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24/09/2014 | CJUE | N°C-518/13

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, The Queen, à la demande de: Eventech Ltd contre Parking Adjudicator., 24/09/2014, C-518/13


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NILS WAHL

présentées le 24 septembre 2014 ( 1 )

Affaire C‑518/13

The Queen, à la demande de Eventech Ltd

contre

The Parking Adjudicator

[demande de décision préjudicielle formée par la Court of Appeal (England & Wales) (Royaume-Uni)]

«Aide d’État — Notion d’‘aide’ au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE — Règles régissant l’accès aux infrastructures publiques et l’utilisation de celles-ci — Autorisation donnée aux taxis mais no

n aux véhicules de location avec chauffeur d’emprunter les voies de bus dans le Grand Londres — Transfert de ressources d’État — Notion de ‘...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NILS WAHL

présentées le 24 septembre 2014 ( 1 )

Affaire C‑518/13

The Queen, à la demande de Eventech Ltd

contre

The Parking Adjudicator

[demande de décision préjudicielle formée par la Court of Appeal (England & Wales) (Royaume-Uni)]

«Aide d’État — Notion d’‘aide’ au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE — Règles régissant l’accès aux infrastructures publiques et l’utilisation de celles-ci — Autorisation donnée aux taxis mais non aux véhicules de location avec chauffeur d’emprunter les voies de bus dans le Grand Londres — Transfert de ressources d’État — Notion de ‘sélectivité’ — Effet sur les échanges entre États membres»

1.  La Court of Appeal (England & Wales) (Royaume-Uni) a demandé à la Cour de préciser si une politique en matière de voies de bus (ci-après la «politique en matière de voies de bus») adoptée par Transport for London (l’autorité londonienne compétente en matière de transport, ci-après «TfL») relève de la notion d’«aide» au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. En vertu de cette politique, seuls les taxis londoniens, dits «taxis noirs» («black cabs»), et non les véhicules de location avec
chauffeur («private hire vehicles»), sont autorisés, pendant certaines périodes de la journée, à emprunter le couloir réservé aux bus aménagé sur les voies publiques.

2.  Ce litige s’inscrit dans le sillage des progrès technologiques faits au cours des dernières décennies. En particulier, l’avènement des systèmes de navigation par satellite et des smartphones possédant des applications spécifiques conçues pour faciliter les demandes de transport a changé le comportement des clients, brouillant les lignes de démarcation entre les taxis et les véhicules de location avec chauffeur. Cela a pour conséquence que les taxis et les véhicules de location avec chauffeur se
livrent une concurrence féroce en Europe, et Londres n’est pas la seule ville où des conflits ont vu le jour ( 2 ).

3.  En somme, je ne considère pas que les règles en matière d’aides d’État sont concernées, de manière générale, par des mesures étatiques telles que la politique en matière de voies de bus, à condition qu’un traitement égal soit garanti à l’égard d’entreprises comparables.

I – Le cadre juridique national

A – Les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur

4. À Londres, les services de taxi sont fournis par les taxis noirs et les véhicules de location avec chauffeur. Les deux types de service font l’objet d’une autorisation d’exploitation délivrée par un organisme qui se trouve sous la supervision de TfL. Cette autorisation est cependant accordée sur le fondement de dispositions légales différentes et soumise à des conditions différentes selon qu’il s’agit de taxis ou de véhicules de location avec chauffeur.

5. L’autorisation d’exploitation des taxis londoniens est délivrée conformément aux dispositions du décret d’application sur les taxis londoniens (London Cab Order), de 1934. Ce décret a été pris sur le fondement de l’habilitation conférée par l’article 6 de la loi relative au transport public urbain (Metropolitan Public Carriage Act), de 1869, disposant à son article 8, paragraphe 2, qu’«un taxi ne peut offrir ses services» («ply for hire») (mise en italique par mes soins) à Londres que lorsque le
chauffeur est titulaire d’une autorisation d’exploitation délivrée par TfL en vertu de l’article 8 de cette même loi. Il en résulte que seuls les taxis londoniens sont autorisés à prendre en charge des passagers dans la rue malgré l’absence de réservation préalable.

6. L’autorisation d’exploitation des véhicules de location avec chauffeur fait l’objet d’un régime différent, conformément aux dispositions de la loi relative aux véhicules de location avec chauffeur [Private Hire Vehicles (London) Act], de 1998. Ils n’ont pas le droit «d’offrir leurs services» à Londres, mais peuvent prendre en charge des passagers les ayant préalablement réservés.

B – Les compétences en matière de réglementation de la circulation et la politique en matière de voies de bus

7. En vertu de l’article 121A de la loi relative à la réglementation de la circulation routière (Road Traffic Regulation Act), de 1984 (ci-après la «loi de 1984»), TfL est l’autorité compétente en matière de circulation pour certaines routes du Grand Londres dénommées «les routes relevant de la Greater London Authority, l’autorité compétente du Grand Londres (GLA)» (les routes soumises à la GLA) ( 3 ), tandis que les autorités compétentes en matière de circulation pour la quasi-totalité des autres
routes à Londres et dans le Grand Londres sont les différents arrondissements («Boroughs») de Londres.

8. L’article 6 de la loi de 1984 (telle que modifiée) habilite l’autorité responsable en matière de circulation compétente pour une voie donnée à restreindre la circulation sur ladite voie (ou une partie de celle-ci) à certains types de véhicules. Dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 6, TfL a désigné des couloirs de bus sur un certain nombre de voies relevant de la GLA. C’est dans ce contexte qu’il a adopté la politique en matière de voies de bus.

9. La plupart des arrondissements de Londres ont adopté des politiques en matière de voies de bus semblables à celle de TfL. L’on peut citer à titre d’exemple la voie de bus de Southampton Row, qui est gérée par l’arrondissement londonien de Camden. Les véhicules de location avec chauffeur sont toutefois autorisés à emprunter les voies de bus afin de prendre en charge des passagers ou de les déposer.

C – Les sanctions

10. En vertu de l’article 4 de la loi relative aux autorités locales de Londres (London Local Authorities Act), de 1996, les autorités compétentes en matière de circulation peuvent dresser des procès‑verbaux de contravention pour non‑respect d’un arrêté pris en vertu de l’article 6 de la loi de 1984.

11. La police peut aussi faire respecter les arrêtés pris conformément à l’article 6 de la loi de 1984, puisque l’article 8, paragraphe 1, de ladite loi dispose qu’agir en contravention à un arrêté pris en vertu de l’article 6 ou ne pas respecter un tel arrêté constitue une infraction pénale. Toutefois, en pratique, la majorité des infractions à ces arrêtés font l’objet de procès-verbaux de contravention dressés par les autorités compétentes en matière de circulation.

II – Les faits à l’origine du litige, la procédure au principal et les questions préjudicielles

12. Eventech Ltd (ci-après «Eventech») est une société liée à Addison Lee Plc (ci-après «Addison Lee»), qui est l’exploitant d’un parc de véhicules de location avec chauffeur dans le Grand Londres. Eventech est le détenteur agréé de tous les véhicules de location avec chauffeur d’Addison Lee, ceux-ci étant loués en vertu de contrats par Addison Lee à des chauffeurs indépendants.

13. Les 6 et 13 octobre 2010, deux chauffeurs d’Addison Lee ont emprunté avec leur véhicule la voie de bus de Southampton Row dans le centre de Londres. L’arrondissement de Camden a alors notifié des procès-verbaux de contravention à Eventech pour ces deux usages de ladite voie de bus. Eventech a contesté ces contraventions et la légalité de la politique en matière de voies de bus devant le Parking Adjudicator.

14. Le Parking Adjudicator a rejeté ce recours. Eventech a alors introduit un recours juridictionnel devant la High Court of Justice (England & Wales), en soutenant que la politique en matière de voies de bus viole les règles applicables en matière de libre prestation des services, de liberté d’établissement et d’aides d’État. La High Court of Justice a rejeté ce recours par un jugement du 13 juillet 2012.

