ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
20 juin 2019 ( *1 )
« Renvoi préjudiciel – Union douanière – Règlement (CEE) no 2913/92 – Article 30, paragraphe 2, sous b) et c) – Règlement (CEE) no 2454/93 – Article 152, paragraphe 1, sous a) et b) – Détermination de la valeur en douane des marchandises – Notion de “marchandises similaires” – Médicaments – Prise en compte de tout élément pouvant avoir une incidence sur la valeur économique du médicament concerné – Délai de 90 jours dans lequel les marchandises importées doivent être vendues dans l’Union
européenne – Délai de rigueur – Absence de prise en compte des remises commerciales »
Dans l’affaire C‑1/18,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie), par décision du 15 décembre 2017, parvenue à la Cour le 2 janvier 2018, dans la procédure
« Oribalt Rīga » SIA, anciennement « Oriola Rīga » SIA,
contre
Valsts ieņēmumu dienests,
LA COUR (cinquième chambre),
composée de M. E. Regan (rapporteur), président de chambre, MM. C. Lycourgos, E. Juhász, M. Ilešič et I. Jarukaitis, juges,
avocat général : M. N. Wahl,
greffier : Mme C. Strömholm, administratrice,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 29 novembre 2018,
considérant les observations présentées :
– pour « Oribalt Rīga » SIA, par Mes A. Leškoviča et J. Taukačs, advokāti, ainsi que par Me Carri Ginter, vandeadvokaat,
– pour le gouvernement letton, par Mmes I. Kucina et J. Davidoviča, en qualité d’agents,
– pour la Commission européenne, par M. A. Sauka et Mme F. Clotuche-Duvieusart, en qualité d’agents,
ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 24 janvier 2019,
rend le présent
Arrêt
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 30, paragraphe 2, sous b) et c), du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire (JO 1992, L 302, p. 1), tel que modifié par le règlement (CE) no 82/97 du Parlement européen et du Conseil, du 19 décembre 1996 (JO 1997, L 17, p. 1) (ci-après « le code des douanes »), ainsi que de l’article 151, paragraphe 4, et de l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement
(CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement no 2913/92 (JO 1993, L 253, p. 1, ci-après « le règlement d’application »).
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant « Oribalt Rīga » SIA, anciennement « Oriola Rīga » SIA, au Valsts ieņēmumu dienests (administration fiscale lettone) au sujet d’une décision du directeur général de celle-ci ayant imposé à cette société de régler au Trésor public un supplément de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), des intérêts de retard et une amende.
Le cadre juridique
Le code des douanes
3 Aux termes de l’article 29, paragraphe 1, du code des douanes :
« La valeur en douane des marchandises importées est leur valeur transactionnelle, c’est-à-dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de la Communauté, le cas échéant, après ajustement effectué conformément aux articles 32 et 33 [...] »
4 L’article 30 de ce code dispose :
« 1. Lorsque la valeur en douane ne peut être déterminée par application de l’article 29, il y a lieu de passer successivement aux lettres a), b), c) et d) du paragraphe 2 jusqu’à la première de ces lettres qui permettra de la déterminer, sauf si l’ordre d’application des points c) et d) doit être inversé à la demande du déclarant ; c’est seulement lorsque cette valeur en douane ne peut être déterminée par application d’une lettre donnée qu’il est loisible d’appliquer la lettre qui vient
immédiatement après celle-ci dans l’ordre établi en vertu du présent paragraphe.
2. Les valeurs en douane déterminées par application du présent article sont les suivantes :
a) valeur transactionnelle de marchandises identiques, vendues pour l’exportation à destination de la Communauté et exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer ;
b) valeur transactionnelle de marchandises similaires, vendues pour l’exportation à destination de la Communauté et exportées au même moment ou à peu près au même moment que les marchandises à évaluer ;
c) valeur fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes dans la Communauté des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, ainsi faites à des personnes non liées aux vendeurs ;
d) valeur calculée, égale à la somme :
– du coût ou de la valeur des matières et des opérations de fabrication ou autres, mises en œuvre pour produire les marchandises importées,
– d’un montant représentant les bénéfices et les frais généraux égal à celui qui entre généralement dans les ventes de marchandises de la même nature ou de la même espèce que les marchandises à évaluer, qui sont faites par des producteurs du pays d’exportation pour l’exportation à destination de la Communauté,
– du coût ou de la valeur des éléments énoncés à l’article 32 paragraphe 1 point e).
