CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. PAOLO MENGOZZI
présentées le 22 septembre 2016 ( 1 )
Affaires jointes C‑248/15 P, C‑254/15 P et C‑260/15 P
Maxcom Ltd (C‑248/15 P),
Commission européenne (C‑254/15 P),
Conseil de l’Union européenne (C‑260/15 P)
contre
City Cycle Industries
«Pourvoi — Politique commerciale — Dumping — Règlement d’exécution (UE) no 501/2013 — Importations de bicyclettes expédiées notamment du Sri Lanka — Extension à ces importations du droit antidumping définitif institué sur les importations de bicyclettes originaires de la République populaire de Chine — Règlement (CE) no 1225/2009 — Articles 13 et 18 — Contournement — Défaut de coopération d’une partie des producteurs/exportateurs visés par l’enquête — Preuve du contournement — Faisceau d’indices
concordants — Défaut de motivation»
1. Les présentes conclusions ont trait à trois pourvois par lesquels Maxcom Ltd, la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne demandent à la Cour d’annuler l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 19 mars 2015, City Cycle Industries/Conseil ( 2 ) (ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a annulé l’article 1er, paragraphes 1 et 3, du règlement d’exécution (UE) no 501/2013 du Conseil ( 3 ) (ci-après le « règlement litigieux »), pour autant qu’il concerne la société City
Cycle Industries (ci-après « City Cycle »), requérante devant le Tribunal.
2. Ces conclusions sont présentées parallèlement à mes conclusions relatives aux affaires C‑247/15 P, Maxcom/Chin Haur Indonesia, C‑253/15, Commission/Chin Haur Indonesia, et C‑259/15 P, Conseil/Chin Haur Indonesia (ci-après les « conclusions relatives aux affaires Chin Haur ») qui concernent trois pourvois introduits par les mêmes requérantes visant l’arrêt du Tribunal, Chin Haur Indonesia/Conseil ( 4 ) prononcé le même jour que l’arrêt attaqué et concernant le même règlement litigieux. Les
questions soulevées dans ces trois pourvois sont analogues à celles soulevées dans les présentes affaires ( 5 ).
3. En substance, toutes ces affaires donnent l’occasion à la Cour de clarifier les exigences relatives à la preuve que doivent rapporter la Commission et le Conseil (ci-après, prises ensemble, les « institutions ») pour établir l’existence d’un contournement, aux termes de l’article 13 du règlement (CE) no 1225/2009 du Conseil (ci-après le « règlement de base ») ( 6 ), dans une situation caractérisée par un défaut de coopération de la part d’une partie des producteurs/exportateurs intéressés par
l’enquête anticontournement.
I – Le cadre juridique
4. Pour une présentation détaillée du cadre juridique, je renvoie aux points 5 à 10 de mes conclusions relatives aux affaires Chin Haur. Pour les besoins de la présente procédure, je me borne à rappeler que l’article 13 du règlement de base permet aux institutions, à certaines conditions, d’étendre des droits antidumping qu’elles ont institués sur les importations d’un produit en provenance d’un pays tiers aux importations de produits similaires en provenance notamment d’un autre pays tiers, afin
d’éviter que les mesures antidumping originaires soient contournées.
5. Il ressort de la définition de la notion de contournement contenue à l’article 13, paragraphe 1, troisième phrase, du règlement de base que, afin que soit établie l’existence d’un contournement, quatre conditions doivent être remplies : i) il doit y avoir une modification de la configuration des échanges entre le pays tiers en cause et l’Union ; ii) cette modification doit découler de pratiques, d’opérations ou d’ouvraisons pour lesquelles il n’existe pas de motivation suffisante ou de
justification économique autre que l’imposition du droit ; iii) il doit y avoir la preuve de l’existence d’un préjudice, et iv) il doit y avoir la preuve de l’existence d’un dumping. Dans les présentes affaires, seul le deuxième de ces éléments constitutifs d’un contournement fait l’objet de contestation ( 7 ).
6. Ensuite, il convient également de relever que, aux termes de l’article 13, paragraphe 4, du règlement de base, un producteur/exportateur du produit concerné originaire du pays en cause dans l’enquête anticontournement peut se voir accorder une exemption individuelle des droits anticontournement institués s’il a présenté, dans les délais fixés, une demande d’exemption, dûment étayée par des éléments de preuve, et ‐ dans le cas où les pratiques de contournement interviennent en dehors de l’Union ‐
lorsque deux conditions sont remplies : premièrement, s’il est à même de démontrer qu’il n’est pas lié à un producteur soumis aux mesures et, deuxièmement, s’il a été constaté que ce producteur ne s’adonne pas à des pratiques de contournement.
7. Enfin, aux termes de l’article 18, paragraphes 1 et 6, du règlement de base, intitulé « Défaut de coopération », d’une part, « [l]orsqu’une partie intéressée refuse l’accès aux informations nécessaires ou ne les fournit pas dans les délais prévus […] ou fait obstacle de façon significative à l’enquête, des conclusions préliminaires ou finales, positives ou négatives, peuvent être établies sur la base des données disponibles » et, d’autre part, « si une partie concernée ne coopère pas ou ne
coopère que partiellement et que, de ce fait, des renseignements pertinents ne sont pas communiqués, il peut en résulter pour ladite partie une situation moins favorable que si elle avait coopéré ».
II – Les antécédents des litiges et le règlement litigieux
8. Les antécédents des litiges sont exposés en détail aux points 1 à 28 de l’arrêt attaqué auxquels je renvoie. Pour les besoins de la présente procédure, je me limite à rappeler qu’en 2012 la Commission a ouvert, par règlement ( 8 ), une enquête concernant l’éventuel contournement des mesures antidumping instituées par le règlement no 990/2011 ( 9 ), par des importations de bicyclettes expédiées, entre autres, du Sri Lanka.
9. Dans le cadre de cette enquête, City Cycle a introduit une demande d’exemption au titre de l’article 13, paragraphe 4, du règlement de base. La Commission a procédé à une visite de vérification dans les locaux de City Cycle au Sri Lanka et a finalement rejeté sa demande d’exemption ( 10 ).
10. Le 29 mai 2013, le Conseil a adopté le règlement litigieux.
11. Dans ce règlement, aux considérants 35 à 42, le Conseil a d’abord indiqué que six sociétés sri-lankaises, représentant 69 % du total des importations de l’Union en provenance du Sri Lanka durant la période de référence, avaient introduit une demande d’exemption au titre de l’article 13, paragraphe 4, du règlement de base. L’une de ces sociétés a arrêté la production de bicyclettes au Sri Lanka et a retiré sa demande d’exemption. Deux autres sociétés, parmi lesquelles figurait City Cycle, n’ont
pas coopéré de manière satisfaisante. Par conséquent, les données qu’elles ont soumises n’ont pas été prises en considération et les conclusions les concernant ont été fondées sur les données disponibles, conformément à l’article 18 du règlement de base.
12. Ensuite, le Conseil a constaté que toutes les conditions pour le constat de l’existence d’un contournement aux termes de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base étaient satisfaites ( 11 ).
