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28/01/2015 | CJUE | N°C-579/13

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, P et S contre Commissie Sociale Zekerheid Breda et College van Burgemeester en Wethouders van de gemeente Amstelveen., 28/01/2015, C-579/13


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 28 janvier 2015 ( 1 )

Affaire C‑579/13

P

et

S

contre

Commissie Sociale Zekerheid Breda

et

College van Burgemeester en Wethouders van de gemeente Amstelveen

[demande de décision préjudicielle

formée par le Centrale Raad van Beroep (Pays‑Bas)]

«Contrôles aux frontières, asile et immigration — Politique d’immigration — Statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue dur

ée — Directive 2003/109/CE — Articles 5, paragraphe 2, et 11, paragraphe 1 — Obligation d’intégration prévue par le droit national — Égalité de traite...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. MACIEJ SZPUNAR

présentées le 28 janvier 2015 ( 1 )

Affaire C‑579/13

P

et

S

contre

Commissie Sociale Zekerheid Breda

et

College van Burgemeester en Wethouders van de gemeente Amstelveen

[demande de décision préjudicielle

formée par le Centrale Raad van Beroep (Pays‑Bas)]

«Contrôles aux frontières, asile et immigration — Politique d’immigration — Statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée — Directive 2003/109/CE — Articles 5, paragraphe 2, et 11, paragraphe 1 — Obligation d’intégration prévue par le droit national — Égalité de traitement des résidents de longue durée — Proportionnalité — Amende»

I – Introduction

1. La question juridique que soulève le présent renvoi préjudiciel est la suivante: dans quelle mesure le droit de l’Union en matière de politique d’immigration fixe‑t‑il des limites à l’application de dispositions nationales prévoyant une obligation d’intégration civique des ressortissants étrangers?

2. Aux Pays‑Bas, l’obligation d’intégration civique des ressortissants étrangers a été instituée en 2007. Elle se traduit par la nécessité de réussir un examen appréciant les aptitudes linguistiques ainsi que la connaissance de base de la société néerlandaise. Le fait de ne pas se conformer à cette obligation dans les délais est sanctionné par une amende.

3. Dans la présente affaire, le Centrale Raad van Beroep (Tribunal central du contentieux administratif, Pays‑Bas) éprouve des doutes quant à la question de savoir si, et, en cas de réponse affirmative, dans quelles conditions, cette obligation peut concerner des ressortissants étrangers qui résident légalement sur le territoire des Pays‑Bas depuis longtemps et qui possèdent le statut de résident de longue durée au sens de la directive 2003/109/CE ( 2 ).

II – Le cadre juridique

A – Le droit de l’Union

4. L’article 4, paragraphe 1, de la directive 2003/109, intitulé «Durée de résidence», dispose ce qui suit:

«Les États membres accordent le statut de résident de longue durée aux ressortissants de pays tiers qui ont résidé de manière légale et ininterrompue sur leur territoire pendant les cinq années qui ont immédiatement précédé l’introduction de la demande en cause.»

5. L’article 5, paragraphe 2, de la directive 2003/109, intitulé «Conditions relatives à l’acquisition du statut de résident de longue durée», prévoit:

«Les États membres peuvent exiger que les ressortissants de pays tiers satisfassent à des conditions d’intégration conformément à leur droit national.»

6. L’article 11, paragraphe 1, de la directive 2003/109, intitulé «Égalité de traitement», dispose:

«Le résident de longue durée bénéficie de l’égalité de traitement avec les nationaux en ce qui concerne:

a) les conditions d’accès à un emploi salarié et à une activité non salariée, à condition que ces activités ne soient pas liées, même à titre occasionnel, à l’exercice de l’autorité publique, ainsi que les conditions d’emploi et de travail, y compris les conditions de licenciement et de rémunération;

b) l’éducation et la formation professionnelle, y compris les allocations et bourses d’études conformément à la législation nationale;

[…]»

7. L’article 15, paragraphe 3, de la directive 2003/109, intitulé «Conditions de séjour dans un deuxième État membre», énonce:

«Les États membres peuvent exiger que les ressortissants de pays tiers satisfassent à des mesures d’intégration conformément à leur droit national.

Cette condition ne s’applique pas lorsque les ressortissants de pays tiers ont été tenus de satisfaire à des conditions d’intégration afin d’obtenir le statut de résident de longue durée, conformément à l’article 5, paragraphe 2.

Sans préjudice du deuxième alinéa, les personnes concernées peuvent être tenues de suivre des cours de langue.»

B – Le droit néerlandais

8. Les conditions d’octroi du statut de résident de longue durée au sens de la directive 2003/109 sont régies, aux Pays‑Bas, par la loi sur les étrangers (Vreemdelingenwet).

9. Conformément à l’article 21, paragraphe 1, sous k), de la loi sur les étrangers, la demande de délivrance du permis de séjour à durée indéterminée peut être rejetée lorsque le ressortissant étranger n’a pas réussi l’examen prévu à l’article 7, paragraphe 2, sous a), de la loi relative à l’intégration civique (Wet inburgering, ci‑après la «Wi») ou n’a pas obtenu un diplôme, certificat ou un autre document visé à l’article 5, paragraphe 1, sous c), de cette loi.

10. Comme l’indique la juridiction de renvoi, cette disposition est entrée en vigueur le 1er janvier 2007, mais n’est appliquée en fait que depuis le 1er janvier 2010. Avant cette date, le ressortissant étranger n’était pas tenu de réussir l’examen d’intégration pour obtenir le statut de résident de longue durée.

11. Les articles 3 et 31 de la Wi, telle qu’elle était libellée au moment des faits, disposaient:

«Article 3

1.   Est tenu à l’obligation d’intégration civique l’étranger séjournant régulièrement [aux Pays‑Bas] au sens de l’article 8, sous a) à e), ou l), de la loi sur les étrangers qui:

a. réside aux Pays‑Bas dans un but autre que le séjour temporaire

[…]

Article 31

1.   Le collège inflige une amende administrative au redevable de l’obligation d’intégration civique qui n’a pas réussi l’examen d’intégration soit dans le délai visé à l’article 7, paragraphe 1, soit dans le délai prorogé sur le fondement du paragraphe 2, sous a).

2.   Par dérogation au paragraphe 1:

a. le collège proroge le délai visé à l’article 7, paragraphe 1, si le redevable de l’obligation d’intégration civique démontre qu’on ne peut lui reprocher de ne pas avoir réussi l’examen d’intégration, ou

b. le collège accorde une dispense de l’obligation d’intégration civique, s’il est amené à considérer, sur le fondement des efforts démontrables fournis par le redevable de l’obligation d’intégration civique, qu’il ne lui est raisonnablement pas possible de réussir l’examen d’intégration.

[…]»

12. La Wi est entrée en vigueur le 1er janvier 2007.

13. Comme le mentionne la juridiction de renvoi, pour les ressortissants étrangers qui ont immigré aux Pays‑Bas après l’entrée en vigueur de la loi, le délai pour réussir l’examen appréciant la connaissance de la langue et de la société néerlandaises commence à courir à compter du début du séjour aux Pays‑Bas. Pour les personnes qui résidaient déjà aux Pays‑Bas au moment de l’entrée en vigueur de la loi, le délai pour réussir l’examen était fixé par une décision administrative distincte.

