ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)
28 juin 2016 ( *1 )
«Fonction publique — Notation — Rapport d’évaluation — Intérêt à agir — Dégradation des appréciations analytiques — Saisine du comité des rapports — Modification par le second notateur de certaines appréciations n’affectant pas la notation globale — Erreur manifeste d’appréciation — Obligation de motivation — Devoir de sollicitude»
Dans l’affaire F‑40/15,
ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,
FV, fonctionnaire du Conseil de l’Union européenne, demeurant à Rhode-Saint-Genèse (Belgique), représentée initialement par Mes T. Bontinck et A. Guillerme, avocats, puis par Me L. Levi, avocat,
partie requérante,
contre
Conseil de l’Union européenne, représenté par M. M. Bauer et Mme M. Veiga, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (deuxième chambre),
composé de MM. K. Bradley, président, J. Sant’Anna et A. Kornezov (rapporteur), juges,
greffier : M. P. Cullen, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 12 mai 2016,
rend le présent
Arrêt
1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 9 mars 2015, FV demande l’annulation de son rapport d’évaluation établi pour la période allant du 1er janvier au 31 décembre 2013 (ci-après le « rapport d’évaluation contesté »).
Cadre juridique
Le statut
2 L’article 42 quater, cinquième alinéa, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») prévoit :
« Le fonctionnaire mis en congé dans l’intérêt du service qui atteint l’âge de la retraite est mis à la retraite d’office. »
3 L’article 43, premier alinéa, du statut énonce :
« La compétence, le rendement et la conduite dans le service de chaque fonctionnaire font l’objet d’un rapport annuel dans les conditions fixées par l’autorité investie du pouvoir de nomination de chaque institution conformément à l’article 110 [du statut]. Ce rapport indique si le niveau des prestations du fonctionnaire est satisfaisant ou non. L’autorité investie du pouvoir de nomination de chaque institution arrête des dispositions prévoyant le droit de former, dans le cadre de la procédure de
notation, un recours qui s’exerce préalablement à l’introduction d’une réclamation conformément à l’article 90, paragraphe 2[, du statut]. »
Les DGE
4 Par décision du 19 octobre 1981, le Conseil de l’Union européenne a fixé les dispositions générales d’exécution de l’article 43 du statut (ci-après les « DGE »).
5 L’article 2, paragraphe 2, des DGE, relevant des dispositions générales contenues au chapitre I, prévoit :
« Tout fonctionnaire est noté par deux notateurs choisis de manière que le premier soit suffisamment proche du fonctionnaire noté pour pouvoir apprécier en toute connaissance les mérites de celui-ci et que le deuxième bénéficie d’un recul suffisant pour pouvoir juger de l’ensemble du dossier. »
6 L’article 3, paragraphe 2, des DGE, figurant également audit chapitre I, énonce :
« Si, à l’issue des procédures d’établissement du rapport de notation, le fonctionnaire noté n’accepte pas le contenu de ce dernier, il peut, dans un délai de trois mois, demander l’intervention du comité des rapports selon la procédure définie au chapitre III [des DGE]. »
7 L’article 6, paragraphe 4, des DGE, relevant du chapitre II portant sur la procédure d’établissement du rapport de notation, précise :
« Le fonctionnaire noté transmet le rapport à l’[a]dministration par la voie hiérarchique dans un délai de sept jours ouvrables, deux options lui étant ouvertes :
a) s’il accepte les conclusions du deuxième notateur, il signe le rapport, qui devient alors définitif ;
b) s’il n’accepte pas les conclusions du deuxième notateur, il peut demander l’intervention du comité des rapports, selon la procédure définie au chapitre III [des DGE] […]. »
8 L’article 7 des DGE, qui fait partie de la section 2, intitulée « Procédures applicables en cas de désaccord du fonctionnaire noté avec le premier notateur », figurant au même chapitre II, est rédigé dans ces termes :
« 1. Lorsque le fonctionnaire noté n’est pas d’accord sur le rapport établi par le premier notateur, il peut, dans un délai de dix jours ouvrables après la réception du rapport :
— demander un entretien avec le premier notateur, entretien qui doit avoir lieu dans les sept jours ouvrables à compter de la date de la demande,
et/ou
— apporter des remarques sur le rapport et les accompagner d’une demande de révision de ce dernier.
Le rapport doit être envoyé au premier notateur dans un délai de dix jours ouvrables.
2. Après l’entretien ou après réception de la demande de révision, le premier notateur établit un nouveau rapport ou maintient le rapport initial et le transmet au fonctionnaire noté, dans un délai de sept jours ouvrables.
[…] »
9 L’article 8 des DGE, relevant également de la même section 2 dudit chapitre II, prévoit, en ce qui concerne la procédure à suivre en cas de non-acceptation des conclusions ultérieures du premier notateur par le fonctionnaire noté, ce qui suit :
« 1. La procédure commence conformément à l’article 7, paragraphes 1 et 2 [des DGE].
2. Lorsque le fonctionnaire noté n’accepte pas les conclusions du premier notateur, il signe le rapport, en y ajoutant une demande de révision par le deuxième notateur, et le retourne au premier notateur, dans un délai de sept jours ouvrables.
3. Le premier notateur transmet le rapport sans délai au deuxième notateur.
4. Le deuxième notateur établit un nouveau rapport, qui se référera expressément au rapport du premier notateur et aux remarques du fonctionnaire noté, et le transmet à ce dernier, dans un délai de quatorze jours ouvrables.
5. La procédure continue alors conformément à l’article 6, paragraphe 4 [des DGE]. »
10 L’article 9 des DGE, figurant au chapitre III, intitulé « Intervention du comité des rapports », précise :
« 1. Le comité des rapports est chargé d’établir un avis motivé sur chaque demande d’intervention dont il est saisi. […]
2. Le comité des rapports procède à toute audition et demande tout document ou renseignement écrit qu’il juge utiles à la formation de son avis. Le fonctionnaire noté et le deuxième notateur ont le droit d’être entendus.
[…]
4. Le deuxième notateur établit le rapport définitif en suivant l’avis du comité des rapports dans la mesure où il le partage.
5. Le deuxième notateur transmet le rapport au fonctionnaire noté dans un délai de quatorze jours ouvrables.
[…] »
11 L’article 10 des DGE, relevant du chapitre IV contenant les dispositions finales, prévoit que « [l]e rapport définitif de notation est susceptible d’un recours devant la Cour de justice [de l’Union européenne] dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle le fonctionnaire noté a reçu le rapport conformément à l’article 9, paragraphe 5 [des DGE] ».
Faits à l’origine du litige
12 La requérante, fonctionnaire des institutions de l’Union européenne depuis le 1er mai 1981, a été affectée le 16 juillet 2008 à l’unité « Formation et développement » de la direction générale (DG) « Ressources humaines » du Conseil en tant que gestionnaire de cours. Elle a été promue au grade AST 7 le 1er janvier 2009.
13 Lors des exercices de promotion pour les années 2011 et 2012, la note attribuée à la requérante était inférieure à celle des années précédentes. Au cours de ces deux années, la requérante a été inscrite sur la liste des fonctionnaires promouvables, mais elle n’a pas été promue.
14 Durant l’année 2012, la requérante a rencontré des problèmes de santé dus, selon elle, au stress, au découragement et à la démotivation face au manque de reconnaissance de la part de sa hiérarchie.
15 Le 15 mai 2012, la requérante a demandé la révision de son rapport d’évaluation établi pour l’année 2011, lequel a été modifié par le second notateur en accord avec la requérante, sans que cela ne modifie la note globale qui lui avait été attribuée.
