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08/05/2014 | CJUE | N°C-401/12

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Conseil de l'Union européenne et autres contre Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht., 08/05/2014, C-401/12


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 8 mai 2014 ( 1 )

Affaires jointes C‑401/12 P à C‑403/12 P

Conseil de l’Union européenne

Parlement européen

Commission européenne

contre

Vereniging Milieudefensie

et

Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht

«Pourvoi — Article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus — Article 2, paragraphe 1, sous g) et article 10 du règlement (CE) no 1367/2006 — Demande de réexamen interne —

Irrecevabilité — Exception d’illégalité — Contrôle de la validité du droit dérivé de l’Union par rapport à un accord international — Jurisprudence issue de...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 8 mai 2014 ( 1 )

Affaires jointes C‑401/12 P à C‑403/12 P

Conseil de l’Union européenne

Parlement européen

Commission européenne

contre

Vereniging Milieudefensie

et

Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht

«Pourvoi — Article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus — Article 2, paragraphe 1, sous g) et article 10 du règlement (CE) no 1367/2006 — Demande de réexamen interne — Irrecevabilité — Exception d’illégalité — Contrôle de la validité du droit dérivé de l’Union par rapport à un accord international — Jurisprudence issue des arrêts Fediol/Commission et Nakajima/Conseil — Conditions de l’invocabilité directe des normes conventionnelles»

Table des matières

  I – Introduction
  II – Les antécédents du litige et l’arrêt attaqué
  III – Les conclusions des parties et la procédure devant la Cour
  IV – Sur le fondement du contrôle de légalité des normes de droit dérivé au regard du droit international conventionnel (premier moyen des pourvois)
  A – Arguments des parties
  B – Sur les effets du droit international en droit de l’Union
  C – Sur l’arrêt attaqué
  V – Sur la solution alternative en vue du contrôle de légalité – justification du renvoi de l’affaire devant le Tribunal
  A – Sur l’invocabilité directe des normes conventionnelles aux fins du contrôle de la légalité du droit dérivé de l’Union
  1. Sur l’«effet direct» comme l’écran du contrôle de la légalité
  2. Sur l’adaptation des conditions requises aux fins de l’invocabilité directe
  B – L’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus comme norme de référence aux fins du contrôle de légalité
  VI – Analyse subsidiaire au titre du contrôle de légalité
  A – Remarques liminaires
  B – Arguments développés par la Commission dans le cadre du second moyen
  C – Sur l’existence d’un contrôle des violations du droit de l’environnement dans le cadre de la convention d’Aarhus
  D – Sur l’étendue du contrôle des violations du droit de l’environnement dans le règlement d’Aarhus
  E – Réflexions complémentaires
  VII – Sur le pourvoi incident
  VIII – Conclusion

I – Introduction

1. La présente série de pourvois soulève des questions fondamentales pour l’ordre juridique de l’Union européenne. En effet, relevant des enjeux à caractère constitutionnel, elle reflète une tension entre, d’une part, la nécessité de préserver l’autonomie du droit de l’Union et, d’autre part, la volonté de se conformer à des engagements internationaux découlant d’accords auxquels l’Union est partie.

2. La spécificité des présentes affaires réside dans le fait que la convention internationale en question, à savoir la convention sur l’accès à l’information, la participation du public au processus décisionnel et l’accès à la justice en matière d’environnement (ci‑après la «convention d’Aarhus»), approuvée au nom de la Communauté européenne par la décision 2005/370/CE du Conseil, du 17 février 2005 ( 2 ), vise, notamment, à créer des droits procéduraux spéciaux au profit des organisations de
protection de l’environnement afin de protéger, dans l’intérêt général, l’environnement entendu comme un bien commun. Ce cas de figure dépasse ainsi la dichotomie entres les sujets publics et les particuliers, laquelle constitue le prisme traditionnellement utilisé dans l’analyse des effets internes des obligations conventionnelles ( 3 ).

3. Dans le contexte particulier de la convention d’Aarhus, la Cour est ainsi invitée à repenser les conditions d’invocabilité ( 4 ) de dispositions du droit conventionnel international devant les juridictions de l’Union dans le cadre du contentieux de l’annulation aux fins du contrôle de la légalité du droit dérivé de l’Union.

4. La présente série d’affaires trouve son origine dans la juxtaposition de deux dispositions, l’une de droit international conventionnel et l’autre de droit dérivé de l’Union, dont l’objectif est de mettre en œuvre la convention en question.

5. En effet, l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, relatif à l’«accès à la justice», prévoit que, «sans préjudice des procédures de recours visées aux paragraphes 1 et 2 ci‑dessus, chaque Partie veille à ce que les membres du public qui répondent aux critères éventuels prévus par son droit interne puissent engager des procédures administratives ou judiciaires pour contester les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques allant à l’encontre des dispositions du droit
national de l’environnement». La portée de cette disposition est précisée au paragraphe 4 de ce même article, lequel exige, notamment, que les procédures visées au paragraphe 3 offrent des recours suffisants et effectifs, y compris un redressement par injonction s’il y a lieu, et soient objectives, équitables et rapides sans que leur coût soit prohibitif.

6. L’application aux institutions et aux organes de l’Union des dispositions de la convention d’Aarhus est régie par le règlement (CE) no 1367/2006 ( 5 ) (ci‑après le «règlement d’Aarhus»). Conformément à l’article 10, paragraphe 1, dudit règlement, relatif à la procédure de «réexamen interne d’actes administratifs», «toute organisation non gouvernementale satisfaisant aux critères prévus à l’article 11[ ( 6 )] est habilitée à introduire une demande de réexamen interne auprès de l’institution ou de
l’organe communautaire qui a adopté un acte administratif au titre du droit de l’environnement ou, en cas d’allégation d’omission administrative, qui était censé avoir adopté un tel acte». En revanche, la notion d’«acte administratif» au sens de ce règlement est définie dans l’article 2, paragraphe 1, sous g), du règlement d’Aarhus, comme «toute mesure de portée individuelle au titre du droit de l’environnement arrêtée par une institution ou un organe communautaire et ayant un effet juridiquement
contraignant et extérieur». Le législateur de l’Union a ainsi exclu les actes de portée générale du champ du contrôle pouvant être initié par les organisations de protection de l’environnement.

7. Dans l’arrêt Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht/Commission (T‑396/09, EU:T:2012:301, ci‑après l’«arrêt attaqué»), le Tribunal a procédé au contrôle de la légalité du règlement d’Aarhus au regard de la convention d’Aarhus en se fondant sur la jurisprudence issue des arrêts Fediol/Commission et Nakajima/Conseil relative à des dispositions de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce (ci‑après le «GATT») et de l’accord instituant l’Organisation
mondiale du commerce (ci‑après l’«accord OMC» ( 7 ).

8. Alors même que l’arrêt du Tribunal me paraît, pour ce motif, être entaché d’une erreur de droit qui doit entraîner son annulation, il n’en demeure pas moins que l’aspect essentiel de cette erreur a trait aux conditions d’invocabilité des normes conventionnelles dégagées par la Cour dans sa jurisprudence, lesquelles ne semblent pas constituer un ensemble totalement cohérent. Selon cette jurisprudence, afin de pouvoir constituer un critère de validité d’un acte du droit de l’Union, une norme
conventionnelle doit être notamment inconditionnelle et suffisamment précise, donc dotée d’effet direct ( 8 ). Or, en cherchant, à juste titre, une solution permettant de vérifier la conformité du règlement d’Aarhus à la convention d’Aarhus, le Tribunal a manifestement essayé d’éluder cette condition ( 9 ). Je considère, pour ma part, que le signal ainsi envoyé par le Tribunal doit être entendu avec attention.

9. Par conséquent, si mon analyse de l’erreur commise par le Tribunal était partagée, le choix suivant se présenterait à la Cour. Si la Cour n’éprouvait aucun doute, il serait envisageable de s’inscrire dans la continuité de la jurisprudence incarnée par l’arrêt Intertanko e.a. ( 10 ), laquelle subordonne la possibilité d’un contrôle de validité au critère de l’effet direct, et de clôturer ainsi définitivement les voies du contrôle de la légalité du droit interne mettant en œuvre l’article 9,
paragraphe 3, de la convention d’Aarhus tant au niveau de l’Union qu’à celui des États membres.

10. Toutefois, pour les raisons que j’exposerai, il me semble préférable d’opter en faveur d’une adaptation par la Cour des conditions d’invocabilité, notamment à l’instar de l’approche retenue dans l’arrêt dit «Biotech» ( 11 ), lequel a expressément exclu que l’effet direct fût une condition universelle d’invocabilité dans le cadre du contrôle de légalité.

11. Par conséquent, même dans l’hypothèse d’un renvoi de l’affaire devant le Tribunal, un assouplissement des conditions d’invocabilité permettrait à celui‑ci de s’assurer sur un fondement approprié, si, en adoptant le règlement d’Aarhus, le législateur communautaire a accordé aux justiciables un degré de protection juridictionnelle suffisant à la lumière de la convention d’Aarhus.

II – Les antécédents du litige et l’arrêt attaqué

12. Les affaires ont pour origine une décision de la Commission européenne du 7 avril 2009 ( 12 ), par laquelle elle a accordé au Royaume des Pays‑Bas une dérogation temporaire aux obligations prévues par la directive 2008/50/CE concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe ( 13 ) (ci‑après la «décision de dérogation»).

13. Par courrier du 18 mai 2009, les Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht (ci‑après les «organisations de protection de l’environnement») ont introduit auprès de la Commission une demande de réexamen interne de la décision de dérogation, conformément à l’article 10, paragraphe 1, du règlement d’Aarhus. Par sa décision C(2009) 6121, du 28 juillet 2009 (ci‑après la «décision d’irrecevabilité»), la Commission a rejeté cette demande comme irrecevable au motif que la
décision de dérogation n’était pas une mesure de portée individuelle et qu’elle ne pouvait, dès lors, pas faire l’objet de la procédure de réexamen interne prévue par le règlement d’Aarhus. Les organisations de protection de l’environnement ont donc introduit un recours devant le Tribunal.

14. Dans l’arrêt attaqué, après avoir rejeté le moyen des organisations tendant à qualifier la décision de dérogation comme une mesure individuelle, le Tribunal a accueilli une exception d’illégalité soulevée par lesdites organisations à l’encontre de l’article 10, paragraphe 1, du règlement d’Aarhus lu en combinaison avec l’article 2, paragraphe 1, sous g), de ce même règlement, tirée d’une incompatibilité de ces dispositions avec la convention d’Aarhus. En conséquence, à la demande des
organisations de protection de l’environnement, le Tribunal a annulé la décision d’irrecevabilité.

15. Pour une description détaillée des faits et de la procédure à l’origine du litige, il est renvoyé à la présentation figurant dans l’arrêt attaqué.

III – Les conclusions des parties et la procédure devant la Cour

16. Par son pourvoi introduit le 3 septembre 2012 (affaire C‑401/12 P), le Conseil de l’Union européenne demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de rejeter dans son intégralité le recours des requérantes et de condamner les requérantes solidairement et conjointement aux dépens.

17. Par son pourvoi introduit le 24 août 2012 (affaire C‑402/12 P), le Parlement européen demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de rejeter le recours quant au fond et de condamner les requérantes en première instance aux dépens du présent pourvoi.

18. Par son pourvoi introduit le 27 août 2012 (affaire C‑403/12 P), la Commission demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de juger l’affaire au fond et de rejeter le recours en annulation de la décision d’irrecevabilité, ainsi que de condamner les requérantes en première instance aux dépens que la Commission a encourus en première instance et dans le cadre du présent pourvoi.

19. Les affaires C‑401/12 P, C‑402/12 P et C‑403/12 P ont été jointes aux fins de la procédure écrite et orale ainsi que de l’arrêt par ordonnance du président de la Cour du 21 novembre 2012.

20. En date du 25 février 2012, les organisations de protection de l’environnement ont déposé un mémoire en réponse au pourvoi. À la suite de la demande de régularisation, en date du 1er mars 2012, lesdites parties ont introduit un pourvoi incident conformément à l’article 176, paragraphe 2, du règlement de procédure.

21. Le Conseil, le Parlement, la Commission, les organisations de protection de l’environnement ainsi que le gouvernement tchèque ( 14 ) ont été entendus à l’audience qui s’est tenue le 10 décembre 2013.

IV – Sur le fondement du contrôle de légalité des normes de droit dérivé au regard du droit international conventionnel (premier moyen des pourvois)

A – Arguments des parties

22. Par leurs premiers moyens, le Conseil, le Parlement et la Commission soutiennent en substance qu’aucun contrôle de validité du règlement d’Aarhus ne peut avoir lieu en l’espèce, eu égard à l’absence d’effet direct de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus reconnue par la Cour dans l’arrêt Lesoochranárske zoskupenie ( 15 ) ainsi qu’au fait que les conditions établies dans la jurisprudence de la Cour afin d’admettre un contrôle de la légalité des actes du droit dérivé revêtaient un
caractère exceptionnel. Par conséquent, en écartant l’approche découlant de l’arrêt Lesoochranárske zoskupenie, et en se fondant sur la jurisprudence issue des arrêts Fediol/Commission et Nakajima/Conseil ( 16 ), laquelle ouvre une possibilité de contrôle de la légalité des actes de droit dérivé dans les cas exceptionnels, le Tribunal aurait commis une erreur de droit.

23. À cet égard, les auteurs des pourvois s’accordent pour considérer que, les exceptions devant être interprétées restrictivement ( 17 ), les dispositions du règlement d’Aarhus ne rempliraient pas, en tout état de cause, les conditions établies dans la jurisprudence Fediol/Commission et Nakajima/Conseil.

24. Selon le Conseil, l’arrêt Fediol/Commission viserait l’hypothèse où un acte de l’Union renvoie expressément à des dispositions spécifiques d’un accord international. Tel ne serait pas le cas du règlement d’Aarhus, dès lors que la simple référence, par un acte de droit dérivé, à un instrument international ne suffirait pas pour justifier qu’il soit susceptible d’être soumis à un contrôle juridictionnel au regard de cet instrument. De même, le Tribunal ne pourrait se fonder sur l’arrêt
Nakajima/Conseil qui concernerait une situation différente dans laquelle l’acte du droit de l’Union entend donner exécution à une obligation «particulière» de l’accord international.

25. Le Parlement partage cette analyse de l’arrêt Fediol/Commission. En ce qui concerne l’arrêt Nakajima/Conseil, le Parlement souligne que cette jurisprudence a un domaine d’application très limité ( 18 ) et vise l’hypothèse où l’Union entend «donner exécution» à une «obligation particulière». Il ne s’agirait donc pas, pour l’Union, de se conformer à ses obligations internationales en général lorsqu’elle dispose d’une marge discrétionnaire quant à la manière de se conformer aux obligations qui lui
incombent au titre d’un accord international donné ( 19 ), mais de donner exécution à un accord qui impose à l’Union une obligation positive d’agir dans un sens déterminé et ne lui laissant aucune marge discrétionnaire ( 20 ).

26. Pour sa part, la Commission ajoute que l’arrêt Nakajima/Conseil trouve son origine dans les affaires antidumping et qu’il a été appliqué en pratique, dans la jurisprudence de la Cour, presque exclusivement à des hypothèses de contrôle, par voie incidente, de la conformité des règlements antidumping de l’Union aux dispositions des codes antidumping du GATT de 1979 et de 1994. Selon la Commission, il n’est pas possible d’interpréter ledit arrêt comme visant tous les cas où l’Union adopte une
mesure pour respecter ses obligations dans le cadre de conventions internationales.

