CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. MANUEL CAMPOS SÁNCHEZ-BORDONA
présentées le 25 janvier 2017 ( 1 )
Affaire C‑437/15 P
Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO)
contre
Deluxe Laboratories, Inc. et
Deluxe Entertainment Services Group Inc.
«Pourvoi — Marque de l’Union européenne — Marque figurative comprenant l’élément verbal “deluxe” — Refus d’enregistrement par l’examinateur»
1. La société Deluxe Entertainment Services Group Inc. (ci-après « Deluxe ») ( 2 ) a demandé l’enregistrement en tant que marque de l’Union européenne ( 3 ) du terme « deluxe », représenté sur élément figuratif, pour un nombre considérable de produits et services (plus de 90). Cette demande a été rejetée par l’examinateur et par la chambre de recours de l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) en raison du défaut de caractère distinctif de la marque demandée en
relation avec l’ensemble de ces produits et services.
2. Le Tribunal de l’Union européenne, devant lequel Deluxe a attaqué la décision de la chambre de recours, a annulé celle-ci par un arrêt du 4 juin 2015 ( 4 ) en raison de l’existence d’un vice de motivation, car – selon le Tribunal – la chambre de recours avait omis d’examiner le caractère distinctif de la marque pour chacun des produits et des services en cause ou, à tout le moins, pour chacune des catégories dont pourraient relever lesdits produits ou services.
3. L’EUIPO a formé un pourvoi contre l’arrêt attaqué et affirme, brièvement, que la motivation de la décision annulée est correcte.
4. Ce pourvoi soulève des questions de diverses natures, qui touchent tant au caractère distinctif du signe « deluxe », qui présente une certaine connotation publicitaire ( 5 ) ou élogieuse ( 6 ) en relation avec les produits et services qu’il vise à protéger – ou, du moins, certains d’entre eux – qu’à la possibilité pour l’EUIPO, en présence d’un motif absolu de refus, de ne pas effectuer d’analyse détaillée du lien entre la marque dont l’enregistrement est demandé et lesdits produits ou services.
5. Dans son pourvoi, l’EUIPO invoque seulement la violation de l’article 75 du règlement no 207/2009 ( 7 ), lu en combinaison avec l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement. Il n’aborde donc pas les questions qui pourraient se poser au sujet du motif absolu de refus d’une marque de l’Union européenne visé à l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce règlement. Je reviendrai sur ce point.
Le cadre juridique
Le règlement n o 207/2009
6. L’article 4 du règlement no 207/2009 dispose ce qui suit :
« Peuvent constituer des marques de l’Union européenne tous les signes susceptibles d’une représentation graphique, […] à condition que de tels signes soient propres à distinguer les produits ou les services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises. »
7. L’article 7 dudit règlement, qui est intitulé « Motifs absolus de refus », dispose ce qui suit :
« 1. Sont refusés à l’enregistrement :
a) les signes qui ne sont pas conformes à l’article 4 ;
b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif ;
c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ;
[…]
2. Le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de l’Union.
[…]. »
8. L’article 75, intitulé « Motivation des décisions », dispose ce qui suit :
« Les décisions de l’Office sont motivées. Elles ne peuvent être fondées que sur des motifs sur lesquels les parties ont pu prendre position. »
Les antécédents du litige
Les faits à l’origine du litige
9. Le 10 octobre 2012, Deluxe a introduit une demande d’enregistrement de marque de l’Union européenne, conformément au règlement no 207/2009, pour le signe figuratif suivant :
Image
10. Cette demande d’enregistrement ( 8 ) visait, dans les classes 9, 35, 37, 39 à 42 et 45 au sens de l’arrangement de Nice ( 9 ), les produits et services suivants ( 10 ) :
— classe 9 : « Films cinématographiques et téléfilms contenant des vidéos musicales, action/aventure, comédie, drame, horreur, famille, enfants, animation, sports, documentaires, films publicitaires, science-fiction, histoire, éducation, action en direct, générés par ordinateur, animés, en deux dimensions, en trois dimensions, bandes annonces, annonces de service public, fiction, non fiction, réalité et thrillers ; médias numériques, à savoir DVD, DVD haute définition préenregistrés et disques
optiques préenregistrés contenant des vidéos musicales, action/aventure, comédie, drame, horreur, famille, enfants, animation, sports, documentaires, films publicitaires, science-fiction, histoire, éducation, action en direct, générés par ordinateur, animés, en deux dimensions, en trois dimensions, bandes annonces, annonces de service public, fiction, non fiction, réalité et thrillers, et enregistrements audio et vidéo téléchargeables contenant des films cinématographiques, programmes
télévisés et programmes vidéo » ;
— classe 35 : « Contrôle, suivi et traçage informatisés des stocks de colis en transit ; publicité et marketing de films cinématographiques, programmes télévisés et messages publicitaires ; préparation de présentations audio-vidéo dans les domaines de la musique, des films cinématographiques, des programmes télévisés et des messages publicitaires ; préparation de présentations audiovisuelles à usage publicitaire ; services de montage de postproduction pour messages publicitaires vidéo et audio ;
commercialisation de produits ; services commerciaux, à savoir sous-traitance dans le domaine des services de traduction, à savoir service de transfert d’informations pour légendes et sous-titres d’œuvres audiovisuelles ; gestion commerciale d’actifs sous forme de programmes télévisés, films cinématographiques et messages publicitaires, et contenu multimédia audiovisuel commercial, industriel et d’entreprises ; organisation et conduite de foires commerciales, expositions à des fins
commerciales ou publicitaires dans les domaines du divertissement, de la télévision, des logiciels et des jeux vidéo ; services d’organisation, à savoir indexation de fichiers numériques à contenu cinématographique, vidéo, audio, illustré et documentaire, pour les industries de la postproduction ; gestion de fichiers numériques à contenu cinématographique, vidéo, audio, illustré et documentaire, pour les industries de la postproduction ; services de présentation de fichiers numériques
présentant du contenu cinématographique, vidéo, audio, photographique et documentaire, pour les industries de la postproduction ; gestion des stocks, à savoir localisation de fichiers numériques à contenu cinématographique, vidéo, audio, illustré et documentaire, pour les industries de la postproduction ; services de gestion commerciale, à savoir gestion de patrimoine numérique et intellectuel » ;
— classe 37 : « Services de rajeunissement de film, bande, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne, à savoir nettoyage de film, bande, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne » ;
— classe 39 : « Dépôt et transport de caméras, supports cinématographiques, vidéo, numériques, traitement de l’information et accessoires connexes ; stockage et entreposage de supports cinématographiques, numériques et vidéo, matériel promotionnel lié aux films cinématographiques, programmes télévisés et programmes publicitaires, à savoir vêtements, affiches, silhouettes de films, de programmes télévisés et programmes publicitaires ; stockage électronique d’images numériques et vidéo,
enregistrements cinématographiques et audio numériques ; stockage de films cinématographiques, de programmes télévisés, de programmes publicitaires, de cinéma numérique, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques et en ligne ; stockage de disques vidéo, bandes audio, et cédéroms originaux contenant de la musique et des images ; gestion de support, à savoir déplacement, archivage et transport de fichiers numériques représentant du
contenu cinématographique, vidéo, audio, photographique et documentaire, pour les industries de la postproduction ; articles de conditionnement pour le transport ; livraison de produits par camion ; dépôt de marchandises ; conditionnement de marchandises pour le compte de tiers, à savoir conditionnement de musique, vidéos, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne ; services de conditionnement personnalisé
pour enregistrements audio, vidéo et de données ; selon les spécifications établies lors de la commande pour le compte de tiers » ;
— classe 40 : « Reproduction et copie de films cinématographiques, de programmes télévisés, de programmes publicitaires et de programmes vidéo sur films, bandes vidéo, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne ; matriçage et reproduction de positifs et négatifs de films cinématographiques sur bandes vidéo (DVD, DVD haute définition, disques optiques et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables
et en ligne) ; découpe de négatifs ; location de machines et appareils d’impression pour le développement et l’impression industriels dans les industries photographique, cinématographique et de la télévision ; accentuation des couleurs de films cinématiques en noir et blanc ; sous-titrage codé de films et vidéos ; services de correction numérique de vidéos, et transfert vidéonumérique, à savoir services de correction des couleurs et de conversion de films cinématographiques, télévisés et
