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12/12/2013 | CJUE | N°C-70/13

CJUE | CJUE, Ordonnance de la Cour, Getty Images (US) Inc. contre Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI)., 12/12/2013, C-70/13


ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

12 décembre 2013 (*)

«Pourvoi – Marque communautaire – Règlement (CE) n° 207/2009 ‒ Article 7, paragraphe 1, sous b) et c) ‒ Motifs absolus de refus ‒ Absence de caractère distinctif ‒ Caractère descriptif ‒ Marque verbale PHOTOS.COM – Refus partiel d’enregistrement ‒ Égalité de traitement ‒ Obligation pour l’OHMI de tenir compte de sa pratique décisionnelle antérieure ‒ Pourvoi en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé»

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ORDONNANCE DE LA COUR (huitième chambre)

12 décembre 2013 (*)

«Pourvoi – Marque communautaire – Règlement (CE) n° 207/2009 ‒ Article 7, paragraphe 1, sous b) et c) ‒ Motifs absolus de refus ‒ Absence de caractère distinctif ‒ Caractère descriptif ‒ Marque verbale PHOTOS.COM – Refus partiel d’enregistrement ‒ Égalité de traitement ‒ Obligation pour l’OHMI de tenir compte de sa pratique décisionnelle antérieure ‒ Pourvoi en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé»

Dans l’affaire C‑70/13 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 8 février 2013,

Getty Images (US) Inc., établie à New York (États-Unis), représentée par M^e P. G. Olson, advokat,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant:

Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI), représenté par M^me V. Melgar, en qualité d’agent,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (huitième chambre),

composée de M. C. G. Fernlund, président de chambre, M^me C. Toader et M. E. Jarašiūnas (rapporteur), juges,

avocat général: M^me J. Kokott,

greffier: M. A. Calot Escobar,

vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,

rend la présente

Ordonnance

1 Par son pourvoi, Getty Images (US) Inc. (ci-après «Getty Images») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 21 novembre 2012, Getty Images/OHMI (PHOTOS.COM) (T‑338/11, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision de la deuxième chambre de recours de l’Office de l’harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI) du 6 avril 2011 (affaire R 1831/2010-2), concernant une demande
d’enregistrement du signe verbal «PHOTOS.COM» en tant que marque communautaire (ci-après la «décision litigieuse»).

Le cadre juridique

2 Sous l’intitulé «Motifs absolus de refus», l’article 7 du règlement (CE) n° 207/2009 du Conseil, du 26 février 2009, sur la marque communautaire (JO L 78, p. 1), dispose:

«1. Sont refusés à l’enregistrement:

[...]

b) les marques qui sont dépourvues de caractère distinctif;

c) les marques qui sont composées exclusivement de signes ou d’indications pouvant servir, dans le commerce, pour désigner l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique ou l’époque de la production du produit ou de la prestation du service, ou d’autres caractéristiques de ceux-ci;

[...]

2. Le paragraphe 1 est applicable même si les motifs de refus n’existent que dans une partie de la Communauté.

3. Le paragraphe 1, points b), c) et d) n’est pas applicable si la marque a acquis pour les produits ou services pour lesquels est demandé l’enregistrement un caractère distinctif après l’usage qui en a été fait.»

Les faits à l’origine du litige

3 Le 15 septembre 2009, Getty Images a présenté à l’OHMI une demande d’enregistrement, en tant que marque communautaire, du signe verbal «PHOTOS.COM».