13. S’agissant, spécifiquement, des pratiques de contournement au Sri Lanka, le Conseil a examiné, d’abord, l’existence d’opérations de réexpédition. À cet égard, les considérants 77 à 79 du règlement litigieux énoncent :
« (77) Les exportations des sociétés sri-lankaises ayant initialement coopéré s’élevaient à 69 % du total des exportations sri-lankaises vers l’Union durant la [période de référence]. Pour trois des six sociétés ayant initialement coopéré, l’enquête n’a pas révélé de pratiques de réexpédition. Pour les exportations restantes vers l’Union, aucune coopération n’a été obtenue, comme expliqué aux considérants 35 à 42.
(78) Par conséquent, à la lumière du considérant 58, qui conclut à l’existence d’une modification de la configuration des échanges entre le Sri Lanka et l’Union au sens de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base et du fait que les producteurs/exportateurs sri-lankais ne se sont pas tous fait connaître et n’ont pas tous coopéré, il peut être conclu que les exportations de ces producteurs/exportateurs peuvent être mises au compte des pratiques de réexpédition.
(79) L’existence de pratiques de réexpédition de produits d’origine chinoise via le Sri Lanka est donc confirmée. »
14. Par la suite, le Conseil a indiqué que l’existence d’opérations d’assemblage, au sens de l’article 13, paragraphe 2, du règlement de base, n’avait pas été établie au Sri Lanka ( 12 ).
15. Dans ces conditions, d’une part, le Conseil a conclu à l’existence d’un contournement par des opérations de réexpédition via le Sri Lanka et a étendu le droit antidumping définitif prévu par le règlement d’exécution no 990/2011 aux importations de bicyclettes expédiées du Sri Lanka ( 13 ) et, d’autre part, il a refusé l’exemption, aux termes de l’article 13, paragraphe 4, du règlement de base, aux deux sociétés, parmi lesquelles figurait City Cycle, n’ayant pas coopéré ( 14 ).
III – La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
16. Le 9 août 2013, City Cycle a introduit un recours devant le Tribunal tendant à l’annulation de l’article 1er, paragraphes 1 et 3, du règlement litigieux.
17. Le 8 octobre 2013, le Tribunal a accueilli la demande proposée par City Cycle à ce qu’il soit statué sur l’affaire selon la procédure accélérée ( 15 ).
18. Par ordonnance du 11 novembre 2013, le président de la septième chambre du Tribunal a fait droit à la demande de la Commission d’intervenir au soutien des conclusions du Conseil. Toutefois, la Commission n’a pas été autorisée à présenter un mémoire en intervention ( 16 ). Le 25 juin 2014, l’affaire étant soumise à la procédure accélérée, la Commission a introduit une demande visant à être autorisée à déposer un mémoire en intervention en tant que mesure d’organisation de la procédure ( 17 ).
Cette demande a été rejetée par le Tribunal.
19. Maxcom a été autorisée à intervenir par ordonnance du 16 juillet 2014.
20. À l’appui de son recours, City Cycle a invoqué cinq moyens. En particulier, le premier moyen était tiré de la violation de l’article 13, paragraphe 1, et de l’article 18, paragraphe 1, du règlement de base. Par la première branche de ce moyen, City Cycle contestait la conclusion du Conseil relative à l’existence d’une modification de la configuration des échanges. Par la seconde branche dudit moyen, City Cycle mettait en cause le constat du Conseil, notamment au considérant 78 du règlement
litigieux, relatif à la réalisation d’opérations de réexpédition ( 18 ).
21. Lors de l’audience, la Commission a mis en cause la recevabilité du recours dans son ensemble, en faisant valoir que City Cycle serait non pas un producteur/exportateur sri-lankais, mais un simple prestataire local agissant pour le compte d’une entreprise chinoise.
22. Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté la première branche du premier moyen ainsi que tous les autres moyens comme étant non fondés. En revanche, il a accueilli la seconde branche du premier moyen, notamment son premier grief tiré d’une erreur d’appréciation entachant le considérant 78 du règlement litigieux.
23. À cet égard, le Tribunal a analysé, en premier lieu, aux points 82 à 97 de l’arrêt attaqué, les éléments communiqués par City Cycle au cours de l’enquête. À la suite de cette analyse, le Tribunal a conclu que ces éléments ne permettaient pas de démontrer que City Cycle était bien un exportateur d’origine sri-lankaise ou qu’elle répondait aux critères prévus à l’article 13, paragraphe 2, du règlement de base.
24. En deuxième lieu, au point 98 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que, pour autant, le Conseil ne disposait d’aucun indice pour conclure explicitement, au considérant 78 du règlement litigieux, que City Cycle se livrait à des opérations de réexpédition.
25. En troisième lieu, au point 99 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, certes, il n’était pas possible d’exclure que, parmi l’ensemble des pratiques, des opérations ou des ouvraisons pour lesquelles il n’existait pas de motivation suffisante ou de justification économique autre que l’imposition du droit antidumping initial, au sens de l’article 13, paragraphe 1, second alinéa, du règlement de base, City Cycle se soit livrée à des opérations de réexpédition. Toutefois, selon cette
juridiction, le fait que celle-ci n’ait pas pu démontrer qu’elle était bien un producteur sri-lankais ou qu’elle répondait à l’article 13, paragraphe 2, du règlement de base ne permettait pas au Conseil de conclure, par défaut, à l’existence de réexpéditions effectuées par City Cycle, une telle possibilité ne ressortant aucunement du règlement de base ou de la jurisprudence.
26. Le Tribunal a dès lors constaté qu’il convenait d’accueillir le premier grief de la seconde branche du premier moyen, sans qu’il soit besoin de traiter les trois autres griefs soulevés par City Cycle dans le cadre de la même branche de ce moyen. Par conséquent, le Tribunal a annulé l’article 1er, paragraphes 1 et 3, du règlement litigieux ( 19 ).
IV – Les conclusions des parties
27. Par leurs pourvois Maxcom, la Commission et le Conseil demandent à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de rejeter le recours en première instance et de condamner City Cycle aux dépens. À titre subsidiaire, la Commission et le Conseil demandent de renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour réexamen et de réserver les dépens des deux instances.
28. City Cycle demande à la Cour de rejeter intégralement les pourvois contre l’arrêt attaqué et de condamner Maxcom, la Commission et le Conseil aux dépens. À titre subsidiaire, dans le cas où la Cour devait annuler l’arrêt attaqué, City Cycle demande à la Cour de statuer sur son recours en première instance, d’accueillir les trois griefs restant de la seconde branche du premier moyen qu’elle a soulevé devant le Tribunal et d’annuler partiellement l’article 1er, paragraphes 1 et 3, du règlement
litigieux dans la mesure où ces dispositions étendent le droit antidumping institué sur les importations de bicyclettes originaires de Chine à City Cycle et rejettent sa demande d’exemption.