15. Le 7 décembre 2012, Eventech a été autorisée à interjeter appel contre la décision de la High Court of Justice, et une audience a alors été organisée devant la Court of Appeal. Nourrissant des doutes quant à l’interprétation correcte de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, la Court of Appeal a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes:

«1)   Dans les circonstances de l’espèce, le fait de rendre un couloir de bus aménagé sur une voie publique accessible aux taxis londoniens à l’exclusion des véhicules de location avec chauffeur aux heures d’usage dudit couloir de bus implique-t-il l’utilisation de ‘ressources d’État’ au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE?

a) Pour déterminer si le fait de rendre un couloir de bus aménagé sur une voie publique accessible aux taxis londoniens à l’exclusion des véhicules de location avec chauffeur aux heures d’utilisation dudit couloir de bus est sélectif au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, à quel objectif doit-on se référer pour apprécier si les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur sont dans une situation juridique et factuelle comparable?

b) S’il peut être démontré que l’objectif pertinent, au sens de la deuxième question, sous a), est au moins en partie de créer un système de transport sûr et efficace et qu’il existe des raisons de sécurité ou d’efficacité qui justifient d’autoriser les taxis londoniens à circuler dans les voies de bus, mais qui ne s’appliquent pas aux véhicules de location avec chauffeur, peut-on dire que la mesure n’est pas sélective au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE ?

c) Pour répondre à la deuxième question, sous b), faut-il vérifier si l’État membre, s’appuyant sur cette justification, a démontré en outre que le traitement favorable accordé aux taxis londoniens par rapport aux véhicules de location avec chauffeur est proportionné et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire?

3)   Le fait de rendre un couloir de bus aménagé sur une voie publique accessible aux taxis londoniens à l’exclusion des véhicules de location avec chauffeur aux heures d’utilisation dudit couloir de bus est-il de nature à affecter les échanges entre États membres au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE lorsque la route en question est située dans le centre de Londres et alors qu’il n’existe aucun obstacle empêchant les citoyens d’autres États membres de posséder ou de conduire des taxis
londoniens ou des véhicules de location avec chauffeur?»

16. Eventech, TfL, le gouvernement polonais, la Commission européenne et l’autorité de surveillance de l’Association européenne de libre-échange (AELE) (ci-après l’«autorité de surveillance») ont présenté des observations écrites. Ces parties, à l’exception du gouvernement polonais, ont également présenté des observations orales lors de l’audience du 3 juillet 2014.

III – Analyse

A – Observations préliminaires

17. La Court of Appeal a posé à la Cour trois questions préjudicielles, toutes trois visant à obtenir une interprétation de certains des éléments constitutifs de la notion d’«aide» au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. La première question traite du problème d’un transfert de «ressources d’État». La deuxième question concerne notamment trois aspects différents de la question de savoir si la politique en matière de voies de bus avantage «certaines entreprises ou certaines productions»,
c’est-à-dire si cette politique est sélective. Par la troisième question, il est demandé à la Cour d’interpréter la notion d’aide «affect[ant] les échanges entre États membres» (notion d’«effet sur le commerce interétatique»).

18. Il est intéressant de relever que, devant la High Court of Justice, les questions d’aides d’État qui étaient litigieuses concernaient i) l’exigence de sélectivité; ii) la question de savoir si la politique en matière de voies de bus «fausse ou menace de fausser la concurrence» et iii) celle de savoir si ladite politique est susceptible d’affecter les échanges entre États membres. En d’autres termes, d’une part, tandis qu’il était constant devant la High Court of Justice que la politique en
matière de voies de bus implique un transfert de ressources d’État, ce point est désormais en cause devant la Court of Appeal, la première question se concentrant sur celui-ci ( 4 ). D’autre part, il n’est plus contesté que la politique en matière de voies de bus est susceptible de fausser la concurrence. Laissant ces aspects de côté, il n’a été contesté devant aucune des deux juridictions que ladite politique confère bel et bien un avantage aux taxis londoniens. Dès lors, la juridiction de
renvoi n’a posé aucune question à ce sujet.

19. Il résulte des règles nationales applicables que le cadre concurrentiel concernant la fourniture de services de transport local de passagers par véhicule se caractérise par le fait que les taxis londoniens ont un monopole légal partiel. En effet, ce sont les seuls à pouvoir «offrir leurs services», c’est-à-dire à prendre en charge des passagers à une station de taxis ou à être hélés dans la rue. Néanmoins, tant les taxis londoniens que les véhicules de location avec chauffeur peuvent prester
leurs services pour des courses réservées préalablement. Concernant la mesure dans laquelle les taxis londoniens opèrent sur le marché des réservations préalables, il ressort des preuves produites devant la High Court of Justice qu’une étude de l’année 2009 montrait que 8 % des courses des taxis londoniens avaient fait l’objet d’une réservation préalable ( 5 ).

B – Première question: le transfert de ressources d’État

20. Par sa première question, la juridiction de renvoi demande si la politique en matière de voies de bus donne lieu à un transfert de ressources d’État. Par conséquent, ce que la Cour doit préciser est la question de savoir si constitue un tel transfert le fait que l’État accorde à un groupe spécifique d’entreprises un accès aux infrastructures publiques, lorsqu’il n’en existait pas auparavant.

21. Eventech soutient que la politique en matière de voies de bus donne lieu à un transfert de ressources d’État de trois manières différentes, à savoir i) par l’accès préférentiel à un bien de l’État pour l’utilisation duquel les taxis londoniens ne sont pas facturés; ii) par l’exemption des taxis londoniens de l’obligation de payer des amendes lorsqu’ils empruntent des voies de bus; et iii) par l’augmentation des dépenses d’entretien des voies de bus en raison de la circulation supplémentaire
émanant des taxis londoniens.

22. S’agissant de ce dernier argument, des fonds publics devront être utilisés pour entretenir les routes, y compris d’éventuelles voies de bus. Le fait que les voies normalement réservées aux bus puissent se détériorer davantage en raison de l’octroi d’un accès aux taxis londoniens ne change pas cela, étant donné que les autres voies auront de manière équivalente besoin de moins d’entretien. Par conséquent, je ne vois pas comment la politique en matière de voies de bus pourrait donner lieu à une
charge additionnelle pour l’État à cet égard.

23. Dans la suite, je traiterai les deux autres arguments de manière séparée.

1. L’accès gratuit aux voies de bus

24. La politique en matière de voies de bus donne aux taxis londoniens la possibilité d’éviter la circulation et, par conséquent, de fournir des services de taxi à un nombre plus important de passagers payant un prix, pendant la même durée, sans coût supplémentaire. Une telle autorisation comporte une valeur économique ( 6 ). La question est donc de savoir si cela revient à renoncer à des ressources d’État ou, en d’autres termes, si les États membres ont une obligation, en vertu des règles en
matière d’aides d’État, de facturer l’utilisation des infrastructures publiques.

25. Bien que la jurisprudence de la Cour donne certaines indications, la question examinée ne semble pas avoir été résolue dans des affaires antérieures.

26. D’une part, la jurisprudence selon laquelle les mesures qui, si elles n’impliquent pas de transfert formel de ressources d’État, donnent néanmoins lieu à une renonciation potentielle à des ressources ( 7 ) ne semble pas pouvoir être transposée à des situations impliquant un accès à des infrastructures publiques, étant donné que cette ligne de jurisprudence concerne essentiellement un traitement fiscal favorable ( 8 ). Dans la même veine, la jurisprudence relative aux garanties d’État, qui,
laissant de côté la prime, peuvent comporter une charge supplémentaire pour l’État, étant donné que de telles garanties peuvent impliquer un transfert de ressources d’État à un stade ultérieur, ne peut être appliquée à la question sous examen ( 9 ).

