CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. EVGENI TANCHEV
présentées le 13 septembre 2018 ( 1 )
Affaires jointes C‑262/17, C‑263/17 et C‑273/17
Solvay Chimica Italia SpA,
Solvay Specialty Polymers Italy SpA,
Solvay Chimica Bussi SpA,
Fenice – Qualità Per L’ambiente SpA,
Ferrari SpA,
Erg Power Srl,
Erg Power Generation SpA,
Eni SpA,
Enipower SpA (C‑262/17),
Whirlpool Europe Srl,
Fenice – Qualità Per L’ambiente SpA,
FCA Italy SpA,
FCA Group Purchasing Srl,
FCA Melfi SpA,
Barilla G. e R. Fratelli SpA,
Versalis SpA (C‑263/17),
Sol Gas Primari Srl (C‑273/17)
contre
Autorità per l’energia elettrica, il gas e il sistema idrico
Parties intervenantes :
Terna SpA,
Nuova Solmine SpA,
American Husky III,
Inovyn Produzione Italia SpA,
Sasol,
Radici Chimica SpA,
La Vecchia Soc. cons. a r.l.,
Santa Margherita e Kettmeir e Cantine Torresella SpA,
Zignago Vetro SpA,
Chemisol Italia Srl,
Vinavil SpA,
Italgen SpA,
Arkema Srl,
Yara Italia SpA,
Ineos Manufacturing Italia SpA,
ENEL Distribuzione SpA,
CSEA – Cassa per i servizi energetici e ambientali,
Ministero dello Sviluppo Economico
[demande de décision préjudicielle formée par le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (tribunal administratif régional de Lombardie, Italie)]
« Renvoi préjudiciel – Marché intérieur de l’électricité – Directive 2009/72/CE – Réseaux fermés de distribution – Notion de “réseau de distribution” – Pouvoir des États membres d’exempter les gestionnaires de réseaux fermés de distribution de certaines exigences – Accès des tiers – Redevances au titre du service d’appel »
1. En l’espèce, la Cour est invitée à interpréter le concept de « réseaux fermés de distribution » d’électricité au sens de l’article 28 de la directive 2009/72/CE ( 2 ). Ce concept a été introduit en droit dérivé de l’Union à la suite de l’arrêt rendu par la Cour dans l’affaire citiworks ( 3 ).
2. Dans l’affaire citiworks, la Cour était interrogée sur le point de savoir si l’obligation imposée aux États membres au titre de l’article 20, paragraphe 1, de la directive 2003/54/CE ( 4 ), soit l’actuel article 32, paragraphe 1, de la directive 2009/72, selon laquelle ceux-ci se doivent de garantir un libre accès aux réseaux de transport et de distribution ( 5 ), s’applique à un réseau qui fournit de l’électricité uniquement à son gestionnaire, c’est-à-dire à l’organe de gestion de l’aéroport de
Leipzig/Halle, ainsi qu’à 93 autres entreprises établies sur le site de cet aéroport. La Cour a jugé, premièrement, qu’un tel réseau devait être considéré comme un réseau de distribution, dès lors que la directive 2003/54 n’établissait pas de conditions afférentes à la taille ou à la consommation d’électricité du réseau. Deuxièmement, la Cour a estimé que l’article 20, paragraphe 1, de la directive 2003/54 s’appliquait au réseau concerné, étant donné que le libre accès des tiers aux réseaux de
distribution constitue l’une des mesures essentielles que les États membres sont tenus de mettre en œuvre pour parvenir à l’achèvement du marché intérieur de l’électricité et que ledit réseau n’entrait dans le champ d’application d’aucune des exceptions ou dérogations à l’obligation de fournir un libre accès prévues par la directive 2003/54 ( 6 ).
3. À la suite de l’arrêt prononcé par la Cour dans l’affaire citiworks, l’on s’est inquiété de ce que les exigences de la directive 2003/54 étaient trop lourdes pour les gestionnaires de réseaux de distribution tels que celui qui avait fait l’objet de cet arrêt ( 7 ).
4. La directive 2009/72 a donc introduit le concept de « réseaux fermés de distribution » et permis à leurs gestionnaires d’être exemptés de certaines des obligations qu’elle prévoit. Conformément à l’article 28 de la directive 2009/72, un réseau fermé de distribution est un réseau qui, premièrement, distribue de l’électricité à l’intérieur d’un site industriel, commercial ou de partage de services géographiquement limité et qui, deuxièmement, soit approvisionne des utilisateurs dont les opérations
ou le processus de production sont intégrés, soit fournit de l’électricité essentiellement au propriétaire ou au gestionnaire du réseau, ou aux entreprises qui leur sont liées. En vertu de cette même disposition, les États membres peuvent exempter ces réseaux, premièrement, de l’obligation, prévue à l’article 25, paragraphe 5, de cette directive, de se procurer l’énergie utilisée pour couvrir les pertes et maintenir une capacité de réserve selon des procédures transparentes, non discriminatoires
et reposant sur les règles du marché et, deuxièmement, de l’obligation, prévue à l’article 32, paragraphe 1, de cette même directive, de veiller à ce que les tarifs ou leurs méthodes de calcul soient approuvés avant leur entrée en vigueur par l’autorité de régulation nationale compétente ( 8 ).
5. En l’espèce, la Cour est invitée à interpréter l’article 28 de la directive 2009/72 pour la première fois, dans le cadre d’une demande de décision préjudicielle introduite par le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (tribunal administratif régional de Lombardie, Italie). Il est demandé à la Cour de préciser le champ d’application de cette disposition. Il lui est également demandé si les gestionnaires de réseaux fermés de distribution sont tenus d’offrir un libre accès aux tiers et
si lesdits gestionnaires peuvent être exemptés d’obligations autres que celles visées à l’article 28 de la directive 2009/72. Enfin, la Cour est invitée à se prononcer sur le point de savoir si les utilisateurs de réseaux fermés de distribution peuvent se voir imposer les règles applicables aux utilisateurs du réseau public ( 9 ) concernant les redevances dues au titre du service d’appel.
I. Le cadre juridique
A. Le droit de l’Union
6. L’article 28 de la directive 2009/72, intitulé « Réseaux fermés de distribution », dispose :
« 1. Les États membres peuvent prévoir que les autorités de régulation nationales ou d’autres autorités compétentes qualifient de réseau fermé de distribution un réseau qui distribue de l’électricité à l’intérieur d’un site industriel, commercial ou de partage de services géographiquement limité et qui, sans préjudice du paragraphe 4, n’approvisionne pas de clients résidentiels :
a) si, pour des raisons spécifiques ayant trait à la technique ou à la sécurité, les opérations ou le processus de production des utilisateurs de ce réseau sont intégrés ; ou
b) si ce réseau fournit de l’électricité essentiellement au propriétaire ou au gestionnaire du réseau, ou aux entreprises qui leur sont liées.
2. Les États membres peuvent prévoir que les autorités de régulation nationales exemptent le gestionnaire d’un réseau fermé de distribution :
a) de l’obligation, prévue à l’article 25, paragraphe 5, de se procurer l’énergie qu’il utilise pour couvrir les pertes d’énergie et maintenir une capacité de réserve dans son réseau selon des procédures transparentes, non discriminatoires et reposant sur les règles du marché ;
b) de l’obligation, prévue à l’article 32, paragraphe 1, de veiller à ce que les tarifs, ou les méthodes de calcul de ceux-ci, soient approuvés avant leur entrée en vigueur conformément à l’article 37.
3. Dans le cas où une exemption est accordée en vertu du paragraphe 2, les tarifs applicables, ou les méthodes de calcul de ceux-ci, sont vérifiés et approuvés conformément à l’article 37 à la demande d’un utilisateur du réseau fermé de distribution.
4. L’usage accessoire par un petit nombre de clients résidentiels employés par le propriétaire du réseau de distribution, ou associés à lui de façon similaire, et situés dans la zone desservie par le réseau fermé de distribution n’interdit pas d’accorder une exemption en vertu du paragraphe 2. »
7. En vertu de l’article 32 de la directive 2009/72, intitulé « Accès des tiers » :
« 1. Les États membres veillent à ce que soit mis en place, pour tous les clients éligibles, un système d’accès des tiers aux réseaux de transport et de distribution. Ce système, fondé sur des tarifs publiés, doit être appliqué objectivement et sans discrimination entre les utilisateurs du réseau. Les États membres veillent à ce que ces tarifs, ou les méthodes de calcul de ceux-ci, soient approuvés avant leur entrée en vigueur conformément à l’article 37, et à ce que ces tarifs et les méthodes
de calcul, lorsque seules les méthodes de calcul sont approuvées, soient publiés avant leur entrée en vigueur.
2. Le gestionnaire d’un réseau de transport ou de distribution peut refuser l’accès s’il ne dispose pas de la capacité nécessaire. Le refus doit être dûment motivé et justifié, eu égard, en particulier, à l’article 3, et reposer sur des critères objectifs et techniquement et économiquement fondés. […] »
8. L’article 37 de la directive 2009/72, sous l’intitulé « Missions et compétences de l’autorité de régulation », prévoit :
« […]
6. Les autorités de régulation se chargent de fixer ou d’approuver, suffisamment à l’avance avant leur entrée en vigueur, au moins les méthodes utilisées pour calculer ou établir :
a) les conditions de raccordement et d’accès aux réseaux nationaux, y compris les tarifs de transport et de distribution ou leurs méthodes. Ces tarifs ou méthodes permettent de réaliser les investissements nécessaires à la viabilité des réseaux ;
b) les conditions de la prestation de services d’ajustement, qui sont assurés de la manière la plus économique possible et qui fournissent aux utilisateurs du réseau des éléments d’incitation appropriés pour qu’ils équilibrent leur apport et leur consommation. Les services d’ajustement sont équitables et non discriminatoires et fondés sur des critères objectifs ; et
c) l’accès aux infrastructures transfrontalières, y compris les procédures d’attribution des capacités et de gestion de la congestion.
7. Les méthodes ou les conditions visées au paragraphe 6 sont publiées.
8. Lors de la fixation ou de l’approbation des tarifs ou des méthodes et des services d’ajustement, les autorités de régulation prévoient des mesures incitatives appropriées, tant à court terme qu’à long terme, pour encourager les gestionnaires de réseau de transport et de distribution à améliorer les performances, à favoriser l’intégration du marché et la sécurité de l’approvisionnement et à soutenir les activités de recherche connexes.