publicitaires en films vidéo ; reproduction de supports cinématographiques et de tout autre support vidéo, à savoir rematriçage de films d’un format dans un autre ; fabrication sur commande dans le domaine des disques optiques ; reproduction de bandes vidéo, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne sous tous formats professionnels ; services vidéo, matriçage et reproduction de bandes vidéo
professionnelles, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne ; services de développement de films ; services de transfert de films sur bandes vidéo, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne, et services de transferts de support en ligne, à savoir conversion de films cinématographiques, télévisés et publicitaires en
bandes vidéo, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne ; services de sauvegarde cinématographique et d’autres supports vidéos, à savoir préservation et restauration numériques de films cinématiques ; services d’impression pour enregistrements audio, vidéo, et de données ; traitement et impression de films cinématographiques, télévisés et publicitaires ; conversion de films cinématographiques, télévisés et
publicitaires de deux dimensions en trois dimensions ; exploitation de laboratoires de traitement de films cinématographiques, télévisés et publicitaires ; formatage et conversion de supports et de données numériques ; conversion numérique de films cinématographiques, télévisés et publicitaires en bandes vidéo, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques et en ligne ; services de transfert numérique de films sur bandes, à savoir
transfert de films sur DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne » ;
— classe 41 : « Services de laboratoire et de postproduction pour films cinématographiques, télévisés et publicitaires, bandes vidéo et vidéos numériques, à savoir tirage haute résolution de films, étalonnage numérique des couleurs, enregistrement de films laser d’images vidéonumériques et haute définition en films ; services de matriçage numérique et vidéo pour films cinématographiques, télévisés et publicitaires ; services d’image numérique ; manipulation numérique et électronique d’images
pour films cinématographiques, télévisés et publicitaires ; enregistrement d’images numériques sur films ; production de contenus vidéo et audio, à savoir production de cassettes vidéo et de DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne pour le compte de tiers ; production d’effets spéciaux visuels, optiques et numériques pour le compte de tiers, télévision, cinéma, publicité, DVD, DVD haute définition, disques
optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne, à savoir le cinéma numérique ; services d’enregistrement et de production audio ; services de montage de films ; production électronique de films cinématographiques, télévisés et publicitaires à partir de bandes vidéo, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres support enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne ; production d’effets spéciaux visuels pour bandes
vidéo, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne ; production et distribution de films cinématographiques, télévisés et publicitaires ; production de voix hors champ pour bandes vidéo, enregistrements, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne ; services d’assistance liée à la production et à la distribution de films ;
production de disques vidéo, bandes audio et cédéroms originaux contenant de la musique et des images ; organisation de la distribution ou de la syndication de films cinématographiques, télévisés et publicitaires ; services de distribution de films, bandes, DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne ; services de doublage et montage de films ; pistes vidéo et bandes son pour le cinéma, la télévision et les
messages publicitaires » ;
— classe 42 : « Conception et développement de logiciels ; recherche et développement de produits ; hébergement de sites web pour le compte de tiers ; services de conception de sites web pour des tiers ; tatouages numériques ; services d’arts graphiques pour la publicité presse dans le domaine du divertissement ; conception de menus de DVD pour le compte de tiers ; conception pour le compte de tiers d’emballages de musique, contenu vidéo, DVD et support numérique ; contrôle de qualité pour le
compte de tiers de la reproduction, copie et distribution de films et vidéos numériques ; services de création de contenu, à savoir création et développement de logiciels interactifs et d’autres contenus multimédias ; conception et développement de produits multimédias, à savoir conception de menus de DVD pour le compte de tiers ; récupération de fichiers numériques représentant du contenu cinématographique, vidéo, audio, photographique et documentaire, pour les industries de postproduction ;
conversion de données ou documents de supports physiques vers des supports électroniques ; services de création pour DVD, DVD haute définition, disques optiques préprogrammés et autres supports enregistrés, numériques, téléchargeables et en ligne ; compression numérique de données ; compression numérique de données audio et vidéo ; compression numérique de données cinématographiques et vidéo ; services de compression numérique de supports et de données numériques » ;
— classe 45 : « Services d’assistance en sécurité des produits dans l’industrie cinématographique, de la télévision et des messages publicitaires, à savoir authentification de produits, détection du piratage de produits, et enregistrement et suivi de données numériques ; impression de sécurité, à savoir encodage de supports et données numériques destinés à être utilisés dans le suivi de la source de copies non autorisées de ceux-ci et services d’encodage et de transcodage de supports et données
numériques ; encodage de films cinématographiques, télévisés et publicitaires destinés à être utilisés dans le suivi de la source de copies non autorisées de ceux-ci ; fourniture de sécurité de contenu pour des supports enregistrés ; gestion de droits de protection contre les copies, à savoir services de sécurité des produits dans l’industrie du cinéma, de la télévision et de la publicité ; technologie et services liés à la sécurité, à savoir services de suivi et traçage utilisés pour
sécuriser, suivre et tracer des films codés contre la fraude, le piratage et la contrefaçon ; services de protection de contenu électronique ; recherche et développement en lien avec le téléchargement et le stockage illégal de fichiers cinématographiques, télévisés et publicitaires numériques non autorisés ».
11. Par décision du 13 juin 2013, l’examinateur a rejeté la demande pour tous les produits et services visés, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b) et c), du règlement no 207/2009, au motif que la marque « deluxe » était dépourvue de caractère distinctif et informait les consommateurs sur la qualité des produits et des services en cause.
12. À la suite du recours formé contre la décision de l’examinateur, la deuxième chambre de recours de l’EUIPO a confirmé celle-ci par une décision du 22 janvier 2014 (ci-après la « décision litigieuse ») fondée sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, en validant également l’argumentation de l’examinateur afférente à l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce même règlement.
13. La chambre de recours a notamment considéré que l’élément verbal « deluxe » ne permettrait pas, à lui seul, dans les parties de l’Union européenne où la langue anglaise était comprise, de distinguer les produits et les services de la requérante de ceux de ses concurrents, puisqu’il constituait un cliché promotionnel banal et consistait uniquement en une « allégation de qualité supérieure ». Elle a ajouté que le terme « deluxe » relevait de la catégorie des termes qui devaient être exclus du
monopole de marque et que l’élément figuratif en cause n’était pas suffisant pour conférer un caractère distinctif à la marque demandée. Pour les mêmes motifs, la chambre de recours a confirmé la décision de l’examinateur en tant qu’il avait estimé que la marque demandée informait les consommateurs sur la qualité des produits et des services en cause. La chambre de recours a enfin considéré que ladite marque n’avait pas acquis de caractère distinctif par l’usage qui en avait été fait dans
l’Union.
L’arrêt attaqué
14. En désaccord avec la décision litigieuse, Deluxe a formé un recours contre celle-ci devant le Tribunal le 10 avril 2014.
15. Dans son recours, Deluxe reprochait cinq violations à la décision litigieuse, chacune de ces violations fondant un moyen d’annulation. Ainsi, la chambre de recours aurait violé les dispositions suivantes du règlement no 207/2009 : 1) l’article 75, qui impose à l’EUIPO l’obligation de motiver ses décisions ; 2) l’article 7, paragraphe 1, sous b), en relation avec le caractère distinctif du signe ; 3) l’article 7, paragraphe 1, sous c), en relation avec le caractère descriptif du signe ;
4) l’article 7, paragraphe 3, en relation avec l’éventuel caractère distinctif acquis par l’usage, et 5) les principes de protection de la confiance légitime, de protection des droits acquis et de la légalité des actes communautaires.