27. Dans le mémoire en réponse aux pourvois, les organisations de protection de l’environnement demandent à la Cour de «valider l’arrêt attaqué, en corrigeant ou non les motifs sur lesquels il est fondé; de rejeter les pourvois formés par la Commission, le Conseil et le Parlement en tous leurs éléments». Elles estiment que la nature et l’objet de la convention d’Aarhus ne font pas obstacle au contrôle de validité et que les conditions de l’arrêt Fediol/Commission sont réunies en l’espèce, dès lors
que le règlement d’Aarhus contient plusieurs références à cette convention.

B – Sur les effets du droit international en droit de l’Union

28. Il a été dit que, pour comprendre et apprécier les attitudes des juges nationaux face aux accords internationaux, il fallait pénétrer jusqu’aux bases constitutionnelles de l’État ( 21 ). Cette exigence s’impose avec plus de force encore dans les présentes affaires, dès lors que la Cour doit préciser les normes de référence applicables au contrôle de la légalité des effets internes de la convention d’Aarhus dans l’ordre juridique de l’Union, alors que durant des décennies la jurisprudence
relative aux relations entre le droit international et le droit de l’Union a dégagé les principes dont l’application n’est pas toujours sans susciter des interrogations.

29. Ainsi que je l’ai déjà indiqué, je suis d’avis que, en appliquant en l’espèce la jurisprudence issue des arrêts Fediol/Commission et Nakajima/Conseil, le Tribunal a commis une erreur de droit, dès lors que ces arrêts consacrent une exception limitée établie dans le cadre de la jurisprudence sur les accords du GATT et OMC, et non une approche générale envers le contrôle de la légalité du droit de l’Union. Afin d’illustrer cette thèse, il est toutefois nécessaire d’analyser le développement de la
jurisprudence portant sur les effets internes des obligations du droit international en droit de l’Union. Il en ressortira que, à l’instar d’un arbre, la jurisprudence a évolué, au fil des années, en suivant plusieurs branches, qui se rattachent néanmoins à un «tronc commun» incarné par le principe de monisme.

1. Le tronc commun moniste

30. D’un point de vue général, il semble acquis, depuis l’arrêt Haegeman rendu en 1974 ( 22 ), qu’une approche moniste sous‑tend l’article 216 TFUE (ex‑article 300, paragraphe 7, CE), aux termes duquel «[l]es accords conclus par l’Union lient les institutions de l’Union et les États membres» ( 23 ), ce qui implique l’«incorporation automatique» ( 24 ), de sorte que les accords internationaux font partie en tant que tels des sources du droit de l’Union.

31. Avec l’arrêt Kupferberg rendu en 1982 ( 25 ), la Cour a confirmé l’incorporation des accords internationaux dans l’ordre juridique communautaire, tout en soulignant que «les effets, dans la Communauté, des dispositions d’un accord international ne sauraient être déterminés en faisant abstraction de l’origine internationale des dispositions en cause», et que, «conformément aux principes du droit international, les parties contractantes peuvent convenir des effets que les dispositions de l’accord
doivent produire dans l’ordre interne des parties contractantes». La Cour a précisé que les institutions compétentes pour négocier et conclure un accord avec un pays tiers sont libres de convenir des effets que les dispositions doivent produire dans l’ordre interne. Ce n’est que si cette question n’a pas été réglée par l’accord qu’il incombe à la Cour de trancher cette question ( 26 ).

32. Conformément à l’approche moniste, les dispositions conventionnelles produisent donc des effets dans l’ordre juridique de l’Union même en l’absence de tout acte législatif ou réglementaire adopté en vue de leur mise en œuvre ( 27 ). Ainsi que l’a résumé l’avocat général Rozès dans l’affaire Polydor, le règlement qui approuve l’accord international n’a donc qu’une valeur instrumentale ( 28 ). Une jurisprudence abondante postérieure confirme que les dispositions des accords internationaux font
partie du droit de l’Union, y compris lorsque leurs dispositions ne constituent pas des normes de référence aux fins du contrôle de la légalité du droit dérivé ( 29 ).

33. À cet égard, il y a lieu de souligner que c’est précisément en raison du principe du monisme que le problème de l’invocabilité du droit international s’est posé, tout particulièrement au regard du principe de droit de l’Union en vertu duquel les accords internationaux sont hiérarchiquement supérieurs à tous les actes de droit dérivé ( 30 ). En effet, la jurisprudence admet que l’article 216, paragraphe 2, TFUE peut constituer le fondement pour invalider une disposition du droit dérivé
incompatible avec le droit international. En droit de l’Union, cette primauté ne s’étend pas au droit primaire et, en particulier, aux principes généraux et aux droits fondamentaux ( 31 ).

34. En ce qui concerne l’hypothèse du contrôle de la légalité d’un acte de droit de l’Union au regard d’une disposition de droit international, c’est ainsi dans l’arrêt International Fruit Company e.a. de 1972 que la Cour a indiqué que sa compétence aux fins d’un contrôle de validité dans le cadre du renvoi préjudiciel s’étendait à l’ensemble des motifs d’invalidité des actes du droit dérivé et que la Cour était tenue d’examiner si la validité desdits actes pouvait être affectée du fait de leur
contrariété à une règle du droit international ( 32 ), tout en exigeant que la condition d’effet direct soit remplie devant le juge national.

35. Enfin, la primauté des accords internationaux conclus par l’Union sur les actes du droit dérivé commande également d’interpréter ces derniers, dans la mesure du possible en conformité avec lesdits accords ( 33 ).

36. Aux fins de la présente affaire, il importe de souligner que l’approche moniste, impliquant une incorporation automatique des dispositions du droit international, constitue la règle de base permettant d’appréhender la relation entre le droit de l’Union et le droit international ( 34 ). Toutefois, cette relation étroite nécessite une attitude prudente au nom de l’autonomie du droit de l’Union, dont l’exemple le plus significatif est le refus de la Cour de reconnaître aux dispositions des accords
du GATT et OMC un effet direct ( 35 ), qui aurait permis leur invocabilité.

2. Première branche dualiste (jurisprudence GATT/OMC)

37. Sachant que la distinction entre le monisme et le dualisme représente une simplification qui masque des différences importantes entre les systèmes faisant partie de l’un ou de l’autre camp ( 36 ), il n’en demeure pas moins qu’une caractéristique du dualisme réside dans le fait que les dispositions du droit international conventionnel ne sont pas directement applicables au niveau national, car leurs effets juridiques, dans l’ordre juridique interne, dépendent d’actes législatifs ou réglementaires
internes destinés à assurer leur mise en œuvre (transformation). C’est en revanche en raison de l’existence d’une source internationale que l’interprétation des dispositions internes en question est régie par le principe de «treaty friendly interpretation» afin d’éviter, dans la mesure du possible, les conflits éventuels entre la disposition nationale et une obligation conventionnelle. C’est cette approche que la Cour a appliquée en substance dans sa jurisprudence relative aux accords du GATT et
OMC ( 37 ), sans toutefois admettre s’être départie du monisme comme principe du fond.

38. Ainsi, répondant à l’invitation de son avocat général, M. Mayras, lequel avait plaidé en faveur d’une cohérence entre accords internationaux et actes des institutions, la Cour a jugé, dans l’affaire International Fruit Company e.a., que la validité de ces derniers pouvait être appréciée «au regard d’une disposition de droit international lorsque cette disposition lie la Communauté et est de nature à engendrer pour ses justiciables le droit de s’en prévaloir en justice» ( 38 ). En l’espèce, la
Cour a toutefois jugé que l’article XI de l’accord du GATT ne produisait pas un tel effet.

39. La jurisprudence ainsi adoptée confirme la nature particulière des accords du GATT et OMC ( 39 ), tenant, d’une part, à ce qu’ils sont fondés sur le principe de négociations entreprises sur une «base de réciprocité et d’avantages mutuels» et, d’autre part, à la position de la Communauté à l’époque de leur adoption ( 40 ).

40. En effet, il est constant que les accords de l’OMC ne comprennent aucune référence au statut des accords dans l’ordre juridique interne des États signataires. À la différence de la situation prévalant en droit de l’Union à la suite de l’affirmation de principe figurant dans l’arrêt Van Gend en Loos, les accords du GATT et OMC n’ont pas créé de nouvel ordre juridique qui comprendrait les parties contractantes ou les États membres et leurs citoyens ( 41 ). Par conséquent, le système des accords de
l’OMC reconnaît des droits aux particuliers uniquement par le biais des solutions adoptées par les membres de l’OMC et n’oblige nullement les juridictions nationales à ne pas appliquer une disposition contraire aux règles de l’OMC ( 42 ).

41. S’agissant du GATT, la Cour a clairement indiqué que ledit accord ne pouvait pas être invoqué par un particulier devant les tribunaux de la Communauté afin de contester la validité d’une mesure communautaire ( 43 ). L’accord du GATT se caractérisait par une flexibilité de ses dispositions, compte tenu du système de règlement de différends non contraignant, ainsi que par la possibilité de se soustraire aux obligations de l’accord lorsqu’un dommage était causé ou risquait d’être causé par l’effet
des engagements consentis dans le cadre du GATT.

42. S’agissant des accords de l’OMC, la Cour a précisé, en premier lieu, que ces accords ne déterminent pas les moyens de droit propres à assurer leur exécution de bonne foi dans l’ordre juridique interne des membres de l’OMC ( 44 ). La Cour a souligné que le système de règlement de différends accordait une place importante à la négociation entre les parties. Cela permettrait donc à un membre ayant adopté des mesures incompatibles avec les règles de l’OMC d’avoir recours à une compensation mutuelle,
au lieu d’un retrait des mesures en cause. Une invalidation d’une mesure contraire aux obligations découlant des accords de l’OMC reviendrait à priver les organes législatifs ou exécutifs des parties contractantes de la possibilité de trouver des solutions négociées. La Cour s’est également fondée sur des considérations de réciprocité liées au refus des partenaires commerciaux de la Communauté de se soumettre à un contrôle de légalité de leur droit interne sur la base des accords de l’OMC ( 45
).

43. La Cour s’en est strictement tenue à son approche en excluant la possibilité pour un particulier d’invoquer la violation des règles de l’OMC dans une action en dédommagement, même dans le cas où l’acte contesté a été condamné par l’Organe pour le règlement des différends de l’OMC ( 46 ). Cette jurisprudence implique aussi que les requérants privilégiés eux‑mêmes ne peuvent demander le contrôle de la légalité ( 47 ). Cette approche n’a toutefois pas empêché la Cour d’établir un manquement tenant
au non‑respect de dispositions de l’accord du GATT ( 48 ).

44. Tout cela ne remet cependant pas en cause la règle fondamentale selon laquelle l’accord du GATT et les accords OMC font partie du droit communautaire et lient donc en principe la Communauté ( 49 ). Ainsi, selon la Cour, les normes de l’OMC (en l’occurrence les accords ADPIC) sont, en tant que partie intégrante de l’ordre juridique communautaire, des normes de référence dans l’interprétation des actes du droit de l’Union ( 50 ).

3. Une ramification de la première branche (jurisprudence issue des arrêts Fediol/Commission et Nakajima/Conseil)

45. Eu égard au caractère restrictif de la jurisprudence générale portant sur les effets des accords du GATT et OMC, la Cour a établi une exception ( 51 ), également connue sous la dénomination de «principe d’implémentation» ( 52 ), en vertu de laquelle les juridictions communautaires peuvent contrôler la légalité d’un acte de droit dérivé à la lumière des règles de l’OMC, dont le GATT, lorsque «la Communauté a entendu donner exécution à une obligation particulière assumée dans le cadre de l’OMC, ou
dans l’occurrence où l’acte communautaire renvoie expressément à des dispositions précises des accords OMC» ( 53 ).

46. Dans l’affaire Fediol/Commission, la requérante contestait la légalité de la décision de la Commission rejetant sa plainte tendant à l’ouverture d’une procédure d’examen à l’encontre de pratiques commerciales de l’Argentine. À cet effet, elle se fondait sur le règlement (CEE) no 2641/84 du Conseil, du 17 septembre 1984, relatif au renforcement de la politique commerciale commune, notamment en matière de défense contre les pratiques commerciales illicites ( 54 ), et ajoutait que lesdites
pratiques étaient aussi contraires à plusieurs dispositions du GATT ( 55 ). Dans l’affaire Nakajima/Conseil, la requérante s’est prévalue, sur le fondement de l’article 184 CEE, de l’inapplicabilité de dispositions d’un règlement antidumping en faisant valoir, notamment, que ce règlement était contraire à certaines dispositions du code antidumping du GATT.

47. Comme cela ressort de l’arrêt Van Parys ( 56 ), lesdits arrêts représentent les deux seules exceptions à la règle générale, exceptions propres au domaine des accords du GATT et OMC, compte tenu de leur nature et de leur économie, lesquelles sont fondées sur les principes de négociations et de réciprocité, ainsi que de la nécessité de préserver la marge de manœuvre des institutions de l’Union.

48. C’est à la lumière de tout ce qui précède qu’il convient d’analyser le premier moyen des présents pourvois.

C – Sur l’arrêt attaqué

49. Je note, tout d’abord, que le raisonnement du Tribunal figurant aux points 55 à 57 de l’arrêt attaqué s’appuie principalement sur l’une des exceptions développées dans le cadre des accords du GATT et OMC, à savoir la jurisprudence Nakajima/Conseil, la référence à l’arrêt Fediol/Commission n’étant que subsidiaire, voire d’ordre purement rédactionnel ( 57 ). En effet, je considère que le point 58 de l’arrêt attaqué constitue un exposé de la justification de l’affirmation y figurant en première
phrase, selon laquelle le règlement d’Aarhus a été adopté pour satisfaire aux obligations de l’Union qui découlent de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus.

50. En conséquence, devant le refus opposé par la Cour, dans l’arrêt Lesoochranárske zoskupenie (EU:C:2011:125), de reconnaître un quelconque effet direct à l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, et dès lors que ce refus semblait exclure toute possibilité d’un contrôle de la légalité du droit dérivé par rapport à une disposition conventionnelle, le Tribunal a choisi d’appliquer une exception relative à la «mise en œuvre» d’un accord international fondée sur l’arrêt Nakajima/Conseil.

51. Ce faisant, le Tribunal a commis, selon moi, une erreur de droit qui se manifeste à deux niveaux.

52. Au premier niveau, l’erreur en question consiste à attribuer à une jurisprudence portant sur les accords du GATT et OMC une portée universelle. Ainsi, l’erreur réside dans la transposition d’une jurisprudence portant sur les accords spécifiques, caractérisés, ainsi qu’il ressort des observations qui précèdent, d’une logique et d’un système de droit propre à un domaine fondamentalement distinct, à savoir celui de la convention d’Aarhus, en vue de procéder à un contrôle de légalité du droit dérivé
de l’Union au regard de ladite convention. Or, il est exclu, à mon avis, d’appliquer le raisonnement qui a motivé ladite jurisprudence à d’autres domaines du droit ( 58 ).

53. La Cour a déjà eu l’occasion de mettre en exergue la nature particulière des règles applicables au sein des accords du GATT et OMC par rapport à celles résultant d’autres conventions internationales, telles que la convention pour la prévention de la pollution par les navires ( 59 ) et la convention sur la diversité biologique ( 60 ) afin d’en déduire l’impossibilité de transposer lesdites règles en dehors de leur cadre. Ainsi, la Cour a précisé que l’exclusion du contrôle de la légalité d’un
acte communautaire au regard des accords OMC/ADPIC/OTC ne saurait être appliquée à une convention qui, à la différence de l’accord OMC, n’est pas strictement fondée sur le principe de la réciprocité et des avantages mutuels ( 61 ).

