La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

18/11/2014 | CJUE | N°C-559/13

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Finanzamt Dortmund-Unna contre Josef Grünewald., 18/11/2014, C-559/13


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO MENGOZZI

présentées le 18 novembre 2014 ( 1 )

Affaire C‑559/13

Finanzamt Dortmund-Unna

contre

Josef Grünewald

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesfinanzhof (Allemagne)]

«Libre circulation des capitaux — Fiscalité directe — Impôt sur le revenu — Déductibilité de rentes versées à un parent en avancement de part successorale — Exclusion pour les contribuables non-résidents»

1.  Par la présente demande de décision

préjudicielle présentée par le Bundesfinanzhof (Allemagne), la Cour est appelée une nouvelle fois à prendre position sur la compatibil...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. PAOLO MENGOZZI

présentées le 18 novembre 2014 ( 1 )

Affaire C‑559/13

Finanzamt Dortmund-Unna

contre

Josef Grünewald

[demande de décision préjudicielle formée par le Bundesfinanzhof (Allemagne)]

«Libre circulation des capitaux — Fiscalité directe — Impôt sur le revenu — Déductibilité de rentes versées à un parent en avancement de part successorale — Exclusion pour les contribuables non-résidents»

1.  Par la présente demande de décision préjudicielle présentée par le Bundesfinanzhof (Allemagne), la Cour est appelée une nouvelle fois à prendre position sur la compatibilité avec les dispositions de droit de l’Union sur la libre circulation des capitaux d’une réglementation nationale en vertu de laquelle seuls les contribuables résidents sont fondés à déduire de leurs revenus imposables les rentes alimentaires versées à la suite d’un transfert de patrimoine en avancement de part successorale.

2.  La demande de décision préjudicielle a été soulevée dans le cadre d’un litige opposant M. Grünewald, personne physique non-résidente en Allemagne, à l’administration fiscale allemande, au sujet du refus de cette dernière de déduire des revenus générés en Allemagne par M. Grünewald les rentes alimentaires que celui-ci a versées à ses parents, dans le cadre d’une cession, en avancement de part successorale, d’une participation dans une société de personnes exerçant une activité horticole.

3.  En réalité, la Cour a déjà eu à connaître de la question de la compatibilité de la réglementation fiscale nationale en cause avec les dispositions de droit de l’Union en matière de libre circulation des capitaux. En effet, dans l’arrêt Schröder ( 2 ), la Cour a déjà retenu l’incompatibilité avec le droit de l’Union d’une réglementation nationale distinguant les contribuables résidents des non-résidents concernant la déductibilité des rentes versées à un parent dans le cadre d’un transfert de
patrimoine en avancement de part successorale, pour autant que l’engagement de payer ces rentes découle de l’opération en cause.

4.  Toutefois, pour les raisons exposées dans la décision de renvoi et qui seront analysées ci-dessous, le Bundesfinanzhof doute du fait que la solution retenue par la Cour dans l’arrêt Schröder puisse préciser définitivement la situation juridique en droit de l’Union et donc fournir une réponse exhaustive à la question de droit litigieuse pendante devant lui. En outre, le juge de renvoi se demande si des motifs impérieux d’intérêt général pourraient justifier la réglementation nationale en cause.
Dans ce contexte, par la présente demande de décision préjudicielle, ce juge a décidé de soulever de nouveau la question devant la Cour.

I – Cadre juridique

5. Bien que le cadre juridique national ait déjà été exposé dans l’arrêt Schröder ( 3 ), il convient de le rappeler en détail ci-dessous, dans la mesure où tant le Bundesfinanzhof que le gouvernement allemand soutiennent que la décision de renvoi ayant donné lieu à la décision préjudicielle dans l’affaire Schröder aurait insuffisamment exposé la réglementation nationale, ce qui pourrait avoir une incidence sur la solution retenue par la Cour dans cette affaire. Je présenterai donc, avant tout, le
cadre normatif pertinent en matière d’impôt sur le revenu, puis, le système de l’avancement de part successorale en droit allemand et, enfin, le traitement fiscal des transferts à titre d’avancement de part successorale.

6. Premièrement, concernant le cadre normatif pertinent en matière d’impôt sur le revenu, il y a lieu de rappeler que la loi allemande relative à cet impôt (Einkommensteuergesetz, ci-après l’«EStG») ( 4 ) distingue les contribuables ayant leur domicile ou leur résidence habituelle en Allemagne de ceux qui n’ont pas leur domicile ou leur résidence habituelle en Allemagne. Les premiers sont assujettis à l’impôt sur le revenu à titre illimité. En revanche, les autres sont assujettis seulement
partiellement à un tel impôt, uniquement pour les revenus perçus en Allemagne. Au titre des revenus imposables des personnes partiellement assujetties figurent ceux provenant de l’exercice d’une activité industrielle ou commerciale dans ce pays ( 5 ).

7. En vertu de l’article 10, paragraphe 1, de l’EStG, à certaines conditions, les rentes et les charges permanentes reposant sur des obligations particulières peuvent faire l’objet d’une déduction à titre de «dépenses exceptionnelles», lorsqu’elles ne constituent ni des charges d’exploitation ni des frais professionnels ( 6 ).

8. L’article 50 de l’EStG prévoit des dispositions particulières pour les contribuables partiellement assujettis à l’impôt. Aux termes du paragraphe 1, ceux-ci ne peuvent déduire les charges d’exploitation ou les frais professionnels que dans la mesure où ils sont économiquement liés aux revenus perçus sur le territoire national. En revanche, pour ces contribuables, l’article 10 de l’EStG ne s’applique pas, ce qui empêche de déduire des dépenses exceptionnelles.

9. Deuxièmement, concernant l’avancement de part successorale en droit allemand, celui-ci implique un transfert de patrimoine par lequel, en vue d’une succession future, un ou plusieurs testateurs cèdent leur patrimoine à un ou plusieurs héritiers, notamment leur entreprise ou des biens immeubles. Il est d’usage que, dans le cadre d’un tel transfert, le cédant se réserve des moyens suffisants de subsistance, qui peuvent être des rentes périodiques (dites «rentes alimentaires privées»). La
jurisprudence allemande a identifié la raison d’être de la succession anticipée en retenant que celle-ci permet aux membres de la génération suivante de bénéficier, avant l’ouverture de la succession, d’une unité économique produisant des revenus leur permettant de pourvoir tout au moins en partie à leurs besoins matériels propres tout en garantissant la subsistance du cédant. Selon la jurisprudence du Bundesfinanzhof, à travers la cession de patrimoine par avancement de part successorale, le
cédant se réserve donc, sous forme de rentes récurrentes, des revenus qui en réalité découlent de son propre patrimoine, mais qui doivent désormais être produits par le cessionnaire ( 7 ).

10. Dans le contrat de cession de patrimoine à titre d’avancement de part successorale, que la jurisprudence qualifie de donation, le montant des rentes est fixé non pas par rapport à la valeur du patrimoine cédé, mais en fonction des besoins alimentaires du cédant et de la capacité contributive du débiteur ( 8 ). Cet élément différencie ce contrat des cessions de patrimoine à titre onéreux et synallagmatique dans lesquelles les éventuelles prestations récurrentes convenues constituent en revanche
la contrepartie financière des biens patrimoniaux transférés.