[…] »
B. Le droit italien
1. La loi no 99/2009
9. L’article 30, paragraphe 27, de la loi no 99/2009 ( 10 ) prévoit :
« Afin de garantir et d’améliorer la qualité du service de fourniture d’électricité aux clients finals connectés, moyennant des réseaux privés avec une éventuelle production interne, au réseau électrique national […], le ministère du Développement économique établit, dans les cent‑vingt jours à compter de la date d’entrée en vigueur de la présente loi, de nouveaux critères pour la définition des relations existant entre le gestionnaire du réseau, les sociétés de distribution en régime de
concession, le propriétaire des réseaux privés et le client final connecté à ces réseaux. L’autorité de régulation de l’énergie électrique et du gaz est chargée de la mise en œuvre de ces critères aux fins de l’adaptation et de la sauvegarde des droits acquis, notamment eu égard à la nécessité d’une utilisation rationnelle des ressources existantes. »
10. L’article 33 de la loi no 99/2009 instaure un type particulier de réseaux privés, dénommés « réseaux internes d’utilisation » (ci-après les « RIU »). L’article 33, paragraphe 1, de la loi no 99/2009 dispose :
« […] est défini comme un réseau interne d’utilisation (RIU) un réseau électrique répondant à toutes les conditions suivantes :
a) il s’agit d’un réseau existant à la date d’entrée en vigueur de la présente loi, ou bien d’un réseau dont les travaux de réalisation ont été entamés à la même date, ou pour lequel toutes les autorisations prévues par la réglementation en vigueur ont été obtenues ;
b) il relie des unités de consommation industrielle, ou relie des unités de consommation industrielle et des unités de production d’électricité essentielles, d’un point de vue fonctionnel, au processus de production industrielle, à condition qu’elles soient situées dans des zones relevant du territoire de, au maximum, trois communes limitrophes ou, au maximum, trois provinces limitrophes uniquement lorsque les unités de production sont alimentées par des sources renouvelables ;
c) il s’agit d’un réseau qui n’est pas soumis à l’obligation de connexion des tiers, sans préjudice du droit de chacune des entités relevant du même réseau de se connecter, à titre d’alternative, au réseau avec obligation de connexion des tiers ;
d) il est relié, moyennant un ou plusieurs points de connexion, à un réseau avec obligation de connexion des tiers dont la tension nominale est d’au moins 120 kV ;
e) l’entité responsable agit comme un gestionnaire unique du même réseau. Cette entité peut être distincte des entités propriétaires des unités de consommation ou de production, mais elle ne peut pas être titulaire de concessions de transport et d’appel ou de distribution d’électricité ».
2. Le décret ministériel du 10 décembre 2010
11. L’article 30, paragraphe 27, de la loi no 99/2009 a été mis en œuvre par le décret ministériel du 10 décembre 2010 ( 11 ).
12. Le décret ministériel du 10 décembre 2010 a établi, entre autres, les obligations suivantes : premièrement, l’obligation, pour les gestionnaires des réseaux privés, de permettre aux utilisateurs finals qui y sont connectés de demander et obtenir la connexion, physique et virtuelle, au réseau public ; deuxièmement, l’obligation, pour les gestionnaires des réseaux privés, d’en permettre l’utilisation par les gestionnaires des réseaux publics afin de garantir le droit des utilisateurs finals
d’obtenir la connexion au réseau public.
13. D’après la décision de renvoi, le droit italien ne définit pas les réseaux visés à l’article 30, paragraphe 27, de la loi no 99/2009 ( 12 ). Ces réseaux constituent donc une catégorie résiduelle, distincte des RIU comme des réseaux simples de production et de consommation ( 13 ). Ils seront désignés ci-après par l’expression suivante : « les autres réseaux privés ».
3. Le décret législatif no 93/2011
14. Conformément à l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011 ( 14 ) :
« Sans préjudice des dispositions relatives aux réseaux efficaces d’utilisation visés à l’article 2, paragraphe 1, sous t), du décret législatif no 115/2008, les réseaux fermés de distribution sont les réseaux intérieurs d’utilisation tels que définis à l’article 33 de la loi no 99/2009, ainsi que les autres réseaux électriques définis à l’article 30, paragraphe 27, de la loi no 99/2009 […] ».
15. D’après la décision de renvoi, l’expression « réseaux fermés de distribution » employée à l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011 est un renvoi à l’article 28 de la directive 2009/72.
16. Seuls les RIU ( 15 ) et les autres réseaux privés ( 16 ) sont considérés, en droit italien, comme des réseaux fermés de distribution.
17. Selon la décision de renvoi, les réseaux visés à l’article 2, paragraphe 1, sous t), du décret législatif no 115/2008 ( 17 ) (les « réseaux efficaces d’utilisation ») et les réseaux visés à l’article 10, paragraphe 2, sous b), de ce même décret législatif (les « réseaux existants assimilés aux réseaux efficaces d’utilisation ») ne sont pas considérés, en droit italien, comme des réseaux fermés de distribution.
18. En vertu de l’article 2, paragraphe 1, sous t), du décret législatif no 115/2008, dans la version en vigueur à l’époque des faits, un réseau efficace d’utilisation est un « réseau dans lequel une installation de production d’électricité […] est directement reliée, moyennant une connexion privée sans obligation de connexion des tiers, à l’installation pour la consommation d’un seul client final et est réalisée au sein de la zone de propriété ou bien se trouve dans la pleine disponibilité du même
client ». Selon l’article 10, paragraphe 2, sous b), du décret législatif no 115/2008, dans la version en vigueur à l’époque des faits, les réseaux existants assimilés aux réseaux efficaces d’utilisation sont des réseaux qui « ont une configuration conforme à la définition de l’article 2, paragraphe 1, sous t), ou qui relient, moyennant une connexion privée sans obligation de connexion des tiers, exclusivement des unités de production et de consommation d’électricité appartenant à la même entité
juridique ». Les réseaux efficaces d’utilisation sont considérés, à l’instar des réseaux existants assimilés aux réseaux efficaces d’utilisation, comme des « réseaux simples de production et de consommation ».
4. Le décret-loi no 91/2014
19. L’article 24, paragraphe 2, du décret-loi no 91/2014 ( 18 ) prévoit :
« Pour les réseaux internes d’utilisation visés à l’article 33 de la loi no 99/2009, tel que modifié ultérieurement, pour les réseaux visés à la deuxième phrase du paragraphe 2 de l’article 10 du décret législatif no 115/2008, tel que modifié ultérieurement, ainsi que pour les réseaux efficaces d’utilisation visés au paragraphe 1 du même article 10, dont l’exploitation a commencé au plus tard le 31 décembre 2014, les montants dus pour couvrir les coûts généraux du système visés au paragraphe 1,
uniquement pour ce qui est des parties variables, sont calculés en fonction de l’électricité consommée et non en fonction de l’électricité prélevée du réseau, à hauteur de 5 % des montants unitaires correspondants dus sur l’énergie prélevée du réseau ».
5. La décision no 539/2015
20. L’annexe A de la décision de l’Autorità per l’energia elettrica il gas e il sistema idrico (autorité de régulation pour l’électricité, le gaz et l’eau, ci-après l’« AEEGSI ») no 539/2015 ( 19 ) établit les dispositions applicables aux réseaux fermés de distribution.
21. L’annexe A, article 8, de la décision no 539/2015 dispose qu’« un réseau fermé de distribution est un réseau avec obligation de connecter uniquement les utilisateurs qui, conformément à l’article 6 de la présente décision, font partie de ceux pouvant être connectés au même réseau fermé de distribution ».
22. Suivant l’annexe A, article 10, paragraphe 6, de la décision no 539/2015, « le gestionnaire du réseau fermé de distribution, au regard des obligations en matière de dissociation comptable visées dans le texte consolidé sur la dissociation comptable, et de séparation fonctionnelle visées dans le texte consolidé sur la séparation fonctionnelle, est considéré comme équivalant à un prestataire du service de distribution de l’électricité avec moins de 5000 points de sortie» ( 20 ).
23. En vertu de l’annexe A, article 22, paragraphe 1, de la décision no 539/2015, « les règles en matière d’appel s’appliquent à l’électricité injectée et prélevée du réseau fermé de distribution par chaque utilisateur à travers le point de connexion de son installation à ce réseau ».
II. Les faits, le litige au principal et les questions préjudicielles
24. Solvay Chimica Italia SpA (ci-après « Solvay »), Erg Power Srl et Erg Power Generation SpA (ci-après, ensemble, « Erg Power »), Eni SpA, Enipower SpA et Versalis SpA (ci-après, ensemble, « Eni »), Sol Gas Primari Srl et Whirlpool Europe Srl possèdent ou gèrent des réseaux privés de distribution d’électricité qui sont considérés, en vertu de l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011, comme des réseaux fermés de distribution. Par exemple, Erg Power Srl possède et Erg Power
Generation SpA gère le RIU du centre pétrochimique établi dans les communes de Priolo Gargallo et de Melilli (situées toutes deux dans la province de Syracuse). Ce RIU connecte onze entreprises à une centrale thermoélectrique dont le gestionnaire est Erg Power Srl.
25. À la suite de la qualification des réseaux détenus ou gérés par les entreprises visées au point précédent de réseaux fermés de distribution au sens de l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011, l’AEEGSI a adopté la décision no 539/2015, par laquelle elle a imposé de nouvelles obligations aux gestionnaires de ces mêmes réseaux.
26. C’est pour cette raison que ces entreprises, parmi d’autres, ont formé un recours devant le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (tribunal administratif régional de Lombardie) aux fins d’obtenir l’annulation de la décision no 539/2015.
27. Les parties requérantes au principal ont affirmé que la décision no 539/2015 soumettait les réseaux fermés de distribution, au sens de l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011, aux règles applicables au réseau public ( 21 ), sans tenir compte des spécificités des réseaux susmentionnés. Selon les requérantes au principal, assimiler de tels réseaux au réseau public n’est pas conforme à l’article 28 de la directive 2009/72.
28. Devant la juridiction de renvoi, les requérantes au principal ont critiqué les aspects suivants de la décision no 539/2015 : premièrement, l’obligation de connexion des tiers, imposée aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution au sens de l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011 ; deuxièmement, l’obligation de dissociation comptable et fonctionnelle imposée à ces mêmes gestionnaires ; troisièmement, l’application des redevances dues au titre du service d’appel à chaque
utilisateur connecté au réseau fermé de distribution, sans toutefois traiter l’ensemble dudit réseau comme un utilisateur unique du service d’appel, comme c’était le cas auparavant ; quatrièmement, l’application des redevances dues au titre des coûts généraux du réseau électrique à la consommation d’électricité de chacun des utilisateurs connectés au réseau fermé de distribution, même lorsqu’il s’agit d’électricité produite au sein dudit réseau.
