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28/09/2015 | CJUE | N°F-73/14

CJUE | CJUE, Ordonnance du Tribunal de la fonction publique, Christiana Kriscak contre Office européen de police (Europol)., 28/09/2015, F-73/14


ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

28 septembre 2015 ( * )

«Fonction publique — Personnel d’Europol — Convention Europol — Statut du personnel d’Europol — Annexe 1 du statut du personnel d’Europol — Liste des postes indiqués en caractères gras ne pouvant être occupés que par une personne recrutée auprès des services compétents au sens de l’article 2, paragraphe 4, de la convention Europol — Postes restreints — Décision Europol — Postes ne pouvant être occupés que par une personn

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décision Europol — Applicat...

ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)

28 septembre 2015 ( * )

«Fonction publique — Personnel d’Europol — Convention Europol — Statut du personnel d’Europol — Annexe 1 du statut du personnel d’Europol — Liste des postes indiqués en caractères gras ne pouvant être occupés que par une personne recrutée auprès des services compétents au sens de l’article 2, paragraphe 4, de la convention Europol — Postes restreints — Décision Europol — Postes ne pouvant être occupés que par une personne recrutée auprès des autorités compétentes au sens de l’article 3 de la
décision Europol — Application du RAA aux agents d’Europol — Non-renouvellement d’un contrat d’agent temporaire à durée déterminée — Refus d’accorder un contrat d’agent temporaire à durée indéterminée — Recours en annulation — Recours indemnitaire»

Dans l’affaire F‑73/14,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE,

Christiana Kriscak, ancien agent temporaire de l’Office européen de police, demeurant à La Haye (Pays-Bas), représentée par Me M. Velardo, avocat,

partie requérante,

contre

Office européen de police (Europol), représenté par MM. D. Neumann et J. Arnould, en qualité d’agents, assistés de Me C. Falmagne, avocat,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (deuxième chambre),

composé de MM. K. Bradley, président, H. Kreppel et Mme M. I. Rofes i Pujol (rapporteur), juges,

greffier : Mme W. Hakenberg,

rend la présente

Ordonnance

1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 24 juillet 2014, Mme Kriscak demande, notamment, l’annulation de la décision implicite de l’Office européen de police (Europol) portant rejet de sa demande de renouveler pour une durée indéterminée son contrat d’agent temporaire à durée déterminée venant à expiration le 30 novembre 2013.

Cadre juridique

2 Le statut du personnel d’Europol, adopté le 3 décembre 1998 par le Conseil de l’Union européenne (JO 1999, C 26, p. 23) en application de l’article 30, paragraphe 3, de la convention établie sur la base de l’article K. 3 du traité sur l’Union européenne portant création d’un Office européen de police (convention Europol), dans sa version modifiée par l’acte du Conseil du 15 mars 2001, modifiant le statut du personnel d’Europol (JO C 112, p. 1, ci-après le « statut du personnel d’Europol »),
dispose à l’article 2, paragraphe 1 :

« Est considéré comme agent d’Europol, au sens du […] statut [du personnel d’Europol], l’agent engagé en vue d’occuper un emploi de la liste figurant à l’annexe 1, à l’exception des emplois signalés comme devant être pourvus par des agents locaux.

Parmi ces emplois, on détermine ceux qui peuvent être occupés uniquement par des agents recrutés au sein des [organismes publics existant dans les États membres, dans la mesure où ils sont compétents conformément à la législation nationale pour la prévention et la lutte contre la criminalité,] et ceux qui peuvent être occupés également par d’autres agents.

Les agents recrutés pour un emploi qui peut être occupé uniquement par des agents recrutés au sein des [organismes publics existant dans les États membres, dans la mesure où ils sont compétents conformément à la législation nationale pour la prévention et la lutte contre la criminalité,] ne peuvent se voir offrir qu’un contrat temporaire pour cet emploi, conformément à l’article 6. »

3 L’article 6 du statut du personnel d’Europol se lisait comme suit :

« Tous les agents d’Europol sont engagés initialement pour une durée déterminée comprise entre un et quatre ans. Le premier contrat peut être renouvelé dans les conditions suivantes :

— pour une durée maximale de six ans, en plus de celle du premier contrat, dans le cas des agents affectés à un emploi qui peut être occupé uniquement par des agents recrutés au sein des [organismes publics existant dans les États membres, dans la mesure où ils sont compétents conformément à la législation nationale pour la prévention et la lutte contre la criminalité],

— pour une durée maximale de six ans, en plus de celle du premier contrat, dans le cas des agents soumis aux dispositions nationales en matière de détachement, de congé spécial ou de mise à disposition, affectés à un emploi qui n’est pas limité aux agents recrutés au sein des [organismes publics existant dans les États membres, dans la mesure où ils sont compétents conformément à la législation nationale pour la prévention et la lutte contre la criminalité],

— pour une durée maximale de huit ans, en plus de celle du premier contrat, dans tous les autres cas.

Seuls les agents visés aux deuxième et troisième tirets peuvent être engagés pour une durée indéterminée après avoir rempli de manière satisfaisante deux contrats à durée déterminée.

Le conseil d’administration d’Europol devra donner son accord chaque année au cas où le directeur d’Europol se proposerait d’accorder des contrats à durée indéterminée. Le conseil d’administration peut limiter le nombre total de contrats de cette nature pouvant être accordés. »

4 L’annexe 1 du statut du personnel d’Europol, intitulée « Emplois auprès d’Europol », énumère, au paragraphe 1, la liste des emplois d’Europol, parmi lesquels figurent notamment, dans la catégorie des emplois d’assistants, celui d’assistant analyste et, dans la catégorie des emplois d’administrateurs, celui d’administrateur chargé de tâches d’analyse. Ces deux emplois sont indiqués en caractères gras. Il est également prévu que cette liste peut être modifiée par décision du conseil d’administration
d’Europol prise à l’unanimité.

5 Les paragraphes 2 et 4 de l’annexe 1 du statut du personnel d’Europol font référence aux emplois qui ne peuvent être occupés que par des personnes recrutées auprès des services compétents, au sens de l’article 2, paragraphe 4, de la convention Europol, c’est-à-dire auprès d’organismes publics existant dans les États membres, dans la mesure où ils sont compétents conformément à la législation nationale pour la prévention et la lutte contre la criminalité (ci-après les « postes restreints »). Ces
paragraphes disposent :

« 2.   Les [postes restreints] ne peuvent être occupés que par des personnes recrutées au sein des services nationaux compétents, conformément aux articles 2 et 6 du statut [du personnel d’Europol]. Par services nationaux compétents, on entend tous les organismes publics existant dans les États membres, dans la mesure où ils sont compétents conformément à la législation nationale pour la prévention et la lutte contre la criminalité. L’État membre concerné fait savoir à Europol s’il considère un
candidat à un [poste restreint] comme étant employé par l’un des services nationaux compétents.

[…]

4.   Si, lors de l’établissement du tableau des effectifs et du budget, le conseil d’administration [d’Europol] décide qu’un [poste restreint] devrait faire l’objet d’un recrutement ouvert à tous, [ce poste restreint] peut être pourvu par concours général. Le contrat offert ne peut alors être que temporaire, avec possibilité de renouvellement dans les conditions prévues à l’article 6 du statut [du personnel d’Europol]. »

6 Par décision 2006/C 311/01 du Conseil, du 4 décembre 2006, modifiant le statut du personnel d’Europol (JO C 311, p. 1), l’article 6 du statut du personnel d’Europol a été remplacé, à partir du 5 décembre 2006, par le texte suivant (ci-après la « nouvelle version de l’article 6 du statut du personnel d’Europol ») :

« Tous les agents d’Europol, qu’ils soient affectés à un [poste restreint] ou qu’ils soient affectés à un [poste ne figurant pas sur la liste des postes restreints], sont initialement engagés pour une durée déterminée comprise entre un et cinq ans.

Le premier contrat peut être renouvelé. La durée totale des contrats à durée déterminée, en ce compris les éventuels renouvellements, ne peut excéder neuf ans.