11. Troisièmement, concernant le traitement fiscal des opérations de cession de patrimoine en avancement de part successorale, lorsque le cessionnaire s’engage à verser des rentes alimentaires privées au cédant, il ressort d’une jurisprudence constante du Bundesfinanzhof que ces prestations ne sont considérées ni comme la contrepartie de la cession ni comme des dépenses d’acquisition du cessionnaire, mais sont qualifiées, à des fins fiscales, comme des dépenses exceptionnelles et des rémunérations
périodiques ( 9 ). Cette qualification se fonde sur la raison d’être du régime juridique de la succession anticipée identifiée au point 9 ci-dessus. En vertu de l’article 10 de l’EStG, pour les contribuables résidents, les rentes alimentaires sont donc entièrement déductibles, aux fins de la détermination du revenu imposable, comme dépenses exceptionnelles sous forme de charges permanentes, même si celles-ci sont variables. Les contribuables non-résidents ne peuvent pas en revanche déduire de
telles rentes, l’article 50 de l’EStG prévoyant expressément que l’article 10 de l’EStG est inapplicable aux contribuables partiellement assujettis à l’impôt.

12. En considération de la raison d’être du régime juridique de la succession anticipée telle qu’identifiée au point 9 ci-dessus, qui implique que la réserve des revenus sous forme de rentes récurrentes en faveur du cédant donne lieu à un «transfert de capacité contributive» ( 10 ), à la déduction de la rente alimentaire privée par le cessionnaire/débiteur correspond une imposition des prestations comme «autres revenus» à la charge du cédant/créancier assujetti à l’impôt de manière illimitée
(principe dit de «correspondance» ou «Korrespondenzprinzip»).

II – Faits, procédure au principal et question préjudicielle

13. Par acte du 17 janvier 1989, M. Grünewald, défendeur devant le juge de renvoi, et son frère ont, dans le cadre d’une cession de patrimoine en avancement de part successorale, acquis de leur père 50 % chacun des parts d’une société de droit civil ayant une activité horticole. Dans le cadre de cette opération, les frères se sont engagés à verser au père ou aux parents une rente alimentaire privée conformément aux termes dudit acte de cession.

14. Entre 1999 et 2002, M. Grünewald, qui n’a ni son domicile ni sa résidence habituelle en Allemagne et qui vit dans un autre État membre de l’Union européenne, a perçu de cette participation des revenus d’origine commerciale. Au cours de la même période, il a perçu également d’autres revenus en Allemagne.

15. Considérant M. Grünewald comme partiellement assujetti à l’impôt sur le revenu, le Finanzamt Dortmund-Unna, requérant devant le juge de renvoi, lui a refusé, sur le fondement de l’article 50 de l’EStG, la possibilité de déduire les rentes alimentaires privées qu’il avait versées à son père.

16. M. Grünewald a introduit un recours contre la décision du Finanzamt Dortmund-Unna auprès du Finanzgericht Münster (tribunal des finances de Münster), qui y a fait droit. Le Finanzamt Dortmund-Unna a alors formé un pourvoi en cassation devant le juge de renvoi pour demander l’annulation de l’arrêt du Finanzgericht Münster et le rejet du recours que M. Grünewald avait introduit devant ledit Finanzgericht.

17. Le juge de renvoi fait observer que, en vertu du droit national applicable, le Finanzamt a refusé, à juste titre, à M. Grünewald de pouvoir déduire les rentes alimentaires privées en cause en tant que dépenses exceptionnelles ne pouvant être déduites par une personne partiellement assujettie à l’impôt comme M. Grünewald. Toutefois, se référant à l’arrêt Schröder susmentionné, ce juge a relevé que la compatibilité d’un tel régime fiscal avec le droit de l’Union demeurait sujette à caution.

18. Le Bundesfinanzhof exprime notamment une série de doutes sur l’applicabilité de l’arrêt Schröder à l’affaire pendante devant lui. Premièrement, la décision de renvoi dans cette affaire n’aurait pas suffisamment mis en évidence l’existence, dans les dispositions nationales, du principe susmentionné dit de «correspondance» ( 11 ) entre la déduction en faveur du débiteur des rentes et l’imposition du bénéficiaire. Deuxièmement, l’administration financière serait d’avis que, dans cet arrêt, la Cour
ne s’est exprimée que sur une cession à titre onéreux qui ne serait pas envisageable pour une opération à titre d’avancement de part successorale. En outre, dans ce cas, le versement d’éventuelles rentes ne serait pas entièrement déductible, mais devrait être réparti entre frais d’acquisition (déductibles par fraction) et part d’intérêts (immédiatement déductible). Troisièmement, l’arrêt Schröder concernerait des revenus locatifs, de nature privée, et non pas, comme en l’espèce, des revenus de
participation de nature commerciale.

19. Le juge de renvoi souligne donc deux aspects pertinents pour l’analyse en droit de l’Union. Tout d’abord, il met en doute la conclusion du Finanzgericht Münster relativement à l’existence d’un rapport direct entre les revenus commerciaux issus de la participation dans la société de personnes et les rentes alimentaires privées versées par M. Grünewald. En effet, le Finanzgericht n’a pas tenu compte du fait que les rentes alimentaires privées étaient destinées aux besoins alimentaires des
bénéficiaires (les parents du requérant), ce qui permettrait de les ranger dans la sphère personnelle. Ensuite, le juge de renvoi se demande si la réglementation en cause ne pourrait pas se justifier par le principe de territorialité, c’est-à-dire pour sauvegarder une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre États membres.

20. Au regard de ces considérations, le juge de renvoi, par ordonnance du 14 mai 2013, a estimé nécessaire de suspendre la procédure pendante devant lui afin de déférer à la Cour la question préjudicielle suivante:

«L’article 63 TFUE fait-t-il obstacle à la réglementation d’un État membre selon laquelle les rentes alimentaires privées versées par des contribuables non-résidents ne sont pas déductibles dans le contexte du transfert, en vertu d’une donation en avancement de part successorale (avancement d’hoirie), d’un patrimoine situé sur le territoire national et générant des revenus, alors que des versements équivalents sont déductibles en cas d’obligation fiscale illimitée, cette déduction entraînant
toutefois une obligation fiscale correspondante du bénéficiaire des prestations (soumis à une obligation fiscale illimitée)?»

III – Procédure devant la Cour

21. Le greffe a reçu la décision de renvoi le 30 octobre 2013. Les gouvernements allemand et français, ainsi que la Commission européenne, ont déposé des observations écrites. Sont intervenus à l’audience, qui s’est tenue le 16 septembre 2014, le Finanzamt Dortmund-Unna et les gouvernements allemand et français, de même que la Commission.

22. Par un courrier du 18 février 2014, le gouvernement allemand, en application de l’article 16, troisième alinéa, du statut, a présenté une demande visant à ce que la Cour traite la présente affaire en grande chambre.

IV – Analyse juridique

23. Par la question préjudicielle qu’il a posée, le juge de renvoi demande, en substance, si l’article 63 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il fait obstacle à la réglementation d’un État membre permettant à un contribuable résident, et pas à un contribuable non-résident, de déduire les rentes alimentaires privées, versées dans le cadre d’une cession, en avancement de part successorale, d’un élément de patrimoine situé sur le territoire national et générant des revenus, et qui prévoit que cette
déduction entraîne une obligation fiscale équivalente du bénéficiaire des rentes soumis à une obligation fiscale illimitée dans cet État.

A – Sur la liberté de circulation applicable

24. Il convient avant tout d’observer que l’article 63, paragraphe 1, TFUE, interdit généralement toutes restrictions aux mouvements de capitaux entre États membres.