16 Par un courriel en date du 21 décembre 2012, le chef de l’unité sociale de la DG « Administration » du Conseil a indiqué à la requérante que, comme convenu, il avait contacté le chef d’unité de la requérante afin de l’informer qu’il avait appris que la « situation était dysfonctionnelle » et qu’il s’était engagé, avec l’accord dudit chef d’unité, à s’adresser à l’unité « Effectifs et mobilité » pour favoriser une mobilité plus aisée de la requérante.
17 Les problèmes de santé de la requérante ont perduré en 2013. Elle a alors travaillé sous un régime de mi-temps médical du 16 janvier au 14 avril 2013 puis a repris le travail à temps plein à compter du 15 avril 2013, et ce jusqu’au 31 décembre 2013. Au cours de cette dernière période, la requérante a enregistré de nombreuses arrivées tardives, dont plus de la moitié se situant au-delà de deux heures. Ces retards ont été « compensés » a posteriori soit par la présence de la requérante sur son lieu
de travail au-delà des heures obligatoires soit par la prise de demi-journées de congé.
18 Le 2 juillet 2013, la requérante a de nouveau été inscrite sur la liste des fonctionnaires promouvables pour l’exercice de promotion 2013 sans avoir été promue par la suite, ce qui l’a amenée à introduire, le 17 décembre 2013, une réclamation à l’encontre de la décision du 17 septembre 2013 de ne pas la promouvoir.
19 À la fin du mois de mars 2014, la requérante a été transférée au sein d’une nouvelle unité.
20 La requérante a reçu, le 14 avril 2014, un projet de rapport d’évaluation pour l’année 2013 (ci-après le « projet de rapport d’évaluation ») rédigé par le premier notateur le 31 mars 2014. En comparaison avec son rapport d’évaluation pour l’exercice 2012, les appréciations analytiques attribuées à la requérante ont été dégradées dans six rubriques, à savoir la rubrique « Jugement », dont l’appréciation est passée de « très bon » à « bon » ; la rubrique « Qualité du travail », qui est passée de
« excellent » à « bon » ; la rubrique « Régularité des prestations », qui est passée de « bon » à « laisse à désirer » ; la rubrique « Adaptation aux exigences du service », qui est passée de « très bon » à « bon » ; la rubrique « Sens du travail en équipe », qui est passée de « bon » à « passable » et la rubrique « Relations humaines », qui est passée de « bon » à « passable ». En revanche, l’appréciation du « Sens des responsabilités » est passée du niveau « très bon » à celui d’« excellent ».
21 La requérante a soumis des observations à cet égard le 19 avril 2014, contestant formellement le contenu du projet de rapport d’évaluation et demandant à ce qu’il soit révisé.
22 Le 20 mai 2014, le premier notateur a répondu aux observations de la requérante et a confirmé sa première appréciation. Il a joint à ses observations plusieurs commentaires de collègues de la requérante ainsi que des échanges de courriels, qui étaient, selon lui, illustratifs du comportement de la requérante sur son lieu de travail.
23 Ainsi, l’un des courriels annexés au projet de rapport d’évaluation par le premier notateur, datant du 24 juillet 2013, que la requérante avait adressé à l’une de ses collègues, était rédigé dans les termes suivants :
« […] Tu ignores absolument tout concernant le déroulement de cette formation. Crois-tu être en mesure de nous donner de[s] leçons sur notre travail [au] moment où tu as des hésitations sur le tien ? […]. »
24 Par courriel du même jour, ladite collègue a fait part au chef d’unité de la requérante de son sentiment à l’égard du courriel mentionné au point précédent du présent arrêt en indiquant :
« […] Je ne vais pas me lancer dans une communication “ping pong” avec [FV] puisque j’ai plus important à faire ; en dépit du fait que je n’apprécie réellement pas le ton et l’attitude de ses emails […]. »
25 En outre, en réponse à un courriel de son chef d’unité du 19 septembre 2013 par lequel celui-ci « constat[ait] un retard dans la réponse à la demande des responsables de Flexitime » et lui demandait de « faire d’urgence le nécessaire », la requérante a adressé, en retour, à ce dernier le courriel suivant :
« OK, mais ma priorité sont les problèmes […] et la gestion de mes dossiers. Je leur ai téléphoné quelques fois mais leurs explications ne m’ont pas aidé. Maintenant je les laisse râler… J’ai évidemment l’intention de le faire dans mon intérêt. »
26 Le chef d’unité a répondu à la requérante le jour même par courriel ce qui suit :
« Je comprends ton souci d’avancer avec tes dossiers, mais j’attire ton attention sur la date indiquée du blocage de Flexitime qui est le 8 juillet. Je ne partage pas ton approche de ne pas donner suite à une demande réitérée et justifiée de l’administration (“Maintenant je les laisse râler”) ce qui ne facilite pas le travail de nos collègues du Flexitime. Le respect de leur travail et des règles du Flexitime est important pour l’institution et pour moi-même en tant que chef d’unité. Je te
demanderai de considérer ceci, s’il te plaît, comme une tâche urgente et importante. »
27 En réponse, la requérante a adressé à son chef d’unité un courriel rédigé dans ces termes :
« Je répète… J’ai évidemment l’intention de le faire dans mon intérêt… Et je n’accepte pas des accusations implicites de non-respect et des discours moralistes, etc., ainsi que le ton de ton message. On n’est pas à l’école… […] »
28 Le 2 juin 2014, la requérante a demandé la révision de son projet de rapport d’évaluation. Après avoir eu un entretien le 10 juin suivant avec le second notateur, celui-ci lui a communiqué, le 26 juin 2014, sa décision confirmant les appréciations du premier notateur.
29 Le 16 juin 2014, la requérante a été inscrite sur la liste des fonctionnaires promouvables pour l’exercice de promotion 2014. Le 22 juillet suivant, l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a publié la liste des fonctionnaires promus pour cet exercice, sur laquelle ne figurait pas la requérante.
30 Le 19 août 2014, la requérante a demandé la saisine du comité des rapports (ci-après le « comité des rapports ») prévue à l’article 9 des DGE. L’AIPN a fait droit à cette demande le 3 septembre 2014.
31 Le comité des rapports a entendu la requérante et sa hiérarchie le 22 septembre 2014. La requérante a demandé à être de nouveau entendue par le comité des rapports au motif que, selon elle, les membres dudit comité n’avaient pas pu, avant la première audition, prendre connaissance de façon détaillée des annexes jointes à sa demande. Cette seconde audition n’a pas été accordée par le comité des rapports, qui a entretemps pris connaissance desdites annexes.
32 Le 22 octobre 2014, la requérante a introduit une réclamation pour contester la décision de l’AIPN du 22 juillet 2014 de ne pas la promouvoir pour l’exercice de promotion 2014.
33 L’avis du comité des rapports en date du 5 novembre 2014 a été communiqué à la requérante le 10 novembre suivant. Le comité des rapports a notamment relevé que, en raison du long congé de maladie pris par la requérante en 2012, le premier notateur avait estimé qu’il ne pouvait pas rédiger un rapport d’évaluation pour l’année 2012 qui serait moins bon que celui pour l’année 2011 et avait décidé de lui attribuer la même évaluation qu’en 2011. En outre, le comité des rapports a recommandé que le
projet de rapport d’évaluation de la requérante soit révisé de façon à expliquer à suffisance les raisons des différences dans les appréciations, si elles étaient maintenues telles quelles.
