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14/01/2016 | CJUE | N°C-395/14

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Vodafone GmbH contre Bundesrepublik Deutschland., 14/01/2016, C-395/14


ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

14 janvier 2016 ( * )

«Renvoi préjudiciel — Cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques — Directive 2002/21/CE — Article 7, paragraphe 3 — Procédure de consolidation du marché intérieur des communications électroniques — Directive 2002/19/CE — Articles 8 et 13 — Opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché — Obligations imposées par les autorités réglementaires nationales — Contrôle des prix et obligations relatives a

u système de
comptabilisation des coûts — Autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile»

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ARRÊT DE LA COUR (troisième chambre)

14 janvier 2016 ( * )

«Renvoi préjudiciel — Cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques — Directive 2002/21/CE — Article 7, paragraphe 3 — Procédure de consolidation du marché intérieur des communications électroniques — Directive 2002/19/CE — Articles 8 et 13 — Opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché — Obligations imposées par les autorités réglementaires nationales — Contrôle des prix et obligations relatives au système de
comptabilisation des coûts — Autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile»

Dans l’affaire C‑395/14,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale, Allemagne), par décision du 25 juin 2014, parvenue à la Cour le 19 août 2014, dans la procédure

Vodafone GmbH

contre

Bundesrepublik Deutschland,

LA COUR (troisième chambre),

composée de M. M. Ilešič, président de la deuxième chambre, faisant fonction de président de la troisième chambre, Mme C. Toader, MM. E. Levits, E. Jarašiūnas (rapporteur) et C. G. Fernlund, juges,

avocat général: M. N. Wahl,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées:

— pour Vodafone GmbH, par Mes T. Tschentscher et D. Herrmann, Rechtsanwälte,

— pour la Commission européenne, par M. G. Braun et Mme L. Nicolae, en qualité d’agents,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 7, paragraphe 3, de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre») (JO L 108, p. 33, ci-après la «directive-cadre»).

2 Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Vodafone GmbH (ci-après «Vodafone») à la Bundesrepublik Deutschland (République fédérale d’Allemagne) au sujet d’une décision de l’Agence fédérale des réseaux (Bundesnetzagentur, ci-après l’«Agence») autorisant à titre provisoire les tarifs de terminaison d’appel mobile de Vodafone.

Le cadre juridique

Le droit de l’Union

La directive-cadre

3 La directive-cadre énonce, à son considérant 38:

4 L’article 1er de la directive-cadre détermine les objectifs et le champ d’application de celle-ci. Il prévoit, à son paragraphe 1:

«La présente directive crée un cadre harmonisé pour la réglementation des services de communications électroniques, des réseaux de communications électroniques et des ressources et services associés. Elle fixe les tâches incombant aux autorités réglementaires nationales [(ci-après les ‘ARN’)] et établit une série de procédures visant à garantir l’application harmonisée du cadre réglementaire dans l’ensemble de la Communauté.»

5 L’article 2, sous l), de la directive-cadre définit les «directives particulières» auxquelles la directive-cadre fait référence comme étant la directive 2002/20/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’autorisation de réseaux et de services de communications électroniques (directive «autorisation») (JO L 108, p. 21); la directive 2002/19/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux
ressources associées, ainsi qu’à leur interconnexion (directive «accès») (JO L 108, p. 7); la directive 2002/22/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, concernant le service universel et les droits des utilisateurs au regard des réseaux et services de communications électroniques (directive «service universel») (JO L 108, p. 51), ainsi que la directive 97/66/CE du Parlement européen et du Conseil, du 15 décembre 1997, concernant le traitement des données à caractère personnel et la
protection de la vie privée dans le secteur des télécommunications (JO 1998, L 24, p. 1).

6 L’article 6 de la directive-cadre, intitulé «Mécanisme de consultation et de transparence», prévoit, en substance, que, lorsque les ARN ont l’intention, en application de la directive-cadre ou des directives particulières, de prendre des mesures ayant des incidences importantes sur le marché pertinent, elles donnent aux parties intéressées l’occasion de présenter leurs observations sur le projet de mesures.

7 L’article 7 de la directive-cadre, intitulé «Consolidation du marché intérieur des communications électroniques», dispose:

«1.   Dans l’accomplissement des tâches qui leur sont assignées en vertu de la présente directive et des directives particulières, les [ARN] tiennent le plus grand compte des objectifs énoncés à l’article 8, y compris ceux qui touchent au fonctionnement du marché intérieur.

2.   Les [ARN] contribuent au développement du marché intérieur en coopérant entre elles et avec la Commission, de manière transparente, afin de veiller à l’application cohérente, dans tous les États membres, des dispositions de la présente directive et des directives particulières. [...]

3.   Outre la consultation visée à l’article 6, dans les cas où une [ARN] a l’intention de prendre une mesure:

a) qui relève des articles 15 ou 16 de la présente directive, des articles 5 ou 8 de la [directive ‘accès’] ou de l’article 16 de la [directive ‘service universel’] et,

b) qui aurait des incidences sur les échanges entre les États membres,

elle met en même temps à disposition de la Commission et des [ARN] des autres États membres le projet de mesure ainsi que les motifs sur lesquels elle est fondée [...] et en informe la Commission et les autres [ARN]. Les [ARN] et la Commission ne peuvent adresser des observations à l’[ARN] concernée que dans un délai d’un mois ou dans le délai visé à l’article 6, si celui-ci est plus long. Le délai d’un mois ne peut pas être prolongé.