27. D’autre part, une ligne différente de jurisprudence semble étayer l’idée selon laquelle une intervention réglementaire sur le marché qui avantage un groupe par rapport à un autre, mais qui n’entraîne pas de versement effectif ou potentiel d’argent étatique (ou de perte de recettes) n’implique pas nécessairement de transfert de ressources d’État ( 10 ). Il pourrait également être déduit d’une ligne de jurisprudence similaire qu’une charge financière pour l’État qui est une simple conséquence d’un
régime légal donné et qui est inhérente à celui-ci ne relève pas non plus de la notion de transfert de «ressources d’État» ( 11 ).

28. Néanmoins, aucune des lignes de jurisprudence mentionnées au point précédent ne traite de la question de l’accès aux infrastructures publiques.

29. Sur cette base, j’estime que, de manière générale, les règles en matière d’aides d’État n’exigent pas spécifiquement que les États membres demandent un paiement pour l’accès à de telles infrastructures, mais laissent à leur discrétion la question de savoir si l’accès doit être gratuit ( 12 ). Étant une ressource du domaine public destinée à faciliter le transport et la mobilité des utilisateurs finaux, une telle infrastructure, par sa nature même, exige que des règles soient fixées pour son
usage, y compris pour son accès; cela est particulièrement évident s’agissant du contrôle de la circulation et du maintien de l’ordre. Il s’agit d’une question d’ordre réglementaire, plutôt que d’une question d’ordre commercial, d’une nature ne justifiant pas l’application des règles de concurrence prévues au chapitre 1 du titre VII du traité FUE, les règles en matière d’aides d’État comprises ( 13 ). Ainsi que le relève le gouvernement polonais, les États membres peuvent avoir adopté des règles
spécifiques pour l’organisation de la circulation. Cela ne signifie pas qu’une ressource a été transférée (voire qu’il y a été renoncé) en réglementant l’accès aux infrastructures publiques.

30. Si, aux fins de l’argumentation, les règles en matière d’aides d’État étaient interprétées comme exigeant de manière générale que les États membres facturent l’accès à des infrastructures publiques ou à des ressources contrôlées par l’État, cela pourrait dissuader des États de créer ou d’ouvrir des domaines auxquels il n’y avait auparavant aucun accès ou seulement un accès limité. De même, cela pourrait dissuader des entreprises de participer à ce processus. Par exemple, dans la question
examinée, si l’on exigeait des taxis londoniens qu’ils payent pour accéder aux voies de bus, cela pourrait dissuader certains d’entre eux de demander un accès, avec pour conséquence que l’accès ne serait donné qu’à ceux disposant des ressources économiques les plus importantes, mettant ainsi en échec l’objectif de la politique en matière de voies de bus.

31. Néanmoins, il doit être souligné que le scénario décrit au point 29 des présentes conclusions est le scénario par défaut, qui peut varier selon les circonstances. Par conséquent, plusieurs réserves s’appliquent. D’abord, une législation spécifique de l’Union peut prévoir des règles détaillées s’agissant d’un domaine particulier ( 14 ).

32. En outre, en réglementant l’accès aux infrastructures, l’État doit de toute évidence agir en qualité de régulateur de bonne foi. Cela comprend le fait de réglementer de la même façon des situations comparables, de sorte que la concurrence ne soit pas faussée ( 15 ). En effet, le fait que les infrastructures soient mises à disposition de tous les usagers dans des termes égaux et non discriminatoires constitue un signe qu’aucune aide n’a été conférée auxdits usagers ( 16 ). En revanche, si, par
exemple, l’État demande de manière générale un paiement pour l’accès aux infrastructures publiques (tel un paiement à un péage pour l’utilisation d’une autoroute publique) ou l’accès à d’autres ressources du domaine public, mais confère à différentes entreprises un accès gratuit sur une base discrétionnaire, il est certes possible qu’il se prive de recettes provenant desdites entreprises. L’affaire Commission/Pays‑Bas ( 17 ) est révélatrice à cet égard. Dans celle-ci, les autorités des Pays‑Bas
avaient rendu négociables certains droits d’émission seulement à l’égard de grandes entreprises ayant une puissance installée supérieure à 20 mégawatts thermiques en tant que groupe et non à l’égard de toutes les entreprises émettrices. La Cour, considérant que cette distinction n’était pas justifiée par l’objet et la finalité d’un programme destiné à réduire la pollution industrielle, a considéré que ces autorités avaient renoncé à des ressources, étant donné qu’aucun paiement n’avait été fait
en échange des droits d’émissions en cause.

33. Ainsi, lorsque l’État, comme décrit précédemment, agit en qualité de régulateur à l’égard de l’accès aux ressources du domaine public, je rejoins, pour l’essentiel, la Commission et l’autorité de surveillance lorsqu’elles considèrent que, sous réserve qu’il traite toutes les entreprises comparables concernées de la même manière en établissant les critères d’octroi à l’avance d’une manière transparente et non discriminatoire, celui-ci peut légitimement décider de ne pas maximiser les recettes qui
auraient sinon pu être perçues sans s’inscrire en faux contre les règles en matière d’aides d’État.

34. En ce qui concerne la politique en matière de voies de bus, rien ne laisse entendre qu’elle aurait été adoptée pour une raison autre que celle de promouvoir un objectif ordinaire de réglementation. Par conséquent et à la lumière des considérations qui précèdent, je ne pense pas qu’il soit pertinent que, dans plusieurs lieux à Londres, l’ensemble de la route (y compris s’agissant de routes particulièrement fréquentées) soit désigné comme étant une voie de bus. Il s’agit simplement d’une
conséquence inhérente à la manière dont la circulation est réglementée.

35. Enfin, j’admets que, avec l’approche que j’ai adoptée, la question de savoir si des ressources d’État ont été transférées dépend de celle de savoir si un traitement égal a été garanti. Certes, le lien entre, d’une part, un traitement égal et, d’autre part, un transfert de ressources d’État semble découler de la nature même de la ressource en cause, à savoir une infrastructure publique. À cet égard, le respect par TfL du principe d’égalité de traitement est une question qui est liée plus
étroitement à la question de savoir si la politique en matière de voies de bus est sélective qu’à celle de savoir s’il a été renoncé à des ressources d’État. Par conséquent, je traiterai ce point de manière séparée dans la deuxième question, d’autant que les questions soulevées dans la procédure au principal sont des questions de principe qui méritent une attention particulière et qu’il serait clairement souhaitable pour les autorités étatiques de même que pour les entreprises que la Cour fasse
aussi la lumière sur celles-ci.

36. Néanmoins, j’examinerai auparavant l’exemption d’amende dont bénéficient les taxis londoniens.

2. L’exemption d’amende dont bénéficient les taxis londoniens lorsqu’ils empruntent les voies de bus

37. Ainsi que cela a déjà été évoqué, Eventech soutient qu’exempter d’amende les taxis londoniens qui empruntent des voies de bus a pour conséquence une charge supplémentaire pour les autorités publiques. La logique sous-jacente à ce raisonnement apparaît être que la Cour a parfois considéré que la dispense de l’obligation de payer des amendes implique une renonciation à des recettes, de la même manière que pour les avantages fiscaux et autres avantages similaires.

38. Toutefois, à tout le moins au départ, une dispense de l’obligation de payer des amendes ne peut pas toujours être mise sur le même pied que d’autres manières par lesquelles il peut être considéré que l’État a renoncé à son droit de percevoir des recettes. L’argument d’Eventech selon lequel un État membre peut être tenu responsable au regard des règles en matière d’aides d’État pour la renonciation à des ressources générées par des amendes semble présupposer que l’État a, de manière générale, une
obligation d’adopter une législation imposant des amendes.

