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20/12/2017 | CJUE | N°C-277/16

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Polkomtel sp. z o.o. contre Prezes Urzędu Komunikacji Elektronicznej., 20/12/2017, C-277/16


ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

20 décembre 2017 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques – Directive 2002/21/CE – Articles 8 et 16 – Directive 2002/19/CE – Articles 8 et 13 – Opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché – Contrôle des prix – Obligations imposées par les autorités réglementaires nationales – Obligation d’orientation des prix en fonction des coûts – Fixation des tarifs en dessous des coût

s exposés par l’opérateur concerné pour la
fourniture des services de terminaison d’appel vocal sur des réseaux mob...

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)

20 décembre 2017 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques – Directive 2002/21/CE – Articles 8 et 16 – Directive 2002/19/CE – Articles 8 et 13 – Opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché – Contrôle des prix – Obligations imposées par les autorités réglementaires nationales – Obligation d’orientation des prix en fonction des coûts – Fixation des tarifs en dessous des coûts exposés par l’opérateur concerné pour la
fourniture des services de terminaison d’appel vocal sur des réseaux mobiles – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 16 – Liberté d’entreprise – Proportionnalité »

Dans l’affaire C‑277/16,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Sąd Najwyższy (Cour suprême, Pologne), par décision du 21 janvier 2016, parvenue à la Cour le 17 mai 2016, dans la procédure

Polkomtel sp. z o.o.

contre

Prezes Urzędu Komunikacji Elektronicznej,

en présence de :

Krajowa Izba Gospodarcza Elektroniki i Telekomunikacji,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de chambre, M. K. Lenaerts, président de la Cour, faisant fonction de juge de la deuxième chambre, M. A. Rosas, Mme C. Toader et M. E. Jarašiūnas (rapporteur), juges,

avocat général : M. E. Tanchev,

greffier : M. R. Schiano, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 11 mai 2017,

considérant les observations présentées :

– pour Polkomtel sp. z o.o., par Mme E. Barembruch, radca prawny,

– pour le Prezes Urzędu Komunikacji Elektronicznej, par M. L. Ochniewicz et Mme D. Dziedzic-Chojnacka, radcowie prawni,

– pour le gouvernement polonais, par M. B. Majczyna ainsi que par Mmes D. Lutostańska et K. Wilimborek-Makulska, en qualité d’agents,

– pour le gouvernement italien, par Mme G. Palmieri, en qualité d’agent, assistée de M. P. Gentili, avvocato dello Stato,

– pour le gouvernement néerlandais, par Mme M. Bulterman ainsi que par M. J. Langer, en qualité d’agents,

– pour la Commission européenne, par M. G. Braun ainsi que par Mmes J. Hottiaux et L. Nicolae, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 26 juillet 2017,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 8, paragraphe 4, et de l’article 13 de la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (directive « accès ») (JO 2002, L 108, p. 7).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Polkomtel sp. z o.o. au Prezes Urzędu Komunikacji Elektronicznej (président de l’Office des communications électroniques, Pologne, ci-après le « président de l’OCE »), au sujet d’une décision prise par ce dernier fixant les tarifs de terminaison d’appel vocal sur le réseau mobile public de Polkomtel.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive 2002/21/CE

3 Les articles 6 et 7 de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive « cadre ») (JO 2002, L 108, p. 33, ci-après la « directive-cadre »), prévoient, respectivement, un mécanisme de consultation et de transparence et une procédure de consolidation du marché intérieur des communications électroniques.

4 L’article 8 de la directive-cadre définit les objectifs généraux et les principes réglementaires dont les autorités réglementaires nationales (ci-après les « ARN ») veillent à assurer le respect. Cet article prévoit :

« 1.   Les États membres veillent, dans l’accomplissement des tâches de réglementation spécifiées dans la présente directive ainsi que dans les directives particulières, à ce que les [ARN] prennent toutes les mesures raisonnables visant à la réalisation des objectifs définis aux paragraphes 2, 3 et 4. Ces mesures sont proportionnées à ces objectifs.

[...]

2.   Les [ARN] promeuvent la concurrence dans la fourniture des réseaux de communications électroniques, des services de communications électroniques et des ressources et services associés, notamment :

a) en veillant à ce que les utilisateurs, y compris les utilisateurs handicapés, retirent un bénéfice maximal en termes de choix, de prix et de qualité ;

b) en veillant à ce que la concurrence ne soit pas faussée ni entravée dans le secteur des communications électroniques ;

[...]

4.   Les [ARN] soutiennent les intérêts des citoyens de l’Union européenne [...]

[...] »

5 L’article 14 de cette directive, intitulé « Entreprises puissantes sur le marché », précise les critères permettant aux ARN de considérer qu’un opérateur donné dispose d’une puissance significative sur le marché.

6 L’article 16 de ladite directive, intitulé « Procédure d’analyse de marché », prévoit :

« 1.   Dès que possible après l’adoption de la recommandation ou de sa mise à jour éventuelle, les [ARN] effectuent une analyse des marchés pertinents, en tenant le plus grand compte des lignes directrices. Les États membres veillent à ce que cette analyse soit effectuée, le cas échéant, en coopération avec les autorités nationales chargées de la concurrence.

2.   Lorsque, conformément aux articles [...] 7 ou 8 de la directive [« accès »], l’[ARN] est tenue de se prononcer sur l’imposition, le maintien, la modification, ou la suppression d’obligations à la charge des entreprises, elle détermine, sur la base de son analyse de marché visée au paragraphe 1 du présent article, si un marché pertinent est effectivement concurrentiel.

[...]

4.   Lorsqu’une [ARN] détermine qu’un marché pertinent n’est pas effectivement concurrentiel, elle identifie les entreprises puissantes sur ce marché conformément à l’article 14 et impose à ces entreprises les obligations réglementaires spécifiques appropriées visées au paragraphe 2 du présent article ou maintient ou modifie ces obligations si elles sont déjà appliquées.

