ARRÊT DE LA COUR (cinquième chambre)
21 mars 2019 ( *1 )
« Manquement d’État – Directive 1999/31/CE – Article 14, sous b) et c) – Mise en décharge des déchets – Décharges existantes – Violation »
Dans l’affaire C‑498/17,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 258 TFUE, introduit le 17 août 2017,
Commission européenne, représentée par MM. G. Gattinara et F. Thiran ainsi que par Mme E. Sanfrutos Cano, en qualité d’agents,
partie requérante,
contre
République italienne, représentée par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. G. Palatiello, avvocato dello Stato,
partie défenderesse,
LA COUR (cinquième chambre),
composée de M. E. Regan (rapporteur), président de chambre, MM. C. Lycourgos, E. Juhász, M. Ilešič et I. Jarukaitis, juges,
avocat général : M. Y. Bot,
greffier : M. R. Schiano, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 22 novembre 2018,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission européenne demande à la Cour de constater que, en n’ayant pas pris, en ce qui concerne les décharges d’Avigliano (localité de Serre Le Brecce), de Ferrandina (localité de Venita), de Genzano di Lucania (localité de Matinella), de Latronico (localité de Torre), de Lauria (localité de Carpineto), de Maratea (localité de Montescuro), de Moliterno (localité de Tempa La Guarella), les deux décharges de Potenza (localité de Montegrosso-Pallareta), les décharges de Rapolla
(localité d’Albero in Piano), de Roccanova (localité de Serre), de Sant’Angelo Le Fratte (localité de Farisi), de Campotosto (localité de Reperduso), de Capistrello (localité de Trasolero), de Francavilla (Valle Anzuca), de L’Aquila (localité de Ponte delle Grotte), d’Andria (D’Oria G. & C. Snc), de Canosa (CO.BE.MA), de Bisceglie (CO.GE.SER), d’Andria (F.lli Acquaviva), de Trani (BAT-Igea Srl), de Torviscosa (société Caffaro), d’Atella (localité de Cafaro), de Corleto Perticara (localité de Tempa
Masone), de Marsico Nuovo (localité de Galaino), de Matera (localité de La Martella), de Pescopagano (localité de Domacchia), de Rionero in Volture (localité de Ventaruolo), de Salandra (localité de Piano del Governo), de San Mauro Forte (localité de Priati), de Senise (localité de Palomabara), de Tito (localité d’Aia dei Monaci), de Tito (localité de Valle del Forno), de Capestrano (localité de Tirassegno), de Castellalto (localité de Colle Coccu), de Castelvecchio Calvisio (localité de Termine),
de Corfinio (localité de Cannucce), de Corfinio (localité de Case querceto), de Mosciano S. Angelo (localité de Santa Assunta), de S. Omero (localité de Ficcadenti), de Montecorvino Pugliano (localité de Parapoti), de San Bartolomeo in Galdo (localité de Serra Pastore), de Trivigano (anciennement Cava Zof) et de Torviscosa (localité de La Valletta), toutes les mesures nécessaires pour qu’il soit procédé, dans les meilleurs délais, conformément à l’article 7, sous g), et à l’article 13 de la
directive 1999/31/CE du Conseil, du 26 avril 1999, concernant la mise en décharge des déchets (JO 1999, L 182, p. 1), à la désaffectation de celles de ces décharges qui n’ont pas obtenu, conformément à l’article 8 de cette directive, l’autorisation de poursuivre leurs opérations, ou en n’ayant pas adopté les mesures nécessaires pour rendre conformes à ladite directive celles desdites décharges qui ont obtenu une autorisation de continuer à fonctionner, et ce sans préjudice des conditions fixées à
l’annexe I, point 1, de cette même directive, la République italienne a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 14, sous b) et c), de la directive 1999/31.
Le cadre juridique
2 Aux termes de l’article 1er de la directive 1999/31, intitulé « Objectif général » :
« 1. En vue de répondre aux exigences de la directive 75/442/CEE [du Conseil, du 15 juillet 1975, relative aux déchets (JO 1975, L 194, p. 39)], et notamment de ses articles 3 et 4, la présente directive a pour objet, par des exigences techniques et opérationnelles strictes applicables aux déchets et aux décharges, de prévoir des mesures, procédures et orientations visant à prévenir ou à réduire autant que possible les effets négatifs de la mise en décharge des déchets sur l’environnement, et
notamment la pollution des eaux de surface, des eaux souterraines, du sol et de l’air, et sur l’environnement de la planète, y compris l’effet de serre, ainsi que les risques qui en résultent pour la santé humaine, pendant toute la durée de vie de la décharge.
