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12/04/2016 | CJUE | N°F-135/15

CJUE | CJUE, Ordonnance du Tribunal de la fonction publique, Laurent Beiner contre Commission européenne., 12/04/2016, F-135/15


ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

12 avril 2016 ( *1 )

«Fonction publique — Concours — Conditions d’admission — Expérience professionnelle — Décision du jury de ne pas admettre le requérant à concourir — Erreur manifeste d’appréciation»

Dans l’affaire F‑135/15,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

Laurent Beiner, demeurant à Knutange (France), représenté par M

e B. Sahki, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. G. Gattinara et Mm...

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

12 avril 2016 ( *1 )

«Fonction publique — Concours — Conditions d’admission — Expérience professionnelle — Décision du jury de ne pas admettre le requérant à concourir — Erreur manifeste d’appréciation»

Dans l’affaire F‑135/15,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

Laurent Beiner, demeurant à Knutange (France), représenté par Me B. Sahki, avocat,

partie requérante,

contre

Commission européenne, représentée par M. G. Gattinara et Mme F. Simonetti, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (troisième chambre),

composé de M. S. Van Raepenbusch (rapporteur), président, Mme M. I. Rofes i Pujol et M. E. Perillo, juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 23 octobre 2015, M. Laurent Beiner a demandé, en substance, l’annulation de la décision de ne pas l’admettre au concours général EPSO/AST/130/14 (AST 3) organisé pour le recrutement d’assistants de grade AST 3 dans le secteur des bâtiments.

Cadre juridique

2 Par l’avis de concours général EPSO/AST/130/14 (AST 3), publié au Journal officiel de l’Union européenne du 27 février 2014 (JO 2014, C 56 A, p. 2, ci-après l’« avis de concours »), l’Office européen de sélection du personnel (EPSO) a annoncé l’organisation d’un concours général sur titres et sur épreuves pour la constitution d’une réserve de recrutement de 101 fonctionnaires du groupe de fonctions des assistants (AST), de grade AST 3, dans six domaines du secteur des bâtiments (ci-après le
« concours »).

3 Le titre II de l’avis de concours, relatif à la nature des fonctions des postes à pourvoir, précise ce qui suit :

4 Le titre III, intitulé « Conditions d’admission », de l’avis de concours dispose, sous le point 2.1 :

5 Le titre V, intitulé « Admission au concours et sélection sur titres » de l’avis de concours prévoit sous le point 1 :

Faits à l’origine du litige

6 Le 1er avril 2014, le requérant s’est inscrit au concours dans le domaine « Gestion de projets ».

7 Le 16 juin 2014, l’EPSO a informé le requérant que le jury du concours (ci-après le « jury ») avait estimé qu’il ne remplissait pas les conditions de diplôme et d’expérience professionnelle prévues au titre III de l’avis de concours et qu’il ne pouvait donc être admis à concourir.

8 Le 26 juin 2014, le requérant a formé une demande de réexamen contre cette décision du jury.

9 Le 4 décembre 2014, l’EPSO a informé le requérant que, après réexamen de sa candidature, le jury avait décidé de confirmer sa décision de ne pas l’admettre au concours. Cette décision était justifiée par le fait que, si le requérant était titulaire d’« un diplôme d’études post-secondaires valable et pertinent obtenu en 1997 », il ne « rempliss[ait] pas les conditions d’admission en raison du fait que [son] expérience professionnelle n’[était] pas liée à la nature de tâches du domaine du concours
mais plutôt au secteur de la conception industrielle, calculs et analyse ».

10 Le 5 mars 2015, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut »), que l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après l’« AIPN ») a rejetée le 6 juillet suivant. Cette décision de rejet de la réclamation a été remise à la poste le 25 juillet 2015 et a été réceptionnée le 27 juillet suivant. Elle est motivée, en substance, d’une part, par le fait que les « gestionnaires de projets »
visés par l’avis de concours seraient en charge de projets en cours et non de l’audit ou de l’expertise de réalisations déjà achevées, de sorte que l’expérience professionnelle du requérant au sein de l’entreprise V. ne répondrait pas aux exigences dudit avis et, d’autre part, par le fait que les deux autres activités professionnelles dont il se prévalait avaient trait à des projets de conception de machines et ne concernaient pas le domaine des bâtiments.