54. Corrélativement, à un second niveau, c’est à tort que le Tribunal a cherché à justifier le contrôle de la légalité au titre d’une exception établie par l’arrêt Nakajima/Conseil, alors que ledit arrêt représente une ramification de la jurisprudence au sein de la jurisprudence relative aux accords du GATT et OMC, propre à ce domaine juridique.

55. En effet, ainsi que le Tribunal l’a rappelé dans l’arrêt Chiquita Brands e.a./Commission, la règle issue de l’arrêt Nakajima/Conseil vise, à titre exceptionnel, à permettre au justiciable de se prévaloir, de manière incidente, de la violation par la Communauté ou ses institutions des règles du GATT ou des accords OMC. En tant qu’exception au principe selon lequel les particuliers ne peuvent directement invoquer les dispositions des accords OMC devant le juge communautaire, cette règle est
interprétée de manière restrictive ( 62 ). Je considère qu’une telle définition de sa portée exclut toute possibilité de s’en prévaloir en dehors du champ des règles des accords du GATT et OMC. Il n’y a donc même pas lieu d’examiner si les exceptions en cause ont été appliquées correctement en l’espèce.

56. Par conséquent, je propose de faire droit au premier moyen des pourvois et d’annuler l’arrêt attaqué en ce qu’il a accueilli le deuxième moyen en première instance et procédé au contrôle de la légalité sur le fondement de la jurisprudence issue des arrêts Fediol/Commission et Nakajima/Conseil.

57. Pour les raisons qui suivent et qui n’ont pas pu être débattues entre les parties, l’affaire ne me semble pas être en l’état d’être jugée au sens de l’article 61, premier alinéa, du statut de la Cour de justice et devrait être renvoyée devant le Tribunal. Si, en revanche, la Cour décidait de statuer en l’espèce sur le fondement de l’arrêt Intertanko e.a. (EU:C:2008:312), sur lequel se fondent les pourvois, il ne serait plus nécessaire de renvoyer l’affaire.

V – Sur la solution alternative en vue du contrôle de légalité – justification du renvoi de l’affaire devant le Tribunal

A – Sur l’invocabilité directe des normes conventionnelles aux fins du contrôle de la légalité du droit dérivé de l’Union

1. Sur l’«effet direct» comme l’écran du contrôle de la légalité

58. Il est constant que la validité d’un acte de l’Union peut être affectée par l’incompatibilité dudit acte avec de telles règles de droit international ( 63 ). Dans sa jurisprudence classique, la Cour recherche donc une telle incompatibilité en procédant par étapes successives. Ainsi, l’Union doit tout d’abord être liée par les règles en question ( 64 ). Ensuite, la Cour ne peut procéder à l’examen de la validité d’un acte du droit de l’Union au regard d’un accord international que lorsque la
nature et l’économie de celui‑ci ne s’y opposent pas ( 65 ). Enfin, lorsque la nature et l’économie ( 66 ) de l’accord en question permettent d’envisager un contrôle de la validité de l’acte du droit de l’Union au regard des dispositions dudit accord, encore faut‑il que les dispositions de cet accord invoquées aux fins de l’examen de la validité de l’acte du droit de l’Union apparaissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et suffisamment précises, donc dotées d’effet direct ( 67
).

59. La condition d’effet direct est remplie lorsque la disposition invoquée comporte une obligation claire et précise qui n’est subordonnée, dans son exécution ou dans ses effets, à l’intervention d’aucun acte ultérieur ( 68 ).

60. Toutefois, en l’état actuel du droit de l’Union, il apparaît difficile de prétendre qu’il n’existe qu’une seule approche uniforme en matière de contrôle de la légalité du droit dérivé au regard d’instruments de droit conventionnel. En effet, la jurisprudence y relative ne constitue plus un bloc consolidé, mais elle semble marquée, au contraire, par une certaine diversité qui confine, parfois, à l’incohérence.

61. Tout d’abord, en ce qui concerne la reconnaissance même de l’effet direct de dispositions d’un accord international, le juge de l’Union fait manifestement preuve de souplesse au sujet de l’invocabilité directe des accords avec des États tiers, notamment des accords d’association ( 69 ). Cette approche permet aux particuliers de se prévaloir en justice des dispositions en cause, dès lors qu’une convention internationale est susceptible d’affecter directement leur situation ( 70 ). En revanche,
ainsi que je l’ai déjà relevé, dans le domaine particulier des accords OMC et des accords ADPIC et OTC, caractérisés par leur nature et leur économie spécifique, les dispositions desdits accords ne figurent pas parmi les normes au regard desquelles la Cour contrôle la légalité des actes des institutions communautaires ( 71 ).

62. L’approche «classique» susvisée doit être confrontée à la réalité qui révèle une diversité accrue entre les accords dont l’Union fait partie, ce qui implique une diversité des effets que ces accords produisent en droit de l’Union. En effet, il est constant qu’un accord de coopération commerciale ne saurait produire, dans l’ordre interne, des effets comparables à une convention multilatérale qui crée un régime de portée générale comportant des objectifs «politiques» ambitieux, ce qui est souvent
le cas notamment en matière de protection de l’environnement et de droit des transports ( 72 ). En outre, les conventions d’association et de partenariat présentent une importante spécificité lorsqu’elles établissent le rapprochement entre les principes des libertés fondamentales ( 73 ).

63. En ce qui concerne le contrôle de légalité, s’il est vrai que, dans certains cas, la Cour procède à un contrôle au regard de dispositions de droit conventionnel, sans toutefois en donner une motivation approfondie à l’instar de l’arrêt rendu dans l’affaire IATA et ELFAA ( 74 ), dans d’autres cas, la Cour adopte une position plus stricte, à l’instar de l’approche retenue dans l’affaire Intertanko e.a.

64. Dans les conclusions présentées dans cette dernière affaire, l’avocat général Kokott a considéré que la convention sur le droit de la mer pouvait représenter un «critère de contrôle» en vue d’apprécier la légalité d’actes de droit dérivé ( 75 ). La Cour n’a toutefois pas suivi le raisonnement proposé par son avocat général en s’appuyant sur l’absence de règles destinées à s’appliquer directement et immédiatement aux particuliers et à conférer à ces derniers des droits ou des libertés
susceptibles d’être invoqués à l’encontre des États ( 76 ).

65. La solution ainsi retenue dans l’affaire Intertanko e.a. a suscité des interrogations, car elle s’inscrit en rupture par rapport à un arrêt précédent, rendu dans l’affaire Poulsen et Diva Navigation ( 77 ), dans lequel la Cour avait reconnu aux particuliers le droit de se référer à la même convention sur le droit de la mer en tant qu’expression du droit international coutumier ( 78 ).

66. La Cour a apporté quelques précisions relatives à l’invocabilité du droit international coutumier dans l’arrêt ATA e.a. (EU:C:2011:864) dans lequel elle a jugé que «les principes du droit international coutumier […] peuvent être invoqués par un justiciable aux fins de l’examen par la Cour de la validité d’un acte de l’Union dans la mesure où, d’une part, ces principes sont susceptibles de mettre en cause la compétence de l’Union pour adopter ledit acte[ ( 79 )] et, d’autre part, l’acte en cause
est susceptible d’affecter des droits que le justiciable tire du droit de l’Union ou de créer dans son chef des obligations au regard de ce droit» ( 80 ).

67. Enfin, l’affaire qui se départit le plus nettement de l’approche «classique» susvisée est, à l’évidence, celle qui a donné lieu à l’arrêt dit «Biotech» (EU:C:2001:523) ( 81 ). En effet, la Cour a considéré que le fait qu’un accord international contienne des dispositions dépourvues d’effet direct, en ce sens qu’elles ne créeraient pas de droits que les particuliers pourraient invoquer directement en justice, ne constitue pas un obstacle au contrôle par le juge du respect des obligations qui
s’imposent à la Communauté en tant que partie à cet accord ( 82 ).

68. Or, une telle prise de position me semble déterminante pour les présentes affaires.

69. De surcroît, force est de constater la tension existant entre le refus de reconnaissance de l’invocabilité directe de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, justifié par la nécessité d’adopter des mesures de mise en œuvre, et la volonté d’assurer une protection juridictionnelle effective conforme aux exigences de la convention, telle qu’exprimée dans l’arrêt Lesoochranárske zoskupenie ( 83 ). La Cour a ainsi souligné que les stipulations de ladite convention, «bien que rédigées en
termes généraux, ont pour objectif de permettre d’assurer une protection effective de l’environnement». Elle a donc enjoint aux juridictions nationales de donner au droit national une «interprétation qui, dans toute la mesure du possible, soit conforme aux objectifs fixés à l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus» ( 84 ). Or, il est incontestable qu’en tant qu’institution la Cour est également tenue de se conformer à la convention d’Aarhus ( 85 ).

2. Sur l’adaptation des conditions requises aux fins de l’invocabilité directe

70. Je rappelle que, conformément à une jurisprudence constante ( 86 ), la Communauté est une communauté de droit en ce que ni ses États membres ni ses institutions n’échappent au contrôle de la conformité de leurs actes avec la charte constitutionnelle de base qui est le traité. La notion de communauté de droit revêt une double dimension: tout d’abord, une dimension normative impliquant une obligation de conformité au traité, et ensuite une dimension juridictionnelle qui suppose une protection
juridictionnelle des particuliers contre les actes de droit dérivé illégaux ( 87 ).

71. En outre, il apparaît de plus en plus souvent difficile, pour la Cour, d’assurer le respect des obligations internationales incombant à l’Union tout en préservant l’autonomie du droit de l’Union, tout particulièrement en droit international de l’environnement ( 88 ). Le droit de l’environnement est, en effet, l’un des exemples de multiplication des lieux d’élaboration et d’application du droit, ce qui conduit nécessairement à des phénomènes d’interaction, d’internationalisation, voire de
mondialisation dudit droit ( 89 ). Ce contexte juridique stratifié requiert, à mon sens, une approche nuancée.

72. Il est vrai que l’effet direct représente un principe qui autorise un juge national à appliquer une règle de droit international en tant que fondement autonome de sa décision lorsque ladite règle n’est pas transposée ou l’est de manière inadéquate en droit national ( 90 ). En droit de l’Union, la théorie de l’effet direct, telle qu’appliquée aux rapports entre le droit de l’Union et l’ordre juridique des États membres, est limitée à des normes répondant à l’exigence d’exhaustivité ( 91 ). Il est
constant que la notion d’effet direct est donc propre à la position d’un particulier dans le cadre juridique national qui souhaite se prévaloir du droit de l’Union, en ce compris les conventions internationales liant l’Union. Toutefois, au stade actuel du développement du droit de l’Union, la théorie de l’effet direct, qui a pu être qualifiée de «maladie d’enfant» du droit de l’Union ( 92 ), n’a plus vocation à protéger son autonomie sur le plan international.

73. De surcroît, au regard de la jurisprudence ci‑dessus présentée, la théorie de l’effet direct ne représente pas un principe universel et obligatoire dans le cadre du contrôle par le juge de l’Union des actes des institutions de l’Union.

74. Or, dans le cadre des présents pourvois, il importe d’observer que l’application automatique et sans réserve de la jurisprudence issue de l’arrêt Intertanko e.a. en combinaison avec l’arrêt Lesoochranárske zoskupenie conduirait la Cour à exclure tout contrôle judiciaire du respect des engagements de l’Union européenne découlant de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus tant par le juge national que par le juge de l’Union. Par conséquent, la notion de protection juridictionnelle
dans l’ordre juridique de l’Union, prise au sens large comme visant non seulement les voies de recours directs, mais également le mécanisme du renvoi préjudiciel, risque d’en être substantiellement affectée.

75. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, il apparaît donc légitime de s’interroger sur le point de savoir comment faire évoluer la condition d’effet direct aux fins de l’invocabilité directe des dispositions conventionnelles.

76. À la lumière du raisonnement suivi par la Cour dans l’affaire Air Transport Association of America e.a. (EU:C:2011:864), l’invocabilité directe d’un acte de droit international suppose, tout d’abord, de l’examiner sous le prisme de sa nature, de son économie et de ses objectifs, sous réserve qu’il ait été établi que l’Union est bien liée par l’acte en cause. En ce qui concerne, dans un deuxième temps, une disposition conventionnelle particulière susceptible de servir de critère de référence au
contrôle de la légalité du droit dérivé de l’Union, il convient de s’attacher à ses caractéristiques.

77. Je suis d’avis qu’il convient de distinguer clairement, sur le plan conceptuel, entre le cas de figure dans lequel un particulier souhaite invoquer directement un acte de droit international en se prévalant d’un droit qui y serait établi à son bénéfice et celui du contrôle de la marge d’appréciation des institutions de l’Union lors du processus d’alignement ( 93 ) d’un acte de droit de l’Union avec un acte de droit international. Habituellement, c’est la vocation des acteurs privilégiés
d’initier un tel contrôle devant les juridictions de l’Union, mais dans le cadre de la convention d’Aarhus cette possibilité a été ouverte également aux organisations de protection de l’environnement remplissant les critères prévus à cet égard.

78. Afin d’éviter la création d’un espace soustrait à tout contrôle judiciaire, il me semble légitime de soutenir que, dans le cadre du contrôle de la conformité d’un acte de droit de l’Union avec le droit international, l’absence d’effet direct d’une disposition, entendue comme une norme exhaustive et une source de droits, ne devrait pas faire obstacle à un examen de la légalité pour autant que les caractéristiques de la convention en cause ne s’y opposent pas.

79. En revanche, la disposition de droit international susceptible de servir de critère de référence aux fins du contrôle de légalité doit nécessairement comporter des éléments suffisamment clairs, intelligibles et précis. Pour autant, il importe de souligner qu’une telle disposition peut revêtir une nature mixte. S’il est possible d’isoler dans son contenu des parties répondant à ladite exigence, il doit pouvoir être possible de procéder audit contrôle de légalité.

80. En effet, une disposition du droit international, tout en laissant aux parties contractantes une marge de manœuvre importante à certains égards, peut comporter, en parallèle, des règles précises et inconditionnelles ( 94 ). Je note que de telles dispositions mixtes sont fréquentes en droit de l’environnement.

81. L’adaptation des conditions d’invocabilité que je préconise ne contredit pas, au demeurant, la position de la Cour selon laquelle, dans l’hypothèse de normes dépourvues d’effet direct, telles que les accords OMC, les requérants privilégiés ne peuvent pas non plus demander un contrôle de la légalité en vertu de l’article 263 TFUE. Au contraire, je considère que l’approche retenue dans l’arrêt Allemagne/Conseil ( 95 ), puis confirmée dans l’arrêt Portugal/Conseil, EU:C:1999:574, reflète justement
l’idée selon laquelle ce sont avant tout les particularités de l’accord international en cause qui justifient l’invocabilité directe par un particulier ainsi que l’exercice d’un contrôle de légalité par la Cour ou, au contraire, s’y opposent ( 96 ).

82. Par ailleurs, la nécessité d’établir, dans la jurisprudence de la Cour, une différenciation entre la problématique de l’invocabilité directe d’une disposition conventionnelle et la possibilité de contrôler la validité d’une norme du droit dérivé au regard du droit international a été soulevée dans de nombreuses analyses doctrinales ( 97 ), ainsi que relevée par des avocats généraux ( 98 ). Il a été ainsi soutenu, à juste titre, que la théorie de l’invocabilité directe devrait être reconstruite
de manière autonome ( 99 ).