2. Pour ce qui est des caractéristiques techniques des décharges, la présente directive comporte, pour les décharges auxquelles s’applique la directive 96/61/CE [du Conseil, du 24 septembre 1996, relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (JO 1996, L 257, p. 26)], les exigences techniques nécessaires pour traduire dans les faits les exigences générales de [cette] directive. Les exigences pertinentes de ladite directive sont réputées satisfaites si les exigences de la
présente directive le sont. »
3 L’article 7 de la directive 1999/31, intitulé « Demande d’autorisation », prévoit :
« Les États membres prennent des mesures pour que la demande d’autorisation pour l’exploitation d’une décharge contienne des données sur au moins les éléments suivants :
[...]
g) le plan proposé pour les procédures de désaffectation et de gestion après désaffectation ;
[...] »
4 L’article 8 de cette directive, intitulé « Conditions d’autorisation », dispose :
« Les États membres prennent des mesures pour que :
a) une autorisation de décharge ne soit délivrée par l’autorité compétente que si les conditions suivantes sont réunies :
i) sans préjudice de l’article 3, paragraphes 4 et 5, le projet de décharge est conforme à toutes les exigences pertinentes de la présente directive, y compris ses annexes ;
ii) la gestion du site de mise en décharge est confiée à une personne physique techniquement compétente pour gérer le site ; la formation professionnelle et technique des exploitants et du personnel de la décharge est assurée ;
iii) l’exploitation de la décharge comporte les mesures nécessaires pour éviter les accidents et en limiter les conséquences ;
iv) avant le début des opérations de dépôt, le demandeur a pris ou prendra les dispositions appropriées, sous forme d’une garantie financière ou par tout moyen équivalent, selon des modalités à arrêter par les États membres, pour faire en sorte que les obligations (y compris les dispositions relatives à la gestion après désaffectation) contractées au titre de l’autorisation délivrée conformément aux dispositions de la présente directive soient exécutées et que les procédures de désaffectation
requises par l’article 13 soient suivies. Cette garantie, ou son équivalent, sera maintenue aussi longtemps que l’exigeront les opérations d’entretien et de gestion du site désaffecté, conformément à l’article 13, point d). Les États membres peuvent, à leur choix, déclarer que le présent point ne s’applique pas aux décharges pour déchets inertes ;
b) le projet de décharge soit conforme au plan ou aux plans pertinents de gestion des déchets visés à l’article 7 de la directive 75/442/CEE ;
c) avant le début des opérations d’élimination, l’autorité compétente inspecte le site pour s’assurer qu’il est conforme aux conditions fixées en la matière par l’autorisation, ce qui ne diminue en rien la responsabilité de l’exploitant en vertu de l’autorisation. »
5 L’article 13 de la directive 1999/31, intitulé « Procédure de désaffectation et de gestion après désaffectation », énonce :
« Les États membres prennent des mesures pour que, conformément, le cas échéant, à l’autorisation :
a) la procédure de désaffectation d’une décharge ou d’une partie de celle-ci soit engagée :
i) lorsque les conditions correspondantes indiquées dans l’autorisation sont réunies
ou
ii) après l’autorisation de l’autorité compétente, à la demande de l’exploitant
ou
iii) sur décision motivée de l’autorité compétente ;
b) une décharge ou une partie de celle-ci ne puisse être considérée comme définitivement désaffectée que lorsque l’autorité compétente a effectué une inspection finale sur place, a procédé à l’évaluation de tous les rapports présentés par l’exploitant et a donné à l’exploitant son autorisation pour la désaffectation. Cette procédure ne diminue en rien la responsabilité qui incombe à l’exploitant en vertu de l’autorisation ;
[...] »
6 L’article 14 de cette directive, intitulé « Décharges existantes », est libellé comme suit :
« Les États membres prennent des mesures pour que les décharges autorisées ou déjà en exploitation au moment de la transposition de la présente directive ne puissent continuer à fonctionner que si les mesures indiquées ci-après sont mises en œuvre dès que possible, et au plus tard dans les huit ans à compter de la date fixée à l’article 18, paragraphe 1.