[...] »

7 L’article 19 de la même directive, intitulé « Mesures d’harmonisation », prévoit, à son paragraphe 1 :

« Lorsque la Commission, statuant conformément à la procédure visée à l’article 22, paragraphe 2, adresse des recommandations aux États membres relatives à l’harmonisation de la mise en œuvre des dispositions de la présente directive et des directives particulières dans la poursuite des objectifs établis à l’article 8, les États membres veillent à ce que les [ARN] tiennent le plus grand compte de ces recommandations dans l’exercice de leurs tâches. Lorsqu’une [ARN] choisit de ne pas suivre une
recommandation, elle en informe la Commission en communiquant la motivation de sa position. »

La directive « accès »

8 Les considérants 15 et 20 de la directive « accès » énoncent :

« (15) Le fait d’imposer une obligation spécifique à une entreprise puissante sur le marché ne requiert pas une analyse additionnelle du marché, mais une preuve que l’obligation en question est appropriée et proportionnée par rapport à la nature du problème en cause.

[...]

(20) Un contrôle des prix peut se révéler nécessaire lorsque l’analyse d’un marché donné met en évidence un manque d’efficacité de la concurrence. Les [ARN] peuvent intervenir de manière relativement limitée, par exemple en imposant une obligation concernant la fixation de prix raisonnables pour la sélection de l’opérateur [...] ou de manière beaucoup plus contraignante, en obligeant, par exemple, les opérateurs à orienter les prix en fonction des coûts afin qu’ils soient entièrement justifiés
lorsque la concurrence n’est pas suffisamment vive pour éviter la tarification excessive. Les opérateurs puissants sur le marché, en particulier, devraient éviter de comprimer les prix d’une manière telle que la différence entre leurs prix de détail et les redevances d’interconnexion facturées à leurs concurrents fournissant des services de détail similaires ne permettrait pas de garantir une concurrence durable. Lorsqu’une [ARN] calcule les coûts engagés pour établir un service rendu
obligatoire par la présente directive, il convient de permettre une rémunération raisonnable du capital engagé, y compris les coûts de la main-d’œuvre et de la construction, la valeur du capital étant adaptée, le cas échéant, pour refléter l’évaluation actualisée des actifs et de l’efficacité de la gestion. La méthode de récupération des coûts devrait être adaptée aux circonstances en tenant compte de la nécessité de promouvoir l’efficacité et une concurrence durable et d’optimaliser les
profits pour le consommateur. »

9 L’article 8 de cette directive, intitulé « Imposition, modification ou suppression des obligations », dispose :

« 1.   Les États membres veillent à ce que les [ARN] soient habilitées à imposer les obligations visées aux articles 9 à 13.

2.   Lorsqu’à la suite d’une analyse du marché effectuée conformément à l’article 16 de la [directive-cadre] un opérateur est désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné, les [ARN] lui imposent les obligations énumérées aux articles 9 à 13 de la présente directive, selon le cas.

[...]

4.   Les obligations imposées conformément au présent article sont fondées sur la nature du problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés à l’article 8 de la [directive-cadre]. Ces obligations ne peuvent être imposées qu’après la consultation prévue aux articles 6 et 7 de ladite directive.

[...] »

10 L’article 13 de ladite directive, intitulé « Contrôle des prix et obligations relatives au système de comptabilisation des coûts », est libellé comme suit :

« 1.   Les [ARN] peuvent, conformément aux dispositions de l’article 8, imposer des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès, lorsqu’une analyse du marché indique que l’opérateur concerné pourrait, en l’absence de concurrence efficace,
maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals. Les [ARN] tiennent compte des investissements réalisés par l’opérateur et lui permettent une rémunération raisonnable du capital adéquat engagé, compte tenu des risques encourus.

2.   Les [ARN] veillent à ce que tous les mécanismes de récupération des coûts ou les méthodologies de tarification qui seraient rendues obligatoires visent à promouvoir l’efficacité économique, à favoriser une concurrence durable et à optimiser les avantages pour le consommateur. À cet égard, les [ARN] peuvent également prendre en compte les prix en vigueur sur les marchés concurrentiels comparables.

3.   Lorsqu’une entreprise est soumise à une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts, c’est à elle qu’il incombe de prouver que les redevances sont déterminées en fonction des coûts, en tenant compte d’un retour sur investissements raisonnable. Afin de calculer les coûts de la fourniture d’une prestation efficace, les [ARN] peuvent utiliser des méthodes de comptabilisation des coûts distinctes de celles appliquées par l’entreprise. Les [ARN] peuvent demander à une entreprise de
justifier intégralement ses prix et, si nécessaire, en exiger l’adaptation.

[...] »

La recommandation 2009/396/CE

11 Aux termes du point 1 de la recommandation 2009/396/CE de la Commission, du 7 mai 2009, sur le traitement réglementaire des tarifs de terminaison d’appels fixe et mobile dans l’UE (JO 2009, L 124, p. 67) :

« Lorsque les [ARN] imposent des obligations de contrôle des prix et de comptabilisation des coûts, conformément à l’article 13 de la [directive “accès”], aux opérateurs désignés par elles comme puissants sur les marchés de gros de la terminaison d’appel vocal sur réseau téléphonique public individuel (ci-après dénommés “marchés de la terminaison d’appels fixe et mobile”) à la suite d’une analyse de marché effectuée conformément à l’article 16 de la [directive-cadre], les ARN doivent fixer des
tarifs de terminaison d’appel en fonction des coûts encourus par un opérateur efficace. Cela implique que les tarifs doivent aussi être symétriques. [...] »

Le droit polonais

12 Aux termes de l’article 39 de l’ustawa Prawo telekomunikacyjne (loi sur les télécommunications), du 16 juillet 2004 (Dz. U. no 171, position 1800), dans sa version applicable au litige au principal (ci-après la « loi sur les télécommunications ») :

« 1.   Dans les conditions visées à l’article 24, point 2, sous a), le président de l’OCE peut, par voie de décision, imposer à l’opérateur disposant d’une puissance significative sur le marché l’obligation :

1) de calculer les coûts justifiés du service d’accès au réseau de télécommunications (en exposant les modalités de calcul des coûts) que celui-ci doit appliquer sur la base des dispositions du règlement visé à l’article 51, conformément au descriptif du calcul des coûts établi par le président de l’OCE,

2) d’appliquer des tarifs d’accès dont le montant inclut la récupération des coûts justifiés de l’opérateur.

2.   L’opérateur auquel est imposée l’obligation visée au paragraphe 1 justifie en détail auprès du président de l’OCE, à la demande de celui-ci, le montant des tarifs en fonction des coûts justifiés.

[...]

4.   Au cas où :

[...]