83. En particulier, certains auteurs ont considéré que la question de savoir si un accord international confère des droits aux particuliers était sans pertinence aux fins d’apprécier si une disposition en cause figure parmi les règles auxquelles la Cour se réfère aux fins du contrôle de la légalité des actes du droit de l’Union ( 100 ).

84. Il convient donc de vérifier si l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus remplit les conditions ainsi requises aux fins de son invocabilité.

B – L’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus comme norme de référence aux fins du contrôle de légalité

85. Tout d’abord, il convient de rappeler que la convention d’Aarhus, considérée comme un «pilier de la démocratie environnementale» ( 101 ), a été signée par la Communauté, puis approuvée par la décision 2005/370. En tant qu’accord mixte conclu à la fois par l’Union et par ses États membres, la convention fait désormais partie intégrante de l’ordre juridique de l’Union ( 102 ). L’Union est donc liée par ladite convention, tout comme le sont toutes ses institutions législatives, exécutives et
judiciaires.

86. La Cour a déjà confirmé sa compétence pour interpréter les stipulations de la convention d’Aarhus ( 103 ) et a prononcé à cet égard un nombre important d’arrêts dans le cadre de questions préjudicielles en interprétation ainsi que de procédures en manquement ( 104 ).

87. Tout en octroyant aux citoyens trois droits procéduraux en matière d’environnement ( 105 ), la convention d’Aarhus énonce également des exigences. Ainsi, elle prévoit qu’il incombe à chaque individu «de protéger et d’améliorer l’environnement dans l’intérêt des générations présentes et futures». En ce qu’elle reconnaît des droits se rapportant aux objectifs de protection de l’environnement, la convention d’Aarhus a un caractère d’instrument procédural. En effet, la protection de l’environnement
n’est possible que si les intéressés disposent de véritables instruments d’action dans le domaine très vaste couvert par la convention. La convention d’Aarhus est donc une source de «droits de participation civique», sous forme de codification de droits procéduraux en matière d’environnement.

88. À la différence, par exemple, de l’accord OMC, la convention d’Aarhus n’est donc pas fondée sur le principe de la réciprocité et des avantages mutuels des parties contractantes ( 106 ).

89. Au contraire, la convention d’Aarhus a pour objet de permettre aux autorités publiques et aux citoyens d’assumer leur responsabilité individuelle et collective afin de protéger et d’améliorer l’environnement pour le bien‑être et la santé des générations présentes et à venir ( 107 ). Elle ne constitue pas un exemple technique d’accord dans le domaine de l’environnement, mais bien l’expression d’un droit de l’homme à l’environnement dans sa dimension la plus solennelle. Ainsi, il ne fait guère de
doute que, parmi les dispositions qu’elle comporte, certaines ne seront pas d’applicabilité immédiate («self‑executing»). Cela explique l’importance des dispositions nationales adoptées afin d’assurer l’effectivité de ces prescriptions internationales en droit interne et, en conséquence, la nécessité d’un contrôle de la légalité de telles normes.

90. En ce qui concerne, plus particulièrement, l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, ladite disposition établit une possibilité de contestation de la violation de dispositions du droit national de l’environnement.

91. Certes, la Cour a jugé, dans l’arrêt Lesoochranárske zoskupenie, que les stipulations dudit article «ne contiennent aucune obligation claire et précise de nature à régir directement la situation juridique de particuliers» ( 108 ). Sous cet angle, cette disposition est évidemment subordonnée à l’intervention d’un acte ultérieur et les particuliers ne peuvent pas s’en prévaloir. En effet, l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus donne aux parties contractantes la possibilité de définir
les critères en vertu desquels les membres du public peuvent se voir octroyer le droit d’ester en justice.

92. L’article 9, paragraphe 3, me semble toutefois constituer une «disposition mixte», dès lors qu’il comporte également une obligation de résultat clairement identifiable pour les parties contractantes.

93. La Cour a elle‑même relevé que, «bien que rédigées en termes généraux, les stipulations de l’article 9, paragraphe 3, ont pour objectif de permettre d’assurer la protection effective de l’environnement» ( 109 ). Cette protection se traduit, à l’article 9 de la convention d’Aarhus, par l’instauration de modalités procédurales applicables aux recours destinés à assurer la sauvegarde des «droits de participation civique» découlant de la convention même. De surcroît, l’article 9, paragraphe 3, de la
convention d’Aarhus doit être lu en combinaison avec l’article 1er de ladite convention, lequel met à la charge de chaque partie contractante une obligation de garantir les droits d’accès à la justice en matière d’environnement.

94. En tout état de cause, le caractère mixte de la règle prévue à l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus se traduit, sur le plan national, par la marge d’appréciation accordée au législateur en vue de déterminer certains critères auxquels doit répondre une organisation en vue de contester une violation du droit de l’environnement. Pour autant, il me semble incontestable que l’obligation de garantir l’accès à la justice est suffisamment claire pour faire obstacle à une norme qui aurait
pour objet ou pour effet d’écarter certaines catégories de décisions non législatives des autorités publiques du champ du contrôle devant être exercé par les juridictions nationales.

95. Selon moi, au vu de son objectif et de son économie, l’article 9, paragraphe 3, constitue donc, pour partie, une norme suffisamment claire afin de pouvoir servir de fondement au contrôle de légalité en ce qui concerne l’accès à la justice des organisations dotées de la capacité d’agir en vertu de la législation nationale, voire de celle de l’Union. Par conséquent, l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus peut servir de critère de référence aux fins de l’appréciation de la légalité
des actes des institutions de l’Union.

VI – Analyse subsidiaire au titre du contrôle de légalité

A – Remarques liminaires

96. Tant dans l’hypothèse d’un renvoi de l’affaire devant le Tribunal que dans celle où la Cour s’estimerait en mesure de statuer au fond, il me semble indispensable de présenter, à titre subsidiaire, quelques observations relatives à l’examen de la légalité du règlement d’Aarhus au regard de la convention d’Aarhus.

97. À cet égard, il y a lieu de préciser que la présente série d’affaires ne concerne pas les conditions générales d’accès à la justice au sens de l’article 263 TFUE dans le domaine du droit de l’environnement, mais vise à analyser si le législateur de l’Union a correctement complété les voies de recours au regard des exigences de la convention d’Aarhus, en restreignant la notion d’actes, et, plus précisément, si, dans ce contexte, il a pu écarter l’accès à la justice requis à l’égard des actes non
législatifs d’application générale adoptés par les institutions de l’Union. En effet, ainsi qu’il ressort des travaux préparatoires du règlement d’Aarhus, en signant la convention d’Aarhus, la Communauté européenne s’est engagée à aligner sa législation sur les exigences de la convention en matière d’accès à la justice.

B – Arguments développés par la Commission dans le cadre du second moyen

98. Dans son pourvoi, la Commission invoque un second moyen tiré de ce que le Tribunal aurait commis une erreur de droit en interprétant l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus. Elle fait valoir que cette disposition offrirait une alternative aux parties contractantes en ce qu’elle leur impose d’assurer des procédures de recours administratives ou judiciaires de révision. Ainsi, le Tribunal aurait à tout le moins dû vérifier si les parties requérantes étaient en mesure de recourir à une
procédure judiciaire à l’encontre de la mesure de portée individuelle en question, que ce soit aux Pays‑Bas ou dans le cadre de l’Union, avant de constater l’incompatibilité de l’article 10, paragraphe 1, du règlement d’Aarhus avec l’article 9, paragraphe 3, de la convention. La Commission rappelle que, conformément à l’article 33 de la directive 2008/50, le Royaume des Pays‑Bas a transposé la dérogation temporaire aux exigences de ladite directive par le biais d’un arrêté du 19 août 2009 ( 110
). Selon la Commission, les organisations de protection de l’environnement ont donc eu la possibilité de saisir la juridiction nationale contre les mesures de transposition. L’examen de la validité de la décision de dérogation aurait pu faire l’objet d’une question préjudicielle.

99. En tout état de cause, selon la Commission, il n’apparaît pas que l’article 10, paragraphe 1, du règlement d’Aarhus constitue la seule disposition donnant exécution à l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus: selon elle, le fait que cet article limite la procédure de révision aux actes de portée individuelle prouve que le législateur de l’Union a considéré que, pour les actes de portée générale, les moyens juridiques sont suffisants pour respecter les exigences de l’article 9,
paragraphe 3, de la convention d’Aarhus.

C – Sur l’existence d’un contrôle des violations du droit de l’environnement dans le cadre de la convention d’Aarhus

100. Conformément à une jurisprudence constante, un accord international doit être interprété en fonction des termes dans lesquels il est rédigé ainsi qu’à la lumière de ses objectifs. Les articles 31 des conventions de Vienne, du 23 mai 1969, sur le droit des traités, et, du 21 mars 1986, sur le droit des traités entre États et organisations internationales ou entre organisations internationales, qui sont l’expression, en la matière, du droit international général coutumier, précisent, à cet égard,
qu’un traité doit être interprété de bonne foi, suivant le sens ordinaire à attribuer à ses termes dans leur contexte, et à la lumière de son objet et de son but ( 111 ).

101. Il résulte du préambule de la convention d’Aarhus que, eu égard à la nécessité de protéger, de préserver et d’améliorer l’état de l’environnement, les parties contractantes ont reconnu l’importance, pour les citoyens, d’avoir accès à la justice en matière d’environnement, étant entendu qu’ils peuvent avoir besoin d’une assistance pour exercer leurs droits. Il résulte également de ce même préambule que les parties ont partagé un souhait pour que le public – y compris les organisations – ait
accès à des mécanismes judiciaires efficaces afin que ses intérêts légitimes soient protégés ( 112 ). C’est donc au regard de ces objectifs que doit être appréciée la portée que les auteurs de la convention d’Aarhus ont voulu conférer aux dispositions de l’article 9, paragraphe 3, de ladite convention.

102. L’accès à la justice est prévu à l’article 9 pour les trois hypothèses déclinées au paragraphe 1 (recours en relation avec l’accès à l’information), au paragraphe 2 (recours contre toute décision relative à des activités particulières touchant à l’environnement) et au paragraphe 3 (accès à des procédures administratives ou judiciaires afin de contester les actes ou omissions des particuliers ou des autorités publiques ( 113 ) constitutives de violations du droit de l’environnement). Sur un plan
plus général, je souhaite rappeler le rôle particulier joué par l’article 9 de la convention d’Aarhus, en ce qu’il constitue, d’une part, une garantie des droits à l’information et de participation au processus décisionnel conférés par la convention et le droit national et, d’autre part, une voie de protection objective d’un ordre juridique ( 114 ).

103. En ce qui concerne le champ d’application personnel de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, il convient d’observer que ladite disposition permet d’établir en droit interne les critères spécifiques auxquels les membres du public habilités à contester les violations du droit de l’environnement doivent répondre. Il est donc clair que c’est sous l’angle de la qualification desdits sujets que les parties à la convention peuvent exercer le pouvoir d’appréciation qui leur est reconnu.
Par conséquent, il apparaît justifié de soutenir que l’article 9, paragraphe 3, n’entend pas instituer une actio popularis en droit de l’environnement ( 115 ).

104. En revanche, en ce qui concerne le champ d’application matériel de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, je souhaite souligner que ladite disposition doit être interprétée à la lumière des objectifs précités visant à garantir des mécanismes efficaces afin de protéger les intérêts du public ( 116 ).

105. De surcroît, il convient de réaliser une lecture conjointe de l’article 9, paragraphe 3, et des exigences applicables conformément aux paragraphes 4 et 5 de la même disposition. En effet, conformément auxdits paragraphes, les procédures visées doivent offrir des recours suffisants et effectifs; elles doivent être objectives, équitables et rapides, sans que leur coût soit prohibitif. L’exigence de publicité ressort clairement du paragraphe 5 de l’article 9 de la convention.

106. Par conséquent, les parties contractantes sont tenues d’adopter un mécanisme surtout efficace et non pas uniquement d’effectuer un choix entre différents types de procédures. Ainsi, il y a lieu de considérer que les signataires de la convention jouissent d’une marge de manœuvre en ce qui concerne les procédures à instaurer, mais que l’obligation d’instaurer des voies de recours administratives ou judiciaires doit être exécutée conformément aux exigences de la convention afin de garantir la
possibilité de contester des violations du droit de l’environnement conformément à son article 9, paragraphe 3. Il s’ensuit que la mise en œuvre de ladite obligation doit être mesurée à l’aune de l’exigence d’accès effectif à la justice. Cette interprétation est également corroborée par l’intitulé de l’article 9 de la convention d’Aarhus – «accès à la justice».

107. Cela m’amène à la notion clé dans le cadre de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, à savoir la notion d’acte susceptible d’être soumis à un contrôle.

108. Il est vrai que ce terme n’est pas défini dans la convention d’Aarhus. Une interprétation littérale de l’article 9, paragraphe 3, de la convention ne permet pas non plus de considérer que ladite notion relèverait du pouvoir discrétionnaire reconnu aux parties contractantes. De surcroît, cette même disposition ne requiert même pas le caractère juridiquement contraignant des actes visés. La doctrine s’accorde donc pour admettre que ladite disposition couvre toute hypothèse de violation de
dispositions du droit national ( 117 ) de l’environnement ( 118 ).

109. La portée à première vue extrêmement large de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, a fortiori par rapport à celle des paragraphes 1 et 2 du même article, peut toutefois être tempérée. En effet, le champ d’application matériel de l’article 9, paragraphe 3, de la convention est délimité par l’article 2, paragraphe 2, deuxième alinéa de la convention dont il ressort que cette dernière ne s’applique pas aux actes de nature législative. Conformément à ladite disposition, la notion
d’«autorité publique» dont les actes allant à l’encontre du droit de l’environnement peuvent faire l’objet des contestations exclut les institutions agissant dans l’exercice de pouvoirs judiciaires et législatifs.

110. Il apparaît donc clairement que les parties signataires de la convention d’Aarhus ont entendu inclure dans son champ d’application exclusivement des mesures non législatives.

111. En d’autres termes, à l’exception des actes relevant de la législation, tous les autres types d’actes adoptés par des particuliers et des autorités publiques, qu’il s’agisse d’actes de portée générale ou de portée individuelle, relèvent du champ de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus.

112. D’autres éléments viennent confirmer cette analyse.

113. Tout d’abord, il est essentiel de mentionner que l’interprétation par la Cour de la notion d’acte législatif dans le contexte de la mise en œuvre de la convention d’Aarhus tend à préserver l’effet utile de l’article 9 de ladite convention ( 119 ). La Cour interprète les différentes dispositions du droit de l’Union à la lumière et compte tenu des objectifs de la convention d’Aarhus par rapport à laquelle la législation de l’Union doit être «correctement alignée» ( 120 ). Cette approche est
fondamentale pour l’interprétation du règlement d’Aarhus au regard de la convention.

114. Il convient également de faire référence à la position adoptée par le Comité d’examen du respect des dispositions de la convention d’Aarhus, selon lequel les parties contractantes n’ont pas la possibilité d’introduire ou de maintenir des critères à ce point stricts qu’ils ont pour effet d’empêcher des organisations non gouvernementales de contester des actes ou des omissions qui violent des dispositions nationales relatives à la protection de l’environnement ( 121 ). Cela rejoint clairement la
position adoptée par la Cour dans sa jurisprudence précitée ( 122 ). Par ailleurs, le Comité a exprimé des doutes quant au respect par l’Union des conditions énoncées à l’article 9, paragraphe 3, de la convention ( 123 ).