Seul le personnel affecté à un [poste non restreint] peut être engagé pour une durée indéterminée après avoir rempli de manière hautement satisfaisante deux contrats à durée déterminée pendant une période de service de six ans au moins.

Le conseil d’administration d’Europol donne son accord chaque année dans le cas où le directeur d’Europol se proposerait d’accorder des contrats à durée indéterminée. Le conseil d’administration peut fixer un plafond pour le nombre total de contrats de cette nature pouvant être accordés. »

7 La décision 2009/371/JAI du Conseil, du 6 avril 2009, portant création d[’Europol] (JO L 121, p. 37, ci-après la « décision Europol ») a remplacé la convention Europol. En vertu de l’article 63 de la décision Europol, sauf disposition contraire de la décision Europol, toutes les mesures d’application de la convention Europol ont été abrogées avec effet à la date d’application de la décision Europol, à savoir, sauf pour les exceptions visées à l’article 64 de la décision Europol, le 1er janvier
2010.

8 Aux termes du paragraphe 1 de l’article 39, intitulé « Personnel », de la décision Europol, le directeur d’Europol, les directeurs adjoints d’Europol et le personnel d’Europol engagés après la date d’application de la décision Europol sont soumis au statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le « statut ») et au régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le « RAA ») ainsi qu’aux modalités d’application du statut et du RAA adoptées conjointement par les
institutions de l’Union européenne.

9 Selon l’article 3, intitulé « Objectif », de la décision Europol :

« Europol a pour objectif de soutenir et de renforcer l’action des autorités compétentes des États membres et leur coopération mutuelle dans la prévention de la criminalité organisée, du terrorisme et d’autres formes graves de criminalité affectant deux États membres ou plus et dans la lutte contre ces phénomènes.

Les ‘autorités compétentes’ au sens de la présente décision sont tous les organismes publics existant dans les États membres qui sont compétents, conformément à la législation nationale, en matière de prévention de la criminalité et de lutte contre celle-ci. »

10 L’article 39, paragraphe 4, de la décision Europol est formulé comme suit :

« Le personnel d’Europol se compose d’agents temporaires et/ou contractuels. Le conseil d’administration d’Europol donne son accord chaque année dans le cas où le directeur se proposerait d’accorder des contrats à durée indéterminée. Le conseil d’administration décide quels sont les postes temporaires prévus au tableau des effectifs qui [doivent figurer sur la liste des postes restreints]. Le personnel recruté pour occuper ces postes [restreints] est composé d’agents temporaires aux termes de
l’article 2, [sous] a), du RAA et ne peut se voir octroyer que des contrats à durée déterminée renouvelables une fois pour une période déterminée. »

11 L’article 57 de la décision Europol, concernant les dispositions transitoires en matière de personnel, dispose ainsi :

« 1.   Par dérogation à l’article 39 [de la décision Europol], tous les contrats d’engagement conclus par Europol, tel qu’institué par la convention Europol, qui sont en vigueur à la date d’application de la [décision Europol], sont honorés jusqu’à leur expiration et ne peuvent être renouvelés sur la base du statut du personnel d’Europol […] après la date d’application de la [décision Europol].

2.   Tous les membres du personnel [d’Europol] sous contrat [d’engagement] au sens du paragraphe 1 se voient offrir la possibilité de conclure un contrat d’agent temporaire au titre de l’article 2, [sous] a), du RAA aux différents grades établis dans le tableau des effectifs, ou un contrat d’agent contractuel au titre de l’article 3 bis du RAA.

Après l’entrée en vigueur de la [décision Europol] et dans un délai de deux ans à compter de sa date d’application, l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement ouvre à cette fin une procédure interne de sélection, limitée au personnel ayant un contrat [d’engagement] avec Europol à la date d’application de la [décision Europol], de manière à contrôler les aptitudes, l’efficacité et l’intégrité des personnes à engager.

En fonction du type et du niveau des fonctions exercées, un lauréat se voit proposer un contrat d’agent temporaire ou un contrat d’agent contractuel pour une durée correspondant au moins à la période restant à courir en vertu du contrat [d’engagement] conclu avant la date d’application de la [décision Europol].

3.   Si un deuxième contrat à durée déterminée avait été conclu par Europol avant la date d’application de la [décision Europol] et que le membre du personnel a accepté un contrat d’agent temporaire ou d’agent contractuel dans les conditions énoncées au paragraphe 2, troisième alinéa, tout renouvellement ultérieur ne peut être conclu que pour une durée indéterminée, conformément aux dispositions de l’article 39, paragraphe 4[, de la décision Europol].

[…] »

12 Le 17 novembre 2009, le conseil d’administration d’Europol a adopté les dispositions générales d’exécution de la procédure de sélection interne à mettre en œuvre en application de l’article 57 de la décision Europol.

13 Par décision du 30 décembre 2009, le conseil d’administration d’Europol a adopté la liste des postes restreints (ci-après la « décision du conseil d’administration d’Europol du 30 décembre 2009 »). Figuraient notamment sur la liste des postes restreints les postes de « spécialistes/analystes » et les postes d’« assistants analystes » de toutes les unités du département « Opérations » d’Europol.

14 L’article 2, paragraphe 1, de la décision du conseil d’administration d’Europol du 30 décembre 2009 dispose :

« Sous réserve de l’[a]rticle 3, les postes restreints ne peuvent être occupés que par du personnel recruté auprès des autorités compétentes des États [m]embres [au sens de l’article 3 de la décision Europol] conformément à l’article 39[, paragraphe 4,] de la [d]écision Europol […] »

15 Selon l’article 3 de la décision du conseil d’administration d’Europol du 30 décembre 2009 :

« 1.   Le [c]onseil d’[a]dministration peut, sur demande motivée du [d]irecteur, décider au cas par cas qu’un poste restreint donné sera exceptionnellement pourvu par une procédure de recrutement sans restriction quant aux candidats.

2.   Dans un tel cas, le candidat retenu peut uniquement se voir offrir un contrat à durée déterminée renouvelable une fois pour une durée déterminée conformément à l’[a]rticle 39[, paragraphe 4,] de la [d]écision Europol. »

16 Le 29 septembre 2011, le conseil d’administration d’Europol a approuvé une proposition de texte, concernant les contrats à durée indéterminée (ci-après les « C. D. I. »), établie par les services d’Europol établissant les critères et la procédure à suivre pour octroyer ces contrats (ci-après la « réglementation relative à l’octroi de C. D. I. »). Au point 3 de la réglementation relative à l’octroi de C. D. I., intitulé « P[rincipes directeurs pour octroyer des C. D. I.] », il est prévu que des
C. D. I. peuvent uniquement être accordés aux membres du personnel occupant des postes ne figurant pas sur la liste des postes restreints. Le point 5 de la réglementation relative à l’octroi de C. D. I., intitulé « P[rocédure] », prévoit une procédure interne selon laquelle un panel constitué par le directeur d’Europol examinera au cas par cas s’il est dans l’intérêt du service d’accorder un C. D. I. à l’agent concerné éligible à se voir offrir un tel contrat. Ce point dispose également que la
décision d’octroyer ou non un tel contrat revient au directeur d’Europol, après avis du panel.

17 Le 7 février 2013, le conseil d’administration d’Europol a adopté une décision remplaçant la décision du conseil d’administration du 30 décembre 2009 et établissant une nouvelle liste des postes restreints (ci-après la « décision du conseil d’administration d’Europol du 7 février 2013 »). Sur la nouvelle liste des postes restreints figurent toujours les postes de « spécialistes/analystes » et les postes d’« assistants analystes » de toutes les unités du département « Opérations » d’Europol.

18 L’article 3 de la décision du conseil d’administration d’Europol du 7 février 2013 dispose :

« 1.   Le [c]onseil d’[a]dministration peut, sur demande motivée du [d]irecteur, décider au cas par cas qu’un poste restreint donné sera exceptionnellement pourvu par une procédure de recrutement sans restriction quant aux candidats.