3) l’entité compétente pour réaliser l’audit visé à l’article 53, paragraphe 5, émet un avis défavorable ou un avis avec réserve,

4) une divergence est constatée entre le montant des tarifs fixés par l’opérateur et celui des tarifs fixés par le président de l’OCE, conformément au paragraphe 3,

le président de l’OCE fixe le montant des tarifs d’accès au réseau de télécommunications ou leurs niveaux maximal ou minimal en appliquant les méthodes visées au paragraphe 3, point 2. Les tarifs susmentionnés sont fixés par décision distincte [...]

5.   Le président de l’OCE fixe les tarifs d’accès au réseau de télécommunications de façon à promouvoir l’efficacité économique, à favoriser une concurrence durable et à procurer un avantage maximal à l’utilisateur final, tout en tenant compte de la récupération des coûts justifiés. »

13 L’article 40 de la loi sur les télécommunications est libellé comme suit :

« 1.   Le président de l’OCE peut, conformément aux conditions visées à l’article 24, point 2, sous a), imposer, par voie de décision, à l’opérateur disposant d’une puissance significative sur le marché une obligation de fixer les tarifs d’accès au réseau de télécommunications en fonction des coûts supportés.

2.   L’opérateur auquel est imposée l’obligation visée au paragraphe 1 justifie auprès du président de l’OCE le montant des tarifs fixés en fonction des coûts supportés.

3.   Afin d’apprécier le bien-fondé du montant des tarifs fixés par l’opérateur visé au paragraphe 1, le président de l’OCE peut tenir compte du montant ou des modalités de fixation des tarifs sur des marchés concurrentiels comparables, ou d’autres modes d’évaluation du bien-fondé du montant desdits tarifs.

4.   Dans le cas où il ressort de l’appréciation visée au paragraphe 3 que le montant des tarifs fixés par l’opérateur n’est pas conforme, le président de l’OCE fixe le montant des tarifs ou leur niveau maximal ou minimal en appliquant les méthodes visées au paragraphe 3, et en visant à promouvoir l’efficacité économique, à favoriser une concurrence durable et à optimiser les avantages pour les utilisateurs finals. Les tarifs sont fixés par décision distincte [...] »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

14 Par décision du 19 juillet 2006, le président de l’OCE a désigné Polkomtel comme étant une entreprise disposant d’une puissance significative sur le marché des services de terminaison d’appel vocal sur son réseau mobile et lui a imposé, notamment, l’obligation de fixer ses tarifs d’accès au réseau de communications en fonction des coûts supportés pour fournir ces services.

15 Polkomtel a, dans le cadre de la mise en œuvre de cette obligation, transmis au président de l’OCE les éléments justifiant le montant des tarifs de terminaison d’appel vocal sur son réseau mobile. Le président de l’OCE a estimé que ce montant était irrégulier et a entamé une procédure afin de vérifier lesdits tarifs et de les adapter. Après avoir relevé que les coûts effectivement supportés par Polkomtel pour fournir les services de terminaison d’appel mobile s’élevaient à 0,1690 zloty polonais
(PLN) (environ 0,0398 euro) par minute, le président de l’OCE a décidé de modifier ces tarifs afin de promouvoir l’efficacité économique, de favoriser une concurrence durable et d’optimiser les avantages pour les utilisateurs finals, conformément à l’article 40 de la loi sur les télécommunications. Il a fixé lesdits tarifs sur la base de la moyenne des tarifs de terminaison d’appel mobile fixés pour les autres opérateurs historiques exerçant leur activité sur le marché polonais de la téléphonie
mobile, en tenant compte, notamment, du fait que ceux-ci exercent leur activité sur le même marché, qu’ils disposent de parts de marchés similaires, qu’ils ont les mêmes fournisseurs d’infrastructures et qu’ils supportent des coûts identiques de location de ligne.

16 Ainsi, par une décision du 9 décembre 2009, prise sur la base de l’article 40 de la loi sur les télécommunications, le président de l’OCE a fixé le tarif de terminaison d’appel mobile sur le réseau de Polkomtel à 0,1677 PLN (environ 0,0395 euro) par minute. Par cette décision, le président de l’OCE a aussi imposé à Polkomtel l’obligation de lui communiquer annuellement les éléments justifiant les tarifs de terminaison d’appel mobile sur son réseau, calculés en fonction des coûts encourus pour
fournir ce service.

17 Cette entreprise a introduit un recours contre la décision du président de l’OCE du 9 décembre 2009 devant le Sąd Okręgowy w Warszawie (tribunal régional de Varsovie, Pologne). Par un jugement du 27 mai 2013, cette juridiction a modifié cette décision et a fixé le montant du tarif de terminaison d’appel mobile sur le réseau de Polkomtel à 0,1690 PLN (environ 0,0398 euro) par minute, au motif que, lorsqu’une entreprise désignée comme disposant d’une puissance significative sur le marché se voit
imposer l’obligation de fixer ses tarifs de terminaison d’appel mobile en fonction des coûts, le président de l’OCE n’est pas autorisé à corriger les tarifs que lui a présentés cette entreprise et à fixer leur montant à un niveau inférieur à celui du coût effectif de la fourniture de ce service.

18 Polkomtel et le président de l’OCE ont interjeté appel de ce jugement devant le Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie, Pologne). Par un arrêt du 7 mai 2014, cette juridiction a, en accueillant l’appel du président de l’OCE, réformé le jugement attaqué et rejeté le recours de Polkomtel. Ladite juridiction a jugé, en outre, que l’obligation de communiquer annuellement au président de l’OCE les éléments justifiant le montant des tarifs de terminaison d’appel mobile en fonction des
coûts était licite.

19 Polkomtel a formé un pourvoi en cassation contre l’arrêt du Sąd Apelacyjny w Warszawie (cour d’appel de Varsovie) devant la juridiction de renvoi, à savoir le Sąd Najwyższy (Cour suprême, Pologne).

20 Cette dernière s’interroge sur l’interprétation qu’il convient de donner aux articles 8 et 13 de la directive « accès ». En premier lieu, elle cherche à savoir si, en vertu du paragraphe 3 de cet article 13, l’ARN peut uniquement vérifier les coûts que l’opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur le marché impute aux services concernés ou si elle peut également contrôler que ces coûts sont économiquement justifiés. Elle se demande, en particulier, au regard de la deuxième
phrase de ce paragraphe 3, si l’ARN ne peut vérifier le montant des coûts que dans une mesure limitée ou si celle-ci peut, en outre, corriger le montant des prix fixés en se référant à un prix effectif moyen sur le marché. Dans ce cadre, elle éprouve des doutes quant à savoir si une interprétation dudit article 13 excluant cette dernière possibilité est compatible avec les dispositions de l’article 8, paragraphe 4, de cette même directive.

