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12/06/2014 | CJUE | N°C-448/13

CJUE | CJUE, Ordonnance de la Cour, Delphi Technologies Inc. contre Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI)., 12/06/2014, C-448/13


ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

12 juin 2014 (*)

«Pourvoi – Marque communautaire – Règlement (CE) n° 207/2009 – Article 7, paragraphe 1, sous b) – Marque verbale INNOVATION FOR THE REAL WORLD – Slogan publicitaire – Refus d’enregistrement – Absence de caractère distinctif»

Dans l’affaire C‑448/13 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 5 août 2013,

Delphi Technologies Inc., établie à Wilmington (États-Unis), représentÃ

©e par M^es C. Albrecht et J. Heumann, Rechtsanwälte,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure éta...

ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)

12 juin 2014 (*)

«Pourvoi – Marque communautaire – Règlement (CE) n° 207/2009 – Article 7, paragraphe 1, sous b) – Marque verbale INNOVATION FOR THE REAL WORLD – Slogan publicitaire – Refus d’enregistrement – Absence de caractère distinctif»

Dans l’affaire C‑448/13 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 5 août 2013,

Delphi Technologies Inc., établie à Wilmington (États-Unis), représentée par M^es C. Albrecht et J. Heumann, Rechtsanwälte,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant:

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M. J. Crespo Carrillo, en qualité d’agent,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (sixième chambre),

composée de M. A. Borg Barthet, président, MM. E. Levits (rapporteur) et F. Biltgen, juges,

avocat général: M. M. Szpunar,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1 Par son pourvoi, Delphi Technologies Inc. demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne Delphi Technologies/OHMI (INNOVATION FOR THE REAL WORLD) (T‑515/11, EU:T:2013:300, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 23 juin 2011 (affaire R 1967/2010-2) concernant la demande
d’enregistrement du signe verbal «INNOVATION FOR THE REAL WORLD» comme marque communautaire (ci-après la «décision litigieuse»).

Le cadre juridique

2 L’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1), prévoit:

«Sont refusés à l’enregistrement:

[...]

b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif».

Les antécédents du litige

3 Le Tribunal a résumé les faits à l’origine du litige comme suit:

«1 Le 17 juillet 2008, la requérante, Delphi Technologies, Inc., a présenté une demande d’enregistrement de marque communautaire à l’[OHMI], en vertu du règlement (CE) n° 40/94 du Conseil, du 20 décembre 1993, sur la marque communautaire (JO 1994, L 11, p. 1), [remplacé par le règlement n° 207/2009].

2 La marque dont l’enregistrement a été demandé est le signe verbal INNOVATION FOR THE REAL WORLD.

3 Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent des classes 7, 9, 10 et 12 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié [ci-après l’ʻarrangement de Nice’], et correspondent, après la limitation intervenue au cours de la procédure devant l’OHMI, pour chacune de ces classes, à la description suivante:

– classe 7: ‘Produits pour véhicules automobiles, à savoir systèmes de gestion du carburant, systèmes et pièces de système d’allumage, et systèmes et pièces de système de contrôle des émissions’;

– classe 9: ‘Systèmes de navigation GPS, radios, systèmes audio et son et pièces et accessoires’;

– classe 10: ‘Appareils et instruments médicaux pour la surveillance des signes vitaux, pour le contrôle des perfusions médicales, et pour le rétablissement et l’amélioration de la fonction respiratoire’;

– classe 12: ‘Produits pour véhicules automobiles, à savoir systèmes et pièces de système de freinage, systèmes et pièces de système de direction, systèmes de montage de suspension du groupe motopropulseur, airbags, ceintures de sécurité, amortisseurs et boîtes de commande pour véhicules terrestres’.

4 Par lettre du 27 mars 2009, l’examinateur a soulevé des objections quant à la possibilité d’enregistrer la marque [en cause] au motif qu’elle serait dépourvue de caractère distinctif.