2.   Dans un tel cas, le candidat retenu peut uniquement se voir offrir un contrat à durée déterminée renouvelable une fois pour une durée déterminée conformément à l’[a]rticle 39[, paragraphe 4,] de la [d]écision Europol. »

Faits à l’origine du litige

19 La requérante est entrée au service d’Europol le 1er décembre 2002 en vertu d’un contrat de quatre ans (ci-après le « contrat de 2002 ») sur un poste d’assistant analyste au sein de l’unité « Analyse » du département « Formes graves de criminalité ». Le contrat mentionnait expressément que ce poste figurait sur la liste des postes restreints de l’annexe 1 du statut du personnel d’Europol.

20 Le 3 mai 2004, suite à son succès à une procédure interne de sélection, la requérante a signé un nouveau contrat aux termes duquel elle était engagée pour une durée de quatre ans, à partir du 1er mai 2004, pour occuper un poste d’administrateur chargé de tâches d’analyse au sein de la même unité que précédemment (ci-après le « contrat de 2004 »). Le contrat mentionnait expressément que le nouveau poste de la requérante figurait sur la liste des postes restreints de l’annexe 1 du statut du
personnel d’Europol.

21 Le 16 avril 2008, les parties ont signé un nouveau contrat intitulé « Deuxième contrat de travail » (ci-après le « contrat de 2008 ») qui mentionnait les deux précédents contrats et stipulait que, conformément à la nouvelle version de l’article 6 du statut du personnel d’Europol, « ce premier contrat » (« such a first contract ») pouvait être renouvelé jusqu’à une durée maximale totale, y compris la durée dudit « premier contrat », de neuf ans. Il était précisé que la requérante continuait à être
engagée par Europol sur le poste restreint qu’elle occupait au moment de la signature de ce « deuxième contrat de travail » et que le « deuxième contrat de travail » entrerait en vigueur le 1er mai 2008 pour expirer le 30 novembre 2011.

22 Par lettre du 9 février 2010, le directeur d’Europol a informé la requérante des conséquences sur sa relation contractuelle avec Europol de l’entrée en vigueur de la décision Europol et de ce que, conformément à l’article 57, paragraphe 1, de la décision Europol, son contrat en cours expirerait le 30 novembre 2011, sans possibilité de renouvellement sous le régime du statut du personnel d’Europol. Le directeur d’Europol a également indiqué à la requérante que, si elle participait avec succès à la
procédure de sélection interne qui allait être ouverte conformément à l’article 57, paragraphe 2, de la décision Europol et aux dispositions générales d’exécution de la procédure de sélection interne à mettre en œuvre en application dudit article, adoptées le 17 novembre 2009, elle aurait la possibilité de conclure un contrat d’agent temporaire au sens de l’article 2, sous a), du RAA d’une durée de deux ans à compter de la fin de son contrat actuel, c’est-à-dire jusqu’au 30 novembre 2013. Par la
même lettre, le directeur d’Europol a invité la requérante à lui faire part de son intention de participer ou non à cette procédure de sélection interne.

23 Suite à une réponse affirmative de la requérante quant à sa participation à la procédure de sélection interne mentionnée au point précédent, l’avis de vacance concernant le poste d’analyste au sein de l’unité « Réseaux de criminalité organisée » du département « Opérations » qu’elle occupait alors a été publié le 1er mars 2010. Cet avis de vacance précisait, au titre des critères d’éligibilité, que la procédure de sélection interne était ouverte aux personnes employées par Europol au 1er janvier
2010 sur la base d’un contrat conclu sous le régime de la convention Europol qui étaient membres d’une « autorité compétente d’un État membre au sens de l’[a]rticle 3 de la [décision Europol] ». L’avis de vacance indiquait aussi que le candidat retenu se verrait offrir un contrat d’agent temporaire, de grade AD 7, pour une durée correspondant à la durée restant à courir de son contrat alors en vigueur, augmentée de deux ans.

24 La requérante a participé avec succès à la procédure de sélection interne organisée pour l’attribution du poste qu’elle occupait. Par lettre du 12 avril 2010, le directeur d’Europol a offert à la requérante de conclure un contrat d’agent temporaire pour une durée de deux ans à compter du 1er décembre 2011. Il était précisé dans ledit courrier que, dans le cas où la requérante déciderait d’accepter l’offre ainsi faite, son contrat en cours serait résilié d’un commun accord des parties, ses droits
cumulés jusqu’alors seraient liquidés conformément aux dispositions du statut d’Europol et son emploi ultérieur en tant qu’agent temporaire serait régi par le RAA et par ses dispositions générales d’exécution. La requérante a accepté cette offre et, le 28 avril 2010, les parties ont conclu un contrat d’agent temporaire au sens de l’article 2, sous a), du RAA, portant sur un poste d’analyste, de grade AD 7, pour la période allant du 1er juin 2010 au 30 novembre 2013, avec possibilité de
renouvellement sous conditions (ci-après le « contrat d’agent temporaire de 2010 »).

25 Par note de son conseil du 29 juillet 2013 adressée au directeur d’Europol, reçue le 1er août suivant, la requérante a introduit une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut visant, principalement, à ce qu’Europol renouvelle le contrat d’agent temporaire de 2010 pour une durée indéterminée.

26 Par courrier du 7 août 2013, la requérante a été invitée à se préparer à quitter Europol à l’expiration de son contrat, le 30 novembre 2013. À cette date, l’engagement de la requérante a pris fin.

27 Aucune réponse n’étant parvenue à la requérante, dans le délai statutaire de quatre mois, à sa demande de renouvellement du contrat d’agent temporaire de 2010 pour une durée indéterminée, cette demande, reçue comme dit plus haut par Europol le 1er août 2013, a fait l’objet, le 1er décembre 2013, d’une décision implicite de rejet.

28 Par note du 6 décembre 2013 adressée au directeur d’Europol, reçue le 9 décembre suivant, la requérante a introduit une réclamation, conformément à l’article 90, paragraphe 2, du statut, contre la décision implicite de rejet de sa demande de renouvellement, pour une durée indéterminée, du contrat d’agent temporaire de 2010.

29 Par décision du directeur d’Europol du 14 avril 2014, la réclamation a été rejetée (ci-après la « décision portant rejet de la réclamation »). Dans cette décision, le directeur d’Europol a relevé, notamment, que, par le contrat de 2002, la requérante avait été recrutée pour une durée déterminée afin d’occuper un poste restreint ; que, par le contrat de 2004, elle avait été engagée pour occuper un autre poste restreint pour une durée de quatre ans et que ce contrat avait été renouvelé par le
contrat de 2008 ; que, conformément à l’article 57, paragraphe 2, de la décision Europol, la requérante s’était vu offrir la possibilité de signer un contrat d’agent temporaire, au sens de l’article 2, sous a), du RAA, à durée déterminée pour un poste restreint ; que les critères fixés dans la réglementation relative à l’octroi de C. D. I. manquaient de pertinence en l’espèce et que l’interdiction de lui offrir un nouveau contrat découlait de la lecture combinée de l’article 39, paragraphe 4, de
la décision Europol, qui exclut la possibilité d’octroyer des C. D. I. aux agents recrutés pour occuper des postes restreints, et de l’article 57, paragraphe 3, de la décision Europol, selon lequel, si un deuxième contrat à durée déterminée (ci-après le « C. D. D. ») a été conclu avant la date d’application de la décision Europol et que l’agent concerné a signé un nouveau contrat régi par le RAA, ce contrat n’est renouvelable que pour une durée indéterminée.

Conclusions des parties

30 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

— annuler la décision implicite de rejet de la « demande […] introduite le 6 décembre 2013 » au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, visant à obtenir le renouvellement pour une durée indéterminée de son contrat d’agent temporaire de 2010, ainsi que la décision portant rejet de la réclamation ;

— condamner Europol à lui payer la somme de 1545124 euros, à titre de dommages et intérêts pour le préjudice matériel subi ;

— condamner Europol à lui payer la somme de 40000 euros, à titre de dommages et intérêts pour le préjudice moral subi ;

— condamner Europol aux dépens.