a) Dans un délai d’un an à compter de la date fixée à l’article 18, paragraphe 1, l’exploitant d’une décharge prépare et présente, pour approbation, à l’autorité compétente un plan d’aménagement du site comprenant les éléments énumérés à l’article 8 ainsi que toute mesure corrective qu’il estime nécessaire pour se conformer aux exigences de la présente directive à l’exception de celles exposées à l’annexe I, point 1.
b) À la suite de la présentation du plan d’aménagement, l’autorité compétente prend une décision définitive quant à la poursuite de l’exploitation sur la base dudit plan d’aménagement et de la présente directive. Les États membres prennent les mesures nécessaires pour qu’il soit procédé, dans les meilleurs délais, conformément à l’article 7, point g), et à l’article 13, à la désaffectation des sites qui n’ont pas obtenu, conformément à l’article 8, l’autorisation de poursuivre leurs opérations.
c) Sur la base du plan d’aménagement du site approuvé, l’autorité compétente autorise les travaux nécessaires et fixe une période transitoire pour l’exécution du plan. Toute décharge existante doit être conforme aux exigences de la présente directive à l’exception de celles énoncées à l’annexe I, point 1, dans un délai de huit ans à compter de la date fixée à l’article 18, paragraphe 1.
d) i) Dans un délai d’un an à compter de la date fixée à l’article 18, paragraphe 1, les articles 4, 5, et 11 ainsi que l’annexe II s’appliquent aux décharges pour déchets dangereux.
ii) Dans les trois ans suivant la date fixée à l’article 18, paragraphe 1, l’article 6 s’applique aux décharges pour déchets dangereux. »
7 L’article 18 de ladite directive, intitulé « Transposition », prévoit, à son paragraphe 1 :
« Les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la présente directive au plus tard deux ans à compter de son entrée en vigueur. Ils en informent immédiatement la Commission.
[...] »
8 Conformément à son article 19, la directive 1999/31 est entrée en vigueur le 16 juillet 1999.
La procédure précontentieuse
9 Après plusieurs échanges avec les autorités italiennes, la Commission a envoyé, le 28 février 2012, une lettre de mise en demeure à la République italienne en vertu de l’article 258 TFUE, dans laquelle elle a fait état, dans cet État membre, de 102 décharges existantes fonctionnant en violation de l’article 14 de la directive 1999/31.
10 Dans leurs lettres des 11 mai et 8 juin 2012, les autorités italiennes ont fait état de 46 décharges existantes au sens dudit article 14.
11 La Commission a émis un avis motivé le 22 novembre 2012, auquel la République italienne a répondu les 24 janvier 2013, 3 mars et 4 juillet 2014.
12 Compte tenu de certaines imprécisions dans les réponses fournies par les autorités italiennes et à la suite de l’arrêt du 2 décembre 2014, Commission/Italie (C‑196/13, EU:C:2014:2407), dans lequel la Cour a constaté que la République italienne avait violé l’article 260, paragraphe 1, TFUE, en ce qui concerne, notamment, certaines décharges existantes, au sens de l’article 14 de la directive 1999/31, la Commission a envoyé, le 19 juin 2015, un avis motivé complémentaire dans lequel elle a précisé
la distinction entre la procédure d’infraction en cause dans la présente affaire et celle ayant abouti à cet arrêt. La Commission y a indiqué que cette dernière concernait l’obligation incombant aux autorités compétentes d’adopter une décision concernant chacune des décharges en cause et ayant pour objet soit l’autorisation de continuer à fonctionner donnée à ces décharges, soit la désaffectation de celles-ci, conformément à l’article 14 de la directive 1999/31. Elle a précisé que la procédure en
cause dans la présente affaire porte, en revanche, sur les obligations dites « d’achèvement », à savoir les obligations d’exécuter les mesures que l’État membre concerné a déjà adoptées et qui peuvent avoir pour objet, selon les décharges concernées, tant une autorisation de continuer à fonctionner donnée à la décharge en cause, qu’une désaffectation de celle-ci. Selon la Commission, ces obligations d’achèvement consistent donc, en fonction de la décharge concernée, tant en la mise en œuvre des
mesures nécessaires à la désaffectation de celle-ci, conformément à l’article 14, sous b), seconde phrase, de cette directive, que en l’adoption des mesures nécessaires pour rendre cette décharge conforme à ladite directive, dans les cas où celle-ci aurait été autorisée de continuer à fonctionner en vertu de l’article 14, sous c), de la même directive.