5 Le 17 juillet 2009, en réponse à la lettre de l’examinateur du 27 mars 2009 précitée, la requérante a soutenu, en substance, que la marque [dont l’enregistrement était demandé] présentait un caractère distinctif intrinsèque, au motif que le mot ‘world’ était vague, que l’expression ‘real world’ n’était pas descriptive, promotionnelle ou laudative et que plusieurs marques analogues à la marque demandée avaient déjà été enregistrées.

6 Par décision du 25 août 2010, l’examinateur a, en application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), et de l’article 7, paragraphe 2, du règlement n° 207/2009, refusé l’enregistrement de la marque [...] pour les produits visés au point 3 ci-dessus au motif que cette marque était dépourvue de caractère distinctif.

7 Le 8 octobre 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre la décision de l’examinateur.

8 Par [la décision litigieuse], la deuxième chambre de recours de l’OHMI [ci-après la ʻchambre de recours’] a rejeté le recours de la requérante. Elle a d’abord défini le public pertinent comme étant composé de professionnels anglophones, pour les produits relevant des classes 7, 10 et 12 [de l’arrangement de Nice], et du grand public anglophone, pour les produits de la classe 9 [de cet arrangement]. Elle a ensuite indiqué que, compte tenu de la nature des produits en cause, le niveau
d’attention du public pertinent (professionnels ou grand public) était ʻrelativement élevé’. Elle a cependant précisé que, malgré un niveau d’attention généralement élevé du public pertinent, ce niveau pouvait être relativement faible à l’égard d’indications à caractère promotionnel qui n’étaient pas déterminantes pour un public avisé. La chambre de recours a ensuite indiqué que l’expression ‘innovation for the real world’ sera comprise par le public pertinent, sans effort d’interprétation, comme un
message laudatif selon lequel les produits délivrés par la requérante constituent des innovations pour le monde réel. Cette signification serait d’autant plus claire que les produits concernés relèvent d’un marché où l’innovation est essentielle. Selon la chambre de recours, la marque [dont l’enregistrement est demandé] n’est donc pas une indication de l’origine commerciale des produits. En outre, rien dans l’expression ‘innovation for the real world’, au-delà de son sens promotionnel, ne
permettrait au public de mémoriser facilement et immédiatement [cette] marque [...] comme une marque distinctive. À cet égard, la chambre de recours relève que la marque [dont l’enregistrement est demandé] ne constitue pas un jeu de mots et n’est pas imaginative, ni surprenante ou inattendue. Selon la chambre de recours, cette analyse ne méconnaîtrait pas l’[arrêt Audi/OHMI (C‑398/08 P, EU:C:2010:29)], dans la mesure où, en l’espèce, la marque demandée [serait] rejetée [non pas] au motif qu’il
s’agit d’un slogan promotionnel, mais au motif qu’il s’agit d’un slogan banal. Enfin, la chambre de recours a précisé que, dans l’affaire ayant donné lieu à l’[arrêt Audi/OHMI (EU:C:2010:29)], le slogan en cause était très connu en raison de son usage pendant de nombreuses années, ce qui ne serait pas le cas en l’espèce.»

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

4 La requête en annulation de la décision litigieuse déposée devant le Tribunal par la requérante reposait sur un moyen unique tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, divisé en trois branches.

5 Premièrement, la requérante reprochait à la chambre de recours d’avoir commis une erreur en considérant que la marque dont l’enregistrement est demandé était dépourvue de caractère distinctif.

6 Après avoir rappelé les principes qui commandent l’appréciation du caractère distinctif d’une marque composée de signes ou d’indications utilisés en tant que slogans publicitaires, indications de qualité ou expressions incitant à acheter les produits ou les services visés par cette marque, le Tribunal a jugé, en premier lieu, aux points 23 et 24 de l’arrêt attaqué, que la requérante n’avait pas démontré que les produits de la classe 9 de l’arrangement de Nice étaient tous nécessairement
complexes et ne s’adressaient pas, en tant que tels, à un grand public. En outre, il a ajouté, aux points 25 à 27 de cet arrêt, que le niveau d’attention d’un public même professionnel serait faible à l’égard d’une marque constituée d’un slogan promotionnel.

