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21/11/2013 | CJUE | N°C-559/12

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, République française contre Commission européenne., 21/11/2013, C-559/12


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 21 novembre 2013 ( 1 )

Affaire C‑559/12 P

République française

contre

Commission européenne

«Pourvoi — La Poste — Établissement public doté d’une personnalité morale propre — Existence d’une aide d’État — Garantie implicite illimitée de l’État — Notion d’avantage — Charge et niveau de preuve requis»

I – Introduction

1. Par son pourvoi, la République française demande

l’annulation de l’arrêt du Tribunal du 20 septembre 2012 prononcé dans l’affaire France/Commission (T‑154/10, ci‑après l’«arrêt attaqué»), par lequel cel...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. NIILO JÄÄSKINEN

présentées le 21 novembre 2013 ( 1 )

Affaire C‑559/12 P

République française

contre

Commission européenne

«Pourvoi — La Poste — Établissement public doté d’une personnalité morale propre — Existence d’une aide d’État — Garantie implicite illimitée de l’État — Notion d’avantage — Charge et niveau de preuve requis»

I – Introduction

1. Par son pourvoi, la République française demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal du 20 septembre 2012 prononcé dans l’affaire France/Commission (T‑154/10, ci‑après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui‑ci a rejeté son recours contre la décision 2010/605/UE de la Commission, du 26 janvier 2010, concernant l’aide d’État C 56/07 (ex E 15/05) accordée par la France à La Poste ( 2 ) (ci‑après la «décision litigieuse»).

2. Sur un plan général, le présent recours requiert à mon sens l’analyse de trois questions capitales. En premier lieu, celle de la notion de la garantie implicite et illimitée de l’État dont bénéficierait La Poste ( 3 ) et qui a été qualifiée par la Commission européenne, dans la décision litigieuse, d’aide d’État incompatible au sens de l’article 107 TFUE; en deuxième lieu, celle de la charge et du niveau de preuve requis aux fins d’établir l’existence d’une telle garantie et, troisièmement, la
question de savoir si et, le cas échéant, comment la Commission doit prouver l’existence d’un avantage découlant d’une garantie implicite accordée par l’État.

3. Il convient de souligner que la spécificité de la présente affaire procède avant tout de la nature implicite du cas de figure concerné, ce qui rend particulièrement complexe l’application des critères constitutifs de la notion d’aide d’État. À cet égard, je relève d’emblée que des aspects qui me paraissent fondamentaux pour l’examen approfondi du dossier n’ont pas été contestés, ou, à tout le moins, évoqués de manière suffisante dans le cadre du présent pourvoi. Tel est le cas de la notion même
de garantie implicite illimitée en droit de l’Union qui ne me semble pas définitivement acquise. Tel est également le cas du lien éventuel entre le régime litigieux des EPIC et la notion de service d’intérêt économique général qui n’a été abordée que sous un angle très restreint.

II – Le cadre juridique, la décision litigieuse et l’arrêt attaqué

4. Pour la description du droit national régissant le statut de La Poste et de faits à l’origine du litige, il est renvoyé à la présentation détaillée figurant dans l’arrêt attaqué.

5. S’agissant de la décision litigieuse, la Commission a conclu, à son article 1er, que «[l]a garantie illimitée octroyée par la France à La Poste constitue une aide d’État incompatible avec le marché intérieur. La France supprime cette aide au plus tard le 31 mars 2010». En outre, au sens de l’article 2 de cette même décision, «[l]a Commission considère que la transformation effective de La Poste en société anonyme supprimera de ce fait la garantie illimitée dont celle‑ci bénéficie. La suppression
effective de cette garantie illimitée au plus tard le 31 mars 2010 constitue une mesure apte à éliminer, conformément au droit de l’Union, l’aide d’État constatée à l’article 1er».

6. Par requête déposée au greffe du Tribunal le 2 avril 2010, la République française a introduit un recours en annulation contre la décision litigieuse. Dans ce cadre, la République française a fait valoir que ce serait à tort que la Commission a conclu, d’une part, à l’existence de la garantie de l’État en faveur de La Poste et, d’autre part, que cette mesure soit constitutive d’une aide d’État, dès lors que l’existence d’un avantage au sens de l’article 107 TFUE n’aurait pas été établie ( 4 ).