V – Analyse
29. Maxcom soulève deux moyens à l’encontre de l’arrêt attaqué, le premier à titre principal et le second à titre subsidiaire, la Commission en soulève quatre et le Conseil, à son tour, en soulève deux. Les moyens invoqués dans les trois pourvois se recoupent dans une large mesure et peuvent, en substance, être rassemblés en quatre groupes.
30. Premièrement, la Commission fait valoir que le Tribunal a commis une erreur de droit en refusant d’apprécier d’office l’irrecevabilité du recours de City Cycle ( 20 ). Deuxièmement, Maxcom, la Commission et le Conseil font valoir que le Tribunal a commis différentes erreurs de droit dans l’application de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base ( 21 ). Troisièmement, la Commission et le Conseil allèguent que l’arrêt attaqué est entaché d’un défaut de motivation et d’une motivation
contradictoire ; dans le même contexte, le Conseil fait également valoir que le Tribunal aurait dénaturé les faits ( 22 ). Quatrièmement, la Commission soutient que le Tribunal a violé ses droits procéduraux ( 23 ).
31. Le quatrième moyen du pourvoi de la Commission, tiré de la violation de ses droits procéduraux est identique, tant d’un point de vue factuel que d’un point de vue juridique, au troisième moyen soulevé par cette institution dans le cadre de l’affaire C‑253/15 P, Commission/Chin Haur Indonesia, dont les conclusions sont présentées parallèlement aux conclusions concernant les présentes affaires. Dans ces conditions, pour l’exposé des arguments de la Commission et des raisons pour lesquelles
j’estime que ce moyen doit être rejeté, je renvoie aux points 102 à 111 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
A – Sur le premier moyen soulevé par la Commission dans l’affaire C‑254/15 P, tiré d’erreur en ce que le Tribunal n’aurait pas examiné ex officio la recevabilité du recours de City Cycle
1. Argumentation des parties
32. La Commission conteste l’analyse contenue aux points 42 à 44 de l’arrêt attaqué par laquelle le Tribunal a rejeté l’exception d’irrecevabilité soulevée par elle lors de l’audience à l’encontre du recours de City Cycle. La Commission reproche, en particulier, au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en refusant d’apprécier d’office l’irrecevabilité de ce recours.
33. Premièrement, selon la Commission, la décision du Tribunal de ne pas examiner la recevabilité du recours est en contradiction avec la jurisprudence de la Cour, selon laquelle l’irrecevabilité doit être soulevée d’office par le juge de l’Union. Deuxièmement, le fait que la Commission n’ait pu soulever une exception d’irrecevabilité que lors de l’audience serait le résultat de la décision du Tribunal de ne pas l’autoriser à déposer un mémoire en intervention. Troisièmement, la Commission fait
valoir que le dossier contenait suffisamment d’éléments permettant d’établir que des doutes sérieux, et pas seulement des conjectures, pesaient sur la recevabilité du recours de City Cycle. Le Tribunal lui-même a d’ailleurs constaté que City Cycle n’avait pas démontré qu’elle était un producteur ou un exportateur de bicyclettes.
34. City Cycle conteste les arguments de la Commission.
2. Appréciation
35. Aux points 41 à 45 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté la fin de non‑recevoir soulevée par la Commission lors de l’audience. Le Tribunal a d’abord relevé que, dans la mesure où le Conseil n’avait pas soulevé une exception d’irrecevabilité, la Commission, en tant que partie intervenante, n’avait pas, selon la jurisprudence, qualité pour soulever une telle exception. Ensuite, le Tribunal a constaté que, en toute hypothèse, la Commission, lors de l’audience, avait émis de simples conjectures,
à un stade particulièrement tardif de la procédure judiciaire, sans apporter de nouveaux éléments de preuve au soutien de son grief tiré de l’irrecevabilité du recours.
36. À cet égard, il convient de relever qu’il est de jurisprudence constante qu’une partie intervenante n’a pas qualité pour soulever une exception d’irrecevabilité non formulée dans les conclusions de la partie défenderesse ( 24 ) et que, dès lors, le juge de l’Union n’est pas tenu d’examiner une telle exception.
37. Toutefois, l’irrecevabilité d’un recours en annulation résultant du défaut de qualité pour agir du requérant constitue un moyen d’ordre public ( 25 ) qui, en tant que tel, doit être soulevé d’office par le juge de l’Union ( 26 ).
38. En l’espèce, force est de constater que, contrairement à ce que fait valoir la Commission, le Tribunal a bien examiné la recevabilité du recours à la lumière des arguments qu’elle a avancés lors de l’audience. Au point 44 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a conclu que ces arguments, portant sur les relations entre City Cycle et l’entreprise chinoise que la Commission avait mise en cause, n’étaient pas étayés par de nouveaux éléments de preuve qui auraient pu remettre en question la recevabilité du
recours présenté par City Cycle.
39. En toute hypothèse, ainsi que le met en exergue City Cycle, elle a participé à l’enquête anticontournement en cause, elle est individuellement mentionnée dans le règlement litigieux en tant qu’exportateur de bicyclettes en provenance du Sri Lanka vers l’Union, et elle s’est vu individuellement refuser le bénéfice de la coopération et l’exemption des droits dans le règlement d’exécution. Dans ces conditions, j’estime que son affectation directe et individuelle par le règlement litigieux ne peut
pas être mise en doute ( 27 ).
40. Il s’ensuit que la Commission ne saurait faire valoir que le Tribunal a commis une erreur en rejetant la fin de non-recevoir qu’elle a soulevée lors de l’audience. Par conséquent, à mon avis, le premier moyen avancé par cette institution dans l’affaire C‑254/15 P doit être rejeté.
B – Sur les moyens tirés d’une application erronée de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base
1. Argumentation des parties
41. Maxcom, la Commission et le Conseil soutiennent que le raisonnement contenu aux points 98 et 99 de l’arrêt attaqué, sur la base duquel le Tribunal a annulé le règlement litigieux, est entaché de différentes erreurs de droit dans l’application de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base.
42. En premier lieu, Maxcom reproche au Tribunal d’avoir fait une application manifestement erronée de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, en ce qu’il a jugé que le Conseil ne pouvait pas conclure à l’existence de réexpéditions effectuées par City Cycle sur la base du constat qu’elle n’était pas un véritable producteur sri-lankais et qu’elle n’effectuait pas d’opérations d’assemblage dépassant les seuils fixés à l’article 13, paragraphe 2, de ce règlement. Maxcom estime, dès lors, que
la Cour devrait annuler les conclusions du Tribunal relatives à la deuxième branche du premier moyen.
43. Premièrement, Maxcom fait valoir que l’appréciation figurant aux points 98 et 99 de l’arrêt attaqué est fondée sur une compréhension fondamentalement erronée de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base et récompense, en substance, City Cycle pour avoir fourni, dans le cadre de l’enquête, des informations incomplètes, contradictoires et invérifiables. En vertu du libellé de cet article, il serait possible de conclure à l’existence d’opérations de réexpédition dans des conditions telles
que celles en cause dans la présente affaire où City Cycle a importé des pièces d’origine chinoise et exporté des bicyclettes vers l’Union sans prouver qu’elle est un producteur ou que ses opérations d’assemblage dépassent les seuils fixés à l’article 13, paragraphe 2, de ce règlement. En outre, l’appréciation du Tribunal ne serait conforme ni à la finalité du règlement de base, à savoir défendre l’industrie de l’Union contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays
tiers, ni à la jurisprudence constante en vertu de laquelle les institutions de l’Union jouissent d’un large pouvoir discrétionnaire dans le cadre des enquêtes antidumping.
