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12/03/2014 | CJUE | N°C‑456/12

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, O. contre Minister voor Immigratie, Integratie en Asiel et Minister voor Immigratie, Integratie en Asiel contre B., 12/03/2014, C‑456/12


ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

12 mars 2014 ( *1 )

«Directive 2004/38/CE — Article 21, paragraphe 1, TFUE — Droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres — Bénéficiaires — Droit de séjour d’un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille d’un citoyen de l’Union, dans l’État membre dont ce citoyen possède la nationalité — Retour du citoyen de l’Union dans cet État membre après des séjours de courte durée dans un autre État membre»

Dans l’affaire C‑456/12,

ayant pour

objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Raad van State (Pays-Ba...

ARRÊT DE LA COUR (grande chambre)

12 mars 2014 ( *1 )

«Directive 2004/38/CE — Article 21, paragraphe 1, TFUE — Droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres — Bénéficiaires — Droit de séjour d’un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille d’un citoyen de l’Union, dans l’État membre dont ce citoyen possède la nationalité — Retour du citoyen de l’Union dans cet État membre après des séjours de courte durée dans un autre État membre»

Dans l’affaire C‑456/12,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par le Raad van State (Pays-Bas), par décision du 5 octobre 2012, parvenue à la Cour le 10 octobre 2012, dans les procédures

O.

contre

Minister voor Immigratie, Integratie en Asiel,

et

Minister voor Immigratie, Integratie en Asiel

contre

B.,

LA COUR (grande chambre),

composée de M. V. Skouris, président, M. K. Lenaerts (rapporteur), vice-président, Mme R. Silva de Lapuerta, MM. M. Ilešič, L. Bay Larsen, A. Borg Barthet et C. G. Fernlund, présidents de chambre, MM. G. Arestis, J. Malenovský, E. Levits, A. Ó Caoimh, D. Šváby, Mmes M. Berger, A. Prechal et M. E. Jarašiūnas, juges,

avocat général: Mme E. Sharpston,

greffier: Mme M. Ferreira, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 25 juin 2013,

considérant les observations présentées:

— pour M. O., par Mes J. Canales et J. van Bennekom, advocaten,

— pour M. B., par Mes C. Chen, F. Verbaas et M. van Zantvoort, advocaten,

— pour le gouvernement néerlandais, par Mmes M. de Ree, C. Schillemans et C. Wissels, en qualité d’agents,

— pour le gouvernement belge, par M. T. Materne et Mme C. Pochet, en qualité d’agents,

— pour le gouvernement tchèque, par MM. M. Smolek et J. Vláčil, en qualité d’agents,

— pour le gouvernement danois, par Mmes V. Pasternak Jørgensen et M. Wolff, en qualité d’agents,

— pour le gouvernement allemand, par M. T. Henze et Mme A. Wiedmann, en qualité d’agents,

— pour le gouvernement estonien, par Mmes M. Linntam et N. Grünberg, en qualité d’agents,

— pour le gouvernement polonais, par Mme K. Pawłowska ainsi que par MM. M. Szpunar, B. Majczyna et M. Arciszewski, en qualité d’agents,

— pour le gouvernement du Royaume-Uni, par M. L. Christie, en qualité d’agent, assisté de M. G. Facenna, barrister,

— pour la Commission européenne, par Mme C. Tufvesson et M. G. Wils, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 12 décembre 2013,

rend le présent

Arrêt

1 La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE (JO L 158, p. 77, et
rectificatifs JO L 229, p. 35, et JO 2005, L 197, p. 34), ainsi que de l’article 21, paragraphe 1, TFUE.

2 Cette demande a été introduite dans le cadre de deux litiges opposant respectivement M. O. au Minister voor Immigratie, Integratie en Asiel (ministre de l’Immigration, de l’Intégration et de l’Asile, ci-après le «Minister») et ce dernier à M. B. à propos de décisions portant refus de leur octroyer une attestation certifiant leur séjour régulier aux Pays-Bas en tant que membre de la famille d’un citoyen de l’Union européenne.

Le cadre juridique

La directive 2004/38

3 L’article 1er de la directive 2004/38, intitulé «Objet», dispose:

«La présente directive concerne:

a) les conditions d’exercice du droit des citoyens de l’Union et des membres de leur famille de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres;

[…]»

4 Sous le titre «Définitions», l’article 2 de ladite directive énonce:

«Aux fins de la présente directive, on entend par:

1) ‘citoyen de l’Union’: toute personne ayant la nationalité d’un État membre;

2) ‘membre de la famille’:

a) le conjoint;

[…]

3) ‘État membre d’accueil’: l’État membre dans lequel se rend un citoyen de l’Union en vue d’exercer son droit de circuler et de séjourner librement.»

5 L’article 3 de la même directive, intitulé «Bénéficiaires», prévoit à son paragraphe 1:

«La présente directive s’applique à tout citoyen de l’Union qui se rend ou séjourne dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité, ainsi qu’aux membres de sa famille, tels que définis à l’article 2, point 2), qui l’accompagnent ou le rejoignent.»

6 Aux termes de l’article 6 de la directive 2004/38:

«1.   Les citoyens de l’Union ont le droit de séjourner sur le territoire d’un autre État membre pour une période allant jusqu’à trois mois [...].