4 Les produits et les services pour lesquels l’enregistrement a été demandé relèvent, après la limitation intervenue au cours de la procédure devant l’OHMI, des classes 9, 42 et 45 au sens de l’arrangement de Nice concernant la classification internationale des produits et des services aux fins de l’enregistrement des marques, du 15 juin 1957, tel que révisé et modifié, et correspondent, pour chacune de ces classes, à la description suivante:

– classe 9: «Logiciels informatiques; logiciels pour la recherche de données; logiciels informatiques en matière de, téléchargeables via, ou fournis à partir de l’internet; images téléchargeables; représentations physiques d’images stockées électroniquement pour manipulation électronique, transfert électronique et/ou amélioration électronique; tableaux d’affichage électroniques; magazines, bulletins, journaux, brochures, publications hebdomadaires et autres publications de textes
téléchargeables via l’internet, un intranet, un extranet ou des serveurs de courrier; programmes de jeux informatiques téléchargeables à partir de l’internet; cédéroms; DVD; vidéos; bandes; cassettes; accessoires pour ordinateurs; économiseurs d’écran; logiciels informatiques; programmes informatiques pour avoir accès et entrer en interaction avec des réseaux informatiques, des systèmes informatiques en ligne, des bases de données, l’internet, intranet, extranet, des réseaux locaux (LAN), des
serveurs web, des serveurs de commerce électronique et des serveurs de courrier électronique; données exploitables par une machine; publications électroniques (téléchargeables) fournies en ligne à partir de bases de données ou de l’internet»;

– classe 42: «Installation et maintenance de logiciels; services d’informations concernant tous les services précités; tous les services précités étant également fournis en ligne à partir d’une base de données ou à partir de l’internet»;

– classe 45: «Concession de licences d’images et de séquences».

5 Par une décision du 2 août 2010, l’examinateur a rejeté ladite demande d’enregistrement sur le fondement de l’article 7, paragraphes 1, sous b) et c), et 2, du règlement n° 207/2009.

6 Le 23 septembre 2010, la requérante a formé un recours auprès de l’OHMI contre cette décision. Par la décision litigieuse, la deuxième chambre de recours de l’OHMI (ci-après la «chambre de recours») a rejeté ce recours, au motif que, pour l’ensemble des produits et des services revendiqués, le signe verbal «PHOTOS.COM» était descriptif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, était dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous
b), de ce règlement et qu’il n’avait pas été établi par Getty Images que ce signe avait, en particulier concernant la partie anglophone de l’Union européenne, acquis un caractère distinctif par l’usage qui en avait été fait au sens de l’article 7, paragraphe 3, dudit règlement.

La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

7 Par une requête déposée au greffe du Tribunal le 30 juin 2011, Getty Images a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse. À l’appui de ce recours, elle soulevait quatre moyens, tirés de la violation, respectivement, de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, des principes d’égalité de traitement et de protection de la confiance légitime ainsi que de l’article 7, paragraphe 3, dudit
règlement.

8 Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté ce recours comme étant non fondé.

9 Aux points 15 à 35 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné, pour le rejeter, le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. À cet égard, il a notamment considéré que le signe en cause est constitué de deux composants dépourvus de caractère distinctif intrinsèque et que la combinaison de ces éléments est également dépourvue de caractère distinctif du point de vue du public pertinent. Il a, en outre, relevé que ce signe sera perçu d’emblée par
le public pertinent comme étant un nom de domaine et non comme désignant l’origine commerciale des produits et des services pour lesquels son enregistrement est demandé.

10 Aux points 66 et 67 de cet arrêt, le Tribunal a jugé qu’il n’y avait pas lieu d’examiner le moyen tiré de la violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009, au motif qu’il avait déjà conclu que la chambre de recours était fondée à considérer que le signe en cause était dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, qu’il n’avait pas été démontré qu’un tel caractère distinctif avait été acquis par l’usage qui avait
été fait de ce signe, au sens du paragraphe 3 de cet article 7, et qu’il suffit que l’un des motifs absolus de refus prévus par ledit règlement s’applique pour qu’un signe ne puisse être enregistré en tant que marque communautaire.