16. Le Tribunal n’a analysé que les deux premiers moyens du recours, pris conjointement ( 11 ), et cet examen l’a conduit à annuler la décision litigieuse et à condamner l’EUIPO aux dépens.
17. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal rappelle la jurisprudence de la Cour en vertu de laquelle, lorsque l’enregistrement d’une marque est demandé pour divers produits ou services, la chambre de recours doit vérifier in concreto que la marque en cause ne relève d’aucun des motifs de refus d’enregistrement énoncés à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 à l’égard de chacun de ces produits ou services et peut aboutir à des conclusions différentes selon les produits ou les services. Dès
lors, la chambre de recours, lorsqu’elle refuse l’enregistrement d’une marque, est tenue d’indiquer dans sa décision la conclusion à laquelle elle aboutit pour chacun des produits et des services visés dans la demande d’enregistrement, indépendamment de la manière dont cette demande a été formulée. Toutefois, lorsque le même motif de refus est opposé pour une catégorie ou un groupe de produits ou de services, l’autorité compétente peut se limiter à une motivation globale pour tous les produits
ou services concernés ( 12 ).
18. Selon le Tribunal, la chambre de recours a examiné le caractère distinctif du signe « deluxe » sans se référer à chacun des produits et des services visés dans la demande d’enregistrement dans les classes 9, 35, 37, 39 à 42 et 45. C’est en contradiction avec la jurisprudence qu’elle a donc adopté à leur égard une motivation globale, sans indiquer que les produits et services en cause présentaient entre eux un lien suffisamment direct et concret, au point qu’ils formaient une catégorie homogène.
La procédure devant la Cour et les conclusions des parties
19. Le pourvoi de l’EUIPO est parvenu au greffe de la Cour le 10 août 2015 et le mémoire en réponse de Deluxe le 25 avril 2016.
20. L’EUIPO demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué et de condamner Deluxe aux dépens.
21. Deluxe conclut à ce que la Cour rejette le pourvoi et condamne l’EUIPO à supporter les dépens exposés par Deluxe devant la Cour et le Tribunal.
22. À la demande de Deluxe, conformément à l’article 76, paragraphe 1, du règlement de procédure de la Cour de justice, une audience à laquelle les deux parties ont comparu s’est tenue le 9 novembre 2016.
L’argumentation des parties
23. Le pourvoi est fondé sur un moyen unique divisé en deux branches. Dans la première, l’EUIPO fait grief au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en limitant la possibilité d’adopter une motivation globale au seul cas où les produits ou les services constituent des catégories homogènes. Selon l’EUIPO, lorsqu’un signe, tel que « deluxe », transmet de manière immédiate un message élogieux applicable à tous les secteurs de l’industrie et des services, une motivation globale suffit pour le
rejeter. Une telle motivation permet au destinataire de la décision de contester les raisons de la mesure prise et au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision.
24. L’EUIPO considère que l’homogénéité des produits et des services n’est pas non plus une condition nécessaire : l’existence d’une caractéristique commune suffit pour qu’une motivation globale soit acceptable à l’égard de l’ensemble d’entre eux. En l’espèce, la caractéristique commune de chacun des produits et services concernés, sans exception, serait qu’ils sont susceptibles d’avoir une qualité plus ou moins élevée, de sorte que l’indication d’une qualité supérieure, inhérente au terme
« deluxe », sera perçue au regard de chacun d’eux comme un simple argument de vente.
25. À l’appui de sa position, l’EUIPO invoque l’argumentation suivie dans l’ordonnance BigXtra ( 13 ), dans laquelle la Cour aurait reconnu l’existence d’un lien suffisamment direct et concret entre les produits et les services visés ( 14 ) (à savoir le fait qu’ils pouvaient tous faire l’objet de réductions ou d’avantages spéciaux), qui autorisait une motivation globale. Au vu de cette caractéristique commune, le signe « BigXtra » serait compris comme une indication d’une qualité positive de ces
produits et services, raison pour laquelle il serait perçu comme une promesse publicitaire.
26. Pour l’EUIPO, le Tribunal s’écarte de la jurisprudence de la Cour lorsqu’il considère que la décision litigieuse est entachée d’un défaut de motivation ( 15 ). Il commet une erreur de droit lorsqu’il juge que le caractère élogieux et promotionnel du signe « deluxe », susceptible de s’appliquer à tous les produits et services en cause, est dépourvu de pertinence.
27. L’EUIPO estime que la chambre de recours a exposé à suffisance les raisons pour lesquelles le signe « deluxe » est dépourvu de caractère distinctif au regard de chacun des produits et services. Ces raisons permettaient ( 16 ) à Deluxe de contester le fait que le signe demandé serait nécessairement perçu comme une simple indication d’excellence ou comme une indication promotionnelle élogieuse de sa qualité supérieure.
28. L’EUIPO considère qu’exiger de la chambre de recours d’effectuer une analyse détaillée par produits et services (y compris par catégories) conduirait à une répétition systématique et formelle de la raison fondamentale pour laquelle l’enregistrement est refusé, à savoir le fait que le signe est dépourvu de caractère distinctif pour chacun d’eux. Cette répétition n’ajouterait rien à l’argument fondant le refus d’enregistrement (c’est-à-dire le défaut de caractère distinctif).
29. Enfin, l’EUIPO invoque le fait que, dans une série d’arrêts, le Tribunal aurait reconnu l’absence de caractère distinctif de certains slogans à l’égard de multiples produits ou services lorsque la perception du signe comme un message publicitaire courant est immédiate et invariablement applicable à chacun d’entre eux ( 17 ).
30. Dans la deuxième branche du moyen unique de son pourvoi, l’EUIPO défend une conception large de la notion d’« homogénéité » aux fins de la motivation globale. Il suffit que les produits et les services en cause présentent une caractéristique commune, qui pourrait même exister entre des produits ou des services relevant de secteurs totalement différents, sans devoir nécessairement découler d’une similitude entre les produits et services au regard de leur nature ou de leur destination. L’EUIPO
conteste qu’une corrélation doive être établie entre l’existence d’une « catégorie homogène » et la description des produits et services, comme l’a fait le Tribunal dans l’arrêt attaqué ( 18 ).
31. Selon l’EUIPO, bien que la jurisprudence ( 19 ) exige que les produits ou les services présentent entre eux un lien suffisamment direct et concret pour pouvoir former une catégorie d’une homogénéité suffisante (autorisant une motivation globale), elle indique non pas quelle doit être la nature de ce lien, mais simplement qu’il doit exister. Dans ce contexte, l’EUIPO souligne qu’il ne ressort pas non plus de la jurisprudence ( 20 ) que les critères pertinents pour apprécier l’homogénéité soient
des critères prédéfinis de façon exhaustive ou que ceux-ci soient cumulatifs.
32. En exigeant, dans l’arrêt attaqué, que le critère de l’homogénéité découle de la description des produits et services pour lesquels Deluxe demandait la protection de la marque, le Tribunal aurait fait une interprétation erronée de la notion de « catégorie de produits ou services suffisamment homogène » établie par la jurisprudence et, par conséquent, de la notion de « lien suffisamment direct et concret » pour constituer une telle catégorie.