[...]

5.   L’[ARN] concernée tient le plus grand compte des observations formulées par les autres [ARN] et par la Commission et, à l’exception des cas visés au paragraphe 4, elle peut adopter le projet de mesure final et, le cas échéant, le communiquer à la Commission.

[...]»

8 L’article 8 de la directive-cadre, intitulé «Objectifs généraux et principes réglementaires», énonce, à son paragraphe 3:

«Les [ARN] contribuent au développement du marché intérieur, notamment:

[...]

d) en coopérant entre elles ainsi qu’avec la Commission, de manière transparente, afin de veiller à l’élaboration de pratiques réglementaires cohérentes et à l’application cohérente de la présente directive et des directives particulières.»

9 L’article 14 de la directive-cadre, intitulé «Entreprises puissantes sur le marché», précise les critères permettant aux ARN de considérer qu’un opérateur donné dispose d’une puissance significative sur le marché.

10 L’article 16 de la directive-cadre, intitulé «Procédure d’analyse de marché», prévoit:

«[...]

2.   Lorsque, conformément aux articles 16, 17, 18 ou 19 de la [directive ‘service universel’] ou aux articles 7 ou 8 de la [directive ‘accès’], l’[ARN] est tenue de se prononcer sur l’imposition, le maintien, la modification, ou la suppression d’obligations à la charge des entreprises, elle détermine, sur la base de son analyse de marché visée au paragraphe 1 du présent article, si un marché pertinent est effectivement concurrentiel.

[...]

4.   Lorsqu’une [ARN] détermine qu’un marché pertinent n’est pas effectivement concurrentiel, elle identifie les entreprises puissantes sur ce marché conformément à l’article 14 et impose à ces entreprises les obligations réglementaires spécifiques appropriées visées au paragraphe 2 du présent article ou maintient ou modifie ces obligations si elles sont déjà appliquées.

[...]

6.   Les mesures prises conformément aux paragraphes 3, 4 et 5 sont soumises aux procédures prévues aux articles 6 et 7.»

11 L’article 19 de la directive-cadre, intitulé «Mesures d’harmonisation», dispose, à son paragraphe 1:

«Lorsque la Commission [...] adresse des recommandations aux États membres relatives à l’harmonisation de la mise en œuvre des dispositions de la présente directive et des directives particulières dans la poursuite des objectifs établis à l’article 8, les États membres veillent à ce que les [ARN] tiennent le plus grand compte de ces recommandations dans l’exercice de leurs tâches. Lorsqu’une [ARN] choisit de ne pas suivre une recommandation, elle en informe la Commission en communiquant la
motivation de sa position.»

La directive «accès»

12 La directive «accès» énonce, à ses considérants 13 et 20:

«(13) [...] Pour faire en sorte que, dans des circonstances similaires, les acteurs du marché soient traités de la même façon dans tous les États membres, la Commission devrait pouvoir veiller à l’application harmonisée des dispositions de la présente directive. Les [ARN] et les autorités nationales compétentes en ce qui concerne l’application de la législation en matière de concurrence devraient, le cas échéant, coordonner leurs actions pour faire en sorte que le remède le plus approprié soit
appliqué. [...]

[...]

(20) Un contrôle des prix peut se révéler nécessaire lorsque l’analyse d’un marché donné met en évidence un manque d’efficacité de la concurrence. Les [ARN] peuvent intervenir de manière relativement limitée, par exemple en imposant une obligation concernant la fixation de prix raisonnables pour la sélection de l’opérateur [...] ou de manière beaucoup plus contraignante, en obligeant, par exemple, les opérateurs à orienter les prix en fonction des coûts afin qu’ils soient entièrement justifiés
lorsque la concurrence n’est pas suffisamment vive pour éviter la tarification excessive. [...]»

13 L’article 1er de cette directive, intitulé «Champ d’application et objectif», prévoit, à son paragraphe 1:

«La présente directive, qui s’inscrit dans le cadre présenté dans la [directive-cadre], harmonise la manière dont les États membres réglementent l’accès aux réseaux de communications électroniques et aux ressources associées, ainsi que leur interconnexion. L’objectif consiste à établir, pour les relations entre fournisseurs de réseaux et de services, un cadre réglementaire qui favorisera l’instauration d’une concurrence durable et garantira l’interopérabilité des services de communications
électroniques tout en procurant des avantages aux consommateurs, et ce conformément aux principes du marché intérieur.»

14 L’article 2, sous a) et b), de ladite directive contient les définitions, respectivement, de la notion d’«accès» et de celle d’«interconnexion». Cette dernière vise «la liaison physique et logique des réseaux de communications publics utilisés par la même entreprise ou une entreprise différente, afin de permettre aux utilisateurs d’une entreprise de communiquer avec les utilisateurs de la même entreprise ou d’une autre, ou bien d’accéder aux services fournis par une autre entreprise. [...]
L’interconnexion constitue un type particulier d’accès mis en œuvre entre opérateurs de réseaux publics».