7. Par l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté la totalité des moyens invoqués par la République française et a, en conséquence, confirmé la légalité de la décision litigieuse.

III – Sur les moyens du pourvoi

8. Dans son pourvoi introduit le 5 décembre 2012, la République française invoque quatre moyens, dont le deuxième et troisième sont divisés en quatre branches. Par son premier moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir méconnu le sens des moyens soulevés devant lui, lorsqu’il a considéré que tous se rattachaient à l’existence d’un avantage, et non pas au critère d’un transfert de ressources d’État. Par son deuxième moyen, la requérante soulève une erreur de droit en ce que le Tribunal aurait
considéré à tort que la Commission a établi à suffisance de droit l’existence d’une garantie de l’État accordée à La Poste. Par son troisième moyen, la requérante reproche au Tribunal une série de dénaturations du droit national. Par son quatrième moyen, la requérante soulève une erreur de droit en ce que le Tribunal a considéré comme suffisant l’établissement par la Commission de l’existence d’un avantage qui aurait été procuré par la prétendue garantie d’État. Pour sa part, la Commission
conclut au rejet du pourvoi dans son ensemble.

9. À mes yeux, indépendamment du nombre de moyens invoqués par la République française, l’aspect essentiel du présent pourvoi a trait à la problématique déjà évoquée, liée aux principes à respecter par la Commission aux fins d’établir l’existence d’une garantie implicite, ainsi que l’existence d’un avantage en découlant. Par conséquent, je me propose d’analyser le pourvoi en regroupant les moyens invoqués selon ces principaux aspects.

A – Sur l’établissement de l’existence d’une garantie implicite constitutive d’une aide d’État (deuxième et troisième moyens du pourvoi)

1. Prétentions des parties

10. Par son deuxième moyen, divisé en quatre branches, la République française soutient en substance que le Tribunal aurait commis une erreur de droit en considérant que la Commission a établi à suffisance de droit l’existence d’une garantie d’État.

11. Par la première branche dudit moyen, la République française reproche au Tribunal d’avoir erronément jugé, au point 23 de l’arrêt attaqué, que la Commission était fondée à procéder à un renversement de la charge de la preuve, en attribuant aux autorités françaises la tâche de démontrer l’absence de garantie. Par la deuxième branche, tout en critiquant les prétendues présomptions négatives figurant dans la décision litigieuse, la République française reproche au Tribunal d’avoir validé, aux
points 73 et 74 de l’arrêt attaqué, le renversement de la charge de la preuve qui aurait été opéré par la Commission aux considérants 126 et 131 de la décision litigieuse. Par la troisième branche, la République française reproche au Tribunal d’avoir erronément interprété, au point 119 de l’arrêt attaqué, l’arrêt Commission/MTU Friedrichshafen ( 5 ).

12. Par la quatrième branche du deuxième moyen, la République française soutient que, même si, comme le Tribunal l’a fait valoir au point 120 de l’arrêt attaqué, «la nature des éléments de preuve devant être apportés par la Commission est tributaire de la nature de la mesure étatique envisagée», le caractère implicite de la garantie prétendument identifiée ne saurait cependant se traduire par une moindre exigence en matière de preuve, ni par un renversement de la charge de la preuve. Dans cette
perspective, le Tribunal aurait erronément considéré, au point 121 de l’arrêt attaqué, que la Commission avait examiné positivement l’existence d’une garantie illimitée de l’État en faveur de La Poste, et qu’elle avait pris en compte plusieurs éléments concordants constituant une base suffisante en vue d’établir l’existence de cette garantie. Or, selon la requérante, l’existence d’une garantie implicite ne peut être démontrée que positivement.

13. Pour sa part, la Commission rétorque, premièrement, qu’elle n’a aucunement renversé la charge de la preuve. Deuxièmement, la Commission fait valoir que les contestations relatives à la prétendue utilisation de présomptions négatives ou des suppositions se révèlent être de simples réitérations des allégations de première instance. Troisièmement, la Commission soutient que le rappel de la jurisprudence Commission/MTU Friedrichshafen, précitée, a visé la prise en compte, comme reconnu dans l’arrêt
Commission/Scott ( 6 ), de la difficulté de la tâche complexe à laquelle était confrontée la Commission en l’espèce. Enfin, la Commission propose d’écarter les critiques relatives aux points 120 et 121 de l’arrêt attaqué comme inopérantes et infondées.

