ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)
14 février 2019 (*)
« Pourvoi – Article 181 du règlement de procédure de la Cour – Marque de l’Union européenne – Procédure d’opposition – Demande d’enregistrement de la marque verbale THE RICH PRADA ‐ Rejet partiel de l’opposition »
Dans l’affaire C‑510/18 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 3 août 2018,
Prada SA, établie à Luxembourg (Luxembourg), représentée par M^es C. Mazzi, G. Guglielmetti et P. Tammaro, avvocati,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant :
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO),
partie défenderesse en première instance,
The Rich Prada International PT,
partie intervenante en première instance,
LA COUR (septième chambre),
composée de M. T. von Danwitz, président de chambre, MM. E. Levits et P. G. Xuereb (rapporteur), juges,
avocat général : M. M. Bobek,
greffier : M. A. Calot Escobar,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,
rend la présente
Ordonnance
1 Par son pourvoi, Prada SA demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 5 juin 2018, Prada/EUIPO – The Rich Prada International (THE RICH PRADA) (T‑111/16, non publié, ci-après l’« arrêt attaqué », EU:T:2018:328), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’EUIPO du 13 janvier 2016 (affaires jointes R 3076/2014-2 et R 3186/2014-2), telle que rectifiée le 14 mars 2017, relative à une procédure
d’opposition entre Prada SA et The Rich Prada International PT.
2 À l’appui de son pourvoi, la requérante soulève un moyen unique, tiré d’une violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement (CE) n^o 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque [de l’Union européenne] (JO 2009, L 78, p. 1).
Sur le pourvoi
3 En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter ce pourvoi, totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée.
4 Il y a lieu de faire application de cette disposition dans la présente affaire.
5 M. l’avocat général a, le 3 décembre 2018, pris la position suivante :
« 1. À l’appui de son pourvoi contre l’arrêt attaqué, Prada soulève un moyen unique, divisé en quatre branches, pris de la violation de l’article 8, paragraphe 5, du règlement n^o 207/2009.
2. Je propose à la Cour de rejeter le pourvoi comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé, en vertu de l’article 181 du règlement de procédure.
3. Par la première branche du moyen, la requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne mettant pas en balance de manière appropriée les facteurs pertinents lors de l’appréciation globale de l’existence d’un lien, dans l’esprit du public concerné, entre la marque dont l’enregistrement est demandé et la marque antérieure.
4. Toutefois, le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve qui lui sont présentés, sauf s’il est allégué que les faits ou les éléments de preuve ont été dénaturés. Or, l’évaluation de l’importance respective de chaque facteur et leur appréciation constituent une analyse de nature factuelle. L’argument au soutien de la première branche du moyen est dès lors irrecevable (voir, en ce sens, arrêt du 2 septembre 2010,
Calvin Klein Trademark Trust/OHMI, C‑254/09 P, EU:C:2010:488, points 49 et 50, ainsi que ordonnance du 21 juin 2016, Mocek, Wenta, KAJMAN Firma Handlowo-Usługowo-Produkcyjna/EUIPO, C‑619/15 P, non publiée, EU:C:2016:475, points 7, 8, 10 et 11). En tout état de cause, il ressort clairement de son raisonnement pris dans son ensemble que le Tribunal ne s’est pas uniquement concentré sur deux des facteurs pertinents en excluant les autres, comme le suggère la requérante, mais qu’il a fondé ses
conclusions sur une appréciation globale (voir, en ce sens, ordonnance du 14 décembre 2017, Torres/Alma-The Soul of Italian Wine, C‑499/17 P, non publiée, EU:C:2017:978, point 7).
5. Par la deuxième branche du moyen, la requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en ce qu’il n’a pas effectué correctement l’appréciation globale de l’existence d’un préjudice porté au caractère distinctif de la marque antérieure. Elle fait également valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en ne procédant pas aux déductions logiques fondées sur une analyse des probabilités qu’un risque sérieux de préjudice apparaisse ultérieurement.
6. La prétendue erreur de droit dénoncée par le premier argument de cette deuxième branche ne saurait faire l’objet d’un contrôle de la Cour puisque cet argument vise en réalité à remettre en cause l’appréciation des faits opérée par le Tribunal, sans que soit invoquée une quelconque dénaturation des faits ou des éléments de preuve (voir, en ce sens, arrêt du 17 mars 2016, Naazneen Investments/OHMI, C‑252/15 P, non publié, EU:C:2016:178, point 59). Quant au second argument, il ne saurait
donner lieu non plus à un contrôle de la Cour, dès lors qu’il n’a pas été soulevé devant le Tribunal (voir, en ce sens, ordonnance du président de la Cour du 12 juin 2014, Bimbo/OHMI, C‑285/13 P, non publiée, EU:C:2014:1751, point 16).
