ORDONNANCE DE LA COUR (septième chambre)
7 avril 2016 (*)
«Renvoi préjudiciel – Article 99 du règlement de procédure de la Cour – Questions préjudicielles identiques – Articles 49 TFUE et 56 TFUE – Liberté d’établissement – Libre prestation de services – Jeux de hasard – Réglementation nationale – Réorganisation du système des concessions au moyen d’un alignement temporel des échéances – Nouvel appel d’offres – Concessions d’une durée inférieure à celle des concessions anciennes – Cession à titre gratuit de l’usage des biens matériels et immatériels
détenus en propriété et constituant le réseau de gestion et de collecte du jeu – Restriction – Raisons impérieuses d’intérêt général – Proportionnalité»
Dans l’affaire C‑65/15,
ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Tribunale di Bari (tribunal de Bari, Italie), par décision du 27 octobre 2014, parvenue à la Cour le 12 février 2015, dans la procédure pénale contre
Vito Santoro,
LA COUR (septième chambre),
composée de M^me C. Toader (rapporteur), président de chambre, M^me A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,
avocat général: M. N. Wahl,
greffier: M. A. Calot Escobar,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour,
rend la présente
Ordonnance
1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation des articles 49 TFUE et 56 TFUE ainsi que des principes d’égalité de traitement et d’effectivité.
2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’une procédure pénale engagée contre M. Santoro pour non-respect de la législation italienne régissant la collecte de paris.
Le litige au principal et les questions préjudicielles
3 L’affaire au principal s’inscrit dans un cadre juridique et factuel pour l’essentiel analogue à celui des affaires ayant donné lieu aux arrêts Stanley International Betting et Stanleybet Malta (C‑463/13, EU:C:2015:25) ainsi que Laezza (C‑375/14, EU:C:2016:60).
4 Ainsi qu’il ressort du dossier soumis à la Cour, un contrôle effectué le 28 mars 2014 par la police douanière et financière (Guardia di Finanza) de Bari (Italie) dans les locaux d’un centre de transmission de données géré par M. Santoro et affilié à Centurionbet Ltd Bet 1128, une société de droit maltais, a permis de mettre au jour l’existence, dans ce centre, d’une activité non autorisée de collecte de paris. À la suite de ce contrôle, il a été procédé à la saisie de certains équipements
utilisés pour la réception et la transmission de ces paris.
5 M. Santoro a saisi la juridiction de renvoi d’une demande de réexamen du décret du 31 mars 2014 du ministère public près le Tribunale di Bari (tribunal de Bari) ayant validé la saisie conservatoire desdits équipements.
6 Dans ces conditions, le Tribunale di Bari (tribunal de Bari) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes, qui sont identiques à celles posées dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts Stanley International Betting et Stanleybet Malta (C‑463/13, EU:C:2015:25) ainsi que Laezza (C‑375/14, EU:C:2016:60):
«1) Les articles 49 TFUE et suivants et 56 TFUE et suivants ainsi que les principes affirmés par la Cour [...] dans l’arrêt Costa et Cifone (C‑72/10 et C‑77/10, EU:C:2012:80) doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que des concessions d’une durée inférieure à celle des concessions précédemment délivrées fassent l’objet d’un appel d’offres, alors que ce dernier est organisé afin de remédier aux conséquences découlant de l’illégalité de l’exclusion d’un certain nombre
d’opérateurs des appels d’offres?
2) Les articles 49 TFUE et suivants et 56 TFUE et suivants ainsi que les principes affirmés par la Cour [...] dans le même arrêt [...] doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que l’exigence d’une réorganisation du système, moyennant un alignement temporel des échéances des concessions, constitue une justification causale adéquate pour une durée réduite des concessions faisant l’objet de l’appel d’offres par rapport à la durée des concessions attribuées par le passé?
3) Les articles 49 TFUE et suivants et 56 TFUE et suivants, tels qu’ils ont notamment été complétés à la lumière des principes contenus dans l’arrêt Costa et Cifone (C‑72/10 et C‑77/10, EU:C:2012:80), doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une disposition nationale prévoyant l’obligation de céder à titre gratuit l’usage des biens matériels et immatériels détenus en propriété qui constituent le réseau de gestion et de collecte du jeu lors de la cessation de l’activité en
raison de l’expiration de la durée limite de la concession ou par l’effet de décisions de déchéance ou de révocation?»