14. Par le troisième moyen, la République française reproche, en substance, au Tribunal une série de dénaturations du droit national dont les éléments ont constitué le point de départ du raisonnement de la Commission aux fins de la constatation de l’existence de la garantie implicite et illimitée. Par la première branche, la requérante met en cause la considération selon laquelle le droit français n’excluait pas la possibilité pour l’État de conférer une garantie implicite aux EPIC. Par la deuxième
branche, la République française reproche au Tribunal d’avoir dénaturé le droit français lorsqu’il a approuvé les conclusions de la Commission relatives aux conséquences découlant de l’application de la loi no 80‑539 ( 7 ). Par la troisième branche, tout en alléguant un défaut de motivation, la République française reproche au Tribunal d’avoir assimilé à tort les conditions d’engagement de la responsabilité de l’État à un mécanisme de garantie à la lumière de l’arrêt Société fermière de
Campoloro et autres du Conseil d’État ( 8 ), de l’arrêt Société de gestion du port de Campoloro et Société fermière de Campoloro c. France de la Cour européenne des droits de l’homme ( 9 ) et de la note du Conseil d’État de 1995 ( 10 ). Par la quatrième branche, la requérante vise la problématique, examinée par le Tribunal au point 102 de l’arrêt attaqué, du transfert des droits et des obligations rattachés à une mission de service public.

15. En réponse à ces griefs, la Commission allègue que le troisième moyen de pourvoi – lequel constituerait en substance une réitération du deuxième moyen avancé devant le Tribunal – viserait en réalité à demander à la Cour de se livrer à une nouvelle appréciation des faits et éléments de preuve, raison pour laquelle ce moyen serait manifestement irrecevable.

2. Analyse

16. En guise d’introduction, il convient de souligner que la notion de garantie, quoique connue à première vue, ne fait pas l’objet de définition univoque en droit de l’Union. La Commission, tout en indiquant dans sa communication portant sur l’application des articles 107 TFUE et 108 TFUE aux aides d’État sous forme de garanties ( 11 ) que «[l]es garanties sont généralement liées à un prêt ou à une autre obligation financière contractée par un emprunteur auprès d’un prêteur, elles peuvent être
accordées individuellement ou dans le cadre d’un régime», a considéré également que constituent «une aide sous forme de garantie les conditions de crédit plus favorables obtenues par les entreprises dont la forme juridique exclut la possibilité d’une procédure de faillite ou d’insolvabilité ou prévoit explicitement une garantie de l’État ou une couverture des pertes par l’État» ( 12 ). La Commission distingue également entre garanties provenant d’une «source contractuelle» ou d’une «autre source
juridique», par opposition aux «garanties dont la forme est moins visible».

17. Dans la présente affaire, il est donc déterminant que la garantie implicite illimitée en cause relève d’un type d’interventions indirectes dans le cadre desquelles les ressources engagées par l’État ne se traduisent pas de manière automatique par un avantage correspondant pour les bénéficiaires. Cette catégorie couvre, notamment, les garanties implicites découlant du régime juridique particulier applicable au bénéficiaire ou, encore, de lettres d’intention ou de patronage.

18. À cet égard, il convient de rappeler que, conformément à la jurisprudence, sont notamment considérées comme aides les interventions étatiques qui, sous des formes diverses, allègent les charges qui normalement grèvent le budget d’une entreprise et qui, par là, sans être des subventions au sens strict du mot, sont de même nature et ont des effets identiques ( 13 ). Il ressort de la jurisprudence qu’une intervention étatique susceptible, à la fois, de placer les entreprises auxquelles elle
s’applique dans une situation plus favorable que d’autres et de créer un risque suffisamment concret de la réalisation, à l’avenir, d’une charge supplémentaire pour l’État, peut grever les ressources de l’État ( 14 ). En effet, le terme «aides sous quelque forme que soit» figurant à l’article 107 TFUE est entendu comme s’appliquant aux avantages, sans que la nature juridique ou l’objectif d’un tel avantage unilatéral soit pertinent. La Cour a ainsi jugé que des avantages consentis sous la forme
d’une garantie d’État peuvent impliquer une charge supplémentaire pour l’État ( 15 ).