39. Or, les amendes et les pénalités financières, notamment dans la mesure où des sanctions pénales sont concernées, sont des instruments qui appartiennent à la sphère de l’ordre public et qui ont comme objectif à la fois de dissuader et de sanctionner. En revanche, les impôts et les taxes poursuivent avant tout un objectif budgétaire, étant donné que l’objectif dans son ensemble de tout système fiscal est de collecter des recettes afin de financer les dépenses de l’État ( 18 ). Bien qu’à la fois
les amendes et les impôts impliquent de toute évidence une charge financière pour ceux qui en font l’objet, cela ne signifie pas qu’ils sont interchangeables. Si une amende ne peut pas en tant que telle être comparée à un impôt, une exemption de l’obligation de payer une amende ne peut pas non plus en tant que telle être comparée à un avantage fiscal.

40. De même, une amende n’est pas la même chose qu’une redevance (qu’elle soit fixe ou variable), étant donné que ces dernières sont normalement payées en contrepartie de la livraison de biens ou de services. À cet égard, ainsi que le gouvernement polonais l’observe à juste titre, une amende pour excès de vitesse ne rémunère pas une utilisation de la route plus importante que celle autorisée.

41. Les affaires dans lesquelles la Cour a jusqu’à présent considéré qu’une dispense de l’obligation de payer des amendes et des pénalités financières impliquait une renonciation à des ressources se passent à mon sens d’explication dans la mesure où lesdites affaires impliquent un simple allégement des coûts d’activité.

42. Les arrêts Ecotrade ( 19 ) et Piaggio ( 20 ) concernaient tous deux la même législation italienne. Dans ces affaires, la dispense de l’obligation de payer des amendes et des pénalités financières dans le contexte d’une procédure d’insolvabilité particulière (qui comprenait un ensemble de mesures favorables telles qu’une garantie donnée par l’État) a conduit la Cour à déclarer qu’il ne pouvait pas être exclu que cette procédure implique une aide d’État. Les amendes et les pénalités financières en
cause étaient infligées en raison du défaut de paiement des cotisations de sécurité sociale et, pour cette raison, la procédure spéciale d’insolvabilité réduisait les charges comprises normalement dans le budget d’une entreprise.

43. En outre, l’affaire Commission/Pays-Bas ( 21 ), invoquée par Eventech, est radicalement différente de l’affaire examinée. Rien ne laisse entendre que l’autorisation donnée aux taxis londoniens d’emprunter les voies de bus est négociable ou que les amendes pour utilisation illicite desdites voies pourraient être évitées. L’ordonnance de renvoi précise tout à fait clairement que l’utilisation non autorisée des voies de bus est une infraction pénale ( 22 ). En revanche, dans l’affaire
Commission/Pays-Bas (EU:C:2011:551), voyant que les entreprises ayant des émissions potentiellement élevées, qui avaient dépassé le niveau applicable, étaient tentées de spéculer annuellement sur la question de savoir s’il serait plus avantageux pour elles de payer une amende ou d’acquérir des droits d’émission, l’amende en jeu en l’espèce, comme dans les affaires Ecotrade (EU:C:1998:579) et Piaggio (EU:C:1999:313), présentait également toutes les caractéristiques classiques d’un coût
d’exploitation.

44. En revanche, l’amende infligée pour l’utilisation illicite des voies de bus ne peut pas être réduite à un simple coût d’exploitation (même s’il est possible que certaines entreprises la traitent de cette façon). Les dispositions en vertu desquelles les amendes sont infligées sont d’application générale, s’appliquant donc aux entreprises et aux particuliers de la même façon. En outre, les amendes sont une conséquence logique d’une activité de réglementation ayant pour objet l’accès aux
infrastructures publiques: ainsi que cela a été indiqué précédemment, une activité de réglementation de ce type ne relève pas en tant que telle du champ d’application des règles en matière d’aides d’État, à condition que toutes les entreprises comparables en cause soient traitées de manière égale lorsque la politique de réglementation est appliquée.

45. Compte tenu de ce qui précède, je ne peux pas non plus être d’accord avec l’argument selon lequel décharger les taxis londoniens de l’obligation de payer une amende pour l’utilisation des voies de bus donne lieu à un transfert de ressources d’État.

3. Conclusion provisoire

46. Sur cette base, je propose que la Cour réponde à la première question que l’article 107, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens que lorsque des autorités étatiques rendent un couloir de bus aménagé sur une voie publique accessible aux taxis londoniens, mais non aux véhicules de location avec chauffeur aux heures d’usage dudit couloir, cela n’implique pas de transfert de «ressources d’État», à la condition que l’accès soit donné à toutes les entreprises comparables selon des
conditions égales, ce qu’il incombe à la juridiction de renvoi de vérifier.

47. Compte tenu de ma position s’agissant de la première question, la réponse concrète qu’il y a lieu de donner à l’affaire dont la juridiction de renvoi a à connaître dépendra de la question de savoir si la politique en matière de voies de bus est sélective. C’est l’objet de la deuxième question, sous a) à c).

C – Deuxième question, sous a) à c): la sélectivité au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE de la politique en matière de voies de bus

1. Remarques introductives

48. Ainsi qu’il y a été fait allusion au point 17 des présentes conclusions, par sa deuxième question, subdivisée en trois parties, la juridiction de renvoi demande qu’il soit fait la lumière sur différents aspects de l’exigence de sélectivité au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

49. Par sa deuxième question, sous a), la juridiction de renvoi demande «à quel objectif [on] doit […] se référer pour apprécier si les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur sont dans une situation juridique et factuelle comparable». Par sa deuxième question, sous b), la Court of Appeal demande, pour le cas où il pourrait être démontré aux fins de la deuxième question, sous a), que l’objectif poursuivi est la création d’«un système de transport sûr et efficace», si cet
objectif peut justifier la politique en matière de voies de bus dans le sens où celle-ci ne peut pas être considérée comme étant sélective aux fins de l’article 107, paragraphe 1, TFUE. Enfin, par sa deuxième question, sous c), la juridiction de renvoi demande si l’État membre doit démontrer, au cours de la procédure de justification, que l’avantage conféré respecte le principe de proportionnalité.

50. Il mérite d’être relevé que, mis à part qu’elle se réfère à l’argumentation des parties dans la procédure au principal, l’ordonnance de renvoi n’énonce pas les raisons de fond qui ont conduit la juridiction de renvoi à formuler sa deuxième question, sous a) à c), de la manière dont elle l’a fait.

51. Compte tenu de cette ambiguïté, l’on peut comprendre la deuxième question, sous a), d’une première manière, littérale, qui est que la juridiction de renvoi souhaite simplement savoir quel est l’objectif au regard duquel il y a lieu de comparer les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur.

52. Néanmoins, si cette interprétation était correcte, il serait surprenant que, par sa deuxième question, sous b), la juridiction de renvoi elle-même mentionne que l’objectif pourrait être la création d’un système de transport sûr et efficace. En outre, en vertu de l’article 267 TFUE, il incombe aux juridictions des États membres de présenter les règles nationales applicables et, dans ce contexte, de déterminer l’objectif que celles-ci poursuivent. Il n’appartient pas à la Cour de suggérer des
objectifs éventuels qui pourraient conduire à conclure qu’une mesure étatique donnée n’est pas sélective ( 23 ).

53. Dès lors, l’on pourrait lire la deuxième question, sous a), d’une autre manière, qui laisse peut-être plus de place à l’interprétation, qui est que la juridiction de renvoi souhaite en réalité savoir s’il y a lieu d’apprécier la sélectivité seulement sur la base du marché sur lequel à la fois les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur sont en concurrence (c’est-à-dire le marché des réservations préalables) ou si ledit marché devrait inclure le marché des taxis qui «offrent
leurs services». Cela constitue certainement une question décisive dans l’affaire examinée, de sorte que je répondrai à la deuxième question, sous a), en ayant cette lecture à l’esprit.