7 En second lieu, après avoir jugé, aux points 29 à 32 dudit arrêt, que la chambre de recours n’avait pas commis d’erreur d’appréciation en considérant que le signe «INNOVATION FOR THE REAL WORLD» n’était pas perçu comme une indication de l’origine commerciale des produits en cause, le Tribunal a considéré que, en vertu des arrêts OHMI/Erpo Möbelwerk (C‑64/02 P, EU:C:2004:645) et Audi/OHMI (EU:C:2010:29), ce signe, même en tant que slogan promotionnel, ne saurait être considéré comme
présentant un caractère distinctif. À cet égard, il a rappelé, en substance, aux points 35 et 36 de l’arrêt attaqué, qu’une marque constituée d’un slogan publicitaire doit se voir reconnaître un caractère distinctif si, au-delà de sa fonction promotionnelle, elle peut être perçue d’emblée par le public pertinent comme une indication d’origine commerciale des produits et des services visés.

8 Procédant, aux points 37 à 43 de cet arrêt, à un examen dudit signe, le Tribunal a confirmé l’appréciation de la chambre de recours telle qu’elle résulte de la décision litigieuse, concluant à l’absence de caractère distinctif du même signe.

9 Ce faisant, le Tribunal a réfuté les arguments de la requérante tendant à démontrer que la chambre de recours aurait appliqué lors de son examen du signe en cause des critères plus stricts que ceux applicables à d’autres signes. Il a indiqué tout d’abord, au point 46 de l’arrêt attaqué, que cette chambre avait procédé à une comparaison de son raisonnement avec celui tenu par la Cour dans l’arrêt Audi/OHMI (EU:C:2010:29). Il a considéré, ensuite, aux points 47 à 54 de l’arrêt attaqué, que
ladite chambre avait appliqué les critères tels qu’ils résultent de la jurisprudence pertinente, sans avoir introduit de hiérarchie entre la fonction promotionnelle d’un slogan et celle indicative de l’origine commerciale des produits. Enfin, au point 56 de cet arrêt, il a constaté que la même chambre ne s’était pas fondée sur le critère de la notoriété de la marque dont l’enregistrement est demandé pour fonder sa décision.

10 Deuxièmement, la requérante reprochait à la chambre de recours de ne pas avoir tenu compte de l’usage de la marque dont l’enregistrement est demandé ni de sa notoriété.

11 D’une part, le Tribunal a constaté que la requérante n’avait pas fait valoir un tel argument devant cette chambre. D’autre part, il a relevé que les éléments avancés visant à démontrer un tel usage sont tous postérieurs à la demande d’enregistrement présentée par la requérante.

12 Troisièmement, la requérante reprochait à ladite chambre de ne pas avoir pris en considération les marques analogues à celle dont l’enregistrement est demandé, enregistrées par l’OHMI ou dans certains États membres.

13 À cet égard, le Tribunal a, d’une part, indiqué que cette branche était inopérante au vu du rejet des première et deuxième branches. D’autre part, il a jugé que les décisions de l’OHMI invoquées par la requérante se rapportaient à des marques partiellement différentes de celle dont l’enregistrement est demandé et que, en outre, l’OHMI n’est pas lié par les décisions d’enregistrement adoptées dans les États membres.

14 Dans ces circonstances, le Tribunal a rejeté le recours de la requérante comme étant non fondé.

Les conclusions des parties

15 Par son pourvoi, la requérante demande à la Cour:

– d’annuler l’arrêt attaqué;

– d’annuler la décision litigieuse, et

– de condamner l’OHMI aux dépens exposés par lui tant dans le cadre de la procédure de pourvoi que devant le Tribunal.

16 L’OHMI demande à la Cour de rejeter le pourvoi et de condamner la requérante aux dépens.

Sur le pourvoi

17 En vertu de l’article 181 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’un pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, celle-ci peut à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, le rejeter totalement ou partiellement par voie d’ordonnance motivée, et ce sans ouvrir la procédure orale.