33. En revanche, la caractéristique commune identifiée par la chambre de recours dans la présente affaire (à savoir que « tous les produits peuvent être présentés comme possédant une qualité “supérieure” », de même que « tous les services peuvent être présentés comme fournissant une “qualité supérieure” ») ( 21 ), même si elle ne ressort pas directement de la description des produits et services, au sens d’une caractéristique exclusive les définissant, constitue un critère suffisant pour considérer
qu’ils forment tous une catégorie homogène permettant d’adopter une motivation globale. Le Tribunal n’aurait pas expliqué les raisons pour lesquelles cette caractéristique commune ne constituait pas un lien suffisamment direct et concret.
34. L’entreprise Deluxe rejette les arguments de l’EUIPO. En particulier, elle considère que sa marque ne saurait, du point de vue du public pertinent, posséder un caractère élogieux à l’égard des produits et services en cause.
35. En ce qui concerne la première branche du moyen du pourvoi, Deluxe soutient que c’est à tort que l’EUIPO invoque l’ordonnance BigXtra ( 22 ), ladite affaire n’étant pas comparable avec l’espèce, puisqu’il avait été établi que ce signe faisait l’éloge des moyens par lesquels les produits étaient vendus. Deluxe conteste également l’applicabilité des arrêts relatifs aux slogans qu’invoque l’EUIPO ( 23 ), les contextes étant différents de celui de l’espèce.
36. En ce qui concerne la deuxième branche du moyen du pourvoi, Deluxe affirme que les produits et les services pour lesquels l’enregistrement du signe a été demandé ne sont pas homogènes et que, en tout état de cause, l’EUIPO n’indique à aucun moment les raisons pour lesquelles ils le seraient. Deluxe considère que la véritable problématique du litige réside dans le caractère élogieux du signe litigieux et fournit des exemples de produits et de services pour lesquels le terme « deluxe » ne présente
pas un caractère élogieux.
37. Lors de l’audience, Deluxe a reproché à l’EUIPO d’avoir tout simplement extrapolé à tous les produits et services visés un postulat trop général, en vertu duquel le terme « deluxe » ne présente pas de caractère distinctif.
38. Afin de justifier le fait que, en l’espèce, un examen détaillé de la signification du terme « deluxe » aurait dû être effectué, à tout le moins, en relation avec plusieurs produits et services, Deluxe a, d’une part, souligné que, pour certains d’entre eux, il n’existe pas de gamme de qualité suffisante pour pouvoir comprendre que, s’ils sont visés par la marque, cette dernière pourrait évoquer leur qualité supérieure ou le luxe ( 24 ). Deluxe a, d’autre part, fait valoir que le public qui
pourrait faire l’acquisition de ces produits et services est constitué de professionnels spécialisés faisant preuve d’un degré d’attention élevé, qui ne verraient pas dans le terme « deluxe » une allusion à leur qualité supérieure. Dans ces conditions, il n’y avait pas lieu d’exclure globalement le caractère distinctif de la marque, sans examiner ce dernier en relation avec lesdits produits et services.
L’analyse juridique
39. Il me semble opportun d’aborder conjointement les deux erreurs de droit invoquées dans le moyen unique du pourvoi. Il est trop artificiel de les diviser, car il s’agit, à proprement parler, du même grief juridique, et la problématique porte sur une question bien précise : la pertinence ou non, en l’espèce, de la motivation globale de la décision de l’EUIPO. L’interprétation de la notion de « catégorie [de produits ou services] suffisamment homogène » à laquelle cette motivation pourrait
s’appliquer n’est rien d’autre qu’un aspect supplémentaire (et subsidiaire) de ce débat.
40. Les principes jurisprudentiels dégagés par la Cour dans ce domaine sont exposés – correctement à mon avis – dans l’arrêt attaqué ( 25 ). Après en avoir résumé les traits essentiels, ils me serviront de base pour l’examen du pourvoi.
41. Lorsque, aux fins de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 207/2009, l’EUIPO examine le caractère distinctif d’un signe dont l’enregistrement a été demandé pour plusieurs produits ou services, tout d’abord il cherche à déterminer si ce signe permet d’identifier les produits ou services comme provenant d’une entreprise déterminée et donc de les distinguer de ceux d’autres entreprises ( 26 ) ; ensuite, si le signe présente un caractère distinctif, l’EUIPO doit procéder à son examen à
l’égard des produits ou des services visés et peut aboutir à des conclusions différentes selon les produits ou services considérés ( 27 ), enfin, en cas de refus d’enregistrement, la décision doit en principe être motivée pour chacun desdits produits ou services ( 28 ).
42. Ces règles connaissent toutefois une exception importante : si l’EUIPO considère qu’un même motif de refus est opposable à une catégorie ou un groupe de produits ou de services, il peut se limiter à une motivation globale pour l’ensemble de ces produits ou services ( 29 ).
43. Cette jurisprudence a, de fait, une incidence sur la nécessité d’examiner le caractère distinctif compte tenu de la perception du public pertinent ( 30 ). Bien qu’il soit moins important, ce point peut avoir une influence sur le litige.
44. L’EUIPO estime que le Tribunal a commis une erreur de droit en exigeant une motivation du refus de la marque « deluxe » pour chaque produit ou service visé, car le caractère élogieux du terme en cause justifiait une appréciation globale. Dans ce contexte, l’EUIPO critique l’application de la notion de « catégorie de produits et services suffisamment homogène » faite dans l’arrêt attaqué, qu’il juge contraire à la jurisprudence.
45. Posé en ces termes, le problème est plus facile à comprendre si on le situe, dans la chronologie de la procédure, au stade de l’examen, par l’EUIPO, du signe dont l’enregistrement est demandé.
46. Comme je l’ai déjà indiqué, l’EUIPO doit, à cette première étape, vérifier in concreto que le signe ne relève d’aucun des motifs de refus figurant à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 207/2009 en ce qui concerne les produits et services en cause. L’examen du caractère distinctif du signe doit être strict et complet, et donc ne pas se limiter à un éventuel examen minimal ( 31 ), qui porterait atteinte aux principes de sécurité juridique et de bonne administration, lesquels s’opposent à
l’enregistrement indu de marques qui ne remplissent pas les exigences légales ( 32 ).
47. Les marques composées « de signes ou d’indications qui sont par ailleurs utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou les services visés par cette marque » constituent un cas particulier. Leur enregistrement n’est pas strictement exclu par la Cour ( 33 ).
48. Pour cette dernière, « la connotation élogieuse d’une marque verbale n’exclut pas que celle-ci soit néanmoins apte à garantir aux consommateurs la provenance des produits ou des services qu’elle désigne. Ainsi, une telle marque peut concomitamment être perçue par le public concerné comme une formule promotionnelle et une indication de l’origine commerciale des produits ou des services. Il en découle que, pour autant que ce public perçoit la marque comme une indication de cette origine, le fait
qu’elle soit simultanément, voire même en premier lieu, appréhendée comme une formule promotionnelle est sans incidence sur son caractère distinctif» ( 34 ).
49. Cette citation est issue d’une jurisprudence relative à des marques verbales composées de signes ou d’indications utilisés en tant que slogans ou indications de qualité, dont l’enregistrement était demandé. La Cour, bien qu’elle reconnaisse « les difficultés que pourraient comporter ces [marques] […] pour établir leur caractère distinctif et dont il est légitime de tenir compte », ne voit pas de raison de les examiner à l’aune de « critères spécifiques suppléant ou dérogeant » aux critères
généraux ( 35 ).
50. Dans ces conditions, il convient à plus forte raison d’appliquer ces critères généraux dans le cadre de l’examen du caractère distinctif des marques qui, outre les éléments verbaux, contiennent des éléments visuels, et constituent donc des marques figuratives. Tel est précisément le cas en l’espèce, puisque l’enregistrement est demandé pour une marque composée d’un élément verbal ou phonétique (le terme « deluxe ») et d’un élément figuratif (un fond circulaire rouge aux pourtours estompés, à
l’intérieur duquel figure l’élément verbal).