11 Aux points 69 et 70 dudit arrêt, le Tribunal a écarté le moyen tiré de la violation des principes d’égalité de traitement et de protection de la confiance légitime. Il a jugé que Getty Images ne saurait utilement invoquer, à l’appui de prétendues violations de ces principes, des décisions antérieures de l’OHMI, dès lors qu’il avait été conclu, dans le cadre du deuxième moyen soulevé devant lui, que la chambre de recours était fondée à considérer que la demande d’enregistrement en cause se
heurtait au motif absolu de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009. À cet égard, le Tribunal s’est appuyé sur l’arrêt du 10 mars 2011, Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI (C‑51/10 P, Rec. p. I‑1541), en considérant, en substance, qu’il ressort de cet arrêt que l’application des principes d’égalité de traitement et de bonne administration doit être conciliée avec le respect du principe de légalité et qu’un examen strict et complet doit avoir lieu dans chaque cas
concret.

Les conclusions des parties devant la Cour

12 Getty Images conclut à ce que la Cour:

– annule l’arrêt attaqué;

– annule la décision litigieuse, et

– condamne l’OHMI aux dépens.

13 L’OHMI conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de Getty Images aux dépens.

Sur le pourvoi

14 En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur proposition du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter totalement ou partiellement ce pourvoi par voie d’ordonnance motivée.

15 Il y a lieu de faire application de cette disposition en l’espèce.

16 À l’appui de son pourvoi, Getty Images soulève trois moyens, tirés d’une violation, respectivement, de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, de l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce règlement ainsi que des principes d’égalité de traitement et de protection de la confiance légitime.

Sur le premier moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009

Argumentation des parties

17 Getty Images rappelle qu’un caractère distinctif minimal suffit pour que le motif absolu de refus d’enregistrement prévu à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 ne soit pas applicable. Le fait que deux marques verbales PHOTOS.COM aient déjà été enregistrées par l’OHMI pour des produits et des services identiques ou similaires créerait une forte présomption que ce caractère distinctif minimal est satisfait en l’espèce. Getty Images souligne en outre que l’intérêt public
visé à cette disposition est la protection du consommateur, en garantissant à ce dernier de pouvoir distinguer les produits et les services d’un opérateur de ceux des autres opérateurs. Or, étant donné que chaque nom de domaine est unique et qu’il indique, comme le Tribunal l’a relevé au point 22 de l’arrêt attaqué, le lieu où les produits et les services concernés peuvent être obtenus, il permettrait au consommateur de distinguer ces produits et ces services de ceux des concurrents dudit opérateur
et, ainsi, la protection du consommateur serait assurée.

18 Par ailleurs, le Tribunal aurait omis de faire application du principe, qu’il rappelle pourtant dans l’arrêt attaqué, selon lequel la seule circonstance que chacun des éléments composant une marque, pris séparément, est dépourvu de caractère distinctif n’exclut pas que la combinaison qu’ils forment puisse présenter un caractère distinctif. En effet, le Tribunal n’aurait pas examiné le signe en cause comme formant un tout. Le fait qu’il s’agisse d’un nom de domaine signifierait que les deux
éléments qui le composent représentent plus que la somme de ceux-ci, en ce que ce nom de domaine confère à ce signe «une dimension en ligne». Le Tribunal aurait donc commis une erreur de droit en jugeant, au point 28 de l’arrêt attaqué, que le public pertinent ne sera pas en mesure de distinguer les produits et les services pour lesquels l’enregistrement en cause est demandé de ceux ayant une origine commerciale différente.

19 L’OHMI fait valoir que le présent moyen est manifestement irrecevable, celui-ci visant à mettre en cause des appréciations de nature factuelle effectuées par le Tribunal. Il serait en tout état de cause manifestement non fondé. En particulier, le Tribunal aurait bien procédé à une appréciation globale de la marque en cause, ainsi qu’il ressortirait des points 25 et 26 de l’arrêt attaqué.

