juridiques des États membres ( 26 ). C’est pourquoi l’article 267 TFUE les désigne, je le répète, comme les interlocuteurs naturels de la Cour.

42. Toutefois, cette règle peut être nuancée, eu égard au risque d’une interprétation dispersée du droit de l’Union, dans des cas exceptionnels où, compte tenu des caractéristiques de l’ordre juridique national, l’intervention juridictionnelle proprement dite n’est pas possible.

43. C’est ce que l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer soulignait : « [l]’organisation juridictionnelle d’une Europe composée de 27 États membres répond à des paramètres et à des conceptions très hétérogènes », de sorte qu’il est « difficile de concevoir un modèle faisant une description commune de la fonction judiciaire de tant de pays ». C’est pourquoi les critères dégagés dans l’arrêt Vaassen-Göbbels ont été interprétés « de façon aussi générale et large » ( 27 ).

44. La Cour s’est donc fondée sur un modèle idéal défini par les caractéristiques qui distinguent spécifiquement les juridictions (en substance, celles énoncées dans l’arrêt Vaassen-Göbbels) ( 28 ). Toutefois, au fil des ans, elle a été saisie d’affaires qui l’ont conduite à relativiser l’importance des critères énoncés dans cet arrêt, lorsque cela se révélait nécessaire pour inclure dans la notion de « juridiction » des institutions qui, bien que ne relevant pas du pouvoir judiciaire, exerçaient
une compétence juridictionnelle ( 29 ).

45. Toutefois, l’élément sur lequel la Cour n’a jamais transigé est l’exigence selon laquelle l’organe qui pose une question préjudicielle doit exercer matériellement une compétence juridictionnelle ou, en d’autres termes, dire le droit de façon irrévocable dans un litige concret.

46. Comme je l’ai déjà exposé, la Cour n’a pas hésité à qualifier de « juridiction » une commission de recours d’un organisme professionnel, alors même que ses décisions étaient susceptibles de recours devant les tribunaux. Cette dernière circonstance aurait dû suffire pour conclure que c’était à ces tribunaux qu’il revenait, le cas échéant, de formuler une éventuelle question préjudicielle. Cependant, le fait que, dans la pratique, les décisions de la commission n’aient jamais fait l’objet de
recours juridictionnels a suffi à la Cour pour juger que ces décisions revêtaient, de facto, un caractère juridictionnel ( 30 ).

47. Ce qui importe donc, dans le contexte de l’article 267 TFUE, c’est que les organes ayant le dernier mot en vertu du droit national puissent avoir accès à la Cour lorsque l’interprétation de dispositions du droit de l’Union est en jeu. Cette constatation vaut tant pour les organes juridictionnels au sens strict que pour d’autres organes qui, sans relever de cette catégorie, exercent à titre exceptionnel, de facto, une compétence juridictionnelle finale dans le cadre d’un litige. Les uns et les
autres doivent se voir accorder la possibilité de céder la parole à la Cour pour que cette dernière dise elle-même l’interprétation autorisée du droit de l’Union.

48. On comprend ainsi que l’expression « rendre son jugement », utilisée à l’article 267 TFUE, ait été interprétée de manière extensive, afin d’éviter « que nombre de questions procédurales soient considérées comme irrecevables et ne puissent faire l’objet d’une interprétation par la Cour et que cette dernière ne puisse connaître de l’interprétation de toutes dispositions du droit de l’Union que la juridiction de renvoi est tenue d’appliquer » ( 31 ).

49. Le souci de la Cour d’être l’interprète ultime de l’ensemble du droit de l’Union a donc conduit à l’adoption des deux exceptions indiquées à l’époque par l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer : i) l’inexistence de voie de recours devant les tribunaux, et ii) l’octroi, en vertu d’une règle constitutionnelle, de fonctions judiciaires à des organes parajudiciaires ( 32 ).

50. Ces prémisses étant posées, il convient d’aborder les objections à la recevabilité du renvoi préjudiciel opéré par le parquet de Trente. Cette institution satisfait aux critères tenant à son origine légale, à sa permanence, au caractère obligatoire de sa juridiction et à l’application de règles de droit.

51. Même si la procédure de reconnaissance et d’exécution de la décision d’enquête européenne ne revêtait pas un caractère contradictoire, ce qui est douteux, la Cour a déjà relativisé l’importance de cette exigence en refusant de la qualifier de « critère absolu » ( 33 ).