34 Le 27 novembre 2014, la requérante a pris connaissance du rapport d’évaluation contesté, tel que modifié par le second notateur. Celui-ci a amélioré l’appréciation relative à la « [r]égularité des prestations », qui est passée de « laisse à désirer » à « passable », tout en diminuant l’appréciation relative au « [s]ens des responsabilités », qui est passée de « excellent » à « très bon ».
Conclusions des parties et procédure
35 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— annuler le rapport d’évaluation contesté ;
— condamner le Conseil aux dépens.
36 Le Conseil conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— rejeter le recours ;
— condamner la requérante aux dépens.
37 Le 10 septembre 2015, le Conseil a été invité à déférer à des mesures d’organisation de la procédure décidées par le Tribunal conformément à l’article 69 du règlement de procédure, portant sur le détail des absences de la requérante au cours de l’année faisant l’objet du rapport d’évaluation contesté. Le Conseil y a répondu dans le délai imparti et a notamment joint à sa réponse, parvenue au greffe du Tribunal le 6 octobre 2015, une offre de preuve qui n’avait pas été sollicitée dans le cadre
desdites mesures d’organisation de la procédure (ci-après l’« offre de preuve du 6 octobre 2015 »). Cette offre de preuve a été communiquée à la requérante, qui a pu prendre position sur celle-ci lors de l’audience du 12 mai 2016 et s’est opposée à son versement au dossier du Tribunal.
38 Le 29 avril 2016, le Conseil a été invité à déférer à de nouvelles mesures d’organisation de la procédure décidées par le Tribunal en application de l’article 69 du règlement de procédure, relatives aux démarches entreprises par le chef d’unité de la requérante au cours de l’année couverte par le rapport d’évaluation contesté pour remédier à la situation, ainsi qu’aux mesures adoptées au sein de l’unité en vue d’harmoniser les pratiques de notation, et sollicitant la production des rapports
d’évaluation de la requérante pour un certain nombre d’années. Le Conseil y a répondu dans le délai imparti. La requérante a présenté lors de l’audience du 12 mai 2016 ses observations à l’égard des réponses fournies par le Conseil.
En droit
Sur la recevabilité
Sur l’offre de preuve du 6 octobre 2015
39 L’offre de preuve du 6 octobre 2015, dont le versement au dossier du Tribunal est contesté par la requérante, consiste dans des échanges de courriels datant de la fin du mois de février 2015 au sein de la nouvelle unité à laquelle la requérante a été affectée au mois de mars 2014.
40 Or, le Tribunal constate, d’une part, que les courriels figurant dans l’offre de preuve du 6 octobre 2015 n’ont pas été sollicités par le Tribunal en application de l’article 69 du règlement de procédure et, d’autre part, qu’ils ne sont pas contemporains à la période de notation qui fait l’objet du rapport d’évaluation contesté et sont dès lors dépourvus de pertinence.
41 Dans ces conditions, à la supposer même recevable, l’offre de preuve du 6 octobre 2015 est sans incidence sur la solution du litige.
Sur l’intérêt à agir de la requérante
42 En réponse aux mesures d’organisation de la procédure décidées par le Tribunal le 29 avril 2016, le Conseil a informé ce dernier, le 10 mai 2016, que la requérante a été mise en congé dans l’intérêt du service en application de l’article 42 quater du statut par une décision de l’AIPN du 8 décembre 2015, à l’encontre de laquelle la requérante a introduit une réclamation le 8 mars 2016. Par la suite, conformément au cinquième alinéa du même article 42 quater, la requérante a été mise à la retraite
d’office avec effet au 1er avril 2016. Selon le Conseil, dans ces conditions, il y aurait lieu de « reconsidérer la recevabilité du recours ».
43 À cet égard, le Tribunal observe, en premier lieu, que la question de la disparition de l’intérêt à agir en cours d’instance constitue une fin de non-recevoir d’ordre public que le juge de l’Union doit examiner d’office. En deuxième lieu, il est de jurisprudence constante que, pour qu’un requérant puisse poursuivre un recours tenant à l’annulation d’une décision de l’administration, il faut qu’il conserve un intérêt personnel, né et actuel à l’annulation de cette décision même après
l’introduction de son recours (arrêt du 11 décembre 2012, Ntouvas/ECDC, F‑107/11, EU:F:2012:182, point 34).
44 En troisième lieu, s’agissant de l’intérêt d’un fonctionnaire ou ancien fonctionnaire à agir en annulation d’un rapport d’évaluation de carrière le concernant, il convient de relever que ledit rapport constitue un jugement de valeur porté par ses supérieurs hiérarchiques sur la manière dont le fonctionnaire évalué s’est acquitté des tâches qui lui ont été confiées et sur son comportement dans le service durant la période concernée et que, indépendamment de son utilité future, il constitue une
preuve écrite et formelle quant à la qualité du travail accompli par le fonctionnaire. Une telle évaluation n’est pas purement descriptive des tâches effectuées pendant la période concernée, mais comporte aussi une appréciation des qualités humaines que la personne notée a montrées dans l’exercice de son activité professionnelle. Dès lors, chaque fonctionnaire dispose d’un droit à ce que son travail soit sanctionné par une évaluation établie de manière juste et équitable. Par conséquent,
conformément au droit à une protection juridictionnelle effective, un fonctionnaire doit se voir reconnaître en tout état de cause le droit de contester un rapport d’évaluation de carrière le concernant en raison de son contenu ou parce qu’il n’a pas été établi selon les règles prescrites par le statut (arrêts du 22 décembre 2008, Gordon/Commission, C‑198/07 P, EU:C:2008:761, points 43 à 45, et du 12 juillet 2011, Commission/Q, T‑80/09 P, EU:T:2011:347, point 157).
45 En l’espèce, s’il est vrai que la requérante ne travaille plus, depuis le 1er avril 2016, au sein du Conseil à la suite de sa mise à la retraite d’office, il est à noter que cette circonstance n’est pas de nature à lui faire perdre son intérêt à agir pour demander l’annulation du rapport d’évaluation contesté.
46 À cet égard, il ressort de la jurisprudence, d’une part, que le rapport d’évaluation, jouant un rôle important dans le déroulement de la carrière du fonctionnaire, n’affecte en principe l’intérêt de la personne notée que jusqu’à la cessation définitive de ses fonctions, de telle sorte que, postérieurement à cette cessation définitive, le fonctionnaire n’est, en principe, plus recevable à introduire un recours, sauf à établir l’existence d’une circonstance particulière justifiant un intérêt
personnel et actuel à obtenir l’annulation du rapport en cause (ordonnance du 19 octobre 1999, N/Commission, C‑21/99 P, EU:C:1999:508, point 24).
47 Or, en l’occurrence, ainsi que la requérante et le Conseil l’ont confirmé lors de l’audience du 12 mai 2016, la requérante a contesté la décision de l’AIPN du 8 décembre 2015 la mettant en congé dans l’intérêt du service. Si cette contestation devait aboutir, la mise à la retraite d’office de la requérante, qui est, ainsi qu’il découle de l’article 42 quater, cinquième alinéa, du statut, une conséquence directe de sa mise en congé dans l’intérêt du service lorsqu’elle a atteint l’âge de la
retraite, pourrait alors être annulée. Dans une telle hypothèse, il ne serait pas exclu, ainsi que le Conseil l’a explicitement admis lors de l’audience du 12 mai 2016, que la requérante soit susceptible d’être réintégrée dans un emploi au sein de son institution, en application de l’article 52 du statut lu en combinaison avec l’article 22, paragraphe 1, de l’annexe XIII dudit statut.