2.   Les dispositions du paragraphe 1 s’appliquent également aux membres de la famille munis d’un passeport en cours de validité qui n’ont pas la nationalité d’un État membre et qui accompagnent ou rejoignent le citoyen de l’Union.»

7 L’article 7, paragraphes 1 et 2, de ladite directive est libellé comme suit:

«1.   Tout citoyen de l’Union a le droit de séjourner sur le territoire d’un autre État membre pour une durée de plus de trois mois:

a) s’il est un travailleur salarié ou non salarié dans l’État membre d’accueil, ou

b) s’il dispose, pour lui et pour les membres de sa famille, de ressources suffisantes afin de ne pas devenir une charge pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil au cours de son séjour, et d’une assurance maladie complète dans l’État membre d’accueil, ou,

c) — s’il est inscrit dans un établissement privé ou public, agréé ou financé par l’État membre d’accueil sur la base de sa législation ou de sa pratique administrative, pour y suivre à titre principal des études, y compris une formation professionnelle et

— s’il dispose d’une assurance maladie complète dans l’État membre d’accueil et garantit à l’autorité nationale compétente, par le biais d’une déclaration ou par tout autre moyen équivalent de son choix, qu’il dispose de ressources suffisantes pour lui-même et pour les membres de sa famille afin d’éviter de devenir une charge pour le système d’assistance sociale de l’État membre d’accueil au cours de leur période de séjour; ou

d) si c’est un membre de la famille accompagnant ou rejoignant un citoyen de l’Union qui lui-même satisfait aux conditions énoncées aux points a), b) ou c).

2.   Le droit de séjour prévu au paragraphe 1 s’étend aux membres de la famille n’ayant pas la nationalité d’un État membre lorsqu’ils accompagnent ou rejoignent dans l’État membre d’accueil le citoyen de l’Union, pour autant que ce dernier satisfasse aux conditions énoncées au paragraphe 1, points a), b) ou c).»

8 L’article 10, paragraphe 1, de la même directive dispose:

«Le droit de séjour des membres de la famille d’un citoyen de l’Union qui n’ont pas la nationalité d’un État membre est constaté par la délivrance d’un document dénommé ‘Carte de séjour de membre de la famille d’un citoyen de l’Union’ au plus tard dans les six mois suivant le dépôt de la demande. Une attestation du dépôt de la demande de carte de séjour est délivrée immédiatement.»

9 Aux termes de l’article 16, paragraphe 1, première phrase, de la directive 2004/38, «[l]es citoyens de l’Union ayant séjourné légalement pendant une période ininterrompue de cinq ans sur le territoire de l’État membre d’accueil acquièrent le droit de séjour permanent sur son territoire». Le paragraphe 2 du même article dispose que «[l]e paragraphe 1 s’applique également aux membres de la famille qui n’ont pas la nationalité d’un État membre et qui ont séjourné légalement pendant une période
ininterrompue de cinq ans avec le citoyen de l’Union dans l’État membre d’accueil».

Le droit néerlandais

10 La loi relative aux étrangers (Vreemdelingenwet), du 23 novembre 2000 (Stb. 2000, no 495), et l’arrêté de 2000 relatif aux étrangers (Vreemdelingenbesluit 2000, Stb. 2000, no 497) ont transposé les dispositions de la directive 2004/38 dans le droit interne néerlandais.

11 L’article 1er de la loi relative aux étrangers énonce:

«Au sens de la présente loi et des dispositions adoptées sur son fondement, on entend par:

[...]

e. ressortissants communautaires:

1° les ressortissants des États membres de l’Union européenne qui, sur le fondement du traité instituant la Communauté européenne, sont autorisés à entrer et à séjourner sur le territoire d’un autre État membre;

2° les membres de la famille des personnes visées au 1° qui possèdent la nationalité d’un pays tiers et qui, au titre d’une décision prise en exécution du traité instituant la Communauté européenne, sont autorisés à entrer et à séjourner sur le territoire d’un État membre;

[…]»

12 L’article 8 de ladite loi dispose:

«L’étranger n’a le droit de séjourner de manière régulière aux Pays-Bas que:

[…]

e. en tant que ressortissant communautaire, dans la mesure où il séjourne aux Pays-Bas en vertu d’une réglementation adoptée au titre du traité instituant la Communauté européenne ou du traité sur l’Espace économique européen; […]»

13 Conformément à l’article 9, paragraphe 1, de la même loi, le Minister procure à l’étranger qui séjourne légalement en vertu du droit de l’Union, sur le territoire néerlandais, un document faisant apparaître la légalité de son séjour (ci-après le «document de séjour»).

Les faits à l’origine des litiges au principal et les questions préjudicielles

La situation de M. O.

14 M. O., qui possède la nationalité nigériane, a épousé en 2006 une ressortissante néerlandaise (ci-après la «personne de référence O»). Il a déclaré avoir vécu en Espagne entre 2007 et le mois d’avril 2010. Selon des pièces produites par la commune de Malaga (Espagne), M. O. et la personne de référence O sont inscrits à la même adresse dans cette commune depuis le 7 août 2009. M. O. a, en outre, produit un document de séjour, valable jusqu’au 20 septembre 2014, dont il ressort qu’il a séjourné en
tant que membre de la famille d’un citoyen de l’Union en Espagne.