51. Il est évidemment possible qu’un signe soit totalement dépourvu de caractère distinctif. Tel est assez probablement le cas de certains slogans et, encore plus certainement, celui de certaines indications élogieuses. Il est logique que si ces slogans ou indications élogieuses souffrent d’une incapacité manifeste ou d’une inaptitude totale à produire des effets distinctifs, les autorités compétentes les rejettent sans procéder aux examens ultérieurs – et inutiles – concernant les produits et
services qu’ils visent à protéger.
52. Je pense que c’est à juste titre que l’EUIPO défend, in abstracto, le bien-fondé de cette approche, car une fois constaté le défaut absolu de caractère distinctif, globalement extensible à tous types de produits et services, je ne vois pas quel motif justifierait l’exigence d’un examen subséquent de ce (défaut de) caractère distinctif à l’égard de produits ou services déterminés. Dans cet esprit, le rejet de la nouvelle marque serait suffisamment justifié et la décision constatant l’inaptitude
pleine et entière (« universelle ») de la marque dont l’enregistrement est demandé serait motivée à suffisance.
53. La jurisprudence mentionnée dans l’arrêt attaqué devrait donc être nuancée lorsque l’inaptitude d’un signe à différencier les produits ou les services d’une entreprise par rapport à ceux d’une autre entreprise atteint un tel degré de certitude qu’elle peut être qualifiée, sans risque d’erreur, d’inaptitude évidente, quels que soient les produits ou les services concernés.
54. Ces conditions n’étaient toutefois pas réunies dans le cas de la marque « deluxe », et ce pour deux raisons. La première (peut-être de moindre importance) est que, en l’espèce, ce que le public pourrait percevoir comme une indication de qualité supérieure, c’est un signe mixte ou figuratif qui, par sa nature même, requiert un effort sensoriel ou intellectuel qui va au-delà de la simple perception du message élogieux. Or, cet effort peut constituer l’un des facteurs qui font pencher la balance en
faveur de l’existence d’un caractère distinctif de la marque « deluxe », du moins en ce qui concerne certains des produits et services qu’elle vise à protéger.
55. La deuxième raison tient à la signification de l’expression « deluxe », qui évoque justement (et seulement dans certains pays) ce qui est somptueux ou ostentatoire, ces caractéristiques pouvant s’appliquer à certains produits et services ( 36 ), mais pas à d’autres dont l’utilisation est intrinsèquement étrangère à ces caractéristiques ( 37 ). Il en découle que l’approche en vertu de laquelle le signe dont l’enregistrement était demandé pouvait présenter un caractère distinctif, en ce qui
concerne à tout le moins certains desdits produits et services, est logique.
56. Cela a d’ailleurs été reconnu par plusieurs offices nationaux des États membres de l’Union (et d’autres pays) ( 38 ) et par l’EUIPO lui-même en ce qui concerne la marque « deluxe» ( 39 ) et d’autres marques similaires, en relation avec différents produits ou services. S’il est vrai que ces précédents ne présentent pas de caractère contraignant, ils peuvent toutefois constituer des indices en ce sens que le signe demandé ne devait pas d’emblée faire l’objet d’un refus global (et donc dissocié de
son lien avec les différents produits ou services) de la part de l’EUIPO, fondé sur son défaut absolu de caractère distinctif ( 40 ).
57. De fait, la jurisprudence a reconnu que la pratique des États membres, dans la mesure où elle peut être pertinente pour une appréciation à l’échelle de l’Union, constitue une indication utile que l’EUIPO peut inclure dans son appréciation sur le caractère distinctif d’un signe ( 41 ).
58. Plus concrètement encore, la Cour a reconnu que, dans le cadre d’une procédure d’opposition, « il n’est pas possible non plus de constater, à l’égard d’un signe identique à une marque protégée dans un État membre, un motif absolu de refus, tel que l’absence de caractère distinctif, prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement no 40/94 ainsi qu’à l’article 3, paragraphe 1, sous b), des directives [rapprochant les législations des États membres sur les marques] [ ( 42 )]» ( 43 ).
59. Les considérations exposées à ce stade suffisent, à mon sens, pour ne pas partager l’hypothèse sur laquelle se fondent les développements subséquents du moyen du pourvoi. Ces derniers reposent sur une base (l’absence absolue de caractère distinctif du signe « deluxe » à l’égard de tout produit ou service) ( 44 ) qu’il convient tout simplement de considérer comme non démontrée. En l’absence de cette condition fondamentale, le pourvoi est, en soi, voué à l’échec, puisque, en présence d’un signe
qui peut éventuellement servir à distinguer des produits ou des services, l’EUIPO doit, dans son contrôle préalable à l’enregistrement de la marque, effectuer un examen (motivé) de l’existence d’un caractère distinctif en relation avec ceux-ci, pris individuellement ou regroupés par catégories.
60. C’est donc à titre subsidiaire ( 45 ) que j’examinerai les griefs que l’EUIPO soulève à l’encontre de l’arrêt attaqué en ce qui concerne, spécifiquement, la motivation de la décision de la chambre de recours et la notion de « catégorie homogène ». Je note toutefois une certaine incohérence dans son approche puisque, de deux choses l’une, soit le terme « deluxe » est dépourvu du moindre caractère distinctif, auquel cas le fait que les produits et les services visés puissent ou non s’inscrire dans
un ou plusieurs groupes ou catégories ainsi que l’élément déterminant à cet effet ne présenteraient aucune importance, soit, au contraire, ce terme peut présenter un caractère distinctif dans certains cas, et il est alors nécessaire d’examiner (au cas par cas ou par catégories) les produits et services en question, ce que l’EUIPO n’a pas fait.
61. Pour le Tribunal, la circonstance selon laquelle le terme « deluxe » constitue un terme élogieux et promotionnel (« à la supposer établie ») ( 46 ) ne justifiait pas la motivation globale de la décision litigieuse ( 47 ). Je ne vois aucune erreur de droit dans cette appréciation, puisque, d’une part, en vertu de la jurisprudence susmentionnée, il n’y a pas lieu, pour un signe élogieux ou publicitaire, de partir du principe d’un défaut de caractère distinctif per se, et, d’autre part, le Tribunal
ne rejette pas la possibilité, pour l’EUIPO, de procéder à une motivation globale, mais l’oblige, à cet effet, à écarter le caractère distinctif du signe pour des motifs autres que le simple fait de relever du domaine de la publicité ou des messages élogieux.
62. De plus, dans le cadre de l’examen des produits et services visés dans la demande d’enregistrement de Deluxe ( 48 ), le Tribunal constate la possibilité de les regrouper dans sept catégories au moins, puisque, eu égard à leur description, ces produits et ces services présentent entre eux d’importantes différences tenant à leurs natures, à leurs caractéristiques, à leurs destinations et à leurs modes de commercialisation ( 49 ). Le Tribunal poursuit son raisonnement ( 50 ) en notant que l’examen
n’a pas été effectué pour chacun des produits et des services (ou des éventuels regroupements de ces derniers) et que la chambre de recours n’a pas estimé qu’ils présentaient entre eux un lien suffisamment direct et concret, au point qu’ils formaient une catégorie homogène.
63. La Cour a établi les critères pertinents aux fins de l’appréciation de l’homogénéité des produits et des services au point 46 de l’ordonnance CFCMCEE/OHMI ( 51 ), où elle examine et confirme l’adéquation et le bien-fondé des critères pris en considération par le Tribunal, à savoir les caractéristiques, les qualités essentielles communes ainsi que les fonctions desdits produits et services.
64. Or, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal ne fait que reprendre les critères confirmés par la Cour dans l’ordonnance CFCMCEE/OHMI ( 52 ). Il tient donc compte des caractéristiques, des qualités essentielles communes ainsi que des fonctions des produits et services pour mettre en évidence la disparité entre ceux-ci ( 53 ). En somme, il s’en tient aux critères de la jurisprudence en question, sans commettre aucune erreur de droit à cet égard.