52. Par conséquent, tout porte à croire que la première des exceptions auxquelles j’ai fait allusion s’applique, car, selon les informations fournies par le parquet de Trente et par le gouvernement italien ( 34 ), bien que la reconnaissance de la décision d’enquête européenne par le parquet puisse faire l’objet d’un contrôle juridictionnel, il n’existe aucune voie de droit qui permette de recourir aux tribunaux pour contester le refus d’accorder à la décision d’enquête européenne la reconnaissance
nécessaire à son exécution.

53. Dans ces conditions, je suis d’avis que le parquet de Trente devrait se voir reconnaître la faculté de poser la question préjudicielle.

54. On pourrait cependant objecter que, si le ministère public reconnaît la validité de la décision d’enquête européenne, sa décision peut être attaquée devant un tribunal, lequel aura le dernier mot, avec pour conséquence que c’est à cette juridiction que sera réservé le droit de poser une question préjudicielle.

55. Au stade actuel de la procédure au principal, le parquet de Trente n’a pas encore pu statuer à l’égard de la viabilité de la décision d’enquête européenne, sur la reconnaissance de laquelle il devra se prononcer. S’il n’a pas pu le faire, c’est précisément parce qu’il se demande si, au regard de la directive 2014/41, les conditions de reconnaissance de la décision d’enquête européenne en cause sont réunies.

56. Ainsi, le parquet de Trente ne pourrait susciter l’intervention d’un tribunal que s’il choisissait de reconnaître la décision d’enquête européenne, indépendamment du fait qu’il s’agisse, selon lui, d’une décision d’enquête européenne émise par un organe incompétent (le Finanzamt Münster). Le parquet de Trente serait, en somme, contraint d’adopter une décision en sachant qu’elle pourrait éventuellement être erronée et dans l’attente d’une intervention judiciaire qui, en outre, ne peut être
garantie.

57. Le parquet de Trente ne pourrait statuer au mieux de ses connaissances et conformément à sa conviction que s’il avait la garantie que son refus de reconnaître la décision d’enquête européenne pouvait également faire l’objet d’un contrôle juridictionnel. Il serait dénué de pertinence, au regard de la finalité de l’article 267 TFUE, que ce contrôle soit effectué par une juridiction de l’État membre à l’origine de la décision d’enquête européenne (la République fédérale d’Allemagne), laquelle
aurait toujours la possibilité de saisir la Cour ( 35 ).

58. Toutefois, la décision d’enquête européenne en cause en l’espèce n’a pas été émise par une juridiction, mais par un organe administratif, qui n’a pas non plus accès à la Cour par la voie de l’article 267 TFUE.

59. Pour s’en tenir au contexte dans lequel la question préjudicielle est posée, le parquet de Trente est enclin à considérer que la décision d’enquête européenne du Finanzamt Münster requiert la validation en cause. Cette prémisse établie, ce que le parquet de Trente demande à la Cour, c’est de confirmer son interprétation de la directive 2014/41.

60. Si la question préjudicielle était déclarée irrecevable, le parquet de Trente pourrait agir conformément à sa propre interprétation de la directive 2014/41 et refuser la reconnaissance demandée par le Finanzamt Münster. Étant donné que ce dernier, je le répète, ne pourrait pas non plus saisir la Cour à titre préjudiciel et qu’il n’est pas certain que la décision d’enquête européenne ait été émise dans le cadre d’une procédure judiciaire ( 36 ), il s’ensuivrait qu’aucune juridiction ne pourrait
céder la parole à la Cour afin qu’elle se prononce sur l’interprétation de cette directive.

61. Si l’on devait généraliser cette solution et conclure que le parquet de Trente ne peut pas saisir la Cour à titre préjudiciel dans les circonstances de l’espèce, cela créerait un angle mort dans l’interprétation d’une disposition du droit de l’Union. Telle est précisément la situation qu’il convient d’éviter, dans l’intérêt de l’unité de cet ordre juridique, ainsi qu’il a été souligné dans l’arrêt Gradbeništvo Korana.

62. Par ailleurs, le fait que la Cour a refusé, à l’époque, au parquet de Turin (Italie) la qualité d’organe habilité à saisir la Cour à titre préjudiciel (arrêt X) n’est pas en lui-même déterminant aux fins de la solution à adopter en l’espèce.

63. Certes, la jurisprudence issue de l’arrêt X reste pleinement valable. Toutefois, elle doit être appliquée en tenant compte du fait que le facteur à prendre en considération n’est pas uniquement le caractère organique ou institutionnel du parquet, mais aussi la fonction qu’il exerce, en tant qu’autorité d’exécution, dans le cadre de la procédure prévue par la directive 2014/41.

