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09/04/2014 | CJUE | N°F-59/13

CJUE | CJUE, Arrêt du Tribunal de la fonction publique, Thierry Rouffaud contre Service européen pour l'action extérieure (SEAE)., 09/04/2014, F-59/13


ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE

DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

9 avril 2014 ( *1 )

«Fonction publique — Agent contractuel auxiliaire — Requalification du contrat — Procédure précontentieuse — Règle de concordance — Modification de la cause des chefs de contestation»

Dans l’affaire F‑59/13,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

Thierry Rouffaud, ancien agent contractuel auxiliaire du Service e

uropéen pour l’action extérieure, demeurant à Ixelles (Belgique), représenté initialement par Mes A. Coolen, É. Marc...

ARRÊT DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE

DE L’UNION EUROPÉENNE (troisième chambre)

9 avril 2014 ( *1 )

«Fonction publique — Agent contractuel auxiliaire — Requalification du contrat — Procédure précontentieuse — Règle de concordance — Modification de la cause des chefs de contestation»

Dans l’affaire F‑59/13,

ayant pour objet un recours introduit au titre de l’article 270 TFUE, applicable au traité CEEA en vertu de son article 106 bis,

Thierry Rouffaud, ancien agent contractuel auxiliaire du Service européen pour l’action extérieure, demeurant à Ixelles (Belgique), représenté initialement par Mes A. Coolen, É. Marchal, S. Orlandi et D. Abreu Caldas, puis par Me S. Orlandi et D. Abreu Caldas, avocats,

partie requérante,

contre

Service européen pour l’action extérieure (SEAE), représenté par M. S. Marquardt et Mme M. Silva, en qualité d’agents,

partie défenderesse,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE

(troisième chambre),

composé de MM. S. Van Raepenbusch (rapporteur), président, R. Barents et K. Bradley, juges,

greffier : Mme X. Lopez Bancalari, administrateur,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 8 janvier 2014,

rend le présent

Arrêt

1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 24 juin 2013, M. Rouffaud demande notamment l’annulation de la décision du 6 août 2012 du Service européen pour l’action extérieure (SEAE), portant rejet de sa demande tendant à ce que la période de service qu’il a accomplie en exécution d’un contrat d’agent contractuel auxiliaire soit considérée comme une période de service accomplie en qualité d’agent contractuel et à ce que ses contrats d’engagement à durée déterminée successifs soient requalifiés
en contrat à durée indéterminée.

Faits à l’origine du litige

2 Du 21 mai 1996 au 30 avril 2006, le requérant a été employé à divers titres par la Commission européenne et par l’Agence européenne pour la reconstruction (EAR).

3 Le requérant a ensuite été engagé, avec effet au 1er mai 2006, en tant qu’agent contractuel au titre de l’article 3 bis du régime applicable aux autres agents de l’Union européenne (ci-après le «RAA»), relevant du groupe de fonctions IV, grade 14, pour exercer les fonctions de responsable régional de sécurité (Regional Security Officer, ci-après «RSO») à la délégation de la Commission à Beyrouth (Liban) pour une période de trois années. Ce contrat a été prolongé jusqu’au 30 avril 2010.

4 À partir du 1er septembre 2010, et donc après une interruption de quatre mois, le requérant a été à nouveau engagé par la Commission en qualité d’agent contractuel auxiliaire, au sens de l’article 3 ter du RAA, relevant du groupe de fonctions IV, grade 18, pour exercer, durant douze mois, des fonctions de RSO «floater». À ce titre, le requérant était affecté au siège de la direction générale (DG) «Relations extérieures» à Bruxelles (Belgique) tout en étant susceptible, dans les situations de
crise, d’être envoyé en délégation pour assister les RSO sur place. Le 1er janvier 2011, le requérant a été transféré au SEAE. Son contrat a été prorogé jusqu’au 31 août 2012.

5 Le 19 avril 2012, le requérant a présenté une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut des fonctionnaires de l’Union européenne (ci-après le «statut»), lequel est applicable par analogie aux agents contractuels auxiliaires en vertu de l’article 117 du RAA. Cette demande tendait à ce que les fonctions qu’il avait accomplies en qualité d’agent contractuel auxiliaire soient considérées comme ayant été exercées en qualité d’agent contractuel et, par voie de conséquence, à ce que les
contrats d’engagement à durée déterminée conclus depuis 2006 soient requalifiés en contrat à durée indéterminée d’agent contractuel, au sens de l’article 3 bis du RAA, et ce, en application de l’article 85, premier alinéa, dudit régime.