III – La procédure au principal et les questions préjudicielles

14. P a la nationalité américaine et réside aux Pays‑Bas depuis l’année 2002. Le 14 novembre 2008, elle a obtenu le statut de résident de longue durée au sens de la directive 2003/109.

15. Par une décision du 1er août 2008, remplacée ultérieurement par des décisions du 4 août 2009 et du 25 février 2010, la Commissie Sociale Zekerheid Breda (Commission de sécurité sociale de Breda) a notifié à P qu’elle était tenue à une obligation d’intégration civique, telle que visée par la Wi, et qu’elle devait réussir l’examen d’intégration pour le 30 juin 2013.

16. P a entamé un parcours d’intégration civique organisé par la Commissie Sociale Zekerheid Breda, qu’elle a interrompu le 25 août 2008 pour des raisons médicales et qu’elle n’a pas poursuivi ultérieurement.

17. S est née dans l’ex‑Yougoslavie et a la nationalité néo‑zélandaise. Depuis l’année 2000, elle réside aux Pays‑Bas. Le 8 juin 2007, elle a obtenu le statut de résident de longue durée.

18. Par décisions du 24 février 2010 et du 6 mai 2010, le College van Burgemeester en Wethouders van de gemeente Amstelveen (Collège des bourgmestres et échevins de la commune d’Amstelveen) a notifié à S qu’elle était tenue à une obligation d’intégration civique et qu’elle devait avoir réussi l’examen d’intégration pour le 24 août 2013.

19. P et S ont respectivement formé des recours contre ces décisions devant le Rechtbank Breda et le Rechtbank Amsterdam (tribunaux de Breda et d’Amsterdam). Ces recours ont été rejetés par un jugement du Rechtbank Breda du 12 juillet 2010 et par un jugement du Rechtbank Amsterdam du 8 septembre 2011.

20. P et S ont chacune interjeté appel de ces jugements devant le Centrale Raad van Beroep.

21. À l’appui de leurs appels, P et S ont fait valoir que, en tant que bénéficiaires du statut de résident de longue durée, elles devraient être traitées de la même manière que les citoyens néerlandais et ne devraient donc pas être tenues à l’obligation d’intégration. Elles ont également affirmé que l’imposition d’une telle obligation aux résidents de longue durée est contraire à la finalité de la directive 2003/109 ainsi qu’à ses articles 5, paragraphe 2, et 11, paragraphe 1.

22. La juridiction de renvoi considère que l’on ne peut exclure que l’imposition d’une obligation d’intégration à des résidents de longue durée soit contraire à la directive 2003/109. Cette juridiction note que l’article 5, paragraphe 2, de ladite directive autorise l’État membre à refuser l’octroi du statut de résident de longue durée s’il n’est pas satisfait aux conditions d’intégration énoncées dans le droit national. L’octroi de ce statut signifie en principe que l’intégration de la personne est
achevée. La question se pose donc de savoir si l’État membre peut imposer une obligation d’intégration à une personne à qui le statut de résident de longue durée a déjà été octroyé et s’il peut, en cas de non‑respect de cette obligation, appliquer une sanction sous forme d’amende.

23. Dans ces circonstances, le Centrale Raad van Beroep a décidé de surseoir à statuer et de soumettre à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1) Convient‑il d’interpréter soit l’objectif et l’esprit de la directive 2003/109/CE, soit son article 5, paragraphe 2 et/ou son article 11, paragraphe 1, en ce sens qu’est incompatible avec ceux‑ci l’imposition, sur le fondement d’une réglementation nationale, de l’obligation d’intégration civique sanctionnée par un système d’amende à des ressortissants de pays tiers qui sont en possession du statut de résident de longue durée?

2) Pour répondre à la première question, importe‑t‑il de savoir si l’obligation d’intégration civique a été imposée avant l’acquisition du statut de résident de longue durée?»

IV – La procédure devant la Cour

24. La demande de décision préjudicielle a été déposée au greffe de la Cour le 15 novembre 2013.

25. Des observations écrites ont été déposées par P et S, par les gouvernements néerlandais et portugais ainsi que par la Commission européenne. P et S ont demandé la tenue d’une audience.

26. P et S, le gouvernement néerlandais ainsi que la Commission ont participé à l’audience qui s’est tenue le 5 novembre 2014.

V – Analyse

A – Remarques préliminaires

27. La directive 2003/109 fait partie d’une série d’actes du droit de l’Union relatifs au statut des ressortissants de pays tiers, qui ont été adoptés sur la base des compétences législatives attribuées par le traité d’Amsterdam ( 3 ).

28. Les objectifs législatifs de l’Union réalisés par ladite directive ont été inscrits dans les conclusions du Conseil européen de Tampere des 15 et 16 octobre 1999. Ces conclusions prévoient notamment que le statut juridique des étrangers devrait être rapproché de celui des citoyens et, en particulier, qu’une personne ayant résidé légalement dans un État membre, pendant une période à déterminer, et titulaire d’un permis de séjour de longue durée devrait se voir octroyer un ensemble de droits aussi
proches que possible de ceux dont jouissent les citoyens de l’Union ( 4 ).

29. À la lumière des considérations qui précèdent, il apparaît que la directive 2003/109 crée en faveur des ressortissants de pays tiers ayant résidé légalement dans l’Union européenne pendant une période d’au moins cinq ans un statut juridique particulier découlant exclusivement du droit de l’Union: le statut de résident de longue durée ( 5 ).

30. L’introduction de ce statut crée pour les ressortissants étrangers, par rapport à la citoyenneté, une forme alternative de participation à la vie économique et sociale de l’Union, qui correspond dans la doctrine à la notion de «denizenship», par opposition à celle de «citizenship» ( 6 ).

31. Pour les questions qui ne sont pas régies par le droit de l’Union, le statut des ressortissants de pays tiers résidant dans l’Union continue de relever du droit national des États membres.

32. En particulier, les États membres demeurent libres de mener une politique d’intégration visant à éviter la marginalisation et la ségrégation des ressortissants étrangers ( 7 ). L’obligation d’intégration peut concerner différentes étapes de l’immigration, selon qu’elle est définie en tant que: i) condition de délivrance d’une autorisation d’entrée et de séjour; ii) condition d’octroi d’un permis de séjour de longue durée; iii) condition d’obtention du statut de résident de longue durée ou,
iv) condition d’acquisition de la nationalité par naturalisation.

33. Cette obligation implique généralement la nécessité de démontrer un certain degré de maîtrise de la langue officielle et, parfois, une connaissance de la société du pays d’accueil (son histoire, son droit interne et ses valeurs). Certains États membres exigent que les ressortissants de pays tiers réussissent un examen, qui peut être précédé de cours obligatoires. D’autres imposent seulement de suivre des cours d’intégration ( 8 ).

34. La question posée par le Centrale Raad van Beroep dans la présente affaire concerne la possibilité d’imposer une obligation d’intégration aux personnes possédant le statut de résident de longue durée au sens du droit de l’Union. En droit néerlandais, ladite obligation est définie à l’égard de ces personnes non pas en tant que condition d’acquisition de droits, mais en tant qu’exigence particulière devant être respectée du seul fait de la résidence sur le territoire de l’État d’accueil.