[...] »
5 L’article 31 dudit code prévoit :
« 1. Si la valeur en douane des marchandises importées ne peut être déterminée par application des articles 29 et 30, elle est déterminée, sur la base des données disponibles dans la Communauté, par des moyens raisonnables compatibles avec les principes et les dispositions générales :
– de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994,
– de l’article VII de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce de 1994
et
– des dispositions du présent chapitre.
[...] »
Le règlement d’application
6 L’article 142, paragraphe 1, du règlement d’application prévoit :
« Au sens du présent titre on entend par :
[...]
d) “marchandises similaires” : des marchandises produites dans le même pays qui, sans être pareilles à tous égards, présentent des caractéristiques semblables et sont composées de matières semblables, ce qui leur permet de remplir les mêmes fonctions et d’être commercialement interchangeables ; la qualité des marchandises, leur réputation et l’existence d’une marque de fabrique ou de commerce font partie des éléments à prendre en considération pour déterminer si des marchandises sont similaires ;
[...] »
7 Aux termes de l’article 151 de ce règlement :
« 1. Aux fins de l’application de l’article 30, paragraphe 2, point b) du code [des douanes] (valeur transactionnelle de marchandises similaires), la valeur en douane est déterminée par référence à la valeur transactionnelle de marchandises similaires, vendues au même niveau commercial et sensiblement en même quantité que les marchandises à évaluer. En l’absence de telles ventes, il y a lieu de se référer à la valeur transactionnelle de marchandises similaires, vendues à un niveau commercial
différent et/ou en quantité différente, ajustées pour tenir compte des différences que le niveau commercial et/ou la quantité auraient pu entraîner, à la condition que de tels ajustements, qu’ils conduisent à une augmentation ou une diminution de la valeur, puissent se fonder sur des éléments de preuve produits établissant clairement qu’ils sont raisonnables et exacts.
[...]
4. Aux fins de l’application du présent article, une valeur transactionnelle de marchandises produites par une personne différente n’est prise en considération que si aucune valeur transactionnelle de marchandises similaires, produites par la même personne que les marchandises à évaluer, ne peut être constatée en application du paragraphe 1.
[...] »
8 L’article 152 dudit règlement dispose :
« 1.
a) Si les marchandises importées ou des marchandises identiques ou similaires importées sont vendues dans la Communauté en l’état, la valeur en douane des marchandises importées visée à l’article 30, paragraphe 2, point c), du code [des douanes] est fondée sur le prix unitaire correspondant aux ventes des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, faites à des personnes non liées aux vendeurs au moment ou à peu près au moment
de l’importation des marchandises à évaluer, sous réserve de déductions se rapportant aux éléments suivants :
i) commissions généralement payées ou convenues, ou marges généralement pratiquées pour bénéfices et frais généraux (y compris les coûts directs ou indirects de la commercialisation des marchandises en question) relatifs aux ventes, dans la Communauté, de marchandises importées de la même nature ou de la même espèce ;
ii) frais habituels de transport et d’assurance, ainsi que frais connexes encourus dans la Communauté ;
iii) droits à l’importation et autres impositions à payer dans la Communauté en raison de l’importation ou de la vente des marchandises.
b) Au cas où les marchandises importées ou les marchandises identiques ou similaires importées ne sont pas vendues au moment ou à peu près au moment de l’importation des marchandises à évaluer, la valeur en douane des marchandises importées, déterminée en application du présent article, est fondée, sous réserve par ailleurs des dispositions du paragraphe 1, point a), sur le prix unitaire auquel les marchandises importées ou des marchandises identiques ou similaires importées sont vendues dans la
Communauté en l’état à la date la plus proche suivant l’importation des marchandises à évaluer, mais en tout cas dans les quatre-vingt-dix jours à compter de cette importation.
[...]