29. Le Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (tribunal administratif régional de Lombardie) a considéré qu’il n’était pas en mesure de trancher le litige et a soumis les questions préjudicielles suivantes à l’appréciation de la Cour :
« 1) Les dispositions de la [directive 2009/72], et en particulier l’article 3, paragraphes 5 et 6, et l’article 28, doivent-elles être interprétées dans le sens qu’un réseau constitué et géré par une entité privée, auquel est relié un nombre limité d’unités de production et de consommation, et qui est à son tour connecté au réseau public, constitue nécessairement un réseau électrique, et donc un “réseau de distribution” au sens de cette directive, sans la possibilité d’exclure de cette
qualification les réseaux privés dotés de ces caractéristiques, constitués avant l’entrée en vigueur de la directive et ayant à l’origine pour finalité l’autoproduction ?
2) En cas de réponse affirmative à la question précédente, le fait de classer un réseau électrique privé dans la catégorie des réseaux fermés de distribution visés à l’article 28 de la [directive 2009/72] en cause constitue-t-il la seule possibilité offerte par cette directive pour tenir compte de ses particularités, ou bien est-il permis au législateur national d’établir une catégorie différente de réseaux de distribution soumis à un régime simplifié, différent de celui prévu pour les réseaux
fermés de distribution ?
3) Indépendamment des questions précédentes, la [directive 2009/72] doit-elle être interprétée dans le sens que l’obligation de connexion des tiers est imposée dans tous les cas aux réseaux fermés de distribution visés à l’article 28 ?
4) Indépendamment des questions précédentes, la qualification d’un réseau électrique privé comme un réseau fermé de distribution, au sens de l’article 28 de la [directive 2009/72], permet-elle au législateur national de prévoir, en faveur de ce réseau, seulement les dérogations au régime général des réseaux de distribution expressément prévues par l’article 28 et par l’article 26, paragraphe 4 de la même directive, ou bien – eu égard à ce qui est exprimé aux considérants 29 et 30 de ladite
directive – est-il permis, voire imposé à l’État membre de prévoir d’autres exceptions à l’application du régime général des réseaux de distribution, de façon à assurer la poursuite des objectifs indiqués dans lesdits considérants ?
5) Dans le cas où la Cour jugerait possible ou obligatoire, pour l’État membre, d’adopter une réglementation qui tienne compte de la spécificité des réseaux fermés de distribution, les dispositions de la [directive 2009/72] – et en particulier les considérants 29 et 30, l’article 15, paragraphe 7, l’article 37, paragraphe 6, sous b), l’article 26, paragraphe 4 – s’opposent-elles à une réglementation nationale, comme celle pertinente dans la présente procédure, qui soumet les réseaux fermés de
distribution à un régime, en matière d’appel et de dissociation, tout à fait analogue à celui applicable aux réseaux publics et qui, en matière de coûts généraux du système électrique, prévoit que les montants dus au titre de la couverture de ces coûts sont en partie proportionnels également à l’électricité consommée à l’intérieur du réseau fermé ? »
30. Des observations écrites ont été déposées par Solvay, Erg Power, Eni, la République italienne, la République hellénique, le Royaume des Pays-Bas et la Commission européenne.
31. En réponse à une demande d’éclaircissements adressée par la Cour conformément à l’article 101 de son règlement de procédure, la juridiction de renvoi a indiqué, par décision du 12 avril 2018, premièrement, que l’obligation de dissociation fonctionnelle ne s’appliquait plus aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution au sens de l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011 ( 22 ) et, deuxièmement, que l’article 24, paragraphe 2, du décret-loi no 91/2014 a été abrogé, de
sorte que les redevances dues au titre des coûts généraux du système électrique s’appliquent à présent à l’électricité prélevée du réseau public par le réseau fermé de distribution dans son ensemble ( 23 ).
32. Par conséquent, la juridiction de renvoi a procédé au retrait de la cinquième question préjudicielle dans la mesure où celle-ci portait sur les obligations de dissociation et sur les redevances dues au titre des coûts généraux du système électrique. Cependant, elle a maintenu cette même question dans la mesure où celle-ci portait sur les redevances dues au titre du service d’appel.
33. Solvay, Eni, la République italienne et la Commission ont présenté des observations orales lors de l’audience du 31 mai 2018.
III. Analyse
A. Observations liminaires
34. Par souci de clarté, je précise que la référence, dans les questions préjudicielles, à l’expression « le réseau public » doit être entendue comme une référence aux réseaux de distribution et de transport qui sont exploités en vertu d’un contrat de concession. En effet, conformément à l’annexe A, article 1er, point 1, sous u), de la décision no 539/2015, un « réseau public » est « tout réseau électrique exploité en vertu d’un contrat de concession pour le transport ou pour la distribution
d’électricité », dont le gestionnaire est « tenu de fournir un accès aux tiers qui en font la demande », car il fournit un service public.
35. Par conséquent, les réseaux de transport ou de distribution qui sont exploités, selon le droit italien, en vertu d’un contrat de concession seront désignés, dans les présentes conclusions, par l’expression « le réseau public ». Les RIU ( 24 ), les autres réseaux privés ( 25 ) et les réseaux simples de production et de consommation ( 26 ) ne font pas partie du réseau public.
36. J’examinerai tout d’abord la question de savoir si un réseau constitué et géré par une entité privée, auquel est relié un nombre limité d’unités de production et de consommation, et qui est à son tour connecté au réseau public, doit être considéré comme un « réseau de distribution » au sens de la directive 2009/72 (première question préjudicielle). Étant donné que tel est, selon moi, le cas, j’examinerai ensuite la question de savoir si les États membres peuvent exempter un réseau de
distribution des obligations prévues par la directive 2009/72 dans la seule hypothèse où ledit réseau peut être qualifié de réseau fermé de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de ladite directive, ou si les États membres sont en droit de définir une autre catégorie de réseaux de distribution, susceptible de faire l’objet d’autres exemptions (deuxième question préjudicielle). J’analyserai ensuite la question de savoir si l’obligation de fournir un accès aux tiers, énoncée à
l’article 32 de la directive 2009/72, s’applique aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution (troisième question préjudicielle) et si les obligations énumérées à l’article 26, paragraphe 4, et à l’article 28, paragraphe 2, de la directive susvisée sont les seules dont les gestionnaires de réseaux fermés de distribution peuvent être exemptés par les États membres (quatrième question préjudicielle). Enfin, j’examinerai si la directive en cause s’oppose à une réglementation nationale qui
applique aux utilisateurs de réseaux fermés de distribution les règles applicables aux utilisateurs du réseau public, s’agissant des redevances dues au titre du service d’appel (cinquième question préjudicielle).
B. Sur la première question préjudicielle
37. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande à la Cour si un réseau constitué et géré par une entité privée, auquel est relié un nombre limité d’unités de production et de consommation, et qui est à son tour connecté au réseau public, doit être considéré comme un « réseau de distribution » au sens de la directive 2009/72 et, en particulier, de l’article 2, paragraphes 5 et 6, ainsi que de l’article 28 de celle-ci. La juridiction de renvoi demande également à la Cour s’il convient
de tenir compte, à cet égard, du fait qu’un tel réseau a été constitué avant l’entrée en vigueur de la directive 2009/72 ou qu’il avait à l’origine pour finalité l’autoproduction.
38. Je précise que, selon moi, la référence, dans la première question préjudicielle, à l’article 3, paragraphes 5 et 6, de la directive 2009/72 doit être comprise comme une référence à l’article 2, paragraphes 5 et 6, de celle-ci. En effet, l’article 3, paragraphes 5 et 6, porte sur les obligations de service public (plus précisément, sur le droit des consommateurs de changer de fournisseur et d’obtenir toutes les données de consommation pertinentes, ainsi que sur l’obligation des États membres
d’octroyer une compensation et des droits exclusifs pour l’accomplissement d’obligations de service public de manière non discriminatoire). Cette disposition n’est guère pertinente aux fins de la qualification des RIU et des autres réseaux privés comme réseaux de distribution. De plus, l’article 3, paragraphes 5 et 6, de ladite directive n’est pas cité dans les motifs de la demande de décision préjudicielle. En revanche, l’article 2, paragraphes 5 et 6, de cette directive est bien mentionné dans
lesdits motifs. En outre, cette disposition est pertinente pour la première question préjudicielle, car elle définit les notions de « distribution » et de « gestionnaire de réseau de distribution ».
39. Solvay et Erg Power soutiennent que les réseaux constitués et gérés par une entité privée, auxquels est relié un nombre limité d’unités de production et de consommation, et qui sont à leur tour connectés au réseau public, ne doivent pas nécessairement être qualifiés de réseaux de distribution au sens de l’article 2, paragraphes 5 et 6, ainsi que de l’article 28 de la directive 2009/72. Selon Solvay et Erg Power, il est possible de refuser cette qualification aux réseaux qui possèdent ces
caractéristiques, qui ont été constitués avant l’entrée en vigueur de la directive 2009/72 et qui ont été créés à l’origine dans un but d’autoproduction. Eni soutient que les RIU ne peuvent pas être qualifiés de réseaux de distribution au sens de la directive 2009/72.
40. Le gouvernement italien soutient que les RIU constituent des réseaux de distribution au sens de la directive 2009/72. Les gouvernements grec et néerlandais, ainsi que la Commission, estiment qu’un réseau constitué et géré par une entité privée, auquel est relié un nombre limité d’unités de production et de consommation, et qui est à son tour connecté au réseau public, doit être considéré comme un réseau de distribution.
41. Comme l’indique la juridiction de renvoi, la directive 2009/72 ne définit pas la notion de « réseau de distribution ». Cependant, selon l’article 2, paragraphe 5, de ladite directive, le terme « distribution » désigne « le transport d’électricité sur des réseaux de distribution à haute, à moyenne et à basse tension aux fins de fourniture à des clients, mais ne comprenant pas la fourniture» ( 27 ). Par conséquent, comme la Cour l’a affirmé dans l’arrêt citiworks, un réseau de distribution est un
réseau servant à acheminer de l’électricité à haute, à moyenne ou à basse tension, laquelle est destinée à être vendue à des clients grossistes ou à des clients finals ( 28 ).
42. Il importe peu, aux fins de déterminer si un réseau constitue un réseau de distribution au sens de la directive 2009/72, que celui-ci relie seulement un nombre limité d’unités de production et de consommation.