25. En l’absence, dans le traité, de définition de la notion de «mouvements de capitaux», la Cour a reconnu une valeur indicative à la nomenclature qui constitue l’annexe I de la directive 88/361/CEE du Conseil, du 24 juin 1988, pour la mise en œuvre de l’article 67 du traité (JO L 178, p. 5), étant entendu que, conformément à l’introduction de cette annexe, la liste qu’elle contient ne présente pas un caractère exhaustif ( 12 ).

26. À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante que les donations et successions, relevant du domaine d’application de la rubrique XI de l’annexe I de la directive 88/361, constituent des mouvements de capitaux au sens de l’article 63 TFUE, à l’exception des cas où leurs éléments constitutifs se cantonnent à l’intérieur d’un seul État membre ( 13 ). Partant, en dehors de ces cas spécifiques, le traitement fiscal des successions et des donations, que celles-ci portent sur des sommes
d’argent, des biens immeubles ou des biens meubles, relève des dispositions du traité relatives aux mouvements de capitaux ( 14 ).

27. Il convient également de relever que, dans l’arrêt Schröder susmentionné, la Cour a déjà reconnu que les cessions de patrimoine en avancement de part successorale, et qui présentent un élément transfrontalier, relèvent du domaine d’application de l’article 63 TFUE ( 15 ). La circonstance que, en l’espèce, l’objet du transfert en avancement de part successorale porte sur des parts d’une société de personnes et non sur des biens immeubles, comme dans l’affaire ayant abouti à l’arrêt Schröder, ne
constitue pas, selon moi, un élément permettant en tant que tel de modifier l’analyse relative à la liberté de circulation applicable à la réglementation nationale en cause ( 16 ).

28. Or, une situation dans laquelle une personne résidant en Allemagne transmet, en avancement de part successorale, des parts d’une société de personnes de droit allemand ayant une activité agricole en Allemagne à son fils résidant dans un autre État membre constitue une opération présentant des éléments transfrontaliers relevant, en principe, de la notion de mouvements de capitaux au sens de l’article 63 TFUE.

B – Sur l’existence d’une restriction à la libre circulation des capitaux

29. Il convient de rappeler que les mesures interdites par l’article 63, paragraphe 1, TFUE, en tant que restrictions aux mouvements de capitaux, comprennent notamment celles qui sont de nature à dissuader les non-résidents de faire des investissements dans un État membre ou de maintenir de tels investissements ( 17 ) ou à dissuader les résidents dudit État membre d’en faire dans d’autres États ( 18 ).

30. Aux termes de la législation en cause au principal, une personne physique n’ayant ni son domicile ni sa résidence habituelle en Allemagne est, conformément à l’article 49 de l’EStG, assujettie à l’impôt sur le revenu dans cet État membre pour les revenus provenant de l’exercice d’une activité industrielle ou commerciale exercée en Allemagne ( 19 ). Toutefois, contrairement au contribuable résident, ce contribuable non-résident ne peut pas, en vertu de l’article 50 de l’EStG, déduire de tels
revenus – en tant que dépenses exceptionnelles au sens de l’article 10, paragraphe 1, de l’EStG – une rente alimentaire privée telle que celle versée par M. Grünewald à son père ou à ses parents en avancement de part successorale.

31. Or, réserver un traitement fiscal moins favorable de ce type aux non‑résidents pour les rentes alimentaires privées pourrait dissuader ces derniers d’acquérir, en avancement de part successorale, ou de conserver des parts de sociétés allemandes ayant une activité industrielle ou commerciale en Allemagne ( 20 ). Il est également susceptible de dissuader les résidents allemands de désigner comme bénéficiaires d’une succession anticipée des personnes résidant dans un État membre autre que la
République fédérale d’Allemagne ( 21 ).

32. Il résulte de ce qui précède qu’une législation qui prévoit un traitement défavorable de ce type pour les contribuables non-résidents constitue une restriction à la libre circulation des capitaux, interdite, en principe, par l’article 63 TFUE.

C – Sur l’existence d’une éventuelle justification à la restriction à la libre circulation des capitaux

33. Il convient toutefois de vérifier si, bien qu’elle constitue une restriction à la libre circulation des capitaux, une législation fiscale nationale telle que celle en cause au principal pourrait être considérée comme compatible avec les dispositions du traité FUE relatives à la libre circulation des capitaux.

34. En effet, aux termes de l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE, l’article 63 TFUE «ne porte pas atteinte au droit qu’ont les États membres […] d’appliquer les dispositions pertinentes de leur législation fiscale qui établissent une distinction entre les contribuables qui ne se trouvent pas dans la même situation en ce qui concerne leur résidence […]». Cette disposition, en tant que dérogation au principe fondamental de la libre circulation des capitaux, doit toutefois faire l’objet d’une
interprétation restrictive et se trouve être elle-même limitée par l’article 65, paragraphe 3, TFUE, en vertu duquel les dispositions nationales visées au paragraphe 1 «ne doivent constituer ni un moyen de discrimination arbitraire ni une restriction déguisée à la libre circulation des capitaux et des paiements telle que définie à l’article 63 [TFUE]» ( 22 ).

35. Il convient donc de vérifier si une législation nationale telle que celle en cause, et qui distingue les contribuables résidents des non-résidents, entraîne une inégalité de traitement permise en vertu de l’article 65, paragraphe 1, sous a), TFUE ou si elle constitue un moyen de discrimination arbitraire ou une restriction déguisée interdite par le paragraphe 3 dudit article. À cet égard, il ressort d’une jurisprudence constante qu’une législation nationale de ce type ne peut être considérée
comme compatible avec la libre circulation des capitaux que dans deux cas: si la différence de traitement concerne des situations qui ne sont pas objectivement comparables ou est justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général ( 23 ). En outre, pour être justifiée, la différence de traitement ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour que l’objectif poursuivi par la réglementation en cause soit atteint ( 24 ).

1. Sur la comparabilité des situations en cause

36. Il ressort d’une jurisprudence constante, depuis l’arrêt Schumacker ( 25 ), que, en matière d’impôts directs, la situation des résidents et celle des non‑résidents ne sont, en règle générale, pas comparables, en ce que le revenu perçu sur le territoire d’un État par un non-résident ne constitue le plus souvent qu’une partie de son revenu global, centralisé au lieu de sa résidence et dans la mesure où la capacité contributive personnelle du non-résident, résultant de la prise en compte de
l’ensemble de ses revenus et de sa situation personnelle et familiale, peut s’apprécier le plus aisément à l’endroit où il a le centre de ses intérêts personnels et patrimoniaux, qui correspond en général à la résidence habituelle ( 26 ).

37. Ainsi, le fait qu’un État membre n’accorde pas, aux non-résidents, le bénéfice des allégements fiscaux qu’il accorde aux résidents n’est pas considéré en principe comme discriminatoire dans la jurisprudence ( 27 ).

38. Un contribuable non-résident n’est donc pas fondé, en principe, à reprocher à l’État membre dans lequel il ne perçoit qu’une faible partie de ses revenus le fait de se voir refuser un avantage fiscal découlant de sa situation personnelle et familiale, tel que la déduction d’une pension alimentaire dont il est débiteur, cette obligation incombant à l’État membre de résidence. L’État membre d’origine des revenus ne doit prendre en considération la situation personnelle et familiale d’un
contribuable non-résident que si ce contribuable tire la totalité ou la quasi-totalité de ses ressources imposables à l’intérieur de cet État ( 28 ).