15 L’article 8 de la directive «accès», intitulé «Imposition, modification ou suppression des obligations», dispose:

«1.   Les États membres veillent à ce que les [ARN] soient habilitées à imposer les obligations visées aux articles 9 à 13.

2.   Lorsqu’à la suite d’une analyse du marché effectuée conformément à l’article 16 de la [directive-cadre] un opérateur est désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné, les [ARN] lui imposent les obligations énumérées aux articles 9 à 13 de la présente directive, selon le cas.

[...]

4.   Les obligations imposées conformément au présent article sont fondées sur la nature du problème constaté, proportionnées et justifiées au regard des objectifs énoncés à l’article 8 de la [directive-cadre]. Ces obligations ne peuvent être imposées qu’après la consultation prévue aux articles 6 et 7 de ladite directive.

[...]»

16 L’article 13 de la directive «accès», intitulé «Contrôle des prix et obligations relatives au système de comptabilisation des coûts», prévoit:

«1.   Les [ARN] peuvent, conformément aux dispositions de l’article 8, imposer des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès, lorsqu’une analyse du marché indique que l’opérateur concerné pourrait, en l’absence de concurrence efficace,
maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals. Les [ARN] tiennent compte des investissements réalisés par l’opérateur et lui permettent une rémunération raisonnable du capital adéquat engagé, compte tenu des risques encourus.

2.   Les [ARN] veillent à ce que tous les mécanismes de récupération des coûts ou les méthodologies de tarification qui seraient rendues obligatoires visent à promouvoir l’efficacité économique, à favoriser une concurrence durable et à optimiser les avantages pour le consommateur. À cet égard, les [ARN] peuvent également prendre en compte les prix en vigueur sur les marchés concurrentiels comparables.

3.   Lorsqu’une entreprise est soumise à une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts, c’est à elle qu’il incombe de prouver que les redevances sont déterminées en fonction des coûts, en tenant compte d’un retour sur investissements raisonnable. Afin de calculer les coûts de la fourniture d’une prestation efficace, les [ARN] peuvent utiliser des méthodes de comptabilisation des coûts distinctes de celles appliquées par l’entreprise. Les [ARN] peuvent demander à une entreprise de
justifier intégralement ses prix et, si nécessaire, en exiger l’adaptation.

[...]»

Le droit allemand

17 La loi sur les télécommunications (Telekommunikationsgesetz), du 22 juin 2004 (BGBl. 2004 I, p. 1190), telle que modifiée par la loi du 17 février 2010 (BGBl. 2010 I, p. 78, ci-après la «loi sur les télécommunications»), prévoit, à son article 12:

«1)   L’[Agence] donne aux parties intéressées la possibilité de présenter leurs observations, dans le délai imparti, sur le projet des conclusions visées aux articles 10 et 11. [...]

2)   Si l’article 10, paragraphe 3, et l’article 11, paragraphe 3, prévoient une transmission conformément au présent article, la procédure suivante est applicable:

1. Lorsque la procédure définie au paragraphe 1 a été menée à bien, l’[Agence] met le projet des conclusions visées aux articles 10 et 11, accompagné des motifs sur lesquels elles sont fondées, à la disposition de la Commission ainsi que, en même temps, des [ARN] des autres États membres et en informe la Commission ainsi que les autres [ARN]. L’[Agence] ne peut pas adopter les conclusions visées aux articles 10 et 11 avant l’expiration d’un délai d’un mois ou d’un délai plus long fixé
conformément au paragraphe 1.

2. L’[Agence] doit tenir le plus grand compte des observations présentées par la Commission et par les autres [ARN] conformément au point 1. Elle communique le projet final à la Commission.

[...]

4. Dans des circonstances exceptionnelles, lorsque l’[Agence] considère qu’il est urgent d’agir, par dérogation à la procédure définie au paragraphe 1 et aux points 1 à 3, afin de préserver la concurrence et de protéger les intérêts des utilisateurs, elle peut adopter immédiatement des mesures provisoires proportionnées. Elle communique sans délai ces mesures, dûment motivées, à la Commission et aux autres [ARN]. Toute décision de l’[Agence] de rendre ces mesures permanentes ou de prolonger la
période pendant laquelle elles sont applicables est soumise aux dispositions du paragraphe 1 et des points 1 à 3.»

18 L’article 13, paragraphe 1, de cette loi dispose:

«Lorsque, à la suite d’une analyse du marché effectuée conformément à l’article 11, l’[Agence] impose, modifie, maintient ou révoque (décision de réglementation) des obligations au titre des articles [...], 30 [...], la procédure prévue à l’article 12, paragraphes 1 et 2, points 1, 2 et 4, est applicable mutatis mutandis, dès lors que la mesure a des incidences sur les échanges entre les États membres. [...]»