64. Contrairement à la situation qui prévalait dans l’arrêt X, où le parquet de Turin agissait en tant que partie à une procédure pénale devant un tribunal, le parquet de Trente intervient en l’espèce en tant qu’organe chargé de l’application définitive d’une règle du droit de l’Union au niveau national. Sur le plan fonctionnel, il agit comme le ferait un organe juridictionnel et il n’existe aucune voie de recours contre son refus de reconnaître la décision d’enquête européenne. Dès lors qu’il agit
en cette qualité, rien ne fait obstacle, à mon sens, à ce qu’il soit qualifié de « juridiction » au sens de l’article 267 TFUE.

65. Il me semble opportun de formuler une dernière observation.

66. Le fait que le parquet de Trente agisse comme une juridiction sur le plan matériel ou fonctionnel pourrait être le signe d’un dysfonctionnement de l’ordre juridique interne, car, en principe, tous les actes publics doivent pouvoir faire l’objet d’un contrôle juridictionnel ( 37 ).

67. Toutefois, la Cour n’a pas à se prononcer sur cette question en l’espèce, puisqu’elle n’a aucun rapport avec l’objet du renvoi préjudiciel. Même si, par hypothèse, le droit interne prévoyait un recours juridictionnel contre la décision du parquet de Trente portant refus de reconnaître une décision d’enquête européenne (question, j’insiste, étrangère à la présente procédure et qui, au demeurant, selon le gouvernement italien et la Commission, appellerait une réponse négative) ( 38 ), la
difficulté qui résulte de l’absence d’une voie d’accès à la Cour dans la situation factuelle concrète ayant donné lieu au présent renvoi préjudiciel ne serait pas résolue.

68. Pour résumer, le parquet de Trente, érigé en « juridiction » aux fins de statuer, en dernier ressort, sur le refus de reconnaître la décision d’enquête européenne, dans les termes exposés dans les présentes conclusions, est habilité à saisir la Cour de la présente question préjudicielle.

B.   Sur le fond

69. Conformément à l’article 1er, paragraphe 1, de la directive 2014/41, la décision d’enquête européenne est une « décision judiciaire » ( 39 ). Selon l’article 2, sous c), de cette directive, une telle décision peut être adoptée et émise par un juge ou un procureur ( 40 ) et, en outre, par tout organe qui « agit en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales, compétente pour ordonner l’obtention de preuves » ( 41 ).

70. Dans cette dernière hypothèse, les décisions d’enquête européenne émises par ces « autorité[s] chargée[s] des enquêtes » doivent être examinées « par un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur » ( 42 ), c’est-à-dire par les organes qui peuvent émettre une décision d’enquête européenne de leur propre chef.

71. Le libellé de l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41 me semble suffisamment concluant pour répondre par la négative à la question posée. Je souscris donc à la thèse défendue par les gouvernements italien et portugais ainsi que par la Commission.

72. Les raisons invoquées par le gouvernement allemand pour justifier l’attribution au Finanzamt des pouvoirs d’instruction dont il dispose dans le domaine fiscal en vertu du droit interne ne me paraissent pas incompatibles avec le droit de l’Union.

73. En particulier, cette attribution de pouvoirs est conforme à l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41, qui se réfère à « toute autre autorité compétente définie par l’État d’émission » qui « agit en qualité d’autorité chargée des enquêtes dans le cadre de procédures pénales, compétente pour ordonner l’obtention de preuves conformément au droit national » ( 43 ).

74. Toutefois, là n’est pas le problème.

75. Le problème est que, bien que les États membres se voient reconnaître la faculté de désigner les autorités habilitées à enquêter dans le cadre de procédures pénales et à ordonner l’obtention de preuves, l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41 n’attribue pas aux autorités ainsi désignées d’autre fonction que celle consistant à choisir d’émettre une décision d’enquête européenne, laquelle, « avant d’être transmise à l’autorité d’exécution, [...] est validée » ; et elle doit l’être
spécifiquement par un juge, une juridiction ou un procureur.

76. Le Finanzamt Münster est indéniablement une institution à caractère administratif, de sorte que, en vertu de la directive 2014/41, il n’est pas habilité à émettre, seul, une décision d’enquête européenne. Plus précisément, il n’est pas habilité à la transmettre à l’autorité d’exécution sans validation préalable d’une autorité judiciaire, c’est-à-dire d’un juge, d’une juridiction ou d’un procureur, conformément à l’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41.