18 À l’appui de son pourvoi, la requérante soulève trois moyens, les deux premiers étant tirés de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et le troisième étant tiré de la violation des principes généraux de légalité, d’égalité de traitement et de bonne administration par l’OHMI.

Sur le premier moyen

Argumentation des parties

19 La requérante reproche au Tribunal de n’avoir apprécié correctement, au point 23 de l’arrêt attaqué, ni les biens relevant de la classe 9 de l’arrangement de Nice pour laquelle l’enregistrement de la marque a été demandé, ni le public pertinent. En outre, le Tribunal n’aurait pas justifié l’affirmation selon laquelle le degré d’attention de ce public est faible dans le cas d’indications à caractère exclusivement promotionnel, sur laquelle il s’est fondé au point 25 de cet arrêt.

20 L’OHMI soutient que la requérante n’a démontré aucune erreur de droit, celle-ci contestant tout au plus la jurisprudence sur laquelle s’est fondé le Tribunal.

Appréciation de la Cour

21 Il convient de relever que, en reprochant au Tribunal d’avoir considéré que le public pertinent pour les produits de la classe 9 de l’arrangement de Nice pour lesquels l’enregistrement de la marque est demandé est le grand public, la requérante n’invoque pas une erreur de droit commise par le Tribunal, mais conteste l’appréciation des faits par celui-ci.

22 Or, il résulte d’une jurisprudence constante de la Cour que, en vertu de l’article 256, paragraphe 1, TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation de ces faits et éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une
question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre d’un pourvoi (voir, notamment, arrêt Calvin Klein Trademark Trust/OHMI, C‑254/09 P, EU:C:2010:488, point 49 et jurisprudence citée).

23 Dès lors, en excipant de ce que le Tribunal n’aurait pas défini correctement le public pertinent, la requérante requiert en réalité une nouvelle appréciation des faits par la Cour. La requérante n’alléguant aucune dénaturation des faits ou des éléments de preuve il y a lieu de considérer que cet argument est manifestement irrecevable.

24 En outre, il a déjà été jugé que les constatations relatives à l’attention, à la perception ou à l’attitude des consommateurs relèvent du domaine des appréciations factuelles (arrêt Henkel/OHMI, C‑144/06 P, EU:C:2007:577, point 51, et ordonnance Asa/OHMI, C‑354/12 P, EU:C:2013:238, point 31).

25 Partant, l’argument de la requérante visant à remettre en cause l’appréciation du Tribunal quant au degré d’attention du public concerné doit également être écarté.

26 Par conséquent, le premier moyen doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

Sur le deuxième moyen

Argumentation des parties

27 La requérante reproche au Tribunal d’avoir violé l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 en procédant à une interprétation trop stricte des critères d’appréciation du caractère distinctif de la marque dont l’enregistrement est demandé.

28 En effet, en vertu du libellé de cette disposition, le plus petit degré de caractère distinctif serait suffisant pour exclure qu’un signe est dépourvu d’un tel caractère.

29 Ainsi, premièrement, aux points 33 et 36 de l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait estimé, à l’encontre du principe dégagé dans les arrêts OHMI/Erpo Möbelwerk (EU:C:2004:645) et Audi/OHMI (EU:C:2010:29), selon lequel la perception directe d’un signe ne peut pas être un critère pertinent pour affirmer le caractère distinctif de ce signe, que ce caractère doit être perçu d’emblée par le public pertinent comme donnant une indication de l’origine commerciale des biens et des services considérés.

30 En outre, le Tribunal n’aurait pas correctement apprécié, au point 37 de l’arrêt attaqué, la perception du signe «INNOVATION FOR THE REAL WORLD».

31 Deuxièmement, au point 46 de l’arrêt attaqué, le Tribunal se serait contenté de citer la jurisprudence résultant des arrêts OHMI/Erpo Möbelwerk (EU:C:2004:645) et Audi/OHMI (EU:C:2010:29) sans, toutefois, l’appliquer. En outre, le Tribunal aurait mal compris l’argument a contrario de la requérante relatif aux difficultés à percevoir les marques tridimensionnelles en tant que telles.