54. Par la deuxième question, sous b) et c), qui semble être liée de la même manière que l’est la deuxième question, sous a) et b), il me semble que la juridiction de renvoi souhaite savoir si des considérations tenant à la sécurité et à l’efficacité peuvent expliquer les raisons pour lesquelles seuls les taxis londoniens et non les véhicules de location avec chauffeur peuvent emprunter les voies de bus pendant certaines heures (telles que les heures d’affluence ou «de pointe») et, si tel est le
cas, si les mesures adoptées à cet effet doivent respecter le principe de proportionnalité.

55. Je vais m’efforcer de donner une réponse cohérente en gardant ces considérations à l’esprit et en traitant successivement chacune des questions soulevées par la juridiction de renvoi.

2. Appréciation

a) Le(s) marché(s) pertinent(s) aux fins de la comparaison entre les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur

56. De manière exceptionnelle par rapport à la situation normale qui prévaut en vertu du régime de transport et de circulation applicable dans le Grand Londres, la politique en matière de voies de bus permet aux taxis londoniens, mais non aux véhicules de location avec chauffeur, d’emprunter les voies de bus pendant certaines heures de la journée.

57. À cet égard, il est de jurisprudence constante qu’une mesure étatique est sélective si, en vertu d’un régime légal donné (également dénommé «le cadre de référence»), cette mesure est de nature à favoriser certaines entreprises ou certaines productions par rapport à d’autres entreprises se trouvant dans une situation factuelle et juridique comparable au regard de l’objectif poursuivi par la mesure concernée ( 24 ).

58. Dès lors, en fonction de la réponse à donner à la question de savoir si les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur sont dans une situation comparable, la politique en matière de voies de bus peut donner lieu à un traitement sélectif ( 25 ). Une manière de le déterminer consiste à évaluer si les véhicules de location avec chauffeur et les taxis londoniens peuvent être substitués les uns aux autres. Cela nécessite alors d’établir sur quel(s) marché(s) pertinent(s) il y a lieu
de jeter les bases d’une comparaison.

59. Les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur sont tous en concurrence sur le marché des réservations préalables et il est constant que la concurrence sur ce marché est affectée par la politique en matière de voies de bus. Si ce marché était le seul pertinent, ils seraient à l’évidence comparables et, par conséquent, la politique en matière de voies de bus serait sélective.

60. Néanmoins, l’on ne peut pas simplement extraire une partie du modèle d’affaires d’une entreprise puis limiter la comparaison avec une autre entreprise au segment ainsi extrait. Cela est certainement également vrai pour l’activité de taxi, dont certaines spécificités font qu’il n’est pas justifié de limiter l’appréciation du caractère comparable au seul marché des réservations préalables.

61. En bref, les taxis fournissent un service qui complète les méthodes de transport public existantes et dont il peut être soutenu que, d’une certaine manière, il peut être assimilé à un service public universel. À une époque où les méthodes de communication étaient moins développées, le fait de pouvoir héler un taxi dans la rue ou d’être pris en charge à une station de taxis constituait un complément essentiel aux autres méthodes de transport disponibles. C’est la raison pour laquelle les taxis
londoniens ont traditionnellement un monopole pour «offrir leurs services» et c’est pour la même raison que, dans de nombreuses villes d’Europe, les taxis bénéficient de privilèges similaires, y compris le droit d’emprunter des voies de bus.

62. En outre, comme mentionné au point 19 des présentes conclusions, il ressort des faits établis devant la juridiction de renvoi que seuls 8 % des courses des taxis londoniens font l’objet d’une réservation préalable. Partant, je ne suis pas persuadé que le marché de la réservation préalable est le seul marché significatif sur lequel opèrent les taxis londoniens ( 26 ). À cet égard, bien que cela ne m’apparaisse pas évident, il ne m’a pas échappé que la High Court of Justice, dans son jugement, a
constaté qu’«il serait évidemment impossible de prévoir dans la loi que […] les taxis londoniens ne peuvent emprunter la voie de bus lorsqu’ils transportent un passager ayant préalablement réservé» ( 27 ). En gardant cela à l’esprit, il ne semble pas justifié de limiter l’appréciation au seul marché des réservations préalables.

63. À ce point du raisonnement, il est donc nécessaire d’examiner la deuxième question, sous b), et donc également la deuxième question, sous c), c’est-à-dire le point de savoir si, pour des raisons tenant à la sécurité et à l’efficacité, les taxis londoniens ne sont pas comparables aux véhicules de location avec chauffeur sur ces marchés combinés, et également le point de savoir s’il est par conséquent justifié d’autoriser seulement les taxis londoniens et non les véhicules de location avec
chauffeur à emprunter les voies de bus pendant certaines heures. J’aborderai cette question à présent.

b) Les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur sont-ils comparables au regard de l’objectif de création d’un système de transport sûr et efficace?

64. Il ressort de la discussion qui précède que les marchés pertinents à prendre en considération aux fins de la comparaison entre les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur sont le marché sur lequel les taxis «offrent leur service»et le marché des réservations préalables.

65. En substance, quatre raisons principales ont été mises en avant concernant la question de savoir pourquoi les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur ne sont pas comparables sur ces marchés combinés.

66. Premièrement, à la différence des véhicules de location avec chauffeur, les taxis londoniens ont certaines obligations à l’égard, notamment, des clients qu’ils prennent dans la rue ou à une station de taxis («compellability», obligation de se présenter). Ces clients peuvent comprendre, par exemple, des personnes handicapées, pour lesquelles les taxis londoniens doivent donc être accessibles.

67. Deuxièmement, les taxis londoniens doivent se conformer à certains critères («les conditions d’aptitude»), tels que la forme et les dimensions du véhicule ainsi que le panneau du taxi (actuellement, seuls deux modèles respectent les conditions d’aptitude), de manière à être visibles plus facilement par les clients les hélant.

68. Troisièmement, les taxis londoniens sont soumis à une réglementation tarifaire stricte ( 28 ).

69. Enfin, pour devenir chauffeur de taxi londonien, les exigences d’agrément sont généralement plus strictes que celles applicables pour devenir chauffeur de véhicule de location et comprennent un test topographique approfondi de la géographie du Grand Londres, connu sous le nom de «the Knowledge» (les connaissances).

70. Compte tenu de ces facteurs, bien que je considère que les taxis londoniens soient comparables aux véhicules de location avec chauffeur sur le marché des réservations préalables, ils ne sont pas comparables à tous les égards. Je peux donc accepter, par principe, que, sur les marchés pertinents combinés, l’objectif consistant en la création d’un système de transport sûr et efficace puisse avoir pour conséquence que les taxis londoniens ne sont pas comparables aux véhicules de location avec
chauffeur.

71. Néanmoins, il ne fait aucun doute que les taxis londoniens opèrent sur un marché qui se recoupe avec celui des véhicules de location avec chauffeur et peuvent ainsi utiliser leur avantage compétitif à l’encontre de ces derniers s’agissant du segment des réservations préalables. Cela étant, et ainsi que la juridiction de renvoi semble le laisser entendre par sa deuxième question, sous c), bien que la création d’un système de transport sûr et efficace puisse exiger de faire une distinction entre
certains groupes d’entreprises, il existe aussi des limites à ce qui peut être justifié par cet objectif. Je ne pense pas que l’objectif de maintenir un système de transport sûr et efficace puisse exiger que la distorsion de concurrence causée par la politique en matière de voies de bus sur le marché des réservations préalables ne soit pas restreinte.

72. À cet égard, il y a lieu de relever que c’est l’État qui, en adoptant une mesure donnée, définit les objectifs de celle-ci. Il appartient donc à celui-ci d’établir que, en vertu d’un régime particulier, certains groupes d’entreprises vraisemblablement comparables ne le sont réellement pas au regard des objectifs de ladite mesure ( 29 ). Je suis d’avis, contrairement à la position exprimée par le gouvernement polonais, que, ce faisant, l’État doit aussi démontrer qu’une différence de traitement
découlant de l’objectif de la mesure est en adéquation avec le principe de proportionnalité, en ce qu’elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre cet objectif et que celui-ci ne pourrait être atteint par des mesures moins contraignantes ( 30 ). Seul un contrôle approfondi effectué par les juridictions nationales à cet égard est suffisant pour prévenir l’arbitraire et pour garantir que l’État soit attentif à la charge de la preuve qui lui incombe à démontrer que ces exigences
sont remplies.