39. Toutefois, il est de jurisprudence constante que, en ce qui concerne les dépenses, telles que des frais professionnels directement liés à une activité ayant généré des revenus imposables dans un État membre, les résidents et les non‑résidents de ce dernier sont placés dans une situation comparable, de sorte qu’une réglementation dudit État qui refuse aux non-résidents, en matière d’imposition, la déduction de telles dépenses, accordée en revanche aux résidents, risque de jouer principalement au
détriment des ressortissants d’autres États membres et comporte donc une discrimination indirecte selon la nationalité ( 29 ).

40. C’est au regard des principes jurisprudentiels exposés aux points précédents qu’il faut déterminer si la situation d’un contribuable non-résident tel que M. Grünewald, qui verse des rentes alimentaires privées dans le cadre d’une cession d’une participation dans une société à titre d’avancement de part successorale, est ou non comparable à celle d’un contribuable résident tel que le frère de M. Grünewald qui reçoit au même titre les mêmes éléments de patrimoine et verse les mêmes rentes
alimentaires privées.

41. À cet égard, il convient avant tout d’observer que, en l’espèce, la décision de renvoi n’indique pas clairement quelle partie du revenu global de M. Grünewald était constituée par les revenus que celui-ci a perçus en Allemagne lors des périodes d’imposition en cause.

42. Si le juge de renvoi devait constater que, au cours de ces périodes, M. Grünewald a perçu en Allemagne la partie essentielle de son revenu global, il conviendrait alors de conclure que sa situation serait comparable à celle du contribuable résident, de sorte qu’il ne serait, en principe, pas admis de réserver un traitement fiscal différent à la déduction des rentes alimentaires privées.

43. En revanche, si le juge de renvoi devait établir que les revenus que M. Grünewald a perçus en Allemagne ne constituaient pas la partie essentielle de son revenu global, sa situation serait comparable à celle d’un contribuable résident dans l’hypothèse où les rentes alimentaires privées versées seraient qualifiées de dépenses directement liées à l’activité génératrice des revenus imposables, en vertu de la jurisprudence mentionnée au point 39 ci-dessus.

44. À cet égard, il faut rappeler que, par les frais professionnels liés directement aux recettes perçues dans l’État membre où l’activité est exercée, il convient de comprendre les frais présentant un lien économique direct avec la prestation ayant donné lieu à l’imposition dans cet État et qui sont donc indissociables de celle-ci ( 30 ).

45. Or, dans l’affaire Schröder, la Cour a déjà expressément retenu que, dans la mesure où l’engagement de payer une rente alimentaire privée en avancement de part successorale découle de la transmission des biens patrimoniaux en cause, ce qu’il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier, cette rente constitue une dépense directement liée à l’exploitation de ces biens, de telle sorte que le contribuable non-résident, tenu de verser ces rentes, se trouve à cet égard dans une situation
comparable à celle d’un contribuable résident ( 31 ).

46. Appliquée au cas d’espèce, cette approche implique que, dans le cas où le juge de renvoi constaterait, comme cela semble être le cas ( 32 ), que l’engagement de M. Grünewald de payer la rente alimentaire privée découle de la cession, en avancement de part successorale, à ce dernier de la participation dans la société de personnes génératrice, au moins partiellement, des revenus imposables en Allemagne, ces rentes seraient alors qualifiées de dépenses directement liées à l’activité génératrice
des revenus imposables, de sorte que la situation de M. Grünewald devrait être considérée comme comparable à celle d’un contribuable résident tel que le frère.

47. Or, dans sa décision de renvoi, le Bundesfinanzhof se réfère à une série de raisons évoquées au point 18 ci-dessus, qui mettraient en doute l’applicabilité au cas d’espèce de la solution adoptée dans l’arrêt Schröder. Toutefois, aucune de ces raisons ne me convainc.

48. Le Bundesfinanzhof se réfère, premièrement, à de possibles lacunes de la décision de renvoi ayant donné lieu à l’affaire Schröder, en ce qu’elle n’aurait pas montré, notamment, l’existence du «principe de correspondance» ( 33 ) entre la déduction pour le débiteur des rentes et l’imposition du bénéficiaire. À cet égard, comme la Commission, j’estime que, à supposer même que le cadre juridique national, que le juge de renvoi avait soumis à la Cour de justice dans cette affaire, ait présenté des
lacunes, l’absence éventuelle de référence au «Korrespondenzprinzip» ne modifierait rien dans l’analyse en droit de l’Union du traitement fiscal discriminatoire du contribuable non-résident. En effet, d’une part, ce principe ne joue aucun rôle dans la qualification des rentes alimentaires privées de «dépenses directement liées» à l’activité génératrice des revenus imposables en vertu de la jurisprudence visée aux points précédents. D’autre part, ‐ et sachant que, hormis les considérations
relatives aux motifs impérieux d’intérêt général, visées aux points 66 et suivants ci-dessous, ni le juge de renvoi ni le gouvernement allemand n’en mentionne aucune ‐ il n’y a aucune raison qui justifierait que le traitement fiscal des rentes privées dans le chef de leur bénéficiaire entraîne une différence de traitement fiscal dans le chef de leur débiteur selon que celui-ci serait ou non un contribuable résident.

49. Deuxièmement, je ne peux m’empêcher de relever le caractère plutôt surprenant de la thèse de l’administration financière allemande, à laquelle fait référence le Bundesfinanzhof, et selon laquelle, dans l’arrêt Schröder, la Cour ne se serait prononcée qu’au sujet d’une cession à titre onéreux et non pas sur une succession anticipée, de sorte que, dans un cas correspondant à cette première situation, il conviendrait de faire la distinction entre déduction des dépenses d’acquisition et des
intérêts. En effet, à la lecture de l’arrêt de la Cour dans l’affaire Schröder et des conclusions y relatives de l’avocat général Bot, il ne fait aucun doute que, dans cet arrêt, la Cour, tout comme dans la présente affaire, a eu à connaître d’un transfert en avancement de part successorale à titre gratuit ( 34 ). Du reste, le gouvernement allemand a clairement indiqué à l’audience que les deux affaires étaient similaires en fait.

50. Troisièmement, quant aux doutes du Bundesfinanzhof au sujet de la source des revenus imposables, je considère dénuée de pertinence, aux fins de l’analyse en droit de l’Union, la circonstance que le transfert en avancement de part successorale porte en l’espèce sur des parts d’une société de personnes ayant une activité économique et non pas sur des biens immeubles comme dans l’affaire Schröder. En effet, il s’agit dans les deux cas d’une cession de biens générant des revenus imposables en
Allemagne et le fait que ces revenus découlent d’une activité commerciale plutôt que d’une location immobilière ne modifie nullement leur traitement fiscal aux fins de la présente affaire, notamment en ce qui concerne le traitement fiscal différencié des contribuables non-résidents.

51. Dans sa décision de renvoi, le Bundesfinanzhof semble reprocher au Finanzgericht de ne pas avoir considéré que les rentes alimentaires privées étaient destinées aux exigences alimentaires des bénéficiaires, ce qui permettrait de faire relever ces rentes de la sphère personnelle du cessionnaire, de sorte que celles-ci devraient être prises en considération par l’État de résidence de ce dernier sans obligation de déduction pour l’État dans lequel le revenu est généré ( 35 ).

52. Dans ses observations, le gouvernement allemand a, lui aussi, avancé que les rentes alimentaires privées devaient être qualifiées, comme en droit allemand, de déductions personnelles car fondées sur des liens familiaux ( 36 ). Ledit gouvernement a soutenu que cette qualification en droit national des rentes alimentaires privées devait également être déterminante pour l’appréciation en droit de l’Union du traitement fiscal de ces rentes. Le régime des impôts directs n’étant pas harmonisé, le
législateur et les juridictions nationaux devraient en effet pouvoir déterminer la nature juridique des déductions fiscales.