19. Or, l’existence même de la garantie implicite en cause au principal, qui fait l’objet du grief développé notamment dans la quatrième branche du deuxième moyen que je propose d’examiner en premier lieu, soulève une difficulté particulière, dès lors qu’aucun texte législatif français ne prévoyait expressément l’existence de ladite garantie. En effet, l’aide litigieuse résulterait non pas d’une mesure distincte, mais plutôt de l’absence de soumission des EPIC au régime général de faillite, voire de
l’introduction d’un régime particulier à cet effet en liaison avec une prétendue absence de situation où les dettes des entités publiques ayant une personnalité morale propre resteraient impayées à leurs créanciers. Ainsi, après avoir examiné plusieurs sources, la Commission s’est fondée sur divers éléments afin de conclure à l’existence de la garantie implicite et illimitée.

20. Le dispositif en question appelle de ma part les observations suivantes au sujet de la méthode et du niveau de preuve requis ainsi que de l’intensité de contrôle à opérer par le juge de l’Union.

– Garantie implicite

21. En premier lieu, s’agissant de la méthode d’examen, je relève que le terme «garantie implicite», dont le concept n’est pas contesté par la requérante, est plutôt un terme métaphorique et contradictoire en soi, dès lors que la notion de garantie correspond habituellement à un aval ou à une promesse constitutive d’un fait ou d’un acte juridique, lequel génère ou est susceptible de générer des conséquences particulières à l’égard de son destinataire. En effet, un créancier ne peut pas invoquer une
garantie implicite à la manière d’une garantie explicite. Selon moi, à supposer même que le garant puisse se voir opposer un tel «engagement», son fondement serait plutôt à rechercher parmi les principes généraux de la responsabilité civile.

22. À supposer donc que le terme en cause soit fondé en droit de la concurrence ( 16 ), il convient de considérer qu’aux fins d’application de l’article 107 TFUE la notion de «garantie implicite» n’est pas une notion de pur droit, mais relève également de l’examen des faits. En effet, la notion de «garantie implicite» se rattache au droit de la concurrence de l’Union en ce qu’elle décrit de façon uniforme un «comportement» des autorités nationales constitutif, le cas échéant, eu égard à ses effets
économiques, d’une aide d’État pour son bénéficiaire.

23. La difficulté majeure repose dans le caractère implicite de la garantie en cause qui est contenue dans des indices tant juridiques que factuels. La garantie implicite constitue donc un phénomène déduit et également un phénomène présumé ( 17 ). La justification principale du recours à ce concept en droit des aides d’État réside dans le fait que le dispositif en question crée une situation financière analogue à celle résultant d’une garantie explicite illimitée que l’État membre octroierait au
bénéfice d’une entreprise, sans que cette dernière soit tenue de payer une prime correspondant à sa valeur économique.

24. Par conséquent, la méthode du faisceau d’indices me paraît particulièrement adaptée afin d’établir l’existence d’une telle mesure implicite ( 18 ), la méthode en question étant, par ailleurs, d’application dans le domaine des aides d’État ( 19 ).

25. En effet, la Cour a déjà admis que ne saurait être exclue de façon générale la possibilité, pour la Commission, de se fonder sur un ensemble de circonstances de nature à déceler l’existence, en fait, d’un programme d’aides ( 20 ). Toutefois, encore faut‑il que la Commission fasse état d’éléments de nature normative, administrative, financière ou économique qui auraient permis de caractériser l’aide litigieuse ( 21 ).