19 L’article 30, paragraphe 1, de ladite loi énonce:

«Sans préjudice des paragraphes qui suivent, les tarifs des prestations d’accès imposées conformément à l’article 21 à l’opérateur d’un réseau public de télécommunications qui dispose d’une puissance significative sur le marché sont soumis à l’autorisation de l’[Agence] dans les conditions prévues à l’article 31. [...]»

20 Aux termes de l’article 31, paragraphe 1, de la loi sur les télécommunications:

«Les tarifs qui sont soumis à autorisation conformément aux dispositions de l’article 30, paragraphe 1, première phrase, [...] peuvent être autorisés lorsqu’ils n’excèdent pas les coûts de la fourniture d’une prestation efficace. [...]»

21 L’article 35, paragraphe 3, de cette loi prévoit:

«L’autorisation est intégralement ou partiellement délivrée lorsque les tarifs sont conformes aux exigences des articles 28 et 31, dans les conditions prévues au paragraphe 2, et qu’il n’existe pas de motif de refus au sens de la deuxième ou troisième phrase. [...]»

Le litige au principal et la question préjudicielle

22 Vodafone est une société qui exploite des réseaux de télécommunications mobiles interconnectés à des réseaux d’autres opérateurs de télécommunications. Dans le cadre d’une procédure antérieure à celle ayant donné lieu au litige au principal, l’Agence a désigné Vodafone comme étant un opérateur disposant d’une puissance significative sur le marché de la téléphonie mobile et a soumis à autorisation ses tarifs de terminaison d’appel mobile.

23 Au mois de septembre 2010, Vodafone a sollicité une telle autorisation de tarifs auprès de l’Agence pour une période commençant à courir le 1er décembre 2010. Ayant l’intention d’initier, à cet égard, les procédures de consultation et de consolidation prévues, respectivement, aux articles 6 et 7 de la directive-cadre, l’Agence a, par décision du 30 novembre 2010, autorisé ces tarifs à titre provisoire. Lorsque lesdites procédures ont été clôturées, celle-ci, par décision du 24 février 2011, a
accordé à Vodafone une autorisation définitive desdits tarifs, avec effet rétroactif à compter du 1er décembre 2010 et valant jusqu’au 30 novembre 2012.

24 Vodafone a contesté la décision du 30 novembre 2010 devant le Verwaltungsgericht Köln (tribunal administratif de Cologne), au motif que celle-ci était dépourvue de base juridique, une procédure de consolidation ne devant, selon cette société, pas être suivie avant la délivrance d’une autorisation de tarifs. Par jugement du 19 septembre 2012, cette juridiction a, d’une part, rejeté la demande d’annulation introduite par Vodafone comme étant irrecevable, la décision attaquée étant devenue sans
objet, et, d’autre part, débouté Vodafone de sa demande subsidiaire visant à ce que l’illégalité de ladite décision soit constatée.

25 Vodafone a formé un recours en «Revision» contre ce jugement devant le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale), dans le cadre duquel elle conclut à ce que l’illégalité de la décision du 30 novembre 2010 soit constatée. Cette juridiction précise, à cet égard, que, même si la décision du 30 novembre 2010 est devenue sans objet, Vodafone conserve un intérêt légitime à ce que son illégalité soit constatée, dans la mesure où il est possible que, à l’avenir, l’Agence agisse de nouveau
dans le sens contesté par cette société.

26 Sur le fond, le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale) indique que, au regard du seul droit allemand, le recours introduit par Vodafone devrait être accueilli. La loi sur les télécommunications ne prévoyant pas qu’une procédure de consolidation peut être engagée préalablement à la délivrance d’une autorisation de tarifs, il ne serait pas possible de délivrer une autorisation provisoire destinée à pallier les inconvénients liés à l’adoption tardive d’une décision définitive
résultant du suivi de cette procédure.

27 Cette juridiction s’interroge toutefois sur la conformité du droit allemand au droit de l’Union. Elle relève qu’il pourrait, certes, être soutenu, au regard des articles 12, paragraphe 2, 31, paragraphe 1, première phrase, et 35, paragraphe 3, première phrase, de la loi sur les télécommunications ainsi que des articles 7, paragraphe 3, de la directive-cadre et 8 et 13 de la directive «accès», que l’Agence est tenue de suivre la procédure de consolidation avant de délivrer une autorisation de
tarifs dans la mesure où une telle autorisation peut relever de la notion d’«obligations liées à la récupération des coûts et aux contrôles des prix, y compris les obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts», visée à l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès», et a généralement des incidences sur les échanges entre les États membres.

28 Ladite juridiction estime, toutefois, qu’un doute subsiste quant à l’exactitude d’une telle interprétation. Il n’existerait, dans le droit de l’Union, aucune disposition détaillée concernant la façon de procéder dans le cadre d’un contrôle des prix ou les critères à appliquer en matière de tarifs. L’article 13 de la directive «accès» permettrait ainsi que l’organisation de la réglementation des tarifs soit, en substance, régie par le droit national. En l’occurrence, la loi sur les
télécommunications aurait établi une procédure en deux étapes, dont seule la première, portant sur l’obligation abstraite de refléter les coûts, et non sur la fixation des tarifs concrets, relèverait du champ d’application de cet article. Le paragraphe 3 de celui-ci pourrait d’ailleurs, selon la juridiction de renvoi, être compris en ce sens que le droit de l’Union établit également un système échelonné de réglementation des tarifs. De plus, une immixtion directe de la Commission dans la fixation
des tarifs concrets pourrait être considérée comme étant contraire aux principes de subsidiarité et de proportionnalité.