6 Cette demande a été rejetée par le SEAE par décision du 6 août 2012 (ci-après la «décision attaquée»).

7 Le 6 novembre 2012, le requérant a introduit une réclamation en vertu de l’article 90, paragraphe 2, du statut contre la décision attaquée. Le requérant y demandait «de retirer la décision attaquée et de faire droit à [s]a demande de requalifier son contrat d’agent contractuel auxiliaire en contrat d’agent temporaire». Cette réclamation a été rejetée le 13 mars 2013 par décision de l’autorité habilitée à conclure les contrats d’engagement (ci-après l’«AHCC») du SEAE.

Conclusions des parties

8 Le requérant conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

— annuler la décision attaquée et requalifier son contrat d’agent contractuel auxiliaire en «contrat d’agent contractuel à durée indéterminée, aux termes de l’article 3 bis du RAA» ;

— condamner le SEAE aux dépens.

9 En défense, le SEAE conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :

— rejeter le recours comme non fondé ;

— statuer sur les dépens.

En droit

10 Sans contester formellement la recevabilité du recours, le SEAE souligne notamment l’absence de concordance entre, d’une part, les conclusions de la demande initiale et du présent recours et, d’autre part, celles de la réclamation, dans laquelle le requérant demandait que son contrat d’agent contractuel auxiliaire soit requalifié en contrat d’agent temporaire. La question de recevabilité concernant la concordance entre la réclamation administrative préalable et le recours étant d’ordre public et
devant, au besoin, être examinée d’office, lors de l’audience, le Tribunal a expressément invité les parties à se prononcer sur cette question.

11 Il convient de rappeler que l’article 117 du RAA rend les dispositions du titre VII du statut relatives aux voies de recours applicables par analogie aux agents contractuels auxiliaires et que l’article 91, paragraphe 2, du statut dispose qu’un recours devant le Tribunal n’est recevable que si l’autorité investie du pouvoir de nomination a été préalablement saisie d’une réclamation.

12 Selon une jurisprudence constante, la règle de concordance entre la réclamation administrative préalable et le recours découle de l’article 91, paragraphe 2, du statut. Cette règle se justifie par la finalité même de la procédure précontentieuse dont l’objet est de permettre un règlement amiable des différends surgis entre les fonctionnaires et l’administration. Elle implique notamment que, sous réserve des exceptions d’irrecevabilité et des moyens d’ordre public, les conclusions du recours ne
peuvent contenir que des chefs de contestation reposant sur la même cause que celle sur laquelle reposent les chefs de contestation invoqués dans la réclamation, étant précisé que ces chefs de contestation peuvent être développés, devant le juge de l’Union, par la présentation de moyens et arguments ne figurant pas nécessairement dans la réclamation, mais s’y rattachant étroitement (arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 25 octobre 2013, Commission/Moschonaki, T‑476/11 P, point 73, et la
jurisprudence citée).

13 En l’espèce, dans sa réclamation, le requérant a fait valoir que, si l’AHCC estimait que son emploi ne revêtait qu’un caractère temporaire, elle aurait dû l’engager, en 2010, non pas en tant qu’agent contractuel auxiliaire sur la base de l’article 3 ter du RAA, mais en tant qu’agent temporaire au titre de l’article 2, sous b), du même régime. Par suite, alors même que sa demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut tendait à ce que son engagement en tant qu’agent contractuel
auxiliaire soit requalifié en engagement en tant qu’agent contractuel et, par voie de conséquence, à ce que ses contrats à durée déterminée successifs soient requalifiés en un contrat d’agent contractuel à durée indéterminée, le requérant a demandé à l’AHCC, dans sa réclamation, «de retirer la décision attaquée et de faire droit à [s]a demande de requalifier son contrat d’agent contractuel auxiliaire en un contrat d’agent temporaire».