21 À cet égard, la juridiction de renvoi indique que Polkomtel soutient que l’article 40 de la loi sur les télécommunications permet à un opérateur de prendre en compte, dans le calcul de ses prix, l’ensemble des coûts liés à la prestation du service faisant l’objet de l’obligation concernant l’orientation des prix en fonction des coûts. Selon cette entreprise, l’ARN ne peut pas utiliser les critères d’efficacité et de concurrence durable, mais doit se limiter à prendre en compte les coûts
effectivement liés à la prestation du service faisant l’objet de ladite obligation, de sorte qu’elle ne peut pas fixer le montant des tarifs à un niveau inférieur à celui des coûts réellement supportés.

22 La juridiction de renvoi estime toutefois que, malgré la différence entre les coûts visés respectivement aux articles 39 et 40 de la loi sur les télécommunications, ce dernier article ne limite pas la compétence de l’ARN à la seule vérification des coûts que l’opérateur concerné a pris en compte pour fixer le tarif et permet de fixer le montant des tarifs à un niveau inférieur à celui des coûts supportés par l’opérateur concerné. Une telle interprétation contribuerait, selon elle, à la
réalisation des objectifs poursuivis par les législateurs de l’Union et polonais, consistant à promouvoir l’efficacité économique, à favoriser une concurrence durable ainsi qu’à optimiser les avantages pour les utilisateurs finals.

23 En deuxième lieu, cette juridiction soulève la question de savoir si l’article 8, paragraphe 4, et l’article 13, paragraphe 3, de la directive « accès », lus en combinaison avec l’article 16 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (ci-après la « Charte »), doivent être interprétés en ce sens que l’ARN peut imposer à un opérateur une obligation de communiquer périodiquement les éléments justifiant les tarifs fixés en fonction des coûts.

24 Ladite juridiction indique, à cet égard, qu’elle privilégie une « interprétation fonctionnelle » de l’article 40, paragraphe 2, de la loi sur les télécommunications, lequel ne prévoit pas à quelle fréquence l’opérateur doit remplir l’obligation de justifier le montant des tarifs fixés en fonction des coûts. Il pourrait être déduit, selon elle, de cet article que l’ARN peut préciser le délai dans lequel l’opérateur doit remplir cette obligation, dès lors que la fixation d’un tel délai garantirait
un niveau minimum de sécurité juridique quant à la fréquence d’éventuelles modifications du montant des tarifs appliqués, serait proportionnée et contribuerait également à garantir la transparence des actes de l’ARN. La même juridiction se demande si une telle interprétation de cette disposition de droit national est conforme à l’article 13, paragraphe 3, de la directive « accès ».

25 En troisième lieu, la juridiction de renvoi cherche à savoir si l’article 13, paragraphe 3, de la directive « accès », lu en combinaison avec l’article 16 de la Charte, doit être interprété en ce sens que l’ARN peut demander une adaptation des prix à un opérateur aussi bien lorsque cet opérateur, désigné comme disposant d’une puissance significative sur le marché, applique les prix qu’il a déterminés de façon autonome que lorsqu’il applique des prix fixés antérieurement par cette autorité. La
juridiction de renvoi fait observer que ces doutes résultent de la version de l’article 13, paragraphe 3, de la directive « accès » en langue polonaise, selon laquelle les ARN peuvent demander à une entreprise de justifier intégralement les « prix appliqués » et, si nécessaire, en exiger l’adaptation, ce qui laisse suggérer que l’ARN ne peut demander à l’opérateur d’adapter le niveau desdits prix que lorsque celui-ci a déjà commencé à appliquer les prix qu’il a calculés.

26 C’est dans ces conditions que le Sąd Najwyższy (Cour suprême) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielle suivantes :

« 1) Les dispositions combinées de l’article 8, paragraphe 4, et de l’article 13 de la directive “accès”, dans leur libellé initial, doivent-elles être interprétées en ce sens que, dans le cas où un opérateur disposant d’une puissance significative sur le marché se voit imposer une obligation de déterminer ses prix en fonction de ses coûts, l’[ARN] peut, en vue de promouvoir l’efficacité économique et favoriser une concurrence durable, fixer le prix du service faisant l’objet d’une telle
obligation en dessous des coûts que supporte l’opérateur pour le fournir, lesquels coûts ont été vérifiés par l’[ARN] et considérés comme liés par un rapport de causalité avec ce service ?

2) Les dispositions combinées de l’article 8, paragraphe 4, et de l’article 13, paragraphe 3, de la directive “accès”, dans leur libellé initial, lues en combinaison avec l’article 16 de la [Charte], doivent-elles être interprétées en ce sens que l’[ARN] peut imposer à l’opérateur tenu de déterminer ses prix en fonction de ses coûts une obligation de fixer annuellement le prix sur la base des données les plus actuelles en matière de coûts et de communiquer, pour vérification, le prix ainsi fixé à
l’[ARN], en l’accompagnant d’une justification desdits coûts, avant de commencer à appliquer ce prix dans le commerce ?

3) L’article 13, paragraphe 3, de la directive “accès”, dans son libellé initial, lu en combinaison avec l’article 16 de la [Charte], doit-il être interprété en ce sens que l’opérateur tenu de déterminer ses prix en fonction de ses coûts peut se voir imposer par l’[ARN] d’adapter son prix uniquement lorsque ledit opérateur fixe d’abord de façon autonome le montant du prix puis commence à l’appliquer, ou aussi lorsque celui-ci applique un prix dont le montant a été antérieurement fixé par l’[ARN],
mais qu’il résulte de la justification des coûts pour la période de référence suivante que le prix antérieurement fixé par l’[ARN] est supérieur au niveau des coûts supportés par l’opérateur ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

27 Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 8, paragraphe 4, et l’article 13 de la directive « accès » doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’un opérateur, désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné, se voit imposer par une ARN une obligation de déterminer ses prix en fonction des coûts, cette ARN peut, en vue de promouvoir l’efficacité économique et de favoriser une concurrence durable, fixer les prix des services
faisant l’objet d’une telle obligation en dessous des coûts supportés par cet opérateur pour les fournir.