29 C’est dans ces conditions que le Bundesverwaltungsgericht (Cour administrative fédérale) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

Sur la question préjudicielle

30 Par sa question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 7, paragraphe 3, de la directive-cadre doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une ARN a imposé à un opérateur qui a été désigné comme disposant d’une puissance significative sur le marché de fournir des services de terminaison d’appel mobile et a soumis à autorisation les tarifs de ces services à l’issue de la procédure prévue par cette disposition, cette ARN est de nouveau tenue de mettre en œuvre cette procédure
avant chaque délivrance, à cet opérateur, d’une autorisation de ces tarifs.

31 Ladite disposition prévoit que, dans les cas où une ARN a l’intention de prendre une mesure qui, d’une part, relève notamment de l’article 16 de la directive-cadre ou de l’article 8 de la directive «accès» et, d’autre part, aurait des incidences sur les échanges entre les États membres, elle met à la disposition de la Commission et des autres ARN le projet de mesure ainsi que les motifs sur lesquels cette mesure est fondée et en informe la Commission et les autres ARN.

32 Selon l’article 16, paragraphe 2, de la directive-cadre, lorsque, conformément, en particulier, à l’article 8 de la directive «accès», l’ARN est tenue de se prononcer sur l’imposition, le maintien, la modification ou la suppression d’obligations à la charge des entreprises, elle détermine, sur la base de son analyse de marché visée au paragraphe 1 de cet article 16, si un marché pertinent est effectivement concurrentiel. Selon le paragraphe 4 dudit article 16, lorsqu’une ARN détermine qu’un
marché pertinent n’est pas effectivement concurrentiel, elle identifie les entreprises puissantes sur ce marché et impose à ces entreprises les obligations réglementaires spécifiques visées notamment à l’article 8 de la directive «accès», ou maintient ou modifie ces obligations si celles-ci sont déjà appliquées. Le paragraphe 6 du même article 16 précise que les mesures prises conformément au paragraphe 4 de celui-ci sont notamment soumises à la procédure de consolidation prévue à l’article 7 de
la directive-cadre.

33 Quant à l’article 8 de la directive «accès», il prévoit, à son paragraphe 2, que, lorsque, à la suite d’une analyse du marché effectuée conformément à l’article 16 de la directive-cadre, un opérateur est désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné, les ARN lui imposent les obligations énumérées aux articles 9 à 13 de cette directive «accès», selon le cas. Cet article 8 prévoit, en outre, à son paragraphe 4, que les obligations imposées conformément audit article 8 ne
peuvent être imposées qu’après la consultation prévue notamment à l’article 7 de la directive-cadre.

34 L’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès» énonce, quant à lui, que les ARN peuvent, conformément aux dispositions de l’article 8 de la même directive, imposer des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès, lorsqu’une analyse du marché
indique que l’opérateur concerné pourrait, en l’absence de concurrence efficace, maintenir des prix à un niveau excessivement élevé, ou comprimer les prix, au détriment des utilisateurs finals.

35 Il découle ainsi d’une lecture combinée des articles 7, paragraphe 3, et 16, paragraphe 4, de la directive-cadre ainsi que des articles 8, paragraphe 2, et 13, paragraphe 1, de la directive «accès» que, lorsqu’une ARN envisage d’adopter à l’encontre d’un opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché donné une mesure qui impose «des obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l’orientation des prix en
fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès» et qui aurait des incidences sur les échanges entre les États membres, cette ARN est tenue de mettre en œuvre la procédure de consolidation prévue à cet article 7, paragraphe 3.

36 Il est sans pertinence à cet égard que cette procédure de consolidation ait déjà été suivie antérieurement, dans le cadre d’une procédure d’analyse de marché effectuée conformément à l’article 16 de la directive-cadre et à l’issue de laquelle des obligations peuvent déjà avoir été imposées à l’opérateur concerné, étant donné que, en prévoyant, au paragraphe 2 de cet article 16, que l’ARN peut être tenue de se prononcer «sur l’imposition, le maintien, la modification, ou la suppression» des
obligations prévues, notamment, à l’article 8 de la directive «accès» et mises à la charge d’une entreprise, la directive-cadre envisage expressément qu’une même obligation puisse faire l’objet de plusieurs procédures de consolidation, conduisant, selon le cas, à l’imposition, au maintien, à la modification ou à la suppression de cette obligation.