44. Deuxièmement, Maxcom avance que les conclusions figurant aux points 98 et 99 de l’arrêt attaqué sont contredites par les conclusions du Tribunal relatives au deuxième moyen du recours de City Cycle, par lesquelles le Tribunal a, d’une part, indiqué que les informations fournies par City Cycle étaient déficientes et, d’autre part, rejeté le grief tiré du fait que le Conseil aurait violé l’article 18 du règlement de base, le principe de proportionnalité et l’obligation de motivation en ce qui
concerne le constat de non-coopération de City Cycle.
45. En deuxième lieu, la Commission et le Conseil soutiennent que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal partirait de la prémisse implicite que l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, exige que les institutions démontrent que chaque producteur/exportateur dans le pays faisant l’objet de l’enquête se livre à des pratiques de réexpédition. Une telle interprétation serait erronée. Premièrement, elle irait à l’encontre de l’obligation d’apprécier les conditions énoncées à l’article 13,
paragraphe 1, du règlement de base au niveau du pays, et non pas au niveau des exportateurs individuels. Deuxièmement, elle rendrait l’article 13, paragraphe 4, du règlement de base dépourvu de tout objet. Troisièmement, elle confondrait la notion de «pratique de contournement» avec une de ses manifestations, à savoir la réexpédition. Or, les institutions ne seraient pas tenues de prouver spécifiquement l’existence de pratiques précises de contournement. Quatrièmement, le Tribunal aurait adopté
des interprétations contradictoires de la notion de pratique de contournement dans l’évaluation des différents moyens.
46. En troisième lieu, Maxcom, la Commission et le Conseil soutiennent que les constatations du Tribunal aux points 98 et 99 ne sont pas suffisantes, en droit, pour conclure à une violation de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base. En effet, même si le Conseil avait commis une erreur de droit en concluant, ainsi qu’il est indiqué dans l’arrêt attaqué, que City Cycle était impliquée dans des opérations de réexpédition, ladite institution aurait été toutefois en droit de conclure, sur la
base des éléments de preuve relatifs aux autres producteurs/exportateurs sri-lankais et de la modification de la configuration des échanges, que des réexpéditions avaient eu lieu via le Sri Lanka. En effet, le fait que le Conseil ait constaté que plusieurs producteurs/exportateurs n’ayant pas coopéré au Sri Lanka se livraient à des réexpéditions resterait juridiquement valable même si la constatation est jugée incorrecte pour l’un d’entre eux. En considérant que le constat de réexpédition pour
un producteur aurait rendu illégal tout le faisceau d’indices sur lequel est fondée la conclusion relative à l’existence de pratiques de réexpédition au niveau du pays, le Tribunal aurait faussé le sens du considérant 78 du règlement litigieux et aurait commis une violation de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base.
47. City Cycle conteste les arguments de Maxcom, de la Commission et du Conseil.
2. Appréciation
a) Rappel des principes jurisprudentiels concernant la réglementation de l’Union en matière de contournement
48. Aux points 42 à 54 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur, j’ai effectué une analyse détaillée de la réglementation de l’Union en matière de contournement à la lumière de la jurisprudence de la Cour, à laquelle je renvoie. Pour les besoins de la présente procédure, je me limite à rappeler, d’abord, qu’il ressort de la jurisprudence que la charge de la preuve de l’existence d’un contournement, et, plus spécifiquement, de tous ses quatre éléments constitutifs tels qu’indiqués à
l’article 13, paragraphe 1, troisième phrase, du règlement de base et mentionnés au point 5 des présentes conclusions, incombe aux institutions ( 28 ).
49. Ensuite, dans lesdites conclusions, j’ai relevé qu’il ressort de la logique et de l’économie de la réglementation de l’Union en matière de contournement que l’analyse visant à vérifier que les quatre conditions prévues à l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base sont satisfaites vise à prouver l’existence d’un contournement des droits antidumping au niveau du pays en cause dans l’enquête anticontournement. En revanche, la situation spécifique des producteurs/exportateurs individuels est
prise en considération dans le cadre de l’analyse aux termes de l’article 13, paragraphe 4, du règlement de base ( 29 ).
50. Dans les mêmes conclusions, j’ai relevé qu’il ressort des arrêts Simon, Evers & Co. ( 30 ) et APEX ( 31 ) que, en cas de défaut de coopération de la part de l’ensemble des parties intéressées par l’enquête anticontournement, le niveau de la preuve d’un contournement incombant aux institutions est nettement assoupli. La Cour a reconnu un tel assouplissement compte tenu de la possibilité, prévue à l’article 18, paragraphes 1 et 6, du règlement de base, d’établir des conclusions, même définitives,
sur la base des données disponibles et de traiter la partie qui ne coopère pas ou qui ne coopère que partiellement de façon moins favorable que si elle avait coopéré. Ainsi, dans de pareils cas, les institutions sont autorisées à se fonder sur un faisceau d’indices concordants permettant de conclure à l’existence d’un contournement, au sens de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base ( 32 ).
51. Dans les mêmes arrêts, toutefois, la Cour a également précisé que le législateur de l’Union n’a pas entendu établir une présomption légale permettant de déduire directement du défaut de coopération des parties intéressées ou concernées l’existence d’un contournement et, partant, dispensant les institutions de toute exigence de preuve ( 33 ).
52. Au point 69 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur, j’ai également considéré que la raison d’être de l’interprétation retenue par la Cour dans les arrêts Simon, Evers & Co. et APEX dans les cas de défaut total de coopération, à savoir l’exigence de ne pas compromettre l’efficacité des mesures de défense commerciale de l’Union ( 34 ), est tout à fait valable également dans un cas dans lequel les entreprises intéressées qui n’ont pas coopéré à l’enquête représentent une proportion
majoritaire des importations du produit concerné dans l’Union.
53. Cette jurisprudence trouve donc à mon avis application dans un cas tel que celui de l’espèce dans lequel les producteurs/exportateurs ayant véritablement coopéré à l’enquête anticontournement représentaient juste 25 % des importations totales du Sri Lanka dans l’Union du produit concerné ( 35 ). Ainsi, dans un cas où le niveau de non-coopération est si élevé, j’estime que les institutions sont autorisées à se fonder sur un faisceau d’indices concordants pour pouvoir prouver à suffisance de droit
l’existence des éléments constitutifs d’un contournement et, plus spécifiquement, pour établir que la modification de la configuration des échanges découle de pratiques de contournement ( 36 ).
b) Sur la violation de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base
54. En l’espèce, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a accueilli la seconde branche du premier moyen du recours de City Cycle qui était tiré de violations de l’article 13, paragraphe 1, et de l’article 18, paragraphe 1, du règlement de base. Ainsi, même si, aux points pertinents de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a pas spécifié explicitement quelles dispositions avaient, à son avis, été violées par le Conseil dans le règlement litigieux, le Tribunal a nécessairement fondé l’annulation de ce règlement
sur la violation de ces dispositions.