35. Afin de trancher cette question, il convient de répondre à deux interrogations fondamentales. En premier lieu, il s’agit de savoir si l’imposition d’une obligation d’intégration à des résidents de longue durée est compatible avec le statut de résident de longue durée au sens de la directive 2003/109. En second lieu, dans l’hypothèse d’une réponse affirmative à la première question, il faut établir dans quelle mesure le droit de l’Union limite la liberté des États membres de définir le contenu de
cette obligation d’intégration.

B – Admissibilité de l’obligation d’intégration imposée aux résidents de longue durée

36. L’article 5, paragraphe 2, de la directive 2003/109 prévoit expressément la possibilité de subordonner l’octroi du statut de résident de longue durée à des «conditions d’intégration» conformément au droit national.

37. Toutefois, la directive ne précise pas si et dans quelle mesure l’imposition d’une obligation d’intégration est encore possible après l’acquisition de ce statut.

38. Les opinions des parties et intervenants à la procédure divergent sur ce point. Les requérantes au principal et le gouvernement portugais considèrent que l’imposition d’une obligation d’intégration aux résidents de longue durée est contraire à la directive 2003/109. En revanche, le gouvernement néerlandais et la Commission, faisant valoir que ladite directive ne tranche pas la question, estiment que cette obligation peut être imposée.

39. Comme il ressort de la décision de renvoi, les deux requérantes au principal résident depuis des années aux Pays‑Bas et appartiennent au groupe des «anciens» résidents de longue durée, car elles ont acquis ce statut avant que l’obligation d’intégration ne commence à s’appliquer dans la pratique. En vertu du droit néerlandais, elles sont toutefois tenues de réussir l’examen d’intégration ( 9 ).

40. Dans la demande de décision préjudicielle, le Centrale Raad van Beroep met en doute la possibilité d’imposer une obligation d’intégration à des personnes qui bénéficient déjà du statut de résident de longue durée. Selon la juridiction de renvoi, l’acquisition de ce statut signifie que l’intéressé a satisfait à l’obligation de démontrer son ancrage dans le pays d’accueil, comme le prévoit le considérant 6 de la directive 2003/109, et, partant, que son intégration est achevée.

41. Je tiens à souligner que – comme la juridiction de renvoi l’indique à juste titre – la directive 2003/109 repose sur l’idée que, au fil du temps, les liens de la personne résidant de manière légale et ininterrompue dans l’État membre concerné acquièrent un caractère durable et témoignent de l’ancrage de la personne dans la société. La directive vise à accorder un statut particulier aux ressortissants de pays tiers qui sont installés durablement dans les États membres, car l’intégration de ces
ressortissants contribue à la promotion de la cohésion économique et sociale dans l’Union ( 10 ).

42. À mon sens, toutefois, cette idée n’exclut pas la possibilité pour les États membres d’adopter des actions d’intégration à l’égard des résidents de longue durée.

43. Il convient de relever que la directive 2003/109 utilise deux notions différentes en rapport avec les actions d’intégration. L’article 5, paragraphe 2, autorise l’application de «conditions d’intégration» ( 11 ) en vue de l’octroi du statut de résident de longue durée. L’article 15, paragraphe 3, de la directive, qui concerne le droit du résident de longue durée de séjourner dans un autre État membre, autorise le pays d’accueil à imposer des «mesures d’intégration» à la personne qui a obtenu le
statut de résident de longue durée dans un autre État membre ( 12 ), sous réserve que cette personne n’ait pas déjà été tenue de satisfaire à des conditions d’intégration afin d’obtenir ce statut dans cet autre État ( 13 ).

44. Cette interprétation est confirmée par la genèse de la disposition précitée. Au cours des travaux préparatoires de la directive 2003/109, certains États membres ont proposé, au sein du Conseil de l’Union européenne, de remplacer, à l’article 15, le terme «mesures» par «conditions», proposition qui n’a toutefois pas été retenue dans le texte définitif de la directive ( 14 ).

45. Les dispositions de la directive 2003/86 témoignent également de la nécessité d’opérer une distinction entre mesures et conditions d’intégration. L’article 7, paragraphe 2, de la directive 2003/86 permet aux États membres d’exiger des ressortissants de pays tiers ayant déposé une demande d’autorisation d’entrée sur le territoire au titre du regroupement familial qu’ils se conforment à des mesures d’intégration. Le législateur a utilisé ici la même formulation qu’à l’article 15, paragraphe 3, de
la directive 2003/109. Comme l’avocat général Mengozzi l’a noté après avoir analysé la genèse de l’article 15, paragraphe 3, de la directive 2003/09 et comparé les dispositions de ces deux directives, le législateur a intentionnellement eu recours à une notion distincte de celle de «conditions d’intégration» attachées à l’acquisition de certains droits ( 15 ).

46. La distinction évoquée ci‑dessus est particulièrement importante aux fins de l’application de la directive 2003/86. Considérer l’examen d’intégration comme une «condition» indispensable à l’obtention d’une autorisation d’entrée sur le territoire d’un membre de la famille porte atteinte à l’essence même du droit au regroupement familial ( 16 ).

47. La distinction en cause joue également un rôle essentiel dans le cadre de la directive 2003/109: les mesures d’intégration imposées aux résidents de longue durée bénéficiant d’un droit de séjour dans un autre État membre ne peuvent constituer des «conditions», en ce sens qu’elles ne sauraient être ni de jure ni de facto un instrument de sélection des personnes ou de contrôle de l’immigration. Dans le cas contraire, ces actions d’intégration remettraient en cause le droit de circuler à
l’intérieur de l’Union, lequel constitue un aspect fondamental du statut juridique découlant de la directive 2003/109.

48. Les deux actes législatifs précités opèrent donc une distinction entre les actions d’intégration définies comme des conditions d’acquisition ou d’exercice de certains droits et celles définies comme des mesures ayant pour seul but de faciliter l’intégration des personnes ( 17 ).

49. À mon sens, l’imposition de mesures d’intégration aux résidents de longue durée n’est pas contraire aux buts de la directive 2003/109, car ces mesures visent exclusivement à inciter les résidents de longue durée à prendre part à la vie économique et sociale de l’État de résidence.

50. Ces mesures semblent également admissibles compte tenu de l’économie de la directive. Comme je l’ai déjà rappelé, l’article 15, paragraphe 3, de la directive 2003/109 permet à un État membre – sous réserve de certaines conditions particulières – d’imposer des mesures d’intégration à une personne ayant obtenu le statut de résident de longue durée dans un autre État membre. Rien n’indique que l’imposition de mesures semblables aux résidents «nationaux», n’ayant pas fait usage du droit de séjour
dans un autre État membre, soit contraire aux buts de la directive.

51. Les requérantes au principal se prévalent du principe de l’égalité de traitement des résidents de longue durée en invoquant le fait que l’obligation d’intégration n’a été imposée ni aux ressortissants néerlandais ni aux autres citoyens de l’Union.

52. Cet argument ne me convainc pas, car, s’agissant de l’obligation d’intégration, les ressortissants de pays tiers ne se trouvent pas dans une situation comparable à celle des citoyens de l’État membre concerné ou des autres citoyens de l’Union.