37 En l’occurrence, il n’est pas contesté que, à la date d’adoption de la décision du 30 novembre 2010, Vodafone était désignée par l’Agence comme étant un opérateur disposant d’une puissance significative sur le marché de la téléphonie mobile, au sens de l’article 14 de la directive-cadre. Afin de répondre à la question posée, il reste donc à déterminer si la délivrance d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile, telle que celle en cause au principal, relève des mesures visées à
l’article 7, paragraphe 3, sous a), de la directive-cadre et, le cas échéant, si la délivrance d’une telle autorisation est susceptible d’avoir des incidences sur les échanges entre les États membres au sens de l’article 7, paragraphe 3, sous b), de la directive-cadre.

38 S’agissant, en premier lieu, du point de savoir si la délivrance d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile relève des mesures visées à l’article 7, paragraphe 3, sous a), de la directive-cadre, il y a lieu de rappeler que celui-ci doit être lu en combinaison avec les articles 8, paragraphe 2, et 13, paragraphe 1, de la directive «accès» et qu’il résulte d’une lecture combinée de ces dispositions qu’une telle autorisation entre dans le champ d’application de cet article 7,
paragraphe 3, sous a), si elle relève des «obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès», visées à l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès».

39 À cet égard, il convient de constater que, si les notions d’«accès» et d’«interconnexion» sont définies à l’article 2, respectivement sous a) et b), de la directive «accès», aucune disposition de cette dernière ne précise ce qu’il faut entendre par la notion d’«obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix, y compris les obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts et les obligations concernant les systèmes de comptabilisation des coûts, pour la
fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès» figurant audit article 13, paragraphe 1.

40 Il convient donc, afin d’interpréter cette notion, de tenir compte non seulement de ses termes, mais également de son contexte et des objectifs poursuivis par la réglementation dont elle fait partie [voir, en ce sens, arrêts The Number (UK) et Conduit Enterprises, C‑16/10, EU:C:2011:92, point 28, ainsi que KPN, C‑85/14, EU:C:2015:610, point 33].

41 S’agissant du libellé de celle-ci, il importe de relever, tout d’abord, qu’il résulte de l’expression «y compris», qui est utilisée à l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès», que «les obligations concernant l’orientation des prix en fonction des coûts» ne constituent que des exemples des «obligations liées à la récupération des coûts et au contrôle des prix» visées par cette disposition. Partant, il convient d’écarter d’emblée l’argumentation de Vodafone selon laquelle la délivrance
d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile ne relèverait pas des mesures visées à l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès» et, par suite, à l’article 8, paragraphe 2, de cette même directive et à l’article 7, paragraphe 3, sous a), de la directive-cadre, au motif qu’il ne s’agirait pas d’une «obligation concernant l’orientation des prix en fonction des coûts».

42 Ensuite, force est de constater que la notion d’«obligations liées [...] au contrôle des prix» a une acception large et que, eu égard au sens habituel des termes qui y sont employés, elle englobe nécessairement une mesure telle que la délivrance d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile, étant donné qu’une telle mesure visant un opérateur donné, préalable à la mise en œuvre des tarifs concernés, est, par nature, une mesure de contrôle des prix.

43 Enfin, il ressort aussi du libellé de l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès» que les «obligations liées [...] au contrôle des prix» qu’il vise doivent concerner «la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou d’accès». Or, d’une part, l’interconnexion est définie à l’article 2, sous b), de cette directive comme consistant, en particulier, en «la liaison physique et logique des réseaux de communications publics utilisés par la même entreprise ou une entreprise différente,
afin de permettre aux utilisateurs d’une entreprise de communiquer avec les utilisateurs de la même entreprise ou d’une autre». D’autre part, selon les observations présentées par la Commission à la Cour, la terminaison d’appel mobile est le service qui permet de faire aboutir un appel téléphonique à l’abonné demandé. Il s’ensuit nécessairement que la délivrance d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile concerne «la fourniture de types particuliers d’interconnexion et/ou
d’accès», au sens de l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès».

44 Il découle ainsi du libellé de cette dernière disposition que la délivrance d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile relève des obligations liées au contrôle des prix visées à ladite disposition que les ARN sont, en vertu de l’article 8, paragraphe 2, de la directive «accès», fondées à imposer à un opérateur disposant d’une puissance significative sur le marché de la téléphone mobile, et qui, si elles sont envisagées et dans la mesure où elles auraient des incidences sur les
échanges entre les États membres, ne peuvent être imposées, conformément au paragraphe 4 de cet article 8, qu’à l’issue de la procédure prévue à l’article 7 de la directive-cadre.

45 Cette interprétation du paragraphe 1 de l’article 13 de la directive «accès» est confortée par le contexte dans lequel cette disposition s’insère. En effet, outre l’intitulé dudit article 13, qui vise expressément le «contrôle des prix», le paragraphe 2 de celui-ci fait notamment référence aux «méthodologies de tarification qui seraient rendues obligatoires» par une ARN. De plus, le considérant 20 de la directive «accès» énonce, en substance, que, dans le cadre d’un contrôle des prix, «[l]es
[ARN] peuvent intervenir de manière relativement limitée [...] ou de manière beaucoup plus contraignante [...]». En ce sens également, le paragraphe 4 de l’article 16 de la directive-cadre, lu en combinaison avec le paragraphe 2 de cet article, fait référence aux «obligations réglementaires spécifiques appropriées» visées notamment à l’article 8 de la directive «accès».