43. En effet, la distribution est définie comme le transport d’électricité sur certains réseaux aux fins de fourniture à des « clients ». Rien dans l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2009/72 n’indique que le transport d’électricité aux fins de sa fourniture à quelques clients seulement ne devrait pas être considéré comme une distribution au sens de cette disposition. Par conséquent, il n’y a pas de raison pour qu’un réseau qui se contente de relier quelques unités de production et de
consommation ne soit pas considéré comme un réseau de distribution au sens de la directive 2009/72. À cet égard, j’observe que le réseau en cause dans l’affaire citiworks, que la Cour a qualifié de réseau de distribution au sens de la directive 2009/72, approvisionnait un nombre limité de clients ( 29 ). D’après la Cour, « le législateur [de l’Union] n’a […] pas entendu exclure certains réseaux […] de distribution du champ d’application de la directive 2003/54 en raison de leur taille ou de leur
consommation d’électricité» ( 30 ).
44. Il n’importe pas davantage, aux fins de déterminer si un réseau constitue un réseau de distribution au sens de la directive 2009/72, que celui-ci ait été constitué avant l’entrée en vigueur de ladite directive. La directive 2009/72 n’indique pas qu’elle ne s’applique pas aux réseaux constitués avant son entrée en vigueur.
45. Enfin, il importe peu, afin de déterminer si un réseau peut être qualifié de réseau de distribution au sens de la directive 2009/72, que celui-ci ait été constitué, à l’origine, dans un but d’autoproduction.
46. Je note que, conformément à l’article 28, paragraphe 1, sous b), de la directive 2009/72, un réseau qui « fournit de l’électricité essentiellement au propriétaire ou au gestionnaire du réseau, ou aux entreprises qui leur sont liées » peut être qualifié de réseau fermé de distribution (et, par conséquent, de réseau de distribution, ainsi que je l’expliquerai ci-dessous) ( 31 ). La note interprétative de la Commission sur les marchés de détail indique que l’article 28, paragraphe 1, sous b), de la
directive 2009/72 s’applique « lorsqu’une entreprise a autorisé des utilisateurs à se connecter à un réseau qui a été développé pour son propre usage» ( 32 ). J’estime que cette disposition englobe les réseaux de distribution qui, à l’instar des RIU, ont été constitués à l’origine dans un but d’autoproduction ( 33 ).
47. Par conséquent, la réponse à la première question préjudicielle devrait être formulée comme suit : l’article 2, paragraphe 5, et l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72 doivent être interprétés en ce sens qu’un réseau constitué et géré par une personne privée, auquel est relié un nombre limité d’unités de production et de consommation, et qui est à son tour connecté au réseau principal, est un réseau de distribution. Il importe peu, à cet égard, que ce réseau ait été conçu à
l’origine comme un réseau d’autoproduction et qu’il ait été constitué avant l’entrée en vigueur de la directive 2009/72.
C. Sur la deuxième question préjudicielle
48. Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi interroge en substance la Cour sur le point de savoir si les États membres ne peuvent exempter un réseau de distribution des obligations prévues par la directive 2009/72 que si le réseau concerné constitue un réseau fermé de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de celle-ci, ou si les États membres sont en droit de définir une autre catégorie de réseaux de distribution et d’exempter les réseaux relevant de ladite catégorie
d’obligations autres que celles dont les réseaux fermés de distribution peuvent être exemptés.
49. Solvay, Erg Power et Eni soutiennent que le législateur national est autorisé à identifier une catégorie de réseaux de distribution autre que les réseaux fermés de distribution et d’établir, pour cette catégorie, un régime simplifié, autre que celui applicable aux réseaux fermés de distribution.
50. Les gouvernements italien, grec et néerlandais, ainsi que la Commission, considèrent que la directive 2009/72 n’autorise pas les États membres à définir une catégorie de réseaux de distribution autre que les réseaux fermés de distribution, ni à appliquer à une telle catégorie un autre régime simplifié.
51. Je relève que la directive 2009/72 impose certaines obligations aux gestionnaires de réseaux de distribution. En particulier, ces derniers doivent procéder à une dissociation fonctionnelle ( 34 ) et comptable ( 35 ). Ils sont également tenus de donner accès aux tiers sur la base de tarifs objectifs et non discriminatoires ( 36 ). En outre, le gestionnaire de réseau de distribution (lorsqu’il est chargé de cette fonction) doit se procurer l’énergie qu’il utilise pour couvrir les pertes d’énergie
et maintenir une capacité de réserve dans son réseau selon des procédures transparentes, non discriminatoires et reposant sur les règles du marché ( 37 ).
52. La directive 2009/72 prévoit quatre catégories de réseaux de distribution susceptibles d’être exemptés, par les États membres, d’obligations imposées par cette directive, à savoir les réseaux fermés de distribution, les petits réseaux isolés, les micro réseaux isolés et les réseaux qui approvisionnent moins de 100000 clients connectés.
53. Premièrement, un réseau de distribution constitue un réseau fermé de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72 si deux conditions sont remplies. En premier lieu, ce réseau doit « distribue[r] de l’électricité à l’intérieur d’un site industriel, commercial ou de partage de services géographiquement limité» ( 38 ). En second lieu, il doit distribuer de l’électricité à des utilisateurs dont les opérations ou le processus de production sont intégrés ou en fournir
essentiellement à son propriétaire ou gestionnaire. Conformément à l’article 28, paragraphe 2, de cette directive, les États membres ont le pouvoir d’exempter le gestionnaire d’un réseau fermé de distribution, d’une part, de l’obligation, prévue à l’article 25, paragraphe 5, de se procurer l’énergie utilisée pour couvrir les pertes et maintenir une capacité de réserve selon des procédures transparentes, non discriminatoires et reposant sur les règles du marché et, d’autre part, de l’obligation,
prévue à l’article 32, paragraphe 1, de la directive 2009/72, d’approbation des tarifs avant leur entrée en vigueur, conformément à l’article 37 de ladite directive. En outre, conformément à l’article 26, paragraphe 4, de cette même directive, les États membres peuvent exempter des obligations de dissociation les réseaux de distribution qui approvisionnent moins de 100000 clients connectés, ce qui est probablement le cas des réseaux fermés de distribution ( 39 ).
54. Deuxièmement, les petits réseaux isolés sont, selon l’article 2, paragraphe 26, de la directive 2009/72, des réseaux « qui [ont] une consommation inférieure à 3000 GWh en 1996, et qui [peuvent] être interconnecté[s] avec d’autres réseaux pour une quantité inférieure à 5 % de [leur] consommation annuelle ». Conformément à l’article 44, paragraphe 1, de ladite directive, les États membres sont autorisés à prévoir des dérogations aux obligations prévues aux chapitres IV, VI, VII et VIII de celle-ci
(sous réserve, cependant, de l’autorisation de la Commission). En vertu de l’article 26, paragraphe 4, de la directive 2009/72, les États membres peuvent également exempter les petits réseaux isolés des obligations de dissociation ( 40 ).
55. Troisièmement, les micro réseaux isolés sont, selon l’article 2, paragraphe 27, de la directive 2009/72, des réseaux qui ont eu « une consommation inférieure à 500 GWh en 1996, et qui [ne sont] pas connecté[s] à d’autres réseaux ». Au titre de l’article 44, paragraphe 1, de la directive 2009/72, les États membres peuvent exempter les micro réseaux isolés des dispositions des chapitres III, IV, VI, VII et VIII de la directive (sous réserve, ici aussi, de l’autorisation de la Commission).
Conformément à l’article 26, paragraphe 4, de cette même directive, les États membres peuvent également exempter des obligations de dissociation les réseaux qui approvisionnent moins de 100000 clients connectés, ce qui est probablement le cas des micro réseaux isolés.
56. Quatrièmement, les réseaux approvisionnant moins de 100000 clients connectés peuvent, conformément à l’article 26, paragraphe 4, de la directive 2009/72, être exemptés des obligations de dissociation qui sont prévues aux paragraphes 1, 2 et 3 de cette disposition. Comme je l’ai indiqué précédemment, les réseaux fermés de distribution, les petits réseaux isolés et les micro réseaux isolés peuvent s’inscrire dans cette catégorie.
57. Il n’y a, selon moi, pas d’autres catégories de réseaux de distribution que les États membres puissent exempter des obligations énoncées par la directive 2009/72. Si le législateur de l’Union avait eu pour intention de conférer aux États membres le pouvoir de définir une autre catégorie de réseaux de distribution et de prévoir des exemptions pour les réseaux relevant de cette catégorie, il l’aurait fait expressément, comme il l’a fait à l’article 26, paragraphe 4, à l’article 28, paragraphe 2,
et à l’article 44, paragraphe 1, de cette même directive.
58. Par conséquent, les États membres peuvent exempter un réseau de distribution des obligations prévues par la directive 2009/72 uniquement si ledit réseau est un réseau fermé de distribution, un petit réseau isolé, un micro réseau isolé ou un réseau approvisionnant moins de 100000 clients connectés.
59. En l’espèce, il n’a pas été soutenu que les RIU ou les autres réseaux privés doivent être considérés comme de petits réseaux isolés ou des micro réseaux isolés. Cependant, les RIU et les autres réseaux privés sont qualifiés de réseaux fermés de distribution par l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011 ( 41 ).
60. C’est à la juridiction de renvoi qu’il incombe de déterminer si les RIU et les autres réseaux privés doivent être considérés comme des réseaux fermés de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72.
61. Toutefois, je note que, conformément à l’article 33, paragraphe 1, sous b), de la loi no 99/2009, les RIU doivent relier, soit des « unités de consommation industrielle », soit des « unités de consommation industrielle et des unités de production d’électricité» ( 42 ) et qu’ils doivent être situés « dans des zones relevant du territoire de, au maximum, trois communes limitrophes ou, au maximum, trois provinces limitrophes uniquement lorsque les unités de production sont alimentées par des
sources renouvelables ». Par conséquent, j’estime que le premier critère prévu par l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72, suivant lequel le réseau en cause distribue de l’électricité « à l’intérieur d’un site industriel […] géographiquement limité » est respecté. Je relève également que, à tout le moins lorsque les RIU relient des unités de consommation industrielle et des unités de production d’électricité qui sont « essentielles, d’un point de vue fonctionnel, pour le processus
de production industrielle », le second critère de l’article 28, paragraphe 1, sous a), selon lequel le processus de production des utilisateurs doit être intégré, est, à mon sens, rempli ( 43 ).