73. Ainsi, bien que je puisse accepter que, par principe, une distinction puisse être faite entre les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur pour des raisons tenant à l’efficacité et à la sécurité, en accord avec le principe de proportionnalité, il est également nécessaire d’évaluer spécifiquement si la politique en matière de voies de bus litigieuse est de nature à atteindre cet objectif et ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre. Toutefois, c’est à la
juridiction de renvoi qu’il appartient de se prononcer sur ce point.

3. Conclusion provisoire

74. Au regard de ce qui précède, je propose que la Cour réponde en même temps à la deuxième question, sous a) à c), en ce sens que, dans les circonstances examinées, lorsque les autorités étatiques rendent un couloir de bus aménagé sur une voie publique accessible aux taxis, mais non aux véhicules de location avec chauffeur aux heures d’usage dudit couloir, cela ne revient pas à «favoriser certaines entreprises» au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, à condition que lesdites autorités
démontrent i) que, en raison de considérations objectives tenant à la sécurité et à l’efficacité du système de transport, les taxis et les véhicules de location avec chauffeur ne sont pas comparables d’un point de vue juridique et factuel et ii) qu’une telle mesure est de nature à atteindre ledit objectif et qu’elle ne va pas au-delà de ce qui nécessaire pour l’atteindre. C’est à la juridiction de renvoi qu’il appartient de vérifier si tel est le cas.

75. La réponse que je propose de donner à la deuxième question à la lumière de la première question a pour conséquence que si TfL arrive à établir que les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur ne sont pas comparables d’un point de vue juridique et factuel au regard de la sécurité et de l’efficacité, autoriser les taxis londoniens à emprunter les voies de bus pendant certaines heures de la journée ne peut pas, dans ces circonstances, être considéré comme impliquant un transfert
de ressources d’État.

76. Si tel est le cas, il ne peut être question d’«aide» aux fins de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, étant donné que les exigences prévues dans cette disposition sont cumulatives ( 31 ). Cependant, quoiqu’il en soit, je présenterai ci-après ma position sur la troisième question, étant donné que cette dernière implique elle aussi une question de principe.

D – Troisième question: l’effet sur les échanges entre États membres

77. Enfin, la Court of Appeal demande si la politique en matière de voies de bus est susceptible d’affecter les échanges entre États membres.

78. Si les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur ne sont pas comparables en raison de considérations tenant à la sécurité et à l’efficacité, la troisième question devient assez absurde. En pratique, il n’existe pas de restriction du nombre de taxis noirs à Londres ( 32 ) et il est loisible à tous les citoyens de l’Union de se porter candidat pour devenir chauffeur de taxi londonien agréé. Partant, il y a lieu de se demander comment une mesure locale de cette nature pourrait
encore être susceptible d’affecter les échanges entre États membres.

79. Par conséquent, la prémisse sur laquelle je fonde ma réponse est que les taxis londoniens et les véhicules de location avec chauffeur sont comparables à tous égards et que, dès lors, la politique en matière de voies de bus confère un avantage sélectif aux taxis londoniens impliquant un transfert de ressources d’État susceptible de fausser la concurrence.

80. À la différence d’Eventech, de la Commission et de l’autorité de surveillance, je ne considère pas que l’arrêt Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg ( 33 ) tranche définitivement la question. S’il est vrai que, dans cet arrêt, la Cour a considéré, notamment, que l’exigence que les échanges entre États membres soient affectés ne dépend pas du caractère local ou régional des services de transport fournis ou de l’importance du domaine d’activité concerné ( 34 ) (position qui a été
confirmée dans la jurisprudence ultérieure) ( 35 ), il y a lieu de souligner ici deux éléments importants.

81. Premièrement, dans l’arrêt Altmark (EU:C:2003:415), l’avantage en cause était conféré à une seule entreprise, s’agissant d’un seul contrat de concession de transport par bus, qui prenait la forme d’une subvention publique. Naturellement, cette concession a donc renforcé la position de cette entreprise bénéficiaire en comparaison avec les entreprises d’autres États membres qui auraient pu être intéressées par la fourniture d’un service similaire dans la région ( 36 ). En revanche, en l’espèce,
l’avantage conféré par la politique en matière de voies de bus, qui n’implique pas de subvention, n’a pas été accordé à une seule entreprise de transport ou à un nombre très limité d’entre elles. Ainsi que cela figure dans l’ordonnance de renvoi, il n’existe aucun obstacle pour les citoyens de l’un des États membres de posséder ou de conduire un taxi noir, dans l’hypothèse où ils souhaiteraient bénéficier de la politique en matière de voies de bus.

82. Deuxièmement, dans l’arrêt Altmark (EU:C:2003:415), la Cour, bien qu’elle ait souligné en termes généraux que le seuil requis est bas pour que l’exigence d’un effet sur les échanges entre États membres soit remplie, n’a aucunement indiqué que cette exigence était effectivement remplie en ce qui concerne l’avantage accordé au fournisseur de service de transport par bus en cause dans cette affaire ( 37 ). La Cour s’est simplement limitée à dire que cette possibilité ne pouvait être exclue. Il en
va de même en ce qui concerne la jurisprudence ultérieure relative aux activités locales ( 38 ). Ce n’est pas sans raison que, par la manière dont elle s’exprime en règle générale dans ces types d’affaires, la Cour fait montre de prudence ( 39 ).

83. En outre, en examinant l’exigence d’un effet sur les échanges entre États membres, il est pertinent de faire une distinction entre les produits et les services, étant donné que les produits sont par nature plus faciles à exporter, avec le risque que les entreprises établies dans d’autres États membres auront moins de chance d’exporter leurs produits vers le marché de l’État membre octroyant l’aide ( 40 ). En revanche, les services sont une affaire plus complexe, particulièrement pour ce qui
concerne les services de transport. Si le service en cause a un quelconque potentiel transfrontalier, l’on peut présumer que les échanges entre États membres sont affectés ( 41 ). S’agissant des services locaux, un tel potentiel transfrontalier n’existe pas toujours, auquel cas il ne peut y avoir d’effet transfrontalier. Les services locaux de taxi ne sont qu’un exemple pour lequel un potentiel transfrontalier n’est pas évident ( 42 ).

84. Toutefois, dans la procédure au principal, il est constant que la politique en matière de voies de bus confère un avantage aux taxis londoniens. Selon la jurisprudence, un tel avantage est présumé susceptible d’affecter les échanges entre États membres ( 43 ). Bien qu’il n’apparaisse pas clairement comment des entreprises établies dans d’autres États membres fournissant un service similaire pourraient être affectées par la politique en matière de voies de bus, les différences soulignées dans les
présentes conclusions pourraient ne pas suffire à justifier un résultat différent de celui de l’arrêt Altmark (EU:C:2003:415), selon lequel même des avantages locaux peuvent être susceptibles d’affecter les échanges entre États membres. À la suite de l’arrêt Altmark (EU:C:2003:415), un effet à tout le moins potentiel sur les échanges entre États membres ne peut être exclu.

85. À la lumière de ce qui précède, si la Cour devait considérer que la politique en matière de voies de bus est susceptible d’affecter les échanges entre États membres, il me faudrait souligner que, dans un tel cas, il semblerait qu’il n’existe aucun seuil trop bas pour remplir l’exigence d’un effet sur les échanges entre États membres. Dans la pratique, cela impliquerait de passer d’une présomption d’effet sur les échanges entre États membres, présomption qui est réfragable, ainsi que le montre la
pratique de la Commission ( 44 ), à une présomption irréfragable. Bien que les présomptions irréfragables aient un avantage en matière de sécurité juridique, ici, une telle présomption aurait certainement également ses inconvénients.