28 Aux termes de l’article 8, paragraphe 2, de la directive « accès », lorsque, à la suite d’une analyse du marché effectuée conformément à l’article 16 de la directive-cadre, un opérateur est désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné, les ARN lui imposent les obligations énumérées aux articles 9 à 13 de la directive « accès », selon le cas.

29 L’article 13, paragraphe 1, de la directive « accès » dispose, quant à lui, que les ARN peuvent, conformément aux dispositions de l’article 8 de cette directive, imposer des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès, lorsqu’une analyse du
marché indique que l’opérateur concerné pourrait, en l’absence de concurrence efficace, maintenir des prix à un niveau excessivement élevé ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals.

30 Ni l’article 13, paragraphe 1, de la directive « accès » ni aucune autre disposition de cette directive ne précisent ce qu’il faut entendre par « obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts ».

31 Cependant, il importe de relever qu’il résulte de l’expression « y compris », figurant à l’article 13, paragraphe 1, de la directive « accès », que les « obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts » peuvent constituer l’une des modalités tant des obligations liées à la récupération des coûts que de celles liées au contrôle des prix. En outre, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général aux points 31 et 32 de ses conclusions, une « obligation concernant l’orientation des prix
en fonction des coûts », eu égard au sens habituel de ces termes, vise une obligation d’orienter les prix en fonction des coûts et non pas une obligation de recouvrer tous les coûts exposés. Partant, il convient d’écarter l’interprétation de cette disposition selon laquelle il s’agirait d’une obligation de fixer les prix à un niveau permettant à l’opérateur concerné de recouvrer tous les coûts qu’il a supportés en vue de la fourniture du service en question.

32 Cette interprétation de l’article 13, paragraphe 1, de la directive « accès » est confortée par le contexte dans lequel cette disposition s’insère. En effet, outre l’intitulé dudit article 13, qui vise expressément le « contrôle des prix », l’article 13, paragraphe 2, de cette directive fait référence non seulement aux « mécanismes de récupération des coûts », mais aussi aux « méthodologies de tarification qui seraient rendues obligatoires » par une ARN. De plus, le considérant 20 de la directive
« accès » énonce que, dans le cadre d’un contrôle des prix, « [l]es [ARN] peuvent intervenir de manière relativement limitée, par exemple en imposant une obligation concernant la fixation de prix raisonnables pour la sélection de l’opérateur [...] ou de manière beaucoup plus contraignante, en obligeant, par exemple, les opérateurs à orienter les prix en fonction des coûts [...] ». Il peut être déduit de ce considérant que le législateur de l’Union a confié aux ARN une marge d’appréciation étendue
dans le choix des mesures de contrôle des prix à imposer dans un cas particulier. En ce sens également, l’article 16, paragraphe 4, de la directive-cadre, lu en combinaison avec le paragraphe 2 de cet article, fait référence aux « obligations réglementaires spécifiques appropriées », visées notamment à l’article 8 de la directive « accès ».

33 S’agissant de la notion de « coûts », il convient de relever que l’article 13, paragraphe 1, de la directive « accès » ne définit pas les coûts en fonction desquels les prix doivent être orientés. Toutefois, il ressort du paragraphe 3 de cet article que, lorsqu’un opérateur est soumis à une obligation d’orienter ses prix en fonction des coûts, les ARN calculent les coûts de la fourniture d’une prestation efficace et peuvent, à cette fin, utiliser des méthodes de comptabilisation des coûts
distinctes de celles appliquées par l’opérateur. Il ressort également dudit article 13, paragraphes 1 et 3, de la directive « accès », lu en combinaison avec le considérant 20 de cette directive, que, en imposant des obligations liées à la récupération des coûts, les ARN sont tenues de prendre en compte une rémunération raisonnable du capital adéquat engagé, compte tenu des risques encourus.

34 À cet égard, la directive « accès » précise aussi, à son considérant 20, que la méthode de récupération des coûts devrait être adaptée aux circonstances en tenant compte de la nécessité de promouvoir l’efficacité et une concurrence durable et d’optimaliser les profits pour le consommateur.

35 Ainsi, l’article 13, paragraphe 2, de la directive « accès » impose aux ARN de veiller à ce que tous les mécanismes de récupération des coûts ou les méthodologies de tarification qui seraient rendues obligatoires visent à promouvoir l’efficacité économique, à favoriser une concurrence durable et à optimiser les avantages pour le consommateur. De même, l’article 8, paragraphe 4, de cette directive prévoit que les obligations imposées conformément à cet article sont fondées sur la nature du
problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés à l’article 8 de la directive-cadre. Ce dernier article prévoit, à son paragraphe 2, sous a) et b), que les ARN promeuvent la concurrence en veillant à ce que les utilisateurs finals retirent un bénéfice maximal, notamment en termes de choix et de prix, et à ce que la concurrence ne soit pas faussée ni entravée dans le secteur des communications électroniques.

36 Par ailleurs, la recommandation 2009/396, qui a été adoptée aux fins de la mise en œuvre de l’article 13 de la directive « accès », prévoit, à son point 1, que, lorsque, en vertu de cet article 13, les ARN imposent des obligations de contrôle des prix et de comptabilisation des coûts aux opérateurs désignés par elles comme étant puissants sur les marchés de gros de la terminaison d’appels fixe et mobile à la suite d’une analyse de marché effectuée conformément à l’article 16 de la
directive-cadre, les ARN doivent fixer des tarifs de terminaison d’appel en fonction des coûts encourus par un opérateur efficace.

37 Or, l’article 19, paragraphe 1, de la directive-cadre exige que les ARN, dans l’exercice de leurs tâches, « tiennent le plus grand compte » des recommandations de la Commission et que, lorsqu’une ARN choisit de ne pas suivre une recommandation, elle en informe la Commission en communiquant la motivation de sa position. Il incombe, dès lors, à une ARN, lorsqu’elle impose des obligations de contrôle des prix et de comptabilisation des coûts conformément à l’article 13 de la directive « accès », de
suivre, en principe, les indications contenues dans la recommandation 2009/396. Ce n’est que s’il lui apparaît, dans le cadre de son appréciation d’une situation donnée, que le modèle préconisé par cette recommandation n’est pas adapté aux circonstances qu’elle peut s’en écarter en motivant sa position (voir, en ce sens, arrêt du 15 septembre 2016, Koninklijke KPN e.a., C‑28/15, EU:C:2016:692, points 37 et 38).