77. Le gouvernement allemand soutient que, faisant usage de son autonomie procédurale, il a confié au Finanzamt, dans le domaine fiscal, l’exercice de fonctions propres au ministère public, en lui conférant les droits et obligations qui caractérisent celui-ci. Il s’agirait d’une exception prévue par la loi, qui abroge le monopole du ministère public en matière d’enquêtes pénales.

78. Cette attribution du Finanzamt fait-elle de lui un « procureur » au sens de la directive 2014/41 ? Je ne le crois pas.

79. Le fait que le droit interne confie au Finanzamt, dans le domaine de la poursuite des infractions fiscales, des pouvoirs d’instruction équivalents à ceux du ministère public n’est pas suffisant pour mettre ces deux institutions sur le même plan dans le contexte de la directive 2014/41.

80. Ainsi que le souligne la Commission, le Finanzamt est une autorité administrative chargée de la gestion des affaires fiscales et fait partie du pouvoir exécutif. Même si le droit allemand lui confère des pouvoirs limités pour enquêter sur certaines infractions, il existe une distinction nette entre l’administration fiscale et le ministère public. Le Finanzamt n’a pas la plénitude de compétence dont dispose le ministère public et ne saurait donc être assimilé à ce dernier en tant qu’autorité
d’émission d’une décision d’enquête européenne.

81. La raison d’être de l’article 2 de la directive 2014/41 est que les autorités administratives, quelles que soient leurs compétences en vertu du droit interne, doivent obtenir la validation des autorités judiciaires (en ce compris le procureur) pour transmettre une décision d’enquête européenne.

82. Cette raison d’être disparaîtrait si les États membres pouvaient, purement et simplement, permettre aux autorités relevant du pouvoir exécutif de transmettre des décisions d’enquête européenne non validées par les autorités judiciaires (en ce compris le procureur), en assimilant, à cet effet, les unes aux autres.

83. À cet argument s’en ajoute un autre, relatif au rôle que jouent les autorités proprement judiciaires (en ce compris le procureur) s’agissant des décisions d’enquête européenne.

84. Selon le considérant 12 de la directive 2014/41, l’autorité d’émission est tenue d’accorder une attention particulière à la garantie des droits fondamentaux, dans la mesure où « [l]a présomption d’innocence et les droits de la défense dans une procédure pénale sont des pierres angulaires des droits fondamentaux reconnus par la [C]harte dans le domaine de la justice pénale ».

85. C’est pourquoi le législateur de l’Union a insisté sur le fait que « [t]oute limitation de l’exercice de ces droits par une mesure d’enquête ordonnée conformément à la présente directive devrait pleinement respecter les exigences établies à l’article 52 de la [C]harte en ce qui concerne son caractère nécessaire et proportionné et les objectifs auxquels elle devrait répondre, notamment le besoin de protection des droits et libertés d’autrui » ( 44 ).

86. Ainsi, l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2014/41 n’autorise l’émission d’une décision d’enquête européenne que si elle est « nécessaire et proportionnée [...] compte tenu des droits du suspect ou de la personne poursuivie ». À cela s’ajoute le fait que l’autorité d’émission doit tenir compte, conformément à l’article 6, paragraphe 2, de cette directive, d’une série de directives relatives aux droits procéduraux dans le cadre des procédures pénales ( 45 ).

87. L’autorité d’émission d’une décision d’enquête européenne est donc tenue, au bénéfice d’une mise en balance adéquate de l’intérêt général et des droits fondamentaux éventuellement concernés, de procéder à un contrôle de nécessité et de proportionnalité pour lequel il est indispensable d’occuper une position institutionnelle qui ne soit pas celle des organes administratifs.

88. Même lorsqu’un organe administratif tel que le Finanzamt se voit attribuer des pouvoirs propres au ministère public, cette attribution ne fait pas de cet organe une « autorité judiciaire » au sens de la directive 2014/41, susceptible d’effectuer ce contrôle de nécessité et de proportionnalité.

89. La compétence matérielle qualifiée qui a conduit le législateur allemand à attribuer aux Finanzamt des pouvoirs dans le domaine de l’instruction des infractions fiscales démontre qu’il s’agit d’organes hautement spécialisés dans ce domaine particulier. Toutefois, cette spécialisation ne suffit pas, au regard de l’économie de la directive 2014/41, pour considérer qu’ils disposent de la vision d’ensemble ou de la compétence, plus générale, qu’exige la mise en balance de droits et d’intérêts devant
précéder le choix d’émettre une décision d’enquête européenne.