Conclusions des parties

11 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

— annuler la décision du jury, du 16 juin 2014, de ne pas l’admettre aux épreuves du concours ;

— annuler la décision du jury, du 4 décembre 2014, confirmant sa décision du 16 juin 2014 ;

— annuler la décision de l’AIPN, du 6 juillet 2015, rejetant sa réclamation ;

— à titre subsidiaire, par réformation, le réintégrer dans le processus de recrutement du concours ;

— condamner la Commission aux dépens.

12 La Commission européenne conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

— rejeter le recours comme en partie irrecevable et en partie non fondé ;

— condamner le requérant aux dépens.

En droit

Sur la décision du Tribunal de statuer par voie d’ordonnance motivée

13 En vertu de l’article 81 du règlement de procédure, lorsqu’un recours est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.

14 Il est de jurisprudence constante que, lorsqu’à la lecture du dossier d’une affaire la formation de jugement, s’estimant suffisamment éclairée par les pièces dudit dossier, est entièrement convaincue de l’irrecevabilité manifeste de la requête ou est d’avis que le recours est manifestement mal fondé et considère de surcroît que la tenue d’une audience ne serait pas de nature à offrir le moindre élément nouveau à cet égard, le rejet de la requête par voie d’ordonnance motivée, sur le fondement de
l’article 81 du règlement de procédure, non seulement contribue à l’économie du procès, mais épargne également aux parties les frais que la tenue d’une audience comporterait (ordonnance du 30 novembre 2015, O’Riain/Commission,F‑104/14, EU:F:2015:143, point 20).

15 En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces produites par les parties et décide, en application de l’article 81 du règlement de procédure, de statuer par voie d’ordonnance motivée sans poursuivre la procédure.

Sur la recevabilité du recours en tant qu’il est introduit contre l’EPSO

16 Dans son acte introductif d’instance, le requérant a désigné l’EPSO comme partie défenderesse aux côtés de la Commission.

17 Or, conformément à l’article 4 de la décision 2002/620/CE du Parlement européen, du Conseil, de la Commission, de la Cour de justice, de la Cour des comptes, du Comité économique et social, du Comité des régions et du Médiateur, du 25 juillet 2002, portant création de l’[(EPSO)] (JO 2002, L 197, p. 53), les demandes et les réclamations contre les décisions de l’EPSO sont introduites auprès de ce dernier, alors que les recours contre les mêmes décisions sont dirigés contre la Commission, y compris
lorsque la décision visée par le recours est une décision d’un jury de concours (ordonnance du 30 novembre 2015, O’Riain/Commission,F‑104/14, EU:F:2015:143, point 23).

18 Il s’ensuit que le présent recours aurait dû être dirigé uniquement contre la Commission. Partant, le recours est manifestement irrecevable en tant qu’il a également été formé contre l’EPSO.

Sur les premier, troisième et quatrième chefs de conclusions

19 Par son premier chef de conclusions, le requérant demande au Tribunal d’annuler la décision du jury du concours, du 16 juin 2014, ne l’admettant pas aux épreuves du concours.

20 Il y a lieu d’observer que, en vertu du point 6.4 du guide applicable aux concours généraux, publié au Journal officiel de l’Union européenne du 7 septembre 2012 (JO 2012, C 270 A, p. 1) et du point 3.4.3 des dispositions générales applicables aux concours généraux adoptées par l’EPSO (JO 2014, C 60 A, p. 1), les candidats évincés d’un concours par le jury dudit concours peuvent former une demande de réexamen auprès de celui-ci. Le requérant a introduit une telle demande le 26 juin 2014 et le
jury a confirmé sa décision initiale de ne pas l’admettre aux épreuves du concours par sa décision du 4 décembre 2014.

21 Or, selon une jurisprudence constante, lorsqu’une partie dont la demande d’admission à un concours a été rejetée sollicite le réexamen de cette décision sur la base d’une disposition précise liant l’administration, c’est la décision prise par le jury, après réexamen, qui constitue l’acte faisant grief, au sens de l’article 90, paragraphe 2, ou, le cas échéant, de l’article 91, paragraphe 1, du statut (arrêts du 24 septembre 2009, Brown/Commission,F‑37/05, EU:F:2009:121, point 28, et du 4 février
2010, Wiame/Commission,F‑15/08, EU:F:2010:7, point 20).