65. Il est vrai que, pour la chambre de recours, l’absence de caractère distinctif du signe à l’égard des produits et des services résultait du fait que tous, « sans exception» ( 54 ), pouvaient être présentés comme étant de qualité supérieure. Selon l’EUIPO, il n’est pas nécessaire que la caractéristique commune à tous les produits et services découle de leur description : il suffirait qu’il existe un lien, suffisant et direct, qui permette de classer les différents produits et services dans une
catégorie « suffisamment homogène ».
66. Le pourvoi vise ainsi, en réalité, à étendre cette jurisprudence afin que le critère de la caractéristique commune auquel l’EUIPO fait référence, c’est-à-dire la possibilité que tous les produits et les services puissent être décrits comme de « qualité supérieure », soit également accepté.
67. Je ne me rallie pas à cette approche de l’EUIPO qui confond, à mes yeux, les deux étapes du processus d’examen du caractère distinctif. L’analyse de la perception du public vise à déterminer si ce dernier identifiera l’origine commerciale des produits et services dans le message élogieux ou s’il percevra plutôt ce dernier comme une simple indication de qualité. En revanche, en vue de définir des catégories de produits par rapport auxquelles le caractère distinctif de la marque peut être établi,
il est indispensable que le lien réside dans ces mêmes produits, c’est-à-dire dans leurs caractéristiques propres, leurs qualités communes ou leurs fonctions.
68. Autrement dit, il convient tout d’abord de chercher et, le cas échéant, de classer les éléments et les liens intrinsèques qui permettent de réunir les différents produits et services dans des catégories et, ensuite, de confronter ces dernières au signe dont le caractère distinctif est examiné. Ce n’est que si un élément commun permettant d’appréhender les produits et les services avec une certaine homogénéité est détecté qu’une appréciation globale du caractère distinctif de la marque à l’égard
de la catégorie homogène, ainsi définie, de produits et services pourra être effectuée ( 55 ).
69. Selon l’EUIPO, la prétendue caractéristique commune des produits et des services visés par la marque « deluxe » découlerait du message élogieux en lui-même. Toutefois, j’insiste sur ce point, cette déduction a pour origine non pas l’analyse des produits et des services, mais celle du signe en relation avec le public pertinent. Pour créer des catégories homogènes de produits et de services, il convient nécessairement de prendre en compte les caractéristiques des produits et des services pour
lesquels la protection est demandée, puisque les éléments intrinsèques de comparaison permettant de constater les similitudes et les différences ne peuvent provenir que de ces produits et services. Enfin, cette manière de procéder est plus objective et offre donc une sécurité juridique plus importante pour les opérateurs économiques.
70. Je ne partage donc pas le raisonnement de l’EUIPO qui va, comme exposé ci-dessus, dans le sens d’une extension des possibilités d’identification de liens directs et concrets permettant d’établir une homogénéité entre les différents produits et services afin de pouvoir apprécier ces derniers de manière globale dans le cadre de l’examen du caractère distinctif. Cette possibilité étant donc écartée, et vu que le Tribunal a eu recours aux critères validés par la Cour dans l’ordonnance CFCMCEE/OHMI (
56 ) (c’est-à-dire les caractéristiques, les qualités essentielles communes ainsi que les fonctions des produits et des services) pour mettre en évidence les différences entre les produits et les services, le Tribunal s’est donc conformé, dans cette mesure, à la jurisprudence susmentionnée, sans commettre la moindre erreur de droit.
71. L’EUIPO invoque également, au soutien de son pourvoi, l’ordonnance rendue par le Tribunal dans l’affaire relative à la marque « BigXtra» ( 57 ). Toutefois, aux points 48 et 49 de cette ordonnance, le Tribunal fait référence non pas au fondement du lien suffisamment direct et concret entre les produits et services en cause, mais au grief soulevé par la requérante dans cette affaire, en vertu duquel le Tribunal aurait renversé la charge de la preuve quant à l’absence de motif absolu de refus
d’enregistrement.
72. Dans l’arrêt attaqué dans cette affaire ( 58 ), le Tribunal s’était contenté de rejeter l’argument de la requérante qui reprochait à la chambre de recours de ne pas avoir examiné le caractère distinctif du signe à l’égard des produits et services désignés. Dans le cadre du pourvoi introduit contre cet arrêt, la Cour n’était donc pas saisie de la question de savoir si le fait que tous les produits et services puissent offrir des réductions considérables, des avantages importants ou une indemnité
spéciale constituait un lien suffisant entre lesdits produits et services, mais était seulement appelée à se prononcer sur un grief relatif à la répartition de la charge de la preuve, qu’elle n’a pas accueilli, en confirmant ainsi l’arrêt attaqué. Par conséquent, l’ordonnance de la Cour dans l’affaire BigXtra ( 59 ) n’est pas extrapolable au présent cas d’espèce.
73. Je ne partage pas non plus l’argument en vertu duquel le fait de ne pas accepter l’extension de la jurisprudence, dans les termes suggérés par l’EUIPO, l’amènerait à répéter le motif basique de refus pour chaque produit ou service dans ses décisions, sans que cela soit nécessaire. Il ne s’agit pas d’une conséquence obligée et irrémédiable, étant donné que le Tribunal ne l’exige pas et que l’on ne saurait exclure que le même motif de refus s’applique à différentes catégories de produits et de
services, auquel cas des explications conjointes peuvent simplement être apportées sur son application.
74. Enfin, je souhaiterais revenir brièvement, comme je l’ai annoncé au début des présentes conclusions ( 60 ), à l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009. C’est cette dernière disposition – et non l’article 7, paragraphe 1, sous b), dudit règlement qui est seul invoqué au stade du pourvoi – qui prévoit les motifs absolus de refus relatifs aux signes descriptifs, c’est-à-dire dans le cas où les marques « sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans
le commerce, pour désigner la qualité […] du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci ».
75. Comme je l’ai déjà indiqué, le Tribunal a fait usage de la possibilité qui lui est ouverte de ne pas examiner tous les moyens d’annulation lorsqu’il accueille l’un d’entre eux [en l’espèce, le moyen relatif à l’article 7, paragraphe 1, sous b)], raison pour laquelle il ne s’est pas arrêté sur le moyen relatif à la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c). De fait, la Cour a reconnu l’existence d’un chevauchement partiel entre les champs d’application respectifs de ces dispositions, la
différence entre celles-ci résidant dans le fait que la première d’entre elles couvre l’ensemble des circonstances dans lesquelles un signe n’est pas de nature à distinguer les produits ou services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises ( 61 ), ce qui pourrait valider le choix du Tribunal de ne pas examiner le moyen d’annulation fondé sur l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement no 207/2009.
76. Toutefois, aux fins d’une application correcte de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 207/2009, cette même jurisprudence a nuancé cette affirmation en soulignant que l’application du motif de refus énoncé dans cette disposition doit rester réservée aux cas proprement visés par celui-ci ( 62 ). Cette approche doit être vue au regard de l’intérêt général qui sous-tend cette disposition, et qui implique que les marques composées exclusivement de signes ou d’indications qui peuvent servir à
désigner les caractéristiques d’un produit ou d’un service au sens de ladite disposition soient librement à la disposition de tous et ne puissent faire l’objet d’un enregistrement ( 63 ).
77. Je pense toutefois que si une décision est attaquée sur le fondement des deux motifs de refus de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et c), du règlement no 207/2009, il est préférable, en raison du chevauchement des domaines d’application de ces dispositions, que le Tribunal examine chacun d’entre eux, même s’il n’en accueille qu’un. À l’instar d’autres avocats généraux, je propose même que l’analyse débute par l’article 7, paragraphe 1, sous c) ( 64 ), étant donné qu’il est préférable, dans le
cadre législatif du règlement no 207/2009, de ne pas confondre les deux critères, ni de les considérer comme intrinsèquement interdépendants ( 65 ).