13 À la suite de l’avis motivé complémentaire, la Commission a accordé à la République italienne un délai jusqu’au 19 octobre 2015 pour y répondre, ce que la République italienne a fait par ses lettres des 20 octobre 2015, 9 septembre 2016, 13 janvier et 12 avril 2017.
14 Dans sa réponse du 9 septembre 2016, la République italienne a fourni une liste complète des décharges existantes, ventilées par région, et mentionné quatre autres décharges existantes qui ne font, cependant, pas l’objet de la présente procédure dès lors qu’elles n’ont pas été prises en compte dans la lettre de mise en demeure.
15 À la lumière des réponses fournies par la République italienne à l’avis motivé complémentaire les 13 janvier et 12 avril 2017, la Commission a indiqué que six décharges avaient été mises en conformité avec la directive 1999/31.
16 Cependant, estimant que 44 décharges n’étaient toujours pas conformes à la directive 1999/31, la Commission a décidé d’introduire le présent recours.
Sur le recours
Argumentation des parties
17 La Commission rappelle que, en vertu de l’article 14 de la directive 1999/31, les États membres doivent prendre des mesures pour que les décharges existantes, c’est-à-dire les décharges ayant obtenu une autorisation ou celles étant déjà en activité avant le 16 juillet 2001, ne puissent continuer à fonctionner après le 16 juillet 2009 que si les mesures visées à l’article 14, sous b) et c), de cette directive sont mises en œuvre, dans les meilleurs délais. Cet article instaurerait ainsi un régime
transitoire destiné à garantir que les décharges existantes soient rapidement mises en conformité avec les exigences de ladite directive.
18 La Commission précise que la présente procédure d’infraction ne concerne que les obligations d’achèvement qui ont pour objet la réalisation, au plus tard le 16 juillet 2009, des mesures nécessaires à la désaffectation des décharges existantes, conformément à l’article 14, sous b), seconde phrase, de la directive 1999/31, ou la réalisation des mesures nécessaires pour rendre conforme aux exigences de cette directive les décharges existantes qui ont obtenu l’autorisation de poursuivre leurs
opérations, en vertu de l’article 14, sous c), de ladite directive.
19 En ce qui concerne, premièrement, les décharges existantes qui n’ont pas obtenu l’autorisation de poursuivre leurs opérations, en vertu de l’article 14, sous b), seconde phrase, de la directive 1999/31, la République italienne aurait dû adopter les mesures nécessaires pour procéder, dans les plus brefs délais et au plus tard le 16 juillet 2009, à leur désaffectation, conformément à l’article 7, sous g), et à l’article 13 de cette directive.
20 Deuxièmement, pour les décharges existantes autorisées à poursuivre leurs opérations, l’article 14, sous c), de ladite directive prévoit que, si le plan d’aménagement a été approuvé et donc que l’autorisation de continuer à fonctionner a été délivrée, les autorités compétentes doivent veiller à ce que toutes ces décharges soient conformes aux exigences de la même directive au plus tard le 16 juillet 2009.
21 La Commission relève, dans ce contexte, une certaine ambiguïté dans les mesures adoptées par les autorités italiennes en ce que celles-ci ont parfois décidé, dans un premier temps, d’adopter un plan d’aménagement et ont donc autorisé la poursuite de l’exploitation de la décharge concernée, avant de décider, dans un second temps, de la désaffectation de celle-ci. Le terme « aménagement » aurait également été utilisé même dans des cas de décharges faisant l’objet d’une décision de désaffectation.
Pour 22 des 44 décharges concernées par le présent recours, il serait ainsi impossible de définir sans ambiguïté s’il s’agit d’une désaffectation ou d’une poursuite d’exploitation.
22 Dans tous les cas, la Commission relève que pour les 44 décharges en cause soit les travaux nécessaires à la mise en conformité avec la directive 1999/31 des décharges dont l’exploitation devait continuer n’avaient pas été réalisés à la date du 19 octobre 2015, fixée dans l’avis motivé complémentaire, soit les mesures nécessaires à la désaffectation des décharges dont l’autorisation d’exploitation n’avait pas été renouvelée n’ont pas été prises, en contrariété avec l’article 14, sous b) et c), de
cette directive.