15 Selon les déclarations de la personne de référence O, celle-ci a, durant la période comprise entre 2007 et le mois d’avril 2010, séjourné deux mois auprès de M. O., en Espagne, mais, comme elle n’a pas pu y trouver un emploi, elle est revenue aux Pays-Bas. Toutefois, la personne de référence O a, pendant cette même période, passé de façon régulière des vacances en Espagne auprès de M. O.

16 Depuis le 1er juillet 2010, M. O. est inscrit au registre néerlandais de la population comme résidant à la même adresse que la personne de référence O.

17 Par décision du 15 novembre 2010, le Minister a rejeté la demande de M. O. tendant à obtenir le document de séjour visé à l’article 9, paragraphe 1, de la loi relative aux étrangers. Par décision du 21 mars 2011, il a déclaré non fondée la réclamation formée par M. O. contre cette décision de rejet.

18 Par jugement du 7 juillet 2011, le Rechtbank ’s-Gravenhage a rejeté comme non fondé le recours introduit par M. O. contre la décision du 21 mars 2011.

19 M. O. a interjeté appel de ce jugement devant la juridiction de renvoi.

La situation de M. B.

20 M. B., de nationalité marocaine, a déclaré avoir cohabité aux Pays-Bas, à partir du mois de décembre 2002 et pendant quelques années, avec sa partenaire (ci-après la «personne de référence B») qui possède la nationalité néerlandaise.

21 Par décision du 14 octobre 2005, M. B. a été déclaré indésirable sur le territoire néerlandais à la suite d’une condamnation à une peine de prison de deux mois pour utilisation d’un faux passeport. M. B. s’est par la suite installé à Retie (Belgique) dans l’appartement que la personne de référence B avait loué durant la période allant du mois d’octobre 2005 à celui de mai 2007. La personne de référence B a déclaré y avoir séjourné chaque week-end durant cette période.

22 En avril 2007, M. B. est rentré au Maroc, parce que le séjour en Belgique lui avait été refusé à la suite de la décision du 14 octobre 2005.

23 Le 31 juillet 2007, M. B. et la personne de référence B se sont mariés. Le 30 décembre 2008, il a demandé le retrait de ladite décision le déclarant indésirable. Par décision du 16 mars 2009, le Minister a retiré cette décision.

24 Au cours du mois de juin 2009, M. B. s’est installé aux Pays-Bas auprès de la personne de référence B.

25 Par décision du 30 octobre 2009, le Staatssecretaris van Justitie (secrétaire d’État à la Justice) a rejeté la demande de M. B. tendant à obtenir le document de séjour. Par décision du 19 mars 2010, le Minister a déclaré non fondée la réclamation formée par M. B. contre cette décision de rejet.

26 Par jugement du 11 novembre 2010, le Rechtbank ’s-Gravenhage a fait droit au recours introduit par M. B. contre ladite décision du 19 mars 2010, a annulé celle-ci et a ordonné au Minister d’adopter une nouvelle décision en tenant compte des considérations énoncées dans ce jugement.

27 Le Minister a interjeté appel dudit jugement devant la juridiction de renvoi.

Les questions préjudicielles

28 MM. O. et B. étant des membres de la famille de citoyens de l’Union au sens de l’article 2, point 2, de la directive 2004/38 aux dates auxquelles ont été prises les décisions portant rejet de leurs demandes respectives de documents de séjour, la juridiction de renvoi s’interroge tout d’abord sur le point de savoir si cette directive leur accorde un droit de séjour dans l’État membre dont ces citoyens possèdent la nationalité.

29 Il est concevable, selon la juridiction de renvoi, qu’il faut entendre par les termes «se rend», au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2004/38, le fait de se rendre, sans s’y installer, dans un État membre autre que celui dont lesdits citoyens ont la nationalité et d’en revenir. Il est également concevable qu’il faut entendre par les termes «le rejoignent», au sens du même article 3, paragraphe 1, le fait de rejoindre les citoyens de l’Union dans l’État membre dont ceux-ci
possèdent la nationalité. Cependant, la juridiction de renvoi constate que d’autres dispositions de la même directive, notamment les articles 6, paragraphe 1, et 7, paragraphes 1 et 2, semblent exclure une telle interprétation dès lors qu’elles mentionnent expressément «un autre État membre» et «l’État membre d’accueil» comme étant l’État membre à l’égard duquel un droit de séjour peut être sollicité. L’arrêt du 5 mai 2011, McCarthy (C-434/09, Rec. p. I-3375), confirme que lesdits articles 6 et 7
régissent la situation juridique d’un citoyen de l’Union dans un État membre dont il ne possède pas la nationalité.