55. Plus spécifiquement, au point 98 dudit arrêt, le Tribunal a constaté que le Conseil ne disposait d’aucun indice permettant de conclure explicitement, au considérant 78 du règlement litigieux, que City Cycle avait été impliquée dans des opérations de réexpédition.
56. Or, ainsi qu’il ressort du point 13 des présentes conclusions, au considérant 78 du règlement litigieux, le Conseil a conclu que les exportations des producteurs/exportateurs n’ayant pas coopéré à l’enquête pouvaient être mises au compte des pratiques de réexpédition sur le fondement de deux éléments : d’une part, le constat de l’existence d’une modification de la configuration des échanges entre le Sri Lanka et l’Union et, d’autre part, le « fait que les producteurs/exportateurs sri-lankais ne
se sont pas tous fait connaître et n’ont pas tous coopéré ». Sur la base du seul constat contenu au considérant 78 du règlement litigieux, le Conseil, au considérant 79 du même règlement, a conclu que « l’existence de pratiques de réexpédition de produits d’origine chinoise via le Sri Lanka [était] donc confirmée ».
57. La lecture desdits considérants 78 et 79 m’amène à formuler deux considérations.
58. En premier lieu, je constate que, à la différence de ce qu’il a fait dans le même règlement en ce qui concerne l’Indonésie – pays en cause dans les affaires relatives à Chin Haur –, au regard du Sri Lanka, le Conseil ne s’est pas fondé sur le constat concernant un producteur individuel pour conclure à l’existence de pratiques de réexpédition au niveau du pays aux termes de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base ( 37 ).
59. En effet, le considérant 78 du règlement litigieux ne contient aucun constat explicite, tel que celui contenu au considérant 62 du même règlement, selon lequel, sur la base d’une analyse individuelle, le Conseil aurait conclu qu’une société spécifique était impliquée dans des pratiques de contournement par des opérations de réexpédition ( 38 ). Ledit considérant 78 se borne à mettre de telles opérations au compte des entreprises n’ayant pas coopéré, en déduisant leur existence des deux éléments
indiqués au point 56 des présentes conclusions : d’une part, le constat de l’existence d’une modification de la configuration des échanges et, d’autre part, le défaut de coopération de la part d’une partie majoritaire des producteurs/exportateurs sri‑lankais.
60. Toutefois, et en deuxième lieu, force est de constater que ces deux éléments, sur lesquels le Conseil a fondé sa conclusion, ne permettent pas, individuellement ou pris ensemble, de conclure ni à l’implication d’un opérateur individuel dans des pratiques de contournement, spécifiquement d’opérations de réexpédition, ni à l’existence de telles pratiques au niveau du pays. Sur le seul fondement de ces deux éléments, le Conseil ne pouvait donc pas conclure que la deuxième condition pour l’existence
d’un contournement – à savoir que la modification dans la configuration des échanges découlait de pratiques, d’opérations ou d’ouvraisons pour lesquelles il n’existait pas de motivation suffisante ou de justification économique autre que l’imposition du droit – était établie ( 39 ).
61. En effet, le premier de ces deux éléments, à savoir l’existence de la modification de la configuration des échanges, ne constitue rien d’autre que la première condition pour l’existence d’un contournement. Il ne saurait donc, en tant que tel, être considéré comme un indice de l’existence de la deuxième de ces conditions, les institutions devant en revanche prouver que toutes les conditions pour l’existence d’un contournement sont remplies ( 40 ).
62. En ce qui concerne le second de ces deux éléments, à savoir le défaut de coopération des producteurs/exportateurs représentant 75 % des exportations vers l’Union, il ressort de la jurisprudence mentionnée au point 51 des présentes conclusions que le défaut de coopération en tant que tel, en l’absence de tout autre élément, ne peut pas faire présumer l’existence d’un contournement. Partant, le Conseil ne peut pas déduire directement du seul défaut de coopération d’une partie, même si majoritaire,
des producteurs/exportateurs intéressés que ceux‑ci étaient impliqués dans des pratiques de contournement.
63. Certes, ainsi qu’il ressort des points 50, 52 et 53 des présentes conclusions, dans un cas, tel que celui de l’espèce, dans lequel les intéressés qui n’ont pas coopéré à l’enquête représentent une proportion majoritaire des importations du produit concerné dans l’Union, la charge de la preuve d’un contournement incombant aux institutions est nettement assouplie. Toutefois, si, dans de telles conditions, il n’est pas nécessaire que les institutions prouvent l’existence de pratiques de
contournement spécifiques, elles doivent, du moins, disposer de quelques éléments semblant indiquer l’existence de telles pratiques ( 41 ).
64. Or, en l’espèce, il ne ressort ni du règlement litigieux ni du dossier que, mis à part les deux éléments mentionnés au considérant 78 du règlement litigieux (la modification de la configuration des échanges et le défaut de coopération), les institutions auraient disposé d’autres éléments pointant l’existence de pratiques de contournement et notamment d’opérations de réexpédition. Bien au contraire, à la suite d’une question de la Cour à l’audience, la Commission a explicitement confirmé que les
institutions se sont fondées exclusivement sur ces deux éléments pour constater l’existence de pratiques de contournement au niveau du Sri Lanka.
65. Dans ces conditions, Maxcom, la Commission et le Conseil ne sauraient, à mon avis, validement reprocher au Tribunal d’avoir commis une erreur lorsqu’il a conclu que le Conseil avait commis une violation de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base et, pour cette raison, a annulé le règlement litigieux.
66. Cette conclusion n’est pas remise en cause par les différents arguments soulevés dans les pourvois.
67. En premier lieu, Maxcom fait valoir que, dans des conditions telles que celles en cause dans la présente affaire, il serait possible de conclure que City Cycle était impliquée dans des opérations de réexpédition. À cet égard, toutefois, j’ai relevé aux points 58 et 59 des présentes conclusions, que, contrairement à ce qui a été le cas pour l’Indonésie, en ce qui concerne le Sri Lanka, le Conseil n’a pas fondé la conclusion concernant l’existence de pratiques de contournement au niveau du pays au
sens de l’article 13, paragraphe 1, troisième phrase, du règlement de base (spécifiquement l’existence d’opérations de réexpédition au Sri Lanka) sur le constat individuel concernant un producteur/exportateur particulier (spécifiquement City Cycle). Le Conseil s’est limité à déduire l’existence de telles pratiques de deux éléments – indiqués aux points 56 et 59 des présentes conclusions – lesquels, comme il a été relevé, ne permettaient pas, seuls, de justifier une telle conclusion. Il s’ensuit
que, même en supposant que, sur la base des éléments présents au dossier, il avait été théoriquement possible de conclure que City Cycle était impliquée dans des opérations de réexpédition, le Conseil n’a pas fondé sa conclusion quant à l’existence de pratiques de contournement au niveau du pays sur un tel constat. Dans ces conditions, la conclusion du Conseil ne reposant pas sur des éléments suffisants à l’étayer, il ne saurait pas être reproché au Tribunal d’avoir constaté que ladite
institution avait commis une violation de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base.