Appréciation de la Cour

20 En vertu des articles 256, paragraphe 1, TFUE et 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, le pourvoi est limité aux questions de droit. Le Tribunal est seul compétent pour constater et apprécier les faits pertinents ainsi que pour apprécier les éléments de preuve. L’appréciation de ces faits et éléments de preuve ne constitue donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour dans le cadre
d’un pourvoi (voir, notamment, arrêts du 7 octobre 2004, Mag Instrument/OHMI, C‑136/02 P, Rec. p. I‑9165, point 39, et du 2 septembre 2010, Calvin Klein Trademark Trust/OHMI, C‑254/09 P, Rec. p. I‑7989, point 49).

21 En outre, il ressort des articles 256, paragraphe 1, second alinéa, TFUE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour ainsi que 169, paragraphe 2, du règlement de procédure qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (voir, notamment, arrêt du 4 juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C-352/98 P, Rec. p. I-5291, point 34, et ordonnance du
21 mars 2013, Mizuno/OHMI, C-341/12 P, point 27).

22 En l’espèce, force est de constater que, si Getty Images, par ses arguments énoncés au point 17 du présent arrêt ainsi que par son argument selon lequel le fait que le signe en cause constitue un nom de domaine conférerait à celui-ci un caractère distinctif, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, formule des observations d’ordre général relatives à la portée de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, à l’objectif que cette disposition
poursuivrait et aux conséquences qu’il conviendrait d’en tirer au regard des faits de l’espèce, elle n’identifie pas de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt attaqué et vise tout au plus à amener la Cour à substituer sa propre appréciation des faits à celle qui a été effectuée par le Tribunal dans le cadre de son examen du caractère distinctif du signe en cause, sans qu’une quelconque dénaturation des faits ou des éléments de preuve soit alléguée. Cette argumentation est, dès lors,
manifestement irrecevable.

23 Au surplus, il importe de relever que, ainsi qu’il ressort notamment du point 13 de l’arrêt attaqué, Getty Images ne s’est pas prévalue devant le Tribunal, dans le cadre de son moyen tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, du fait que deux marques identiques au signe en cause avaient déjà été enregistrées pour des produits et des services en partie identiques et en partie similaires. Cet argument pris de la prétendue pertinence de cette
circonstance aux fins de l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, dont le Tribunal aurait à tort omis de tenir compte, est dès lors, en tout état de cause, manifestement irrecevable (voir, en ce sens, ordonnance du 28 septembre 2006, El Corte Inglés/OHMI et Emilio Pucci, C‑104/05 P, point 40 et jurisprudence citée).

24 Par ailleurs, dans la mesure où, par le présent moyen, Getty Images fait grief au Tribunal d’avoir, en violation du droit, omis d’examiner le signe en cause dans son ensemble afin d’apprécier son caractère distinctif éventuel, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, il convient de rappeler que, certes, s’agissant d’une marque composée de plusieurs mots ou éléments, un éventuel caractère distinctif peut être examiné, en partie, pour chacun de ses termes ou de
ses éléments, pris séparément, mais doit, en tout état de cause, dépendre d’un examen de l’ensemble qu’ils composent. En effet, la seule circonstance que chacun de ces termes ou éléments, pris séparément, est dépourvu de caractère distinctif, n’exclut pas que la combinaison qu’ils forment puisse présenter un tel caractère (voir, notamment, arrêts du 16 septembre 2004, SAT.1/OHMI, C‑329/02 P, Rec. p. I‑8317, point 28, et du 15 septembre 2005, BioID/OHMI, C‑37/03 P, Rec. p. I‑7975, point 29).

25 Toutefois, aux points 24 à 28 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé ce qui suit:

«24 Il convient [...] de procéder à un examen d’ensemble du signe verbal PHOTOS.COM. En effet, selon une jurisprudence constante, s’agissant de marques composées de mots et d’un signe typographique, comme celle faisant l’objet du présent litige, un éventuel caractère distinctif peut être examiné, en partie, pour chacun des termes ou de ses éléments, pris séparément, mais doit, en tout état de cause, dépendre d’un examen de l’ensemble qu’ils composent. La seule circonstance que chacun de ces
éléments, pris séparément, est dépourvu de caractère distinctif, n’exclut pas que la combinaison qu’ils forment puisse présenter un caractère distinctif (voir arrêt [du Tribunal du 12 décembre 2007, DeTeMedien/OHMI (suchen.de), T‑117/06], point 31, et la jurisprudence citée).