5. Aux fins de l’application du paragraphe 1, point b), la “date la plus proche” est la date à laquelle les marchandises importées ou des marchandises identiques ou similaires importées sont vendues en quantité suffisante pour que le prix unitaire puisse être établi. »
9 L’annexe 23 du règlement d’application, intitulée « Notes interprétatives en matière de valeur en douane », prévoit, en ce qui concerne l’interprétation de l’article 31, paragraphe 1, du code des douanes, que « les méthodes d’évaluation à employer en vertu de [cette disposition] sont celles que définissent les articles 29 à 30, paragraphe 2, inclus, [de ce code] mais une souplesse raisonnable dans l’application de ces méthodes serait conforme aux objectifs et aux dispositions de l’article 31,
paragraphe [1], [dudit code] ». À cet effet, ladite annexe prévoit certains exemples aux fins d’illustrer ce qu’il convient d’entendre par « souplesse raisonnable ». Ainsi, pour ce qui concerne l’application de la méthode déductive, il est indiqué que « le délai de “quatre-vingt-dix jours” [prévu à l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement d’application] pourrait être modulé avec souplesse ».
Le litige au principal et les questions préjudicielles
10 La requérante au principal, Oribalt Rīga, et la société indienne Ranbaxy Laboratories Ltd ont conclu, au cours de l’année 2005, un contrat de consignation en vertu duquel Ranbaxy Laboratories a désigné Oribalt Rīga comme fournisseur exclusif de services de stockage en consignation en Lettonie, en Lituanie et en Estonie pour les médicaments génériques importés par ce laboratoire (ci-après les « médicaments en cause ») et l’a chargée de leur déclaration aux fins de leur mise en libre pratique.
Oribalt Rīga s’engageait à garantir une surface d’entreposage suffisante et des services de manutention pour honorer les commandes des clients de Ranbaxy Laboratories sans acquérir la propriété des médicaments en cause.
11 Lorsque Oribalt Rīga a placé les médicaments en cause sous régime douanier, elle a effectué des déclarations en douane aux termes desquelles elle s’est désignée à la fois comme destinataire de ces médicaments et comme déclarant.
12 La valeur en douane des médicaments en cause a été calculée par Oribalt Rīga selon la méthode dite « de la valeur transactionnelle », prévue à l’article 29, paragraphe 1, du code des douanes. Cette valeur en douane a été déterminée au moyen de factures pro forma établies par Ranbaxy Laboratories, présentées au bureau des douanes, comportant des informations sur le type de marchandises importées, le prix unitaire sur le marché au moment de cette facturation et le prix total.
13 Ranbaxy Laboratories déterminait à qui les médicaments en cause seraient vendus, les modalités et le prix de vente, ainsi que les remises de prix applicables. Lors de l’exécution des commandes, Oribalt Rīga émettait des factures au prix de vente fixé par Ranbaxy Laboratories.
14 Oribalt Rīga, qui stockait les médicaments en cause dans son entrepôt, avait pour mission de vendre en priorité les médicaments en cause dont la date de péremption était la plus proche. Plusieurs mois pouvaient ainsi s’écouler entre l’importation de ces médicaments et leur vente aux clients finals, de sorte que leur valeur au moment de la vente pouvait différer de leur valeur sur le marché au moment de leur importation. Le prix de vente des médicaments en cause pouvait également être influencé
par les remises consenties par Ranbaxy Laboratories à ses clients. Après la vente des médicaments en cause, Ranbaxy Laboratories émettait donc de nouvelles factures à l’intention d’Oribalt Rīga, sur la base desquelles celle-ci payait à Ranbaxy Laboratories les marchandises importées, destinées à être mises en libre pratique sur le territoire de l’Union européenne. Oribalt Rīga percevait une commission de pour son rôle d’intermédiaire.
15 Du 20 octobre 2010 au 10 janvier 2011, la Muitas audita pārvalde (direction du contrôle douanier, Lettonie) a procédé à un contrôle du calcul, du paiement et de la comptabilité des droits de douane et d’autres impôts gérés par les services douaniers dus par Oribalt Rīga pour la période allant du 1er février 2008 au 31 août 2010.