7. Par la troisième branche du moyen, la requérante allègue que le Tribunal a commis une erreur de droit en ce qu’il n’a pas correctement procédé à une appréciation globale, tenant compte de l’ensemble des facteurs pertinents, de l’existence d’un préjudice porté à la renommée de la marque antérieure. Par la quatrième branche du moyen, elle soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit en ce qu’il n’a pas apprécié globalement l’existence d’un profit indûment tiré du caractère distinctif
ou de la renommée de la marque antérieure en prenant en considération tous les facteurs pertinents. Elle fait également valoir que certains éléments de preuve n’ont pas été pris en compte.
8. Bien que les troisième et quatrième branches du moyen unique évoquent l’existence d’erreurs de droit entachant l’arrêt attaqué, les arguments avancés par la requérante au soutien de ces branches visent à nouveau à remettre en question l’appréciation effectuée par le Tribunal de certains éléments de preuve. Il ressort de l’arrêt dans son ensemble que le Tribunal a examiné un certain nombre de facteurs pertinents dans son appréciation globale. Le Tribunal dispose d’une certaine marge
d’appréciation pour déterminer les éléments de preuve qu’il considère pertinents ainsi que l’importance qu’il leur donne. Cette appréciation échappe au contrôle de la Cour, à moins qu’une dénaturation ne soit alléguée. Puisque tel n’est pas le cas dans le cadre du présent pourvoi, la Cour ne saurait contrôler aucune question de droit (voir, en ce sens, ordonnances du 17 septembre 2015, Arnoldo Mondadori Editore/OHMI, C‑548/14 P, non publiée, EU:C:2015:624, point 41, et du 20 septembre 2017, Anton
Riemerschmid Weinbrennerei und Likörfabrik/EUIPO, C‑158/17 P, non publiée, EU:C:2017:701, point 6).
9. Je propose donc à la Cour de rejeter le moyen unique comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé. »
6 La première branche du moyen unique, par laquelle la requérante soutient que le Tribunal a commis des erreurs de droit lors de l’appréciation du lien existant entre les marques en conflit, doit être rejetée comme étant manifestement irrecevable et, en tout état de cause, comme étant manifestement non fondée pour les motifs retenus par M. l’avocat général au point 4 de sa position.
7 Par les deuxième, troisième et quatrième branches du moyen, la requérante conteste l’appréciation effectuée par le Tribunal du risque de préjudice porté au caractère distinctif ou à la renommée des marques antérieures et du risque de profit indu tiré de ce caractère distinctif ou de cette renommée, figurant aux points 52 à 57 de l’arrêt attaqué.
8 À cet égard, ainsi que l’atteste l’expression « en toute hypothèse » figurant au point 52 de l’arrêt attaqué, ce n’est qu’à titre surabondant que le Tribunal a apprécié ces risques, après avoir confirmé, aux points 50 et 51 de cet arrêt, la conclusion de la chambre de recours selon laquelle la requérante n’avait pas démontré l’existence d’un lien, dans l’esprit du public pertinent, entre les marques en conflit.
9 Or, à défaut d’un tel lien dans l’esprit du public, l’usage de la marque postérieure n’est pas susceptible de tirer indûment profit du caractère distinctif ou de la renommée de la marque antérieure, ni de lui porter préjudice (ordonnance du 17 septembre 2015, Arnoldo Mondadori Editore/OHMI, C‑548/14 P, non publiée, EU:C:2015:624, point 75 et jurisprudence citée).
10 Dès lors que la première branche relative au lien entre les signes en conflit a été rejetée, les deuxième, troisième et quatrième branches, ne sauraient entraîner l’annulation de l’arrêt attaqué même si elles étaient fondées. Elles doivent donc être rejetées comme étant manifestement inopérantes.
11 Pour ces motifs, le pourvoi doit être rejeté comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.
Sur les dépens
12 En application de l’article 137 du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance. En l’espèce, la présente ordonnance étant adoptée avant que le pourvoi ne soit signifié à la partie défenderesse et, par conséquent, avant que celle-ci n’ait pu exposer des dépens, il convient de décider que Prada supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (septième chambre) ordonne :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Prada SA supporte ses propres dépens.
Signatures
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* Langue de procédure : l’anglais.