14 Or, dans sa requête, le requérant demande au Tribunal d’annuler la décision attaquée et de requalifier ses contrats d’agent contractuel auxiliaire en un «contrat d’agent contractuel à durée indéterminée». De plus, à l’appui de son recours, le requérant développe une argumentation tendant à réfuter, au vu de sa situation, les différents cas de figure dans lesquels un agent contractuel auxiliaire peut être engagé conformément à l’article 3 ter du RAA pour en conclure que, si le SEAE estimait que
son poste ne pouvait figurer au tableau des effectifs annexé à la section du budget le concernant, il appartenait à celui-ci de l’engager dans le cadre d’un contrat d’agent contractuel à durée indéterminée en vertu de l’article 3 bis du RAA.

15 Ainsi, bien que le requérant ait conclu, dans sa réclamation, au retrait de la décision attaquée et, dans sa requête, à l’annulation de celle-ci, il ressort des moyens invoqués à l’appui de son recours et de la conclusion figurant également dans la requête et tendant à la requalification des contrats d’agent contractuel auxiliaire en un contrat d’agent contractuel à durée indéterminée que les chefs de contestation contenus dans la requête ne reposent pas sur la même cause que celle sur laquelle
reposent les chefs de contestation invoqués dans la réclamation. Au demeurant, le requérant ne le conteste pas. En effet, si les moyens développés dans la requête sont proches des arguments figurant dans la réclamation, ils ne sauraient être considérés comme s’y rattachant étroitement au sens de la jurisprudence citée au point 12, dans la mesure où les différences apportées traduisent, fondamentalement, un changement d’objectif du requérant.

16 Par ailleurs, le changement de point de vue opéré par le requérant dans sa réclamation pourrait également conduire à requalifier celle-ci en une nouvelle demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut. Toutefois, dans cette hypothèse, il y aurait alors lieu de considérer que, après le rejet de cette seconde demande, une nouvelle réclamation préalable au recours ferait défaut.

17 Le requérant explique néanmoins ses changements de position par la circonstance que ses contrats successifs manquaient de précision quant à leur fondement et qu’il lui était difficile de déterminer la nature de son emploi.

18 Force est cependant de rappeler que, sous peine d’empêcher la procédure précontentieuse d’atteindre son objectif et de permettre un règlement amiable du différend l’opposant à son administration, il appartenait au requérant d’informer le SEAE de ses griefs d’une manière suffisamment précise (voir, en ce sens, arrêt du Tribunal de première instance du 7 juillet 2004, Schmitt/AER, T‑175/03, point 42 ; arrêt du Tribunal du 4 octobre 2007, de la Cruz e.a./OSHA, F‑32/06, point 39). Dans cette
perspective, il lui incombait soit d’adopter un point de vue et de s’y tenir à tous les stades de la procédure précontentieuse, ainsi que dans son recours, soit d’exposer, également à tous les stades, les deux possibilités qui, selon lui se présentaient, le cas échéant en en défendant une à titre principal et l’autre à titre subsidiaire.

19 Il découle de ce qui précède que le requérant a méconnu les règles de la procédure précontentieuse et que le recours est, par voie de conséquence, irrecevable.

Sur les dépens

20 Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.

21 Il résulte des motifs énoncés dans le présent arrêt que le requérant a succombé en son recours. En outre, le SEAE a, dans ses conclusions, expressément demandé que le requérant soit condamné aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, le requérant doit supporter ses propres dépens et être condamné à supporter les dépens exposés par le SEAE.

  Par ces motifs,

LE TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE (troisième chambre)

déclare et arrête :

  1) Le recours est rejeté.

  2) M. Rouffaud supporte ses propres dépens et est condamné à supporter les dépens exposés par le Service européen pour l’action extérieure.

Van Raepenbusch

Barents

Bradley

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 9 avril 2014.
 
Le greffier

W. Hakenberg

Le président

S. Van Raepenbusch

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( *1 ) Langue de procédure : le français.


Synthèse
Formation : Troisième chambre
Numéro d'arrêt : F-59/13
Date de la décision : 09/04/2014
Type de recours : Recours de fonctionnaires - irrecevable

Analyses

Fonction publique - Agent contractuel auxiliaire - Requalification du contrat - Procédure précontentieuse - Règle de concordance - Modification de la cause des chefs de contestation.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Thierry Rouffaud
Défendeurs : Service européen pour l'action extérieure (SEAE).

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Van Raepenbusch

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:F:2014:49

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