62. Par conséquent, il convient de répondre à la deuxième question préjudicielle comme suit : les États membres ne peuvent exempter des réseaux de distribution des obligations prévues par la directive 2009/72 que lorsque de tels réseaux peuvent être qualifiés de réseaux fermés de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de celle-ci, de petits réseaux isolés au sens de l’article 2, paragraphe 26, de celle-ci, de micro réseaux isolés au sens de l’article 2, paragraphe 27, de celle-ci, ou
lorsque ces réseaux approvisionnent moins de 100000 clients. Les États membres ne sont pas autorisés à définir une autre catégorie de réseaux de distribution, ni à exempter les réseaux relevant de ladite catégorie d’obligations autres que celles dont peuvent être exemptés les réseaux fermés de distribution, les petits réseaux isolés, les micro réseaux isolés ou les réseaux qui approvisionnent moins de 100000 clients connectés.
D. Sur la troisième question préjudicielle
63. Par sa troisième question, la juridiction de renvoi interroge la Cour sur le point de savoir si les gestionnaires de réseaux fermés de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72 sont tenus d’octroyer un accès aux tiers dans tous les cas.
64. Solvay, Erg Power, Eni et les gouvernements grec et italien sont d’avis que les gestionnaires de réseaux fermés de distribution ne sont pas tenus de conférer un accès aux tiers dans tous les cas ( 44 ).
65. La Commission estime que la directive 2009/72 ne permet pas aux États membres d’exempter les gestionnaires de réseaux fermés de distribution de l’obligation de fournir un accès aux tiers.
66. Selon l’article 32 de la directive 2009/72, les « États membres veillent à ce que soit mis en place […] un système d’accès des tiers aux réseaux […] de distribution », sur la base de tarifs objectifs et non discriminatoires. Les États membres doivent également veiller à ce que ces tarifs soient approuvés par les autorités nationales de régulation et publiés avant leur entrée en vigueur, conformément à l’article 37 de la directive susmentionnée.
67. Selon la jurisprudence, le libre accès des tiers aux réseaux de transport et de distribution constitue l’une des mesures essentielles que les États membres sont tenus de mettre en œuvre pour parvenir à l’achèvement du marché intérieur de l’électricité ( 45 ). À cet égard, le considérant 4 de la directive 2009/72 souligne qu’il n’existe pas encore d’accès non discriminatoire aux réseaux dans chaque État membre.
68. À mon sens, l’article 32 de la directive 2009/72 impose aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution de fournir un accès aux tiers.
69. Premièrement, je souligne que les réseaux fermés de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72 sont des réseaux de distribution ( 46 ). Par conséquent, toutes les obligations qui pèsent sur les gestionnaires de réseaux de distribution s’appliquent aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution, à moins que la directive n’en dispose autrement.
70. Cela est conforme à la note interprétative de la Commission sur les marchés de détail. Suivant la section 5.3 de celle-ci, « les réseaux fermés de distribution sont des réseaux de distribution et ne forment pas une nouvelle catégorie distincte de réseaux ».
71. Cela est également conforme à la proposition de la Commission relative à une refonte de la directive 2009/72, du 23 février 2017 ( 47 ). Cette proposition ajoute un cinquième paragraphe à l’article 28 de la directive 2009/72 (qui correspond à l’article 38 de la proposition de la Commission relative à une refonte de la directive 2009/72), qui dispose que « les réseaux fermés de distribution sont considérés comme des réseaux de distribution aux fins de [cette] directive ».
72. Deuxièmement, il est vrai que l’article 32, paragraphe 1, de la directive 2009/72 laisse aux États membres le soin de prendre les mesures nécessaires afin que soit mis en place un système d’accès des tiers aux réseaux de transport ou de distribution. Cependant, compte tenu de l’importance du principe du libre accès aux réseaux de transport ou de distribution ( 48 ), cette marge de manœuvre ne les autorise pas à écarter ledit principe, hormis les cas dans lesquels la directive 2009/72 prévoit des
exceptions ou des dérogations ( 49 ).
73. À cet égard, je relève que l’article 28, paragraphe 2, sous b), de la directive 2009/72 n’autorise pas les États membres à exempter les gestionnaires de réseaux fermés de distribution de l’obligation de fournir un accès non discriminatoire aux tiers.
74. En effet, l’article 28, paragraphe 2, sous b), de ladite directive dispose que les États membres peuvent exempter les gestionnaires de réseaux fermés de distribution de « l’obligation, prévue à l’article 32, paragraphe 1, de veiller à ce que les tarifs, ou les méthodes de calcul de ceux-ci, soient approuvés avant leur entrée en vigueur conformément à l’article 37 ». À ce titre, en vertu de l’article 28, paragraphe 2, sous b), de la directive 2009/72, les États membres peuvent exempter lesdits
gestionnaires de réseaux fermés de distribution de l’obligation relative à l’approbation préalable de leurs tarifs. Ainsi, les gestionnaires de ces réseaux fermés de distribution peuvent être autorisés à appliquer des tarifs négociés, comme mentionné dans la note interprétative de la Commission sur les marchés de détail ( 50 ). Lorsque cette option a été exercée, les utilisateurs d’un réseau fermé de distribution peuvent, au titre de l’article 28, paragraphe 3, de cette directive, inviter
l’autorité de régulation nationale à vérifier ces mêmes tarifs. Cependant, l’article 28, paragraphe 2, sous b), de la directive 2009/72 ne permet pas aux États membres d’exempter les gestionnaires de réseaux fermés de distribution de leur obligation de fournir un accès aux tiers ( 51 ).
75. J’observe également que la note interprétative de la Commission sur les marchés de détail prévoit, dans sa section 5.3, que « l’obligation d’octroyer aux tiers un accès au réseau est également applicable aux [gestionnaires de réseaux fermés de distribution] ».
76. À l’inverse, l’article 3, paragraphe 14, de la directive 2009/72 dispose que « les États membres peuvent décider de ne pas appliquer les dispositions [de l’article 32] […] si leur application risque d’entraver l’accomplissement, en droit ou en fait, des obligations imposées aux entreprises d’électricité dans l’intérêt économique général […]» ( 52 ). Conformément à la jurisprudence, les États membres sont autorisés à ne pas appliquer les dispositions de l’article 32 de la directive 2009/72
prévoyant un accès des tiers, sous réserve du respect des conditions visées à l’article 3, paragraphe 8, de ladite directive ( 53 ).
77. Par conséquent, l’article 32 de la directive 2009/72 impose aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution de fournir un accès aux tiers, pour autant que la capacité nécessaire ne leur fasse pas défaut, comme indiqué au second paragraphe de cette disposition.
78. En l’espèce, je relève que, conformément à l’annexe A, article 8, de la décision no 539/2015 ( 54 ), les RIU et les autres réseaux privés ne sont pas soumis à une obligation de connecter les tiers, alors que les utilisateurs de ces réseaux ont le droit d’être reliés au réseau public ( 55 ).
79. Par conséquent, si les RIU et les autres réseaux privés devaient être considérés comme des réseaux fermés de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72, les dispositions mentionnées au point précédent seraient incompatibles avec l’article 28, paragraphe 2, sous b), et avec l’article 32 de cette même directive.
80. Dès lors, il convient de répondre à la troisième question préjudicielle que l’article 28, paragraphe 2, sous b), et l’article 32 de la directive 2009/72 doivent être interprétés en ce sens que les gestionnaires de réseaux fermés de distribution sont tenus de fournir un accès aux tiers, à moins qu’ils ne disposent pas de la capacité nécessaire.
E. Sur la quatrième question préjudicielle
81. Par sa quatrième question, la juridiction de renvoi demande à la Cour si les États membres peuvent exempter les gestionnaires des réseaux fermés de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72 des seules obligations énumérées à l’article 26, paragraphe 4, et à l’article 28, paragraphe 2, de celle-ci, ou si les États membres peuvent ou doivent exempter ces gestionnaires d’autres obligations prévues par cette directive.
82. Solvay soutient que les États membres sont en droit d’exempter les réseaux fermés de distribution non seulement des obligations visées à l’article 26, paragraphe 4, et à l’article 28, paragraphe 2, de la directive 2009/72, mais également d’autres obligations prévues par ladite directive, afin d’éviter, comme l’indiquent les considérants 29 et 30 de cette directive, qu’une charge disproportionnée ou injustifiée ne soit imposée aux gestionnaires de ces réseaux. Erg partage le point de vue de
Solvay. Selon Eni, les États membres sont tenus d’exempter les gestionnaires de réseaux fermés de distribution d’autres obligations. Le gouvernement italien considère que les réseaux fermés de distribution peuvent être exemptés d’obligations autres que celles énumérées à l’article 26, paragraphe 4, et à l’article 28, paragraphe 2, de la directive 2009/72, pour autant que cela résulte en un régime simplifié. Selon le gouvernement grec, le pouvoir des États membres d’exempter lesdits gestionnaires
de réseaux fermés de distribution des obligations visées par cette directive n’est sans doute pas limité à celles énumérées à l’article 26, paragraphe 4, et à l’article 28, paragraphe 2, de celle‑ci.
83. Le gouvernement néerlandais considère que les États membres peuvent exempter les réseaux fermés de distribution des seules obligations énumérées à l’article 26, paragraphe 4, et à l’article 28, paragraphe 2, de la directive 2009/72. La Commission est d’avis que les réseaux fermés de distribution peuvent être exemptés uniquement des obligations prévues à l’article 25, paragraphe 5, et à l’article 32, paragraphe 1, de cette directive.
84. D’après moi, les États membres ne peuvent pas exempter les gestionnaires de réseaux fermés de distribution d’obligations autres que celles visées à l’article 26, paragraphe 4, et à l’article 28, paragraphe 2, de la directive 2009/72, à savoir : premièrement, les obligations de dissociation prévues à l’article 26, paragraphes 1, 2 et 3, de cette directive ; deuxièmement, l’obligation prévue à l’article 25, paragraphe 5, de se procurer l’énergie utilisée pour couvrir les pertes et maintenir une
capacité de réserve selon des procédures transparentes, non discriminatoires et reposant sur les règles du marché ; troisièmement, l’obligation relative à l’approbation préalable des tarifs par l’autorité de régulation nationale, examinée aux points 63 à 80 des présentes conclusions.
85. Premièrement, ainsi que je l’ai indiqué précédemment ( 56 ), les réseaux fermés de distribution sont des réseaux de distribution. Par conséquent, toutes les obligations qui pèsent sur les gestionnaires de réseaux de distribution s’appliquent aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution, à moins que la directive n’en dispose autrement.
