ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
DE L’UNION EUROPÉENNE (deuxième chambre)
9 juin 2015 ( *1 )
«Fonction publique — Personnel du SEAE — Agent contractuel — Incidents de procédure — Exception d’irrecevabilité — Décision du SEAE — Recours dirigé en partie contre le SEAE et en partie contre la Commission — Irrecevabilité partielle»
Dans l’affaire F‑126/14,
ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,
Nicolas Henri Astier, ancien agent contractuel du Service européen pour l’action extérieure, demeurant à La Vacquerie‑et‑Saint‑Martin‑de‑Castries (France), représenté par Me M. Tallent, avocat,
partie requérante,
contre
Service européen pour l’action extérieure (SEAE), représenté par M. S. Marquardt et Mme M. Silva, en qualité d’agents,
et
Commission européenne, représentée par MM. J. Currall et G. Gattinara, en qualité d’agents,
parties défenderesses,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (deuxième chambre),
composé de MM. K. Bradley (rapporteur), président, H. Kreppel et Mme M. I. Rofes i Pujol, juges,
greffier : Mme W. Hakenberg,
rend la présente
Ordonnance
1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 30 octobre 2014, M. Astier a introduit le présent recours à l’encontre du Service européen pour l’action extérieure (SEAE) et de la Commission européenne tendant, en substance, à l’annulation de la décision du SEAE de fixer à 7960 euros le montant à lui rembourser pour le déménagement effectué de son lieu d’affectation à son lieu d’origine, au lieu du montant de 17940 euros demandé, et de soumettre ce remboursement à certaines conditions.
Faits à l’origine du litige
2 Le requérant, agent contractuel du groupe de fonctions IV, a été affecté à la délégation de l’Union européenne à Podgorica (Monténégro) (ci‑après la «délégation») du 1er novembre 2011 au 14 octobre 2013, date à laquelle son contrat a pris fin.
3 Le requérant indique dans sa requête avoir informé, le 17 juin 2013, le SEAE de son intention de ne pas solliciter le renouvellement de son contrat.
4 En vue du déménagement de ses effets personnels ainsi que d’une voiture de Podgorica vers La Vacquerie‑et‑Saint‑Martin‑de‑Castries (France), prévu pour les 26 et 27 septembre 2013, le requérant a soumis à l’administration de la délégation, le 17 septembre 2013, les offres de trois entreprises de déménagement françaises, dont la moins élevée était de 17940 euros.
5 À la demande de la délégation, le requérant a présenté, le 26 septembre 2013, un nouveau devis établi cette fois par une entreprise de déménagement monténégrine locale, pour un montant de 18528 euros.
6 Le 27 septembre 2013, le déménagement du requérant a été effectué par l’entreprise française ayant présenté l’offre de prix la moins élevée et, le 29 septembre suivant, le requérant a quitté le Monténégro avec son épouse.
7 Par lettre du 15 janvier 2014, le chef de la délégation a indiqué au requérant que seul un montant de 7960 euros lui serait remboursé pour son déménagement. Ce montant correspondait à une offre de prix soumise à la délégation par une entreprise de déménagement locale, sise à Podgorica.
8 Par courriel du 13 mars 2014, le chef de l’administration de la délégation a indiqué au requérant que le versement du montant fixé dans la lettre du 15 janvier 2014 était subordonné à la restitution des cartes d’exemption de la taxe sur la valeur ajoutée émises au nom du requérant et de son épouse, ainsi que de leurs plaques diplomatiques.
9 Par lettre du 12 avril 2014, le requérant a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci‑après le «statut») contre les décisions du 15 janvier 2014 et du 13 mars 2014. La réclamation était adressée à l’unité «Recours et suivi des cas» de la direction «Affaires juridiques, communication et relations avec les parties prenantes» de la direction générale «Ressources humaines et sécurité» de la Commission.
10 Par décision du 23 juillet 2014, transmise au requérant le 1er août 2014, le directeur exécutif du département «Administration et finances» du SEAE, agissant en qualité d’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci‑après l’«AHCC»), a rejeté la réclamation du 12 avril 2014 (ci‑après la «décision du 23 juillet 2014»).
Conclusions des parties et procédure
11 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— annuler la décision du 23 juillet 2014 ;
— ordonner de lui rembourser l’ensemble des frais exposés au titre de son déménagement pour un montant de 17940 euros ;
— à titre subsidiaire, ordonner à tout le moins le remboursement des frais de déménagement à hauteur de 7960 euros ;
— condamner le SEAE à supporter l’ensemble des dépens.
12 Le SEAE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
— rejeter le recours comme partiellement irrecevable et, en tout état de cause, non fondé ;
— condamner le requérant aux dépens.
13 Par acte séparé déposé au greffe du Tribunal le 12 février 2015, la Commission a demandé au Tribunal de déclarer le présent recours irrecevable en tant qu’il est dirigé contre elle, sans engager le débat au fond, et de condamner le requérant à supporter les dépens qu’elle a exposés.