25 Les parties s’accordent sur le fait que le signe verbal PHOTOS.COM, considéré dans son ensemble, reproduit la structure caractéristique d’un nom de domaine de deuxième niveau, à savoir ‘photos’, et d’un domaine de premier niveau, à savoir ‘com’, séparés d’un point. Ainsi que la chambre de recours l’a souligné, ledit signe ne possède pas de caractéristiques, notamment graphiques, particulières, dès lors que l’utilisation d’un point est usuelle pour séparer le domaine de deuxième niveau du
domaine de premier niveau.

26 Par ailleurs, le fait d’accoler l’élément ‘.com’ au terme descriptif et dépourvu de caractère distinctif ‘photos’ n’a pas pour effet de rendre le signe distinctif dans son ensemble. En effet, ainsi que l’a relevé la chambre de recours, dans un nom de domaine, la partie distinctive n’est pas le domaine de premier niveau, qui est générique, mais le domaine de deuxième niveau, lequel, en l’occurrence, est dépourvu de caractère distinctif.

27 Force est de constater, en outre, que, même si l’enregistrement d’un signe en tant que marque communautaire n’est pas subordonné à la constatation d’un certain niveau de créativité ou d’imagination linguistique ou artistique de la part du titulaire de la marque, il n’en demeure pas moins que, ainsi que la chambre de recours l’a constaté, aucun élément additionnel ne permet de considérer que la combinaison formée par les éléments courants et usuels ‘photos’ et ‘.com’ serait inhabituelle,
fantaisiste ou pourrait avoir sa propre signification, notamment dans la perception que le public pertinent peut avoir des produits et des services concernés (voir, en ce sens, arrêt [DeTeMedien/OHMI], précité, point 32).

28 Partant, à défaut de caractéristiques particulières propres au signe en cause, la perception de ce dernier par le public pertinent ne différera pas de celle qui résulte de la combinaison des deux mots qui le composent. Il s’ensuit que, ainsi que la chambre de recours l’a relevé à bon droit, le public pertinent ne sera pas en mesure de distinguer les produits et les services désignés par la demande de marque de ceux ayant une origine commerciale différente, ledit signe étant, par voie de
conséquence, dépourvu de caractère distinctif.»

26 Ainsi, il ressort clairement de ces considérations que le Tribunal a bien examiné l’éventuel caractère distinctif du signe en cause au regard de celui-ci pris dans son ensemble, conformément à la jurisprudence rappelée au point 24 du présent arrêt.

27 Par conséquent, dans la mesure où le présent moyen vise à établir une erreur de droit qui résulterait de la non-prise en compte par le Tribunal du signe en cause dans son ensemble dans le cadre de l’appréciation de son caractère distinctif éventuel, ce moyen manque en fait et est, dès lors, manifestement non fondé.

28 Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être rejeté dans son ensemble comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.

Sur le deuxième moyen, tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009

Argumentation des parties

29 Getty Images fait observer que le Tribunal, ayant jugé que le signe dont l’enregistrement est demandé était dépourvu de caractère distinctif au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009, n’a pas examiné le moyen soulevé devant lui, qui était tiré d’une violation de l’article 7, paragraphe 1, sous c), de ce règlement. Toutefois, ledit signe ne serait pas descriptif des produits et des services en cause d’une manière contraire à cette dernière disposition, celui-ci
étant un nom de domaine qui ne peut avoir qu’un seul propriétaire, qui ne peut être librement utilisé par tous et que les concurrents de Getty Images ne voudront pas utiliser.

30 L’OHMI fait valoir que ce moyen est manifestement irrecevable, le Tribunal ne s’étant pas prononcé sur l’application de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. En toute hypothèse, l’existence d’un seul motif absolu de refus suffirait pour qu’un signe ne puisse pas être enregistré en tant que marque communautaire.