86. Deuxièmement, j’observe qu’au cours des travaux préparatoires afférents à la directive 2009/72, le Parlement européen a proposé d’ajouter un paragraphe à l’article 26 de la directive 2003/54 ( 57 ), qui prévoyait qu’« il [serait] loisible aux États membres d’exempter des sites industriels de l’application des dispositions des chapitres III, IV, V, VI et VII» ( 58 ). Les « sites industriels » ont été définis par le Parlement comme des « zone[s] géographique[s] privée[s] dotée[s] d’un réseau
d’électricité destiné en premier lieu à desservir les consommateurs industriels établis sur [ces] zone[s]» ( 59 ). À mon avis, la notion de « sites industriels » se rapproche de la notion de « réseaux fermés de distribution » qui fait l’objet des présentes conclusions (laquelle n’a été introduite que plus tard dans la directive 2009/72). L’amendement du Parlement octroyait aux États membres le pouvoir d’exempter les « sites industriels » d’un grand nombre de dispositions, en particulier celles
relatives à la gestion des réseaux de distribution (prévues au chapitre V de la directive 2003/54).
87. Toutefois, la directive 2009/72 a été adoptée sans l’amendement du Parlement, ce qui suggère que l’intention du législateur de l’Union était d’autoriser les États membres à n’accorder aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution que des exemptions limitées aux obligations imposées aux gestionnaires de réseaux de distribution.
88. Troisièmement, il est vrai que, conformément à la section 5.3 de la note interprétative de la Commission sur les marchés de détail, « les [États membres] peuvent prévoir pour les [gestionnaires de réseaux fermés de distribution] des règles ciblées et proportionnées qui tiennent compte de leurs spécificités. Cela est particulièrement important dès lors que la nature précise de nombre d’obligations incombant aux gestionnaires de réseaux est définie par les États membres, et non directement établie
dans la [directive 2009/72] ».
89. Cependant, à mon sens, les États membres disposent d’une marge d’appréciation aux fins de mettre en œuvre les obligations prévues par la directive 2009/72 (en d’autres termes, aux fins de définir la « nature précise » de ces obligations). Dans la mesure où, comme l’indique le considérant 30 de ladite directive, il convient de ne pas imposer une « charge administrative injustifiée » aux réseaux fermés de distribution, ces obligations peuvent être adaptées par les États membres afin de tenir
compte des caractéristiques particulières de ces réseaux. Cela ne signifie pas que les États membres sont en droit d’exempter les réseaux fermés de distribution des obligations imposées par la directive 2009/72.
90. À titre d’exemple, selon la note interprétative de la Commission sur les marchés de détail, les États membres peuvent tenir compte des caractéristiques particulières des réseaux fermés de distribution en fixant des règles relatives à la désignation des gestionnaires de réseau de distribution. Cette note interprétative ne prévoit cependant pas que les États membres peuvent exempter les entreprises qui sont propriétaires ou responsables de réseaux fermés de distribution de l’obligation de désigner
un gestionnaire, prévue à l’article 24 de la directive 2009/72.
91. Je relève également que les phrases citées au point 88 des présentes conclusions font partie de la section 5.3 de la note interprétative de la Commission sur les marchés de détail, sous l’intitulé « Not a separate category of systems » (Ce n’est pas une catégorie distincte de réseaux) ( 60 ), et non de la section 5.4 de la note, intitulée « Specific exemptions » (Exemptions particulières), qui est relative à l’article 28, paragraphe 2, de la directive 2009/72. Cela confirme que le pouvoir des
États membres de définir la « nature précise » des obligations qui incombent aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution, auquel ces phrases se rapportent, ne leur permet pas d’accorder des exemptions, mais plutôt d’adapter les règles fixées pour les gestionnaires de réseaux de distribution qui ne sont pas fermés.
92. En l’espèce, les gestionnaires de RIU et d’autres réseaux privés sont exemptés de certaines obligations incombant aux gestionnaires de réseaux de distribution, à savoir, d’une part, l’obligation de fournir un accès aux tiers et, d’autre part, l’obligation de dissociation fonctionnelle ( 61 ).
93. L’exemption relative à l’obligation de fournir un accès aux tiers a été examinée précédemment. Quant à l’exemption de l’obligation de dissociation fonctionnelle, elle est conforme au pouvoir conféré aux États membres par l’article 26, paragraphe 4, de la directive 2009/72 d’exempter de cette obligation les réseaux qui approvisionnent moins de 100000 clients connectés.
94. Par conséquent, il convient de répondre à la quatrième question préjudicielle comme suit : l’article 26, paragraphe 4, et l’article 28, paragraphe 2, de la directive 2009/72 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que les États membres exemptent les gestionnaires de réseaux fermés de distribution d’obligations qui ne sont pas énumérées par ces dispositions.
F. Sur la cinquième question préjudicielle
95. Par sa cinquième question, la juridiction de renvoi demande à la Cour si la directive 2009/72 et, en particulier, son article 15, paragraphe 7, son article 37, paragraphe 6, sous b), ainsi que ses considérants 29 et 30, s’opposent à une législation nationale qui soumet les utilisateurs des réseaux fermés de distribution au régime applicable aux utilisateurs du réseau public, s’agissant des redevances dues au titre du service d’appel.
96. Ainsi que la Commission l’a indiqué dans son enquête sectorielle sur les marchés de l’énergie de 2007 ( 62 ), « dans la mesure où l’électricité ne peut pas être stockée » et où la stabilité du réseau nécessite que la production et la consommation soient en permanence en équilibre, « des régimes d’ajustement et de réserve existent afin de compenser en temps réel les déséquilibres des acteurs du marché, qui résultent des inadéquations entre […] demande et production d’électricité» ( 63 ). Les
gestionnaires de réseaux de transport et de distribution sont chargés de la gestion de ces régimes ( 64 ).
97. L’article 2, paragraphe 10, du décret législatif no 79/1999 ( 65 ) définit l’appel comme « l’activité tendant à impartir des instructions pour l’utilisation et l’exploitation coordonnées des installations de production, du réseau de transport et des services auxiliaires ». Selon l’article 1er, paragraphe 1, de ce même décret législatif, l’appel est un service public fourni par l’État par l’intermédiaire du gestionnaire du réseau de transport national, à savoir Terna SpA (ci-après « Terna »).
98. La fourniture des services d’appel est facturée aux utilisateurs du réseau. En vertu de l’annexe A, article 22, paragraphe 1, de la décision no 539/2015, les règles appliquées aux utilisateurs de réseaux fermés de distribution s’agissant des redevances au titre du service d’appel sont celles qui sont applicables aux utilisateurs du réseau public. Cette même disposition précise que, s’agissant des utilisateurs de réseaux fermés de distribution, les redevances dues au titre du service d’appel
s’appliquent à « l’électricité injectée et prélevée du réseau fermé de distribution par chaque utilisateur à travers le point de connexion de son installation à ce réseau ».
99. Les redevances dues au titre du service d’appel sont versées à Terna, et non au gestionnaire du réseau fermé de distribution.
100. Avant l’entrée en vigueur de la décision no 539/2015, lesdites redevances étaient appliquées uniquement à l’électricité injectée ou prélevée du réseau public par le réseau fermé de distribution dans son ensemble, à travers le point de connexion de ce réseau fermé au réseau public. En d’autres termes, les redevances dues au titre du service d’appel s’appliquaient uniquement à l’électricité injectée ou prélevée du réseau public. Elles ne s’appliquaient pas à l’électricité produite au sein du
réseau fermé de distribution.
101. Solvay, Erg Power, Eni et le gouvernement grec affirment que la directive 2009/72 s’oppose à ce que les règles en matière de service d’appel applicables au réseau public soient appliquées aux réseaux fermés de distribution.
102. Le gouvernement italien soutient que les utilisateurs de RIU ont la possibilité de se regrouper en un seul point de connexion au réseau public, auquel cas les redevances dues au titre du service d’appel ne s’appliqueront qu’à l’électricité prélevée par le RIU, dans son ensemble, du réseau public ( 66 ).
103. D’après la Commission, la directive 2009/72 ne fait pas obstacle à ce que les règles en matière d’appel applicables aux utilisateurs du réseau public soient appliquées aux utilisateurs des RIU.
104. Je relève que, comme le soutient Eni, les utilisateurs d’un RIU injectent ou prélèvent habituellement de l’électricité du seul RIU, et non du réseau public, de sorte que les services d’appel sont fournis par le RIU, et non par Terna. Ce n’est que rarement, lorsque la demande augmente sensiblement ou que la production est perturbée au sein du RIU, que les utilisateurs de ce dernier se procurent de l’énergie sur le réseau public et qu’ils bénéficient de services d’appel fournis par Terna.
105. Par conséquent, la méthodologie suivant laquelle le montant des redevances dues au titre du service d’appel est calculé en fonction de l’électricité injectée ou prélevée du RIU, et non seulement en fonction de l’électricité injectée ou prélevée du réseau public, n’est pas conforme à l’article 15, paragraphe 7, ni à l’article 37, paragraphe 6, sous b), de la directive 2009/72, lesquels exigent que les redevances dues au titre des services d’ajustement soient « non discriminatoires ». En effet,
les utilisateurs de RIU, à l’instar des utilisateurs du réseau public, se voient facturer la fourniture de services d’appel par Terna, alors que lesdits utilisateurs de RIU, à l’inverse de ceux du réseau public, ne bénéficient de ces services qu’à titre exceptionnel.
106. En outre, cette méthodologie n’est pas conforme à l’article 15, paragraphe 7, ni au considérant 35 de la directive 2009/72, lesquels exigent que les redevances au titre des services fournis en cas de déséquilibre « [tiennent] compte des coûts ». Elle n’est pas davantage conforme à l’article 37, paragraphe 6, sous b), de cette directive, selon lequel les services d’ajustement doivent être fournis « de la manière la plus économique possible ». En effet, Terna n’a pas encouru de frais, ou n’a
encouru que des frais limités, au regard des utilisateurs des RIU.
107. Par conséquent, il me semble qu’une même méthodologie ne peut pas trouver à s’appliquer au calcul des redevances d’appel payées par les utilisateurs de RIU et au calcul des redevances d’appel payées par les utilisateurs du réseau public. Les redevances d’appel payées par lesdits utilisateurs de RIU doivent être calculées en fonction de l’électricité injectée ou prélevée du réseau public. En effet, ces redevances doivent refléter les frais exposés par Terna pour la fourniture des services
d’appel aux utilisateurs des RIU concernés.