30 La juridiction de renvoi rappelle ensuite qu’il ressort des arrêts du 7 juillet 1992, Singh (C-370/90, Rec. p. I-4265), et du 11 décembre 2007, Eind (C-291/05, Rec. p. I-10719), que le conjoint d’un ressortissant d’un État membre ayant fait usage du droit de libre circulation doit, lorsque ce dernier revient dans son État membre d’origine, disposer au moins des mêmes droits d’entrée et de séjour que ceux que lui reconnaîtrait le droit de l’Union si le citoyen de l’Union concerné choisissait
d’entrer et de séjourner dans un autre État membre. Ladite juridiction émet toutefois des doutes sur le point de savoir si cette jurisprudence s’applique dans des situations telles que celles en cause au principal. Elle souligne à cet égard que, contrairement aux affaires ayant donné lieu aux arrêts précités Singh et Eind, les citoyens de l’Union concernés dans les litiges au principal ont séjourné dans l’État membre d’accueil non pas en tant que travailleurs, mais en qualité de citoyens de
l’Union au titre de l’article 21, paragraphe 1, TFUE et en tant que bénéficiaires de prestations de services au sens de l’article 56 TFUE.

31 Enfin, dans l’hypothèse où la jurisprudence issue des arrêts précités Singh et Eind devrait s’appliquer dans des situations telles que celles en cause au principal, la juridiction de renvoi demande dans quelle mesure il serait exigé que le séjour du citoyen de l’Union dans un État membre autre que celui dont il est ressortissant ait eu une durée minimale déterminée pour que, après le retour de ce citoyen dans l’État membre dont il possède la nationalité, le membre de sa famille qui a la
nationalité d’un État tiers se voie accorder un droit de séjour dans ce dernier État membre. Dans le litige concernant M. B., la juridiction de renvoi s’interroge également sur le point de savoir si le droit de séjour de ce dernier aux Pays-Bas en vertu de la directive 2004/38 est affecté par la circonstance qu’il n’a rejoint la personne de référence B dans l’État membre dont cette dernière possède la nationalité que plus de deux ans après le retour de celle-ci dans cet État.

32 Dans ces conditions, le Raad van State a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes, dont les trois premières sont formulées en des termes identiques en ce qui concerne les cas de M. O. et de M. B., seule la quatrième question étant propre au cas de ce dernier:

«1) La [directive 2004/38], en ce qui concerne les conditions du droit au séjour pour les membres de la famille d’un citoyen de l’Union qui ont la nationalité d’un État tiers, s’applique-t-elle par analogie, comme dans les arrêts [précités] Singh […] et Eind […], lorsqu’un citoyen de l’Union retourne dans l’État membre dont il possède la nationalité après avoir, dans le cadre de l’article 21, paragraphe 1, TFUE ainsi que comme bénéficiaire de prestations de services au sens de l’article 56 TFUE,
séjourné dans un autre État membre?

2) [En cas de réponse affirmative à la première question], est-il exigé que le séjour du citoyen de l’Union dans un autre État membre ait eu une durée minimale déterminée pour que, après le retour du citoyen de l’Union dans l’État membre dont il possède la nationalité, le membre de sa famille qui a la nationalité d’un État tiers se voie accorder un droit de séjour dans ce dernier État membre?

3) [En cas de réponse affirmative à la deuxième question], peut-il être satisfait à cette exigence si le séjour dans l’autre État membre n’a pas été d’un seul tenant, mais [a eu lieu] à raison d’une certaine fréquence comme à raison de séjours hebdomadaires, durant les week-ends, ou comme à raison de séjours réguliers?

4) Le droit éventuel du membre de la famille ayant la nationalité d’un État tiers à un droit de séjour tiré du droit de l’Union est-il, dans des circonstances telles que celles du litige [concernant M. B.], frappé de caducité comme conséquence de l’écoulement du temps entre le retour du citoyen de l’Union dans l’État membre dont il possède la nationalité et l’arrivée du membre de la famille ayant la nationalité d’un État tiers dans l’État membre en question?»

Sur les questions préjudicielles

Sur les première à troisième questions

33 Par ses première à troisième questions, qu’il y a lieu d’examiner ensemble, la juridiction de renvoi demande, en substance, si les dispositions de la directive 2004/38 et l’article 21, paragraphe 1, TFUE doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce qu’un État membre refuse le droit de séjour à un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille d’un citoyen de l’Union ayant la nationalité dudit État membre, lors du retour de ce citoyen dans ce même État membre, lorsque ledit
citoyen, avant son retour, a exercé son droit de libre circulation en vertu de l’article 21, paragraphe 1, TFUE, en séjournant dans un autre État membre avec le membre de sa famille concerné, en sa seule qualité de citoyen de l’Union, et, en cas de réponse positive, quelles sont les conditions d’octroi d’un tel droit de séjour.

34 À cet égard, il doit être rappelé que, en vertu de l’article 21, paragraphe 1, TFUE, «[t]out citoyen a le droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, sous réserve des limitations et conditions prévues par les traités et par les dispositions prises pour leur application».

35 En ce qui concerne la directive 2004/38, la Cour a déjà eu l’occasion de constater qu’elle vise à faciliter l’exercice du droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres qui est conféré directement aux citoyens de l’Union par l’article 21, paragraphe 1, TFUE et que cette directive a notamment pour objet de renforcer ledit droit (voir, en ce sens, arrêts du 25 juillet 2008, Metock e.a., C-127/08, Rec. p. I-6241, points 59 et 82; du
7 octobre 2010, Lassal, C-162/09, Rec. p. I-9217, point 30, ainsi que McCarthy, précité, point 28).