90. La Cour a jugé que la notion d’« autorité judiciaire » ne se limite pas « à désigner les seuls juges ou juridictions d’un État membre, mais [doit] s’entendre comme désignant, plus largement, les autorités participant à l’administration de la justice pénale » ( 46 ), mais toujours à l’exclusion des autorités administratives, qui relèvent du pouvoir exécutif ( 47 ).

91. Sans nécessairement jouir de l’indépendance propre aux tribunaux, le ministère public n’est pas une institution soumise au pouvoir exécutif en matière d’assujettissement et de subordination, lesquels caractérisent les autorités administratives. Il est vrai que, dans certains systèmes juridiques, les membres du parquet peuvent recevoir des instructions individuelles de la part du pouvoir exécutif, mais ils bénéficient néanmoins d’un statut d’autonomie qui les distingue des organes dudit pouvoir (
48 ).

92. La position institutionnelle du ministère public en tant que garant de la légalité devant les tribunaux en fait un véritable participant à l’administration de la justice, car il ne sert pas exclusivement ni principalement l’intérêt de l’administration publique, mais l’intérêt général tenant au respect de la loi. C’est pourquoi l’article 2 de la directive 2014/41 place le ministère public sur un pied d’égalité avec les juges ( 49 ).

93. L’exercice ponctuel de fonctions d’instruction, analogues à celles du ministère public, ne signifie pas que le Finanzamt cesse d’être un organe administratif soumis, en tant que tel, sur les plans structurel et fonctionnel, à la hiérarchie de l’administration et, en particulier, un organe dépourvu de la compétence indispensable pour effectuer le contrôle de nécessité et la mise en balance exigés par la directive 2014/41. Ce contrôle et cette mise en balance vont au-delà de la prise en compte de
l’intérêt particulier de l’administration fiscale et englobent l’intérêt général de l’État membre dans son ensemble ainsi que la garantie des droits fondamentaux des citoyens de l’Union européenne.

V. Conclusion

94. Eu égard à ce qui précède, je propose à la Cour de répondre à la Procura Distrettuale della Repubblica presso il Tribunale ordinario di Trento (parquet de district de la République près le tribunal ordinaire de Trente, Italie) dans les termes suivants :

L’article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41/UE du Parlement européen et du Conseil, du 3 avril 2014, concernant la décision d’enquête européenne en matière pénale doit être interprété en ce sens qu’il ne permet pas à un État membre de dispenser les autorités administratives nationales compétentes en matière fiscale, y compris lorsqu’elles sont habilitées à instruire certaines procédures pénales, de l’obligation de demander, avant la transmission d’une décision d’enquête européenne à
l’autorité d’exécution, sa validation par un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur de l’État d’émission.

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( 1 ) Langue originale : l’espagnol.

( 2 ) Il s’agit, en l’occurrence, du Finanzamt für Steuerstrafsachen und Steuerfahndung Münster (service des affaires fiscales pénales et des enquêtes fiscales de Münster, Allemagne ; ci-après le « Finanzamt Münster » ou le « Finanzamt »).

( 3 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 3 avril 2014 concernant la décision d’enquête européenne en matière pénale (JO 2014, L 130, p. 1, et rectificatif JO 2015, L 143, p. 16).

( 4 ) La Procura Distrettuale della Repubblica presso il Tribunale ordinario di Trento (parquet de district de la République près le tribunal ordinaire de Trente, Italie ; ci-après le « parquet de Trente »).

( 5 ) La Cour s’est prononcée sur la capacité du ministère public à émettre, en qualité d’« autorité judiciaire », un mandat d’arrêt européen dans les arrêts du 27 mai 2019, OG et PI (Parquets de Lübeck et de Zwickau) [C‑508/18 et C‑82/19 PPU, ci-après l’ arrêt OG et PI (Parquets de Lübeck et de Zwickau) , EU:C:2019:456], et du 27 mai 2019, PF (Procureur général de Lituanie) (C‑509/18, EU:C:2019:457). Elle s’est également penchée sur la compétence du ministère public pour émettre une décision
d’enquête européenne dans l’arrêt du 8 décembre 2020, Staatsanwaltschaft Wien (Ordres de virement falsifiés) [C‑584/19, ci-après l’ arrêt Staatsanwaltschaft Wien (Ordres de virement falsifiés) , EU:C:2020:1002].

( 6 ) Interrogation à laquelle la Cour a apporté une réponse négative dans l’arrêt du 12 décembre 1996, X (C‑74/95 et C‑129/95, ci-après l’ arrêt X , EU:C:1996:491).