86. Ce n’est par conséquent pas sans raison que l’autorité de surveillance a suggéré que la Cour reconsidère son approche sur l’exigence d’un effet sur les échanges entre États membres, étant donné que, selon ladite autorité, cette exigence est interprétée si largement que presque aucune mesure ne peut y échapper. Selon l’autorité de surveillance, le point décisif devrait être de savoir si des entreprises établies dans d’autres États membres ont moins de chance de fournir leurs services sur le
marché de l’État membre dans lequel l’avantage est conféré.

87. Toutefois, j’estime que, à ce stade, il serait prématuré d’envisager de revenir sur cette ligne de jurisprudence constante depuis plus de 30 ans en restreignant l’exigence d’un effet sur les échanges entre États membres de la manière suggérée par l’autorité de surveillance. Cela vaudrait la peine de défendre cette idée uniquement dans l’hypothèse où cette exigence devrait, à partir d’une présomption simple, devenir une présomption irréfragable. Manifestement, cela dépendra entièrement de la
manière dont la Cour décidera de répondre à la troisième question.

88. Certes, la Cour peut simplement choisir de maintenir le statu quo en ayant recours, dans sa réponse, à la formule prudente consacrée au fil du temps selon laquelle, en dépit de son caractère local, il n’est pas impossible que la politique en matière de voies de bus puisse affecter les échanges entre États membres. En outre, cela serait en harmonie avec la pratique de la Cour de laisser à la juridiction de renvoi décider au final si, dans les circonstances de la procédure au principal, les
échanges entre États membres sont susceptibles d’être affectés, en prenant dûment en considération l’éclairage donné par la Cour ( 45 ). À cet égard, la juridiction de renvoi pourrait évidemment prendre en compte les facteurs auxquels il a été fait référence aux points 81 à 83 des présentes conclusions, notamment ceux qui distinguent l’affaire examinée de l’arrêt Altmark (EU:C:2003:415).

89. Compte tenu des réponses que j’ai proposées à la première et à la deuxième question, sous a) à c), c’est également la réponse que je propose que la Cour donne à la troisième question, dans le cas où les autres exigences pour qu’il soit conclu à une «aide» au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, seraient considérées comme étant remplies.

IV – Conclusion

90. À la lumière de ce qui précède, je propose que la Cour réponde aux questions préjudicielles de la Court of Appeal de la manière suivante:

Il y a lieu d’interpréter l’article 107, paragraphe 1, TFUE, en ce sens que, lorsque les autorités d’un État membre rendent un couloir de bus aménagé sur une voie publique accessible aux taxis, mais non aux véhicules de location avec chauffeur aux heures d’usage dudit couloir:

— cela n’implique pas de transfert de «ressources d’État», à condition qu’un accès soit accordé à toutes les entreprises comparables dans des conditions égales; et

— cela ne revient pas à «favoriser certaines entreprises», à condition que lesdites autorités établissent i) qu’en raison de considérations objectives tenant à la sécurité et à l’efficacité du système de transport, les taxis et les véhicules de location avec chauffeur ne sont pas comparables d’un point de vue juridique et factuel et ii) qu’une telle mesure est de nature à atteindre ledit objectif et qu’elle ne va pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’atteindre.

C’est à la juridiction de renvoi qu’il appartient de vérifier si tel est le cas dans les circonstances de l’affaire au principal. Si tel n’est pas le cas, le simple fait que le droit d’emprunter les voies de bus soit conféré dans le contexte d’une politique locale en matière de circulation n’exclut pas, en tant que tel, la possibilité que les échanges entre États membres soient affectés, ce qu’il appartient également à la juridiction de renvoi de vérifier.

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( 1 ) Langue originale: l’anglais.

( 2 ) Voir, notamment, avis de l’Autorité de la concurrence française no 13-A-23, du 16 décembre 2013, concernant un projet de décret relatif à la réservation préalable des voitures de tourisme avec chauffeur; ordonnance de référé du Conseil d’État français du 5 février 2014 dans les affaires no 374524 et no 374554, SAS Allocab et autres; jugement du tribunal de commerce de Bruxelles du 31 mars 2014 dans l’affaire no A/14/01645, Taxi Radio Bruxellois, et décision du 16 septembre 2014 du Landgericht
Frankfurt dans l’affaire no 2-03 0 329/14, Taxi Deutschland.

( 3 ) La juridiction de renvoi indique que les routes relevant de la GLA s’étendent sur 580 km et sont, d’une manière très générale, les routes les plus importantes du Grand Londres.

( 4 ) Lors de l’audience, il a été expliqué que la Court of Appeal a décidé de soulever d’office la question du transfert de ressources d’État et a demandé aux parties leurs observations à ce sujet.

( 5 ) En outre, ces informations indiquent que 52 % des courses des taxis londoniens ont pour origine le fait qu’ils ont été hélés par des passagers dans la rue et 34 % le fait qu’ils ont pris leur passager en charge à une station de taxis. Néanmoins, ce qui se produit dans le cas des 6 % restant n’a pas été révélé; voir jugement de la High Court of Justice, Eventech Ltd v the Parking Adjudicator [2012] EWHC 1903 (Admin), points 9 et 50, sous i).

( 6 ) Voir, en ce sens, arrêt Bouygues et Bouygues Télécom/Commission (C‑431/07 P, EU:C:2009:223, points 118 et 119 ainsi que jurisprudence citée).

( 7 ) Voir arrêts Commission et Espagne/Government of Gibraltar et Royaume-Uni (C‑106/09 P et C‑107/09 P, EU:C:2011:732, point 72) ainsi que Vent De Colère e.a. (C‑262/12, EU:C:2013:851, point 19).

( 8 ) Voir, en ce sens, arrêt P (C‑6/12, EU:C:2013:525, point 18).

( 9 ) Voir, notamment, arrêt Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a. (C‑399/10 P et C‑401/10 P, EU:C:2013:175, points 106 et 107).

( 10 ) Voir arrêts Kirsammer-Hack (C‑189/91, EU:C:1993:907, points 17 et 18); Viscido e.a. (C‑52/97 à C‑54/97, EU:C:1998:209, points 14 et 15) et PreussenElektra (C‑379/98, EU:C:2001:160, points 61 et 62). Voir aussi arrêt van Tiggele (82/77, EU:C:1978:10, points 24 et 25).

( 11 ) Voir arrêts Sloman Neptun (C‑72/91 et C‑73/91, EU:C:1993:97, point 21) et Ecotrade (C‑200/97, EU:C:1998:579, point 36).

( 12 ) Voir, en ce sens, point 84 des conclusions de l’avocat général Mengozzi présentées dans l’affaire Commission/Pays-Bas (C‑279/08 P, EU:C:2010:799).

( 13 ) Voir, en ce sens, arrêt Selex Sistemi Integrati/Commission (C‑113/07 P, EU:C:2009:191, point 70 et jurisprudence citée). Voir aussi arrêt Pays-Bas/Commission (T‑231/06 et T‑237/06, EU:T:2010:525, point 93).

( 14 ) Notamment, la directive 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil, du 10 avril 1997, relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications (JO L 117, p. 15) et la décision no 128/1999/CE du Parlement européen et du Conseil, du 14 décembre 1998, relative à l’introduction coordonnée dans la Communauté d’un système de communications mobiles et sans fil (UMTS) de troisième génération (JO 1999, L 17, p. 1),
ont conféré aux États membres la liberté de choisir la procédure d’octroi des licences UMTS, sous réserve que les principes de libre concurrence et d’égalité de traitement soient respectés.

( 15 ) Voir, en ce sens, arrêt Bouygues et Bouygues Télécom/Commission (T‑475/04, EU:T:2007:196, point 110), confirmé sur pourvoi, voir arrêt Bouygues et Bouygues Télécom/Commission (EU:C:2009:223, notamment points 98 et 103).