48 Partant, l’ensemble des conditions requises pour justifier la mise à la retraite d’office de la requérante ne pouvait être considéré comme définitivement acquis et, en conséquence, le départ de celle-ci à la retraite ne paraît pas irréversible (voir, par analogie, arrêt du 12 juillet 2011, Commission/Q, T‑80/09 P, EU:T:2011:347, points 158 à 161). La requérante conserve ainsi un intérêt, au sens de la jurisprudence, à voir le rapport d’évaluation contesté établi équitablement, objectivement et
conformément aux normes d’une évaluation régulière. En effet, dans l’éventualité d’une réintégration, ledit rapport pourrait avoir une utilité pour l’évolution de la requérante au sein de son service ou des institutions de l’Union (voir, par analogie, arrêt du 12 juillet 2011, Commission/Q, T‑80/09 P, EU:T:2011:347, point 158).
49 D’autre part, l’intérêt du fonctionnaire noté à contester son rapport d’évaluation en raison de son contenu demeure, en tout état de cause, lorsque son rapport de notation comporte des appréciations explicitement négatives sur son rendement et sa conduite dans le service (voir, en ce sens, arrêt du 12 juillet 2011, Commission/Q, T‑80/09 P, EU:T:2011:347, point 162).
50 Tel est le cas en l’espèce étant donné que, ainsi que cela ressort du rapport d’évaluation contesté, la requérante aurait connu « des difficultés considérables dans son travail » se caractérisant notamment par des « difficultés à participer de manière intégrée à la vie de l’unité » ; rencontré des « difficultés et [commis des] erreurs dans le suivi de quelques dossiers » ; eu des « communications verbales et écrites [pouvant] être perçues comme excessivement dures vis-à-vis d’interlocuteurs
internes » ; tenu des « jugements discutables et parfois factuellement erronés exprimés à l’égard de son chef d’unité » ou, encore, éprouvé des « difficultés à accepter des critiques à l’égard de sa performance professionnelle ».
51 Partant, il y a lieu de conclure que la requérante conserve un intérêt à demander l’annulation du rapport d’évaluation contesté.
Sur le fond
52 À l’appui de ses conclusions en annulation, la requérante soulève deux moyens, tirés, premièrement, d’erreurs manifestes d’appréciation et, deuxièmement, de la violation du devoir de sollicitude.
Sur le premier moyen, tiré d’erreurs manifestes d’appréciation
– Arguments des parties
53 En premier lieu, la requérante fait valoir que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne l’évaluation de la « [r]égularité de [ses] prestations ». En effet, même si, à la suite de l’avis du comité des rapports, le second notateur a modifié cette évaluation, qui a été améliorée, passant de « laisse à désirer » à « passable », il n’a pas pour autant assorti cette modification de précisions. En revanche, les appréciations d’ordre général, qui faisaient mention d’un
nombre très élevé d’arrivées tardives, régularisées ex post y compris par des prises de congés, sont restées telles quelles, mention qui ne serait pas, en tout état de cause, justifiée.
54 À cet égard, d’une part, les retards constatés au cours de la période comprise entre le 15 avril et le 31 décembre 2013, dont la réalité n’est pas contestée par la requérante, seraient dus à des problèmes de santé, que cette dernière aurait portés à la connaissance de sa hiérarchie oralement.
55 Or, ces retards, selon la requérante, auraient été « compensés » a posteriori soit par sa présence sur son lieu de travail au-delà des heures obligatoires soit par la prise de demi-journées de congé, lesquelles auraient d’ailleurs été validées par son chef d’unité. Dans cette situation, la requérante aurait formé l’idée que l’administration acceptait la modulation du temps de travail qu’elle pratiquait. Partant, sa hiérarchie n’aurait pas pu utiliser ses retards pour dégrader les appréciations
relatives à la « [r]égularité de [ses] prestations » dans le rapport d’évaluation contesté.
56 D’autre part, lors de l’audience du 12 mai 2016, la requérante a fait valoir que, conformément au point 63 de la communication au personnel du Conseil no 15/14, du 15 janvier 2014, portant sur l’exercice de promotion 2013, les absences justifiées pour cause de maladie du fonctionnaire noté ne sauraient être utilisées au détriment du fonctionnaire aux fins de sa notation.
57 En outre, la ponctualité serait, selon la requérante, dénuée de pertinence pour l’appréciation de la « régularité des prestations », celle-ci étant définie par le guide de la notation du Conseil, porté à la connaissance du personnel par la communication no 99/89 F, du 28 juillet 1989, en vigueur à la date d’adoption du rapport d’évaluation contesté (ci-après le « guide de la notation »), comme la « mesure dans laquelle l’intéressé fournit un effort constant pour les tâches qui lui incombent ». En
effet, la requérante aurait fait preuve d’un tel effort constant en dépit de ses retards.
58 En deuxième lieu, la requérante soutient que le rapport d’évaluation contesté est entaché d’une erreur manifeste d’appréciation en ce qui concerne l’évaluation de son « [s]ens des responsabilités ». En effet, alors que le premier notateur a attribué à cette rubrique la mention « excellent », appréciation accompagnée de l’observation selon laquelle « elle a fait preuve d’un engagement professionnel avec un sens des responsabilités remarquable », le second notateur a diminué l’appréciation à « très
bon », sans pour autant ajouter de commentaire. Selon la requérante, cette dépréciation ne chercherait qu’à compenser l’amélioration de l’évaluation relative à la régularité de ses prestations afin que la note globale reste la même, ce qui entacherait d’irrégularité les appréciations des notateurs portées à cet égard.
59 La requérante relève également que, dans les appréciations d’ordre général, le rapport d’évaluation contesté fait état de « difficultés à participer de manière intégrée à la vie de l’unité (réunions de l’unité, réunions de coordination des assistants gestionnaires, difficultés à suivre les évolutions et les tests des outils de gestion) ». Or, cette affirmation serait infirmée par le fait que, en dépit de ses absences à plusieurs réunions de l’unité en raison de sa situation médicale, elle se
serait tenue informée et n’aurait pas porté préjudice au suivi de ses dossiers.
60 En troisième lieu, la requérante conteste, au titre de l’appréciation de la « [q]ualité du travail », la mention de l’existence d’erreurs dans la gestion de ses dossiers. D’une part, elle aurait démontré au cours de la procédure de révision que les allégations dont le premier notateur avait fait mention dans sa réponse à la demande de révision du projet de rapport d’évaluation et relatives à une erreur de gestion financière étaient erronées. D’autre part, même si le second notateur n’avait pas
repris ces allégations dans le rapport d’évaluation contesté, la référence à des « erreurs dans le suivi de quelques dossiers » aurait été maintenue, sans plus de précisions dans les appréciations d’ordre général contenues dans ledit rapport.
61 En quatrième et dernier lieu, la requérante est d’avis que le Conseil a commis une erreur manifeste d’appréciation lors de l’évaluation de son « [s]ens du travail en équipe » et ses « [r]elations humaines » dont le second notateur a maintenu le niveau « passable » sans pour autant ajouter de précisions. En particulier, les appréciations du second notateur portant sur l’existence de « communications verbales et écrites susceptibles d’être perçues comme excessivement dures vis-à-vis
d’interlocuteurs internes », de « jugements discutables, parfois factuellement erronés, exprimés à l’égard de son chef d’unité » ainsi que de « difficultés à accepter des critiques à l’égard de sa performance professionnelle » seraient erronées.