( 7 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 20 octobre 2010 relative au droit à l’interprétation et à la traduction dans le cadre des procédures pénales (JO 2010, L 280, p. 1).

( 8 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 22 mai 2012 relative au droit à l’information dans le cadre des procédures pénales (JO 2012, L 142, p. 1).

( 9 ) Directive du Parlement européen et du Conseil du 22 octobre 2013 relative au droit d’accès à un avocat dans le cadre des procédures pénales et des procédures relatives au mandat d’arrêt européen, au droit d’informer un tiers dès la privation de liberté et au droit des personnes privées de liberté de communiquer avec des tiers et avec les autorités consulaires (JO 2013, L 294, p. 1).

( 10 ) GURI no 162, du 13 juillet 2017.

( 11 ) Régis par la décision-cadre 2002/584/JAI du Conseil, du 13 juin 2002, relative au mandat d’arrêt européen et aux procédures de remise entre États membres (JO 2002, L 190, p. 1), telle que modifiée par la décision-cadre 2009/299/JAI du Conseil, du 26 février 2009 (JO 2009, L 81, p. 24).

( 12 ) C‑453/16 PPU, EU:C:2016:860.

( 13 ) Elle leur a demandé si, eu égard au droit de l’Union, la décision, prise par une « autorité d’exécution », au sens de l’article 2, sous d), de la directive 2014/41, autre qu’un juge ou une juridiction, de ne pas reconnaître la décision d’enquête européenne doit être soumise à un contrôle juridictionnel.

( 14 ) La Cour a demandé au gouvernement italien d’expliciter la procédure de reconnaissance et d’exécution de la décision d’enquête européenne par un procureur de la République italienne et d’indiquer les hypothèses dans lesquelles un juge ou une juridiction sont éventuellement amenés à intervenir dans cette procédure et celles dans lesquelles ce procureur est le seul à intervenir. Le gouvernement italien était également invité à détailler les voies de recours prévues par le droit national en cas
de refus de reconnaissance ou d’exécution de la décision d’enquête européenne.

( 15 ) Arrêt du 21 janvier 2020, Banco de Santander (C‑274/14, ci-après l’ arrêt Banco de Santander , EU:C:2020:17).

( 16 ) Arrêt du 30 juin 1966 (61/65, ci-après l’ arrêt Vaassen-Göbbels , EU:C:1966:39).

( 17 ) Arrêt Banco de Santander, point 51 et jurisprudence citée.

( 18 ) Arrêt du 6 octobre 1981, Broekmeulen (246/80, ci-après l’ arrêt Broekmeulen , EU:C:1981:218).

( 19 ) Arrêt du 29 novembre 2001, De Coster (C‑17/00, EU:C:2001:651).

( 20 ) Ainsi que l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer l’a indiqué dans ses conclusions dans l’affaire Umweltanwalt von Kärnten (C‑205/08, ci-après les « conclusions Umweltanwalt von Kärnten », EU:C:2009:397, point 25). Selon lui, l’évolution de la jurisprudence avait admis « un amalgame hétérogène d’institutions qui ne cadr[ait] pas toujours avec l’esprit juridictionnel qui sous-tend[ait] l’article [267 TFUE] ». Il s’inscrivait ainsi dans la lignée de ses conclusions dans l’affaire De Coster
(C‑17/00, ci-après les  conclusions De Coster , EU:C:2001:366, point 14).

( 21 ) Arrêt Banco de Santander, point 55.

( 22 ) Avis 2/13, du 18 décembre 2014 (ci-après l’« avis 2/13 », EU:C:2014:2454, point 174).

( 23 ) Avis 2/13, point 176. Mise en italique par mes soins.

( 24 ) Ce sont en définitive les juges qui, en disant le droit (jus dicere) de manière irrévocable dans un cas concret, garantissent que le processus normatif et décisionnel qui emporte l’application finale des dispositions générales et abstraites de l’ordre juridique a été mis en œuvre de la manière prescrite par ce dernier. Je renvoie, à cet égard, à mes conclusions dans les affaires OG et PI (Parquets de Lübeck et de Zwickau) (C‑508/18 et C‑82/19 PPU, EU:C:2019:337, point 66). Dans le même sens,
j’ai indiqué, dans mes conclusions dans l’affaire PF (Procureur général de Lituanie) (C‑509/18, EU:C:2019:338, point 27), que le rôle du juge « consiste à avoir le dernier mot, lequel emporte l’application du droit de sorte que la réponse donnée, qui a force de chose jugée, soit conforme au droit et soit, en tant que telle, valide ». La compétence pour garantir la régularité de ce dernier mot dans l’ordre juridique détermine à ce point son rôle que « le respect du droit pourrait être considéré comme
n’étant pas un moyen pour le juge, mais un objectif en soi. Plus précisément, il s’agit de l’unique objectif qu’il se doit d’atteindre » (point 28 de ces conclusions).