108. Je relève que, à l’audience, le gouvernement italien a soutenu que les utilisateurs de RIU pouvaient, selon la législation italienne, se regrouper de telle sorte que les redevances d’appel soient calculées en fonction de l’électricité injectée ou prélevée du réseau public par le RIU dans son ensemble. Selon le gouvernement italien, si les utilisateurs de RIU décidaient de se regrouper ainsi, les redevances d’appel seraient calculées suivant le procédé qui prévalait avant l’entrée en vigueur de
la décision no 539/2015. À l’audience, les représentants de Solvay et d’Eni ont répliqué que, si les utilisateurs de RIU se regroupaient, cela n’aurait aucune incidence sur le calcul des redevances d’appel. C’est à la juridiction de renvoi qu’il appartiendra de clarifier ce point.
109. Quant à déterminer si la faculté de s’approvisionner en énergie auprès du réseau public devrait faire l’objet d’une rémunération en tant que telle, c’est-à-dire même lorsque cette faculté n’est pas exercée et qu’aucune électricité n’est prélevée du réseau public, il me semble que la Cour ne dispose pas d’informations suffisantes sur le cadre réglementaire italien et les caractéristiques du marché et qu’elle ne saurait donc se prononcer sur ce point.
110. Par conséquent, il convient de répondre à la cinquième question préjudicielle que l’article 15, paragraphe 7, et l’article 37, paragraphe 6, sous b), de la directive 2009/72 s’opposent à une réglementation nationale selon laquelle les redevances dues au titre du service d’appel acquittées par les utilisateurs de réseaux fermés de distribution au profit du gestionnaire du réseau principal sont calculées sur la base de l’électricité injectée par chaque utilisateur dans le réseau fermé de
distribution ou prélevée du réseau fermé de distribution par chaque utilisateur. Ces redevances devraient être calculées sur la seule base de l’électricité injectée par chaque utilisateur du réseau fermé de distribution dans le réseau principal, ou prélevée du réseau principal par chaque utilisateur du réseau fermé de distribution.
IV. Conclusion
111. À la lumière des développements qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit aux questions préjudicielles du Tribunale amministrativo regionale per la Lombardia (tribunal administratif régional de Lombardie, Italie) :
1) L’article 2, paragraphe 5, et l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE doivent être interprétés en ce sens qu’un réseau constitué et géré par une personne privée, auquel est relié un nombre limité d’unités de production et de consommation, et qui est à son tour connecté au réseau principal, est un réseau de
distribution. Il importe peu, à cet égard, que ce réseau ait été conçu à l’origine comme un réseau d’autoproduction et qu’il ait été constitué avant l’entrée en vigueur de la directive 2009/72.
2) Les États membres ne peuvent exempter des réseaux de distribution des obligations prévues par la directive 2009/72 que lorsque de tels réseaux peuvent être qualifiés de réseaux fermés de distribution au sens de l’article 28, paragraphe 1, de celle-ci, de petits réseaux isolés au sens de l’article 2, paragraphe 26, de celle‑ci, de micro réseaux isolés au sens de l’article 2, paragraphe 27, de celle-ci, ou lorsque ces réseaux approvisionnent moins de 100000 clients. Les États membres ne sont
pas autorisés à définir une autre catégorie de réseaux de distribution, ni à exempter les réseaux relevant de ladite catégorie d’obligations autres que celles dont peuvent être exemptés les réseaux fermés de distribution, les petits réseaux isolés, les micro réseaux isolés ou les réseaux qui approvisionnent moins de 100000 clients connectés.
3) L’article 28, paragraphe 2, sous b), et l’article 32 de la directive 2009/72 doivent être interprétés en ce sens que les gestionnaires de réseaux fermés de distribution sont tenus de fournir un accès aux tiers, à moins qu’ils ne disposent pas de la capacité nécessaire.
4) L’article 26, paragraphe 4, et l’article 28, paragraphe 2, de la directive 2009/72 doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que les États membres exemptent les gestionnaires de réseaux fermés de distribution d’obligations qui ne sont pas énumérées par ces dispositions.
5) L’article 15, paragraphe 7, et l’article 37, paragraphe 6, sous b), de la directive 2009/72 s’opposent à une réglementation nationale selon laquelle les redevances dues au titre du service d’appel acquittées par les utilisateurs de réseaux fermés de distribution au profit du gestionnaire du réseau principal sont calculées sur la base de l’électricité injectée par chaque utilisateur dans le réseau fermé de distribution ou prélevée du réseau fermé de distribution par chaque utilisateur. Ces
redevances devraient être calculées sur la seule base de l’électricité injectée par chaque utilisateur du réseau fermé de distribution dans le réseau principal ou prélevée du réseau principal par chaque utilisateur du réseau fermé de distribution.
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( 1 ) Langue originale : l’anglais.
( 2 ) Directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE (JO 2009, L 211, p. 55).
( 3 ) Arrêt du 22 mai 2008, citiworks (C‑439/06, EU:C:2008:298).
( 4 ) Directive 2003/54/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2003, concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et abrogeant la directive 96/92/CE (JO 2003, L 176, p. 37).
( 5 ) Je précise que, si le terme « transport » désigne « le transport d’électricité sur le réseau à très haute tension et à haute tension interconnecté », le terme « distribution » désigne « le transport d’électricité sur des réseaux de distribution à haute, à moyenne et à basse tension » (voir article 2, paragraphes 3 et 5, de la directive 2009/72).
( 6 ) Arrêt du 22 mai 2008, citiworks (C‑439/06, EU:C:2008:298, points 44, 49, 55 et 64).
( 7 ) Section 5.1 de la note interprétative de la Commission, du 22 janvier 2010, relative aux marchés de détail dans la directive 2009/72 et la directive 2009/73/CE du Parlement européen et du Conseil, du 13 juillet 2009, concernant des règles communes pour le marché intérieur du gaz naturel et abrogeant la directive 2003/55/CE (JO 2009, L 211, p. 94) (ci-après la « note interprétative de la Commission sur les marchés de détail »). Cette note est disponible sur le site Internet de la direction
générale de l’énergie de la Commission, à l’adresse suivante : https://ec.europa.eu/energy/en/home.
( 8 ) Une disposition similaire a été introduite dans la directive 2009/73. Voir article 28 de la directive 2009/73.
( 9 ) Voir point 35 des présentes conclusions.
( 10 ) Legge 23 luglio 2009, n. 99 – Disposizioni per lo sviluppo e l’internazionalizzazione delle imprese, nonché in materia di energia (loi no 99, du 23 juillet 2009, concernant le développement et l’internationalisation des entreprises, ainsi que l’énergie) (ci-après la « loi no 99/2009 »).
( 11 ) Decreto ministeriale 10 dicembre 2010 – Attuazione dell’articolo 30, comma 27, della legge 23 luglio 2009, n. 99, in materia di rapporti intercorrenti fra i gestori delle reti elettriche, le società di distribuzione in concessione, i proprietari di reti private ed i clienti finali collegati a tali reti (décret ministériel du 10 décembre 2010 mettant en œuvre l’article 30, paragraphe 27, de la loi no 99, du 23 juillet 2009, concernant les relations existant entre les gestionnaires des réseaux
électriques, les sociétés de distribution en régime de concession, les propriétaires de réseaux privés et les clients finals connectés à ces réseaux) (ci-après le « décret ministériel du 10 décembre 2010 »).
( 12 ) Bien que l’article 30, paragraphe 27, de la loi no 99/2009 ait prévu l’adoption, par le ministère du Développement économique, de critères afférents à la définition de ces réseaux.
( 13 ) Voir point 18 des présentes conclusions.
( 14 ) Decreto legislative 1 giugno 2011, n. 93 – Attuazione delle direttive 2009/72/CE, 2009/73/CE e 2008/92/CE relative a norme comuni per il mercato interno dell’energia elettrica, del gas naturale ed ad una procedura comunitaria sulla trasparenza dei prezzi al consumatore finale industriale di gas e di energia elettrica, nonchè abrogazione delle direttive 2003/54/CE e 2003/55/CE (décret législatif du 1er juin 2011, no 93, mettant en œuvre les directives 2009/72/CE, 2009/73/CE et 2008/92/CE
concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et du gaz naturel, instaurant une procédure communautaire assurant la transparence des prix au consommateur final industriel de gaz et d’électricité, et abrogeant les directives 2003/54/CE et 2003/55/CE) (ci-après le « décret législatif no 93/2011 »).
( 15 ) Voir point 10 des présentes conclusions.
( 16 ) Voir point 13 des présentes conclusions.
( 17 ) Decreto legislative 30 maggio 2008, n. 115 – Attuazione della direttiva 2006/32/CE relative all’efficienza degli usi finali dell’energia e i servizi energetici e abrogazione della direttiva 93/76/CEE (décret législatif du 30 mai 2008, no 115, mettant en œuvre la directive 2006/32/CE, relative à l’efficacité énergétique dans les utilisations finales et aux services énergétiques et abrogeant la directive 93/76/CEE) (ci-après le « décret législatif no 115/2008 »).
( 18 ) Decreto legge 24 giugno 2014, n. 91 – Disposizioni urgenti per il settore agricolo, la tutela ambientale e l’efficientamento energetico dell’edilizia scolastica a universitaria, il rilancio e lo sviluppo delle imprese, il contenimento dei costi gravanti sulle tariffe elettriche, nonché per la definizione immediata di adempimenti derivanti della normativa europea (décret-loi du 24 juin 2014, no 91, établissant des dispositions urgentes pour le secteur agricole, la protection de l’environnement
et l’efficacité énergétique des bâtiments scolaires et universitaires, pour la relance et le développement des entreprises, la limitation des coûts grevant les tarifs électriques, ainsi que pour la mise en œuvre immédiate d’obligations découlant de la réglementation européenne) (ci-après le « décret-loi no 91/2014 »). Le décret-loi no 91/2014 a ensuite été converti en loi, avec des modifications.