32 Troisièmement, le Tribunal aurait jugé à tort, au point 51 de l’arrêt attaqué, que la décision litigieuse n’établissait aucune hiérarchie entre la fonction promotionnelle d’un slogan et celle d’indication de l’origine commerciale. À cet égard, aux points 55 et 56 de cet arrêt, le Tribunal aurait méconnu la signification de la référence à la notoriété de la marque en cause dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Audi/OHMI (EU:C:2010:29), cette notoriété étant dénuée d’importance pour
l’appréciation de la Cour. En outre, le Tribunal n’aurait analysé aucun des critères pertinents dégagés dans cet arrêt. Or, eu égard à ces critères, le Tribunal aurait dû conclure au caractère distinctif du signe en cause, de la même manière que l’a fait la Cour dans l’affaire ayant donné lieu audit arrêt.

33 Quatrièmement, la requérante soutient que le Tribunal aurait considéré à tort dans son examen du caractère distinctif de la marque dont l’enregistrement est demandé le critère tiré de la notoriété de cette marque.

34 Pour l’OHMI, la requérante ne démontre pas l’existence d’une erreur de droit ou d’une dénaturation des faits ou des éléments de preuve. Tout au plus, les reproches dirigés contre l’arrêt attaqué résulteraient d’une lecture erronée de cet arrêt.

Appréciation de la Cour

35 S’agissant de la première branche du deuxième moyen, force est de constater que le reproche exprimé par la requérante résulte d’une lecture erronée de l’arrêt attaqué et de la jurisprudence citée dans cet arrêt.

36 En effet, le Tribunal a, aux points 34 à 36 dudit arrêt, fidèlement repris le principe établi par la Cour aux points 44 et 45 de l’arrêt Audi/OHMI (EU:C:2010:29), selon lequel, en substance, le simple fait qu’une marque est perçue par le public concerné comme une formule promotionnelle n’est pas en tant que tel suffisant pour conclure que cette marque est dépourvue de caractère distinctif, ladite marque pouvant concomitamment être perçue par le public concerné comme une formule
promotionnelle et une indication de l’origine commerciale des produits ou des services qu’elle désigne. Partant, c’est à bon droit que le Tribunal a jugé, au point 36 de l’arrêt attaqué, qu’une marque constituée d’une formule promotionnelle doit se voir reconnaître un caractère distinctif si elle peut être perçue d’emblée par le public pertinent comme une indication d’origine commerciale des produits et des services pour lesquels son enregistrement est demandé.

37 Ce faisant, contrairement à ce que fait valoir la requérante dans la deuxième branche de son deuxième moyen, le Tribunal n’a établi aucune hiérarchie entre l’aspect promotionnel et l’aspect commercial de la perception d’une marque constituée d’un slogan promotionnel. Au contraire, c’est conformément aux principes jurisprudentiels qu’il a rappelé aux points 34 et 35 dudit arrêt qu’il a indiqué qu’une telle marque ne doit être considérée comme dépourvue de caractère distinctif que si elle est
perçue par le public pertinent uniquement comme une simple formule promotionnelle, et non pas, également, comme une indication de l’origine commerciale des produits et des services pour lesquels son enregistrement est demandé.

38 Par ailleurs, la requérante ne saurait reprocher au Tribunal un défaut de motivation de l’absence de caractère distinctif de la marque dont l’enregistrement est demandé. En effet, aux points 37 à 43 du même arrêt, le Tribunal a procédé à un examen détaillé de la perception du signe en cause.

39 À cet égard, il faut rappeler, ainsi qu’il résulte du point 22 de la présente ordonnance, que le pourvoi est limité aux questions de droit. Or, en critiquant le point 37 de l’arrêt attaqué en ce qu’il confirme l’appréciation faite par la chambre de recours de la façon dont est perçu le signe «INNOVATION FOR THE REAL WORLD» par le public pertinent, la requérante demande à la Cour une nouvelle appréciation des faits, exclue au stade du pourvoi.