( 25 ) Avis 2/13, point 176.

( 26 ) Parmi les principes de l’État de droit figure l’exigence que les juges aient le dernier mot, car la soumission des pouvoirs publics à la loi est garantie par l’éventualité du contrôle juridictionnel de tous les actes de ces derniers, sans exception aucune. À cette garantie s’ajoute celle qui est reconnue aux individus en tant que titulaires du droit à un recours effectif, visée à l’article 47 de la Charte. Dans une disposition récente du droit de l’Union, l’« État de droit » est défini comme
« la valeur de l’Union consacrée à l’article 2 du traité sur l’Union européenne », qui recouvre, entre autres principes, celui de la « protection juridictionnelle effective [...] assurée par des juridictions [...], également en ce qui concerne les droits fondamentaux » [article 2, sous a), du règlement (UE, Euratom) 2020/2092 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2020, relatif à un régime général de conditionnalité pour la protection du budget de l’Union (JO 2020, L 433I, p. 1)].

( 27 ) Conclusions Umweltanwalt von Kärnten, point 35. La Cour s’est ainsi efforcée « d’accueillir les traditions constitutionnelles communes au sein d’un dialogue préjudiciel européen » (point 36 de ces conclusions).

( 28 ) Curieusement, le critère de l’indépendance judiciaire n’en faisait pas partie. L’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer a souligné dans les conclusions De Coster, point 17, que le critère de l’indépendance avait été mentionné pour la première fois dans l’arrêt du 11 juin 1987, X (14/86, EU:C:1987:275), et n’avait été admis sans condition que dans l’arrêt du 30 mars 1993, Corbiau (C‑24/92, EU:C:1993:118).

( 29 ) En dépit du fait que le droit interne les qualifiait explicitement d’« organes administratifs ». Tel a été le cas, par exemple, du Tribunal Català de Contractes del Sector Públic (tribunal catalan des marchés du secteur public, Espagne), qui est une institution administrative en vertu du droit espagnol, que l’arrêt du 6 octobre 2015, Consorci Sanitari del Maresme (C‑203/14, EU:C:2015:664), a considéré comme étant une « juridiction » au sens de l’article 267 TFUE.

( 30 ) Arrêt Broekmeulen, point 17 : « en l’absence pratique d’une voie de recours effective devant les juridictions ordinaires, dans une matière qui touche à l’application du droit [de l’Union], la commission de recours », dont les décisions « sont en fait reconnues comme définitives, doit être considérée comme juridiction d’un État membre au sens de l’article [267 TFUE] ». Mise en italique par mes soins.

( 31 ) Arrêt du 28 février 2019, Gradbeništvo Korana (C‑579/17, ci-après l’« arrêt Gradbeništvo Korana », EU:C:2019:162, point 35). Mise en italique par mes soins.

( 32 ) Conclusions Umweltanwalt von Kärnten, points 40 à 49.

( 33 ) Arrêt du 17 septembre 1997, Dorsch Consult (C‑54/96, EU:C:1997:413, point 31).

( 34 ) Tel est le sens explicite de la réponse écrite (point 8) du gouvernement italien à la question que la Cour lui a posée, évoquée à la note 14 des présentes conclusions.

( 35 ) Dans son arrêt du 25 juillet 2018, AY (Mandat d’arrêt – Témoin) (C‑268/17, EU:C:2018:602), la Cour a admis la possibilité qu’une juridiction de l’État membre d’origine ait recours à l’article 267 TFUE à l’occasion de l’interprétation du droit de l’Union adoptée par les autorités de l’État membre d’exécution. Par conséquent, le fait que l’interprétation du droit de l’Union dans un État membre puisse entraîner le retrait par la juridiction d’un autre État membre d’un mandat d’arrêt européen qui
lui a été adressé a conduit la Cour à conclure qu’« il ne saurait être prétendu que les questions posées n’ont aucun rapport avec la réalité ou l’objet de la procédure pendante devant la juridiction de renvoi ni que le problème est de nature hypothétique » (point 27 de cet arrêt).