Appréciation de la Cour

31 Par ce moyen, Getty Images soutient, en substance, que le Tribunal aurait dû conclure à l’absence de caractère descriptif du signe en cause, au sens de l’article 7, paragraphe 1, sous c), du règlement n° 207/2009. À cet égard, il y a lieu de rappeler que, ainsi qu’il ressort du libellé de l’article 7, paragraphe 1, du règlement n° 207/2009, il suffit qu’un des motifs absolus de refus énumérés à cette disposition s’applique pour que le signe en cause ne puisse être enregistré comme marque
communautaire (ordonnance du 17 janvier 2013, Abbott Laboratories/OHMI, C‑21/12 P, point 76; voir également, par analogie, arrêt du 19 septembre 2002, DKV/OHMI, C‑104/00 P, Rec. p. I‑7561, point 29).

32 L’analyse du premier moyen du pourvoi n’ayant pas révélé que le Tribunal aurait commis une erreur de droit en constatant l’existence d’un motif absolu de refus fondé sur l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et Getty Images ne contestant pas la conclusion figurant au point 64 de l’arrêt attaqué, selon laquelle, en substance, il n’avait pas été démontré que le signe en cause avait acquis un caractère distinctif par l’usage qui en avait été fait, au sens de l’article 7,
paragraphe 3, du règlement n° 207/2009, le Tribunal a pu, sans commettre d’erreur de droit, considérer qu’il n’avait pas à apprécier l’éventuelle absence de caractère descriptif du signe en cause.

33 Le présent moyen doit, par conséquent, être écarté comme étant manifestement non fondé.

Sur le troisième moyen, tiré d’une violation des principes d’égalité de traitement et de protection de la confiance légitime

Argumentation des parties

34 Getty Images fait valoir que, au point 69 de l’arrêt attaqué, le Tribunal, en attachant trop d’importance à la nécessité d’une évaluation individualisée des demandes d’enregistrement de marques communautaires, n’a pas correctement mis en balance les principes d’égalité de traitement et de bonne administration, d’une part, et le principe de légalité, d’autre part. À cet égard, Getty Images souligne qu’elle est déjà titulaire de deux marques verbales identiques au signe verbal «PHOTOS.COM»
dont l’enregistrement est demandé en l’espèce, qui ont été enregistrées par l’OHMI pour des produits et des services identiques ou semblables à ceux en cause. Or, l’OHMI n’aurait pas expliqué les raisons pour lesquelles la marque en cause a été traitée différemment des marques enregistrées précédemment. En outre, en l’espèce, l’examen des marques antérieures n’aurait pas été entaché d’erreur. La conclusion du Tribunal selon laquelle il s’agirait, éventuellement, d’un cas d’erreur antérieure serait
donc erronée.

35 En outre, l’arrêt du Tribunal du 27 février 2002, Streamserve/OHMI (STREAMSERVE) (T‑106/00, Rec. p. II‑723), auquel le Tribunal n’aurait pas fait référence dans l’arrêt attaqué, mais sur lequel la chambre de recours se serait appuyée afin d’écarter l’argument que Getty Images tirait du fait que deux marques identiques à la marque en question avaient été enregistrées par l’OHMI pour des produits et des services identiques ou semblables à ceux en cause, n’aurait pas été applicable à la
présente affaire, les faits étant différents. Ce serait donc à tort que la chambre de recours aurait affirmé que seule l’existence d’une erreur antérieure expliquait la différence de traitement de marques similaires ou identiques. Cet arrêt devrait être reconsidéré et, au lieu d’appliquer un principe de légalité en vertu duquel les enregistrements antérieurs sont réputés erronés, il conviendrait plutôt de présumer que les marques antérieures ont été régulièrement enregistrées.