53. Cette conclusion est également valable pour les ressortissants étrangers possédant le statut de résident de longue durée. Aux termes de l’article 11, paragraphe 1, de la directive 2003/109, le résident de longue durée bénéficie de l’égalité de traitement avec les nationaux dans les nombreux domaines énumérés par cette disposition (notamment en ce qui concerne les conditions d’accès à un emploi salarié et à une activité non salariée, l’éducation et la formation professionnelle, la sécurité
sociale ainsi que l’accès aux biens et aux services). Le droit des résidents de longue durée à l’égalité de traitement s’applique donc principalement aux domaines concrets énumérés à l’article 11, paragraphe 1, de la directive 2003/109 ( 18 ). La ratio legis de cette disposition se reflète dans le considérant 2 de la directive, qui évoque le «rapprochement» du statut des résidents de longue durée de celui des citoyens, plutôt que l’harmonisation de leur statut.

54. Il ne fait aucun doute selon moi que des dispositions nationales qui conditionneraient le maintien du statut de résident de longue durée ou l’exercice des droits y afférents à une obligation d’intégration seraient contraires aussi bien à l’article 9 de la directive 2003/109, qui énonce les conditions de retrait ou de perte de ce statut, qu’à l’article 5, paragraphe 2, de ladite directive, qui ne permet d’imposer des «conditions» d’intégration qu’aux seules fins de l’acquisition de ce statut.

55. La distinction entre l’obligation d’intégration en tant que mesure ou condition d’intégration revêt donc une importance décisive dans la présente affaire.

56. Il résulte de la décision de renvoi que les dispositions nationales qui trouvent à s’appliquer dans la présente affaire ne prévoient pas explicitement l’obligation de réussir l’examen d’intégration comme «condition» de jouissance du statut de résident de longue durée. Le non‑respect de cette obligation n’entraîne pas la perte du statut de résident de longue durée ni la limitation des droits qui en découlent. Comme il ressort du dossier, la seule conséquence négative en droit national est
l’imposition d’une amende.

57. Je n’exclus donc pas que l’obligation d’intégration prévue en droit néerlandais puisse être considérée comme une «mesure d’intégration» au sens de la directive 2003/109.

58. Eu égard aux considérations qui précèdent, j’estime que la directive 2003/109, et en particulier ses articles 5, paragraphe 2, et 11, paragraphe 1, ne s’opposent pas à ce que des mesures d’intégration soient imposées à des ressortissants de pays tiers ayant acquis le statut de résident de longue durée dans l’État membre concerné ( 19 ), pour autant que ces mesures aient uniquement pour but de faciliter l’intégration de l’intéressé et ne constituent pas une condition explicite ou cachée du
maintien de ce statut ou de l’exercice des droits y afférents.

59. S’agissant de la seconde question préjudicielle, je voudrais souligner que, aux fins de l’application de l’interprétation énoncée ci‑dessus, il est indifférent de savoir si l’obligation d’intégration a été imposée avant que l’intéressé n’ait acquis le statut de résident de longue durée ou après cette date. Si l’État membre n’a pas prévu une telle obligation en tant que condition d’acquisition du statut de résident de longue durée, il ne peut pas revenir sur cette décision en imposant, à l’égard
des personnes qui bénéficient déjà dudit statut, une condition au maintien de ce statut ou à l’exercice des droits y afférents. Après l’acquisition du statut de résident de longue durée, les actions d’intégration destinées à ces personnes devraient être limitées à des mesures d’intégration ( 20 ).

60. Il convient maintenant d’examiner jusqu’à quel point le droit de l’Union peut limiter la liberté des États membres de définir le contenu de telles mesures d’intégration.

C – Appréciation de la conformité au droit de l’Union des dispositions nationales imposant une obligation d’intégration aux résidents de longue durée

1. Les critères d’appréciation des dispositions susvisées en droit de l’Union

61. Comme je l’ai déjà signalé, la directive 2003/109 autorise les États membres à imposer une obligation d’intégration «conformément à leur droit national» (articles 5, paragraphe 2, et 15, paragraphe 3), mais ne contient pas d’indications relatives au contenu des mesures en cause ou aux conditions de leur application, et renvoie à cet égard au droit national.

62. Quels sont les critères d’appréciation de la conformité au droit de l’Union des dispositions nationales régissant l’obligation d’intégration?

63. Afin de répondre à cette question, il y a lieu d’examiner si les dispositions en cause relèvent du champ d’application du droit de l’Union. En cas de réponse affirmative, il conviendrait d’apprécier ces dispositions aussi bien sous l’angle de l’interdiction de porter atteinte à la portée et à l’efficacité du droit de l’Union qu’au regard de l’obligation de respecter le principe de proportionnalité ainsi que les droits fondamentaux protégés par la charte des droits fondamentaux de l’Union
européenne (ci‑après la «Charte»).

64. Je tiens à souligner que la directive 2003/109 crée un nouveau statut juridique en faveur des ressortissants de pays tiers résidant sur le territoire de l’Union, ce qui implique la nécessité de réglementer ce statut de manière exhaustive.

65. Dans ce contexte, l’affirmation selon laquelle les actions d’intégration relèvent de la sphère de compétence des États membres ne permet nullement de conclure à elle seule que ceux‑ci conservent une liberté totale en la matière. L’exercice, par les États membres, de leurs compétences, dans la mesure où il affecte les droits conférés et protégés par l’ordre juridique de l’Union, est susceptible d’un contrôle au regard du droit de l’Union ( 21 ).

66. En ce qui concerne le paiement de droits pour la délivrance de permis et de titres de séjour sur le fondement de la directive 2003/109, la Cour a jugé que, si les États membres conservent une marge d’appréciation en fixant le montant de ces droits, ils ne sauraient appliquer des réglementations nationales susceptibles de mettre en péril la réalisation des objectifs poursuivis par une directive et, partant, de priver celle‑ci de son effet utile ( 22 ).

67. Il ne fait aucun doute pour moi que, lorsqu’un État membre fait usage d’une faculté expressément prévue par la directive 2003/109, les dispositions nationales en cause entrent dans le champ d’application du droit de l’Union.

68. Tel est le cas lorsque les dispositions nationales subordonnent l’acquisition du statut de résident de longue durée à des «conditions d’intégration» en vertu des pouvoirs expressément prévus à l’article 5, paragraphe 2, de la directive 2003/109. Il faut également tenir compte ici du fait que l’acquisition du statut de résident de longue durée est soumise à une procédure particulière régie par la directive 2003/109, qui définit de manière exhaustive les conditions d’acquisition de ce statut ( 23
).

69. Il n’est pas douteux non plus que les dispositions nationales qui, conformément à l’article 15, paragraphe 3, de la directive 2003/109, imposent des «mesures d’intégration» à une personne qui a obtenu le statut de résident de longue durée dans un autre État membre relèvent du champ d’application du droit de l’Union.

70. Une réglementation nationale telle que celle en cause au principal, qui impose une obligation d’intégration aux résidents de longue durée «nationaux», à savoir ceux qui n’ont pas fait usage du droit de séjour dans un autre État membre, entre‑t‑elle également dans le champ d’application du droit de l’Union?

71. À mon sens, il convient de répondre à cette question par l’affirmative.

72. Le statut de résident de longue durée découle exclusivement du droit de l’Union. Dans ce contexte, la distinction entre les résidents de longue durée «migrants» et «nationaux», c’est‑à‑dire entre ceux qui ont fait usage du droit de circuler à l’intérieur de l’Union et ceux qui n’ont pas exercé ce droit, n’est pas pertinente pour définir le champ d’application du droit de l’Union. Même lorsqu’un résident de longue durée n’exerce pas son droit de séjour dans un autre État membre, on ne peut parler
de situation purement interne.