31 Europol conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

— rejeter le recours comme irrecevable ;

— à titre subsidiaire, rejeter le recours comme non fondé ;

— condamner la requérante aux dépens.

En droit

1. Sur la décision du Tribunal de statuer par voie d’ordonnance motivée

32 En vertu de l’article 81 du règlement de procédure, lorsqu’un recours est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut à tout moment décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, sans poursuivre la procédure.

33 En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de l’article 81 du règlement de procédure, de statuer par voie d’ordonnance motivée sans poursuivre la procédure.

2. Sur la recevabilité du recours

34 Europol conteste la recevabilité du recours en soutenant que le contrat d’agent temporaire de 2010 excluait tout renouvellement ultérieur et que, faute d’avoir introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre ledit contrat dans le délai statutaire de trois mois à compter de sa signature, ce contrat était devenu définitif. Par conséquent, en l’absence d’un fait nouveau et substantiel, la requérante ne saurait, en saisissant Europol d’une demande au sens de
l’article 90, paragraphe 1, du statut, faire renaître, à son profit, un droit de recours contre le contrat d’agent temporaire de 2010. Par suite, la réclamation de la requérante du 6 décembre 2013 serait irrecevable et il en irait de même de la requête.

35 Selon une jurisprudence constante, le juge est en droit d’apprécier, suivant les circonstances de chaque espèce, si une bonne administration de la justice justifie de rejeter au fond des conclusions sans statuer préalablement sur un grief d’irrecevabilité (voir, en ce sens, arrêts du 8 avril 2008, Bordini/Commission, F‑134/06, EU:F:2008:40, point 56, et du 28 octobre 2010, Kay/Commission, F‑113/05, EU:F:2010:132, point 31, et la jurisprudence citée).

36 Dans les circonstances de l’espèce et dans un souci d’économie de la procédure, le Tribunal estime qu’il n’y a pas lieu d’examiner la recevabilité du recours dans son ensemble, dès lors que celui-ci doit en tout état de cause être rejeté sur le fond.

3. Sur le fond

Sur l’objet du recours

37 La requérante demande l’annulation de la décision implicite de rejet de la « demande […] introduite le 6 décembre 2013 » au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, visant à obtenir le renouvellement pour une durée indéterminée de son contrat d’agent temporaire de 2010.

38 Le Tribunal constate toutefois que la demande de renouvellement pour une durée indéterminée du contrat d’agent temporaire de 2010 n’a pas été introduite le 6 décembre 2013, mais par note du conseil de la requérante du 29 juillet 2013 adressée au directeur d’Europol et reçue le 1er août suivant. Or, ainsi que mentionné au point 27 de la présente ordonnance, cette demande est restée sans réponse pendant plus de quatre mois, ce qui a donné naissance à une décision implicite de rejet. Dès lors, il y
a lieu de comprendre que la requérante demande l’annulation de la décision implicite de rejet de la demande, introduite par note du 29 juillet 2013 au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, visant à l’obtention d’un C. D. I.

39 La requérante demande également l’annulation de la décision portant rejet de sa réclamation. À cet égard, il convient de rappeler que les conclusions en annulation formellement dirigées contre le rejet d’une réclamation ont pour effet de saisir le Tribunal de l’acte contre lequel la réclamation a été présentée, lorsqu’elles sont, comme telles, dépourvues de contenu autonome (voir, en ce sens, arrêts du 17 janvier 1989, Vainker/Parlement, 293/87, EU:C:1989:8, point 8, et du 6 avril 2006, Camós
Grau/Commission, T‑309/03, EU:T:2006:110, point 43).

40 En l’espèce, ainsi qu’il ressort du point 29 ci-dessus, la décision portant rejet de la réclamation contient une motivation qui faisait évidemment défaut dans la décision implicite de rejet contre laquelle la réclamation était dirigée. Compte tenu du caractère évolutif de la procédure précontentieuse, c’est la motivation figurant dans la décision de rejet de la réclamation qui doit être prise en considération pour l’examen de la légalité de l’acte initial faisant grief, cette motivation étant
censée compléter ledit acte (voir, en ce sens, arrêt du 9 décembre 2009, Commission/Birkhoff, T‑377/08 P, EU:T:2009:485, points 58 et 59, et la jurisprudence citée). Pour autant, c’est bien la légalité de l’acte initial faisant grief qui est examinée, et ce au regard des motifs contenus dans la décision de rejet de la réclamation. En l’espèce, les conclusions en annulation dirigées contre la décision de rejet de la réclamation étant dépourvues de contenu autonome, le recours doit être regardé
comme formellement dirigé contre la décision implicite d’Europol du 1er décembre 2013 portant rejet de la demande de renouvellement pour une durée indéterminée du contrat d’agent temporaire de 2010 de la requérante, telle que complétée par la décision de rejet de la réclamation (ci-après la « décision attaquée »).

Sur les conclusions en annulation

41 Au soutien de son recours en annulation, la requérante soulève quatre moyens, tirés, le premier, de la violation de l’obligation de motivation, le deuxième, de la violation des formes substantielles en raison d’un vice de compétence, le troisième, de l’erreur manifeste d’appréciation ainsi que de la violation du devoir de sollicitude et du principe d’égalité de traitement et, le quatrième, de la violation des droits de la défense.

Sur le premier moyen, tiré de la violation de l’obligation de motivation

– Arguments des parties

42 La requérante fait valoir qu’Europol a violé l’article 296 TFUE et l’article 25, deuxième alinéa, du statut en rejetant de manière implicite sa demande de renouveler le contrat d’agent temporaire de 2010. Selon la requérante, Europol aurait dû motiver un tel rejet, comme il l’a fait dans les affaires ayant donné lieu aux arrêts du 25 juin 2014, Rihn/Europol (F‑67/13, EU:F:2014:167, ci-après l’« arrêt Rihn/Europol »), Molina Solano/Europol (F‑66/13, EU:F:2014:168, ci-après l’« arrêt Molina
Solano/Europol »), Maynard/Europol (F‑121/12, EU:F:2014:169), Ruff/Europol (F‑1/13, EU:F:2014:170), Sumberaz Sotte-Wedemeijer/Europol (F‑119/12, EU:F:2014:171) et Coutureau/Europol (F‑120/12, EU:F:2014:172), notamment pour qu’elle puisse comprendre si, dans son cas, la procédure interne en matière de renouvellement des contrats d’agent temporaire adoptée par le conseil d’administration d’Europol et mentionnée dans lesdits arrêts avait été suivie. Europol aurait également dû éclaircir les raisons
pour lesquelles, par dérogation à la règle selon laquelle les postes restreints ne peuvent être occupés que par du personnel recruté auprès des autorités compétentes des États membres au sens de l’article 3 de la décision Europol, il avait permis à la requérante d’occuper pendant onze ans un poste restreint, alors qu’elle n’appartient à aucune administration nationale, et avait, à l’inverse, omis d’appliquer une telle dérogation pour faire droit à sa demande de renouvellement en lui accordant un
C. D. I.

43 La requérante ajoute que la motivation contenue dans la décision portant rejet de la réclamation est tardive et lacunaire. En effet, dans cette décision, Europol non seulement ne ferait pas référence à la procédure interne en matière de renouvellement des contrats d’agent temporaire mentionnée dans les arrêts cités au point précédent, mais n’aurait pas non plus précisé sur quelle base légale la décision attaquée avait été adoptée. La requérante souligne qu’Europol n’était pas en droit de
compléter la motivation au stade du recours, dans le mémoire en défense.