62 En effet, la requérante aurait toujours entretenu des relations cordiales et respectueuses avec l’ensemble de ses collègues, son style « clair et direct » n’ayant pas été critiqué dans ses précédents rapports d’évaluation mais ayant, au contraire, été apprécié par ses collègues. En réalité, les critiques du second notateur mentionnées au point précédent du présent arrêt seraient fondées sur les appréciations formulées par le premier notateur, auxquelles avaient été annexés plusieurs courriels
échangés entre la requérante et ses collègues. Or, la plupart desdits courriels auraient été échangés entre 2010 et 2012, seuls quatre d’entre eux correspondant à l’année 2013, et seraient, en tout état de cause, extraits de leur contexte.
63 S’agissant, en particulier, de ces quatre courriels, la requérante fait valoir que deux d’entre eux auraient été échangés avec son chef d’unité et qu’ils porteraient sur la validation de son horaire de travail et l’exercice de promotion 2013, sans qu’ils puissent démontrer qu’elle entretenait des relations difficiles ou irrespectueuses dans l’exercice de son activité professionnelle. Le contenu des deux autres courriels, échangés avec des collègues, pourrait aisément s’expliquer dans leur
contexte respectif et n’attesterait, en aucun cas, de mauvaises relations avec ces derniers. Au contraire, certains témoignages de ses collègues datant du mois d’avril 2014 démontreraient qu’elle aurait été appréciée au sein de l’unité.
64 Le Conseil conteste cette argumentation.
– Appréciation du Tribunal
65 À titre liminaire, il convient d’observer que la requérante soulève dans le cadre du présent moyen deux séries d’arguments tenant, d’une part, aux prétendues erreurs manifestes d’appréciation entachant le rapport d’évaluation contesté et, d’autre part, à une méconnaissance de l’obligation de motivation en ce que les appréciations et modifications effectuées par le second notateur ne seraient accompagnées d’aucune précision. Dans ces circonstances, même si la requérante ne soulève pas un moyen
distinct tiré d’une violation de l’obligation de motivation, il y a lieu également d’apprécier si le rapport d’évaluation contesté est motivé à suffisance de droit.
66 En ce qui concerne, en premier lieu, les allégations de la requérante visant de prétendues erreurs manifestes d’appréciation entachant le rapport d’évaluation contesté, il convient de rappeler qu’il n’appartient pas au Tribunal de substituer son appréciation à celle des personnes chargées d’évaluer le travail de la personne notée, les institutions de l’Union disposant d’un large pouvoir d’appréciation pour évaluer le travail de leurs fonctionnaires (voir, en ce sens, arrêt du 1er juin 1983,
Seton/Commission, 36/81, 37/81 et 218/81, EU:C:1983:152, point 23). Dès lors, le contrôle juridictionnel exercé par le juge de l’Union sur le contenu des rapports d’évaluation est limité au contrôle de la régularité procédurale, de l’exactitude matérielle des faits, ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation ou de détournement de pouvoir. Il n’appartient pas, ainsi, au Tribunal de contrôler le bien-fondé de l’appréciation portée par l’administration sur les aptitudes
professionnelles d’un fonctionnaire lorsqu’elle comporte des jugements complexes de valeur qui, par leur nature même, ne sont pas susceptibles d’une vérification objective (arrêt du 29 septembre 2011, AJ/Commission, F‑80/10, EU:F:2011:172, point 32 et jurisprudence citée).
67 En conséquence, afin d’établir que l’administration a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des faits qui soit de nature à justifier l’annulation d’un rapport d’évaluation, les éléments de preuve, qu’il incombe à la partie requérante d’apporter, doivent être suffisants pour priver de plausibilité les appréciations retenues par l’administration (arrêts du 12 décembre 1996, AIUFFASS et AKT/Commission, T‑380/94, EU:T:1996:195, point 59, et du 12 février 2008, BUPA e.a./Commission,
T‑289/03, EU:T:2008:29, point 221). En d’autres termes, le moyen tiré de l’erreur manifeste doit être rejeté si, en dépit des éléments avancés par la requérante, l’appréciation mise en cause peut être admise comme justifiée et cohérente (voir, en ce sens, arrêts du 29 septembre 2011, AJ/Commission, F‑80/10, EU:F:2011:172, point 35, et du 8 octobre 2015, FT/AEMF, F‑39/14, EU:F:2015:117, point 74).
68 C’est à la lumière de ces considérations qu’il y a lieu d’examiner si le rapport d’évaluation contesté est entaché d’erreurs manifestes d’appréciation.
69 S’agissant, premièrement, du grief tiré de la prétendue erreur manifeste d’appréciation commise par le Conseil dans le cadre de l’évaluation de la « [r]égularité des prestations » de la requérante, il convient de relever que, comme mentionné au point 57 du présent arrêt, la « [r]égularité des prestations » se définit, aux termes du guide de la notation, comme la « mesure dans laquelle l’intéressé fournit un effort constant pour les tâches qui lui incombent ».
70 À cet égard, il y a lieu de constater que, pendant toute la période comprise entre le 15 avril et le 31 décembre 2013, c’est-à-dire lorsque la requérante travaillait à temps plein, un nombre particulièrement élevé d’arrivées tardives de cette dernière sur son lieu de travail a été enregistré. Ainsi, selon les statistiques relatives aux pointages de la requérante fournies par le Conseil et non contestées par celle-ci, sur 175 jours ouvrables, elle a été présente 111 jours au cours desquels
100 arrivées tardives ont été comptabilisées dont 59 enregistraient un retard supérieur à deux heures, étant précisé que les arrivées tardives inférieures à 30 minutes n’étaient d’ailleurs pas comptabilisées en tant que retards.
71 La présence de la requérante sur son lieu de travail pendant la période comprise entre le 15 avril et le 31 décembre 2013 était ainsi caractérisée par la récurrence de ses retards, le caractère imprévisible de ses absences et la durée particulièrement longue, à savoir presque neuf mois, au cours de laquelle se sont étalés lesdits retards.
72 De surcroît, il convient de relever que, pendant la période mentionnée au point précédent du présent arrêt, la requérante bénéficiait déjà d’un horaire individuel, lequel n’était pas respecté et dont elle n’a pas jugé important de solliciter la révision.
73 Si la requérante explique ses retards par des raisons liées à son état de santé, force est de constater qu’aucun des retards mentionnés au point 70 du présent arrêt n’était justifié ni ex ante ni ex post par la production de certificats médicaux, ainsi que l’a confirmé la requérante lors de l’audience du 12 mai 2016.
74 Partant, ces retards et absences ne sauraient être considérés comme justifiés pour cause de maladie au sens du point 63 de la communication no 15/14 du 15 janvier 2014, citée au point 56 du présent arrêt, aux termes duquel « les mentions, dans un rapport de notation, d’éléments ne relevant pas directement de la compétence, du rendement ou de la conduite dans le service des fonctionnaires – tels que les absences justifiées (par exemple pour cause de maladie) – […] doivent être, en principe,
proscrites ». Leur prise en considération aux fins du rapport d’évaluation contesté n’était dès lors pas exclue.
75 Dans ces circonstances, la hiérarchie de la requérante a légitimement pu s’attendre à ce que cette dernière soit présente sur son lieu de travail à un rythme correspondant à un travail à temps plein.