53. À cet égard, concernant la circonstance mise en évidence par le Bundesfinanzhof et selon laquelle les rentes alimentaires privées sont destinées aux exigences alimentaires des bénéficiaires, la Cour, dans l’arrêt Schröder, rejetant des arguments similaires avancés par le gouvernement allemand, a déjà retenu que cette circonstance ne remettait pas en question l’existence d’un lien direct au sens de la jurisprudence, dans la mesure où ledit lien direct découle non pas d’une corrélation quelconque
entre le montant de la dépense en question et celui des revenus imposables, mais du fait que la dépense soit indissociable de l’activité produisant ces revenus ( 37 ).

54. Pour ce qui est, en revanche, de l’argument du gouvernement allemand relatif à la nécessité de prendre en considération la qualification en droit national des déductions en cause, je note que, indépendamment de la pertinence que le législateur et les juridictions nationaux veulent accorder à une qualification au niveau national, le fait de qualifier, d’une manière ou d’une autre, une dépense ou une déduction en droit national (quelle que soit la qualification: personnelle, professionnelle ou
encore d’une autre nature) ne peut toutefois servir à justifier une discrimination entre citoyens européens en fonction de leur lieu de résidence, au mépris du droit de l’Union.

55. À cet égard, il convient également de rappeler qu’il ressort d’une jurisprudence constante que, s’il est vrai que, à l’heure actuelle, les États membres ont conservé leur compétence en matière de fiscalité directe, ils doivent toutefois exercer celle-ci dans le respect du droit de l’Union ( 38 ).

56. Le gouvernement allemand a avancé, à titre subsidiaire, que, en l’espèce, il n’existait pas de lien direct entre les dépenses dont la déduction est demandée et les revenus imposables. En effet, pour justifier l’existence d’un «lien direct» entre les rentes et les revenus d’activité commerciale, il ne suffirait pas que M. Grünewald n’aurait pas pu obtenir la participation dans la société en l’absence d’engagement de verser la rente. Pour établir l’existence d’un tel lien, l’élément déterminant
tiendrait à la circonstance que les dépenses invoquées aient été précisément assumées en raison de l’activité économique imposable en Allemagne, à savoir à travers la gestion de l’entreprise, ou qu’elles présentent un lien indissociable avec cette activité économique.

57. Dans le même sens, selon le gouvernement français, le lien entre les rentes et les revenus commerciaux en cause ne pourrait pas être qualifié de direct, dès lors que les rentes ne seraient pas spécifiquement liées à ces revenus commerciaux. Le gouvernement français se réfère à deux arrêts récents de la Cour, Commission/Finlande ( 39 ) et Commission/Allemagne ( 40 ), dans lesquels la Cour aurait précisé le sens et la portée de la notion de «lien direct».

58. À cet égard, il convient toutefois d’observer que rien ne justifie de ne pas confirmer les considérations retenues par la Cour dans l’arrêt Schröder, à savoir que, si le juge de renvoi devait établir que l’engagement de payer la rente alimentaire privée découle, à savoir résulte ou provient, de la cession des éléments de patrimoine qui génèrent le revenu, la dépense relative à l’exécution de cette obligation constitue une dépense directement liée à la gestion de ces éléments ( 41 ).

59. Or, en l’espèce, et sous réserve des vérifications incombant au juge de renvoi, il semble que, comme dans l’affaire Schröder, l’obligation de payer les rentes alimentaires privées découle de la cession des parts de la société ayant généré le revenu imposable. En effet, la cession des parts et les rentes font partie d’un même contrat et sont la contrepartie l’une des autres. Le Bundesfinanzhof a relevé dans sa décision de renvoi qu’il résulte de l’article 2 de ce contrat qu’il est convenu que les
rentes sont versées à titre de «contrepartie» («Gegenleistung»). Cela montre que, si M. Grünewald n’avait pas assumé l’obligation de payer la rente à son père, il n’aurait pas reçu de participation dans la société de personnes.

60. D’autre part, l’existence d’un «lien direct» en cas de cession en avancement de part successorale résulte de la précision jurisprudentielle du régime juridique de la succession anticipée par le Bundesfinanzhof lui-même. En effet, il ressort du point 9 ci-dessus que, d’après la jurisprudence de ce juge, les rentes alimentaires privées constituent des revenus provenant de l’élément de patrimoine cédé que le cédant se réserve, mais qui doivent être produits par le cessionnaire. Partant, en
substance, la rente correspond au revenu généré par le bien cédé, ou du moins à une partie de celui-ci. Cela montre qu’il existe non pas uniquement un lien direct, mais aussi une véritable correspondance entre la dépense dont la déduction est demandée (la rente alimentaire privée) et les revenus imposables (les bénéfices générés par la participation dans la société).

61. Quant aux arrêts cités par le gouvernement français, dans l’affaire Commission/Finlande, la Cour était appelée à examiner la compatibilité avec l’article 63 TFUE du régime finlandais d’imposition des dividendes distribués aux fonds de pension, régime discriminatoire pour les fonds non-résidents ( 42 ). Or, il ne peut, selon moi, être inféré de cet arrêt, comme semble le faire le gouvernement français, que la Cour ait entendu appliquer un critère unique, celui de l’intention du législateur, qui
aurait remplacé celui de l’indissociabilité des dépenses et des revenus développé dans la jurisprudence antérieure pour établir l’existence d’un lien direct. En effet, aux points 41 à 43 de cet arrêt, la Cour n’a développé aucun critère nouveau, mais s’est limitée à rejeter l’argument avancé par le gouvernement finlandais relatif à la non-comparabilité des situations des fonds résidents et non-résidents en raison de l’absence de lien direct, en constatant que le législateur avait lui-même
instauré, par la législation nationale en cause, un lien direct entre la dépense déductible (les montants provisionnés en vue de faire face à leurs engagements en matière de pensions) et les revenus imposables (les dividendes) afin de tenir compte de la finalité spécifique des fonds ( 43 ), qui était commune tant aux fonds résidents qu’aux fonds non-résidents.

62. En revanche, dans l’affaire Commission/Allemagne, la Cour était appelée à examiner la compatibilité avec l’article 63 TFUE du régime fiscal allemand selon lequel les fonds de pension non-résidents ne pouvaient pas déduire des dividendes et des intérêts perçus en Allemagne des dépenses qui, selon la Commission, devaient être considérées comme directement liées à ceux-ci. Toutefois, à la différence de ce que semble soutenir le gouvernement français, dans cet arrêt, la Cour n’a pas modifié
l’approche retenue dans l’arrêt Schröder, sur laquelle elle s’est au contraire appuyée ( 44 ), mais s’est bornée à rejeter le recours de la Commission au motif que celle-ci n’avait pas démontré le manquement, comme il lui incombait de le faire. En particulier, la Cour a rejeté le recours de la Commission au motif que celle-ci n’avait pas fourni d’éléments suffisant à démontrer que les dépenses (frais bancaires et de transaction, de même que des dépenses de ressources humaines) qui, selon elle,
présentaient un lien direct avec les revenus imposables (les dividendes et intérêts) étaient spécifiquement nécessaires à la perception de ces revenus. En d’autres termes, utilisant la terminologie de l’arrêt Schröder, la Commission n’a pas suffisamment démontré que ces dépenses découlaient ou provenaient de l’activité génératrice des revenus imposables.