36 Par ailleurs, il y aurait lieu de distinguer les faits de la présente affaire de ceux de l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité. En l’espèce, les marques antérieures enregistrées et le signe en cause étant identiques et les produits ainsi que les services concernés étant en partie identiques et en partie très similaires, la nécessité pour l’OHMI de traiter chaque demande d’enregistrement sur une base individualisée serait réduite et il conviendrait
donc d’accorder aux principes de non-discrimination et d’égalité de traitement un poids plus important. En outre, dans un État de droit, il importerait que le traitement des demandes d’enregistrement de marques soit prévisible et que l’OHMI ne se voie pas conférer un trop grand pouvoir d’appréciation qui lui permette de traiter différemment des marques identiques.

37 L’OHMI estime que ce moyen est manifestement irrecevable, celui-ci visant à remettre en cause des appréciations de nature factuelle. Il serait, en tout état de cause, manifestement non fondé, le Tribunal n’ayant commis aucune erreur de droit au regard de la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle les décisions déjà adoptées dans le cadre d’une affaire identique ou similaire ne sont pas contraignantes pour l’OHMI pour des affaires similaires.

Appréciation de la Cour

38 En premier lieu, il convient de rappeler que les arguments d’un pourvoi qui critiquent non pas l’arrêt rendu par le Tribunal à la suite d’une demande d’annulation d’une décision, mais la décision dont l’annulation a été demandée devant le Tribunal ne sont pas recevables (ordonnances du 13 janvier 2012, Evropaïki Dynamiki/AEE, C‑462/10 P, point 36, et Abbott Laboratories/OHMI, précitée, point 86).

39 Dès lors, dans la mesure où le présent moyen est dirigé contre des considérations qui auraient été émises ou omises par la chambre de recours dans la décision litigieuse, ou de manière plus générale par l’OHMI, et qui ne figurent pas dans l’arrêt attaqué, il doit être rejeté comme étant manifestement irrecevable.

40 En deuxième lieu, il convient de relever que, au point 69 de l’arrêt attaqué, le Tribunal s’est limité à rappeler la jurisprudence de la Cour issue de l’arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, en indiquant notamment à cet égard que, selon cet arrêt, «la personne qui demande l’enregistrement d’un signe en tant que marque ne saurait invoquer à son profit une illégalité commise en faveur d’autrui afin d’obtenir une décision identique». Le Tribunal ne s’est toutefois pas prononcé sur
le caractère erroné ou non des décisions antérieures de l’OHMI, dont Getty Images se prévalait devant lui aux fins d’établir l’existence d’une violation des principes d’égalité de traitement et de protection de la confiance légitime. Par conséquent, l’argument selon lequel le Tribunal aurait commis une erreur de droit en concluant que l’examen des marques antérieures ayant donné lieu auxdites décisions était entaché d’erreur manque en fait. Partant, il est manifestement non fondé.

41 En troisième lieu, il convient de rappeler que l’OHMI est tenu d’exercer ses compétences en conformité avec les principes généraux du droit de l’Union, tels que le principe d’égalité de traitement et le principe de bonne administration (arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, point 73).

42 Eu égard à ces deux derniers principes, l’OHMI doit, dans le cadre de l’instruction d’une demande d’enregistrement d’une marque communautaire, prendre en considération les décisions déjà prises sur des demandes similaires et s’interroger avec une attention particulière sur le point de savoir s’il y a lieu ou non de décider dans le même sens (arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, point 74 et jurisprudence citée).

43 Cela étant, les principes d’égalité de traitement et de bonne administration doivent se concilier avec le respect de la légalité. Par conséquent, la personne qui demande l’enregistrement d’un signe en tant que marque ne saurait invoquer à son profit une illégalité éventuelle commise en faveur d’autrui, afin d’obtenir une décision identique (arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, points 75 et 76 ainsi que jurisprudence citée).