36 L’article 21, paragraphe 1, TFUE et les dispositions de la directive 2004/38 n’octroient aucun droit autonome aux ressortissants d’États tiers (voir, en ce sens, arrêts du 8 novembre 2012, Iida, C‑40/11, point 66, ainsi que du 8 mai 2013, Ymeraga et Ymeraga-Tafarshiku, C‑87/12, point 34). En effet, les éventuels droits conférés à de tels ressortissants par les dispositions du droit de l’Union concernant la citoyenneté de l’Union sont des droits dérivés de l’exercice de la liberté de circulation
par un citoyen de l’Union (voir arrêts Iida, précité, point 67; Ymeraga et Ymeraga-Tafarshiku, précité, point 35, ainsi que du 10 octobre 2013, Alokpa e.a., C‑86/12, point 22).

37 Or, il résulte d’une interprétation littérale, systématique et téléologique des dispositions de la directive 2004/38 que celles-ci ne permettent pas de fonder un droit de séjour dérivé en faveur des ressortissants d’États tiers, membres de la famille d’un citoyen de l’Union, dans l’État membre dont ce citoyen possède la nationalité.

38 En effet, l’article 3, paragraphe 1, de ladite directive définit comme «bénéficiaires» des droits conférés par celle-ci «tout citoyen de l’Union qui se rend ou séjourne dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité, ainsi [que les] membres de sa famille, tels que définis à l’article 2, point 2), qui l’accompagnent ou le rejoignent».

39 Ainsi, la directive 2004/38 ne prévoit un droit de séjour dérivé en faveur des ressortissants d’États tiers, membres de la famille d’un citoyen de l’Union, au sens de l’article 2, point 2, de cette directive, que lorsque ce dernier a exercé son droit de libre circulation en s’établissant dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité (voir, en ce sens, arrêts Metock e.a., précité, point 73; du 15 novembre 2011, Dereci e.a., C-256/11, Rec. p. I-11315, point 56; Iida, précité,
point 51, ainsi que du 6 décembre 2012, O. e.a., C‑356/11 et C‑357/11, point 41).

40 Les autres dispositions de la directive 2004/38, notamment ses articles 6, 7, paragraphes 1 et 2, et 16, paragraphes 1et 2, se réfèrent au droit de séjour d’un citoyen de l’Union et au droit de séjour dérivé des membres de sa famille soit dans «un autre État membre», soit dans «l’État membre d’accueil», et confirment ainsi qu’un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille d’un citoyen de l’Union, ne peut pas se prévaloir, sur le fondement de cette directive, d’un droit de séjour dérivé
dans l’État membre dont ce citoyen possède la nationalité (voir arrêts précités McCarthy, point 37, et Iida, point 64).

41 Quant à l’interprétation téléologique des dispositions de la directive 2004/38, il doit être rappelé que, s’il est vrai que celle-ci a pour but de faciliter et de renforcer l’exercice du droit fondamental et individuel de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres conféré directement à chaque citoyen de l’Union, il n’en demeure pas moins que son objet concerne, ainsi qu’il ressort de son article 1er, sous a), les conditions d’exercice de ce droit (arrêt McCarthy,
précité, point 33).

42 Dès lors que, en vertu d’un principe de droit international, un État ne saurait refuser à ses propres ressortissants le droit d’entrer sur son territoire et d’y demeurer, la directive 2004/38 a uniquement vocation à régir les conditions d’entrée et de séjour d’un citoyen de l’Union dans les États membres autres que celui dont il a la nationalité (voir arrêt McCarthy, précité, point 29).

43 Dans ces conditions, et eu égard à ce qui a été rappelé au point 36 du présent arrêt, ladite directive n’a donc pas non plus vocation à conférer un droit de séjour dérivé à un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille d’un citoyen de l’Union qui séjourne dans l’État membre dont il possède la nationalité.

44 Dès lors que des ressortissants d’État tiers se trouvant dans des situations telles que celles de MM. O. et B. ne peuvent bénéficier, sur le fondement des dispositions de la directive 2004/38, d’un droit de séjour dérivé dans l’État membre dont la personne de référence de chacun d’eux a la nationalité, il convient d’examiner si un droit de séjour dérivé peut, le cas échéant, être fondé sur l’article 21, paragraphe 1, TFUE.

45 À cet égard, il doit être rappelé que la finalité et la justification dudit droit de séjour dérivé se fondent sur la constatation selon laquelle le refus de reconnaissance d’un tel droit est de nature à porter atteinte à la liberté de circulation du citoyen de l’Union, en le dissuadant d’exercer ses droits d’entrée et de séjour dans l’État membre d’accueil (voir arrêts précités Iida, point 68; Ymeraga et Ymeraga-Tafarshiku, point 35, ainsi que Alokpa e.a., point 22).