( 36 ) Dans ses observations écrites (point 54), le gouvernement allemand affirme que la décision d’enquête européenne du Finanzamt Münster a été précédée d’une ordonnance de perquisition et de saisie de l’Amtsgericht Münster (tribunal de district de Münster, Allemagne). Cependant, il n’indique pas si la décision d’enquête européenne se limite à reprendre le contenu de cette ordonnance judiciaire – auquel cas il conviendrait d’imputer la décision d’enquête européenne à l’Amtsgericht Münster
(tribunal de district de Münster) –, ou si cette dernière a servi de fondement général à l’adoption d’une décision dont le contenu précis est le fait du seul Finanzamt. En tout état de cause, on ne saurait écarter des décisions d’enquête européenne émises par des organes administratifs avant l’ouverture formelle d’une procédure judiciaire.

( 37 ) Voir, à cet égard, point 41 des présentes conclusions.

( 38 ) La Commission s’est prononcée en ce sens dans sa réponse écrite à la question de la Cour évoquée dans la note 13 des présentes conclusions. Telle est également la position du gouvernement italien (points 22 à 30 de sa réponse).

( 39 ) Le gouvernement allemand a souligné (points 38 à 43 de ses observations écrites) que, à la différence d’autres versions linguistiques, la version en langue allemande de cette disposition n’utilise pas l’adjectif « judiciaire » (« justizielle »), mais le terme « juridictionnelle » (« gerichtliche »). Cette divergence ne me paraît pas pertinente, car la référence explicite aux procureurs, figurant à l’article 2, sous c), de la directive 2014/41, montre que la décision d’enquête européenne n’est
pas conçue comme une décision prise dans tous les cas par un organe qui exerce une compétence juridictionnelle au sens strict.

( 40 ) Plus précisément, selon l’article 2, sous c), i), de la directive 2014/41, par « un juge, une juridiction, un juge d’instruction ou un procureur compétent(e) dans l’affaire concernée ».

( 41 ) Article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41.

( 42 ) Article 2, sous c), ii), de la directive 2014/41.

( 43 ) Mise en italique par mes soins.

( 44 ) Mise en italique par mes soins.

( 45 ) Les directives 2010/64, 2012/13 et 2013/48. Voir point 4 ainsi que notes 7, 8 et 9 des présentes conclusions.

( 46 ) Arrêt OG et PI (Parquets de Lübeck et de Zwickau), point 50.

( 47 ) Arrêt du 10 novembre 2016, Poltorak (C‑452/16 PPU, EU:C:2016:858, point 35).

( 48 ) La soumission du ministère public à des instructions individuelles du pouvoir exécutif a pour conséquence qu’il ne peut pas émettre un mandat d’arrêt européen [arrêt OG et PI (Parquets de Lübeck et de Zwickau)], mais ne l’empêche pas d’émettre une décision d’enquête européenne [arrêt Staatsanwaltschaft Wien (Ordres de virement falsifiés)].

( 49 ) Dans l’arrêt du 2 mars 2021, Prokuratuur (Conditions d’accès aux données relatives aux communications électroniques) (C‑746/18, EU:C:2021:152), pour le cas spécifique de l’accès aux données relatives au trafic et aux données de localisation aux fins d’une instruction pénale, la Cour a interprété la directive 2002/58/CE du Parlement européen et du Conseil, du 12 juillet 2002, concernant le traitement des données à caractère personnel et la protection de la vie privée dans le secteur des
communications électroniques (directive vie privée et communications électroniques) (JO 2002, L 201, p. 37), telle que modifiée par la directive 2009/136/CE du Parlement européen et du Conseil, du 25 novembre 2009 (JO 2009, L 337, p. 11), en ce sens qu’elle s’oppose à une réglementation nationale donnant compétence au ministère public pour autoriser cet accès, dès lors qu’il dirige la procédure d’instruction pénale et exerce, le cas échéant, l’action publique.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-66/20
Date de la décision : 11/03/2021
Type de recours : Recours préjudiciel - irrecevable

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par la Procura della Repubblica di Trento.

Renvoi préjudiciel – Article 267 TFUE – Notion de “juridiction nationale” – Critères – Procura della Repubblica di Trento (parquet de la République de Trente, Italie) – Irrecevabilité de la demande de décision préjudicielle.

Coopération policière

Espace de liberté, de sécurité et de justice

Coopération judiciaire en matière pénale


Parties
Demandeurs : XK.

Composition du Tribunal
Avocat général : Campos Sánchez-Bordona

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2021:200

Source

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