68. Maxcom avance ensuite des arguments concernant des prétendues contradictions contenues dans l’arrêt attaqué ( 42 ). À cet égard, je relève toutefois que la circonstance que les informations fournies par City Cycle lors de l’enquête aient été insuffisantes et n’aient pas reflété un esprit de coopération véritable de sorte que le Tribunal a entériné le rejet par le Conseil de la demande d’exemption de City Cycle au titre de l’article 13, paragraphe 4, du règlement de base n’est aucunement en
contradiction avec le constat fait aux points 60 à 65 des présentes conclusions que le Tribunal n’a pas commis d’erreur lorsqu’il a conclu que le Conseil avait commis une violation de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base ( 43 ).
69. En deuxième lieu, en ce qui concerne les arguments de la Commission et du Conseil résumés au point 45 des présentes conclusions, il suffit, pour les rejeter, de relever qu’ils se fondent sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué et, donc, sur une prémisse erronée. En effet, dans aucun point de cet arrêt le Tribunal a considéré que les institutions doivent établir positivement que chaque producteur/exportateur individuel se livre à des opérations de réexpédition.
70. En troisième lieu, s’agissant des griefs, résumés au point 46 des présentes conclusions, contestant le caractère suffisant des conclusions du Tribunal pour annuler le règlement litigieux, il ressort des considérations faites aux points 60 à 65 des présentes conclusions qu’ils doivent être rejetés.
71. À la lumière des considérations qui précèdent, j’estime que les moyens avancés par Maxcom, la Commission et le Conseil tirés d’une application erronée de la part du Tribunal de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base doivent être rejetés.
C – Sur les moyens tirés d’un défaut de motivation, d’une motivation contradictoire et d’une dénaturation des faits
1. Argumentation des parties
72. Respectivement dans leur troisième et deuxième moyen, la Commission et le Conseil mettent en cause la motivation de l’arrêt attaqué. Le Conseil fait également valoir une dénaturation des faits.
73. En premier lieu, les institutions font valoir que l’arrêt attaqué n’explique pas pourquoi le Conseil aurait violé l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base. Premièrement, l’arrêt attaqué n’indiquerait pas si l’erreur commise par le Conseil est une simple erreur d’appréciation ou une erreur manifeste d’appréciation. Deuxièmement, le Tribunal n’expliquerait pas pourquoi les éléments de preuve présentés devant lui, y compris les données disponibles, ne permettent pas de conclure que City
Cycle s’est livrée à des activités de réexpédition.
74. En second lieu, la Commission considère que la motivation de l’arrêt attaqué est contradictoire. À cet égard, cette institution relève qu’il découle du point 97 de l’arrêt attaqué que les éléments de preuve soumis par City Cycle ne permettent pas de démontrer qu’elle était bien un exportateur d’origine sri-lankaise ou qu’elle répondait aux critères prévus à l’article 13, paragraphe 2, du règlement de base. La Commission se demande à cet égard comment ces éléments de preuve, s’ils indiquent que
City Cycle se livre à un contournement par le biais de pratiques d’assemblage, pourraient ne pas démontrer qu’elle est également impliquée dans des opérations de réexpédition.
75. Le Conseil fait valoir, à titre subsidiaire, que le Tribunal aurait dénaturé les faits établis. Premièrement, étant donné que la réexpédition a été dûment démontrée au niveau du pays et que la demande d’exemption de City Cycle était non fondée, le Conseil considère que la seule conclusion que le Tribunal pouvait tirer des faits était que City Cycle se livrait à des opérations de réexpédition. En tirant une conclusion différente, le Tribunal aurait dénaturé les faits. Deuxièmement, cette
dénaturation ressortirait également des conclusions de l’arrêt attaqué relatives à la demande d’exemption de City Cycle, qui excluent que celle‑ci ait satisfait aux conditions devant être remplies pour que l’assemblage dans le pays visé par l’enquête confère aux produits une origine locale.
2. Appréciation
76. En ce qui concerne, en premier lieu, les griefs tirés du défaut de motivation, il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante, la motivation d’un arrêt doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement du Tribunal, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la décision prise et à la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel. L’obligation de motivation qui incombe au Tribunal conformément aux articles 36 et 53, premier alinéa, du
statut de la Cour de justice de l’Union européenne est satisfaite lorsque, même en étant implicite, la motivation retenue permet aux intéressés de connaître les raisons pour lesquelles le Tribunal n’a pas fait droit à leurs arguments et à la Cour de disposer des éléments suffisants pour exercer son contrôle ( 44 ).
77. Or, il ressort des points 54 et 55 des présentes conclusions, que, même si dans l’arrêt attaqué le Tribunal n’a pas développé de manière détaillée le raisonnement qui l’a amené à conclure à l’annulation partielle du règlement litigieux pour autant qu’il concerne City Cycle, ce raisonnement peut être déduit de manière non équivoque dudit arrêt, ce qui permet à la Cour d’exercer son contrôle juridictionnel. De ce point de vue, l’arrêt attaqué ne peut donc pas être considéré, à mon avis, comme
étant entaché d’un défaut de motivation.
78. Quant aux autres griefs, premièrement, celui tiré de ce que l’arrêt attaqué serait entaché d’un défaut de motivation en ce qu’il n’explique pas si l’erreur commise par le Conseil est une simple erreur d’appréciation ou une erreur manifeste d’appréciation ne saurait selon moi prospérer. En effet, même s’il est certainement souhaitable que le Tribunal dans ses arrêts indique le critère de contrôle juridictionnel qu’il applique, un arrêt ne saurait être considéré comme étant entaché d’un défaut de
motivation en raison du seul fait que le Tribunal n’y indique pas explicitement le critère de contrôle juridictionnel qu’il a appliqué. Or, les institutions n’ayant pas contesté au fond l’application d’un critère de contrôle juridictionnel erroné, mais ayant limité leurs griefs au défaut de motivation ( 45 ), la question de savoir si le critère appliqué in concreto dans l’arrêt attaqué était erroné ou non ne fait pas partie de l’objet des présents pourvois.
79. Deuxièmement, quant au grief tiré de ce que le Tribunal aurait omis d’expliquer pourquoi les éléments de preuve présentés devant lui, y compris les données disponibles, ne permettent pas de conclure que City Cycle s’est livrée à des activités de réexpédition, il ne saurait non plus prospérer. En effet, il ressort de la jurisprudence qu’il n’appartient pas à la Cour d’exiger du Tribunal qu’il motive chacun de ses choix lorsqu’il retient, à l’appui de sa décision, un élément de preuve plutôt qu’un
autre. En décider autrement reviendrait pour la Cour à substituer sa propre appréciation de ces éléments à celle opérée par le Tribunal, ce qui n’est pas en son pouvoir ( 46 ).