73. Je suis donc d’avis que les dispositions nationales imposant une obligation d’intégration aux personnes possédant le statut de résident de longue durée relèvent du champ d’application du droit de l’Union, indépendamment du fait que l’intéressé a exercé ou non son droit de séjour dans un autre État membre.

74. La solution dégagée ci‑dessus est également utile pour définir les limites de l’application du droit de l’Union au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte ( 24 ). Cette disposition de la Charte est fondée sur la jurisprudence de la Cour selon laquelle les droits fondamentaux garantis dans l’ordre juridique de l’Union ont vocation à être appliqués dans toutes les situations régies par le droit de l’Union ( 25 ).

75. Cette constatation englobe sans nul doute la situation dans laquelle un État membre invoque une option de mise en œuvre d’une directive expressément prévue par les dispositions de celle‑ci ou découlant de l’économie même de la directive – comme c’est le cas en l’espèce.

76. Il importe peu que les dispositions de la directive 2003/109 relatives aux conditions et mesures d’intégration renvoient au droit national. La Cour a déjà eu l’occasion de déclarer que, lorsque les États membres déterminent la portée des droits d’un résident de longue durée aux prestations sociales au sens de l’article 11, paragraphes 1, sous d), et 4, de la directive 2003/109, ainsi que la portée des prestations essentielles, ils doivent respecter les droits fondamentaux protégés par la Charte,
même si la disposition susvisée de la directive opère un renvoi au droit national ( 26 ).

77. Je rappelle que la Cour a déjà examiné des dispositions nationales subordonnant l’entrée sur le territoire au titre du droit au regroupement familial à des mesures d’intégration. À cette occasion, la Cour a vérifié si lesdites mesures étaient justifiées par des raisons impérieuses d’intérêt général et si elles étaient proportionnées ( 27 ). Certes, cette analyse était fondée sur la liberté d’établissement accordée en vertu de l’accord d’association avec la Turquie. Toutefois, l’utilisation de
critères analogues pour apprécier des mesures d’intégration ne devrait pas être sujette à caution, notamment lorsque lesdites mesures sont imposées dans un domaine régi par une directive de l’Union relative à la politique d’immigration.

78. Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, j’estime que les dispositions nationales imposant des mesures d’intégration aux résidents de longue durée relèvent du champ d’application du droit de l’Union, y compris au sens de l’article 51, paragraphe 1, de la Charte.

2. Appréciation de la proportionnalité des mesures d’intégration

79. Comme je l’ai déjà indiqué, dès lors que l’article 79, paragraphe 4, TFUE exclut la compétence de l’Union pour harmoniser le droit dans le domaine de l’intégration, il semble raisonnable d’affirmer que le droit de l’Union confère aux États membres une marge d’appréciation.

80. Toutefois, cette marge d’appréciation ne doit pas être utilisée par les États membres d’une manière qui porterait atteinte à l’objectif et à l’effet utile de la directive ( 28 ). Les dispositions nationales qui entrent dans le champ d’application du droit de l’Union doivent être également conformes au principe de proportionnalité: l’obligation d’intégration doit être propre à garantir la réalisation de l’objectif en cause et ne pas aller au‑delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre ( 29 ).

81. Lorsqu’elle concerne des résidents de longue durée, l’obligation d’intégration ne doit pas rendre excessivement difficile l’exercice des droits afférents à leur statut. Cette obligation ne doit pas constituer un obstacle à l’exercice du droit de travailler et de mener une activité économique, ni entraver le droit à l’éducation et à la formation professionnelle. L’accès à des cours du soir revêt, à cet égard, une importance essentielle; de même, il faut tenir compte du coût de la formation et de
l’accès à un système d’aide matérielle ( 30 ). Je rappelle que la Cour a jugé que des droits fiscaux qui ont une incidence financière considérable pour les ressortissants de pays tiers remplissant les conditions prévues par la directive 2003/109 pour l’octroi de permis de séjour pourraient priver ces ressortissants de la possibilité de faire valoir les droits conférés par cette directive, ce qui nuirait à la réalisation de son objectif ( 31 ).

82. Après avoir examiné si les exigences en matière d’intégration imposées aux résidents de longue durée sont par elles‑mêmes disproportionnées, il convient également de les comparer aux exigences applicables aux fins de l’acquisition de la nationalité par naturalisation. Les exigences imposées aux résidents de longue durée devraient être inférieures – et, en tout état de cause, ne sauraient être supérieures – à celles qui s’appliquent en matière d’acquisition de la nationalité ( 32 ).

83. Les mesures appliquées doivent être compatibles avec les droits fondamentaux protégés par la Charte. Il convient de tenir compte en particulier du droit au respect de la vie privée et familiale (article 7 de la Charte), de la liberté de pensée, de conscience et de religion (article 10 de la Charte), de l’interdiction de toute discrimination (article 21 de la Charte) ( 33 ), des droits de l’enfant (article 24 de la Charte) ainsi que des droits des personnes âgées (article 25 de la Charte) et des
personnes handicapées (article 26 de la Charte).

84. S’il appartient à la juridiction nationale d’apprécier les dispositions internes au regard des principes susvisés, la Cour peut fournir les éléments d’interprétation nécessaires à cette appréciation.

85. Aux fins de cette appréciation, il y a lieu tout d’abord de vérifier si les dispositions nationales établissent des conditions ou des mesures d’intégration au sens de la directive 2003/109. Bien que ni la directive 2003/86 ni la directive 2003/109 ne fournissent d’indications explicites à cet égard, il n’en demeure pas moins que les «mesures d’intégration» doivent être considérées comme moins restrictives que les «conditions d’intégration» ( 34 ).

86. Les mesures d’intégration – par opposition aux conditions d’intégration – ont pour seul but de faciliter la participation de l’intéressé à la vie économique et sociale de l’État concerné et ne sauraient en aucun cas être un instrument de sélection des immigrants ou de contrôle de l’immigration ( 35 ).

87. Dans ce contexte, quelle est la fonction de l’obligation de réussite à l’examen d’intégration?

88. L’examen est un moyen d’évaluer le niveau de connaissance de l’intéressé. Il crée un seuil permettant de qualifier les personnes qui remplissent les exigences voulues, étant entendu que certaines personnes ne satisfont pas à ces exigences. Lorsque l’examen est organisé par l’État, il constitue indubitablement un instrument de sélection fondé sur des critères définis par l’administration.

89. En revanche, je ne vois pas en quoi l’introduction d’un examen obligatoire appréciant la connaissance de la langue ou de la société pourrait contribuer à l’objectif poursuivi par les mesures d’intégration, à savoir faciliter la participation de l’intéressé à la société. Cela vaut tout particulièrement pour une personne résidant légalement depuis longtemps dans l’État membre concerné et bénéficiant à ce titre du statut de résident de longue durée et qui, indépendamment de ses compétences
linguistiques ou de sa connaissance de la société en cause, possède déjà un solide réseau de liens sociaux.

90. Imposer à une telle personne l’obligation de réussir un examen d’intégration dans un délai déterminé porterait atteinte à l’essence même des mesures d’intégration, qui devraient être des actions destinées à favoriser l’adaptation à la société concernée, et non à fixer des exigences de qualification liées au séjour dans l’État membre.