46 Tant la directive «accès» que la directive-cadre envisagent donc que des obligations précises liées au contrôle des prix, aussi spécifiques que la délivrance d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile, puissent relever des obligations visées à l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès» que les ARN peuvent imposer aux opérateurs disposant d’une puissance significative sur un marché.

47 L’interprétation exposée au point 44 du présent arrêt est, de plus, corroborée par les objectifs poursuivis, d’une part, par la directive «accès», qui vise notamment, selon son article 1er, paragraphe 1, à harmoniser la manière dont les États membres réglementent l’accès aux réseaux de communications électroniques ainsi que leur interconnexion. À cet égard, cette directive rappelle, à son considérant 13, que, pour faire en sorte que, dans des circonstances similaires, les acteurs du marché soient
traités de la même façon dans tous les États membres, la Commission devrait pouvoir veiller à l’application harmonisée des dispositions de ladite directive et les ARN devraient coordonner leurs actions pour faire en sorte que le remède le plus approprié soit appliqué.

48 D’autre part, et de manière analogue, l’article 1er, paragraphe 1, de la directive-cadre précise que celle-ci a notamment pour objectif d’établir une série de procédures visant à garantir l’application harmonisée du cadre réglementaire dans l’ensemble de l’Union européenne. Ainsi, il ressort du paragraphe 2 de l’article 7 de la directive-cadre que l’objet de la procédure prévue au paragraphe 3 de cet article, d’ailleurs intitulé «Consolidation du marché intérieur des communications
électroniques», est de permettre aux ARN de contribuer au développement du marché intérieur en coopérant entre elles et avec la Commission, de manière transparente, afin de veiller à l’application cohérente, dans tous les États membres, des dispositions de cette directive et des directives particulières. Cette obligation de coopération transparente des ARN et de la Commission est, en outre, expressément imposée aux ARN par l’article 8, paragraphe 3, sous d), de la directive-cadre, qui ajoute que
cette coopération doit également viser à l’élaboration de pratiques réglementaires cohérentes.

49 Or, selon les indications de l’Agence exposées par la juridiction de renvoi et les observations déposées par la Commission devant la Cour, la délivrance d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile, telle que celle en cause au principal, vise à mettre en œuvre des obligations abstraites définies dans une décision antérieure et a, par conséquent, une incidence concrète et directe sur le marché, pour les entreprises réglementées, mais également pour les demandeurs d’accès qui
s’adressent à ces dernières, en termes de coûts et de compétitivité. De plus, l’application effective de telles obligations abstraites, que la délivrance d’une telle autorisation permettrait, est, ainsi que le fait observer la Commission, susceptible d’aboutir à des différences considérables dans le traitement réglementaire des tarifs de terminaison d’appel mobile.

50 Dans ces circonstances, l’ensemble des objectifs d’harmonisation, de coordination, de coopération et de transparence, visant à aboutir à la consolidation du marché intérieur des communications électroniques, poursuivis par la directive-cadre et la directive «accès», serait compromis si la délivrance d’une telle autorisation devait échapper à l’application de la procédure prévue à l’article 7, paragraphe 3, de la directive-cadre.

51 Il convient également de relever que ni le libellé des dispositions en cause, ni l’économie générale de la directive «accès» ou de la directive-cadre, ni les objectifs qu’elles poursuivent ne permettent de considérer que le législateur de l’Union entendait, comme le suggèrent Vodafone et la juridiction de renvoi, faire une distinction, parmi les obligations liées au contrôle des prix visées à l’article 13, paragraphe 1, de la directive «accès», entre des mesures qui seraient dites «de base»,
«fondamentales» ou «de réglementation», qui devraient être soumises à la procédure prévue à l’article 7, paragraphe 3, de la directive-cadre, et des mesures qui seraient dites «d’exécution» de ces premières, qui pourraient, elles, échapper à ladite procédure.

52 À cet égard, la Cour a déjà jugé que c’est non pas la nature de la procédure en cours devant l’ARN, mais l’objet même de la mesure que l’ARN a l’intention de prendre ainsi que les incidences qu’elle est susceptible d’avoir sur les échanges entre les États membres qui sont déterminants afin d’apprécier si cette mesure relève de la procédure prévue à l’article 7, paragraphe 3, de la directive-cadre (voir, en ce sens, arrêt Prezes Urzędu Komunikacji Elektronicznej et Telefonia Dialog, C‑3/14,
EU:C:2015:232, point 34).

53 De plus, outre le fait qu’une telle distinction serait susceptible de compromettre les objectifs poursuivis par la directive-cadre et la directive «accès» rappelés aux points 47 et 48 du présent arrêt, dans la mesure où elle pourrait aboutir à un traitement réglementaire différent de situations similaires, aucun argument au soutien de cette distinction ne saurait être tiré du paragraphe 3 de l’article 13 de la directive «accès», dès lors qu’il en résulte de manière univoque que cette disposition
ne vise que les cas dans lesquels une entreprise a été soumise à une obligation d’orientation des prix en fonction des coûts, obligation qui, ainsi que cela a été constaté au point 41 du présent arrêt, ne constitue qu’un exemple des obligations visées au paragraphe 1 de cet article.