46 C’est ainsi que la Cour a jugé que, lorsqu’un citoyen de l’Union a séjourné avec un membre de sa famille, ressortissant d’un État tiers, dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité pendant une période dépassant respectivement deux ans et demi et un an et demi, et y a exercé une activité salariée, ce ressortissant d’un État tiers doit, lors du retour de ce citoyen de l’Union dans l’État membre dont il possède la nationalité, bénéficier, en vertu du droit de l’Union, d’un droit de
séjour dérivé dans ce dernier État (voir arrêts précités Singh, point 25, et Eind, point 45). Si ce ressortissant d’un État tiers ne disposait pas d’un tel droit, le travailleur, citoyen de l’Union, pourrait être dissuadé de quitter l’État membre dont il a la nationalité afin d’exercer une activité salariée sur le territoire d’un autre État membre en raison de l’absence de certitude, pour ce travailleur, de pouvoir poursuivre, après son retour dans l’État membre d’origine, une vie de famille
éventuellement commencée, par l’effet du mariage ou du regroupement familial, dans l’État membre d’accueil (voir arrêts précités Eind, points 35 et 36, ainsi que Iida, point 70).

47 Partant, l’entrave à la sortie de l’État membre dont le travailleur a la nationalité, telle que relevée dans les arrêts précités Singh et Eind, résulte du refus d’accorder, lors du retour de ce travailleur dans l’État membre dont il est originaire, un droit de séjour dérivé aux membres de la famille dudit travailleur, ressortissants d’un État tiers, lorsque ce dernier a séjourné avec ceux-ci dans l’État membre d’accueil en vertu et dans le respect du droit de l’Union.

48 Dès lors, il convient de vérifier si la jurisprudence issue desdits arrêts a vocation à s’appliquer de manière générale aux membres de la famille de citoyens de l’Union qui, ayant fait usage des droits que leur confère l’article 21, paragraphe 1, TFUE, ont séjourné dans un État membre autre que celui dont ils sont ressortissants, avant de revenir dans l’État membre dont ils possèdent la nationalité.

49 Tel est bien le cas. En effet, l’octroi, lors du retour d’un citoyen de l’Union dans l’État membre dont il possède la nationalité, d’un droit de séjour dérivé à un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille de ce citoyen de l’Union, avec lequel ce dernier a séjourné, en sa seule qualité de citoyen de l’Union, en vertu et dans le respect du droit de l’Union dans l’État membre d’accueil, vise à éliminer le même type d’entrave à la sortie de l’État membre dont il est originaire que celle
dont il est fait état au point 47 du présent arrêt, en garantissant audit citoyen de pouvoir poursuivre, dans ce dernier État membre, la vie de famille qu’il avait développée ou consolidée dans l’État membre d’accueil.

50 En ce qui concerne les conditions d’octroi, lors du retour d’un citoyen de l’Union dans l’État membre dont il possède la nationalité, d’un droit de séjour dérivé sur le fondement de l’article 21, paragraphe 1, TFUE, à un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille de ce citoyen de l’Union, avec lequel ce dernier a séjourné, en sa seule qualité de citoyen de l’Union, dans l’État membre d’accueil, celles-ci ne devraient pas, en principe, être plus strictes que celles prévues par la
directive 2004/38 pour l’octroi d’un tel droit de séjour à un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille d’un citoyen de l’Union, qui a exercé son droit de libre circulation en s’établissant dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité. En effet, même si la directive 2004/38 ne couvre pas un tel cas de retour, elle doit être appliquée par analogie pour ce qui est des conditions de séjour du citoyen de l’Union dans un État membre autre que celui dont il possède la
nationalité, étant donné que, dans les deux cas, c’est le citoyen de l’Union qui constitue la personne de référence pour qu’un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille de ce citoyen de l’Union, puisse se voir accorder un droit de séjour dérivé.

51 Une entrave telle que celle rappelée au point 47 du présent arrêt ne se produira que lorsque le séjour du citoyen de l’Union dans l’État membre d’accueil est caractérisé par une effectivité suffisante pour lui permettre de développer ou de consolider une vie de famille dans cet État membre. Partant, l’article 21, paragraphe 1, TFUE n’exige pas que tout séjour d’un citoyen de l’Union dans l’État membre d’accueil accompagné d’un membre de sa famille, ressortissant d’un État tiers, implique
nécessairement l’octroi d’un droit de séjour dérivé à ce membre de la famille dans l’État membre dont ce citoyen a la nationalité au moment du retour de celui-ci dans cet État membre.

52 À cet égard, il doit être relevé qu’un citoyen de l’Union qui exerce les droits que lui confère l’article 6, paragraphe 1, de la directive 2004/38 ne vise pas à s’installer dans l’État membre d’accueil d’une façon qui serait propice au développement ou à la consolidation d’une vie de famille dans ce dernier État membre. Dans ces conditions, le refus d’accorder, lors du retour de ce citoyen dans l’État membre dont il est originaire, un droit de séjour dérivé aux membres de la famille dudit
citoyen, ressortissants d’un État tiers, ne dissuadera pas un tel citoyen d’exercer les droits qu’il tire dudit article 6.

53 En revanche, une entrave telle que celle rappelée au point 47 du présent arrêt risque de se produire lorsque le citoyen de l’Union vise à exercer les droits qu’il tire de l’article 7, paragraphe 1, de la directive 2004/38. En effet, un séjour dans l’État membre d’accueil en vertu et dans le respect des conditions énoncées à l’article 7, paragraphe 1, de ladite directive témoigne, en principe, de l’installation, et donc du caractère effectif du séjour, du citoyen de l’Union dans ce dernier État
membre et il est de nature à aller de pair avec le développement ou la consolidation d’une vie de famille dans cet État membre.