91. L’obligation de réussite à l’examen est une mesure d’autant moins appropriée dans le cas des personnes possédant le statut de résident de longue durée que – comme il semble ressortir du système néerlandais décrit dans la décision de renvoi ( 36 ) – ledit examen est le seul critère permettant d’établir le niveau d’intégration de la personne concernée.

92. Une personne qui vit pendant une longue période dans un environnement donné y tisse nécessairement un ensemble de liens qui lui permettent de s’intégrer (par le mariage ou la famille, la vie de quartier, le travail, la pratique d’un loisir ou l’exercice d’une activité auprès d’organisations non gouvernementales). Une mesure d’intégration qui ne permet pas une appréciation individuelle de ces circonstances factuelles et qui ne tient compte que du résultat d’un examen d’intégration est
disproportionnée par rapport à l’objectif visant à faciliter la participation de l’intéressé à la vie de la société.

93. La possibilité d’imposer un examen d’intégration en tant que mesure destinée à faciliter l’intégration des immigrants ne paraît pas conforme aux prémisses sur lesquelles reposent les principes de base communs de la politique d’intégration des immigrants, énoncés par le Conseil en 2004 et confirmés par le programme de Stockholm ( 37 ).

94. Les principes de base définissent l’intégration comme un processus dynamique à double sens dont les éléments clés sont l’interaction, l’intensification des échanges entre immigrants et citoyens de l’État membre concerné et la promotion d’un dialogue interculturel. Ce document énonce qu’une connaissance de base de la langue, de l’histoire et des institutions de la société d’accueil est un élément indispensable de l’intégration et qu’il est essentiel de donner aux immigrants la possibilité
d’acquérir cette connaissance pour réussir l’intégration. Toutefois, les diverses mesures préconisées à cet effet aux niveaux national et de l’Union ne comprennent pas des examens ou des tests d’intégration ( 38 ).

95. Cela ne signifie pas, selon moi, que les mesures d’intégration ne puissent pas imposer des obligations aux résidents de longue durée. Toutefois, ces obligations ne doivent pas impliquer la nécessité de démontrer un niveau prédéterminé de compétences linguistiques ou de connaissances de la société au moyen d’un examen ou d’un test d’aptitude ( 39 ).

96. Je tiens à souligner qu’une opinion semblable – selon laquelle les mesures d’intégration ne peuvent pas inclure d’obligations de résultat telles que l’obligation de réussite à un examen – a été exprimée dans la doctrine ( 40 ).

97. Compte tenu de ce qui précède, je considère que les «mesures d’intégration» au sens de la directive 2003/109, à la différence des «conditions d’intégration», ne peuvent pas comporter d’obligation de réussite à un examen d’intégration.

3. Proportionnalité de la sanction

98. Il convient d’examiner séparément la question de la juridiction de renvoi en ce qu’elle concerne la possibilité d’infliger une sanction en cas de non‑respect de l’obligation d’intégration.

99. À mon sens, cette question doit être considérée comme hypothétique, car il ressort de la décision de renvoi ainsi que des observations des parties et intervenants à la procédure qu’aucune amende n’a été infligée aux requérantes.

100. Néanmoins, dès lors que cette question a été débattue au cours de la procédure et que, au demeurant, les positions exprimées à cet égard sont nettement divergentes ( 41 ), je souhaiterais présenter quelques observations sur ce point.

101. La sanction accentue la nature coercitive des actions d’intégration et leur rôle en tant qu’instrument de contrôle aux mains de l’administration, ce qui gomme la frontière entre condition et mesure d’intégration. La possibilité d’infliger une sanction implique un degré élevé d’ingérence de l’État dans la situation des personnes possédant le statut de résident de longue durée, lequel est protégé par le droit de l’Union.

102. L’imposition de sanctions aux résidents de longue durée afin de les contraindre à participer aux actions d’intégration paraît difficile à justifier au regard de la directive 2003/109.

103. La seule forme de pression financière que l’on peut admettre sans réserve en pareille situation est le remboursement des coûts supportés au titre de l’organisation des actions d’intégration, lorsque l’intéressé a renoncé sans motif à participer auxdites actions.

104. Toutefois, contrairement à la position défendue par la Commission dans la présente affaire, je n’exclus pas la possibilité que soit également appliquée une sanction sous forme d’amende infligée à la personne qui persisterait à se soustraire à l’obligation qui lui incombe dans le cadre des mesures d’intégration. Cependant, la peine devrait être proportionnée à l’infraction et prendre en compte les raisons pour lesquelles un tel acte est considéré comme répréhensible ( 42 ). Pour fixer le montant
de l’amende, il conviendrait également de tenir compte du fait que les ressources financières des immigrants sont en général inférieures à la moyenne nationale. L’application de la sanction devrait être limitée dans le temps et en cas de faits répétés. En outre, il y aurait lieu de déterminer si la sanction financière concernée revêt un caractère répressif, ce qui entraînerait la nécessité de tenir compte de l’article 49, paragraphe 3, de la Charte, aux termes duquel l’intensité des peines ne
doit pas être disproportionnée par rapport à l’infraction ( 43 ).

105. Ces indications semblent pertinentes pour la présente affaire, car, comme il ressort des observations formulées par le gouvernement néerlandais lors de l’audience, le montant maximal de l’amende pour manquement à l’obligation d’intégration atteint, aux Pays‑Bas, un niveau considérable, à savoir 1000 euros, et la sanction peut être infligée une nouvelle fois en cas d’échec à l’examen dans un nouveau délai, et ce sans aucune limite quant au cumul des sanctions en cas de «récidive». Avec une
amende fixée à un niveau si élevé et dont l’application n’est pas limitée en cas de manquements ultérieurs à l’obligation d’intégration, il conviendrait d’examiner également si, pour certaines personnes, la menace de sanctions ne constituerait pas un motif pour quitter le territoire de l’État membre concerné, ce qui porterait manifestement atteinte au statut de résident de longue durée découlant de la directive 2003/109.

106. Les raisons qui viennent d’être exposées conduisent à considérer que la sanction sous forme d’amende prévue par le droit néerlandais en cas de manquement à l’obligation d’intégration est disproportionnée, tant au regard de son montant que des conditions de son application.

VI – Conclusion

107. Eu égard aux considérations qui précèdent, je propose à la Cour de répondre comme suit aux questions préjudicielles posées par le Centrale Raad van Beroep:

1) La directive 2003/109/CE du Conseil, du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée ne fait pas obstacle à ce qu’un État membre impose des obligations consistant en des mesures d’intégration aux ressortissants de pays tiers possédant le statut de résident de longue durée acquis dans l’État membre concerné. Ces mesures ne sauraient avoir d’autre objet que de faciliter l’intégration de l’intéressé et ne sauraient conditionner le maintien
dudit statut ou l’exercice des droits y afférents.

En vertu du principe de proportionnalité, les mesures d’intégration ne sauraient rendre excessivement difficile l’exercice des droits afférents au statut de résident de longue durée; elles doivent être propres à garantir la réalisation de l’objectif consistant à faciliter l’intégration et ne pas aller au‑delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif. En particulier, les mesures d’intégration imposées aux résidents de longue durée ne sauraient inclure une obligation de réussite à
un examen d’intégration civique.