54 Par ailleurs, il importe de constater que l’interprétation exposée au point 44 du présent arrêt ne saurait être considérée comme étant contraire aux principes de subsidiarité et de proportionnalité au motif qu’elle impliquerait, selon la juridiction de renvoi, une «immixtion directe de la Commission dans la fixation des tarifs concrets», dès lors qu’il est manifeste que ni la procédure en cause ni cette interprétation n’ont pour effet d’accorder à la Commission un tel pouvoir de fixer d’autorité
les tarifs des services de communications électroniques.

55 S’agissant, en second lieu, du point de savoir si la délivrance d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile aurait des incidences sur les échanges entre les États membres au sens de l’article 7, paragraphe 3, sous b), de la directive-cadre, il convient de rappeler que, selon la jurisprudence de la Cour, une mesure envisagée par une ARN a une telle incidence au sens de cette disposition si elle est susceptible d’exercer, autrement que d’une manière insignifiante, une influence
directe ou indirecte, actuelle ou potentielle, sur ces échanges (voir, en ce sens, arrêt Prezes Urzędu Komunikacji Elektronicznej et Telefonia Dialog, C‑3/14, EU:C:2015:232, points 49 à 54 et 59). Le considérant 38 de la directive-cadre précise, en outre, que les mesures pouvant avoir une incidence sur les échanges entre les États membres englobent, entre autres choses, les mesures touchant les prix à la consommation dans d’autres États membres.

56 En l’occurrence, il ressort de la position de l’Agence telle qu’elle est présentée dans la demande de décision préjudicielle et des observations déposées par la Commission devant la Cour que les tarifs de terminaison d’appel mobile correspondent aux prix que d’autres entreprises, y compris des entreprises d’autres États membres, doivent payer à l’opérateur du réseau de téléphonie mobile appelé pour faire aboutir les appels sur ce réseau et que ces tarifs ont une incidence sur les prix que les
utilisateurs d’autres États membres doivent acquitter lorsqu’ils appellent des clients de l’opérateur concerné dans un État membre donné, ces tarifs de terminaison d’appel mobile étant répercutés sur les tarifs d’appels de l’utilisateur final.

57 Dans de telles conditions, qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, il convient, au regard de ce qui a été a rappelé au point 55 du présent arrêt, de constater que la délivrance d’une autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile aurait des incidences sur les échanges entre les États membres au sens de l’article 7, paragraphe 3, sous b), de la directive-cadre.

58 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il convient de répondre à la question posée que l’article 7, paragraphe 3, de la directive-cadre doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une ARN a imposé à un opérateur qui a été désigné comme disposant d’une puissance significative sur le marché de fournir des services de terminaison d’appel mobile et a soumis à autorisation les tarifs de ces services à l’issue de la procédure prévue par cette disposition, cette ARN est de nouveau tenue
de mettre en œuvre cette procédure avant chaque délivrance, à cet opérateur, d’une autorisation de ces tarifs, lorsque cette dernière autorisation est susceptible d’avoir des incidences sur les échanges entre les États membres au sens de cette disposition.

Sur les dépens

59 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (troisième chambre) dit pour droit:

  L’article 7, paragraphe 3, de la directive 2002/21/CE du Parlement européen et du Conseil, du 7 mars 2002, relative à un cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques (directive «cadre»), doit être interprété en ce sens que, lorsqu’une autorité réglementaire nationale a imposé à un opérateur qui a été désigné comme disposant d’une puissance significative sur le marché de fournir des services de terminaison d’appel mobile et a soumis à autorisation les
tarifs de ces services à l’issue de la procédure prévue par cette disposition, cette autorité réglementaire nationale est de nouveau tenue de mettre en œuvre cette procédure avant chaque délivrance, à cet opérateur, d’une autorisation de ces tarifs, lorsque cette dernière autorisation est susceptible d’avoir des incidences sur les échanges entre les États membres au sens de cette disposition.

  Signatures

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( * )   Langue de procédure: l’allemand.


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : C-395/14
Date de la décision : 14/01/2016
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Bundesverwaltungsgericht.

Renvoi préjudiciel – Cadre réglementaire commun pour les réseaux et services de communications électroniques – Directive 2002/21/CE – Article 7, paragraphe 3 – Procédure de consolidation du marché intérieur des communications électroniques – Directive 2002/19/CE – Articles 8 et 13 – Opérateur désigné comme disposant d’une puissance significative sur un marché – Obligations imposées par les autorités réglementaires nationales – Contrôle des prix et obligations relatives au système de comptabilisation des coûts – Autorisation de tarifs de terminaison d’appel mobile.

Télécommunications

Rapprochement des législations


Parties
Demandeurs : Vodafone GmbH
Défendeurs : Bundesrepublik Deutschland.

Composition du Tribunal
Avocat général : Wahl
Rapporteur ?: Jarašiūnas

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2016:9

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