23 La République italienne conteste les allégations de la Commission. S’agissant de la prétendue violation de l’obligation, imposée par l’article 14, sous b) et c), de ladite directive, d’adopter une décision définitive relative à la mise en conformité ou à la désaffectation des décharges existantes et de l’ambiguïté dans les mesures adoptées par les autorités italiennes, la République italienne relève, d’une part, que les autorités compétentes ont adopté une décision définitive imposant la
désaffectation de 18 des 22 décharges, alors que quatre autres décharges, situées dans la région des Pouilles, ont fait l’objet de décisions définitives prévoyant leur mise en conformité avec les dispositions de la même directive, et, d’autre part, s’agissant des 22 autres décharges identifiées par la Commission, que cette dernière conteste non pas la validité des mesures définitives de désaffectation adoptées par les autorités compétentes, mais uniquement la violation de l’obligation d’achever
les travaux de désaffectation avant l’expiration du délai fixé au 16 juillet 2009.
24 Dans de nombreux cas, les autorités compétentes auraient, dans un premier temps, prescrit l’aménagement de la décharge concernée et autorisé l’exploitation de celle-ci, avant de décider, dans un second temps, de la désaffectation définitive de cette décharge en raison du défaut de mise en conformité dans les délais impartis ou à la suite de la cessation de l’activité. La désaffectation définitive de la décharge concernée aurait, dans ce cas, été réalisée en exécution des dispositions prévues dans
l’acte unique qui avait approuvé tant le plan d’aménagement que le plan de désaffectation, ce qui expliquerait la prétendue ambiguïté des décisions citées par les autorités italiennes, ambiguïté qui ne serait que formelle.
Appréciation de la Cour
25 En vertu de l’article 14 de la directive 1999/31, les États membres devaient prendre des mesures pour que les décharges autorisées ou déjà en exploitation au moment de la transposition de cette directive, à savoir au plus tard le 16 juillet 2001, ne puissent continuer à fonctionner que si toutes les mesures mentionnées à cet article étaient mises en œuvre dès que possible et au plus tard le 16 juillet 2009.
26 Il ressort de la jurisprudence de la Cour que ledit article 14 instaure un régime transitoire dérogatoire afin de mettre en conformité ces décharges avec les nouvelles exigences environnementales (arrêt du 25 février 2016, Commission/Espagne, C‑454/14, non publié, EU:C:2016:117, point 36 et jurisprudence citée).
27 En particulier, l’article 14, sous b), de la directive 1999/31 exige, d’une part, que l’autorité compétente prenne une décision définitive quant à la poursuite de l’exploitation sur la base d’un plan d’aménagement et de cette directive et, d’autre part, que les États membres prennent les mesures nécessaires pour qu’il soit procédé, dans les meilleurs délais, à la désaffectation des sites qui n’ont pas obtenu, conformément à l’article 8 de ladite directive, l’autorisation de poursuivre leurs
opérations.
28 L’article 14, sous c), de la directive 1999/31 prévoit, en substance, que, sur la base du plan d’aménagement d’un site approuvé, l’autorité compétente autorise les travaux nécessaires et fixe une période transitoire pour l’exécution du plan, étant précisé que toute décharge existante doit être conforme aux exigences de cette directive avant le 16 juillet 2009.
29 Pour constater un manquement à des obligations en vertu de ladite directive, l’existence de celui-ci doit, selon une jurisprudence constante de la Cour, être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé, de sorte que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (arrêt du 18 octobre 2018, Commission/Roumanie, C‑301/17, non publié, EU:C:2018:846, point 42 et jurisprudence citée).
30 En l’occurrence, la date pertinente est celle qui a été fixée dans l’avis motivé complémentaire, à savoir le 19 octobre 2015.
31 Certes, la République italienne a pris des mesures en vue soit de la désaffectation des sites qui n’ont pas obtenu l’autorisation de poursuivre leurs opérations, soit de la réalisation des travaux nécessaires conformément aux plans d’aménagement des sites approuvés par les autorités compétentes.