14 Par acte déposé au greffe du Tribunal le 13 mars 2015, le requérant a fait part de ses observations quant à l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission et a demandé au Tribunal de la rejeter.
15 Par lettre du 13 mars 2015, le SEAE a informé le Tribunal qu’il n’avait pas d’observations sur l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission.
16 Par lettre du greffe du 27 avril 2015, le Tribunal a, au titre de mesures d’organisation de la procédure, posé des questions à la Commission et au SEAE. Les parties concernées ont dûment répondu dans le délai imparti.
En droit
17 En vertu de l’article 83, paragraphes 1 et 2, du règlement de procédure, si une partie demande que le Tribunal statue sur l’irrecevabilité, l’incompétence ou sur un incident, sans engager le débat au fond, elle présente sa demande par acte séparé. Dès la présentation de l’acte introduisant la demande, le président de la formation de jugement fixe un délai à l’autre partie pour présenter par écrit ses conclusions et arguments de fait et de droit. Sauf décision contraire du Tribunal, la suite de la
procédure sur la demande est orale.
18 En l’espèce, le Tribunal, s’estimant suffisamment éclairé par les pièces produites par les parties, considère qu’il n’y a pas lieu d’ouvrir la procédure orale.
19 Le Tribunal rappelle, premièrement, que, en vertu de l’article 1er ter, sous a), du statut, le SEAE est assimilé, pour l’application du statut, aux institutions de l’Union.
20 Deuxièmement, en application de l’article 5, paragraphe 2, de la décision 2010/427/UE du Conseil, du 26 juillet 2010, fixant l’organisation et le fonctionnement du SEAE (JO L 201, p. 30), chaque délégation est placée sous l’autorité d’un chef de délégation qui exerce son autorité sur tous les membres du personnel qui composent la délégation, quel que soit leur statut.
21 Troisièmement, l’article 6, paragraphe 5, de la décision 2010/427/UE établit que les compétences conférées à l’AHCC sont confiées au haut représentant de l’Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité qui peut les déléguer au sein du SEAE.
22 Quatrièmement, s’agissant des agents contractuels de la Commission en service dans les délégations de l’Union dans les pays tiers, selon l’annexe I, tableau XIV, sous B, point 10, de la décision C(2013) 3288 de la Commission, du 4 juin 2013, relative à l’exercice des pouvoirs dévolus par le statut à l’autorité investie du pouvoir de nomination et par le régime applicable aux autres agents de l’Union européenne à l’AHCC, publiée aux Informations administratives no 26‑2013 du 7 juin 2013, les
pouvoirs de l’AHCC concernant le remboursement des frais sont exercés par le SEAE.
23 En l’espèce, il ressort du dossier que le requérant agit en sa qualité d’ancien agent contractuel en service dans une délégation d’un pays tiers. En outre, aussi bien la décision par laquelle l’administration de la délégation a limité le remboursement des frais de déménagement du requérant et l’a subordonné à certaines conditions que la décision du 23 juillet 2014 portant rejet de la réclamation ont été adoptées par le SEAE et sont imputables exclusivement à ce dernier.
24 Il en découle que le présent recours aurait dû être introduit uniquement contre le SEAE et qu’il doit être déclaré irrecevable en ce qu’il est dirigé contre la Commission.
Sur les dépens
25 Aux termes de l’article 101 du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe supporte ses propres dépens et est condamnée aux dépens exposés par l’autre partie, s’il est conclu en ce sens. En vertu de l’article 102, paragraphe 1, du même règlement, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe supporte ses propres dépens, mais n’est condamnée que partiellement aux
dépens exposés par l’autre partie, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.
26 Il résulte des motifs énoncés dans la présente ordonnance que le recours est irrecevable en tant qu’il est dirigé contre la Commission. En outre, dans sa demande de statuer sans engager le débat au fond, la Commission a expressément demandé que le requérant soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 102, paragraphe 1, du règlement de procédure, le requérant doit supporter ses propres dépens et est condamné à supporter les
dépens exposés par la Commission dans le cadre de la présente exception d’irrecevabilité.
27 Le SEAE n’ayant pas demandé la condamnation du requérant aux dépens occasionnés par cette exception d’irrecevabilité, il y a lieu de décider que le SEAE supportera ses propres dépens exposés dans le cadre de la présente exception d’irrecevabilité, les dépens dans la procédure au principal étant réservés.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (deuxième chambre)
ordonne :
1) Le recours dans l’affaire F‑126/14 est rejeté comme irrecevable en tant qu’il est dirigé contre la Commission européenne.
2) M. Astier supporte ses propres dépens et est condamné à supporter les dépens exposés par la Commission européenne dans le cadre de la procédure sur l’exception d’irrecevabilité.
3) Le Service européen pour l’action extérieure supporte ses propres dépens exposés dans le cadre de la procédure sur l’exception d’irrecevabilité.
4) Les dépens dans la procédure au principal sont réservés.
Fait à Luxembourg, le 9 juin 2015.
Le greffier
W. Hakenberg
Le président
K. Bradley
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( *1 ) Langue de procédure : le français.