2) Aux fins de l’application de l’interprétation énoncée ci‑dessus, il est indifférent de savoir si cette obligation a été imposée avant que l’intéressé n’ait acquis le statut de résident de longue durée.

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( 1 )   Langue originale: le polonais.

( 2 )   Directive du Conseil du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée (JO 2004, L 16, p. 44), telle que modifiée par la directive 2011/51/UE du Parlement européen et du Conseil, du 11 mai 2011 (JO L 132, p. 1).

( 3 )   Voir également directive 2003/86/CE du Conseil, du 22 septembre 2003, relative au droit au regroupement familial (JO L 251, p. 12); directive 2004/114/CE du Conseil, du 13 décembre 2004, relative aux conditions d’admission des ressortissants de pays tiers à des fins d’études, d’échange d’élèves, de formation non rémunérée ou de volontariat (JO L 375, p. 12); directive 2005/71/CE du Conseil, du 12 octobre 2005, relative à une procédure d’admission spécifique des ressortissants de pays tiers
aux fins de recherche scientifique (JO L 289, p. 15), et directive 2009/50/CE du Conseil, du 25 mai 2009, établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié (JO L 155, p. 17).

( 4 )   Voir considérant 2 de la directive 2003/109 et la communication de la Commission du 3 juin 2003 sur l’immigration, l’intégration et l’emploi [COM (2003) 336 final].

( 5 )   Le statut juridique des ressortissants de pays tiers qui travaillent légalement dans un État membre, mais qui n’ont pas encore le statut de résident de longue durée est régi par la directive 2011/98/UE du Parlement européen et du Conseil, du 13 décembre 2011 (JO L 343, p. 1), plus restrictive.

( 6 )   Le terme anglais «denizen» (qui, dans l’une de ses acceptions, signifie «étranger naturalisé») a été introduit dans la doctrine relative à la problématique de la migration pour définir le statut intermédiaire entre le statut des citoyens et celui des étrangers. Voir Hammar, T., Democracy and the Nation State: Aliens, Denizens, and Citizens in a World of International Migration, Aldershot, Avebury, 1990.

( 7 )   L’article 79, paragraphe 4, TFUE exclut toute compétence de l’Union en matière d’harmonisation des dispositions nationales visant à favoriser l’intégration des ressortissants étrangers.

( 8 )   Voir rapport de la Commission du 28 septembre 2011 sur l’application de la directive 2003/109/CE relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée [COM(2011) 585 final, p. 3].

( 9 )   La juridiction de renvoi indique que la requérante S est née sur le territoire de l’ex‑Yougoslavie et qu’il n’est pas exclu qu’elle ait la nationalité croate, information que le représentant de la requérante a confirmée lors de l’audience devant la Cour. Si tel était le cas, S ne serait plus tenue à une obligation d’intégration, puisqu’elle aurait acquis le statut de citoyenne de l’Union le jour de l’adhésion de la Croatie à l’Union. Je souhaite observer par ailleurs que le fait que cette
requérante soit citoyenne de l’Union exclurait également l’application d’une sanction pour non‑respect de l’obligation d’intégration, y compris en ce qui concerne la période antérieure à l’adhésion.

( 10 )   Voir arrêt Tahir (C‑469/13, EU:C:2014:2094, point 32).

( 11 )   La version en langue polonaise de la directive diverge des autres versions linguistiques, car, à l’article 15, paragraphe 3, elle utilise, aussi bien au premier alinéa qu’au deuxième, la notion d’«actions d’intégration» («działania integracyjne»). S’agissant de cette disposition, j’utiliserai dans les présentes conclusions les notions de «mesures d’intégration» («środki integracji») ou de «conditions d’intégration» («warunki integracji»). La version en langue polonaise de la
directive 2009/50, postérieure, utilise, en faisant référence à la directive 2003/86, les notions de «conditions et mesures d’intégration» («warunki i środki dotyczące integracji»).

( 12 )   Voir, dans les versions en langues allemande, anglaise et française, respectivement: «Integrationsanforderungen» et «Integrationsmaßnahmen», «integration conditions» et «integration measures» ou encore «conditions d’intégration» et «mesures d’intégration». En revanche, le texte de la directive 2003/109 en langue néerlandaise utilise une notion unique («integratievoorwaarden») et n’opère pas cette distinction. Celle‑ci apparaît toutefois à l’article 15, paragraphe 3, de la directive 2009/50
(«integratievoorwaarden en ‑maatregelen»).

( 13 )   Conformément à l’article 15, paragraphe 3, troisième alinéa, de la directive 2003/109, l’obligation de suivre des cours de langue peut être admise à titre exceptionnel.

( 14 )   Voir point 51 des conclusions de l’avocat général Mengozzi qu’il a présentées dans l’affaire Dogan (C‑138/13, EU:C:2014:287), qui renvoie à la note de la présidence du Conseil du 14 mars 2003, 7393/1/03 REV 1, p. 5.

( 15 )   Voir points 51 à 56 des conclusions de l’avocat général Mengozzi qu’il a présentées dans l’affaire Dogan (EU:C:2014:287). L’article 15, paragraphe 3, de la directive 2009/50 fait lui aussi référence aux «conditions et mesures d’intégration». Voir également articles 7, 10 et 11 de la directive 2004/114, qui énoncent des «conditions» facultatives d’octroi du permis d’entrée et de séjour des étudiants (obligation d’apporter la preuve d’une connaissance suffisante de la langue) ainsi que
certaines exigences applicables aux stagiaires non rémunérés et aux volontaires (suivre un cours de langue).

( 16 )   La Cour n’a pas encore eu l’occasion de se prononcer sur la question de savoir si la directive 2003/86 s’oppose à ce que l’entrée sur le territoire national soit subordonnée à l’obligation de réussir un tel examen (voir point 59 des conclusions de l’avocat général Mengozzi qu’il a présentées dans l’affaire Dogan, EU:C:2014:287 ainsi que les documents de la Commission mentionnés dans la note en bas de page 52 desdites conclusions). Le Comité européen des droits sociaux a considéré qu’il
serait contraire à l’article 19, paragraphe 6, de la charte sociale européenne, signée à Turin le 18 octobre 1961, de conditionner l’entrée sur le territoire national ou la poursuite du séjour au titre du regroupement familial à une telle obligation (voir document de travail du 15 juillet 2014 intitulé «La relation entre le droit de l’Union européenne et la charte sociale européenne», paragraphe 76).

( 17 )   Voir point 53 des conclusions de l’avocat général Mengozzi qu’il a présentées dans l’affaire Dogan (EU:C:2014:287).

( 18 )   Conformément à l’article 11, paragraphe 5, les États membres peuvent étendre le principe de l’égalité de traitement à des domaines non couverts par le paragraphe 1.

( 19 )   Je rappelle que la situation des ressortissants de pays tiers ayant acquis le statut de résident de longue durée dans un autre État membre est régie par l’article 15, paragraphe 3, de la directive 2003/109.

( 20 )   Comme il ressort du dossier, telle est la situation de la requérante P, qui a acquis le statut de résident de longue durée le 14 novembre 2008, c’est‑à‑dire après l’entrée en vigueur de la Wi le 1er janvier 2007 et après l’adoption de la décision administrative du 1er août 2008 fixant un délai individuel pour la réussite à l’examen. Je rappelle qu’avant le 1er janvier 2010, l’acquisition du statut de résident de longue durée aux Pays‑Bas n’était pas subordonnée à la réussite de l’examen
d’intégration.