38 Ainsi, il découle d’une lecture combinée de l’article 8, paragraphe 2, sous a) et b), et de l’article 16, paragraphe 4, de la directive-cadre, d’une part, ainsi que de l’article 8, paragraphe 4, et de l’article 13, paragraphes 1 et 2, de la directive « accès », d’autre part, qu’il incombe à l’ARN, lorsqu’elle impose une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts, en vertu de l’article 13 de cette dernière directive, d’exiger, en principe, que les tarifs de terminaison d’appel soient
fixés en fonction des coûts encourus par un opérateur efficace, y inclus la rémunération du capital adéquat engagé par celui-ci, à laquelle fait référence l’article 13, paragraphes 1 et 3, de la directive « accès ».

39 Il s’ensuit que les ARN peuvent, après avoir effectué le contrôle du respect par l’opérateur concerné de l’obligation d’orienter ses prix en fonction des coûts et décidé qu’il est nécessaire d’exiger l’adaptation de ces prix, imposer à cet opérateur de fixer les tarifs à un niveau inférieur à celui des coûts supportés par celui-ci si ces coûts sont supérieurs aux coûts d’un opérateur efficace, ces derniers devant inclure la rémunération raisonnable du capital adéquat engagé par celui-ci.

40 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que l’article 8, paragraphe 4, et l’article 13 de la directive « accès » doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’un opérateur, désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné, se voit imposer par une ARN une obligation de déterminer ses prix en fonction des coûts, cette ARN peut, en vue de promouvoir l’efficacité économique et de favoriser une concurrence
durable, fixer les prix des services faisant l’objet d’une telle obligation en dessous des coûts supportés par cet opérateur pour les fournir, si ces coûts sont supérieurs à ceux d’un opérateur efficace, ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier.

Sur la deuxième question

41 Par sa deuxième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 8, paragraphe 4, et l’article 13, paragraphe 3, de la directive « accès », lus en combinaison avec l’article 16 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’une ARN peut imposer à un opérateur, désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné et soumis à une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts, de fixer annuellement ses prix sur la base des données les plus
actuelles et de lui communiquer, pour vérification, ces prix ainsi que les éléments les justifiant préalablement à leur application.

42 À cet égard, il convient de constater que l’article 8, paragraphe 2, et l’article 13, paragraphe 1, de la directive « accès », qui autorisent les ARN à imposer à un opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné une obligation concernant l’orientation des prix en fonction des coûts, ne précisent pas si cette autorité peut, en imposant cette obligation, fixer les modalités de la mise en œuvre de celle-ci et, en particulier, exiger de cet opérateur qu’il
actualise ses prix à une certaine fréquence et lui communique, pour un contrôle périodique, les éléments justifiant les tarifs appliqués.

43 L’article 13, paragraphe 3, de la directive « accès » prévoit, quant à lui, à sa troisième phrase, que les ARN peuvent demander à un opérateur de justifier intégralement ses prix et, si nécessaire, en exiger l’adaptation. Bien qu’il ressorte de la première phrase de cette disposition que cette demande peut être adressée à un opérateur déjà contraint à une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts, elle ne précise pas à quelle fréquence l’ARN peut demander cette justification et, si
nécessaire, exiger l’adaptation des prix.

44 Il résulte de ces considérations que le législateur de l’Union n’entendait pas établir les modalités de la mise en œuvre de l’obligation d’orientation des prix en fonction des coûts imposée en vertu de l’article 13, paragraphe 1, de la directive « accès » et, en particulier, fixer la fréquence de l’actualisation, par l’opérateur soumis à cette obligation, des prix des services faisant l’objet de ladite obligation, ni les règles concernant la fréquence du contrôle par l’ARN du respect de cette
obligation.

45 Au demeurant, il convient de relever que l’article 8, paragraphe 4, de la directive « accès » prévoit que les obligations imposées par l’ARN, y compris celles prévues à l’article 13 de cette directive, doivent être fondées sur la nature du problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés à l’article 8 de la directive-cadre, et qu’elles ne peuvent être imposées qu’après la consultation prévue aux articles 6 et 7 de de cette dernière directive (voir, en ce sens, arrêt
du 14 avril 2016, Polkomtel, C‑397/14, EU:C:2016:256, point 56).

46 Il en découle que la fréquence à laquelle les ARN peuvent exiger de l’opérateur concerné la justification et l’adaptation de prix précédemment fixés en fonction des coûts doit être déterminée selon la nature du problème constaté, doit être proportionnée et doit tenir compte des objectifs définis tant dans la directive-cadre que dans la directive « accès ». À cet égard, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 59 de ses conclusions, l’une des particularités des marchés des communications
électroniques est leur évolution rapide, due aux développements techniques, de sorte qu’une obligation d’adaptation annuelle de prix préalablement fixés est susceptible de répondre à ces impératifs. Comme l’a également fait observer la juridiction de renvoi, cette obligation imposée à l’opérateur concerné peut lui garantir un niveau minimum de sécurité juridique quant à la fréquence de l’éventuelle modification du montant des tarifs appliqué et l’imposition de ladite obligation, en contribuant en
même temps à garantir la transparence des actes des ARN, peut être proportionnée.

47 En conséquence, il y a lieu de considérer que les ARN peuvent imposer à un opérateur, désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné et soumis à une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts, de fixer annuellement ses prix sur la base des données les plus actuelles et de leur communiquer des justifications desdits prix, si de telles obligations sont fondées sur la nature du problème constaté, sont proportionnées et sont justifiées au regard des objectifs
énoncés à l’article 8 de la directive-cadre et, en particulier, au regard de ceux visés au paragraphe 2, sous a) et b), de cet article.

48 En ce qui concerne la question de savoir si de nouvelles obligations ne peuvent être imposées qu’à l’issue d’une nouvelle analyse de marché, il convient de constater que l’article 16, paragraphe 2, de la directive-cadre prévoit que, lorsque, conformément notamment à l’article 8 de la directive « accès », l’ARN est tenue de se prononcer sur l’imposition, le maintien, la modification ou la suppression d’obligations à la charge des opérateurs, cette autorité détermine, sur la base de son analyse du
marché visée à l’article 16, paragraphe 1, de cette directive, si un marché pertinent est effectivement concurrentiel. Par ailleurs, il ressort du considérant 15 de la directive « accès », en substance, que le fait d’imposer une obligation spécifique à un opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné ne requiert pas une analyse additionnelle du marché, mais requiert simplement la preuve que l’obligation en question est appropriée et proportionnée par rapport
à la nature du problème en cause.