16 Par décision du 20 mai 2011, l’administration fiscale lettone a rejeté la valeur en douane des médicaments en cause importés durant cette période, déterminée par Oribalt Rīga selon la méthode de la valeur transactionnelle. En effet, selon cette décision, la valeur des marchandises importées aurait dû être déterminée par application de la méthode déductive, prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes, en prenant comme point de départ le prix des médicaments en cause figurant
sur les factures adressées aux clients de Ranbaxy Laboratories, mais sans tenir compte des remises appliquées. Le directeur général de l’administration fiscale lettone a ainsi imposé à Oribalt Rīga un supplément de TVA, des intérêts de retard et une amende.
17 À la suite du rejet de son recours contre la décision de l’administration fiscale lettone par l’Administratīvā rajona tiesa (tribunal administratif de district, Lettonie), Oribalt Rīga a interjeté appel devant l’Administratīvā apgabaltiesa (cour administrative régionale, Lettonie) en soutenant que cette administration devait et pouvait obtenir les informations nécessaires pour pouvoir déterminer la valeur en douane des marchandises selon les premières méthodes de détermination disponibles et que,
si ladite administration appliquait la méthode déductive mentionnée à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes, elle aurait dû utiliser les informations relatives à la revente de ces marchandises ou de marchandises identiques à une date aussi proche que possible de la date d’importation desdites marchandises, sans dépasser le délai de 90 jours prévu à l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement d’application. Enfin, elle fait valoir que la base du calcul de la valeur en
douane résidait dans le prix de vente réel des médicaments en cause, si bien qu’il y avait lieu de tenir compte de la remise accordée aux clients de Ranbaxy Laboratories.
18 L’Administratīvā apgabaltiesa (cour administrative régionale) ayant confirmé la décision de l’administration fiscale lettone, Oribalt Rīga s’est pourvue en cassation devant la juridiction de renvoi, l’Augstākā tiesa (Cour suprême, Lettonie).
19 Cette juridiction estime que la solution de l’affaire dont elle est saisie dépend d’une interprétation par la Cour de l’article 30 du code des douanes ainsi que des articles 151 et 152 du règlement d’application. Dans ces conditions, l’Augstākā tiesa (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :
« 1) Dans les cas où les marchandises importées sont des médicaments, faut-il, pour déterminer la valeur en douane desdites marchandises conformément à l’article 30, paragraphe 2, sous b), du [code des douanes] et à l’article 151, paragraphe 4, du règlement [d’application], considérer comme “marchandises similaires” des médicaments composés d’une substance active et d’une quantité de celle-ci identiques (similaires), ou bien faut-il, pour identifier des marchandises similaires, tenir compte
également de la position de marché du médicament importé concerné et de son fabricant, c’est-à-dire de la popularité et de la demande ?
2) Faut-il, pour déterminer la valeur en douane des marchandises importées conformément à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du [code des douanes], appliquer avec souplesse le délai de 90 jours figurant à l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement [d’application] ?
3) Si le délai prescrit doit être appliqué avec souplesse, quelles sont alors, dans la présente affaire, les données à privilégier ? S’agit-il des données concernant les transactions portant sur des marchandises identiques ou similaires les plus proches du moment de l’importation des marchandises à évaluer, vendues en quantité totale suffisante pour déterminer le prix unitaire, ou bien des données concernant les transactions plus éloignées portant concrètement sur les marchandises importées ?
4) Faut-il, pour déterminer la valeur en douane des marchandises importées conformément à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du [code des douanes], appliquer les réductions accordées qui ont déterminé le prix de vente réel des marchandises ? »
Sur les questions préjudicielles
Sur la première question
20 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, quels sont les facteurs à prendre en compte pour identifier des « marchandises similaires » lorsque la valeur en douane des marchandises importées, tels que les médicaments en cause, est calculée par application de la méthode déductive prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes.
21 La juridiction de renvoi pose cette question afin de savoir si, pour qu’une telle identification soit établie, il importe de tenir compte uniquement de la composition des médicaments à comparer ou bien également des circonstances liées à la position de ces médicaments et de leurs fabricants sur le marché pharmaceutique concerné.