76 Ainsi, compte tenu de l’ampleur des absences irrégulières de la requérante, telle que constatée au point 71 du présent arrêt, l’évaluation de la « [r]égularité des prestations » de cette dernière, relevée au niveau « passable » par le second notateur, ce qui, selon le guide de la notation, correspond à un niveau acceptable, ne paraît pas entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.
77 Cette considération n’est pas remise en cause par le fait que la requérante a « compensé » a posteriori ses arrivées tardives soit par sa présence sur son lieu de travail au-delà des heures obligatoires soit par la prise de demi-journées de congé. En effet, de telles « compensations », intervenant uniquement a posteriori et de manière impromptue, ne permettent ni l’organisation optimale des ressources de l’unité au sein de laquelle la requérante travaillait ni la répartition sereine de la charge
de travail au sein de cette unité, comme l’attestent d’ailleurs les témoignages de ses collègues annexés au projet de rapport d’évaluation.
78 De même, la circonstance que les demandes de la requérante visant à pallier ses arrivées tardives auraient toujours été « validées » par sa hiérarchie, ce qui constitue une opération de comptabilisation purement administrative, ne signifie pas pour autant que la hiérarchie approuvait un tel horaire irrégulier et imprévisible sur le lieu de travail. En tout état de cause, une telle acceptation implicite, à la supposer même établie, ne justifie aucunement une notation pour la rubrique
« [r]égularité des prestations » supérieure à celle finalement retenue dans le rapport d’évaluation contesté, à savoir « passable », compte tenu du caractère imprévisible de la présence de la requérante sur son lieu de travail qui emportait nécessairement des conséquences néfastes sur l’organisation du travail.
79 Par conséquent, il ne saurait être allégué, ainsi que le fait la requérante, que ses arrivées tardives seraient dépourvues de pertinence aux fins de l’appréciation de la « [r]égularité de [ses] prestations », dès lors que son effort ne saurait être qualifié de « constant » au sens du guide de la notation.
80 Partant, les éléments apportés par la requérante ne sont pas susceptibles de priver de plausibilité les appréciations contenues dans le rapport d’évaluation contesté à l’égard de la « [r]égularité des prestations » de cette dernière.
81 Deuxièmement, concernant l’appréciation de la « [q]ualité du travail » de la requérante, il convient de relever que la mention « bon » qui lui a été attribuée dans le rapport d’évaluation contesté constitue, selon le guide de la notation, la notation pivot et correspond à un niveau élevé qu’on est en droit d’attendre d’un fonctionnaire de l’Union. Or, à supposer même que la requérante n’ait pas commis d’« erreurs dans le suivi de quelques dossiers », ainsi qu’elle le fait valoir, force est de
constater que celle-ci se borne à contester l’existence de telles erreurs sans pour autant démontrer en quoi la qualité de son travail aurait été à tel point « exceptionnellement élevé[e] » ou « particulièrement élevé[e] » qu’elle aurait mérité, selon le guide de la notation, l’attribution de la mention « excellent » ou « très bon ».
82 S’agissant, troisièmement, de l’attribution au « [s]ens du travail en équipe » et aux « [r]elations humaines » de la requérante de l’appréciation « passable », il convient d’observer que cette appréciation se fonde, au moins en partie, sur des communications écrites pouvant être perçues, aux termes du rapport d’évaluation contesté, comme « excessivement dures vis-à-vis d’interlocuteurs internes », ce dont attestent, en effet, les propos particulièrement discourtois de la requérante adressés tant
à son chef d’unité qu’à ses collègues dans les courriels reproduits aux points 23, 25 et 27 du présent arrêt.
83 Dans ces circonstances, les éléments du dossier mentionnés au point précédent du présent arrêt suffisent à démontrer que, pour évaluer le « [s]ens du travail en équipe » et les « [r]elations humaines » de la requérante, l’appréciation « passable » qui, aux termes du guide de la notation tels que rappelés au point 76 du présent arrêt, correspond à un niveau acceptable apparaît cohérente et justifiée et n’est donc pas entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.
84 Cette conclusion ne se trouve pas remise en cause par l’argument de la requérante selon lequel les témoignages de certains de ses collègues datant du mois d’avril 2014 démontreraient qu’elle entretenait avec eux de bonnes relations. En effet, de tels témoignages ne sont pas pour autant susceptibles de priver de plausibilité l’appréciation que le chef d’unité de la requérante a pu, de son point de vue, porter à l’égard du comportement de cette dernière au sein du service sur la base de ses
communications verbales et écrites, telles que notamment celles citées aux points 23, 25 et 27 du présent arrêt.
85 Quatrièmement, en ce qui concerne le « [s]ens des responsabilités » de la requérante, dont l’appréciation est passée de « excellent » par le premier notateur à « très bon » par le second, force est de constater que la requérante se borne à critiquer la dégradation de son évaluation sans pour autant apporter le moindre élément de preuve susceptible de démontrer en quoi son « [s]ens des responsabilités » aurait été, au sens du guide de la notation, « exceptionnellement élevé » et, partant, devrait
se voir attribuer l’appréciation « excellent ».
86 En outre, l’argument de la requérante selon lequel cette dégradation de l’appréciation n’aurait visé qu’à compenser l’amélioration de l’évaluation relative à la « [r]égularité des prestations » afin que la note globale demeure inchangée ne saurait davantage prospérer. En effet, en l’absence d’élément concret démontrant que le rapport d’évaluation contesté serait entaché d’une erreur manifeste dans l’appréciation de son « [s]ens des responsabilités », le seul fait que la note globale soit restée
la même ne constitue nullement un indice de ce qu’une telle erreur aurait été commise.
87 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de constater que le rapport d’évaluation contesté n’est entaché d’aucune erreur manifeste d’appréciation.
88 En ce qui concerne, en second lieu, la question de savoir si le rapport d’évaluation contesté est suffisamment motivé, il découle d’une jurisprudence constante que le notateur dispose d’un large pouvoir d’appréciation pour évaluer le travail des notés. Or, l’existence d’un tel pouvoir d’appréciation présuppose que les notateurs n’aient pas l’obligation de faire figurer dans le rapport de notation tous les éléments de fait et de droit pertinents à l’appui de leur évaluation, ni celle d’examiner et
de répondre à tous les points contestés par le noté (arrêt du 10 septembre 2009, van Arum/Parlement, F‑139/07, EU:F:2009:105, point 88).
89 Il y a lieu, ensuite, d’ajouter que les commentaires descriptifs figurant dans un rapport d’évaluation ont pour objet de justifier les appréciations analytiques portées dans le rapport et servent d’assise à l’établissement de l’évaluation, en permettant au fonctionnaire ou à l’agent concerné de comprendre les mentions obtenues. Par conséquent, eu égard à leur rôle prédominant dans l’établissement du rapport d’évaluation, les commentaires doivent être cohérents avec les mentions attribuées, la
notation devant être considérée comme une transcription chiffrée ou analytique des commentaires. Toutefois, compte tenu du large pouvoir d’appréciation reconnu aux évaluateurs, une éventuelle incohérence au sein du rapport d’évaluation ne peut justifier l’annulation de celui-ci que si elle est manifeste (arrêt du 23 octobre 2013, Solberg/OEDT, F‑148/12, EU:F:2013:154, point 41 et jurisprudence citée).