22 Il s’ensuit que le recours n’est manifestement pas recevable en tant qu’il est dirigé contre la décision initiale du jury, du 16 juin 2014.

23 Par ailleurs, le requérant demande au Tribunal, par son troisième chef de conclusions, d’annuler la décision de l’AIPN, du 6 juillet 2015, rejetant sa réclamation.

24 Or, aux termes de l’article 91, paragraphe 1, du statut, le recours doit, en principe, être dirigé contre l’acte initial faisant grief. Dans ce contexte, la jurisprudence est fixée en ce sens que la réclamation administrative et son rejet, explicite ou implicite, font partie intégrante d’une procédure complexe et ne constituent qu’une condition préalable à la saisine du juge. Il est dès lors de jurisprudence constante que le recours, même formellement dirigé contre le rejet de la réclamation, a
pour effet de saisir le juge de l’acte faisant grief contre lequel la réclamation a été présentée, sauf dans l’hypothèse où le rejet de la réclamation a une portée différente de celle de l’acte contre lequel cette réclamation a été formée (arrêt du 21 mai 2014, Mocová/Commission,T‑347/12 P, EU:T:2014:268, point 34). En outre, compte tenu de ce que la procédure précontentieuse présente un caractère évolutif, une décision explicite de rejet de la réclamation qui ne contient que des précisions
complémentaires et se borne ainsi à révéler, de manière détaillée, les motifs de la confirmation de la décision antérieure ne constitue pas un acte faisant grief (voir en ce sens, arrêt du 7 juin 2005, Cavallaro/Commission,T‑375/02, EU:T:2005:199, points 65 et 66). Néanmoins, ce même caractère évolutif de la procédure précontentieuse implique que ces précisions complémentaires soient prises en considération pour apprécier la légalité de l’acte attaqué.

25 En l’espèce, le rejet de la réclamation du requérant a confirmé la décision du jury du 4 décembre 2014 de ne pas l’admettre aux épreuves du concours, et cela au motif, figurant déjà dans cette décision, que l’expérience professionnelle de l’intéressé n’était pas directement pertinente au regard de l’objet du concours. Les précisions apportées à cet égard par l’AIPN au vu de l’expérience professionnelle mise en avant par le requérant ne constituent que des motifs confirmant la décision du jury et
ne sauraient faire du rejet de la réclamation un acte faisant grief.

26 Partant, il n’y a manifestement pas lieu de statuer séparément sur le troisième chef de conclusions tendant à l’annulation de la décision de l’AIPN rejetant la réclamation du requérant.

27 Enfin, par son quatrième chef de conclusions, invoqué à titre subsidiaire, le requérant demande au Tribunal de le réintégrer dans le processus de recrutement du concours.

28 Toutefois, il ressort d’une jurisprudence constante qu’il n’appartient pas au juge de l’Union d’adresser des injonctions à l’administration (ordonnance du 21 septembre 2015, De Nicola/BEI,T‑10/15 P, EU:T:2015:705, point 34).

29 Le quatrième chef de conclusions doit donc être jugé manifestement irrecevable.

30 Au vu de tout ce qui précède, le Tribunal doit seulement se prononcer sur le deuxième chef de conclusions tendant à l’annulation de la décision, du 4 décembre 2014, par laquelle le jury a confirmé, après réexamen, que le requérant ne pouvait être admis aux épreuves du concours.

Sur le deuxième chef de conclusions

31 Le requérant soulève deux moyens tirés, le premier, d’une erreur manifeste d’appréciation et, le second, d’un excès de pouvoir. L’excès de pouvoir est, toutefois, un concept générique recouvrant les différents cas d’ouverture du recours en annulation. Son invocation comme telle est dès lors trop imprécise pour constituer le fondement d’un moyen recevable au sens de l’article 50, paragraphe 1, sous e), du règlement de procédure. Néanmoins, la lecture du moyen permet de considérer que le requérant
a, en réalité, entendu soulever un moyen tiré de la violation du principe de sécurité juridique.