22 Tout d’abord, il convient de rappeler que le droit de l’Union relatif à l’évaluation en douane vise à établir un système équitable, uniforme et neutre qui exclut l’utilisation de valeurs en douane arbitraires ou fictives. La valeur en douane doit donc refléter la valeur économique réelle d’une marchandise importée et, dès lors, tenir compte de l’ensemble des éléments de cette marchandise qui présentent une valeur économique (arrêt du 20 décembre 2017, Hamamatsu Photonics Deutschland, C‑529/16,
EU:C:2017:984, point 24 et jurisprudence citée).
23 Ensuite, si le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises forme, en règle générale, la base de calcul de la valeur en douane, ce prix est une donnée qui doit éventuellement faire l’objet d’ajustements lorsque cette opération est nécessaire pour éviter de déterminer une valeur en douane arbitraire ou fictive (arrêt du 20 décembre 2017, Hamamatsu Photonics Deutschland, C‑529/16, EU:C:2017:984, point 27 et jurisprudence citée).
24 Lorsque la valeur en douane ne peut toutefois pas être déterminée, en vertu de l’article 29 du code des douanes, par la valeur transactionnelle des marchandises importées, l’évaluation en douane est effectuée conformément aux dispositions de l’article 30 de ce code, par application, successivement, des méthodes prévues aux points a) à d) du paragraphe 2 de ce dernier article (arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004. Hungary, C‑291/15, EU:C:2016:455, point 27 et jurisprudence citée).
25 S’agissant de l’application de ce même article 30, il découle du point 1 des notes relatives à l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes, figurant à l’annexe 23 du règlement d’application, que les autorités douanières se référeront, chaque fois que cela sera possible, à une vente de marchandises similaires, réalisée au même niveau commercial et portant sensiblement sur la même quantité que la vente de marchandises à évaluer (voir, en ce sens, arrêt du 16 juin 2016, EURO 2004.
Hungary, C‑291/15, EU:C:2016:455, point 34).
26 Enfin, la notion de « marchandises similaires », figurant audit article 30, paragraphe 2, sous b), est définie à l’article 142, paragraphe 1, sous d), du règlement d’application comme étant des marchandises produites dans le même pays qui, sans être pareilles à tous égards, présentent des caractéristiques semblables et sont composées de matières semblables, ce qui leur permet de remplir les mêmes fonctions et d’être commercialement interchangeables. Cette disposition précise que la qualité des
marchandises, leur réputation et l’existence d’une marque de fabrique ou de commerce font partie des éléments à prendre en considération pour déterminer si des marchandises sont similaires.
27 Eu égard à la définition large de la notion de « marchandises similaires », laquelle, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 40 de ses conclusions, se réfère à une appréciation factuelle des marchandises sur la base d’un ensemble de facteurs mentionnés à titre exemplatif, il y a lieu de considérer qu’une telle notion est applicable à tous types de marchandises, en ce compris des médicaments, tels que les médicaments en cause. Ainsi, afin d’identifier les marchandises similaires,
l’administration des douanes nationale compétente doit être en mesure d’utiliser toutes les données dont elle dispose afin de définir la valeur en douane de la manière la plus précise et la plus proche possible de la réalité.
28 Dans le cas de médicaments génériques, il convient, comme l’a souligné M. l’avocat général aux points 50 et 51 de ses conclusions, de prendre en compte tout élément pertinent, tels la composition de ces médicaments, leur caractère substituable au regard de leurs effets et leur interchangeabilité commerciale. L’administration des douanes nationale compétente doit ainsi procéder à une appréciation factuelle, prenant en compte tout élément pouvant avoir une incidence sur la valeur économique réelle
desdits médicaments, y inclus la position sur le marché du médicament importé et de son fabricant.
29 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de répondre à la première question que l’article 30, paragraphe 2, sous b), du code des douanes doit être interprété en ce sens que lorsque la valeur en douane de marchandises, telles que les médicaments en cause, est calculée par application de la méthode déductive prévue à cette disposition, l’administration des douanes nationale compétente doit, pour identifier des « marchandises similaires », prendre en considération tout élément pertinent, tels la
composition de ces marchandises, leur caractère substituable au regard de leurs effets et leur interchangeabilité commerciale, en procédant ainsi à une appréciation factuelle tenant compte de tout élément pouvant avoir une incidence sur la valeur économique réelle desdites marchandises, y inclus la position sur le marché de la marchandise importée et de son fabricant.