115. Enfin, bien que le guide d’application de la convention d’Aarhus n’ait pas, selon la jurisprudence, de force contraignante ( 124 ), ce guide peut néanmoins servir de point de référence dans le cadre de l’interprétation des dispositions pertinentes de la convention ( 125 ). Dans un arrêt récent rendu dans l’affaire Fish Legal et Shirley ( 126 ), la Cour s’est même référée de manière systématique audit guide en interprétant la directive 2003/4/CE du Parlement européen et du Conseil, du 28 janvier
2003, concernant l’accès du public à l’information en matière d’environnement et abrogeant la directive 90/313/CEE du Conseil ( 127 ), au regard de la convention d’Aarhus Or, le guide explique et recommande une interprétation large des conditions d’accès à la justice conformément à la lettre et à l’esprit de la convention d’Aarhus. En effet, en ce qui concerne les actes pouvant être soumis à un contrôle, il ressort du guide que les membres du public ont le droit de contester les violations du
droit national de l’environnement même «indépendamment du fait qu’ils présentent un lien avec l’information du public et le droit de la participation tel que garanti par la convention» ( 128 ). Il en ressort également que le contrôle prévu à l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus ( 129 ) repose sur l’idée de «citizen enforcement» (application de la loi par les citoyens) au sens direct et indirect ( 130 ).

D – Sur l’étendue du contrôle des violations du droit de l’environnement dans le règlement d’Aarhus

116. Aux fins de l’interprétation d’une disposition de droit de l’Union, il y a lieu de tenir compte non seulement des termes de celle‑ci et des objectifs qu’elle poursuit, mais également de son contexte ainsi que de l’ensemble des dispositions du droit de l’Union ( 131 ).

117. Tout d’abord, en vue d’apprécier l’exécution des obligations particulières découlant de la convention d’Aarhus en droit de l’Union, il convient de conserver à l’esprit que les effets de la convention, qui est une convention mixte, ont été précisés par le biais de la déclaration de la Communauté européenne annexée à la décision 2005/370. Il en ressort clairement que, à l’époque de la signature de la convention, les instruments juridiques en vigueur ne suffisaient pas à assurer l’intégralité de
l’exécution des obligations découlant de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, puisqu’ils concernaient des procédures de contestation contre les actes ou omissions de particuliers ou d’autorités publiques autres que les institutions visées à l’article 2, paragraphe 2, deuxième alinéa, de la convention. Par conséquent, les États membres restaient responsables de l’exécution desdites obligations jusqu’à l’adoption par la Communauté de dispositions assurant l’exécution de ces mêmes
obligations.

118. Or, ainsi que je l’ai déjà rappelé, il ressort des travaux législatifs précédant l’adoption du règlement d’Aarhus que ledit règlement avait pour objet d’aligner le droit communautaire sur les dispositions de la convention ( 132 ). Certes, l’application de la convention impliquait, au niveau de l’Union, l’adoption d’autres actes de droit dérivé ( 133 ). Toutefois, tout en contribuant à la poursuite des objectifs de la politique de protection de l’environnement, le règlement d’Aarhus s’est
attaché, à titre principal, à compléter des aspects particuliers relatifs à l’accès à la justice au sein d’un système communautaire préétabli par le biais des articles 9 à 13 du règlement d’Aarhus ( 134 ). Cela apparaît d’autant plus important que le projet de directive sur l’accès à la justice n’a toujours pas abouti en droit de l’Union ( 135 ).

119. En conséquence, le contrôle de la légalité du règlement d’Aarhus au regard de la convention éponyme s’impose d’autant plus en l’état actuel du droit de l’Union que l’Union est tenue de s’acquitter pleinement de ses engagements par la mise en œuvre des obligations découlant de la convention d’Aarhus.

120. Dans ce contexte, je propose de rejeter l’argumentation de la Commission tirée de la nécessité d’un examen global du système de protection juridictionnelle effective en droit de l’Union. Il est constant que la protection juridictionnelle des particuliers, dans le système contentieux de l’Union, est assurée non seulement par les différentes voies de recours directs, mais également grâce au mécanisme du renvoi préjudiciel. Toutefois, le mécanisme du renvoi préjudiciel ne saurait remédier et
combler ainsi les lacunes découlant d’une approche restrictive retenue par le législateur de l’Union dans la mise en œuvre d’une disposition d’une convention à laquelle l’Union est partie.

121. À la différence de la Commission, je considère que l’établissement de voies de recours principalement au niveau national contre les mesures «allant à l’encontre du droit de l’environnement» équivaudrait à un nouveau transfert vers les États membres de la responsabilité incombant à l’Union. Or, l’Union ne saurait exiger des États membres qu’ils assurent un niveau donné de contrôle afin de combler les lacunes du droit dérivé. De fait, par l’adoption du règlement d’Aarhus, l’Union demeure
entièrement responsable de l’exécution des obligations lui incombant en vertu de la convention d’Aarhus.

122. En revanche, j’admets volontiers que l’appréciation de la conformité de la mise en œuvre des obligations découlant de la convention d’Aarhus devrait être différente si cette mise en œuvre passait par des directives, dans la mesure où elle est assurée à deux stades, à savoir l’adoption desdites directives et leur transposition dans le droit des États membres ( 136 ).

123. Ensuite, s’agissant de la portée de l’accès à la justice dans le règlement d’Aarhus, il convient de constater que l’article 10, paragraphe 1, du règlement d’Aarhus traduit cet objectif en conférant aux entités qualifiées, à savoir des associations représentatives du public, la possibilité d’introduire une demande de réexamen interne d’un acte qui contrevient au droit de l’environnement. Il ressort clairement des travaux préparatoires que le réexamen a été introduit afin de ne pas empiéter sur
l’exercice du droit d’accès à la justice au titre du traité en vertu duquel une personne peut former un recours devant la Cour de justice contre des décisions qui la concernent directement et individuellement ( 137 ).

124. Sous l’angle du champ d’application personnel, en établissant une procédure de réexamen, l’article 10 du règlement d’Aarhus a facilité l’accès à la justice des organisations non gouvernementales, dès lors que ces dernières n’ont pas à faire valoir un intérêt suffisant ni à alléguer une atteinte à un droit pour pouvoir exercer ce droit conformément à l’article 263 TFUE. Le règlement revient donc à reconnaître à ces groupements la qualité de destinataires ( 138 ).

125. En revanche, sous l’angle du champ d’application matériel, le champ d’application des contestations éventuelles par le biais de la procédure dite de «réexamen» est défini à la lumière de l’article 10, lu en combinaison avec l’article 2, paragraphe 1, sous g) du règlement d’Aarhus comme s’appliquant aux actes de portée individuelle au titre du droit de l’environnement arrêtés par une institution ou un organe communautaire et ayant un effet juridiquement contraignant et extérieur. De surcroît, la
mesure susceptible de faire l’objet d’une contestation dans le cadre d’un tel «réexamen» est définie comme excluant, conformément à l’article 2, paragraphe 2, du règlement d’Aarhus, les actes administratifs adoptés par l’institution ou l’organe de l’Union «en sa qualité d’organisme de contrôle administratif».

126. J’observe, à cet égard, que, dans sa rédaction initiale, la proposition de règlement définissait la notion d’acte comme s’entendant de «toute mesure administrative arrêtée par une institution ou un organe communautaire au titre du droit de l’environnement et ayant un effet contraignant et extérieur» ( 139 ). La notion d’actes «administratifs de portée individuelle» est apparue seulement au stade de la position commune arrêtée par le Conseil ( 140 ) et a été reprise par le Parlement en deuxième
lecture ( 141 ) sans qu’aucune motivation ne soit fournie.

127. En l’absence de toute définition de la notion d’acte administratif dans d’autres sources du droit de l’Union, il s’agit d’une définition ad hoc, dans le règlement d’Aarhus dont la portée reste difficile à délimiter ( 142 ). Toutefois, il me paraît clair que la volonté du législateur a été de restreindre la portée de la procédure de réexamen.

128. Certes, l’acte est défini à l’article 2, sous g), du règlement d’Aarhus comme s’entendant d’une mesure adoptée «au titre du droit de l’environnement». Cette dernière condition est donc envisagée de manière large en rapport avec les objectifs découlant de l’article 191 TFUE ( 143 ). Il est vrai également que le caractère général ( 144 ) ou individuel d’une décision s’apprécie, selon la jurisprudence, au vu de son contenu en vue de constater si ses dispositions sont de nature à affecter d’une
façon individuelle et directe la situation des intéressés ( 145 ). Dans le cadre du règlement d’Aarhus, cette distinction dépend fondamentalement de l’interprétation de la notion de «législation» au sens de la convention d’Aarhus, telle que reprise par le règlement d’Aarhus, dont l’interprétation fait l’objet de mes conclusions parallèles dans les affaires Conseil et Commission/Stichting Natuur en Milieu et Pesticide Action Network Europe (C‑404/12 P et C‑405/12 P) ( 146 ).

129. Il est cependant constant que la procédure de réexamen ( 147 ). ne s’applique qu’à des décisions individuelles qui comportent des effets juridiques de nature à affecter les intérêts de leurs destinataires. Au juste, l’ampleur très limitée des contestations portant sur des violations du droit de l’environnement au titre de l’article 10 du règlement d’Aarhus a été confirmée à l’audience par la Commission, qui est parvenue à fournir, non sans difficulté, un seul exemple d’application concrète de
la procédure de réexamen, à savoir l’autorisation de la mise sur le marché d’un OGM. Force est de constater, au demeurant, que le domaine des OGM ainsi que la mise sur le marché des produits chimiques conformément au règlement REACH ( 148 ) semblent être le principal domaine auquel la procédure de réexamen s’applique effectivement ( 149 ). La pratique de la Commission confirme ainsi l’interprétation restrictive du règlement d’Aarhus ( 150 ).

130. Enfin, il convient de relever que, selon le règlement d’Aarhus, les recours devant la Cour conformément à l’article 12 dudit règlement portent non pas sur l’acte administratif litigieux, mais sur la réponse adressée par l’institution ou l’organe saisi de la demande de réexamen interne. C’est donc uniquement par le biais de l’exception d’illégalité, à l’instar de celle à l’origine des présentes affaires, qu’une organisation non gouvernementale pourrait demander un examen au fond.

131. Par conséquent, force est de constater que l’article 10 du règlement d’Aarhus ne constitue pas une mise en œuvre complète des obligations découlant de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus ( 151 ).

132. Pour les motifs précédemment exposés au sujet de l’interprétation de l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus, ce constat n’est pas infirmé par l’étendue de la marge de manœuvre conférée aux signataires de la convention d’Aarhus. En effet, tout en reconnaissant une telle marge dans la mise en œuvre de l’article 9 de la convention d’Aarhus (et par exemple de l’article 15 bis de la directive 96/61/CE ( 152 )) ( 153 ), la Cour a défendu une approche très protectrice de l’effet utile et
des objectifs de la convention au sujet des obligations de mise en œuvre incombant aux États membres ( 154 ). Par conséquent, il ne me paraît pas envisageable d’adopter une approche différente à l’égard de l’Union elle‑même ( 155 ).

133. Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, je considère que c’est à bon droit que le Tribunal est parvenu, dans l’arrêt attaqué, à la conclusion selon laquelle l’exception d’illégalité dirigée contre l’article 10 du règlement d’Aarhus en combinaison avec l’article 2, paragraphe 1, sous g), dudit règlement doit être accueillie. Si la Cour décidait d’examiner la présente problématique, je propose donc de rejeter le second moyen de la Commission.

E – Réflexions complémentaires

134. Dans l’hypothèse d’une absence d’effet direct d’un accord international entendu comme source des droits pour les particuliers, il peut paraître utile d’évoquer le principe d’interprétation conforme en tant qu’instrument permettant de donner effet à un tel accord.

135. En effet, l’interprétation du droit dérivé en conformité avec les accords internationaux liant la Communauté s’impose au juge de l’Union lui‑même ( 156 ). Il est de jurisprudence constante que les dispositions du droit de l’Union doivent être interprétées, dans la mesure du possible, à la lumière du texte et de la finalité des accords internationaux dont l’Union fait partie ( 157 ). Une telle «lecture conciliatrice» ( 158 ) connaît, dans le cas du droit international, une limite en vertu de
laquelle ledit principe «ne s’applique que dans l’hypothèse où l’accord international en cause a primauté sur le texte de droit communautaire concerné» ( 159 ). Dès lors, une telle interprétation serait en principe admissible en l’espèce.

136. Toutefois, la méthode de l’interprétation conforme n’est susceptible d’être utilisée que lorsque la disposition litigieuse est insuffisamment claire ou qu’elle se prête à plusieurs interprétations au regard du contexte, de la nature ou de l’économie de la disposition ou de l’acte de base dont elle fait partie. Or, tel n’est pas le cas, au regard des observations précédentes, de l’article 10 du règlement d’Aarhus, dont il ressort clairement la volonté d’exclure de son champ d’application les
actes de portée générale.

137. De surcroît, à l’instar des règles applicables à l’interprétation du droit national, l’interprétation conforme est limitée par les principes généraux du droit et l’exclusion de toute interprétation contra legem ( 160 ). Or, dès lors qu’à mon sens le champ d’application du règlement d’Aarhus restreint l’accès à la justice par le biais de la définition de l’acte relevant de la procédure de réexamen excessivement restrictive au regard du champ d’application de la convention d’Aarhus, une
interprétation conforme me paraît exclue en l’espèce.

VII – Sur le pourvoi incident

138. Les organisations de protection de l’environnement ont formé un pourvoi incident dans les affaires C‑401/12 P à C‑403/12 P , qualifié de «conditionnel» par lesdites organisations, en ce qu’il aurait été introduit exclusivement «pour le cas où la Cour ne ferait pas droit aux moyens avancés dans le mémoire en réponse». Lesdites organisations invoquent, dans ce cadre, un moyen unique tiré de ce que le Tribunal aurait omis, à tort, de reconnaître un effet direct à la notion d’«actes» figurant à
l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus.

139. Le Conseil, la Commission et le Parlement s’accordent à considérer qu’un tel pourvoi incident «conditionnel» ( 161 ) est irrecevable. Quant au fond, ils proposent de rejeter comme non fondés les arguments des organisations. En outre, ils font observer que les organisations ne visent pas l’annulation du dispositif de l’arrêt attaqué, mais demandent en réalité un nouvel arrêt qui confirmerait l’arrêt attaqué, mais sur d’autres motifs.

140. Tout d’abord, j’observe que, dans leurs conclusions, les organisations demandent «d’annuler l’arrêt attaqué et également d’annuler la décision d’irrecevabilité de la Commission». En ce qu’elles demandent à la Cour de déclarer la notion d’acte comme étant d’effet direct, ce qui permettrait d’examiner la validité du règlement d’Aarhus, les organisations de protection de l’environnement ne visent pas à «compléter» l’arrêt attaqué. En effet, le grief tiré de l’absence de la déclaration d’effet
direct, s’il était accepté, conduirait à annuler l’intégralité du raisonnement du Tribunal, lequel a fondé l’examen de légalité sur la jurisprudence Fediol/Commission et Nakajima/Conseil. Lesdites organisations remettent donc en cause l’arrêt Lesoochranárske zoskupenie, sans pour autant apporter les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande. En effet, il ne ressort nullement des écrits sur quel fondement la déclaration d’effet direct pourrait intervenir afin de
procéder au contrôle de légalité du règlement d’Aarhus.