54 Or, lorsque, à l’occasion d’un séjour effectif du citoyen de l’Union dans l’État membre d’accueil, en vertu et dans le respect des conditions de l’article 7, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/38, une vie de famille s’est développée ou consolidée dans ce dernier État membre, l’effet utile des droits que le citoyen de l’Union concerné tire de l’article 21, paragraphe 1, TFUE exige que la vie de famille que ce citoyen a menée dans l’État membre d’accueil puisse être poursuivie lors de son
retour dans l’État membre dont il possède la nationalité, par l’octroi d’un droit de séjour dérivé au membre de la famille concerné, ressortissant d’un État tiers. En effet, en l’absence d’un tel droit de séjour dérivé, ce citoyen de l’Union serait dissuadé de quitter l’État membre dont il a la nationalité afin d’exercer son droit de séjour, en vertu de l’article 21, paragraphe 1, TFUE, dans un autre État membre, en raison du fait qu’il n’a pas la certitude de pouvoir poursuivre dans l’État
membre dont il est originaire une vie de famille avec ses proches parents ainsi développée ou consolidée dans l’État membre d’accueil (voir, en ce sens, arrêts précités Eind, points 35 et 36, ainsi que Iida, point 70).

55 A fortiori, l’effet utile de l’article 21, paragraphe 1, TFUE requiert que le citoyen de l’Union puisse poursuivre, lors de son retour dans l’État membre dont il a la nationalité, la vie de famille qu’il a menée dans l’État membre d’accueil, si ce citoyen et le membre de sa famille concerné, ressortissant d’un État tiers, ont acquis, dans ce dernier État membre, un droit de séjour permanent en vertu, respectivement, de l’article 16, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/38.

56 Partant, c’est le séjour effectif dans l’État membre d’accueil du citoyen de l’Union et du membre de sa famille, ressortissant d’un État tiers, en vertu et dans le respect des conditions énoncées, respectivement, aux paragraphes 1 et 2 de l’article 7 ou de l’article 16 de la directive 2004/38 qui ouvre, au retour de ce citoyen de l’Union dans l’État membre dont il a la nationalité, un droit de séjour dérivé, sur le fondement de l’article 21, paragraphe 1, TFUE, au ressortissant d’un État tiers
avec lequel ledit citoyen a mené une vie de famille dans l’État membre d’accueil.

57 Il appartient à la juridiction de renvoi de vérifier si les personnes de référence O et B, qui sont des citoyens de l’Union, se sont installées et, partant, ont séjourné de manière effective, dans l’État membre d’accueil et si, en raison de la vie de famille menée à l’occasion dudit séjour effectif, MM. O. et B. ont bénéficié d’un droit de séjour dérivé dans l’État membre d’accueil en vertu et dans le respect des articles 7, paragraphe 2, ou 16, paragraphe 2, de la directive 2004/38.

58 Il convient d’ajouter que l’application des règles de droit de l’Union ne saurait être étendue jusqu’à couvrir des pratiques abusives (voir, en ce sens, arrêts du 14 décembre 2000, Emsland-Stärke, C-110/99, Rec. p. I-11569, point 51, et du 22 décembre 2010, Bozkurt, C-303/08, Rec. p. I-13445, point 47), sachant que la preuve d’une telle pratique nécessite, d’une part, un ensemble de circonstances objectives d’où il résulte que, malgré un respect formel des conditions prévues par la réglementation
de l’Union, l’objectif poursuivi par cette réglementation n’a pas été atteint et, d’autre part, un élément subjectif consistant en la volonté d’obtenir un avantage résultant de la réglementation de l’Union en créant artificiellement les conditions requises pour son obtention (arrêt du 16 octobre 2012, Hongrie/Slovaquie, C‑364/10, point 58).

59 Quant au point de savoir si l’effet cumulatif de différents séjours de courte durée dans l’État membre d’accueil est susceptible d’ouvrir un droit de séjour dérivé à un membre de la famille du citoyen de l’Union, ressortissant d’un État tiers, lors du retour de ce citoyen dans l’État membre dont il a la nationalité, il doit être rappelé que seul un séjour satisfaisant aux conditions énoncées aux paragraphes 1 et 2 de l’article 7 ou de l’article 16 de la directive 2004/38 est de nature à ouvrir un
tel droit de séjour. À cet égard, des séjours de courte durée, tels que des week-ends ou des vacances passés dans un État membre autre que celui dont ce citoyen possède la nationalité, même considérés ensemble, relèvent de l’article 6 de la directive 2004/38 et ne satisfont pas auxdites conditions.

60 S’agissant de la situation de M. O., qui, ainsi qu’il ressort de la décision de renvoi, détient une carte de séjour au titre de l’article 10 de la directive 2004/38 en tant que membre de la famille d’un citoyen de l’Union, il convient de rappeler que le droit de l’Union n’impose pas aux autorités de l’État membre dont le citoyen de l’Union concerné possède la nationalité de reconnaître au ressortissant d’un État tiers, membre de la famille de ce citoyen, un droit de séjour dérivé en raison du
seul fait que, dans l’État membre d’accueil, ce ressortissant détenait une telle carte de séjour en cours de validité (voir arrêt Eind, précité, point 26). En effet, une carte de séjour délivrée en vertu de l’article 10 de la directive 2004/38 a un caractère déclaratif et non pas constitutif de droits (voir arrêt du 21 juillet 2011, Dias, C-325/09, Rec. p. I-6387, point 49).