32 Toutefois, il est constant entre les parties que, premièrement, les décharges d’Avigliano (localité de Serre Le Brecce), de Ferrandina (localité de Venita), de Genzano di Lucania (localité de Matinella), de Latronico (localité de Torre), de Lauria (localité de Carpineto), de Maratea (localité de Montescuro), de Moliterno (localité de Tempa La Guarella), de Potenza (localité de Montegrosso-Pallareta), de Rapolla (localité d’Albero in Piano), de Sant’Angelo Le Fratte (localité de Farisi), de
Capistrello (localité de Trasolero), de Francavilla (Valle Anzuca), de L’Aquila (localité de Ponte delle Grotte), de Canosa (CO.BE.MA), de Torviscosa (société Caffaro), de Corleto Perticara (localité de Tempa Masone), de Marsico Nuovo (localité de Galaino), de Matera (localité de La Martella), de Rionero in Volture (localité de Ventaruolo), de Salandra (localité de Piano del Governo), de Senise (localité de Palomabara), de Tito (localité d’Aia dei Monaci), de Capestrano (localité de Tirassegno),
de Castellalto (localité de Colle Coccu), de Castelvecchio Calvisio (localité de Termine), de Corfinio (localité de Cannucce), de Corfinio (localité de Case querceto), de Mosciano S. Angelo (localité de Santa Assunta), de S. Omero (localité de Ficcadenti), de Montecorvino Pugliano (localité de Parapoti) et de Torviscosa (localité de La Valletta) n’avaient pas été désaffectées, conformément à la directive 1999/31, à la date du 19 octobre 2015 et n’étaient toujours pas en conformité avec celle-ci à
la date d’introduction du présent recours.
33 En ce qui concerne, deuxièmement, les décharges d’Andria (D’Oria G. & C.), de Bisceglie (CO.GE.SER), d’Andria (F.lli Acquaviva), de Trani (BAT-Igea), d’Atella (localité de Cafaro), de Pescopagano (localité de Domacchia), de Tito (localité de Valle del Forno), il a été confirmé par les parties lors de l’audience que les travaux de mise en conformité avec ladite directive de ces décharges ont été achevés au cours des années 2017 et 2018, soit après le 19 octobre 2015.
34 Troisièmement, concernant les décharges de Potenza (localité de Montegrosso-Pallareta), de Roccanova (localité de Serre), de Campotosto (localité de Reperduso), de San Mauro Forte (localité de Priati), de San Bartolomeo in Galdo (localité de Serra Pastore) et de Trivigano (anciennement Cava Zof), la République italienne a allégué, lors de l’audience, de la mise en conformité de ces décharges avec la directive 1999/31. Cependant, à supposer même que la Commission ait été mise en mesure de prendre
connaissance des documents produits par la République italienne à la veille de l’audience, qui tendent à démontrer que ces décharges ont effectivement été mises en conformité avec cette directive, ce qu’elle a d’ailleurs contesté, il y a lieu de relever qu’il est constant que cette mise en conformité, à la supposer établie, a été effectuée après le 19 octobre 2015.
35 Enfin, concernant les arguments avancés par la République italienne pour expliquer le non-respect de ses obligations en vertu de la directive 1999/31, il convient de noter que, selon une jurisprudence constante de la Cour, un État membre ne saurait exciper de situations de son ordre interne pour justifier le non-respect des obligations et des délais résultant du droit de l’Union (arrêt du 18 octobre 2018, Commission/Roumanie, C‑301/17, non publié, EU:C:2018:846, point 45 et jurisprudence citée).