63. Le gouvernement allemand fait également valoir que, même si l’État de résidence de M. Grünewald devait considérer, aux fins de déduction personnelle, les rentes alimentaires privées que celui-ci verse, il y aurait un risque de double déduction de ces rentes et, corrélativement, de traitement plus favorable des non-résidents par rapport au traitement garanti aux résidents. Or, l’existence éventuelle d’un tel risque, qui en l’espèce apparaît plutôt théorique, ne permet pas de justifier un
traitement discriminatoire des contribuables non-résidents. En effet, tant la directive 77/799/CEE du Conseil, du 19 décembre 1977, concernant l’assistance mutuelle des autorités compétentes des États membres dans le domaine des impôts directs ( 45 ), en vigueur à l’époque des faits faisant l’objet de la procédure au principal, que la directive 2011/16/UE du Conseil, du 15 février 2011, relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal et abrogeant la directive 77/799 ( 46 ),
prévoient un échange d’informations entre autorités fiscales intéressées, de sorte que le ministère des Finances allemand peut informer l’État de résidence du contribuable assujetti partiellement de la demande de déduction présentée par ce dernier afin d’éviter la double déduction ( 47 ).

64. Enfin, le gouvernement français fait valoir, à titre subsidiaire, que, dans l’hypothèse où la Cour qualifierait de contraire à l’article 63 TFUE une législation nationale empêchant le contribuable non-résident de déduire les rentes alimentaires privées versées, alors la déduction devrait non pas être imputée sur le revenu total généré par celui-ci dans l’État dans lequel il n’est pas résident, mais être admise uniquement par référence aux revenus catégoriels relatifs à l’activité directement
liée aux rentes, et donc, en l’espèce, uniquement aux revenus générés en Allemagne par M. Grünewald en raison de sa participation dans la société de personnes.

65. À cet égard, j’estime toutefois, conformément à ce qu’a indiqué la Commission à l’audience, que, dans la mesure où l’approche retenue n’entraîne pas de discrimination entre contribuable résident et non-résident, il appartient aux autorités fiscales nationales de décider des modalités précises de calcul des déductions ou de la base imposable sur laquelle effectuer ces déductions.

2. Sur l’existence d’un motif impérieux d’intérêt général

66. Il résulte d’une jurisprudence constante qu’une restriction à la libre circulation des capitaux ne saurait être admise que si elle se justifie par des raisons impérieuses d’intérêt général ( 48 ). Si, dans l’affaire Schröder, aucun motif impérieux d’intérêt général n’avait été avancé par le gouvernement allemand ou envisagé par le juge de renvoi ( 49 ), deux motifs sont en revanche invoqués dans la présente affaire.

a) Sur la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre États membres

67. Le juge de renvoi se demande avant tout si le fait de nier au contribuable non-résident la possibilité de déduire les rentes dont celui-ci est débiteur pourrait se justifier afin de préserver une répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre États membres conformément au principe de territorialité. Se référant au «Korrespondenzprinzip» ( 50 ) susmentionné, duquel résulterait que la législation en cause ne pourrait être examinée au regard du droit de l’Union sans tenir compte de la
situation fiscale du bénéficiaire de la rente, ledit juge se demande si l’État d’origine des revenus pourrait être autorisé à sauvegarder sa législation fiscale par une interdiction de déduction à l’égard d’un contribuable non-résident dans le cas où, pour des raisons objectives, il serait impossible d’imposer le bénéficiaire, comme lorsque celui-ci aurait sa résidence en dehors du territoire national.

68. À cet égard, il y a lieu de rappeler, d’une part, que la préservation de la répartition du pouvoir d’imposition entre les États membres est un objectif légitime reconnu par la Cour et que, d’autre part, il ressort d’une jurisprudence constante que, en l’absence de mesures d’unification ou d’harmonisation adoptées par l’Union européenne, les États membres demeurent compétents pour définir, par voie conventionnelle ou unilatérale, les critères de répartition de leur pouvoir de taxation, en vue,
notamment, d’éliminer les doubles impositions ( 51 ).

69. Toutefois, en l’espèce, il y a lieu, premièrement, d’observer qu’il ne ressort ni de la décision de renvoi ni d’aucun autre élément du dossier que les rentes versées par M. Grünewald à son père bénéficiaire ne pourraient pas être imposées en Allemagne. En effet, rien n’indique que le père résiderait en dehors du territoire allemand ou que, pour une quelconque autre raison, celui-ci ne pourrait pas être imposé au titre de ces rentes. Il semble donc s’agir d’un argument hypothétique qui, sous
réserve bien entendu de vérification par le juge de renvoi, ne permettrait nullement de justifier concrètement dans la présente affaire la discrimination qu’a subie M. Grünewald.

70. Deuxièmement, et en tout état de cause, comme l’indique déjà le point 48 ci-dessus, indépendamment du «Korrespondenzprinzip» ( 52 ), le traitement fiscal du bénéficiaire des rentes ne peut pas justifier la discrimination du contribuable non‑résident. La législation en cause, particulièrement l’article 50 de l’EStG, refuse généralement toute déduction en tant que «dépense exceptionnelle» lorsque le débiteur est assujetti partiellement à l’impôt. Partant, la déduction des rentes alimentaires
privées est refusée en tout état de cause au contribuable non‑résident et indépendamment tant du lieu de résidence du créancier que de l’imposition de ces rentes dans le chef de leur bénéficiaire. Cette législation n’a aucunement pour but de maintenir la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition et ne peut pas être considérée, en tout état de cause, comme une mesure proportionnée à cette fin.

b) Sur la cohérence du régime fiscal national

71. Se fondant expressément sur les mêmes arguments auxquels s’est référé le Bundesfinanzhof pour faire état de ses doutes quant au motif tiré de la répartition équilibrée du pouvoir d’imposition entre États membres, le gouvernement allemand fait également valoir, comme motif de justification du traitement fiscal en cause, la nécessité de garantir la cohérence du régime fiscal national. Selon lui, en raison du «Korrespondenzprinzip» et du transfert corrélatif de capacité contributive entre débiteur
et créancier des rentes ( 53 ), l’ensemble composé par le de cujus et ses héritiers («Generationennachfolgeverbund») dans le cadre duquel intervient la succession anticipée (en l’espèce, les parents et les deux fils) devrait être considéré comme une entité fiscale unique et donc imposé de manière uniforme ( 54 ). Selon le gouvernement allemand, si la déduction des rentes alimentaires privées était permise en Allemagne sans que le bénéficiaire de ces rentes soit, en même temps, taxé, alors
l’entité fiscale unique bénéficierait d’un double avantage, ce qui créerait un risque pour la cohérence du système fiscal allemand.

72. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, dans sa jurisprudence constante, la Cour a reconnu la nécessité de préserver la cohérence d’un régime fiscal comme un motif impérieux d’intérêt général ( 55 ). Toutefois, pour qu’un argument fondé sur une telle justification puisse prospérer, il faut que soit établie l’existence d’un lien direct entre l’avantage fiscal concerné et la compensation de cet avantage par un prélèvement fiscal déterminé, le caractère direct de ce lien devant être apprécié au
regard de l’objectif de la réglementation en cause ( 56 ). En outre, un tel lien direct fait défaut, lorsqu’il s’agit, notamment, d’impositions distinctes ou du traitement fiscal de contribuables différents ( 57 ).

73. Or, en l’espèce, il apparaît évident que le traitement fiscal en cause concerne des contribuables différents, à savoir, d’une part, le débiteur des rentes alimentaires privées qui, s’il est résident, peut déduire ces rentes et, d’autre part, le bénéficiaire dans le chef duquel, conformément au «Korrespondenzprinzip», les rentes sont imposées.