80. En ce qui concerne, en deuxième lieu, le grief tiré de la motivation contradictoire, j’estime qu’il se fonde sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué. En effet, au point 97 de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a aucunement relevé que les preuves soumises par Chin Haur auraient indiqué que celle-ci se livrait à un contournement par des pratiques d’assemblage.
81. En ce qui concerne, en troisième lieu, les griefs du Conseil tirés d’une dénaturation des faits, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence, une telle dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves ( 47 ).
82. Or, toute l’argumentation du Conseil se fonde sur la prémisse selon laquelle l’existence d’opérations de réexpédition au niveau du pays, aux termes de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, aurait été démontrée. Toutefois, il ressort des points 60 à 65 des présentes conclusions que, à mon avis, le Tribunal a jugé à bon droit que cela n’était pas le cas. Il s’ensuit que la prémisse du grief du Conseil est erronée. Il s’ensuit que le Tribunal n’a pas dénaturé les faits contrairement à
ce que fait valoir le Conseil.
83. Il résulte de ce qui précède que, à mon avis, tant le troisième moyen du pourvoi de la Commission dans l’affaire C‑254/15 P que le second moyen du pourvoi du Conseil dans l’affaire C‑260/15 P doivent être rejetés.
84. Dans ces conditions, j’estime que les pourvois de Maxcom, de la Commission et du Conseil doivent être rejetés dans leur intégralité.
VI – Sur les dépens
85. Aux termes de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens. Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens.
86. Si la Cour fait siennes mes appréciations concernant les trois pourvois joints, Maxcom, la Commission et le Conseil succombent en leurs pourvois. City Cycle ayant conclu à leur condamnation aux dépens, je propose à la Cour de condamner Maxcom, la Commission et le Conseil aux dépens exposés tant en première instance que dans les présents pourvois par City Cycle.
VII – Conclusion
87. Au vu des considérations qui précèdent, je propose à la Cour de statuer de la manière suivante :
1) Les pourvois sont rejetés.
2) Maxcom Ltd, la Commission européenne et le Conseil de l’Union européenne sont condamnés aux dépens exposés en première instance ainsi que dans les présentes procédures par City Cycle Industries.
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( 1 ) Langue originale: le français.
( 2 ) T‑413/13, EU:T:2015:164.
( 3 ) Règlement du 29 mai 2013, portant extension du droit antidumping définitif institué par le règlement d’exécution (UE) no 990/2011 sur les importations de bicyclettes originaires de la République populaire de Chine aux importations de bicyclettes expédiées d’Indonésie, de Malaisie, du Sri Lanka et de Tunisie, qu’elles aient ou non été déclarées originaires de ces pays (JO 2013, L 153, p. 1).
( 4 ) T‑412/13, EU:T:2015:163.
( 5 ) Par souci de concision, dans les présentes conclusions je me référerai à plusieurs reprises à l’analyse plus détaillée faite dans les conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 6 ) Règlement du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO L 2009, 343, p. 51, et rectificatif JO 2010, L 7, p. 22), tel que modifié par le règlement (UE) no 1168/2012 du Parlement européen et du Conseil, du 13 juin 2012 (JO 2012, L 237, p. 1).
( 7 ) En effet, en l’espèce, l’existence des trois autres éléments a été définitivement constatée dans l’arrêt attaqué et n’est pas remise en cause dans les présentes procédures.
( 8 ) Règlement (UE) no 875/2012 de la Commission, du 25 septembre 2012, ouvrant une enquête concernant l’éventuel contournement des mesures antidumping instituées par le règlement d’exécution no 990/2011 par des importations de bicyclettes expédiées d’Indonésie, de la Malaisie, du Sri Lanka et de la Tunisie, qu’elles aient ou non été déclarées originaires de l’Indonésie, de la Malaisie, du Sri Lanka et de la Tunisie, et soumettant ces importations à enregistrement (JO 2012, L 258, p. 21).
( 9 ) Règlement d’exécution (UE) no 990/2011 du Conseil, du 3 octobre 2011, sur les importations de bicyclettes originaires de la République populaire de Chine à l’issue d’un réexamen au titre de l’expiration des mesures effectué en vertu de l’article 11, paragraphe 2, du règlement (CE) no 1225/2009 (JO 2011, L 261, p. 2). Voir points 2 à 6 de l’arrêt attaquée pour les références aux règlements antérieurs.
( 10 ) À cet égard, voir, plus en détail, points 8 à 18 de l’arrêt attaqué.
( 11 ) Voir, respectivement, considérants 45 à 58 et 77 à 79 du règlement litigieux, ainsi que considérants 92 (concernant l’absence de motivation ou de justification économique autre que l’intention d’éviter les mesures antidumping en vigueur), 93 à 96 (concernant la neutralisation des effets correctifs de ces mesures) et 107 à 110 (concernant l’existence d’un dumping par rapport à la valeur normale précédemment établie) du règlement litigieux.
( 12 ) Voir considérants 80 à 82 du règlement litigieux.
( 13 ) Voir considérants 115 à 117 et article 1er, paragraphes 1 et 3, du règlement litigieux.
( 14 ) Voir considérant 126 et article 1er, paragraphe 1, du règlement litigieux.
( 15 ) Voir article 76 bis du règlement de procédure du Tribunal en vigueur au moment du déroulement de la procédure devant cette juridiction.
( 16 ) Cette décision a été adoptée en vertu de l’article 76 bis, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement de procédure du Tribunal qui était en vigueur au moment du déroulement de la procédure devant cette juridiction.
( 17 ) Aux termes de l’article 76, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement de procédure du Tribunal en vigueur au moment du déroulement de la procédure devant cette juridiction, en cas de soumission d’une affaire à une procédure accélérée, l’intervenant ne pouvait présenter un mémoire en intervention que si le Tribunal l’autorisait dans le cadre des mesures d’organisation de la procédure adoptées conformément à l’article 64 dudit règlement. La demande de la Commission se fondait sur cette
dernière disposition.
( 18 ) Le deuxième moyen était tiré de la violation de l’article 18 du règlement de base, du principe de proportionnalité ainsi que de l’obligation de motivation. Il concernait le constat du Conseil relatif à l’absence de coopération de City Cycle. Le troisième moyen était tiré de violations des principes de diligence, de bonne administration, ainsi que de l’article 18, paragraphe 4, du règlement de base et des droits de la défense de City Cycle. Il visait à démontrer que le Conseil, d’une part, ne
l’avait pas informée de manière appropriée de sa volonté de refuser sa demande d’exemption et, d’autre part, ne lui avait pas accordé un accès complet au dossier. Le quatrième moyen était tiré d’une violation du principe d’égalité de traitement. Le cinquième moyen était tiré d’une violation de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base et du principe d’égalité de traitement et portait sur le constat du Conseil s’agissant de l’existence d’un dumping.
( 19 ) Voir points 100 et 185 de l’arrêt attaqué.
( 20 ) Premier moyen du pourvoi de la Commission dans l’affaire C‑254/15 P.