49 Il en résulte, ainsi que l’a, en substance, relevé M. l’avocat général aux points 68 et 69 de ses conclusions, que la réalisation d’une nouvelle analyse de marché n’est pas nécessaire, lorsque, comme dans l’affaire au principal, l’ARN envisage d’imposer une obligation spécifique pour la mise en œuvre d’une obligation générale d’orientation des prix en fonction des coûts précédemment imposée.

50 S’agissant de la question de savoir si l’article 16 de la Charte s’oppose à la possibilité, pour une ARN, d’imposer à un opérateur d’actualiser annuellement ses prix et de les soumettre à un contrôle périodique, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence constante de la Cour, la protection conférée par cette disposition comporte la liberté d’exercer une activité économique ou commerciale, la liberté contractuelle ainsi que la concurrence libre. En outre, la liberté contractuelle
comprend, notamment, le libre choix du partenaire économique ainsi que la liberté de déterminer le prix pour une prestation. Toutefois, la liberté d’entreprise ne constitue pas une prérogative absolue, mais doit être prise en considération par rapport à sa fonction dans la société (voir, en ce sens, arrêts du 22 janvier 2013, Sky Österreich, C‑283/11, EU:C:2013:28, points 42, 43, 45 et jurisprudence citée, ainsi que du 17 octobre 2013, Schaible, C‑101/12, EU:C:2013:661, points 25 et 28).

51 La possibilité pour l’ARN d’exiger d’un opérateur d’actualiser annuellement ses tarifs et de les soumettre à un contrôle périodique constitue une ingérence dans l’exercice du droit garanti par l’article 16 de la Charte. Elle doit dès lors, en vertu de l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, être prévue par la loi, respecter le contenu essentiel du droit garanti par cet article 16, et, dans le respect du principe de proportionnalité, être nécessaire et répondre effectivement à des objectifs
d’intérêt général reconnus par l’Union ou au besoin de protection des droits et des libertés d’autrui (voir, en ce sens, arrêts du 22 janvier 2013, Sky Österreich, C‑283/11, EU:C:2013:28, points 46 à 48, ainsi que du 21 décembre 2016, AGET Iraklis, C‑201/15, EU:C:2016:972, point 70 et jurisprudence citée).

52 En l’occurrence, il convient de relever, premièrement, que la décision du président de l’OCE du 9 décembre 2009 a été adoptée conformément à la réglementation nationale visant à transposer notamment la directive « accès » et que cette réglementation lui confère la compétence d’imposer des obligations d’orienter les prix en fonction des coûts et d’adapter ces prix annuellement. Deuxièmement, l’imposition de ces obligations n’a pas porté atteinte au contenu essentiel de la liberté d’entreprise,
puisque l’opérateur concerné pouvait continuer à fournir les services en cause après l’imposition desdites obligations. Troisièmement, les objectifs d’intérêt général poursuivis par cette réglementation nationale répondent à ceux de l’Union, tels que la promotion de la concurrence et le soutien des intérêts des citoyens de l’Union visés à l’article 8, paragraphes 2 et 4, de la directive-cadre ainsi qu’à l’article 13, paragraphe 1, de la directive « accès ». En particulier, l’obligation d’orienter
les prix en fonction des coûts et d’adapter ces prix annuellement devrait, au sens de l’article 13, paragraphe 1, de la directive « accès », empêcher les opérateurs concernés de maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou de comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals. Quatrièmement, quant à l’examen de la nécessité d’une telle mesure, qui comprend celui de la proportionnalité de celle-ci et qui incombe à la juridiction nationale, il correspond à la vérification du respect
des conditions prévues à l’article 8, paragraphe 4, de la directive « accès ».

53 Ainsi, il appartient à la juridiction nationale de vérifier si l’obligation d’adapter les prix annuellement est conforme à l’exigence de proportionnalité visée à l’article 8, paragraphe 4, de la directive « accès », dans la mesure où cette obligation est nécessaire pour atteindre les objectifs d’intérêt général mentionnés au point précédent.

54 Il s’ensuit que, sous réserve de cette vérification, l’article 16 de la Charte ne s’oppose pas à la possibilité pour une ARN d’exiger d’un opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné d’actualiser annuellement ses tarifs et de les soumettre à un contrôle périodique.

55 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la deuxième question que l’article 8, paragraphe 4, et l’article 13, paragraphe 3, de la directive « accès », lus en combinaison avec l’article 16 de la Charte, doivent être interprétés en ce sens qu’une ARN peut imposer à un opérateur, désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné et soumis à une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts, de fixer annuellement ses prix sur
la base des données les plus actuelles et de lui communiquer, pour vérification, ces prix ainsi que les éléments les justifiant préalablement à leur application, à condition que de telles obligations soient fondées sur la nature du problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés à l’article 8 de la directive-cadre, ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier.

Sur la troisième question

56 À titre liminaire, il convient de relever qu’il ressort de la demande de décision préjudicielle que la troisième question est fondée sur la prémisse selon laquelle le libellé de l’article 13, paragraphe 3, troisième phrase, de la directive « accès », dans sa version en langue polonaise (« Krajowe organy regulacyjne mogą zażądać od danego operatora całościowego uzasadnienia stosowanych cen, a w razie potrzeby – odpowiedniego dostosowania tych cen »), diffère de celui d’autres versions
linguistiques. En langue polonaise, cette phrase suggérerait, en effet, que les ARN peuvent exiger d’un opérateur qu’il adapte ses prix calculés en fonction des coûts uniquement lorsqu’il a déjà commencé à les appliquer.

57 Dans ces conditions, il y a lieu de comprendre que, par sa troisième question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 13, paragraphe 3, de la directive « accès » doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts a été imposée à un opérateur sur le fondement de l’article 13, paragraphe 1, de cette directive, cet opérateur peut se voir imposer une obligation d’adaptation de ses prix uniquement après qu’il a commencé à
appliquer les prix orientés en fonction des coûts, ou également avant qu’il n’ait commencé à appliquer ceux-ci.