78. En effet, bien qu’il suffise que l’un des motifs absolus de refus s’applique pour que le signe ne puisse pas être enregistré ( 66 ), le fait d’examiner les autres motifs absolus de refus et de se prononcer sur ceux-ci peut permettre d’éviter, dans les cas d’annulation, une répétition du recours en annulation.
79. Quoi qu’il en soit, dès lors que les arguments de l’EUIPO sur le défaut de caractère distinctif du signe litigieux reposaient sur le fait qu’il s’agissait d’une affirmation de qualité supérieure, les considérations exposées s’appliquent tant en ce qui concerne l’article 7, paragraphe 1, sous b), que l’article 7, paragraphe 1, sous c) (dans la mesure où il vise les indications pouvant servir pour désigner la qualité), du règlement no 207/2009.
80. En somme, je considère que le moyen unique du pourvoi ne saurait être accueilli, dès lors que l’arrêt attaqué n’est pas entaché des erreurs de droit dont l’EUIPO lui fait grief, et qu’il convient donc de rejeter le pourvoi.
Conclusion
81. Eu égard aux raisonnements qui précèdent, je propose à la Cour :
1) de rejeter le pourvoi introduit par l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO) contre l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 4 juin 2015, Deluxe Laboratories/OHMI (deluxe) (T‑222/14, non publié, EU:T:2015:364) ;
2) de condamner l’EUIPO aux dépens supportés par Deluxe Entertainment Services Group Inc.
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
( 1 ) Langue originale : l’espagnol.
( 2 ) Ladite société a succédé à la société Deluxe Laboratories, Inc.
( 3 ) L’expression « marque de l’Union européenne » est prévue à l’article 1er, sous 2), du règlement (UE) 2015/2424 du Parlement européen et du Conseil, du 16 décembre 2015, modifiant le règlement (CE) no 207/2009 du Conseil sur la marque communautaire et le règlement (CE) no 2868/95 de la Commission portant modalités d’application du règlement (CE) no 40/94 du Conseil sur la marque communautaire, et abrogeant le règlement (CE) no 2869/95 de la Commission relatif aux taxes à payer à l’Office de
l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (JO 2015, L 341, p. 21).
( 4 ) Arrêt Deluxe Laboratories/OHMI (deluxe) (T‑222/14, non publié, EU:T:2015:364, ci-après l’« arrêt attaqué »).
( 5 ) Il existe une jurisprudence abondante de la Cour sur les marques comportant des slogans publicitaires. Voir, notamment, arrêts du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk (C‑64/02 P, EU:C:2004:645, point 35), et du 21 janvier 2010, Audi/OHMI (C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 45).
( 6 ) Voir, en ce qui concerne la jurisprudence sur les signes élogieux, arrêt du 13 janvier 2011, Media-Saturn-Holding/OHMI (C‑92/10 P, non publié, EU:C:2011:15, point 51), et ordonnance du 11 décembre 2014, FTI Touristik/OHMI (C‑253/14 P, non publiée, EU:C:2014:2445, ci‑après l’« ordonnance BigXtra », point 35).
( 7 ) Règlement du Conseil du 26 février 2009 sur la marque de l’Union européenne (JO 2009, L 78, p. 1). Le règlement 2015/2424 n’est pas applicable ratione temporis.
( 8 ) Publiée au Bulletin des marques communautaires no 2009/44, du 16 novembre 2009.
( 9 ) Arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié.
( 10 ) Dans la version de l’arrêt dans la langue de procédure (l’espagnol), les produits et les services sont énumérés en langue anglaise, tels qu’ils figuraient dans le recours déposé auprès du Tribunal. La traduction reproduite dans les présentes conclusions n’est donc pas une traduction officielle.
( 11 ) Points 22 à 24 de l’arrêt attaqué.
( 12 ) Le Tribunal renvoie notamment à l’ordonnance du 18 mars 2010, CFCMCEE/OHMI (C‑282/09 P, EU:C:2010:153, points 37 et 38), et, par analogie, à l’arrêt du 15 février 2007, BVBA Management, Training en Consultancy (C‑239/05, EU:C:2007:99, points 32, 34 et 38).
( 13 ) Ordonnance du 11 décembre 2014 (C‑253/14 P, non publiée, EU:C:2014:2445, points 48 et 49).
( 14 ) Dans cette affaire, la protection de la marque était demandée pour des produits et des services des classes 16, 35, 39, 41, 42 et 43 au sens de l’arrangement de Nice.
( 15 ) En particulier en ce qui concerne les points 23 et 24 de l’arrêt attaqué.
( 16 ) Dans le respect de l’obligation de motivation.
( 17 ) Arrêts du 12 mars 2008, Suez/OHMI (Delivering the essentials of life) (T‑128/07, non publié, EU:T:2008:72, point 33) ; du 25 mars 2014, Deutsche Bank/OHMI (Leistung aus Leidenschaft) (T‑539/11, non publié, EU:T:2014:154, point 16), et du 12 décembre 2014, Wilo/OHMI (Pioneering for You) (T‑601/13, non publié, EU:T:2014:1067, point 37).
( 18 ) Aux points 20 et 21 de l’arrêt.
( 19 ) Point 17 de l’arrêt attaqué, qui renvoie à l’ordonnance du 18 mars 2010, CFCMCEE/OHMI (C‑282/09 P, EU:C:2010:153, point 40), et aux arrêts du 2 avril 2009, Zuffa/OHMI (ULTIMATE FIGHTING CHAMPIONSHIP) (T‑118/06, EU:T:2009:100, point 28), et du 23 septembre 2009, France Télécom/OHMI (UNIQUE) (T‑396/07, EU:T:2009:353, point 28).
( 20 ) L’EUIPO fait référence à l’ordonnance du 18 mars 2010, CFCMCEE/OHMI (C‑282/09 P, EU:C:2010:153, point 46).
( 21 ) Point 23 de la décision litigieuse.
( 22 ) Ordonnance du 11 décembre 2014 (C‑253/14 P, non publiée, EU:C:2014:2445).
( 23 ) Voir point 29 des présentes conclusions et note en bas de page 17.
( 24 ) À titre d’exemple, Deluxe renvoie aux produits et services suivants : services de gestion de patrimoine numérique et intellectuel (classe 35) ; dépôt et transport de caméras (classe 39) ; exploitation de laboratoires de traitement de films cinématographiques, télévisés et publicitaires (classe 40) ; récupération de fichiers numériques représentant du contenu cinématographique (classe 42) ; recherche et développement en lien avec le téléchargement et le stockage illégal de fichiers
cinématographiques, télévisés et publicitaires numériques non autorisés (classe 45).
( 25 ) En particulier aux points 15 à 18.
( 26 ) Arrêt du 8 mai 2008, Eurohypo/OHMI (C‑304/06 P, EU:C:2008:261, point 59).
( 27 ) Arrêt du 15 février 2007, BVBA Management, Training en Consultancy (C‑239/05, EU:C:2007:99, point 32 et jurisprudence citée).
( 28 ) Ordonnance du 18 mars 2010, CFCMCEE/OHMI (C‑282/09 P, EU:C:2010:153, point 37 et jurisprudence citée).
( 29 ) Ordonnance du 18 mars 2010, CFCMCEE/OHMI (C‑282/09 P, EU:C:2010:153, point 38 et jurisprudence citée).
( 30 ) Le Tribunal l’indique à juste titre au point 18 de l’arrêt attaqué.