Sur les questions préjudicielles
7 Conformément à l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une question posée à titre préjudiciel est identique à une question sur laquelle la Cour a déjà statué, cette dernière peut, après avoir entendu l’avocat général, à tout moment, statuer par voie d’ordonnance motivée.
8 Il convient de faire application de cette disposition dans le cadre de la présente affaire.
9 Par ses première et deuxième questions, qu’il convient d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les articles 49 TFUE et 56 TFUE ainsi que les principes d’égalité de traitement et d’effectivité doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une législation nationale relative aux jeux de hasard, telle que celle en cause au principal, qui prévoit l’organisation d’un nouvel appel d’offres portant sur des concessions d’une durée inférieure à celle des
concessions précédemment octroyées en raison d’une réorganisation du système au moyen d’un alignement temporel des échéances des concessions.
10 Dans la mesure où, dans son arrêt Stanley International Betting et Stanleybet Malta (C‑463/13, EU:C:2015:25, point 55 et dispositif), la Cour a déjà été amenée à examiner des questions identiques à celles posées dans la présente affaire, la réponse apportée par la Cour dans ledit arrêt est pleinement transposable aux première et deuxième questions posées par la juridiction de renvoi dans l’affaire au principal.
11 Dans ces conditions, il y a lieu de répondre aux première et deuxième questions que les articles 49 TFUE et 56 TFUE ainsi que les principes d’égalité de traitement et d’effectivité doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une législation nationale relative aux jeux de hasard, telle que celle en cause au principal, qui prévoit l’organisation d’un nouvel appel d’offres portant sur des concessions d’une durée inférieure à celle des concessions précédemment octroyées en
raison d’une réorganisation du système au moyen d’un alignement temporel des échéances des concessions.
12 Par sa troisième question, la juridiction de renvoi cherche en substance à savoir si les articles 49 TFUE et 56 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une disposition nationale, telle que celle en cause au principal, qui impose au concessionnaire de jeux de hasard de céder à titre gratuit, lors de la cessation de l’activité du fait de l’expiration de la période de concession ou par l’effet de décisions de déchéance ou de révocation, l’usage de biens matériels et
immatériels détenus en propriété et constituant le réseau de gestion et de collecte du jeu.
13 Étant donné que, dans son arrêt Laezza (C‑375/14, EU:C:2016:60, point 44 et dispositif), la Cour a déjà été amenée à examiner une question identique à celle posée dans la présente affaire, la réponse apportée par la Cour dans ledit arrêt est pleinement transposable à la troisième question posée par la juridiction de renvoi dans l’affaire au principal.
14 Il convient, par conséquent, de répondre à la troisième question que les articles 49 TFUE et 56 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une disposition nationale restrictive, telle que celle en cause au principal, qui impose au concessionnaire de jeux de hasard de céder à titre gratuit, lors de la cessation de l’activité du fait de l’expiration de la période de concession, l’usage des biens matériels et immatériels détenus en propriété et constituant le réseau de gestion
et de collecte du jeu, pour autant que cette restriction aille au-delà de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objectif effectivement poursuivi par cette disposition, ce qu’il revient à la juridiction de renvoi de vérifier.
Sur les dépens
15 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens.
Par ces motifs, la Cour (septième chambre) dit pour droit:
1) Les articles 49 TFUE et 56 TFUE ainsi que les principes d’égalité de traitement et d’effectivité doivent être interprétés en ce sens qu’ils ne s’opposent pas à une législation nationale relative aux jeux de hasard, telle que celle en cause au principal, qui prévoit l’organisation d’un nouvel appel d’offres portant sur des concessions d’une durée inférieure à celle des concessions précédemment octroyées en raison d’une réorganisation du système au moyen d’un alignement temporel des échéances
des concessions.
2) Les articles 49 TFUE et 56 TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à une disposition nationale restrictive, telle que celle en cause au principal, qui impose au concessionnaire de jeux de hasard de céder à titre gratuit, lors de la cessation de l’activité du fait de l’expiration de la période de concession, l’usage des biens matériels et immatériels détenus en propriété et constituant le réseau de gestion et de collecte du jeu, pour autant que cette restriction aille
au-delà de ce qui est nécessaire à la réalisation de l’objectif effectivement poursuivi par cette disposition, ce qu’il revient à la juridiction de renvoi de vérifier.
Signatures
--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
* Langue de procédure: l’italien.