Sur le premier moyen tiré de l’erreur manifeste d’appréciation

32 Le requérant fait, en premier lieu, valoir que le jury du concours a commis une erreur manifeste d’appréciation en considérant, dans sa décision initiale du 16 juin 2014, qu’il ne satisfaisait pas aux conditions de diplôme requises par l’avis de concours.

33 Toutefois, la décision sur réexamen du 4 décembre 2014 s’est substituée à la décision initiale du 16 juin précédent et repose sur le seul motif que l’expérience professionnelle du requérant n’était pas directement pertinente au regard des postes à pourvoir par le concours. De plus, ainsi que cela a été exposé au point 22 ci-dessus, le recours est manifestement irrecevable en tant qu’il est dirigé contre la décision initiale du 16 juin 2014. Partant, le grief dirigé contre l’appréciation du jury
au soutien de cette décision est manifestement inopérant à l’égard de la décision sur réexamen du 4 décembre 2014.

34 Le requérant conteste, en second lieu, l’appréciation du jury, figurant dans la décision du 4 décembre 2014, selon laquelle son expérience professionnelle ne serait pas adaptée à la nature des tâches assignées aux postes à pourvoir par le concours, mais plutôt au secteur de la conception industrielle, calculs et analyse.

35 À cet égard, il ressort de l’arrêt du 24 avril 2013, Demeneix/Commission (F‑96/12, EU:F:2013:52, point 42) que, s’agissant plus particulièrement d’une condition d’admission à concourir relative à l’expérience professionnelle, le fait que la fonction de l’avis de concours soit d’« informer les intéressés d’une façon aussi exacte que possible » ne s’oppose pas à ce que soit laissée au jury de concours la responsabilité d’apprécier, au cas par cas, si l’expérience professionnelle déclarée par chaque
candidat correspond au niveau requis par l’avis de concours (voir également arrêts du 12 juillet 1989, Belardinelli e.a./Cour de justice,225/87, EU:C:1989:309, points 13 et 14, et du 25 mars 2004, Petrich/Commission,T‑145/02, EU:T:2004:91, point 37).

36 Le jury de concours dispose, à cet effet, d’un large pouvoir d’appréciation, dans le cadre des dispositions du statut relatives aux procédures de concours, en ce qui concerne tant la nature et la durée des expériences professionnelles antérieures des candidats que le rapport plus ou moins étroit que celles-ci peuvent présenter avec les exigences du poste à pourvoir. Ainsi, dans le cadre de son contrôle de légalité, le Tribunal doit se limiter à vérifier si l’exercice de ce pouvoir n’a pas été
entaché d’une erreur manifeste (arrêts du 25 novembre 2008, Iordanova/Commission, F‑53/07, point 34 et la jurisprudence citée, et du 24 avril 2013, Demeneix/Commission,F‑96/12, EU:F:2013:52, point 43).

37 De plus, dans le cadre de son contrôle de la légalité des refus d’admission à concourir, le juge de l’Union doit tenir compte de ce qu’il appartient, en principe et selon une jurisprudence constante, au candidat à un concours de fournir au jury de concours tous les renseignements et documents qu’il estime utiles en vue de l’examen de sa candidature afin de permettre à celui-ci de vérifier s’il remplit les conditions posées par l’avis de concours, et cela a fortiori s’il y a été expressément et
formellement invité (arrêt du 24 avril 2013, Demeneix/Commission,F‑96/12, EU:F:2013:52, point 44 et la jurisprudence citée). Le jury de concours, lorsqu’il se prononce sur l’admission des candidats à concourir, est donc autorisé à limiter son examen aux seuls actes de candidature et aux pièces qui y sont annexées (arrêt du 13 mars 2002, Martínez Alarcón/Commission,T‑357/00, T‑361/00, T‑363/00 et T‑364/00, EU:T:2002:66, point 76).

38 Enfin, compte tenu du large pouvoir d’appréciation reconnu au jury de concours, établir que celui-ci a commis une erreur manifeste dans l’appréciation des faits de nature à justifier l’annulation de la décision prise suppose que les éléments de preuve, qu’il incombe au requérant d’apporter, soient suffisants pour priver de plausibilité les appréciations retenues par le jury en question (arrêts du 12 décembre 1996, AIUFFASS et AKT/Commission, T‑380/94, EU:T:1996:195, point 59, et du 12 février
2008, BUPA e.a./Commission,T‑289/03, EU:T:2008:29, point 221 ; arrêt du 24 avril 2013, Demeneix/Commission,F‑96/12, EU:F:2013:52, point 45).