44 Au demeurant, pour des raisons de sécurité juridique et, précisément, de bonne administration, l’examen de toute demande d’enregistrement doit être strict et complet afin d’éviter que des marques ne soient enregistrées de manière indue. Cet examen doit avoir lieu dans chaque cas concret. En effet, l’enregistrement d’un signe en tant que marque dépend de critères spécifiques, applicables dans le cadre des circonstances factuelles du cas d’espèce, destinés à vérifier si le signe en cause ne
relève pas d’un motif de refus (arrêt Agencja Wydawnicza Technopol/OHMI, précité, point 77 et jurisprudence citée).

45 En outre, il ressort de la jurisprudence de la Cour que les considérations rappelées aux points 41 à 44 du présent arrêt sont valables même si le signe dont l’enregistrement en tant que marque communautaire est demandé est composé de manière identique à une marque dont l’OHMI a déjà accepté l’enregistrement en tant que marque communautaire et qui se réfère à des produits ou à des services identiques ou semblables à ceux pour lesquels l’enregistrement du signe en cause est demandé [voir par
analogie, au sujet de l’article 3, paragraphe 1, sous b) et c), de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques (JO 1989, L 40, p. 1), ordonnance du 12 février 2009, Bild digital et ZVS, C‑39/08 et C‑43/08, points 15 à 19].

46 En l’espèce, il s’est avéré que la demande d’enregistrement en cause se heurtait, eu égard aux produits et aux services pour lesquels l’enregistrement était demandé et à la perception par les milieux intéressés, au motif de refus énoncé à l’article 7, paragraphe 1, sous b), du règlement n° 207/2009 et qu’elle ne pouvait bénéficier de la disposition prévue au paragraphe 3 de cet article 7.

47 Dans ces conditions, le Tribunal a pu considérer à bon droit, au point 70 de l’arrêt attaqué, que, au vu de la conclusion à laquelle il était déjà parvenu aux points précédents de cet arrêt, selon laquelle un enregistrement du signe verbal «PHOTOS.COM» en tant que marque communautaire pour les produits et les services mentionnés dans la demande d’enregistrement, tels que limités, était incompatible avec le règlement n° 207/2009, Getty Images ne pouvait utilement invoquer, à l’appui de
prétendues violations des principes d’égalité de traitement et de protection de la confiance légitime, alléguées aux fins d’infirmer cette conclusion, des décisions antérieures de l’OHMI.

48 L’argumentation de Getty Images tirée d’une violation des principes d’égalité de traitement et de protection de la confiance légitime est, dès lors, manifestement non fondée.

49 Le présent moyen doit, par conséquent, être écarté comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.

50 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit être rejeté dans son intégralité comme étant en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.

Sur les dépens

51 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. L’OHMI ayant conclu à la condamnation de Getty Images aux dépens et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (huitième chambre) ordonne:

1) Le pourvoi est rejeté.

2) Getty Images (US) Inc. est condamnée aux dépens.

Signatures

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* Langue de procédure: l’anglais.


Synthèse
Formation : Huitième chambre
Numéro d'arrêt : C-70/13
Date de la décision : 12/12/2013
Type d'affaire : Pourvoi - irrecevable, Pourvoi - non fondé
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi - Marque communautaire - Règlement (CE) nº 207/2009 ‒ Article 7, paragraphe 1, sous b) et c) ‒ Motifs absolus de refus ‒ Absence de caractère distinctif ‒ Caractère descriptif ‒ Marque verbale PHOTOS.COM - Refus partiel d’enregistrement ‒ Égalité de traitement ‒ Obligation pour l’OHMI de tenir compte de sa pratique décisionnelle antérieure ‒ Pourvoi en partie manifestement irrecevable et en partie manifestement non fondé.

Marques

Propriété intellectuelle, industrielle et commerciale


Parties
Demandeurs : Getty Images (US) Inc.
Défendeurs : Office de l'harmonisation dans le marché intérieur (marques, dessins et modèles) (OHMI).

Composition du Tribunal
Avocat général : Kokott
Rapporteur ?: Jarašiūnas

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2013:875

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