74. Le gouvernement allemand estime cependant que le lien direct entre avantage fiscal et prélèvement, exigé par la jurisprudence, peut exister même pour des contribuables différents puisque, en raison du «Korrespondenzprinzip», le de cujus et ses héritiers devraient être traités comme une entité fiscale unique.

75. Cet argument ne me convainc nullement.

76. En effet, premièrement, cet argument me semble être en évidente contradiction avec celui que le gouvernement allemand a avancé – et qui a été abordé aux points 56 et suivants ci-dessus – selon lequel il n’y aurait pas de lien direct entre les dépenses dont la déduction est demandée (les rentes alimentaires privées au titre desquelles le bénéficiaire est imposé) et les revenus imposables. En effet, à supposer qu’il n’existe pas de lien direct entre les dépenses déductibles et les revenus
imposables, je me demande comment il est possible d’affirmer qu’un tel lien existerait entre l’avantage fiscal et le prélèvement.

77. Deuxièmement, cet argument contredit la pratique des autorités fiscales allemandes qui, en vertu de la législation fiscale en cause, ne traitent pas toujours le de cujus et les héritiers comme une entité fiscale unique, mais seulement si le contribuable débiteur réside en Allemagne. En effet, ce n’est que dans ce cas qu’il existe une correspondance entre l’imposition des rentes et leur déduction. En revanche, en vertu de l’article 50 de l’EStG, la déduction des rentes alimentaires privées est
refusée en tout état de cause au contribuable non‑résident, que les rentes soient ou non taxées en Allemagne.

78. En outre, à l’audience, le gouvernement allemand a lui-même admis que, si le bénéficiaire des rentes réside à l’étranger – situation, comme nous l’avons vu, qui semble être plutôt hypothétique en l’espèce – la déduction des rentes alimentaires privées est accordée au débiteur contribuable résident, même si ces rentes ne sont pas imposées en Allemagne, à condition que celui-ci produise un certificat de l’État membre dans lequel réside le bénéficiaire des rentes, indiquant que celles-ci sont
imposées dans cet État membre.

79. Il ressort donc de ces considérations que le «Korrespondenzprinzip» ne fonde aucune cohérence qui, comme le soutient le gouvernement allemand, devrait être préservée dans le régime fiscal national et qui pourrait justifier un traitement discriminatoire du contribuable non-résident.

80. Il s’ensuit que, selon moi, aucun des motifs impérieux d’intérêt général soulevés ne peut justifier la restriction constatée à la libre circulation des capitaux.

V – Conclusion

81. Pour les raisons susmentionnées, je suggère donc à la Cour de répondre à la question préjudicielle du Bundesfinanzhof dans les termes suivants:

L’article 63 TFUE doit être interprété en ce sens qu’il s’oppose à une réglementation d’un État membre, telle que celle en cause au principal, laquelle permet au contribuable résident, et pas au contribuable non-résident, de déduire les rentes alimentaires privées versées dans le cadre d’une cession en avancement de part successorale, d’un élément patrimonial lié audit État et générant des revenus, pour autant que l’engagement de payer ces rentes découle de la transmission de cet élément
patrimonial, même si cette réglementation prévoit que la déduction entraîne une obligation fiscale correspondante du bénéficiaire des prestations soumis à une obligation fiscale illimitée dans cet État.

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

( 1 ) Langue originale: l’italien.

( 2 ) C‑450/09, EU:C:2011:198.

( 3 ) Voir arrêt Schröder (EU:C:2011:198, points 5 à 7), ainsi que conclusions de l’avocat général Bot dans cette affaire (C‑EU:C:2010:761, points 13 à 23).

( 4 ) Dans la version applicable à l’affaire au principal BGBl. 2002 I, p. 4210.

( 5 ) Voir articles 1er et 49 de l’EStG.

( 6 ) Respectivement prévus aux articles 4 et 9 de l’EStG.

( 7 ) Arrêts du Bundesfinanzhof du 5 juillet 1990, GrS 4/89 à 6/89 (point C.II.1.C), et du 12 mai 2003, GrS 1/00 (point C.II.3).

( 8 ) Arrêt du Bundesfinanzhof du 5 juillet 1990, GrS 4/89 à 6/89 (point C.I.1).

( 9 ) Arrêts du Bundesfinanzhof du 5 juillet 1990, GrS 4/89 à 6/89 (point C.II.1.C) et du 12 mai 2003, GrS 1/00 (point C.II.1.C).

( 10 ) Arrêt du Bundesfinanzhof du 31 mars 2004, X R 66/98 (point II.3 et jurisprudence citée).

( 11 ) Voir point 12 supra.

( 12 ) Arrêt Welte (C‑181/12, EU:C:2013:662, point 19).

( 13 ) Arrêts Welte (EU:C:2013:662, point 20 et jurisprudence citée), et Schröder (EU:C:2011:198, point 26).

( 14 ) Arrêts Commission/Espagne (C‑127/12, EU:C:2014:2130, point 53), et Mattner (C‑510/08, EU:C:2010:216, point 20 et jurisprudence citée).

( 15 ) Dans cet arrêt (EU:C:2011:198, point 27), la Cour a retenu que la transmission de biens immeubles sis dans un État membre, à titre de succession anticipée, à une personne physique résidant dans un autre État membre, relevait de l’article 63 TFUE.

( 16 ) À cet égard, en effet, d’une part, la Cour a déjà retenu que le transfert de parts d’une société résidente entre un résident et un non-résident constitue un mouvement de capitaux (voir, en ce sens, arrêt Glaxo Wellcome, C‑182/08, EU:C:2009:559, point 43). Par ailleurs, selon moi, la question d’une éventuelle application de la liberté d’établissement en vertu de l’article 49 TFUE à laquelle, entre autres, aucun des intervenants n’a fait référence, ne se pose pas en l’espèce. En effet, quant à
la question de savoir si une législation nationale relève de l’une ou de l’autre des libertés de circulation, il résulte d’une jurisprudence bien établie qu’il y a lieu de prendre en considération l’objet de la législation en cause (voir arrêt Test Claimants in the FII Group Litigation, C‑35/11, EU:C:2012:707, point 90 et jurisprudence citée). Or, force est de constater que la législation nationale en cause porte sur le traitement fiscal des rentes alimentaires privées dues au titre d’une opération
d’avancement de part successorale et, en particulier, la déductibilité de ces rentes en tant que «dépenses exceptionnelles», et ce indépendamment du fait que cette opération porte ou pas sur une cession de participations dans une société (c’est ce qui différencie la législation fiscale en cause de celle faisant l’objet de l’arrêt Scheunemann, C‑31/11, EU:C:2012:481, point 21). Par conséquent, à la lumière de son objet, à supposer que la réglementation en cause ait des effets restrictifs sur la
liberté d’établissement, notamment lorsque l’objet de la cession en avancement de part successorale porte sur des participations dans des sociétés permettant d’exercer une influence certaine sur les décisions et de déterminer les activités, de tels effets seraient la conséquence inéluctable d’une éventuelle entrave à la libre circulation des capitaux et ne justifient pas, dès lors, un examen autonome de la même réglementation au regard de l’article 49 TFUE (voir, en ce sens, arrêt Glaxo Wellcome,
EU:C:2009:559, point 51 et jurisprudence citée). Il convient également de relever, entre autres, que, en l’espèce, la décision de renvoi n’indique pas clairement quel rôle, dans la gestion de la société, confèrent les participations faisant l’objet de la cession.