39 En l’espèce, le titre V de l’avis de concours prévoyait précisément que la sélection des candidats admis à participer aux épreuves serait effectuée sur la base des déclarations de ceux-ci au regard des conditions générales et spécifiques d’admission indiquées dans ledit avis.

40 À cet égard, il importe de rappeler que la fonction d’un avis de concours est d’informer les intéressés d’une manière aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper les postes dont il s’agit. Aussi convient-il d’interpréter les conditions d’admission à la lumière des finalités du concours en cause, telles qu’elles résultent de la description des fonctions relatives aux postes à pourvoir. En conséquence, la partie concernant la nature des fonctions et la partie
concernant les conditions d’admission d’un avis de concours doivent être considérées ensemble (arrêt du 14 juillet 2000, Teixeira Neves/Cour de justice,T‑146/99, EU:T:2000:194, point 34 et la jurisprudence citée ; voir également en ce sens arrêt du 22 janvier 2015, Kakol/Commission,F‑1/14 et F‑48/14, EU:F:2015:5, point 56, faisant l’objet d’un pourvoi pendant devant le Tribunal de l’Union européenne, affaire T‑152/15 P).

41 En l’occurrence, le titre II de l’avis de concours mentionnait, quant à la nature des fonctions des postes à pourvoir, que les techniciens à recruter seraient responsables de tâches de gestion, d’application, de surveillance et de suivi dans le secteur des bâtiments. S’agissant du domaine « Gestion de projets », choisi par le requérant, l’avis de concours précisait en outre que les gestionnaires de projets seraient chargés de l’« assistance à la gestion de projets immobiliers (construction,
rénovation, location de bâtiments), techniques spéciales, gros œuvre et parachèvement : structures, façades, stores intérieurs et extérieurs, toitures, menuiseries extérieures intérieures, revêtements sols et murs ».

42 Or, à la rubrique « [e]xpérience professionnelle » de son acte de candidature, le requérant a indiqué disposer d’une expérience consistant dans la « [g]estion de missions d’audit techniques sur [le] patrimoine immobilier d[e] clients », dans le « [c]alcul et [la] modélisation d’ouvrages », dans l’« [e]xpertise et [l]’analyse concernant la modification de patrimoine[s] », ainsi que dans l’« [é]valuation pathologique d’ouvrages existants ».

43 Au vu de ces indications, et comme l’AIPN l’a relevé dans le rejet de la réclamation du requérant, le jury a pu considérer, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, que l’expérience professionnelle susmentionnée n’était pas directement pertinente, parce qu’elle concernait des activités très spécifiques, telles que l’audit et l’expertise de réalisations immobilières déjà achevées, alors que les « gestionnaires de projets » visés par l’avis de concours seraient chargés de projets
immobiliers en cours, concernant tant le gros œuvre que le parachèvement et l’aménagement.

44 Toujours à la rubrique « [e]xpérience professionnelle » de son acte de candidature, le requérant a également indiqué disposer d’une expérience professionnelle, d’une part, dans le domaine « [c]alcul et dimensionnement [de] structures métalliques diverses », dans la « [c]onception mécanique de machine[s] et [de] charpente[s] métallique[s] » et, d’autre part, dans la « [c]onception de prototype[s] pour le marché agroalimentaire de machines spéciales », dans le « [s]uivi de chantier[s] pour les
phases de construction sur site » ainsi que dans le « [m]anagement des équipes de montage ».

45 À cet égard, le jury a aussi pu considérer, sans commettre d’erreur manifeste d’appréciation, que cette double expérience professionnelle n’était pas davantage pertinente en ce qu’elle avait trait à la conception de machines et non pas au secteur des bâtiments, comme l’a souligné l’AIPN dans le rejet de la réclamation du requérant.

46 Il est vrai que le requérant a spécifié, sous la rubrique « [é]valuateur de talents » de son acte de candidature, réaliser depuis 28 mois « des missions d’inspection de tous les corps d’état (gros œuvre et second œuvre) de tous les bâtiments occupés par le [Parlement européen] » au Luxembourg.