44 Europol conclut au rejet du premier moyen comme non fondé.

– Appréciation du Tribunal

45 Le Tribunal rappelle que, selon une jurisprudence constante, l’obligation de motiver toute décision faisant grief, prévue par l’article 25, deuxième alinéa, du statut, lequel ne constitue que la reprise dans le contexte spécifique des relations entre les institutions et leurs agents de l’obligation générale édictée à l’article 296 TFUE, a pour but de fournir à l’intéressé une indication suffisante pour savoir si la décision est bien fondée ou si elle est entachée d’un vice permettant d’en
contester la légalité et de permettre au juge de l’Union d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision attaquée (arrêt Molina Solano/Europol, point 63, et la jurisprudence citée).

46 S’agissant, comme en l’espèce, d’une décision de ne pas renouveler un contrat d’agent temporaire, il a plus précisément été jugé que, si l’administration n’est pas tenue de motiver sa décision de ne pas renouveler un contrat à la date d’expiration de celui-ci, elle est, en revanche, tenue de motiver la décision par laquelle elle rejette la demande d’un agent tendant à obtenir le renouvellement de son contrat, car elle constitue un acte faisant grief (arrêt du 27 novembre 2012, Sipos/OHMI,
F‑59/11, EU:F:2012:164, point 71, ci-après l’« arrêt Sipos/OHMI »).

47 Il est également de jurisprudence constante qu’une institution de l’Union peut remédier à un éventuel défaut de motivation par une motivation adéquate fournie au stade de la réponse à la réclamation, cette dernière motivation étant censée coïncider avec la motivation de la décision contre laquelle la réclamation a été dirigée (arrêt du 18 septembre 2003, Lebedef e.a./Commission, T‑221/02, EU:T:2003:239, point 62, et ordonnance du 20 novembre 2012, Marcuccio/Commission, T‑491/11 P, EU:T:2012:608,
point 24).

48 En l’espèce, dans la mesure où la décision attaquée a été adoptée de manière implicite, toute motivation faisait forcément défaut. Europol pouvait dès lors satisfaire à son obligation de motivation découlant de l’article 25 du statut et de l’article 296 TFUE en exposant les motifs de la décision attaquée dans la décision portant rejet de la réclamation.

49 Cette conclusion ne saurait être remise en cause ni par l’arrêt Sipos/OHMI, ni par l’arrêt du 26 février 2014, Diamantopoulos/SEAE (F‑53/13, EU:F:2014:22, ci-après l’« arrêt Diamantopoulos/SEAE »), invoqués par la requérante au soutien de sa thèse selon laquelle la motivation contenue dans la décision portant rejet de la réclamation serait tardive. En effet, d’une part, dans l’arrêt Sipos/OHMI, le juge de l’Union a précisé qu’une décision portant rejet d’une demande visant à obtenir le
renouvellement d’un contrat doit être motivée et a constaté que, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, tel était le cas puisque l’administration avait adopté dans le délai statutaire une décision explicite et motivée portant rejet de la demande introduite par le requérant afin d’obtenir un second renouvellement de son contrat d’agent temporaire. La thèse de la requérante ne trouve donc pas de soutien dans cet arrêt. D’autre part, dans l’arrêt Diamantopoulos/SEAE, le juge de l’Union a
certes jugé que la tardiveté de la motivation fournie au requérant présentait un degré de gravité justifiant l’annulation de la décision litigieuse, à savoir celle, par nature non motivée, de ne pas promouvoir le requérant, mais, dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, l’administration avait répondu explicitement à la réclamation du requérant seulement après l’introduction du recours et n’avait donc pas, comme en l’espèce, adopté de décision de rejet de la réclamation dans le délai prévu par
le statut.

50 Quant à l’étendue de l’obligation de motivation, il y a lieu de rappeler que la portée de celle-ci doit être appréciée en fonction des circonstances concrètes de l’espèce. Or, celles-ci comprennent, notamment, non seulement le contenu de l’acte attaqué, mais aussi l’intérêt que le destinataire peut avoir à recevoir des explications, ainsi que le contexte factuel et juridique dans lequel s’inscrit l’adoption de cet acte (arrêt Diamantopoulos/SEAE, point 20).

51 En l’espèce, le Tribunal constate que, dans la décision portant rejet de la réclamation, le directeur d’Europol répond à tous les arguments exposés par la requérante dans sa réclamation. En effet, il explique les raisons pour lesquelles il estime, contrairement à ce que soutenait la requérante dans sa réclamation, que le RAA n’était pas applicable aux contrats signés par la requérante avec Europol avant le 1er janvier 2010, date de l’entrée en vigueur de la décision Europol, et que la décision
Europol ne méconnaissait pas la directive 1999/70/CE du Conseil, du 28 juin 1999, concernant l’accord-cadre CES, UNICE et CEEP sur le travail à durée déterminée (JO L 175, p. 43).

52 Quant au grief, également soulevé dans la réclamation, tiré de la violation du droit d’être entendu en ce que la requérante n’aurait pas participé à la procédure liée à la classification de son poste en tant que poste restreint, le directeur d’Europol explique que c’est le Conseil, puis le conseil d’administration d’Europol qui ont décidé, avant le recrutement de la requérante et indépendamment de ses aptitudes, quels postes devaient être qualifiés de restreints.

53 De même, le Tribunal observe que, dans la décision portant rejet de la réclamation, le directeur d’Europol indique bel et bien, contrairement à ce que soutient la requérante, la base légale sur laquelle la décision attaquée a été prise, à savoir l’article 39, paragraphe 4, de la décision Europol, qui exclut la possibilité d’octroyer des C. D. I. aux agents recrutés pour occuper des postes restreints, et l’article 57, paragraphe 3, de la décision Europol, selon lequel, si un deuxième C. D. D. a
été conclu avant la date d’application de la décision Europol, en l’occurrence le 1er janvier 2010, et que l’agent concerné a signé après cette date un nouveau contrat régi par le RAA, ce contrat n’est renouvelable que pour une durée indéterminée. Le directeur d’Europol rappelle à cet égard que la requérante avait déjà conclu un deuxième C. D. D. avant l’entrée en vigueur de la décision Europol et que le contrat d’agent temporaire de 2010, régi par le RAA, avait été signé compte tenu de la
possibilité pour Europol de conclure un nouveau C. D. D. pour occuper un poste restreint au titre de l’article 57, paragraphe 2, de la décision Europol. Le directeur d’Europol conclut que la lecture combinée de l’article 39, paragraphe 4, et de l’article 57, paragraphe 3, de la décision Europol rendait impossible l’octroi d’un C. D. I. à la requérante.

54 Ensuite, le directeur d’Europol répond aux griefs, soulevés dans la réclamation, tirés de l’erreur manifeste d’appréciation et de la violation du devoir de sollicitude, en faisant valoir que l’argument de la requérante selon lequel son poste ne devrait pas être qualifié de poste restreint étant donné qu’elle n’est pas membre du personnel d’une quelconque autorité compétente d’un État membre au sens de l’article 3 de la décision Europol ne peut prospérer, car une telle qualification méconnaîtrait
l’annexe 1 du statut du personnel d’Europol et l’article 3 de la décision du conseil d’administration d’Europol du 30 décembre 2009 qui prévoient la possibilité de déroger à l’obligation de pourvoir un poste restreint par l’engagement d’un agent provenant d’une autorité compétente d’un État membre en recrutant, par procédure ouverte à tous, un agent n’appartenant pas à une telle autorité nationale. Le directeur d’Europol poursuit en affirmant que cette possibilité de dérogation ne permet
toutefois pas d’écarter l’interdiction de conclure un C. D. I. avec l’agent engagé pour occuper un poste restreint et affirme que, puisque la requérante occupait sous le contrat d’agent temporaire de 2010 un poste restreint, elle n’avait pas le droit de se voir offrir un C. D. I.

55 Dès lors, le Tribunal constate également que la décision portant rejet de la réclamation contient une réponse à l’interrogation de la requérante quant au motif pour lequel il n’a pas été possible de déroger à la règle selon laquelle il était interdit de lui offrir un C. D. I.