( 17 ) Arrêts Halley (C‑132/10, EU:C:2011:586, point 22 et jurisprudence citée) et Schröder (EU:C:2011:198, point 30).

( 18 ) Arrêts Commission/Finlande (C‑342/10, EU:C:2012:688, point 28) et Commission/Allemagne (C‑600/10, EU:C:2012:737, point 14).

( 19 ) Voir, par référence aux revenus issus de la location de biens immeubles, arrêt Schröder (EU:C:2011:198, point 31).

( 20 ) Voir, par analogie, au sujet de l’acquisition de biens immeubles, arrêt Schröder (EU:C:2011:198, point 31). Quant au caractère dissuasif pour l’acquisition de parts de sociétés, voir arrêts Haribo Lakritzen Hans Riegel et Österreichische Salinen (C‑436/08 et C‑437/08, EU:C:2011:61, points 52 et 53), et Glaxo Wellcome (EU:C:2009:559, points 57 et 58).

( 21 ) Voir arrêt Schröder (EU:C:2011:198, point 32).

( 22 ) Voir arrêts Commission/Allemagne (C‑211/13, EU:C:2014:2148, points 45 et 46) et Welte (EU:C:2013:662, points 42 et 43, et jurisprudence citée).

( 23 ) Arrêt Commission/Finlande (EU:C:2012:688, point 35 et jurisprudence citée).

( 24 ) Voir arrêts Schröder (EU:C:2011:198, point 35 et jurisprudence citée) et Commission/Allemagne (EU:C:2014:2148, point 47).

( 25 ) C‑279/93, EU:C:1995:31.

( 26 ) Arrêts Schumacker (EU:C:1995:31, points 31 et 32) et Schröder (EU:C:2011:198, point 37 et jurisprudence citée).

( 27 ) Et cela compte tenu des différences objectives entre la situation de résident et celle de non‑résident concernant tant la source des revenus que la capacité contributive personnelle ou encore la situation personnelle et familiale. Voir arrêt Schröder (EU:C:2011:198, point 38 et jurisprudence citée).

( 28 ) Arrêt Schumacker (EU:C:1995:31, point 32). Voir, également, conclusions de l’avocat général Bot dans l’affaire Schröder (EU:C:2010:761, points 44 et 45).

( 29 ) Arrêts Commission/Finlande (EU:C:2012:688, point 37) et Schröder (EU:C:2011:198, point 40 et jurisprudence citée).

( 30 ) Arrêt Centro Equestre da Lezíria Grande (C‑345/04, EU:C:2007:96, point 25).

( 31 ) EU:C:2011:198, point 46.

( 32 ) Voir point 59 infra.

( 33 ) Le «Korrespondenzprinzip» mentionné au point 12 ci-dessus.

( 34 ) Voir points 9, 12 et également 42 et 43 de l’arrêt Schröder (EU:C:2011:198) et, de manière encore plus évidente, points 20 à 23 des conclusions de l’avocat général Bot dans cette affaire (EU:C:2010:761).

( 35 ) Voir jurisprudence citée à la note 25.

( 36 ) Le gouvernement allemand a notamment avancé que la nature personnelle des rentes alimentaires privées résultait de la nature du contrat au regard du droit de la famille et des successions, de l’objectif de la cession qui vise à assurer des parents vieillissants d’un point de vue économique, de la circonstance que la rente est appréciée non pas en fonction de la valeur de la contrepartie, mais des exigences alimentaires du cédant et de la capacité contributive du débiteur des prestations et du
fait que les parties à la convention se laissent guider par l’idée de maintenir l’activité de production cédée entre les mains de la famille.

( 37 ) EU:C:2011:198, point 43.

( 38 ) Arrêts Schumacker (EU:C:1995:31, point 21); Itelcar (C‑282/12, EU:C:2013:629, point 26 et jurisprudence citée), et Conijn (C‑346/04, EU:C:2006:445, point 14 et jurisprudence citée).

( 39 ) EU:C:2012:688.

( 40 ) EU:C:2012:737.

( 41 ) Voir point 45 supra et arrêt Schröder (EU:C:2011:198, points 45, 46 et 49).

( 42 ) Alors que les fonds résidents pouvaient déduire fiscalement les montants provisionnés en vue de faire face à leurs engagements en matière de pensions, ce qui aboutissait, en fait, à une exonération d’impôt desdits dividendes, cette possibilité n’était pas accordée aux fonds non‑résidents. Voir arrêt Commission/Finlande (EU:C:2012:688, points 25 et 26).

( 43 ) La Cour a retenu que cette finalité consistait à accumuler des capitaux, par le biais d’investissements produisant, notamment, un revenu sous la forme de dividendes, afin de faire face à leurs obligations futures au titre de contrats d’assurance. Voir arrêt Commission/Finlande (EU:C:2012:688, point 42).

( 44 ) Arrêt Commission/Allemagne (EU:C:2012:737, point 17).

( 45 ) JO L 336, p. 15.

( 46 ) JO L 64, p. 1.

( 47 ) Voir, en ce sens, également arrêts Centro Equestre da Lezíria Grande (EU:C:2007:96, point 36) et van Caster (C‑326/12, EU:C:2014:2269, point 55).

( 48 ) Voir, entre autres, arrêt DMC (C‑164/12, EU:C:2014:20, point 44 et jurisprudence citée).

( 49 ) EU:C:2011:198, point 48.

( 50 ) Voir point 12 supra.

( 51 ) Voir arrêt DMC (EU:C:2014:20, points 46 et 47 et jurisprudence citée).

( 52 ) Dans sa décision de renvoi, le Bundesfinanzhof se réfère à l’arrêt Schempp (C‑403/03, EU:C:2005:446). Or, cette référence me paraît sans pertinence en ce que cette affaire concernait la non-déductibilité dans un État membre d’une pension alimentaire versée dans un autre État membre et donc la relation entre deux législations fiscales différentes (voir notamment point 35), alors que la question de la déductibilité des rentes privées et de l’imposition correspondante du bénéficiaire concerne
exclusivement le système fiscal allemand.

( 53 ) Voir points 10 et 12 supra.

( 54 ) Le gouvernement allemand a également indiqué que, dans des cas analogues, tel que celui des groupes de sociétés, la Cour a reconnu que différentes personnes formaient une entité fiscale unique. Il vise en particulier l’arrêt Papillon (C‑418/07, EU:C:2008:659).

( 55 ) Voir, entre autres, arrêts Manninen (C‑319/02, EU:C:2004:484, point 42) et Papillon (EU:C:2008:659, point 43).

( 56 ) Voir, entre autres, arrêt Emerging Markets Series of DFA Investment Trust Company (C‑190/12, EU:C:2014:249, point 92 et jurisprudence citée).

( 57 ) Voir arrêts DI. VI. Finanziaria di Diego della Valle & C. (C‑380/11, EU:C:2012:552, point 47 et jurisprudence citée). À cet égard, je renvoie également aux points 35 et suiv. de mes conclusions dans l’affaire Commission/Portugal (C‑493/09, EU:C:2011:344).


Synthèse
Formation : Grande chambre
Numéro d'arrêt : C-559/13
Date de la décision : 18/11/2014
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Bundesfinanzhof.

Renvoi préjudiciel – Libre circulation des capitaux – Fiscalité directe – Impôt sur le revenu – Déductibilité de rentes alimentaires versées en contrepartie d’une donation en avancement de part successorale – Exclusion pour les non-résidents.

Libre circulation des capitaux


Parties
Demandeurs : Finanzamt Dortmund-Unna
Défendeurs : Josef Grünewald.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mengozzi

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2014:2379

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award