141. Or, doit être considéré comme irrecevable un pourvoi qui ne comporte pas d’argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt du Tribunal ( 162 ). Tel est le cas du présent pourvoi incident par lequel les parties reprochent en substance au Tribunal de ne pas s’être prononcé sur un aspect, sans qu’aucune erreur de droit en résultant ne soit déterminée. En effet, un tel pourvoi, alors même qu’il s’agit d’un pourvoi incident, n’est pas susceptible de
faire l’objet d’une appréciation juridique permettant à la Cour d’exercer la mission qui lui incombe dans le domaine considéré et d’effectuer ainsi son contrôle de légalité ( 163 ).

142. Je propose, par conséquent, de rejeter le pourvoi incident comme irrecevable.

VIII – Conclusion

143. Je propose à la Cour:

— d’annuler l’arrêt du Tribunal Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht/Commission (T‑396/09, EU:T:2012:301), en ce qu’il a accueilli le deuxième moyen en première instance et procédé au contrôle de la légalité sur le fondement de la jurisprudence issue des arrêts Fediol/Commission (70/87, EU:C:1989:254) et Nakajima/Conseil (69/89, EU:C:1991:186);

— de renvoyer l’affaire devant le Tribunal;

— de rejeter le pourvoi incident dans les affaires jointes C‑401/12 P, à C‑403/12 P;

— de réserver les dépens.

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( 1 ) Langue originale: le français.

( 2 ) JO L 124, p. 1.

( 3 ) Les présents pourvois sont étroitement liés à une deuxième série de pourvois, dans les affaires Conseil et Commission/Stichting Natuur en Milieu et Pesticide Action Network Europe (C‑404/12 P et C‑405/12 P), au sujet desquelles je présenterai mes conclusions ce jour également.

( 4 ) Ainsi qu’il a été proposé par l’avocat général Maduro dans les conclusions dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du 9 septembre 2008, FIAMM e.a./Conseil et Commission (C‑120/06 P et C‑121/06 P, EU:C:2008:476), il convient, d’un point de vue terminologique, d’évoquer l’effet direct dans le cadre de la mise en œuvre du droit de l’Union dans les États membres et l’«invocabilité directe» pour les normes internationales conventionnelles. Voir également Dutheil de la Rochère, J., «L’effet direct
des accords internationaux», dans Court of Justice and the Construction of Europe, 2013.

( 5 ) Règlement du Parlement européen et du Conseil, du 6 septembre 2006, concernant l’application aux institutions et organes de la Communauté européenne des dispositions de la convention d’Aarhus (JO L 264, p. 13). Selon l’article 1er dudit règlement, celui‑ci a pour objet de contribuer à l’exécution des obligations découlant de la convention d’Aarhus, en établissant des dispositions visant à appliquer aux institutions et aux organes communautaires les dispositions de la convention, notamment en
garantissant l’accès à la justice en matière d’environnement au niveau de la Communauté, dans les conditions prévues par le règlement.

( 6 ) Il n’est pas contesté que les organisations défenderesses au pourvoi remplissent ces critères.

( 7 ) Arrêts Fediol/Commission (70/87, EU:C:1989:254) et Nakajima/Conseil (C‑69/89, EU:C:1991:186).

( 8 ) Voir arrêts Pabst & Richarz (17/81, EU:C:1982:129, point 27); Demirel (12/86, EU:C:1987:400, point 14), ainsi que conclusions de l’avocat général Darmon dans cette même affaire (EU:C:1987:232, point 18). Voir, également, arrêts Racke (C‑162/96, EU:C:1998:293, point 31); IATA et ELFAA (C‑344/04, EU:C:2006:10, point 39); Air Transport Association of America e.a. (C‑366/10, EU:C:2011:864, point 54) et Z (C‑363/12, EU:C:2014:159, points 84 à 86).

( 9 ) Voir arrêt Lesoochranárske zoskupenie (C‑240/09, EU:C:2011:125), dans lequel la Cour a jugé que l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus était dépourvu d’effet direct.

( 10 ) Cet arrêt (C‑308/06, EU:C:2008:312, points 42 à 45) est ainsi libellé: «Il ressort de l’article 300, paragraphe 7, CE que les institutions de la Communauté sont liées par les accords conclus par celle‑ci et, par conséquent, que ces accords bénéficient de la primauté sur les actes de droit communautaire dérivé. Il s’ensuit que la validité d’un acte communautaire dérivé peut être affectée du fait de l’incompatibilité de ce dernier avec de telles règles du droit international. […] la Cour
vérifie ainsi, en application de l’article 234 CE, la validité de l’acte communautaire concerné au regard de toutes les règles du droit international, sous réserve du respect de deux conditions. Premièrement, la Communauté doit être liée par ces règles. Deuxièmement, la Cour ne peut procéder à l’examen de la validité […] que lorsque la nature et l’économie de celui‑ci ne s’y opposent pas et que, par ailleurs, ses dispositions apparaissent, du point de vue de leur contenu, inconditionnelles et
suffisamment précises».

( 11 ) Arrêt Pays‑Bas/Parlement et Conseil (C‑377/98, EU:C:2001:523, points 52 à 54): «Il est constant que, en principe, la légalité d’un acte communautaire ne dépend pas de sa conformité à une convention internationale à laquelle la Communauté n’est pas partie […]. Sa légalité ne saurait davantage être appréciée au regard d’instruments de droit international qui, comme l’accord OMC et les accords ADPIC et OTC […]. Mais pareille exclusion ne saurait être appliquée à la convention sur la diversité
biologique signée à Rio de Janeiro le 5 juin 1992 (CDB) qui, à la différence de l’accord OMC, n’est pas strictement fondée sur le principe de la réciprocité et des avantages mutuels. À supposer que, comme le Conseil le soutient, la CDB contienne des dispositions dépourvues d’effet direct, en ce sens qu’elles ne créeraient pas de droits que les particuliers pourraient invoquer directement en justice, cette circonstance ne constituerait pas un obstacle au contrôle par le juge du respect des
obligations qui s’imposent à la Communauté en tant que partie à cet accord».

( 12 ) Décision C(2009) 2560 final.

( 13 ) Directive du Parlement européen et du Conseil, du 21 mai 2008 (JO L 152, p. 1).

( 14 ) La demande d’intervention du gouvernement tchèque au soutien de la Commission a été déposée après l’expiration du délai prévu. L’intervention n’a été admise qu’aux fins de la procédure orale.

( 15 ) EU:C:2011:125.

( 16 ) EU:C:1989:254 et EU:C:1991:186.

( 17 ) Voir, en ce sens, arrêt Chiquita Brands e.a./Commission (T‑19/01, EU:T:2005:31, point 117).

( 18 ) Celui de la réglementation antidumping, à l’exception du domaine concerné par l’arrêt Italie/Conseil (C‑352/96, EU:C:1998:531), qui concernait les règles du GATT.

( 19 ) Arrêts Allemagne/Conseil (C‑280/93, EU:C:1994:367, point 111); Portugal/Conseil (C‑149/96, EU:C:1999:574, point 51) et Van Parys (C‑377/02, EU:C:2005:121, points 39 à 42).

( 20 ) Arrêt Chiquita Brands e.a./Commission (EU:T:2005:31, points 125 à 169).

( 21 ) Pescatore, P., «L’application judiciaire des traités internationaux dans la Communauté européenne et dans ses États membres», dans Études de droit des Communautés européennes, Mélanges Teitgen, 1984, p. 356.

( 22 ) L’arrêt Haegeman (181/73, EU:C:1974:41) concernait l’accord d’association avec la République hellénique.

( 23 ) Cette analyse n’est pas unanime en doctrine. En effet, bien que certains auteurs soutiennent le concept moniste (Pescatore, P., Die Rechtsprechung des Europaischen Gerichtshofs zur innergemeinschaftlichen Wirkung Volkerrechtlicher Abkommen, 1986, ainsi que «L’application judiciaire des traités internationaux […]», op. cit., p. 395), d’autres défendent une approche dualiste (Hartley, T. C., International Agreements and the Community Legal System, 8 ELR, 1983, p. 383 et 390). Il existe
également une analyse nuancée selon laquelle il serait peu utile de privilégier une approche plutôt que l’autre (Everling, «The Law of the External Economic Relations of the EC», dans Hilf, M., Jacobs, G., et Petersmann, E.‑U., The European Community and GATT, Kluwer, 1986, p. 85 et 95).

( 24 ) Voir de Burca, G., «The ECJ and the international legal order», dans The Worlds of European Constitutionalism, p. 105.

( 25 ) 104/81, EU:C:1982:362.

( 26 ) Ibidem, point 17. Voir également arrêt Demirel (EU:C:1987:400).

( 27 ) Voir Rosas, A., cité par Mardsen, S.: «As far as treaties are concerned, the EU approach is basically a monist one: the treaties concluded by the Council become ipso facto part of EU law, without any need for further measures of transposition or incorporation. The decision by the Council to conclude the agreement thus makes it directly applicable»; «Invoking direct application and effect of international treaties by the European Court of Justice», International and Comparative Law Quarterly,
vol. 60, no 30, p. 737 à 757.

( 28 ) 270/80, EU:C:1981:286, p. 353.

( 29 ) Arrêts Demirel (EU:C:1987:400); Andersson et Wåkerås‑Andersson (C‑321/97, EU:C:1999:307) et Jacob Meijer et Eagle International Freight (C‑304/04 et C‑305/04, EU:C:2005:441). Voir, également, arrêt Grèce/Commission (30/88, EU:C:1989:422, point 13). En ce qui concerne la communautarisation des accords mixtes, voir arrêts Commission/Allemagne (C‑61/94, EU:C:1996:313) et Commission/France (C‑239/03, EU:C:2004:598). Voir, également, arrêt Opel Austria/Conseil (T‑115/94, EU:T:1997:3).

( 30 ) Arrêt International Fruit Company e.a. (21/72 à 24/72, EU:C:1972:115) et conclusions en ce sens de l’avocat général Mayras. Voir aussi arrêt Air Transport Association of America e.a. (EU:C:2011:864, point 50 et jurisprudence citée). Voir, également, arrêt HK Danmark (C‑335/11 et C‑337/11, EU:C:2013:222, point 28).

( 31 ) Voir, en ce sens, arrêt Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission (C‑402/05 P et C‑415/05 P, EU:C:2008:461, point 308).

( 32 ) EU:C:1972:115 (points 6 et 7).

( 33 ) La règle d’interprétation a été énoncée pour la première fois dans l’arrêt Interfood (92/71, EU:C:1972:30) et confirmée par l’arrêt Commission/Allemagne (EU:C:1996:313, point 52). Voir, plus récemment, arrêt HK Danmark (EU:C:2013:222).

( 34 ) Voir de Burca, G., op. cit., p. 106. Certains commentateurs ont relevé que l’Union, elle‑même issue de traités internationaux, ne pouvait qu’adopter une attitude ouverte à l’égard du droit international, au titre du principe de «völkerrechtsfreundliche Integration». Voir, par exemple, Timmermans, «The EU and Public International Law», European Foreign Affairs Review, 1999, p. 181 à 194.

( 35 ) Voir arrêts International Fruit Company e.a. (EU:C:1972:115), ainsi que Portugal/Conseil (EU:C:1999:574). En revanche, un tel effet est souvent reconnu aux dispositions des accords d’association dans le cadre desquels l’Union apparaît en position de force: voir Klabbers, J., «International Law in Community Law, The Law and Politics of Direct Effect», Yearbook of European Law, 2001, 21 (1); p. 263 à 298. Klabbers relève également, au sujet des accords conclus dans le cadre du Conseil de
l’Europe, l’application d’une clause dite «de déconnexion» («disconnection clause») en vertu de laquelle les États contractants, tout en étant obligés de respecter le traité international, sont tenus de faire primer, dans leurs relations avec l’Union, le droit de l’Union. Voir Economides, C., «La clause de déconnexion en faveur du droit communautaire, une pratique critiquable», Revue générale de droit international public, 2006, p. 273 à 302.

( 36 ) Waelbroeck, M., «Enforceability of the EEC‑EFTA Free Trade Agreements: A Reply», European Law Review, 1978, p. 27 et 28.

( 37 ) Voir, également, conclusions de l’avocat général Ruiz‑Jarabo Colomer dans l’affaire Merck Genericos – Produtos Farmacêuticos (C‑431/05, EU:C:2007:48, points 76 à 79) au sujet du dualisme.

( 38 ) EU:C:1972:115.

( 39 ) En ce qui concerne l’absence d’effet direct de ces accords, voir Kokott, J., «International law – a neglected ‘integral’ part», dans De Rome à Lisbonne: les juridictions de l’Union européenne à la croisée des chemins, Bruylant, 2013.

( 40 ) Arrêt International Fruit Company e.a. (EU:C:1972:115, point 21). C’est, en outre, dans cet arrêt que la Cour a admis que la Communauté a succédé, dans une large mesure, aux États membres, dans leurs droits et obligations au titre de l’accord du GATT.

( 41 ) Voir prise de position du panel WTO: Sections US‑301‑310 of the Trade Act of 1974 WT/DS 152/R, 1999, § 7.72.

( 42 ) Voir, à ce sujet, Slotboom, M., «A comparison of WTO and EC law», Cameron, mai 2006, p. 65.

( 43 ) Arrêt International Fruit Company e.a. (EU:C:1972:115).

( 44 ) Arrêt Portugal/Conseil (EU:C:1999:574, point 41).

( 45 ) Ibidem, points 44 et 45.

( 46 ) Arrêts Biret International/Conseil (C‑93/02 P, EU:C:2003:517) et FIAMM e.a./Conseil et Commission (EU:C:2008:476). Au sujet de l’invocabilité du droit de l’OMC, voir conclusions de l’avocat général Maduro dans l’affaire FIAMM e.a./Conseil et Commission (EU:C:2008:98).

( 47 ) Arrêt Allemagne/Conseil (EU:C:1994:367, point 109), confirmé par l’arrêt Portugal/Conseil (EU:C:1999:574) (la Cour a jugé que «les particularités de l’Accord général, relevées par la Cour pour constater qu’un justiciable de la Communauté ne peut pas s’en prévaloir en justice afin de contester la légalité d’un acte communautaire, s’opposent également à ce que la Cour prenne en considération les dispositions de l’Accord général pour apprécier la légalité d’un règlement dans le cadre d’un
recours introduit par un État membre au titre de l’article 173, premier alinéa, du traité).

( 48 ) Voir arrêt Commission/Allemagne (EU:C:1996:313).

( 49 ) Voir, en ce sens, conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Intertanko e.a. (EU:C:2007:689, points 73 et 74). Elle se réfère aux arrêts Fediol/Commission (EU:C:1989:254, points 19 et suiv.), Nakajima/Conseil (EU:C:1991:186, point 31), Portugal/Conseil (EU:C:1999:574, point 49), Biret International/Conseil (EU:C:2003:517, point 53), et Van Parys (EU:C:2005:121, point 40).

( 50 ) Arrêts Hermès (C‑53/96, EU:C:1998:292, point 35) et Dior e.a. (C‑300/98 et C‑392/98, EU:C:2000:688).

( 51 ) Bourgeois, J., «The European Court of Justice and the WTO», dans Towards a Common Law of International Trade, Weiler, OUP, 2000, p. 103.

( 52 ) Eeckhout, P., External Relations of the European Union, OUP, 2004, p. 316.