( 21 )   En ce qui concerne l’exercice, par les États membres, de leurs compétences pour définir les conditions de perte de la nationalité d’un État membre, voir arrêt Rottmann (C‑135/08, EU:C:2010:104, point 48).

( 22 )   Arrêt Commission/Pays‑Bas (C‑508/10, EU:C:2012:243, points 64 et 65).

( 23 )   Voir arrêts Kamberaj (C‑571/10, EU:C:2012:233, point 66) et Tahir (EU:C:2014:2094, point 27).

( 24 )   Il ressort du considérant 3 de la directive 2003/109 que celle‑ci respecte les droits fondamentaux qui sont reconnus notamment par la Charte. Cette disposition est désormais privée de toute portée autonome, car, aux termes de l’article 6, paragraphe 1, premier alinéa, TUE, la Charte a la même valeur juridique que les traités.

( 25 )   Voir arrêt Åkerberg Fransson (C‑617/10, EU:C:2013:105, point 19).

( 26 )   Voir arrêt Kamberaj (EU:C:2012:233, point 81).

( 27 )   Voir arrêt Dogan (C‑138/13, EU:C:2014:2066, points 37 et 38), relatif à l’article 41, paragraphe 1, du protocole additionnel annexé à l’accord créant une association entre la Communauté économique européenne et la Turquie et relatif aux mesures à prendre pour leur entrée en vigueur (JO 1972, L 293, p. 3).

( 28 )   Voir, en ce sens, sur la directive 2003/86, arrêt Chakroun (C‑578/08, EU:C:2010:117, point 43) et point 61 des conclusions de l’avocat général Mengozzi qu’il a présentées dans l’affaire Noorzia (C‑338/13, EU:C:2014:288).

( 29 )   Voir arrêt Siragusa (C‑206/13, EU:C:2014:126, point 34 et jurisprudence citée).

( 30 )   Cette condition est également essentielle aux fins de l’acquisition du statut de résident de longue durée, car, aux termes du considérant 9 de la directive 2003/109, les considérations économiques ne devraient pas être un motif de refus d’octroyer ledit statut et ne doivent pas être considérées comme interférant avec les conditions pertinentes.

( 31 )   Arrêt Commission/Pays‑Bas (EU:C:2012:243, point 70).

( 32 )   Voir rapport de la Commission du 28 septembre 2011 [COM(2011) 585 final, p. 4] et arrêt Commission/Pays‑Bas (EU:C:2012:243, point 78).

( 33 )   Le considérant 5 de la directive rappelle la nécessité de respecter l’interdiction de toute discrimination fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, les origines ethniques ou sociales, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion ou les convictions, les opinions politiques ou toute autre opinion, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, un handicap, l’âge ou l’orientation sexuelle.

( 34 )   Voir point 52 des conclusions de l’avocat général Mengozzi qu’il a présentées dans l’affaire Dogan (EU:C:2014:287).

( 35 )   Voir point 48 des présentes conclusions.

( 36 )   Il découle des dispositions néerlandaises citées dans la décision de renvoi que, à titre de dérogation, n’est pas tenu à l’obligation d’intégration celui qui, notamment, est âgé de moins de 16 ans ou de 65 ans ou plus, a résidé au moins huit ans aux Pays‑Bas pendant qu’il était en âge de la scolarité obligatoire, est titulaire d’un diplôme, d’un certificat ou d’un autre document approprié et a démontré disposer d’aptitudes orales et écrites suffisantes en néerlandais (article 5,
paragraphe 1, de la Wi).

( 37 )   Le programme de Stockholm – Une Europe ouverte et sûre qui sert et protège les citoyens (JO 2010, C 115, p. 1). Voir communiqué de presse 14615/04 du Conseil du 19 novembre 2004 et note 17024/09 du Conseil du 11 décembre 2009 ainsi que communication de la Commission, du 1er septembre 2005, intitulée «Programme commun pour l’intégration. Cadre relatif à l’intégration des ressortissants de pays tiers dans l’Union européenne» [COM(2005) 389 final].

( 38 )   Les mesures proposées au niveau national consistent notamment à offrir différents types de cours de langue et d’éducation civique, des formations et des programmes instituant un tuteur éducatif, en tenant compte de la diversité des situations dans lesquelles se trouvent les immigrants, de l’éducation des intéressés et de leurs connaissances préalables sur le pays.

( 39 )   À titre d’exemples de telles mesures ne reposant pas sur un examen d’aptitude, on peut citer l’obligation de participer à des cours de langue, les actions de formation destinées à l’acquisition de connaissances sur la société et le droit, les ateliers culturels ou les rencontres avec des personnalités qui se sont distinguées dans la société en cause.

( 40 )   Voir Bribosia, E., et Ganty, S., «Arrêt ‘Dogan’: quelle légalité pour les tests d’intégration civique?», Journal de droit européen, 2014, no 213, p. 378, ainsi que l’abondante doctrine citée à la note en bas de page 19, p. 379. Certains auteurs considèrent que la notion de «mesures d’intégration» – contrairement aux «conditions d’intégration», qui supposent une discipline et des sanctions – peut également signifier que lesdites mesures ne peuvent comporter aucune exigence impérative ni
aucune sanction, voir Carrera, S., «Integration of Immigrants in EU Law and Policy», sous la direction de Azoulai, L., et de Vries, K., EU Migration Law: Legal Complexities and Political Rationales, Oxford University Press, 2014, p. 159.

( 41 )   La Commission soutient que la seule sanction admissible au regard du principe de proportionnalité est le remboursement du coût des actions d’intégration, alors que le gouvernement néerlandais est d’avis qu’une amende d’un montant maximal de 1000 euros est proportionnée.

( 42 )   La peine maximale encourue en cas de non‑respect de l’obligation de participer à des actions d’intégration ne devrait pas être plus lourde que les peines appliquées pour des infractions similaires en matière d’obligations civiques, par exemple en cas de non‑respect de l’obligation de vote ou de manquement à l’obligation de hisser le drapeau national.

( 43 )   Voir jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme relative au champ d’application des articles 6 et 7 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales en rapport avec les sanctions ne faisant pas partie du «noyau dur» du droit pénal, et en particulier arrêt Jussila du 23 novembre 2006 (requête no 73053/01, § 43) ainsi que, sur la proportionnalité de la peine, arrêt Segame SA du 7 juin 2012 (requête no 4837/06, § 59).


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : C-579/13
Date de la décision : 28/01/2015
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Centrale Raad van Beroep.

Renvoi préjudiciel – Statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée – Directive 2003/109/CE – Articles 5, paragraphe 2, et 11, paragraphe 1 – Législation nationale imposant aux ressortissants de pays tiers ayant acquis le statut de résident de longue durée une obligation d’intégration civique, attestée par un examen, sous peine d’amende.

Espace de liberté, de sécurité et de justice


Parties
Demandeurs : P et S
Défendeurs : Commissie Sociale Zekerheid Breda et College van Burgemeester en Wethouders van de gemeente Amstelveen.

Composition du Tribunal
Avocat général : Szpunar

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2015:39

Source

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