56 En outre, le Tribunal observe que la décision portant rejet de la réclamation expose que la réglementation relative à l’octroi de C. D. I. n’était pas applicable à la requérante au motif qu’elle occupait un poste restreint et n’avait dès lors pas le droit de se voir offrir un C. D. I. En conséquence, par la décision portant rejet de sa réclamation, la requérante a appris que la réglementation relative à l’octroi de C. D. I. n’a pas été appliquée et pour quelle raison.

57 Compte tenu de ce qui précède, le Tribunal estime que la décision attaquée est intervenue dans un contexte connu de la requérante et que, par les motifs contenus dans la décision portant rejet de la réclamation, cette dernière a été mise en mesure d’apprécier la légalité et le bien-fondé de la décision attaquée et de décider de l’opportunité ou non de la soumettre au contrôle juridictionnel prévu par l’article 91 du statut. De même, la motivation contenue dans la décision portant rejet de la
réclamation permet au Tribunal d’exercer son contrôle sur la légalité de la décision attaquée.

58 Par suite, le premier moyen doit être rejeté comme manifestement non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré de la violation des formes substantielles en raison d’un vice de compétence

– Arguments des parties

59 La requérante fait valoir qu’il ressort de l’arrêt Rihn/Europol que le contrat d’un agent temporaire peut être renouvelé pour une durée indéterminée seulement selon une procédure interne adoptée par le conseil d’administration d’Europol et suite à l’examen au cas par cas par un panel constitué ad hoc. Étant donné que la décision attaquée a été adoptée de manière implicite, et donc non motivée, et qu’Europol n’indiquerait pas dans la décision portant rejet de la réclamation avoir respecté cette
procédure interne, la requérante en conclut que, en l’espèce, Europol n’a pas suivi ladite procédure. Elle poursuit en affirmant que, dans la mesure où Europol a adopté la décision attaquée sans consultation préalable d’un panel constitué ad hoc, la décision attaquée est entachée d’un vice d’incompétence. Un tel vice constituerait une violation des formes substantielles entraînant l’annulation de la décision attaquée, car la réponse d’Europol à sa demande de renouveler le contrat d’agent
temporaire de 2010 aurait pu être différente de la décision attaquée si un tel panel avait été consulté.

60 Europol estime que le deuxième moyen est non fondé.

– Appréciation du Tribunal

61 Il ressort de l’arrêt Rihn/Europol que la procédure interne adoptée par le conseil d’administration d’Europol pour le renouvellement pour une durée indéterminée des contrats d’agent temporaire à laquelle fait référence la requérante n’est autre que la procédure interne contenue dans la réglementation relative à l’octroi de C. D. I.

62 À cet égard, le Tribunal observe qu’il ressort du libellé de la réglementation relative à l’octroi de C. D. I. que des C. D. I. pouvaient uniquement être octroyés à des agents qui occupaient des postes ne figurant pas sur la liste des postes restreints. Étant donné que le poste occupé par la requérante en vertu du contrat d’agent temporaire de 2010 était un poste restreint, ce qu’elle ne conteste pas, elle ne pouvait pas se voir offrir un C. D. I. C’est donc à bon droit qu’Europol n’a pas
constitué un panel pour examiner l’octroi éventuel à la requérante d’un C. D. I.

63 Ne peut être accueilli l’argument de la requérante selon lequel, si Europol peut déroger à la règle selon laquelle un poste restreint doit être occupé par une personne recrutée auprès des autorités compétentes des États membres au sens de l’article 3 de la décision Europol, il doit a fortiori pouvoir déroger à l’interdiction de conclure un C. D. I. avec un tel agent et aurait, de ce fait, dû suivre la réglementation relative à l’octroi de C. D. I. afin de répondre à sa demande de renouveler pour
une durée indéterminée le contrat d’agent temporaire de 2010.

64 En effet, l’article 3 de la décision du conseil d’administration du 7 février 2013, dont le libellé est par ailleurs identique à celui de l’article 3 de la décision du conseil d’administration du 30 décembre 2009, prévoit, au paragraphe 1, qu’un poste restreint donné peut exceptionnellement être pourvu par une procédure de recrutement sans restriction quant aux candidats et donc par une personne qui n’a pas été recrutée auprès des autorités compétentes des États membres au sens de l’article 3 de
la décision Europol. Le paragraphe 2 de l’article 3 de la décision du conseil d’administration du 7 février 2013 dispose toutefois que, dans un tel cas, le candidat retenu peut seulement se voir offrir un C. D. D., renouvelable une fois pour une durée également déterminée. Par conséquent, si la possibilité est ouverte au conseil d’administration d’Europol de déroger à l’obligation de pourvoir un poste restreint par l’engagement d’un agent recruté auprès d’une autorité compétente d’un État membre
au sens de l’article 3 de la décision Europol, il n’est pas pour autant prévu de déroger à l’interdiction de renouveler pour une durée indéterminée le C. D. D. conclu avec cet agent. Partant, Europol ne pouvait pas, sans violer l’article 3 de la décision du conseil d’administration du 7 février 2013, offrir un C. D. I. à la requérante.

65 À titre surabondant, le Tribunal relève que l’interdiction d’offrir un C. D. I. à un agent occupant un poste restreint existait déjà avant l’entrée en vigueur de la décision Europol et était applicable à la requérante dès son engagement en 2002. En effet, le paragraphe 4 de l’annexe 1 du statut du personnel d’Europol prévoyait la possibilité de pourvoir un poste restreint par concours général, mais il était précisé que le contrat ne pouvait être qu’à durée déterminée, avec possibilité de
renouvellement selon les conditions prévus à l’article 6 du statut du personnel d’Europol. Or, tant la version initiale que la nouvelle version de l’article 6 du statut du personnel d’Europol prévoyaient que seuls les agents affectés à un poste ne figurant pas sur la liste des postes restreints pourraient se voir offrir un C. D. I. Étant donné que sous les contrats de 2002, de 2004 et de 2008 la requérante a occupé des postes restreints, de tels contrats ne lui permettaient pas de se voir offrir
un C. D. I.

66 Au vu de tout ce qui précède, il convient de rejeter le deuxième moyen comme manifestement non fondé.

Sur le troisième moyen, tiré de l’erreur manifeste d’appréciation ainsi que de la violation du devoir de sollicitude et du principe d’égalité de traitement

– Arguments des parties

67 La requérante estime qu’Europol a violé son devoir de sollicitude en n’ayant pas adopté de manière explicite une décision sur sa demande de renouvellement du contrat d’agent temporaire de 2010. En effet, l’absence de décision explicite ne lui permettrait pas de savoir si Europol avait pris des mesures pour concilier les intérêts du service avec ses propres intérêts.

68 La requérante affirme être bien consciente du fait qu’Europol n’avait pas l’obligation légale de lui offrir un nouveau contrat, mais elle estime qu’Europol était tenu d’examiner une telle possibilité en la réaffectant éventuellement à un service différent. En ayant omis d’effectuer cet examen, Europol aurait uniquement pris en considération les intérêts de l’administration et non pas ceux de la requérante et aurait ainsi commis une erreur manifeste d’appréciation. Ce manque d’examen constituerait
également une violation du devoir de sollicitude, car il ressortirait de la directive 1999/70 que les institutions européennes, à l’instar des États membres, doivent préférer des contrats qui assurent au maximum la stabilité dans la durée de l’emploi, à savoir des C. D. I.

69 Enfin, la requérante estime qu’Europol a violé le principe d’égalité de traitement, car, s’agissant d’autres agents temporaires se trouvant dans une situation similaire, telle la requérante dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Molina Solano/Europol, Europol aurait bel et bien examiné la possibilité de les réaffecter à un poste différent.

70 Europol conclut au rejet du troisième moyen comme non fondé.

– Appréciation du Tribunal

71 En ce qui concerne le grief tiré de la violation du devoir de sollicitude du fait de ne pas avoir adopté une décision explicite sur la demande de renouvellement du contrat d’agent temporaire de 2010 introduite au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, il suffit d’observer que ladite disposition prévoit la possibilité pour l’administration de ne pas donner, dans le délai statutaire, de réponse explicite à une telle demande et l’intervention dans un tel cas d’une décision implicite, contre
laquelle une réclamation peut être introduite. Par conséquent, le simple fait qu’Europol n’a pas donné de réponse explicite dans le délai statutaire à la demande de renouvellement du contrat d’agent temporaire de 2010 ne constitue pas, en soi, une violation du devoir de sollicitude à l’égard de la requérante.