( 31 ) La Cour a implicitement exclu que l’autorité compétente puisse effectuer un examen du caractère distinctif réduit à sa plus simple expression, qui lui permettrait d’enregistrer n’importe quel signe dès lors qu’il présente un tel caractère, aussi faible soit-il, à l’égard des signes des concurrents. Voir arrêt du 19 septembre 2002, DKV/OHMI (C‑104/00 P, EU:C:2002:506, points 13 et 20).
( 32 ) Arrêt du 6 mai 2003, Libertel (C‑104/01, EU:C:2003:244, point 59 et jurisprudence citée).
( 33 ) Arrêt du 21 octobre 2004, OHMI/Erpo Möbelwerk (C‑64/02 P, EU:C:2004:645, point 41).
( 34 ) Arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI (C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 45).
( 35 ) Arrêt du 21 janvier 2010, Audi/OHMI (C‑398/08 P, EU:C:2010:29, point 38).
( 36 ) L’EUIPO a essayé de mettre sur le même plan le luxe et la qualité supérieure, mais cette association n’est ni évidente ni inéluctable. Il peut exister des produits, y compris de consommation courante, qui présentent une très bonne qualité (par exemple, l’eau) sans pour autant être nécessairement luxueux. Au contraire, on peut imaginer des produits ou des services de luxe (en raison, surtout, de leur rareté ou de leur particularité) qui ne présentent pas forcément une qualité exceptionnelle.
( 37 ) On peut difficilement parler, par exemple, d’un système « luxueux » de compression numérique de données ou d’un service « luxueux » de suivi de données numériques piratées, pour ne citer que deux des services visés par la marque litigieuse.
( 38 ) Lors de l’audience, Deluxe a confirmé ce qu’elle avait déjà avancé devant la chambre de recours de l’EUIPO, sans être contredite, à savoir que le signe litigieux avait été enregistré en Espagne, en Italie, en Australie, au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni, ces enregistrements démontrant le « caractère distinctif intrinsèque » de la marque.
( 39 ) Il s’agit de la marque figurative « deluxe » no 006891949, composée de ce terme inscrit sur un cercle de couleur rouge. Son enregistrement a été accordé par l’EUIPO, à la demande de Deluxe, pour des produits des classes 35, 39, 40, 41, 42 et 45, analogues à ceux visés par la marque litigieuse en l’espèce.
( 40 ) Il n’en demeure pas moins que la marque « deluxe » peut être dépourvue de caractère distinctif à l’égard de certains produits. C’est ce qu’a jugé le Tribunal dans un arrêt antérieur à l’arrêt attaqué [arrêt du 17 décembre 2014, Lidl Stiftung/OHMI (Deluxe), T‑344/14, non publié, EU:T:2014:1097, point 28].
( 41 ) Point 91 des conclusions que l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer a présentées dans l’affaire DKV/OHMI (C‑104/00 P, EU:C:2002:288), repris presque littéralement au point 39 de l’arrêt du 19 septembre 2002 (DKV/OHMI, C‑104/00 P, EU:C:2002:506).
( 42 ) Première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988 (JO 1989, L 40, p. 1), et directive 2008/95/CE du Parlement européen et du Conseil, du 22 octobre 2008 (JO 2008, L 299, p. 25).
( 43 ) Arrêts du 24 mai 2012, Formula One Licensing/OHMI (C‑196/11 P, EU:C:2012:314, point 41), et du 8 novembre 2016, BSH/OHMI (C‑43/15 P, EU:C:2016:837, point 66). Dans le premier de ces arrêts, le débat portait sur le défaut de caractère distinctif du signe « F1 », que le Tribunal a confirmé malgré un enregistrement antérieur en tant que marque nationale. Bien que les circonstances de cette affaire diffèrent de la présente espèce, les considérations exposées dans cet arrêt du 24 mai 2012 lui sont
extrapolables.
( 44 ) Lors de l’audience, l’EUIPO a assuré que, selon lui, le terme « deluxe » est absolument inapte à distinguer un quelconque produit ou service.
( 45 ) Lors de l’audience également, interrogé par la Cour, l’EUIPO a reconnu que sa thèse principale reposait sur l’incapacité pleine et entière du signe « deluxe » à distinguer des produits ou des services et que sa thèse subsidiaire se fondait sur le fait qu’en cas d’examen de ces derniers, il conviendrait de rechercher l’existence de traits communs permettant de les regrouper dans une ou plusieurs catégories.
( 46 ) Point 27, in fine, de l’arrêt attaqué.
( 47 ) Bien que cet argument figure à la fin de l’arrêt attaqué, il semble opportun de le soulever à cet endroit, car je pense qu’il explique mieux la ratio decidendi du Tribunal dans l’arrêt attaqué.
( 48 ) Points 20 et 21 de l’arrêt attaqué.
( 49 ) Selon le Tribunal, « la marque demandée vise plus de 90 produits et services, relevant de huit classes distinctes. Ceux-ci concernent des domaines aussi différents que, notamment, le cinéma, la publicité, le stockage et le transport de marchandises, la recherche et le développement de produits, la sécurité, le divertissement ou l’informatique » (point 20 de l’arrêt attaqué).
( 50 ) Point 22 de l’arrêt attaqué.
( 51 ) Ordonnance du 18 mars 2010 (C‑282/09 P, EU:C:2010:153).
( 52 ) Ordonnance du 18 mars 2010 (C‑282/09 P, EU:C:2010:153).
( 53 ) « [L]’existence d’un tel lien entre, par exemple, des films cinématographiques, des services de livraison de produits par camion, des services de dépôt de marchandises, des services de recherche et de développement de produits ainsi que d’hébergement et de conception de sites Internet pour le compte de tiers n’est pas évidente et ne ressort pas, en tout état de cause, des termes de la décision [litigieuse] » (point 27 de l’arrêt attaqué).
( 54 ) Point 22 de l’arrêt attaqué.
( 55 ) Reconnaître l’existence d’une caractéristique commune émanant du « message » de la marque reviendrait à inverser le processus de déduction logique qui conduit à chercher un lien suffisamment direct et concret entre les produits et les services.
( 56 ) Ordonnance du 18 mars 2010 (C‑282/09 P, EU:C:2010:153).
( 57 ) Ordonnance du 11 décembre 2014, BigXtra (C‑253/14 P, non publiée, EU:C:2014:2445). Voir point 25 des présentes conclusions.
( 58 ) Arrêt du 21 mars 2014, FTI Touristik/OHMI (BigXtra) (T‑81/13, non publié, EU:T:2014:140, points 43 à 47).
( 59 ) Ordonnance du 18 mars 2010 (C‑282/09 P, EU:C:2010:153).
( 60 ) Point 5.
( 61 ) Arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI (C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 47).
( 62 ) Arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI (C‑51/10 P, EU:C:2011:139, point 48).
( 63 ) Arrêt du 8 avril 2003, Linde e.a. (C‑53/01 à C‑55/01, EU:C:2003:206, point 74). Le signe « deluxe » est certes un signe mixte, mais si l’examinateur et la chambre de recours ont mis l’accent sur le caractère banal de l’élément figuratif, en lui déniant toute importance dans le cadre de l’examen du caractère distinctif, ils auraient dû, pour être cohérents, réduire ledit signe à un signe constitué exclusivement d’une éventuelle indication de la qualité des produits.
( 64 ) Conclusions que l’avocat général Ruiz-Jarabo Colomer a présentées dans l’affaire Mag Instrument/OHMI (C‑136/02 P, EU:C:2004:151, point 20).
( 65 ) Conclusions que l’avocat général Jacobs a présentées dans l’affaire OHMI/Wrigley (C‑191/01 P, EU:C:2003:225, points 51 et 53).
( 66 ) Ordonnance du 13 février 2008, Indorata-Serviços e Gestão/OHMI (C‑212/07 P, non publiée, EU:C:2008:83, point 27 et jurisprudence citée).