( 21 ) Premier et second moyens du pourvoi de Maxcom dans l’affaire C‑248/15 P, deuxième moyen du pourvoi de la Commission dans l’affaire C‑254/15 P et premier moyen du pourvoi du Conseil dans l’affaire C‑260/15 P.
( 22 ) Troisième moyen du pourvoi de la Commission dans l’affaire C‑254/15 P et deuxième moyen du pourvoi du Conseil dans l’affaire C‑260/15 P.
( 23 ) Quatrième moyen du pourvoi de la Commission dans l’affaire C‑254/15 P.
( 24 ) Arrêt du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a. (C‑341/06 P et C‑342/06 P, EU:C:2008:375, point 67 et jurisprudence citée).
( 25 ) Voir, notamment, arrêt du 29 avril 2004, Italie/Commission (C‑298/00 P, EU:C:2004:240 point 35), ainsi que l’ordonnance du président de la Cour du 24 mars 2009, Cheminova e.a./Commission [C‑60/08 P(R), non publiée, EU:C:2009:181, point 31].
( 26 ) Voir arrêt du 24 mars 1993, CIRFS e.a./Commission (C‑313/90, EU:C:1993:111, point 23 et jurisprudence citée). À cet égard, il convient de rappeler que l’article 150 du règlement de procédure précise que la Cour peut, à tout moment, d’office, décider de statuer sur les fins de non-recevoir d’ordre public. Par ailleurs, selon une jurisprudence désormais bien consolidée, la Cour a jugé qu’il appartient au juge de l’Union de relever d’office les moyens d’ordre public [voir, notamment, arrêts du
2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France (C‑367/95 P, EU:C:1998:154, point 67); du 8 décembre 2011, KME Germany e.a./Commission (C‑272/09 P, EU:C:2011:810), et du 19 décembre 2013, Siemens/Commission (C‑239/11 P, C‑489/11 P et C‑498/11 P, non publié, EU:C:2013:866, point 321). À cet égard voir, également, conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Philips Lighting Poland et Philips Lighting/Conseil (C‑511/13 P, EU:C:2015:206, point 56).
( 27 ) À cet égard, voir arrêt du 18 septembre 2014, Valimar (C‑374/12, EU:C:2014:2231, point 30 et jurisprudence citée). Pour un aperçu de la jurisprudence en ce qui concerne la qualité pour agir à l’encontre des décisions en matière de mesures antidumping en général, voir points 92 et suiv. des conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Philips Lighting Poland et Philips Lighting/Conseil (C‑511/13 P, EU:C:2015:206).
( 28 ) Voir arrêt du 4 septembre 2014, Simon, Evers & Co. (C‑21/13, EU:C:2014:2154, point 35) et point 45 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 29 ) Voir points 46 à 48 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 30 ) Arrêt du 4 septembre 2014 (C‑21/13, EU:C:2014:2154).
( 31 ) Arrêt du 17 décembre 2015 (C‑371/14, EU:C:2015:828).
( 32 ) Voir arrêts du 4 septembre 2014, Simon, Evers & Co. (C‑21/13, EU:C:2014:2154, points 30 à 37), et du 17 décembre 2015, APEX (C‑371/14, EU:C:2015:828, point 62 à 69) ; voir points 49, 50 et 52 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 33 ) Voir arrêts du 4 septembre 2014, Simon, Evers & Co. (C‑21/13, EU:C:2014:2154, point 36), et du 17 décembre 2015, APEX (C‑371/14, EU:C:2015:828, point 68) ; voir point 51 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 34 ) Voir arrêts du 4 septembre 2014, Simon, Evers & Co. (C‑21/13, EU:C:2014:2154, point 37), et du 17 décembre 2015, APEX (C‑371/14, EU:C:2015:828, point 69).
( 35 ) Cette donnée ne ressort pas du règlement litigieux, mais a été fournie par la Commission lors de l’audience.
( 36 ) Voir point 69 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 37 ) Voir point 49 des présentes conclusions.
( 38 ) Voir considérants 62 et 64 du règlement litigieux ainsi que points 56, 57 et 75 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 39 ) À cet égard, voir également l’analyse faite au point 87 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 40 ) Voir point 48 des présentes conclusions et références à la note 28.
( 41 ) Voir, en ce sens, arrêt du 4 septembre 2014, Simon, Evers & Co. (C‑21/13, EU:C:2014:2154, point 53), et, plus dans le détail, points 70 et 71 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 42 ) Voir point 44 des présentes conclusions.
( 43 ) Sur les relations entre les paragraphes 1 et 4 de l’article 13 du règlement de base, voir point 49 des présentes conclusions. Voir, également, point 48 et note 36 des conclusions relatives aux affaires Chin Haur.
( 44 ) Voir notamment, en ce sens, arrêt du 10 avril 2014, Areva e.a./Commission (C‑247/11 P et C‑253/11 P, EU:C:2014:257, points 54 et 55).
( 45 ) Dans le cadre de son deuxième moyen, tiré d’erreurs dans l’application de l’article 13, paragraphe 1, du règlement de base, la Commission, après avoir affirmé que l’arrêt attaqué n’est pas suffisamment motivé en ce qui concerne les raisons pour lesquelles le règlement attaqué aurait enfreint cette disposition, qualifie d’erreur de droit la circonstance que « l’arrêt attaqué ne mentionne même pas de norme de contrôle juridictionnel et, en particulier, il ne précise pas si le Conseil a commis
une simple erreur d’appréciation ou une erreur manifeste d’appréciation ». Dans ce cadre, toutefois, la Commission ne développe aucune argumentation concernant ce grief, mais se borne à renvoyer explicitement, « pour une analyse plus en détail », à son deuxième moyen, tiré du défaut de motivation. Or, force est de constater que la simple qualification d’erreur de droit du défaut de mention du critère de contrôle juridictionnel appliqué par le Tribunal, sans que cette qualification soit étayée par
aucun argument ou développement, sauf un renvoi général au moyen tiré du défaut de motivation, ne saurait être interprétée comme un grief autonome tiré de ce que le Tribunal aurait outrepassé le niveau de contrôle juridictionnel requis, violant ainsi le pouvoir d’appréciation reconnu aux institutions par la jurisprudence [arrêt du 4 septembre 2014, Simon, Evers & Co. (C‑21/13, EU:C:2014:2154, point 29 et jurisprudence citée]. Dans ces conditions, ce grief de la Commission coïncide, en substance,
avec le grief tiré du défaut de motivation analysé dans le présent point. À cet égard, je relève qu’il ressort de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure de la Cour qu’il revient aux requérants aux pourvois de développer de manière suffisante les arguments qu’ils invoquent au soutien de leurs pourvois.
( 46 ) Voir arrêt du 16 février 2012, Conseil et Commission/Interpipe Niko Tube et Interpipe NTRP (C‑191/09 P et C‑200/09 P, EU:C:2012:78, point 161).
( 47 ) Voir arrêt du 2 juin 2016, Photo USA Electronic Graphic/Conseil (C‑31/15 P, EU:C:2016:390, point 52 et jurisprudence citée).