Sur les deuxième et troisième questions
30 Par ses deuxième et troisième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement d’application doit être interprété en ce sens que, pour déterminer le prix unitaire des marchandises importées selon la méthode prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes, le délai de 90 jours dans lequel les marchandises importées doivent être vendues dans l’Union, prévu à cet article 152,
paragraphe 1, sous b), est un délai de rigueur et, si tel n’est pas le cas, quelles sont les données à privilégier pour déterminer le prix unitaire des marchandises importées.
31 Il convient de rappeler que l’article 152, paragraphe 1, sous a), du règlement d’application pose le principe selon lequel, pour déterminer le prix unitaire des marchandises importées ou des marchandises identiques ou similaires importées, vendues en l’état dans l’Union, en vue de la détermination de la valeur en douane des marchandises importées visées à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes, il y a lieu de se fonder sur le prix unitaire correspondant aux ventes des
marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, faite à des personnes non liées aux vendeurs au moment, ou à peu près au moment, de l’importation des marchandises à évaluer, sous réserve de déductions se rapportant aux éléments visés à l’article 152, paragraphe 1, sous a), i) à iii), de ce règlement.
32 Par exception à ce principe, l’article 152, paragraphe 1, sous b), dudit règlement prévoit que, dans le cas où les marchandises importées ou les marchandises identiques ou similaires importées ne sont pas vendues au moment, ou à peu près au moment, de l’importation des marchandises à évaluer, la valeur en douane des marchandises importées est fondée sur le prix unitaire auquel ces dernières ou des marchandises identiques ou similaires importées sont vendues dans l’Union en l’état à la date la
plus proche suivant l’importation des marchandises à évaluer, mais en tous cas dans les 90 jours à compter de cette importation.
33 Ainsi, afin de déterminer la valeur en douane la plus précise et la plus proche de la réalité, conformément à la méthode prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes, la valeur en douane des marchandises doit être déterminée au moment le plus proche de leur importation. Le délai de 90 jours prévu à l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement d’application constitue donc une exception au principe posé à l’article 152, paragraphe 1, sous a), de ce règlement et doit, à ce
titre, faire l’objet d’une interprétation stricte.
34 Le libellé de cette disposition conforte cette interprétation. En effet, selon celui-ci, le prix unitaire sur lequel il convient de se fonder est celui auquel les marchandises sont vendues à la date la plus proche suivant l’importation des marchandises à évaluer, mais dans tous les cas dans les 90 jours à compter de cette importation, soit à une date qui ne dépasse pas ce délai.
35 De plus, il ressort de l’économie de l’article 30 du code des douanes qu’il existe une hiérarchie dans les méthodes de détermination de la valeur en douane. Ainsi, si la valeur en douane des marchandises importées ne peut être déterminée en application de la méthode visée à l’article 30, paragraphe 2, sous c), de ce code, c’est-à-dire s’il n’est pas possible de déterminer le prix de marchandises identiques ou similaires importées vendues dans l’Union dans un délai de 90 jours à compter de cette
importation, il convient, conformément à ladite hiérarchie, d’appliquer la méthode d’évaluation prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous d), dudit code.
36 En outre, comme l’a relevé M. l’avocat général au point 54 de ses conclusions, si la juridiction de renvoi se réfère aux notes interprétatives figurant à l’annexe 23 du règlement d’application, qui indiquent que le délai de 90 jours visé à l’article 152, paragraphe 1, sous b), de ce règlement pourrait être appliqué avec souplesse, il convient de noter qu’une telle adaptabilité est envisagée uniquement en cas d’application de l’article 31, paragraphe 1, du code des douanes.
37 Or, la méthode de détermination de la valeur en douane visée à l’article 31 du code des douanes figure en dernière position dans la hiérarchie des méthodes d’évaluation prévues par ce code, au titre de méthode résiduelle. En tant que telle, cette dernière méthode ne peut être utilisée que lorsque la valeur en douane des marchandises importées n’a pas pu être déterminée sur la base des articles 29 ou 30 dudit code.