58 Il convient d’observer que les versions de l’article 13, paragraphe 3, troisième phrase, de la directive « accès », notamment en langues allemande (« Die nationalen Regulierungsbehörden können von einem Betreiber die umfassende Rechtfertigung seiner Preise und gegebenenfalls deren Anpassung verlangen »), anglaise (« National regulatory authorities may require an operator to provide full justification for its prices, and may, where appropriate, require prices to be adjusted »), française (« Les
[ARN] peuvent demander à une entreprise de justifier intégralement ses prix et, si nécessaire, en exiger l’adaptation ») et italienne (« Le autorità nazionali di regolamentazione possono esigere che un operatore giustifichi pienamente i propri prezzi e, ove necessario, li adegui ») conduisent à interpréter cette disposition en ce sens que les prix ne doivent pas nécessairement être déjà appliqués par l’opérateur concerné avant que l’ARN ne lui impose, le cas échéant, d’adapter ses prix.

59 Or, selon une jurisprudence constante de la Cour, la formulation utilisée dans l’une des versions linguistiques d’une disposition du droit de l’Union ne saurait servir de base unique à l’interprétation de cette disposition ou se voir attribuer un caractère prioritaire par rapport aux autres versions linguistiques. Les dispositions du droit de l’Union doivent en effet être interprétées et appliquées de manière uniforme, à la lumière des versions établies dans toutes les langues de l’Union. En cas
de disparité entre les diverses versions linguistiques d’un texte du droit de l’Union, la disposition en cause doit être interprétée en fonction de l’économie générale et de la finalité de la réglementation dont elle constitue un élément (arrêt du 1er mars 2016, Alo et Osso, C‑443/14 et C‑444/14, EU:C:2016:127, point 27 et jurisprudence citée).

60 À cet égard, il importe de relever, d’une part, que, si le paragraphe 1 de l’article 13 de la directive « accès » permet aux ARN d’obliger les opérateurs à orienter leurs prix en fonction des coûts, le paragraphe 3 de ce même article, en autorisant les ARN à demander à un opérateur concerné de justifier intégralement ses prix et, si nécessaire, à en exiger l’adaptation, confère aux ARN les moyens permettant d’assurer la mise en œuvre de ce droit et de s’assurer que cet opérateur applique
réellement des prix orientés en fonction des coûts.

61 D’autre part, en vertu de l’article 8, paragraphe 1, de la directive-cadre, dans l’accomplissement des tâches de réglementation spécifiées dans la directive-cadre et, notamment, dans la directive « accès », les ARN sont autorisées à prendre toutes les mesures raisonnables visant à la réalisation des objectifs définis à l’article 8, paragraphe 2, de la directive-cadre, au nombre desquels figurent, en particulier, l’objectif de promouvoir l’efficacité économique, de favoriser une concurrence
durable et d’optimiser les profits pour les utilisateurs finals. Ainsi, l’application des mesures prévues à l’article 13, paragraphe 3, troisième phrase, de la directive « accès » permet aux ARN d’assurer, en demandant à l’opérateur concerné de justifier intégralement ses prix et, si nécessaire, en exigeant qu’il les adapte, que les objectifs visés tant à l’article 8, paragraphe 2, de la directive-cadre qu’à l’article 13, paragraphes 1 et 2, de la directive « accès » soient poursuivis.

62 Or, ces objectifs ne seraient pas toujours atteints si les ARN pouvaient demander à l’opérateur concerné de justifier intégralement ses prix et, si nécessaire, en exiger l’adaptation, uniquement dans l’hypothèse où ces prix sont déjà appliqués.

63 En conséquence, il y a lieu de répondre à la troisième question que l’article 13, paragraphe 3, de la directive « accès » doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts a été imposée à un opérateur sur le fondement de l’article 13, paragraphe 1, de cette directive, cet opérateur peut se voir imposer une obligation d’adaptation des prix avant ou après qu’il a commencé à les appliquer.

Sur les dépens

64 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit :

  1) L’article 8, paragraphe 4, et l’article 13 de la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (directive « accès »), doivent être interprétés en ce sens que, lorsqu’un opérateur, désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné, se voit imposer par une autorité réglementaire nationale une obligation de déterminer ses
prix en fonction des coûts, cette autorité réglementaire nationale peut, en vue de promouvoir l’efficacité économique et de favoriser une concurrence durable, fixer les prix des services faisant l’objet d’une telle obligation en dessous des coûts supportés par cet opérateur pour les fournir, si ces coûts sont supérieurs à ceux d’un opérateur efficace, ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier.

  2) L’article 8, paragraphe 4, et l’article 13, paragraphe 3, de la directive 2002/19, lus en combinaison avec l’article 16 de la charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, doivent être interprétés en ce sens qu’une autorité réglementaire nationale peut imposer à un opérateur, désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné et soumis à une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts, de fixer annuellement ses prix sur la base des données les plus
actuelles et de lui communiquer, pour vérification, ces prix ainsi que les éléments les justifiant préalablement à leur application, à condition que de telles obligations soient fondées sur la nature du problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés à l’article 8 de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive
« cadre »), ce qu’il appartient à la juridiction nationale de vérifier.

  3) L’article 13, paragraphe 3, de la directive 2002/19 doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts a été imposée à un opérateur sur le fondement de l’article 13, paragraphe 1, de cette directive, cet opérateur peut se voir imposer une obligation d’adaptation des prix avant ou après qu’il a commencé à les appliquer.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure : le polonais.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : C-277/16
Date de la décision : 20/12/2017
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Sąd Najwyższy.

Renvoi préjudiciel – Cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques – Directive 2002/21/CE – Articles 8 et 16 – Directive 2002/19/CE – Articles 8 et 13 – Opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché – Contrôle des prix – Obligations imposées par les autorités réglementaires nationales – Obligation d’orientation des prix en fonction des coûts – Fixation des tarifs en dessous des coûts exposés par l’opérateur concerné pour la fourniture des services de terminaison d’appel vocal sur des réseaux mobiles – Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne – Article 16 – Liberté d’entreprise – Proportionnalité.

Télécommunications

Rapprochement des législations


Parties
Demandeurs : Polkomtel sp. z o.o.
Défendeurs : Prezes Urzędu Komunikacji Elektronicznej.

Composition du Tribunal
Avocat général : Tanchev
Rapporteur ?: Jarašiūnas

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2017:989

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