36 Dès lors, il y a lieu de considérer que le recours introduit par la Commission est fondé.
37 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de constater que, en n’ayant pas pris, en ce qui concerne les décharges d’Avigliano (localité de Serre Le Brecce), de Ferrandina (localité de Venita), de Genzano di Lucania (localité de Matinella), de Latronico (localité de Torre), de Lauria (localité de Carpineto), de Maratea (localité de Montescuro), de Moliterno (localité de Tempa La Guarella), les deux décharges de Potenza (localité de Montegrosso-Pallareta), les décharges de
Rapolla (localité d’Albero in Piano), de Roccanova (localité de Serre), de Sant’Angelo Le Fratte (localité de Farisi), de Campotosto (localité de Reperduso), de Capistrello (localité de Trasolero), de Francavilla (Valle Anzuca), de L’Aquila (localité de Ponte delle Grotte), d’Andria (D’Oria G. & C.), de Canosa (CO.BE.MA), de Bisceglie (CO.GE.SER), d’Andria (F.lli Acquaviva), de Trani (BAT-Igea), de Torviscosa (société Caffaro), d’Atella (localité de Cafaro), de Corleto Perticara (localité de
Tempa Masone), de Marsico Nuovo (localité de Galaino), de Matera (localité de La Martella), de Pescopagano (localité de Domacchia), de Rionero in Volture (localité de Ventaruolo), de Salandra (localité de Piano del Governo), de San Mauro Forte (localité de Priati), de Senise (localité de Palomabara), de Tito (localité d’Aia dei Monaci), de Tito (localité de Valle del Forno), de Capestrano (localité de Tirassegno), de Castellalto (localité de Colle Coccu), de Castelvecchio Calvisio (localité de
Termine), de Corfinio (localité de Cannucce), de Corfinio (localité de Case querceto), de Mosciano S. Angelo (localité de Santa Assunta), de S. Omero (localité de Ficcadenti), de Montecorvino Pugliano (localité de Parapoti), de San Bartolomeo in Galdo (localité de Serra Pastore), de Trivigano (anciennement Cava Zof) et de Torviscosa (localité de La Valletta), toutes les mesures nécessaires pour qu’il soit procédé, dans les meilleurs délais, conformément à l’article 7, sous g), et à l’article 13
de la directive 1999/31, à la désaffectation de celles de ces décharges qui n’ont pas obtenu, conformément à l’article 8 de cette directive, l’autorisation de poursuivre leurs opérations, ou en n’ayant pas adopté les mesures nécessaires pour rendre conformes à ladite directive celles desdites décharges qui ont obtenu une autorisation de continuer à fonctionner, et ce sans préjudice des conditions fixées à l’annexe I, point 1, de la même directive, la République italienne a manqué aux obligations
qui lui incombent en vertu de l’article 14, sous b) et c), de la directive 1999/31.
Sur les dépens
38 En vertu de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République italienne et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) déclare et arrête :
1) En n’ayant pas pris, en ce qui concerne les décharges d’Avigliano (localité de Serre Le Brecce), de Ferrandina (localité de Venita), de Genzano di Lucania (localité de Matinella), de Latronico (localité de Torre), de Lauria (localité de Carpineto), de Maratea (localité de Montescuro), de Moliterno (localité de Tempa La Guarella), les deux décharges de Potenza (localité de Montegrosso-Pallareta), les décharges de Rapolla (localité d’Albero in Piano), de Roccanova (localité de Serre), de
Sant’Angelo Le Fratte (localité de Farisi), de Campotosto (localité de Reperduso), de Capistrello (localité de Trasolero), de Francavilla (Valle Anzuca), de L’Aquila (localité de Ponte delle Grotte), d’Andria (D’Oria G. & C. Snc), de Canosa (CO.BE.MA), de Bisceglie (CO.GE.SER), d’Andria (F.lli Acquaviva), de Trani (BAT-Igea Srl), de Torviscosa (société Caffaro), d’Atella (localité de Cafaro), de Corleto Perticara (localité de Tempa Masone), de Marsico Nuovo (localité de Galaino), de Matera
(localité de La Martella), de Pescopagano (localité de Domacchia), de Rionero in Volture (localité de Ventaruolo), de Salandra (localité de Piano del Governo), de San Mauro Forte (localité de Priati), de Senise (localité de Palomabara), de Tito (localité d’Aia dei Monaci), de Tito (localité de Valle del Forno), de Capestrano (localité de Tirassegno), de Castellalto (localité de Colle Coccu), de Castelvecchio Calvisio (localité de Termine), de Corfinio (localité de Cannucce), de Corfinio
(localité de Case querceto), de Mosciano S. Angelo (localité de Santa Assunta), de S. Omero (localité de Ficcadenti), de Montecorvino Pugliano (localité de Parapoti), de San Bartolomeo in Galdo (localité de Serra Pastore), de Trivigano (anciennement Cava Zof) et de Torviscosa (localité de La Valletta), toutes les mesures nécessaires pour qu’il soit procédé, dans les meilleurs délais, conformément à l’article 7, sous g), et à l’article 13 de la directive 1999/31/CE du Conseil, du 26 avril 1999,
concernant la mise en décharge des déchets, à la désaffectation de celles de ces décharges qui n’ont pas obtenu, conformément à l’article 8 de cette directive, l’autorisation de poursuivre leurs opérations, ou en n’ayant pas adopté les mesures nécessaires pour rendre conformes à ladite directive celles desdites décharges qui ont obtenu une autorisation de continuer à fonctionner, et ce sans préjudice des conditions fixées à l’annexe I, point 1, de la même directive, la République italienne a
manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 14, sous b) et c), de la directive 1999/31.
2) La République italienne est condamnée aux dépens.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure : l’italien.