38 Ainsi, ce n’est que lorsqu’il n’est pas possible de procéder à l’évaluation de la valeur en douane des marchandises importées par application des articles 29 ou 30 du code des douanes que certaines des règles relatives aux méthodes d’évaluation de la valeur en douane prévues aux articles 29 ou 30 du code des douanes peuvent être appliquées avec souplesse dans le cadre de l’article 31 de ce code.
39 Dès lors, l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement d’application doit être interprété en ce sens que, pour déterminer le prix unitaire des marchandises importées selon la méthode prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes, le délai de 90 jours dans lequel les marchandises importées doivent être vendues dans l’Union, visé à l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement d’application, est un délai de rigueur.
Sur la quatrième question
40 Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes doit être interprété en ce sens que les réductions sur le prix de vente des marchandises importées doivent être prises en compte pour déterminer la valeur en douane de ces marchandises par application de cette disposition.
41 Cette disposition prévoit que la valeur en douane de marchandises importées est déterminée en se fondant sur le prix unitaire correspondant aux ventes dans l’Union des marchandises importées ou de marchandises identiques ou similaires importées totalisant la quantité la plus élevée, ainsi faite à des personnes non liées aux vendeurs.
42 De plus, l’article 152, paragraphe 1, sous a), i) à iii), du règlement d’application prévoit la prise en compte de certaines déductions, parmi lesquelles figurent certaines commissions, les frais habituels de transport et d’assurance, ainsi que les droits à l’importation. Les remises commerciales accordées par le vendeur ne sont pas mentionnées à cet article. Or, il ressort du libellé de cette disposition que cette liste de déductions est exhaustive.
43 En outre, en prenant en compte le prix unitaire de la quantité la plus élevée de marchandises importées, l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes prévoit déjà la prise en compte de certaines réductions liées à la quantité.
44 Enfin, la prise en compte de remises commerciales dans la détermination de la valeur en douane risquerait d’aboutir à une valeur en douane encore plus éloignée de la valeur économique réelle des marchandises importées faisant l’objet d’une telle évaluation.
45 Il résulte de ces considérations qu’il y a lieu de répondre à la quatrième question que l’article 30, paragraphe 2, sous c), du code des douanes doit être interprété en ce sens que les réductions sur le prix de vente des marchandises importées ne peuvent être prises en compte pour déterminer la valeur en douane de ces marchandises par application de cette disposition.
Sur les dépens
46 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.
Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) dit pour droit :
1) L’article 30, paragraphe 2, sous b), du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, tel que modifié par le règlement (CE) no 82/97 du Parlement européen et du Conseil, du 19 décembre 1996, doit être interprété en ce sens que lorsque la valeur en douane de marchandises, telles que les médicaments en cause dans le litige au principal, est calculée par application de la méthode déductive prévue à cette disposition, l’administration des
douanes nationale compétente doit, pour identifier des « marchandises similaires », prendre en considération tout élément pertinent, tels la composition respective de ces marchandises, leur caractère substituable au regard de leurs effets et leur interchangeabilité commerciale, en procédant ainsi à une appréciation factuelle tenant compte de tout élément pouvant avoir une incidence sur la valeur économique réelle desdites marchandises, y inclus la position sur le marché de la marchandise
importée et de son fabricant.
2) L’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement no 2913/92, doit être interprété en ce sens que, pour déterminer le prix unitaire des marchandises importées selon la méthode prévue à l’article 30, paragraphe 2, sous c), du règlement no 2913/92, tel que modifié par le règlement no 82/97, le délai de 90 jours dans lequel les marchandises importées doivent être vendues dans l’Union
européenne, visé à l’article 152, paragraphe 1, sous b), du règlement no 2454/93, est un délai de rigueur.
3) L’article 30, paragraphe 2, sous c), du règlement no 2913/92, tel que modifié par le règlement no 82/97, doit être interprété en ce sens que les réductions sur le prix de vente des marchandises importées ne peuvent être prises en compte pour déterminer la valeur en douane de ces marchandises par application de cette disposition.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : le letton.