90 Enfin, il importe de préciser que, selon le guide de la notation, auquel cette institution doit certes se conformer, lorsque ledit guide contient des règles impératives que l’institution s’est ainsi imposée à elle-même et non de simples conseils à l’attention des notateurs (voir, par analogie, arrêt du 10 septembre 2009, van Arum/Parlement, F‑139/07, EU:F:2009:105, point 89), le premier notateur a la « faculté de faire de brefs commentaires dans la colonne prévue à cet égard, notamment lorsqu’il
s’écarte de la notation “bon” qui constitue la notation pivot ». En outre, selon ce guide, « l’attribution d’une notation “excellent” ou “laisse à désirer” doit obligatoirement être assortie d’un commentaire justificatif » dans le cadre des appréciations d’ordre général.
91 C’est à la lumière des considérations qui précèdent qu’il convient d’examiner, à présent, si les appréciations figurant dans le rapport d’évaluation contesté sont suffisamment précises et argumentées pour satisfaire à l’obligation de motivation.
92 En l’espèce, la requérante critique l’absence de précisions apportées par le second notateur à l’égard, premièrement, de l’attribution de la mention « passable » à la « [r]égularité des prestations », rubrique à laquelle le premier notateur avait accordé la mention « laisse à désirer », deuxièmement, de la régression de l’évaluation de son « [s]ens des responsabilités » par rapport à celle qu’avait effectuée le premier notateur, qui est ainsi passée à « très bon », et, troisièmement, du maintien
de l’appréciation « passable » à son « [s]ens du travail en équipe » et à ses « [r]elations humaines ».
93 Ainsi suffit-il de constater que le rapport d’évaluation contesté ne comporte aucune appréciation « excellent » ou « laisse à désirer », mentions qui, comme indiqué au point 90 du présent arrêt, doivent être assorties, selon le guide de la notation, d’un commentaire justificatif de la part du notateur.
94 En tout état de cause, les éléments figurant dans les appréciations d’ordre général du rapport d’évaluation contesté sont motivés de façon suffisante et circonstanciée pour permettre à la requérante de formuler des observations sur cette motivation et au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité dudit rapport, ainsi que cela découle des points 66 à 87 du présent arrêt.
95 S’agissant, par ailleurs, d’une éventuelle incohérence de motivation invoquée par la requérante dans la mesure où le rapport d’évaluation contesté précise qu’elle a démontré un « sens des responsabilités remarquable en essayant de suivre ses dossiers de chez elle même durant ses absences » alors que l’appréciation qui lui a été attribuée par le second notateur pour cette rubrique est « très bon », il y a lieu de souligner que ce même rapport relève en même temps une série d’éléments attestant de
« difficultés considérables » que la requérante a connues dans son travail, difficultés qui se rapportent, au moins en partie, à la rubrique du « [s]ens des responsabilités ». Cette dernière rubrique est définie, par le guide de la notation, comme « l’engagement de l’intéressé vis-à-vis de son travail, sa disponibilité à exécuter ses tâches dans un esprit actif et constructif ».
96 Or, à cet égard, force est de constater qu’un certain nombre d’observations susceptibles d’affecter l’évaluation de la rubrique du « [s]ens des responsabilités », tel que défini dans le guide de la notation, figure dans les appréciations d’ordre général, à savoir le nombre d’arrivées tardives de la requérante ; ses difficultés à participer de manière intégrée à la vie de l’unité ; ses difficultés et erreurs dans le suivi de quelques dossiers ; ses communications verbales et écrites excessivement
dures vis-à-vis d’interlocuteurs internes ; ses jugements discutables et parfois factuellement erronés à l’égard de son chef d’unité ainsi que ses difficultés à accepter les critiques portant sur sa performance professionnelle.
97 Dans ces circonstances, l’incohérence de motivation alléguée par la requérante au sein du rapport d’évaluation contesté n’apparaît pas manifeste au sens de la jurisprudence citée au point 89 du présent arrêt.
98 Partant, le grief tiré d’un défaut de motivation doit être écarté et, par voie de conséquence, le premier moyen doit être rejeté dans son intégralité comme non fondé.
Sur le second moyen, tiré de la violation du devoir de sollicitude
– Arguments des parties
99 La requérante soutient que, au vu de son état de santé, l’administration était tenue à un devoir accru de sollicitude à son égard, notamment lors de l’établissement du rapport d’évaluation contesté.
100 En effet, tout comme le service médical du Conseil et l’assistante sociale de cette institution, le second notateur aurait été parfaitement au courant de la situation de la requérante, caractérisée par la maltraitance professionnelle et le harcèlement moral dont elle aurait souffert de la part de son chef d’unité. L’AIPN en aurait également été informée dans le cadre de la réclamation que la requérante avait introduite à l’encontre de la décision du 17 septembre 2013 de non-promotion pour
l’année 2013. Le chef d’unité de la requérante en aurait, lui aussi, été averti à plusieurs reprises mais aurait attendu la fin du mois de décembre de la même année pour proposer à celle-ci de la rencontrer à ce sujet.
101 Dans ces conditions, le devoir de sollicitude aurait dû empêcher le second notateur d’entériner les appréciations du premier notateur, et cela d’autant plus que les obligations découlant de ce devoir se trouveraient substantiellement renforcées lorsque se trouve en cause la situation d’un fonctionnaire dont il est avéré que sa santé psychologique est affectée.
102 Le Conseil réfute cette argumentation.
– Appréciation du Tribunal
103 À titre liminaire, il y a lieu de constater que les allégations de la requérante tirées du fait qu’elle aurait subi une situation de maltraitance professionnelle et de harcèlement moral de la part de son chef d’unité, allégations qui sont, par leur nature même, particulièrement graves, s’avèrent pourtant, au regard des éléments du dossier, purement gratuites voire abusives.
104 En effet, en premier lieu, la requérante n’a produit aucun élément concret permettant d’établir que son chef d’unité aurait adopté un comportement, tant sur la forme que sur le fond, assimilable à un harcèlement moral, lequel se définit, selon la jurisprudence, comme comprenant des agissements ayant entraîné objectivement des conséquences emportant le discrédit de la victime ou la dégradation de ses conditions de travail. Les agissements en cause devant, en vertu de l’article 12 bis,
paragraphe 3, du statut, présenter un caractère abusif, il s’ensuit que la qualification de harcèlement est subordonnée à la condition que celui-ci revête une réalité objective suffisante, au sens où un observateur impartial et raisonnable, doté d’une sensibilité normale et placé dans les mêmes conditions, le considérerait comme excessif et critiquable (arrêt du 16 mai 2012, Skareby/Commission, F‑42/10, EU:F:2012:64, point 65).
105 Or, une évaluation des prestations du fonctionnaire noté par un supérieur hiérarchique, fût-elle critique, ne saurait comme telle être qualifiée de harcèlement (voir, en ce sens, arrêt du 2 juillet 2009, Giannini/Commission, F‑49/08, EU:F:2009:76, point 136).
106 En deuxième lieu, force est de constater que la requérante n’a introduit aucune demande d’assistance au titre de l’article 24 du statut aux fins de solliciter l’ouverture d’une enquête administrative visant à établir les faits de harcèlement moral allégués alors même que, selon la jurisprudence, il appartient au fonctionnaire qui s’estime victime de tels comportements de saisir l’administration d’une demande visant à obtenir la cessation du comportement. Ce n’est que le rejet explicite ou
implicite de cette demande qui constituerait une décision faisant grief que le fonctionnaire concerné peut contester, après avoir suivi la procédure administrative applicable, devant le juge de l’Union (voir, en ce sens, arrêt du 1er février 2007, Rossi Ferreras/Commission, F‑42/05, EU:F:2007:17, points 58 et 59, et ordonnance du 25 novembre 2009, Soerensen Ferraresi/Commission, F‑5/09, EU:F:2009:156, point 27).