( 53 ) Arrêt Portugal/Conseil (EU:C:1999:574, point 49); voir, également, arrêts Italie/Conseil (EU:C:1998:531, point 19), et Allemagne/Conseil (EU:C:1994:367, point 111).

( 54 ) JO L 252, p. 1.

( 55 ) Il importe de préciser que, dans le cadre de l’arrêt Fediol/Commission, ce n’est pas l’accord en tant que tel qui était invoqué, mais l’acte communautaire qui sert de relais entre le droit de l’Union et le droit international.

( 56 ) EU:C:2005:121, points 39 et 40.

( 57 ) Au point 54 de l’arrêt attaqué figure une citation générale de l’arrêt Fediol/Commission; ensuite, au point 58 de l’arrêt attaqué, le Tribunal mentionne seulement une référence expresse figurant au point 18 du règlement d’Aarhus par rapport à l’article 9, paragraphe 3, de la convention d’Aarhus.

( 58 ) Voir arrêt Portugal/Conseil (EU:C:1999:574).

( 59 ) Voir arrêt Intertanko e.a. (EU:C:2008:312, point 48).

( 60 ) Voir arrêt dit «Biotech» (EU:C:2001:523, point 53).

( 61 ) Ibidem (point 53).

( 62 ) EU:T:2005:31, point 117.

( 63 ) Voir arrêt Air Transport Association of America e.a. (EU:C:2011:864, point 51).

( 64 ) Ibidem (point 7) et arrêt Intertanko e.a. (EU:C:2008:312, point 44).

( 65 ) Arrêt FIAMM e.a./Conseil et Commission (EU:C:2008:476, point 110).

( 66 ) Dans l’arrêt Demirel (EU:C:1987:400), la Cour se réfère à l’«objet et [à] la nature de l’accord» (point 14).

( 67 ) Voir, notamment, arrêts Kupferberg (EU:C:1982:362, point 22); IATA et ELFAA (EU:C:2006:10, point 39), et Intertanko e.a. (EU:C:2008:312, point 45).

( 68 ) Voir arrêt Demirel (EU:C:1987:400, point 14), et conclusions de l’avocat général Darmon dans la même affaire (EU:C:1987:232, point 18); voir également arrêt Pêcheurs de l’étang de Berre (C‑213/03, EU:C:2004:464, point 39).

( 69 ) Voir arrêt Demirel (EU:C:1987:400, point 14). Sur les accords d’association, voir arrêts Pokrzeptowicz‑Meyer (C‑162/00, EU:C:2002:57); Deutscher Handballbund (C‑438/00, EU:C:2003:255) et Simutenkov (C‑265/03, EU:C:2005:213), dans lesquels la Cour a fait référence au principe de non‑discrimination pour fonder l’invocabilité de la disposition conventionnelle. Voir aussi commentaire de Jacobs, F., «The Internal Legal Effects of EU’s agreements», dans A constitutional order of States? Essays in
EU Law in honour of A. Dashwood, p. 535. Voir, également, arrêt Toprak et Oguz (C‑300/09 et C‑301/09, EU:C:2010:756).

( 70 ) Voir, a contrario, arrêt Ioannis Katsivardas – Nikolaos Tsitsikas (C‑160/09, EU:C:2010:293, point 45).

( 71 ) Arrêt Portugal/Conseil (EU:C:1999:574, point 47); arrêt dit «Biotech» (EU:C:2001:523, point 52), et arrêt Dior e.a. (EU:C:2000:688, point 43). Voir, également, ordonnance OGT Fruchthandelsgesellschaft (C‑307/99, EU:C:2001:228, point 24) et arrêt Van Parys (EU:C:2005:121, point 39).

( 72 ) Par exemple accord OMC, convention des Nations unies sur le droit de la mer, protocole de Kyoto à la convention‑cadre des Nations unies sur les changements climatiques du 11 décembre 1997 et accord sur le transport aérien «ciel ouvert» entre la CE et les États‑Unis.

( 73 ) Voir accords CEE‑Turquie (par exemple, arrêt Cetinkaya, C‑467/02, EU:C:2004:708), accord d’association CEE‑Maroc (arrêt Kziber, C‑18/90, EU:C:1991:36), accords européens de préadhésion (par exemple ceux conclus avec la République de Pologne et la République tchèque, voir arrêt Jany e.a., C‑268/99, EU:C:2001:616). En ce qui concerne les accords conclus entre la Communauté européenne et ses États membres et la Confédération suisse, voir arrêt Ettwein (C‑425/11, EU:C:2013:121).

( 74 ) EU:C:2006:10, point 39.

( 75 ) Intertanko e.a. (EU:C:2007:689, point 59).

( 76 ) Arrêt Intertanko e.a. (EU:C:2008:312, point 64). De surcroît, il convient de noter, à propos de cette affaire, que les particuliers ne cherchaient pas à faire valoir des droits dans leur propre intérêt, mais cherchaient plutôt à obtenir la vérification de la compatibilité de la législation de l’Union avec ses obligations internationales.

( 77 ) C‑286/90, EU:C:1992:453.

( 78 ) Wenneras, P., «Towards an Ever Greener Union», CMLR 45, 2008, 1679. Alors que, dans l’arrêt Intertanko e.a., la Cour a refusé d’opérer un contrôle de légalité en se référant à la convention sur le droit de la mer, elle a, dans un arrêt en manquement, accepté de procéder à la vérification de la compatibilité de la législation d’un État membre avec cette même convention (arrêt Commission/Irlande, dit «MOX Plant», C‑459/03, EU:C:2006:345, point 121).

( 79 ) La Cour se réfère ici aux arrêts Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission (89/85, 104/85, 114/85, 116/85, 117/85 et 125/85 à 129/85, EU:C:1988:447, points 14 à 18), ainsi que Mondiet (C‑405/92, EU:C:1993:906, points 11 à 16).

( 80 ) La Cour ajoute, en outre, que, «dès lors qu’un principe du droit international coutumier ne revêt pas le même degré de précision qu’une disposition d’un accord international, le contrôle juridictionnel doit nécessairement se limiter au point de savoir si les institutions de l’Union, en adoptant l’acte en cause, ont commis des erreurs manifestes d’appréciation quant aux conditions d’application de ces principes».

( 81 ) Eeckhout, P., voit toutefois dans ledit arrêt des «enigmatic statements», CMLR 46, 2009, p. 2052.

( 82 ) Arrêt dit «Biotech» (EU:C:2001:523, point 54). Il convient de relever que la Cour s’est toutefois référée à l’arrêt Racke au sujet du droit international coutumier (EU:C:1998:293, points 45, 47 et 51).

( 83 ) EU:C:2011:125, point 46.

( 84 ) Ibidem (point 51).

( 85 ) Il a été toutefois observé que cette approche pouvait se justifier par le fait que ladite convention a été conclue par la Communauté et tous ses États membres en vertu d’une compétence partagée, la convention d’Aarhus étant un accord mixte. Voir, en particulier, Neframi, E., Mixed Agreements as a source of European Union Law, p. 335.

( 86 ) Arrêt Les Verts/Parlement (294/83, EU:C:1986:166, point 23).

( 87 ) Voir, Simon, D., «La Communauté de droit», dans Sudre, F., et Labayle, H., Réalité et perspectives du droit communautaire, 2000, p. 85.

( 88 ) Voir, en la matière, arrêts Pêcheurs de l’étang de Berre (EU:C:2004:464, points 42 à 52); Commission/France (EU:C:2004:598, point 29); Commission/Irlande (EU:C:2006:345); Intertanko e.a. (EU:C:2008:312), et Lesoochranárske zoskupenie (EU:C:2011:125).

( 89 ) Je ne conteste pas que d’autres domaines sont marqués par un phénomène analogue d’élaboration du droit à plusieurs niveaux, comme les règles régissant la lutte contre le blanchiment d’argent, la politique commerciale, le transport aérien, etc.

( 90 ) Betlem, G., et Nollkaemper, A., «Giving Effect to Public International Law and European Community Law before Domestic Courts», EJIL 2003, vol. 14, no 3, p. 569 à 589.

( 91 ) Voir, à cet égard, conclusions de l’avocat général Trabucchi dans l’affaire Defrenne, dite «Defrenne II» (43/75, EU:C:1976:39).

( 92 ) Pescatore, P., «The Doctrine of ‘Direct Effect’; An Infant Disease of Community Law», ELR 1983, 8, p. 155.

( 93 ) Le terme est emprunté à l’arrêt Bund für Umwelt und Naturschutz Deutschland, Landesverband Nordrhein‑Westfalen (C‑115/09, EU:C:2011:289, point 41): «ainsi qu’il résulte du cinquième considérant de la directive 2003/35, la législation de l’Union doit être correctement alignée» par rapport à la convention d’Aarhus.

( 94 ) Voir, à titre d’exemple, analyse d’une telle disposition en droit de l’Union dans l’arrêt Bund für Umwelt und Naturschutz, Landesverband Nordrhein‑Westfalen, EU:C:2011:289 (points 55 à 59).

( 95 ) EU:C:1994:367, point 109.

( 96 ) Dans le cadre du contrôle de légalité, il convient de noter la pertinence de la recevabilité de l’exception d’illégalité admise par le Tribunal. En effet, la Cour a été saisie du présent litige à la suite d’une exception d’illégalité soulevée à l’encontre du règlement d’Aarhus. Selon la jurisprudence, l’article 277 TFUE est l’expression d’un principe général assurant à toute partie le droit de contester, en vue d’obtenir l’annulation d’une décision qui la concerne directement et
individuellement, la validité des actes institutionnels antérieurs, constituant la base juridique de la décision attaquée, si cette partie ne disposait pas du droit d’introduire un recours direct contre ces actes, dont elle subit ainsi les conséquences sans avoir été en mesure d’en demander l’annulation (voir arrêt Simmenthal/Commission, 92/78 EU:C:1979:53). La possibilité d’invoquer l’exception d’illégalité suppose donc la recevabilité du recours à l’occasion duquel elle est soulevée (arrêt Ripa di
Meana e.a./Parlement, T‑83/99 à T‑85/99, EU:T:2000:244, point 35). Il s’ensuit que le jeu de l’exception d’illégalité doit donc être ouvert aux parties à l’encontre des actes qu’ils ne peuvent attaquer directement en annulation (arrêt Kik/OHMI, T‑120/99, EU:T:2001:189).

( 97 ) Voir, ex multis, Manin, P., «À propos de l’accord instituant l’OMC», RTDE 1997; Klabbers, J., op. cit.; Lenaerts, K., et Corthauts, T. «On birds and hedges», EL Rev. 2006, 31(3), p. 287 à 315, point 298; Pavoni, R., «Controversial aspects of the interaction between international and EU law in environmental matters: direct effects and Members State’s unilateral measures», dans The EU external Environmental Policy of the European Union, Cambridge University Press, 2012, p. 347 à 377. Par
ailleurs, il a été proposé d’inverser l’ordre du raisonnement de la Cour, laquelle analyse tout d’abord la disposition, afin de vérifier si elle remplit le critère d’effet direct (caractère clair, précis et inconditionnel), pour ensuite analyser l’accord même. Voir Jacobs, F. «The Internal Legal Effects of EU’s agreements», op. cit., p. 532.

( 98 ) L’avocat général Gulmann a établi cette distinction tout en soutenant que l’approche moniste, laquelle implique que les accords internationaux forment une partie intégrale du droit de l’Union, n’entraîne pas comme conséquence que ces derniers peuvent constituer un paramètre pour l’examen de la légalité des actes du droit de l’Union. Selon lui, «[i]l se peut que, nonobstant le défaut d’effet direct, on puisse se prévaloir d’un accord, dans le cadre d’un recours au titre de l’article 173 du
traité; mais il se peut également que les motifs qui aboutissent au rejet de l’effet direct de l’accord soient de telle nature qu’ils doivent, en outre, aboutir à écarter l’accord en tant qu’élément de la base sur laquelle la Cour opère son contrôle de légalité». Voir, en ce sens, conclusions dans l’affaire Allemagne/Conseil (EU:C:1994:235, point 137).

( 99 ) Voir Manin, P., op. cit.

( 100 ) Lenaerts, K., et Corthauts, T., «On birds and hedges»; op. cit., point 299: «the invoked articles need to be unconditional and sufficiently precise, but only to the extent that they must be apt to serve as yardstick for review, not in the sense that they confer rights on individuals as required in cases involving direct effect».

( 101 ) Prieur, M., «La convention d’Aarhus, instrument universel de la démocratie environnementale», RJE, 1999, p. 9, cité par Guiorguieff, J., «Les règles de recevabilité concernant les actions des particuliers et la convention d’Aarhus», R.A.E, 2012/3, p. 629.

( 102 ) Arrêts Lesoochranárske zoskupenie (EU:C:2011:125, point 31) et Haegeman (EU:C:1974:41). Voir, par analogie, notamment, arrêts IATA et ELFAA (EU:C:2006:10, point 36), et Commission/Irlande (EU:C:2006:345, point 82).

( 103 ) Arrêt Lesoochranárske zoskupenie (EU:C:2011:125, point 30) (la Cour se réfère, notamment, aux arrêts Haegeman, EU:C:1974:41, points 4 à 6, et Demirel, EU:C:1987:400, point 7).

( 104 ) Voir arrêts Boxus e.a. (C‑128/09 à C‑131/09, C‑134/09 et C‑135/09, EU:C:2011:667); Križan e.a. (C‑416/10, EU:C:2013:8); Edwards et Pallikaropoulos (C‑260/11, EU:C:2013:221); Bund für Umwelt und Naturschutz Deutschland, Landesverband Nordrhein‑Westfalen (EU:C:2011:289); Lesoochranárske zoskupenie (EU:C:2011:125), ainsi que conclusions du 12 septembre 2013 dans l’affaire Commission/Royaume‑Uni (C‑530/11, actuellement encore pendante devant la Cour).

( 105 ) Commission économique pour l’Europe, The Aarhus Convention: An Implementation Guide, 2e éd., 2013, p. 6; Beyerlin, U., et Grote Stoutenburg, J., «Environment, International Protection», sous la direction de Wolfrum, R., Max Planck Encyclopedia of Public International Law, point 73.

( 106 ) Voir, pour une application de ce critère, arrêt dit «Biotech» (EU:C:2001:523, points 51 à 53).

( 107 ) Résolution du Parlement européen sur la stratégie de l’Union européenne en vue de la conférence d’Almaty sur la convention d’Aarhus, P6_TA(2005)0176.

( 108 ) EU:C:2011:125, point 45.

( 109 ) Ibidem (point 46).

( 110 ) Arrêté intitulé «Besluit derogatie (luchtkwaliteitseisen)», publié au Staatsblad, 2009, no 366.

( 111 ) Voir arrêt IATA et ELFAA (EU:C:2006:10, point 40 et jurisprudence citée).

( 112 ) Voir considérants 8 et 18 de la convention d’Aarhus.

( 113 ) À l’exception d’actes adoptés dans le cadre des activités législatives ou judiciaires, voir mes conclusions parallèles dans les affaires Conseil et Commission/Stichting Natuur en Milieu et Pesticide Action Network Europe (C‑404/12 P et C‑405/12 P).

( 114 ) Stec, S., et Casey‑Lefkowitz, S., The Aarhus Convention, An Implementation Guide, p. 23 à 25.

( 115 ) Voir Andrusevyvh, K., Case Law of the Aarhus Convention, 2004‑2011, p. 80.