47 Toutefois, au stade de la vérification des conditions requises pour être admis à concourir, le jury n’était pas tenu de prendre en considération les éléments d’information figurant à la rubrique « évaluateur de talents » de l’acte de candidature. En effet, le titre V de l’avis de concours précisait que cette vérification serait effectuée au vu des réponses du candidat aux questions relatives aux conditions générales et spécifiques d’admission, la prise en compte de ses déclarations sous la
rubrique « évaluateur de talents » intervenant, quant à elle, au stade suivant de la procédure, celui de la sélection sur titres.

48 De plus, et en tout état de cause, le requérant a précisé à la rubrique « évaluateur de talents » que son travail avait « pour but d’établir le point de départ d’une maintenance globale avec échéancier ». Enfin, au moment du dépôt des candidatures, l’expérience professionnelle en question n’atteignait pas les trois années requises.

49 Aussi, à supposer même que, au stade de la vérification des conditions générales et spécifiques d’admission au concours, le jury du concours ait pris en compte les mentions figurant à la rubrique « évaluateur de talents », il y a lieu d’admettre, avec la Commission, que celui-ci a pu considérer, sans erreur manifeste d’appréciation, que l’expérience professionnelle du requérant auprès du Parlement portait sur des missions d’inspection et d’audit technique effectuées dans le but de procéder,
ultérieurement, à la maintenance et à la rénovation des bâtiments en question, de sorte que cette expérience n’avait pas de lien direct avec l’objet du concours.

50 Au demeurant, dans sa requête, le requérant décrit lui-même son expérience professionnelle comme étant une expérience en matière d’inspection et de conception mécanique.

51 Au vu de ce qui précède, il y a lieu de juger que le requérant reste, à l’évidence, en défaut d’apporter des éléments suffisants de nature à priver de plausibilité les appréciations du jury quant à son expérience professionnelle. Partant, le premier moyen est manifestement mal fondé.

Sur le second moyen tiré de la violation du principe de sécurité juridique

52 Le requérant prétend que le jury du concours a excédé ses pouvoirs en ajoutant des critères de sélection ne figurant pas dans l’avis de concours. Cet ajout « de critères secrets » serait contraire au principe de sécurité juridique.

53 Sans qu’il soit besoin de se prononcer sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission et tirée de la méconnaissance de la règle de concordance entre la réclamation et la requête, découlant des articles 90 et 91 du statut, il suffit de constater que le requérant n’étaye en rien l’existence de prétendus « critères secrets » sur lesquels le jury du concours se serait basé pour apprécier l’adéquation de son expérience professionnelle. Au contraire, il résulte de l’examen du premier moyen
que le jury a pu parvenir légalement à la conclusion que le requérant ne pouvait être admis à concourir au seul vu des conditions d’admission figurant dans l’avis de concours.

54 Le second moyen doit donc être jugé manifestement non fondé.

Appréciation finale de la requête

55 Il découle de tout ce qui précède que le recours doit être rejeté comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.

Sur les dépens

56 Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe supporte ses propres dépens, mais n’est condamnée que partiellement aux
dépens exposés par l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

57 Il résulte des motifs énoncés dans la présente ordonnance que le requérant a succombé en son recours. En outre, la Commission a, dans ses conclusions, expressément demandé que le requérant soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, le requérant doit supporter ses propres dépens et être condamné à supporter les dépens exposés par la Commission.

  Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (troisième chambre)

ordonne :

  1) Le recours est rejeté comme, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

  2) M. Laurent Beiner supporte ses propres dépens et est condamné à supporter les dépens exposés par la Commission européenne.

Fait à Luxembourg, le 12 avril 2016.

Le greffier

W. Hakenberg
 
Le président

S. Van Raepenbusch

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( *1 )   Langue de procédure : le français.


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : F-135/15
Date de la décision : 12/04/2016
Type de recours : Recours de fonctionnaires - non fondé, Recours de fonctionnaires - irrecevable

Analyses

Fonction publique – Concours – Conditions d’admission – Expérience professionnelle – Décision du jury de ne pas admettre le requérant à concourir – Erreur manifeste d’appréciation.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Laurent Beiner
Défendeurs : Commission européenne.

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Van Raepenbusch

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:F:2016:77

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