107 En troisième lieu, interrogée à cet égard lors de l’audience du 12 mai 2016, la requérante n’a invoqué que deux éléments démontrant, selon elle, la situation de harcèlement moral qu’elle aurait subie, à savoir, d’une part, le courriel que lui aurait adressé le chef de l’unité sociale de la DG « Administration » du Conseil le 21 décembre 2012 faisant état de ce que celui-ci aurait appris par ses services que la « situation était dysfonctionnelle » et, d’autre part, l’observation du second
notateur, contenue dans le rapport d’évaluation dans sa version antérieure à la saisine du comité des rapports, mentionnant la « souffrance réellement éprouvée » par la requérante.
108 Toutefois, aucun de ces éléments ne mentionne ni ne révèle un quelconque harcèlement moral de la part du chef d’unité de la requérante. En effet, le constat du caractère « dysfonctionne[l] » de la situation dans l’unité concernée n’implique aucunement que la cause de ce « dysfonctionne[ment] » aurait été le harcèlement moral dont aurait souffert la requérante plutôt que les difficultés de fonctionnement constatées au sein de cette unité et occasionnées objectivement par les absences de la
requérante. De même, le constat d’une « souffrance réellement éprouvée » par celle-ci ne suggère pas davantage, en l’absence d’un quelconque autre élément en ce sens, que l’origine de cette souffrance aurait résidé dans le harcèlement moral allégué.
109 Par ailleurs, si les certificats médicaux produits par la requérante mettent en évidence l’existence d’un « syndrome anxio-dépressif » chez cette dernière « l’empêchant d’arriver à l’heure à son travail », ils ne permettent toutefois pas de présumer que ledit syndrome résulterait d’un harcèlement moral, dès lors que la mention dans lesdits certificats d’un tel harcèlement en tant que « motif d’admission » s’explique exclusivement par la description que la requérante a pu faire à l’auteur de ces
certificats de ses conditions de travail au sein du Conseil (voir, par analogie, arrêts du 2 décembre 2008, K/Parlement, F‑15/07, EU:F:2008:158, point 41, et du 17 septembre 2014, CQ/Parlement, F‑12/13, EU:F:2014:214, point 127).
110 Dans ces conditions, la requérante ne saurait tirer aucun argument du harcèlement allégué.
111 Cela étant précisé, il convient de rappeler que la notion de devoir de sollicitude, telle que développée par la jurisprudence, reflète l’équilibre des droits et obligations réciproques que le statut a créé dans les relations entre l’administration et les agents du service public. Cet équilibre implique notamment que, lorsqu’elle statue à propos de la situation d’un fonctionnaire, l’administration prenne en considération l’ensemble des éléments susceptibles de déterminer sa décision et que, ce
faisant, elle tienne compte non seulement de l’intérêt du service, mais aussi de celui du fonctionnaire concerné (arrêts du 28 mai 1980, Kuhner/Commission, 33/79 et 75/79, EU:C:1980:139, point 22, et du 29 juin 1994, Klinke/Cour de justice, C‑298/93 P, EU:C:1994:273, point 38).
112 À cet égard, il importe de relever que plusieurs éléments du dossier permettent d’établir que l’administration a dûment tenu compte des intérêts de la requérante. En effet, il en ressort que le chef d’unité de la requérante a manifesté, à plusieurs reprises, son inquiétude à l’égard de la situation de cette dernière tout en adoptant ou en lui proposant un certain nombre de mesures qui démontrent un haut degré de sollicitude envers elle.
113 Premièrement, le chef d’unité de la requérante a procédé à la validation a posteriori de l’ensemble des arrivées tardives de cette dernière, nonobstant les difficultés que ces arrivées tardives occasionnaient pour le bon fonctionnement de l’unité, afin notamment de ne pas l’exposer à un stress additionnel.
114 Deuxièmement, un horaire individuel avait été mis en place au profit de la requérante déjà en 2012 afin de tenir compte de sa situation, ce que celle-ci ne conteste pas.
115 Troisièmement, le chef d’unité a soutenu la requérante dans sa démarche visant à lui éviter de se voir appliquer, en raison de ses problèmes de santé, le régime d’invalidité, comme en atteste notamment une note adressée par le chef d’unité au médecin-conseil du service médical du Conseil le 22 janvier 2014.
116 Quatrièmement, il ressort d’un échange de courriels entre la requérante et son chef d’unité entre les 11 et 18 septembre 2013 ainsi que de la note mentionnée au point précédent du présent arrêt que le chef d’unité a fait le nécessaire afin que la requérante puisse, en novembre 2013, changer de bureau en raison des difficultés relationnelles qu’elle entretenait avec la collègue dont elle partageait le bureau.
117 Cinquièmement, le chef d’unité a envisagé une éventuelle mobilité de la requérante vers un autre service, ce que démontre notamment un courriel du 15 janvier 2013 dont il ressort que celui-ci a pris l’initiative de contacter le nouveau directeur de la direction des ressources humaines et de l’administration du personnel de la DG « Administration » du Conseil à ce sujet.
118 Par ailleurs, les intérêts de la requérante ont également été pris en compte par le second notateur, lequel a indiqué, au titre des appréciations d’ordre général contenues dans le rapport d’évaluation contesté, que les qualités professionnelles de la requérante l’avaient amené, « aussi dans le but de l’aider dans son développement ultérieur, à décider, en accord avec [la requérante], de sa mobilité vers une autre unité de la [direction des ressources humaines et de l’administration du personnel
de la DG « Administration » du Conseil] en 2014 ».
119 Il convient encore de souligner, ainsi que cela ressort de la jurisprudence citée au point 111 du présent arrêt, que l’intérêt de la requérante doit être mis en perspective avec l’intérêt du service. Or, à cet égard, il est indéniable que la présence irrégulière et imprévisible de la requérante sur son lieu de travail, sans justification dûment produite, ainsi que cela a été relevé au point 73 du présent arrêt, emportait nécessairement des conséquences néfastes au bon fonctionnement du service,
qu’il s’agisse de constater et justifier son absence au cours de réunions, de ne pas pouvoir s’assurer de la mise à jour de ses connaissances en ce qui concerne les outils de gestion ou encore de la difficulté, compte tenu de l’absence d’anticipation possible, de procéder à la redistribution de son travail et de planifier différemment l’organisation du service et la gestion du temps afin de ne pas accroître considérablement la charge de travail de ses collègues.
120 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le Conseil n’a pas méconnu son devoir de sollicitude.
121 Partant, le second moyen n’est pas fondé et, par voie de conséquence, le recours doit être rejeté dans son intégralité.
Sur les dépens
122 Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe supporte ses propres dépens, mais n’est condamnée que partiellement aux
dépens exposés par l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.
123 Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que la requérante a succombé en son recours. En outre, le Conseil a, dans ses conclusions, expressément demandé que la requérante soit condamnée aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, la requérante doit supporter ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par le Conseil.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (deuxième chambre)
déclare et arrête :
1) Le recours est rejeté.
2) FV supporte ses propres dépens et est condamnée à supporter les dépens exposés par le Conseil de l’Union européenne.
Bradley
Sant’Anna
Kornezov
Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 28 juin 2016.
Le greffier
W. Hakenberg
Le président
K. Bradley
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
( *1 ) Langue de procédure : le français.