40 S’agissant de la troisième branche du deuxième moyen, force est de constater que, en reprochant au Tribunal d’avoir qualifié à tort les points 27 et 28 de la décision litigieuse d’analyse comparative du raisonnement de la chambre des recours dans la présente affaire et de celui de la Cour développé dans l’arrêt Audi/OHMI (EU:C:2010:29), la requérante n’indique pas en quoi, ce faisant, le Tribunal aurait commis une erreur de droit. Un tel reproche procéderait, en tout état de cause, d’une
lecture erronée de la décision litigieuse, ces points qui se rapportent à la jurisprudence dont se prévaut la requérante, étant le pendant du point 26 qui concerne la perception du signe dont l’enregistrement est demandé en tant que marque par la requérante.

41 Enfin, s’agissant de la quatrième branche du deuxième moyen, la requérante n’indique pas en quoi le Tribunal aurait commis une erreur de droit en indiquant, au point 56 de l’arrêt attaqué, que, avant d’avoir abordé la question de la notoriété de la marque dont l’enregistrement est demandé, la chambre de recours avait déjà conclu que cette marque ne disposait pas d’un caractère distinctif. Ce faisant, la requérante réitère le grief présenté devant le Tribunal sans indiquer précisément une
erreur de droit résultant, à cet égard, de l’arrêt attaqué.

42 Partant, il y a lieu de rejeter le deuxième moyen du pourvoi comme étant, en partie, manifestement non fondé et, en partie, manifestement irrecevable.

Sur le troisième moyen

Argumentation des parties

43 La requérante fait valoir que le Tribunal a violé les principes d’égalité de traitement et de bonne administration en rejetant son recours contre la décision litigieuse alors que l’OHMI a appliqué à sa demande d’enregistrement de la marque en cause des critères plus sévères que ceux ayant permis l’enregistrement de marques similaires. En tout état de cause, il appartiendrait à l’OHMI de motiver toute décision de refus d’enregistrement.

44 L’OHMI relève que, aux termes de ce moyen, les critiques de la requérante sont exclusivement dirigées contre la chambre de recours et n’identifient en rien une erreur de droit commise par le Tribunal.

Appréciation de la Cour

45 Force est de constater que la requérante n’identifie pas avec précision l’erreur de droit qu’elle reproche au Tribunal. Ainsi, elle se contente de faire valoir que le Tribunal a appliqué dans le cadre de son recours en annulation des critères différents de ceux appliqués dans des affaires antérieures. Ce faisant, la requérante ne précise pas les différences sur lesquelles elle fonde son reproche. En tout état de cause, même à considérer que la requérante se réfère aux critères d’appréciation
du caractère distinctif d’une marque constituée d’un slogan publicitaire, il résulte des points 36 à 41 de la présente ordonnance que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit dans le choix et l’application des critères retenus pour apprécier ce caractère.

46 Par conséquent, il convient de rejeter le troisième moyen comme étant manifestement non fondé.

47 Il résulte des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté dans son ensemble comme étant, en partie, manifestement irrecevable et, en partie, manifestement non fondé.

Sur les dépens

48 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La requérante ayant succombé en ses moyens et l’OHMI ayant conclu à sa condamnation, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) ordonne:

1) Le pourvoi est rejeté.

2) Delphi Technologies Inc. est condamnée aux dépens.

Signatures

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* Langue de procédure: l’anglais.


Synthèse
Formation : Sixième chambre
Numéro d'arrêt : C-448/13
Date de la décision : 12/06/2014
Type d'affaire : Pourvoi - irrecevable, Pourvoi - non fondé
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi - Marque communautaire - Règlement (CE) nº 207/2009 - Article 7, paragraphe 1, sous b) - Marque verbale INNOVATION FOR THE REAL WORLD - Slogan publicitaire - Refus d’enregistrement - Absence de caractère distinctif.

Marques

Propriété intellectuelle, industrielle et commerciale


Parties
Demandeurs : Delphi Technologies Inc.
Défendeurs : Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

Composition du Tribunal
Avocat général : Szpunar
Rapporteur ?: Levits

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2014:1746

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