( 116 ) L’article 9, paragraphe 3, doit être lu à la lumière du préambule et d’autres dispositions telles que les articles 1er et 3 de la convention. Conformément à la volonté des parties, le public, y compris les organisations, devraient jouir d’un droit d’accès à des mécanismes efficaces afin de pouvoir protéger leurs intérêts légitimes (voir considérant 18 du préambule).

( 117 ) Le droit de l’Union est assimilé à cette fin au droit national: voir communication ACCC/C/2008/32, point 76.

( 118 ) Larssen, C., et Jadot, B., «La convention d’Aarhus», p. 219, dans L’accès à la justice en matière d’environnement, Bruylant, 2005.

( 119 ) Arrêt Boxus e.a. (EU:C:2011:667, point 53).

( 120 ) Voir, au sujet du considérant 5 de la directive 2003/35/CE du Parlement européen et du Conseil, du 26 mai 2003, prévoyant la participation du public lors de l’élaboration de certains plans et programmes relatifs à l’environnement, et modifiant, en ce qui concerne la participation du public et l’accès à la justice, les directives 85/337/CEE et 96/61/CE du Conseil (JO L 156, p. 17), arrêts Edwards et Pallikaropoulos (EU:C:2013:221, point 26), et Bund für Umwelt und Naturschutz Deutschland,
Landesverband Nordrhein‑Westfalen (EU:C:2011:289, point 41). En ce qui concerne la transposition de l’interprétation de la directive 85/337/CEE du Conseil, du 27 juin 1985, concernant l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement (JO L 175, p. 40), à l’interprétation de l’article 2, paragraphe 2, de la convention, voir arrêt Solvay e.a. (C‑182/10, EU:C:2012:82, point 42).

( 121 ) Comité d’examen du respect des dispositions de la convention d’Aarhus, 14 juin 2005, communication ACCC/C/2005/11 (Belgique).

( 122 ) Voir arrêt Boxus e.a. (EU:C:2011:667).

( 123 ) Communication ACCC/C/2008/32 (UE), (http://www.unece.org/fileadmin/DAM/env/pp/compliance/C2008‑32/DRF/C32Findings27April2011.pdf, point 88).

( 124 ) Arrêt Solvay e.a. (EU:C:2012:82, point 28).

( 125 ) Voir arrêt Edwards et Pallikaropoulos (EU:C:2013:221, point 34): «même si le document publié en 2000 par la Commission économique pour l’Europe de l’Organisation des Nations unies, intitulé ‘La convention d’Aarhus, guide d’application’, ne saurait donner une interprétation contraignante de cette convention, il peut être relevé que celui-ci précise que le coût d'une procédure de recours au titre de la convention ou pour faire appliquer le droit national de l’environnement ne doit pas être
élevé au point d’empêcher des membres du public de former un recours s’ils l’estiment nécessaire».

( 126 ) C‑279/12, EU:C:2013:853.

( 127 ) JO L 41, p. 26.

( 128 ) http://www.unece.org/fileadmin/DAM/env/pp/acig.pdf, p. 131: «The provision potentially covers a wide range of administrative and judicial procedures, including the ‘citizen enforcement’ concept, in which members of the public are given standing to directly enforce environmental law in court. The obligation can also be met, for example, by providing for the opportunity to initiate an administrative procedure. Regardless of the particular mechanism, the Convention makes it abundantly clear
that it is not only the province of environmental authorities and public prosecutors to enforce environmental law, but that the public also has a role to play».

( 129 ) http://www.unece.org/fileadmin/DAM/env/pp/acig.pdf, p. 125: «Provides review procedures for public review of acts and omissions of private persons or public authorities concerning national law relating to the environment».

( 130 ) http://www.unece.org/fileadmin/DAM/env/pp/acig.pdf, p. 130.

( 131 ) Voir, en ce sens, arrêt Cilfit e.a. (283/81, EU:C:1982:335, point 20). La genèse d’une disposition du droit de l’Union peut également revêtir des éléments pertinents pour son interprétation (arrêt Pringle, C‑370/12, EU:C:2012:756, point 135).

( 132 ) COM(2003) 622 final, 2003/0242 COD, p. 17.

( 133 ) Il ressort du considérant 11 de la directive 2003/35 que cette directive a été adoptée afin de rendre la législation de l’Union «parfaitement compatible avec les dispositions de la convention d’Aarhus, et notamment avec [...] son article 9, [paragraphe] 2». (Voir, en outre, conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Commission/Royaume‑Uni, C‑530/11, EU:C:2013:554, et conclusions de l’avocat général Cruz Villalón dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Gemeinde Altrip e.a.,
C‑72/12, EU:C:2013:712). Le considérant 5 de la directive 2003/4 précise également que, en adoptant cette directive, le législateur de l’Union a entendu assurer la compatibilité du droit de l’Union avec la convention d’Aarhus concernant le droit d’accès aux informations environnementales (voir, à cet égard, arrêt Flachglas Torgau, C‑204/09, EU:C:2012:71, point 31).

( 134 ) En effet, pour ce qui est de l’accès à la justice, les anciens articles 230 CE et 232 CE, qui garantissaient l’accès à la justice de l’UE, étaient applicables. Or, ces dispositions ne permettaient pas à la Communauté de ratifier la convention dans la mesure où les dispositions de cette convention sont, pour certaines d’entre elles, plus détaillées ou plus ambitieuses que les dispositions communautaires existantes. Voir COM(2003) 622 final, 2003/0242 COD, p. 3.

( 135 ) Le projet de directive sur l’accès à la justice en matière environnementale qui vise à définir un ensemble d’exigences minimales relatives à l’accès aux procédures administratives et judiciaires en matière d’environnement, transposant ainsi en droit de l’Union et dans celui des États membres le troisième pilier de la convention d’Aarhus. Voir COM(2003) 624 final.

( 136 ) Report by the Compliance Committee on the Compliance by the European Community with its obligation under the Convention presented to the Third meeting of the Parties to the Convention (Kazokiskes Report) http://www.unece.org/fileadmin/DAM/env/documents/2008/pp/mop3/ece_mp_pp_2008_5_add_10_e.pdf.

( 137 ) COM(2003) 622 final, 2003/0242 COD.

( 138 ) Il ressort des travaux législatifs précédant l’adoption du règlement d’Aarhus que «[l’]option consistant à reconnaître un droit d’accès à la justice en matière d’environnement à toute personne physique ou morale n’a pas été considérée comme une solution rationnelle […]. Cela impliquerait en effet de modifier les articles 230 et 232 du traité CE: ce principe ne peut donc être établi par des dispositions de droit dérivé. La proposition a donc prévu de limiter le droit d’ester en justice aux
‘entités qualifiées’». Voir proposition de règlement COM(2003) 622 final, p. 17.

( 139 ) COM(2003) 622 final, p. 28. Il convient de relever que la problématique de l’exclusion des actes adoptés dans l’exercice des pouvoirs législatifs ou judiciaires a été distinguée d’emblée de celle de l’exclusion des actes adoptés en qualité d’organe de contrôle administratif (aides d’État, infractions, médiations, OLAF, etc.) (ibidem, p. 11).

( 140 ) Position commune du 20 avril 2005, 6273/05 (ENV 57, JUSTCIV 24 INF 38 ONU 10 CODEC 81 OC 80).

( 141 ) Résolution législative du Parlement européen relative à la position commune du Conseil en vue de l’adoption du règlement du Parlement européen et du Conseil sur l’application aux institutions et organes de la CE des dispositions de la convention d’Aarhus sur l’accès à l’information, la participation du public et l’accès à la justice dans le domaine de l’environnement [6273/2/2005 – C6‑0297/2005 – 2003/0242(COD)]. Dès le stade de la position commune, le Royaume de Belgique a relevé une
incompatibilité avec la convention d’Aarhus, en ce que les dispositions ont pour effet de restreindre indûment l’accès aux moyens de recours des membres du public que les institutions seraient tenues de garantir conformément à la convention. Voir, à ce sujet, déclaration du Royaume de Belgique: http://register.consilium.europa.eu/pdf/fr/05/st10/st10896-ad01.fr05.pdf

( 142 ) Pour une analyse plus complète des enjeux de la procédure de réexamen, voir Pallemaerts, M., «Acces to Environmental Justice at EU level», dans The Aarhus Convention at Ten, Interactions and Tensions between Conventional International Law and EU Environmental Law, Europa Law Publishing, 2001.

( 143 ) Il s’agirait donc non seulement des actes adoptés sur le fondement de l’article 191 TFUE, mais également des actes ayant une double base juridique (voir, notamment, arrêts Commission/Conseil, C‑94/03, EU:C:2006:2, et Commission/Parlement et Conseil, C‑411/06, EU:C:2009:518).

( 144 ) Par opposition à des actes de portée générale qui s’appliquent à des situations déterminées objectivement et comportent des effets juridiques à l’égard de catégories de personnes envisagées de manière générale et abstraite (voir arrêt Calpak et Società Emiliana Lavorazione Frutta/Commission, 789/79 et 790/79, EU:C:1980:159, point 9).

( 145 ) Arrêt du 9 juin 1964, Acciaierie Fonderie Ferriere di Modena/Haute Autorité (55/63 à 59/63 et 61/63 à 63/63, EU:C:1964:37).

( 146 ) Conclusions prononcées conjointement le 8 mai 2014.

( 147 ) Pour les aspects procéduraux, voir décision 2008/50/CE de la Commission, du 13 décembre 2007, établissant les modalités d’application du règlement (CE) no 1367/2006 du Parlement européen et du Conseil relatif à la convention d’Aarhus en ce qui concerne les demandes de réexamen interne d’actes administratifs (JO 2008, L 13, p. 24).

( 148 ) Article 64 du règlement (CE) no 1907/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 18 décembre 2006, concernant l’enregistrement, l’évaluation et l’autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (REACH), instituant une agence européenne des produits chimiques, modifiant la directive 1999/45/CE et abrogeant le règlement (CEE) no 793/93 du Conseil et le règlement (CE) no 1488/94 de la Commission ainsi que la directive 76/769/CEE du Conseil et les
directives 91/155/CEE, 93/67/CEE, 93/105/CE et 2000/21/CE de la Commission (JO L 396, p. 1).

( 149 ) Voir la procédure conformément au règlement (CE) no 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil, du 22 septembre 2003, concernant les denrées alimentaires et les aliments pour animaux génétiquement modifiés (JO L 268, p. 1) – Réponse de la Commission du 26 mai 2008 publiée sur le site http://ec.europa.eu/environment/aarhus/pdf/title_iv/Reply%20to%20J_E.pdf.

( 150 ) Ainsi, la Commission a considéré que la demande de réexamen de la décision approuvant un programme d’assistance du Fonds européen de développement régional, quoique juridiquement contraignante, était dépourvue d’effets externes au motif que l’État membre bénéficiaire pouvait déterminer les projets éligibles (voir réponse de la Commission au Ekologicky Pravni Servis du 6 août 2008, publiée sur le site Internet de la Commission:
http://ec.europa.eu/environment/aarhus/pdf/title_iv/Reply%20to%20EPS.pdf). En se fondant sur les mêmes motifs, la Commission a rejeté comme irrecevable une demande de réexamen de la décision établissant une «short‑list» des candidats pour le poste de directeur exécutif de l’agence REACH (réponse de la Commission au Ekologicky Pravni Servis du 6 août 2008, publiée sur le site Internet de la Commission: http://ec.europa.eu/environment/aarhus/pdf/title_iv/Reply%20to%20EPS.pdf).

( 151 ) Ainsi que je l’ai déjà relevé, le règlement d’Aarhus a été considéré par le Comité (Aarhus Convention Compliance Committee) comme excessivement restrictif, voire incompatible avec la convention: «The scope of the Aarhus Regulation is far more restrictive than that of the Aarhus Convention, and so the Regulation fails to fully implement the Convention. This causes three specific problems. First, it appears to make it impossible to challenge a whole range of EC institutions and bodies’
decisions. Second, it fails to transpose of article 9(2) of the Convention. Third, it incorrectly transposes article 9(3) of the Convention». http://www.unece.org/fileadmin/DAM/env/pp/compliance/C2008‑32/communication/Communication.pdf, p. 20.

( 152 ) Directive 96/61/CE du Conseil, du 24 septembre 1996, relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution (JO L 257, p. 26).

( 153 ) Arrêt Križan e.a. (EU:C:2013:8, point 106).

( 154 ) Arrêts Boxus e.a. (EU:C:2011:667, point 53), et Deutsche Umwelthilfe (C‑515/11, EU:C:2013:523).

( 155 ) Voir déclarations accompagnant l’adoption de la convention d’Aarhus: «Fully supporting the objectives pursued by the Convention and considering that the EC itself is being actively involved in the protection of the environment through a comprehensive and evolving set of legislation, it was felt important not only to sign up to the Convention at the Community level but also to cover its own institutions, alongside national public authorities», déclaration reproduite par Pallemaerts, M.,
«Access to Environmental Justice at EU level», op. cit., p. 273. Voir, également, décision 2005/370.

( 156 ) Le principe d’interprétation conforme a été dégagé par l’arrêt Interfood (EU:C:1972:30). Voir arrêt Kupferberg (EU:C:1982:362, point 14).

( 157 ) Arrêts Hermès (EU:C:1998:292, point 28); Safety Hi‑Tech (C‑284/95, EU:C:1998:352, point 22) et Bellio F.lli (C‑286/02, EU:C:2004:212, point 33).

( 158 ) Simon, D., «La panacée de l’interprétation conforme», dans De Rome à Lisbonne: les juridictions de l’Union européenne à la croisée des chemins, Bruylant, 2013, p. 284.

( 159 ) Arrêt Microsoft/Commission (T‑201/04, EU:T:2007:289, point 798).

( 160 ) Règle énoncée, au sujet de l’interprétation du droit national, par exemple, dans l’arrêt Dominguez (C‑282/10, EU:C:2012:33, point 25).

( 161 ) S’agissant du caractère conditionnel du pourvoi incident, je doute que ce seul aspect puisse être un motif d’irrecevabilité. En effet, le pourvoi incident me paraît conditionnel par nature, dès lors qu’il dépend de l’issue réservée aux moyens dans le cadre du pourvoi principal.

( 162 ) Voir, en ce sens, ordonnance du 6 février 2014, Thesing et Bloomberg Finance/BCE (C‑28/13 P, EU:C:2014:96, point 25).

( 163 ) Arrêt Wam Industriale/Commission (C‑560/12 P, EU:C:2013:726, point 44).


Synthèse
Formation : Grande chambre
Numéro d'arrêt : C-401/12
Date de la décision : 08/05/2014
Type d'affaire : Pourvoi - fondé
Type de recours : Recours en annulation - non fondé

Analyses

Pourvoi - Directive 2008/50/CE - Directive concernant la qualité de l’air ambiant et un air pur pour l’Europe - Décision relative à la notification par le Royaume des Pays-Bas du report du délai fixé pour atteindre les valeurs limites pour le dioxyde d’azote et de l’exemption de l’obligation d’appliquer les valeurs limites pour les particules (PM10) - Demande de réexamen interne de cette décision, introduite en application des dispositions du règlement (CE) nº 1367/2006 - Décision de la Commission déclarant la demande irrecevable - Mesure de portée individuelle - Convention d’Aarhus - Validité du règlement (CE) nº 1367/2006 au regard de cette convention.

Environnement


Parties
Demandeurs : Conseil de l'Union européenne et autres
Défendeurs : Vereniging Milieudefensie et Stichting Stop Luchtverontreiniging Utrecht.

Composition du Tribunal
Avocat général : Jääskinen

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2014:310

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