72 En ce qui concerne les griefs tirés de l’existence d’une erreur manifeste d’appréciation et de la violation du devoir de sollicitude du fait de ne pas avoir examiné la possibilité d’affecter la requérante à un autre poste, le Tribunal rappelle que l’administration jouit d’un large pouvoir d’appréciation en matière de renouvellement de contrats et que, dans ce contexte, le contrôle du juge se limite à la question de savoir si, eu égard aux voies et aux moyens qui ont pu conduire l’administration à
son appréciation, celle-ci s’est tenue dans des limites non critiquables et n’a pas usé de son pouvoir de manière manifestement erronée. En outre, il convient d’ajouter que le devoir de sollicitude implique notamment que, lorsqu’elle statue sur la situation d’un agent, et ce même dans le cadre de l’exercice d’un large pouvoir d’appréciation, l’autorité compétente prenne en considération l’ensemble des éléments susceptibles de déterminer sa décision ; il lui incombe, ce faisant, de tenir compte
non seulement de l’intérêt du service, mais aussi de celui du fonctionnaire ou de l’agent concerné. Compte tenu précisément de l’étendue du pouvoir d’appréciation dont disposent les institutions dans l’évaluation de l’intérêt du service, le contrôle du juge de l’Union doit se limiter à la question de savoir si l’autorité compétente s’est tenue dans des limites raisonnables et n’a pas usé de son pouvoir d’appréciation de manière erronée (arrêt Molina Solano/Europol, point 54).

73 À cet égard, le Tribunal observe qu’il ressort sans aucune ambiguïté de l’arrêt du 21 mai 2014, Commission/Macchia (T‑368/12 P, EU:T:2014:266, ci-après l’« arrêt Commission/Macchia »), que le respect du devoir de sollicitude ainsi que la notion d’intérêt du service n’obligent pas l’administration, avant de décider de ne pas renouveler un contrat d’agent temporaire, à examiner préalablement la possibilité de redéployer l’agent concerné sur un autre poste (arrêt Commission/Macchia, point 57).

74 Europol n’avait donc aucune obligation de rechercher, avant d’adopter la décision attaquée, s’il existait un autre poste sur lequel la requérante aurait pu être utilement engagée dans l’intérêt du service.

75 Cette conclusion n’est pas remise en cause par l’argument de la requérante, basé sur le point 37 de l’arrêt du 8 mars 2012, Huet (C‑251/11, EU:C:2012:133, ci-après l’« arrêt Huet »), et sur l’arrêt du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission (T‑325/09 P, EU:T:2011:506), selon lequel le fait qu’Europol n’ait même pas envisagé la possibilité de renouveler le contrat d’agent temporaire de 2010 ou de la réaffecter à un autre poste serait contraire aux principes énoncés dans la directive 1999/70,
puisque cette directive, que les institutions de l’Union devraient elles aussi respecter, viserait non seulement à éviter que celles-ci, dans les relations de travail avec leurs agents, utilisent de manière abusive des C. D. D., mais également à promouvoir la signature de contrats qui assurent au maximum la stabilité de l’emploi.

76 Il suffit, à cet égard, de constater, comme il l’a d’ailleurs fait au point 59 de l’arrêt Commission/Macchia, que, dans l’arrêt du 21 septembre 2011, Adjemian e.a./Commission (T‑325/09 P, EU:T:2011:506), le Tribunal de l’Union européenne a établi que l’interdiction de l’abus de droit fait partie des principes généraux du droit dont le juge doit assurer le respect, mais il n’a aucunement reconnu l’existence, en tant que principe général du droit, pour les agents temporaires ayant un C. D. D., d’un
droit à une stabilité d’emploi qui se traduirait par l’obligation, pour une institution, de vérifier, avant de décider de ne pas renouveler un contrat d’agent temporaire de cette catégorie, si ce dernier ne peut pas être redéployé sur un autre poste.

77 En ce qui concerne le point 37 de l’arrêt Huet invoqué par la requérante, le Tribunal relève que, à ce point de l’arrêt, la Cour de justice de l’Union européenne, dans le cadre de l’analyse de la clause 5, point 1, de l’accord-cadre sur le travail à durée déterminée, conclu le 18 mars 1999, qui figure en annexe de la directive 1999/70 et qui a pour objectif de prévenir l’utilisation abusive des C. D. D., s’est limitée à établir que la transformation d’un C. D. D. en un C. D. I. ne saurait être
considérée comme étrangère au champ d’application de l’accord-cadre en question, mais que la Cour n’a pas établi l’existence d’un droit, pour le personnel sous contrat, à une certaine continuité de l’emploi. Par conséquent, l’argument de la requérante ne trouve non plus d’appui dans l’arrêt Huet.

78 Il résulte de tout ce qui précède qu’Europol n’a pas commis d’erreur manifeste d’appréciation ni violé son devoir de sollicitude du fait de ne pas avoir envisagé la possibilité d’offrir un nouveau contrat à la requérante par le biais d’une affectation à un autre poste avant d’adopter la décision attaquée.

79 En ce qui concerne le grief tiré de la violation du principe d’égalité de traitement, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, le principe d’égalité de traitement interdit notamment que des situations comparables soient traitées de manière différente ou que des situations différentes soient traitées de manière égale, à moins que de tels traitements, différents ou égaux selon le cas, ne soient objectivement justifiés (voir, à titre d’exemple, arrêt du 28 avril 2009,
Balieu-Steinmetz et Noworyta/Parlement, F‑115/07, EU:F:2009:41, point 26).

80 En l’espèce, il ressort du point 18 de l’arrêt Molina Solano/Europol que la requérante dans ladite affaire avait un contrat d’agent temporaire qui, en vertu de l’article 57, paragraphe 3, de la décision Europol, pouvait seulement être renouvelé pour une durée indéterminée, après accord du conseil d’administration d’Europol et selon la procédure interne adoptée par celui-ci, à savoir la réglementation relative à l’octroi de C. D. I. Dans cette affaire, il s’agissait donc d’un agent qui n’occupait
pas un poste restreint et qui était, de ce fait, éligible au renouvellement de son contrat pour une durée indéterminée suivant la procédure établie dans la réglementation relative à l’octroi de C. D. I.

81 La requérante ne se trouvait donc pas, au regard d’un possible renouvellement de son contrat, dans une situation égale ou comparable à celle de l’agent d’Europol dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Molina Solano/Europol.

82 Par suite, le grief tiré de la méconnaissance du principe d’égalité de traitement n’est pas fondé.

83 Il résulte de tout ce qui précède que le troisième moyen doit être rejeté comme manifestement non fondé.

Sur le quatrième moyen, tiré de la violation des droits de la défense

– Arguments des parties

84 La requérante reproche à Europol d’avoir méconnu la procédure qui doit être suivie lorsque le contrat d’un agent temporaire arrive à échéance, car il ne lui aurait pas envoyé de lettre au sujet de la fin du contrat d’agent temporaire de 2010. Europol n’aurait non plus répondu de manière explicite à sa demande de renouvellement du contrat d’agent temporaire de 2010 pour une durée indéterminée introduite par la note du 29 juillet 2013. La décision attaquée serait dès lors intervenue sans que la
requérante n’ait eu l’opportunité d’être entendue. Ensuite, l’absence de motivation dans la décision implicite de rejet de sa demande de renouvellement du contrat d’agent temporaire de 2010 ne lui aurait pas permis de se défendre de manière appropriée lors de l’introduction du présent recours, car, même après l’adoption de la décision portant rejet de la réclamation, la base légale et le cadre factuel de la décision attaquée seraient restés très obscurs. Ses droits de la défense auraient ainsi
été méconnus.