( 16 ) Voir, en ce sens, arrêt Freistaat Sachsen et Land Sachsen-Anhalt/Commission (T‑443/08 et T‑455/08, EU:T:2011:117, point 109), confirmé sur pourvoi par l’arrêt Mitteldeutsche Flughafen et Flughafen Leipzig-Halle/Commission (C‑288/11 P, EU:C:2012:821).

( 17 ) EU:C:2011:551.

( 18 ) Communication de la Commission sur l’application des règles relatives aux aides d’État aux mesures relevant de la fiscalité directe des entreprises (JO 1998, C 384, p. 3, point 26).

( 19 ) EU:C:1998:579, points 42 à 44.

( 20 ) C‑295/97, EU:C:1999:313, points 41 et 42.

( 21 ) EU:C:2011:551.

( 22 ) TfL ajoute que «l’amende pour circulation illicite sur des voies de bus aux heures d’usage de celles-ci serait encourue chaque fois que le véhicule concerné passe sur une voie de bus, ce qui pourrait arriver plusieurs fois par course» (mise en italique par mes soins), c’est-à-dire, théoriquement, de manière illimitée.

( 23 ) Voir, par analogie, ordonnance Bertazzi e.a. (C‑393/11, EU:C:2013:143, point 54) et aussi, en ce sens, arrêt P (EU:C:2013:525, points 20 et 21).

( 24 ) Arrêt Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke (C‑143/99, EU:C:2001:598, point 41). Voir, également, arrêts Portugal/Commission (C‑88/03, EU:C:2006:511, point 54) ainsi que Commission et Espagne/Government of Gibraltar et Royaume-Uni (EU:C:2011:732, point 75).

( 25 ) Il est important de garder à l’esprit que la jurisprudence citée au point 57 des présentes conclusions ne se réfère qu’à «une situation juridique et factuelle comparable» (mise en italique par mes soins) et non à une situation juridique et factuelle similaire, et encore moins à une situation identique.

( 26 ) Sans remettre en cause l’exactitude de ce chiffre, au regard de l’évolution constante de la technologie, l’avenir nous dira si les smartphones (et les différentes applications téléphoniques créées par les opérateurs de taxis londoniens et de véhicules de location avec chauffeur) pourront changer définitivement cette structure de marché.

( 27 ) Voir jugement de la High Court of Justice, précité, point 60, sous ii).

( 28 ) Selon le document de la Commission des lois no 347, «Services de taxis et de location de véhicules avec chauffeur», de mai 2014, point 9.21, disponible à l’adresse http://www.lawcom.gov.uk, s’agissant des tarifs, les courses faisant l’objet d’une réservation préalable sont réglementées sur la même base que celles pour lesquelles les taxis «offrent leurs services».

( 29 ) Voir, par analogie, arrêt Commission et Espagne/Government of Gibraltar et Royaume-Uni (EU:C:2011:732, point 146 et jurisprudence citée).

( 30 ) Voir, par analogie, arrêt Paint Graphos e.a. (C‑78/08 à C‑80/08, EU:C:2011:550, point 75).

( 31 ) Voir, notamment, arrêt Vent De Colère e.a. (EU:C:2013:851, point 15).

( 32 ) Voir article 16 de la loi sur les transports (Transport Act), de 1985, et document de la Commission des lois no 347, «Services de taxis et de location de véhicules avec chauffeur», précité, point 11.1.

( 33 ) C‑280/00, EU:C:2003:415 (ci-après l’«arrêt Altmark»).

( 34 ) Ibidem (points 77 et 82).

( 35 ) Voir, notamment, arrêt Comitato «Venezia vuole vivere» e.a./Commission (C‑71/09 P, C‑73/09 P et C‑76/09 P, EU:C:2011:368, point 135).

( 36 ) Voir, de même, arrêt ACEA/Commission (T‑297/02, EU:T:2009:189, point 91) et affaire SA.34056 (12/N) – Royaume-Uni, Téléphérique pour Londres, décision du 27 juin 2012, points 43 à 46 (publication du résumé au JO 2012, C 220, p. 6), disponible en langue anglaise à l’adresse http://ec.europa.eu/competition/state_aid/cases/244896/244896_1341324_89_1.pdf.

( 37 ) Voir arrêt Altmark (EU:C:2003:415, point 77), dans lequel la Cour a simplement dit «[…] qu’il n’est nullement exclu qu’une subvention publique accordée à une entreprise qui ne fournit que des services de transport local ou régional et ne fournit pas de services de transport en dehors de son État d’origine puisse, néanmoins, avoir une incidence sur les échanges entre États membres» (mise en italique par mes soins).

( 38 ) Voir, notamment, arrêt Comitato «Venezia vuole vivere» e.a./Commission (EU:C:2011:368, point 135).

( 39 ) Voir, de même, point 116 des conclusions de l’avocat général Alber présentées dans l’affaire Espagne/Commission (C‑409/00, EU:C:2002:475).

( 40 ) Voir, notamment, arrêt Belgique/Commission (C‑75/97, EU:C:1999:311, point 47 et jurisprudence citée).

( 41 ) Voir, notamment, arrêt Xunta de Galicia (C‑71/04, EU:C:2005:493, points 47 et 48), concernant un programme d’aide à la construction et à la transformation navales accordé aux chantiers navals de Galice, dont les clients étaient tant nationaux qu’étrangers.

( 42 ) Voir, sur ce point, point 145 des conclusions de l’avocat général Jacobs présentées dans l’affaire GEMO (C‑126/01, EU:C:2002:273); réponse donnée par le commissaire Kinnock à la question écrite E‑3484/96 (JO 1996, C 186, p. 96) et affaire N 733/2000 – Italie (Ligure), Action régionale visant à améliorer le service public de taxi, décision du 25 avril 2001, disponible à l’adresse http://ec.europa.eu/competition/state_aid/cases/134182/134182_1154208_1_2.pdf (publication du résumé au JO 2004,
C 67, p. 11). Néanmoins, tous ces éléments sont antérieurs à l’arrêt Altmark (EU:C:2003:415).

( 43 ) Voir arrêt Altmark (EU:C:2003:415, point 78 et jurisprudence citée). Voir aussi arrêt Philip Morris Holland/Commission (730/79, EU:C:1980:209, point 11).

( 44 ) Voir, notamment, affaire N 258/2000 – Allemagne, Piscine à Dorsten, décision du 21 décembre 2000, disponible à l’adresse http://ec.europa.eu/competition/state_aid/cases/137009/137009_1153410_12_2.pdf (publication du résumé au JO 2001, C 172, p. 16), et affaire SA.36581 (2013/NN) – Grèce, Construction du musée archéologique de Messara, Crète, décision du 6 novembre 2013, disponible à l’adresse http://ec.europa.eu/competition/state_aid/cases/250254/250254_1484489_76_2.pdf (publication du résumé
au JO 2013, C 353, p. 4).

( 45 ) Voir arrêt Fallimento Traghetti del Mediterraneo (C‑140/09, EU:C:2010:335, point 51).


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : C-518/13
Date de la décision : 24/09/2014
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par la Court of Appeal (England & Wales) (Civil Division).

Renvoi préjudiciel – Concurrence – Aides d’État – Article 107, paragraphe 1, TFUE – Autorisation accordée aux seuls taxis londoniens, à l’exclusion des voitures de tourisme avec chauffeur, d’utiliser les couloirs réservés aux autobus – Notion d’‘aide d’État’ – Ressources d’État – Avantage économique – Avantage sélectif – Incidence sur les échanges entre les États membres.

Concurrence

Aides accordées par les États


Parties
Demandeurs : The Queen, à la demande de: Eventech Ltd
Défendeurs : Parking Adjudicator.

Composition du Tribunal
Avocat général : Wahl

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2014:2239

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