( 19 ) Deliberazione 12 novembre 2015, n. 539/2015/R/eel dell’Autorità per l’energia elettrica, il gas e il sistema idrico – Regolazione dei servizi di connessione, misura, trasmissione, distribuzione, dispacciamento e vendita nel caso di sistemi di distribuzione chiusi (décision du 12 novembre 2015, no 539/2015, de l’AEEGSI portant réglementation des services de connexion, de mesure, de transport, de distribution, d’appel et de vente dans les réseaux fermés de distribution) (ci‑après la « décision
no 539/2015 »). La décision no 539/2015 est disponible sur le site Internet de l’AEEGSI, devenue l’Autorità di Regolazione per Energia Reti e Ambiente (soit l’autorité de régulation pour l’énergie, les réseaux et l’environnement), à l’adresse suivante : https://www.arera.it/it/index.htm
( 20 ) Voir annexe A, article 1er, sous r) et s), de la décision no 539/2015. Le texte consolidé sur la dissociation comptable figure à l’annexe A de la Deliberazione 22 maggio 2014, n. 231/2014/R/com dell’AEEGSI – Disposizioni in materia di obblighi di separazione contabile (unbundling) per i settori dell’energia elettrica e del gas (décision du 22 mai 2014, no 231/2014/R/com, de l’AEEGSI, relative à l’obligation de dissociation comptable dans les secteurs de l’électricité et du gaz). Le texte
consolidé sur la dissociation fonctionnelle figure à l’annexe A de la Deliberazione 22 giugno 2015, n. 296/2015/R/com dell’AEEGSI – Disposizioni in merito agli obblighi di separazione funzionale (unbundling) per i settori dell’energia elettrica e del gas (décision du 22 juin 2015, no 296/2015/R/com, de l’AEEGSI, relative à l’obligation de dissociation fonctionnelle dans les secteurs de l’électricité et du gaz). Ces deux décisions sont disponibles sur le site Internet de l’AEEGSI.
( 21 ) Voir point 35 des présentes conclusions.
( 22 ) Cela s’explique par le fait que la Legge 4 agosto 2017, n. 124 – Legge annuale per il mercato e la concorrenza (loi du 4 août 2017, no 124 – loi annuelle sur le marché et sur la concurrence) a ajouté les paragraphes 5 bis et 5 ter à l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011, de sorte que l’obligation de dissociation fonctionnelle imposée aux gestionnaires de réseaux de distribution ne s’applique pas aux gestionnaires de réseaux fermés de distribution, qui ne doivent tenir
des comptes séparés que s’ils font partie d’une entreprise verticalement intégrée. À ce titre, l’autorité de régulation pour l’énergie, les réseaux et l’environnement a adopté la Deliberazione 18 gennaio 2018, n. 15/2018/R/com – Esclusione dagli obblighi di separazione funzionale per le imprese di distribuzione elettrica con meno di 25000 punti di prelievo e per i sistemi di distribuzione chiusi, ai sensi della legge 124/2017 (décision du 18 janvier 2018, no 15/2018/R/com, relative à l’exemption des
obligations de dissociation fonctionnelle pour les entreprises de distribution d’électricité ayant moins de 25000 points de prélèvement et pour les réseaux fermés de distribution au sens de la loi no 124/2017).
( 23 ) Voir Decreto legge 30 dicembre 2016, n. 244 – Proroga e definizione di termini (décret-loi du 30 décembre 2016, no 244, relatif à la prorogation et à la définition des délais), converti ultérieurement en loi.
( 24 ) Voir point 10 des présentes conclusions.
( 25 ) Voir point 13 des présentes conclusions.
( 26 ) Voir point 18 des présentes conclusions.
( 27 ) L’article 2, paragraphe 19, de la directive 2009/72 définit la « fourniture » comme « la vente, y compris la revente, d’électricité à des clients ».
( 28 ) Arrêt du 22 mai 2008, citiworks (C‑439/06, EU:C:2008:298, point 46).
( 29 ) Voir point 2 des présentes conclusions.
( 30 ) Arrêt du 22 mai 2008, citiworks (C‑439/06, EU:C:2008:298, point 49). Le constat formulé par la Cour au point 49 de son arrêt citiworks, selon lequel les réseaux de distribution relèvent du champ d’application de la directive 2003/54, quelle que soit leur taille, est susceptible de s’appliquer à la directive 2009/72. En effet, la lettre de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2003/54, sur laquelle s’est appuyée la Cour pour formuler ce constat au point 49 de son arrêt citiworks, est
quasiment identique à celui de l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2009/72. En effet, l’article 2, paragraphe 5, de la directive 2003/54 définissait la distribution comme le « transport d’électricité sur des réseaux de distribution à haute, à moyenne et à basse tension aux fins de fourniture à des clients, mais ne comprenant pas la fourniture ».
( 31 ) Voir point 69 des présentes conclusions.
( 32 ) Voir point 5.2, p. 11, de la note interprétative de la Commission sur les marchés de détail.
( 33 ) À cet égard, la juridiction de renvoi indique que, lorsqu’en 1962, les réseaux électriques ont été nationalisés, les réseaux qui reliaient une unité de production à une unité de consommation n’ont pas été visés par cette mesure. En effet, ils n’étaient pas considérés comme de véritables réseaux de distribution parce qu’ils reliaient deux unités détenues par une même personne. Ces réseaux étaient, au contraire, perçus comme des réseaux d’autoproduction. Par la suite, toutefois, certains de ces
réseaux d’autoproduction ont évolué, par exemple lorsque l’unité de consommation était vendue à un tiers, de sorte que le réseau concerné ne pouvait plus être considéré comme un réseau d’autoproduction.
( 34 ) Voir article 26 de la directive 2009/72.
( 35 ) Voir article 31 de la directive 2009/72.
( 36 ) Voir article 32 de la directive 2009/72.
( 37 ) Voir article 25, paragraphe 5, de la directive 2009/72.
( 38 ) Un réseau fermé de distribution ne peut pas approvisionner de clients résidentiels, sauf aux fins d’un usage accessoire par un petit nombre de clients résidentiels. Voir article 28, paragraphe 4, de la directive 2009/72.
( 39 ) Selon la section 5.3 de la note interprétative de la Commission sur les marchés de détail, « étant donné qu’ils interviennent dans des sites géographiquement limités, en approvisionnant uniquement des clients non résidentiels, les [gestionnaires de réseaux fermés de distribution] n’auront pas plus de 100000 clients. Les États membres auront donc la faculté d’appliquer les règles de l’article 26, paragraphe 4, de la [directive 2009/72], qui permettent aux États membres de ne pas exiger que ces
[gestionnaires de réseaux de distribution] fassent l’objet d’une dissociation ».
( 40 ) Une décision de la Commission n’est pas requise pour qu’un État membre puisse exercer l’option prévue à l’article 26, paragraphe 4, de la directive 2009/72.
( 41 ) Il ressort de la demande de décision préjudicielle que l’expression « réseau fermé de distribution » employée à l’article 38, paragraphe 5, du décret législatif no 93/2011, a la signification que lui prête l’article 28, paragraphe 1, de la directive 2009/72. Voir point 15 des présentes conclusions.
( 42 ) C’est moi qui souligne.
( 43 ) Il m’est impossible d’analyser cette question s’agissant des autres réseaux privés, dès lors que, d’après la juridiction de renvoi, il n’existe pas de définition de ces réseaux en droit italien. Voir point 13 des présentes conclusions.
( 44 ) Le gouvernement néerlandais n’a pas soumis d’observations sur la troisième question préjudicielle.
( 45 ) Arrêts du 22 mai 2008, citiworks (C‑439/06, EU:C:2008:298, point 44) ; du 9 octobre 2008, Sabatauskas e.a. (C‑239/07, EU:C:2008:551, point 33), et du 29 septembre 2016, Essent Belgium (C‑492/14, EU:C:2016:732, point 76).
( 46 ) Tels que définis par la Cour dans l’arrêt du 22 mai 2008, citiworks (C‑439/06, EU:C:2008:298, point 46). Voir point 41 des présentes conclusions.
( 47 ) Proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité (refonte), du 23 février 2017 (ci‑après la « proposition de la Commission relative à une refonte de la directive 2009/72 ») [COM(2016) 864 final/2].
( 48 ) Voir point 67 des présentes conclusions.
( 49 ) Arrêt du 22 mai 2008, citiworks (C‑439/06, EU:C:2008:298, point 55).
( 50 ) En effet, la section 5.5 de la note interprétative de la Commission sur les marchés de détail est intitulée « Review procedure for negotiated tariffs » (« Procédure de vérification des tarifs négociés », c’est moi qui souligne). Ladite section fait partie de la section 5, qui porte sur les réseaux fermés de distribution.
( 51 ) Voir Johnston, A., et Block, G., EU Energy Law, Oxford University Press, 2012, point 4.131.
( 52 ) À l’inverse, l’article 28, paragraphe 2, sous b), de la directive 2009/72 prévoit que les États membres peuvent exempter les gestionnaires de réseaux fermés de distribution d’une certaine « obligation » prévue à l’article 32 de ladite directive, et non de l’article 32 en tant que tel.
( 53 ) Arrêt du 29 septembre 2016, Essent Belgium (C‑492/14, EU:C:2016:732, point 91).
( 54 ) Voir point 21 des présentes conclusions.
( 55 ) Voir également, s’agissant des RIU, article 33, paragraphe 1, sous c), de la loi no 99/2009 (citée au point 10 des présentes conclusions) et, s’agissant des autres réseaux privés, décret ministériel du 10 décembre 2010 (cité au point 12 des présentes conclusions).
( 56 ) Voir points 69 à 71 des présentes conclusions.
( 57 ) L’article 26 de la directive 2003/54 correspond à l’article 44 de la directive 2009/72.
( 58 ) Résolution législative du Parlement européen du 18 juin 2008 sur la proposition de directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2003/54/CE concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité (JO 2009, C 286 E, p. 106).
( 59 ) Voir article 1er, paragraphe 2, sous c), de la résolution législative visée dans la note 58 (ci-dessus).
( 60 ) La section 5.3 de cette note interprétative fait elle-même partie de la section 5, intitulée « Réseaux fermés de distribution ».
( 61 ) Voir point 31 des présentes conclusions.
( 62 ) DG Competition Report on Energy Sector Enquiry, du 10 janvier 2007 (ci-après l’« enquête sectorielle sur les marchés de l’énergie de 2007 ») [SEC(2006) 1724]. Ce rapport est disponible sur le site Internet de la direction générale de la concurrence de la Commission, à l’adresse suivante : http://ec.europa.eu/competition/sectors/energy/overview_en.html
( 63 ) Voir point 327 de l’enquête sectorielle sur les marchés de l’énergie de 2007.
( 64 ) Voir articles 15 et 25 de la directive 2009/72.
( 65 ) Decreto legislativo 16 marzo 1999, n. 79 – Attuazione della direttiva 96/92/CE recante norme comuni per il mercato interno dell’energia elettrica (décret législatif du 16 mars 1999, no 79, mettant en œuvre la directive 96/92/CE établissant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité) (ci-après le « décret législatif no 79/1999 »).
( 66 ) Le gouvernement néerlandais n’a pas formulé d’observations sur la cinquième question préjudicielle.