85 Europol estime que le quatrième moyen doit être rejeté comme non fondé.

– Appréciation du Tribunal

86 Selon une jurisprudence constante, un fonctionnaire n’a aucun intérêt légitime à demander l’annulation, pour vice de forme, et en particulier pour non-respect du droit d’être entendu avant toute décision faisant grief, d’une décision dans le cas où l’administration ne dispose d’aucune marge d’appréciation et est tenue d’agir comme elle l’a fait. En pareille hypothèse de compétence liée de l’administration, l’annulation de la décision attaquée ne pourrait, une fois ce vice rectifié, que donner
lieu à l’intervention d’une décision identique, quant au fond, à la décision annulée (arrêt du 29 avril 2004, Parlement/Reynolds, C‑111/02 P, EU:C:2004:265, points 59 à 61).

87 En l’espèce, il est incontestable que l’article 39, paragraphe 4, de la décision Europol exclut la possibilité d’octroyer des C. D. I. aux agents recrutés pour occuper des postes restreints et que l’article 57, paragraphe 3, de la décision Europol dispose que, si un deuxième C. D. D. a été conclu avant la date d’application de la décision Europol, soit le 1er janvier 2010, et que l’agent concerné a signé, après cette date, un nouveau contrat régi par le RAA, ce contrat n’est renouvelable que pour
une durée indéterminée. Dans la présente affaire, le poste occupé par la requérante sous le contrat d’agent temporaire de 2010 était un poste restreint. De même, la requérante avait déjà conclu deux C. D. D. avant l’entrée en vigueur de la décision Europol, à savoir le contrat de 2004, puis le contrat de 2008. En outre, le contrat d’agent temporaire de 2010, régi par le RAA, avait été signé suite à la possibilité qu’Europol lui avait offerte, au titre de l’article 57, paragraphe 2, de la décision
Europol, de conclure un nouveau C. D. D. pour occuper un poste restreint. Il résulte de la lecture combinée de l’article 39, paragraphe 4, et de l’article 57, paragraphe 3, de la décision Europol qu’Europol ne pouvait pas faire droit à la demande de la requérante de lui octroyer un C. D. I., car l’octroi d’un tel contrat aurait été contraire à la réglementation applicable et dès lors contra legem.

88 Partant, dans la présente affaire, s’il est certes vrai que la décision attaquée a été adoptée sans que la requérante ait été entendue, ce qui constitue, en l’espèce, une violation des formes substantielles, il n’en demeure pas moins que, même si Europol avait respecté les droits de la défense de la requérante et l’avait entendue avant d’adopter ladite décision conformément à l’article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, il aurait été tenu d’adopter une décision
identique, quant au fond, à la décision attaquée dans la mesure où il se trouvait dans une situation de compétence liée.

89 Il y a donc lieu de rejeter le moyen tiré de la violation des droits de la défense comme inopérant.

90 Il ressort de tout ce qui précède qu’il convient de rejeter les conclusions en annulation dans leur ensemble comme manifestement non fondées.

Sur les conclusions indemnitaires

Arguments des parties

91 La requérante demande réparation du préjudice matériel prétendument subi suite à la perte de la rémunération qu’elle aurait perçue si elle était restée au service d’Europol. Elle demande également réparation du préjudice moral qu’elle estime avoir subi du fait qu’Europol n’a pas apprécié la possibilité de lui offrir un nouveau contrat avant d’adopter la décision attaquée.

92 Europol rétorque que les conclusions indemnitaires doivent être rejetées comme non fondées.

Appréciation du Tribunal

93 Il y a lieu de rappeler que, selon une jurisprudence constante en matière de fonction publique, les conclusions tendant à la réparation d’un préjudice doivent être rejetées dans la mesure où elles présentent un lien étroit avec les conclusions en annulation qui ont elles-mêmes été rejetées soit comme irrecevables soit comme non fondées (arrêts du 29 septembre 2009, Wenning/Europol, F‑114/07, EU:F:2009:130, point 210, et du 1er juillet 2010, Časta/Commission, F‑40/09, EU:F:2010:74, point 94).

94 En l’espèce, il existe un lien étroit entre les conclusions en annulation de la décision attaquée et les conclusions indemnitaires. Dans la mesure où l’examen des moyens présentés au soutien des conclusions en annulation n’a révélé aucune illégalité commise par Europol ni aucune faute de nature à engager sa responsabilité, les conclusions indemnitaires doivent être rejetées comme manifestement non fondées.

95 Au vu des considérations qui précèdent, le recours doit être rejeté dans son intégralité.

Sur les dépens

96 Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens.

97 En vertu de l’article 102, paragraphe 2, du même règlement, le Tribunal peut condamner la partie gagnante à supporter ses propres dépens et à prendre en charge les dépens exposés par l’autre partie si cela apparaît justifié en raison de son attitude, y compris avant l’introduction de l’instance. À cet égard, il a déjà été jugé que la mise des dépens à la charge de l’institution peut être justifiée par le manque de diligence de celle-ci lors de la procédure précontentieuse (ordonnance du 5 juillet
2011, Coedo Suárez/Conseil, F‑73/10, EU:F:2011:102, point 47).

98 En l’espèce, il résulte des motifs énoncés dans la présente ordonnance que la requérante a succombé en son recours. En outre, Europol a, dans ses conclusions, expressément demandé que la requérante soit condamnée aux dépens.

99 Toutefois, le Tribunal constate qu’Europol a manqué de diligence lors de la procédure précontentieuse : en effet, Europol a laissé s’écouler le délai de quatre mois, prévu à l’article 90, paragraphe 1, du statut, sans adopter une décision explicite de rejet de la demande de renouvellement du contrat d’agent temporaire de 2010 pour une durée indéterminée présentée par la requérante. En agissant de la sorte, Europol a privé la requérante d’une réponse motivée à cette demande. Or, si Europol avait
correctement mené la procédure précontentieuse et notifié dans le délai statutaire une réponse motivée à la demande de renouvellement susvisée que la requérante aurait pu ensuite contester par une réclamation, il ne saurait être exclu que la requérante se serait abstenue d’introduire le présent recours après avoir reçu la décision portant rejet de la réclamation. En l’absence de toute explication circonstanciée quant au manquement d’Europol de donner une réponse explicite à la demande susvisée,
il sera fait une juste appréciation des circonstances du litige, au regard de l’article 102, paragraphe 2, du règlement de procédure, en décidant qu’Europol est condamné à supporter ses propres dépens et à prendre en charge un tiers des dépens exposés par la requérante pour la procédure judiciaire dans des limites raisonnables.

  Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (deuxième chambre)

ordonne :

  1) Le recours est rejeté comme manifestement non fondé.

  2) L’Office européen de police supporte ses propres dépens et est condamné à supporter un tiers des dépens exposés par Mme Kriscak.

  3) Mme Kriscak supporte deux tiers de ses propres dépens.

  Fait à Luxembourg, le 28 septembre 2015.

Le greffier

W. Hakenberg
 
Le président

K. Bradley

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( * )   Langue de procédure : le français.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : F-73/14
Date de la décision : 28/09/2015
Type de recours : Recours en responsabilité - non fondé, Recours de fonctionnaires - non fondé

Analyses

 Fonction publique – Personnel d’Europol – Convention Europol – Statut du personnel d’Europol – Annexe 1 du statut du personnel d’Europol – Liste des postes indiqués en caractères gras ne pouvant être occupés que par une personne recrutée auprès des services compétents au sens de l’article 2, paragraphe 4, de la convention Europol – Postes restreints – Décision Europol – Postes ne pouvant être occupés que par une personne recrutée auprès des autorités compétentes au sens de l’article 3 de la décision Europol – Application du RAA aux agents d’Europol – Non-renouvellement d’un contrat d’agent temporaire à durée déterminée – Refus d’accorder un contrat d’agent temporaire à durée indéterminée – Recours en annulation – Recours indemnitaire .

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Christiana Kriscak
Défendeurs : Office européen de police (Europol).

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Rofes i Pujol

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:F:2015:111

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