61 Au regard de l’ensemble des considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre aux première à troisième questions que l’article 21, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens que, dans une situation dans laquelle un citoyen de l’Union a développé ou consolidé une vie de famille avec un ressortissant d’un État tiers à l’occasion d’un séjour effectif, en vertu et dans le respect des conditions énoncées aux articles 7, paragraphes 1 et 2, ou 16, paragraphes 1 et 2, de la directive
2004/38, dans un État membre autre que celui dont il possède la nationalité, les dispositions de cette même directive s’appliquent par analogie lorsque ledit citoyen de l’Union retourne, avec le membre de sa famille concerné, dans son État membre d’origine. Dès lors, les conditions d’octroi d’un droit de séjour dérivé au ressortissant d’un État tiers, membre de la famille de ce citoyen de l’Union, dans l’État membre d’origine de ce dernier, ne devraient pas, en principe, être plus strictes que
celles prévues par ladite directive pour l’octroi d’un droit de séjour dérivé à un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille d’un citoyen de l’Union qui a exercé son droit de libre circulation en s’établissant dans un État membre autre que celui dont il a la nationalité.

Sur la quatrième question

62 Ainsi qu’il ressort des points 21 à 23 du présent arrêt, M. B. a acquis la qualité de membre de la famille, au sens de l’article 2, point 2, de la directive 2004/38, d’un citoyen de l’Union à un moment postérieur au séjour de la personne de référence B dans l’État membre d’accueil.

63 Or, un ressortissant d’un État tiers, qui n’a pas eu, à tout le moins pendant une partie de son séjour dans l’État membre d’accueil, la qualité de membre de la famille, au sens de l’article 2, point 2, de la directive 2004/38, n’a pas pu bénéficier dans cet État membre d’un droit de séjour dérivé au titre des articles 7, paragraphe 2, ou 16, paragraphe 2, de la directive 2004/38. Dans ces conditions, ce ressortissant d’un État tiers ne peut pas non plus se fonder sur l’article 21, paragraphe 1,
TFUE pour obtenir un droit de séjour dérivé lors du retour du citoyen de l’Union concerné dans l’État membre dont il possède la nationalité.

64 Partant, il n’y a pas lieu de répondre à la quatrième question.

Sur les dépens

65 La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

  Par ces motifs, la Cour (grande chambre) dit pour droit:

L’article 21, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens que, dans une situation dans laquelle un citoyen de l’Union a développé ou consolidé une vie de famille avec un ressortissant d’un État tiers à l’occasion d’un séjour effectif, en vertu et dans le respect des conditions énoncées aux articles 7, paragraphes 1 et 2, ou 16, paragraphes 1 et 2, de la directive 2004/38/CE du Parlement européen et du Conseil, du 29 avril 2004, relative au droit des citoyens de l’Union et des membres de
  leurs familles de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres, modifiant le règlement (CEE) no 1612/68 et abrogeant les directives 64/221/CEE, 68/360/CEE, 72/194/CEE, 73/148/CEE, 75/34/CEE, 75/35/CEE, 90/364/CEE, 90/365/CEE et 93/96/CEE, dans un État membre autre que celui dont il possède la nationalité, les dispositions de cette même directive s’appliquent par analogie lorsque ledit citoyen de l’Union retourne, avec le membre de sa famille concerné, dans son État membre
d’origine. Dès lors, les conditions d’octroi d’un droit de séjour dérivé au ressortissant d’un État tiers, membre de la famille de ce citoyen de l’Union, dans l’État membre d’origine de ce dernier, ne devraient pas, en principe, être plus strictes que celles prévues par ladite directive pour l’octroi d’un droit de séjour dérivé à un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille d’un citoyen de l’Union, qui a exercé son droit de libre circulation en s’établissant dans un État membre autre que
celui dont il a la nationalité.

  Signatures

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( *1 ) Langue de procédure: le néerlandais.


Synthèse
Formation : Grande chambre
Numéro d'arrêt : C‑456/12
Date de la décision : 12/03/2014
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle, introduite par le Raad van State (Pays-Bas).

Directive 2004/38/CE – Article 21, paragraphe 1, TFUE – Droit de circuler et de séjourner librement sur le territoire des États membres – Bénéficiaires – Droit de séjour d’un ressortissant d’un État tiers, membre de la famille d’un citoyen de l’Union, dans l’État membre dont ce citoyen possède la nationalité – Retour du citoyen de l’Union dans cet État membre après des séjours de courte durée dans un autre État membre.

Citoyenneté de l'Union

Droit d'entrée et de séjour


Parties
Demandeurs : O.
Défendeurs : Minister voor Immigratie, Integratie en Asiel et Minister voor Immigratie, Integratie en Asiel

Composition du Tribunal
Avocat général : Sharpston
Rapporteur ?: Lenaerts

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2014:135

Source

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