26. Je souhaite apporter deux précisions dans ce contexte. D’une part, contrairement à ce qui me semble être la position de la Commission, je suis d’avis que la nature «implicite» d’une mesure exclut une certitude quant à son existence. Une garantie implicite déduite d’un faisceau d’indices devra donc être considérée comme existante aussi longtemps que la preuve contraire de son inexistence n’aura pas été apportée. En l’espèce, il serait relativement aisé d’apporter une telle preuve en faisant état
de cas concrets où les dettes d’un EPIC ou d’une collectivité territoriale française demeureraient durablement impayées, et cela malgré l’absence de procédure formelle de faillite ou d’insolvabilité. En effet, une telle défense d’un État membre conduirait à considérer que la décision de la Commission repose sur des prémisses erronées en fait ( 22 ).

27. D’autre part, le Tribunal est tenu de déterminer si les éléments de preuve constituent l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier ledit «comportement» des autorités nationales, et si ces données sont de nature à étayer l’allégation selon laquelle l’entreprise est bénéficiaire d’une aide d’État de nature implicite.

28. En effet, comme l’a rappelé la Cour, une erreur manifeste d’appréciation peut consister dans le fait, pour la Commission, de s’appuyer sur des éléments qui ne «constituent pas l’ensemble des données pertinentes devant être prises en considération pour apprécier une situation complexe» ( 23 ).

29. Par conséquent, le critère tenant à «établir positivement» l’existence d’une garantie est rempli dès lors que, dans l’intérêt d’une bonne administration, la Commission conduit la procédure d’examen des mesures incriminées de manière diligente et impartiale, afin qu’elle dispose, lors de l’adoption de la décision finale, des éléments les plus complets et fiables possible pour ce faire ( 24 ). Cela implique, dans un cas comme celui de l’espèce, la nécessité de réunir toutes les informations
pouvant plaider cumulativement de manière plausible en faveur de l’existence d’une mesure susceptible de constituer une aide d’État. Cette existence se déduit également de l’absence des informations la réfutant.

30. À cet égard, je relève que, après avoir rappelé, au point 119 de l’arrêt attaqué, les obligations qui incombent à la Commission par rapport aux éléments pouvant fonder la conclusion selon laquelle l’entreprise bénéficie d’un avantage constitutif d’une aide d’État, au point 120 de l’arrêt attaqué le Tribunal a affirmé que la nature des éléments de preuve devant être apportés par la Commission est tributaire de la nature de la mesure. Il va de soi qu’en ce faisant le Tribunal a exprimé le concept
de la diversification des mesures susceptibles de constituer des aides d’État sans pour autant enfreindre les principes régissant la charge et le niveau de preuve. S’agissant de l’existence d’une mesure implicite litigieuse, le Tribunal a adapté le constat susvisé en jugeant à bon droit, audit point 120, que l’existence d’une garantie implicite peut se déduire d’un faisceau d’éléments convergents. Enfin, le Tribunal a énuméré, en lien avec le deuxième moyen soulevé en première instance,
l’ensemble des éléments concordants constituant une base pour le constat de l’existence de l’aide d’État.

31. Il convient de relever qu’il n’est pas expressément contesté que les EPIC ne sont pas soumis au régime général ou spécifique de faillite ou à la procédure d’insolvabilité. Il en découle que la mise en cause de la véracité d’un indice individuel retenu par le Tribunal ne peut pas être considérée comme suffisante afin de prouver l’inexistence de la mesure dont l’existence est fondée sur une méthode de faisceau d’indices. Certes, en l’absence d’un contre‑exemple concret réfutant l’existence d’une
garantie implicite, la requérante est tenue de contredire chaque indice l’un après l’autre. Toutefois, à mon avis, l’auteur de la contestation doit être tenu de prouver que l’ensemble des éléments constitutifs d’un faisceau d’indices plaide en faveur de l’inexistence d’une garantie implicite illimitée de l’État.

32. Il s’ensuit que les griefs invoqués dans une partie du deuxième et dans l’ensemble du troisième moyen, en ce qu’ils ne remettent pas en cause la conclusion globale relative à l’existence de la garantie implicite, mais portent sur différents indices pris isolément, pourraient donc d’emblée être rejetés comme inopérants.

– Charge et niveau de preuve requis

33. En deuxième lieu, en ce qui concerne la charge de la preuve, il est indiscutable que c’est à la Commission qu’incombe de prouver l’existence d’une mesure susceptible d’être qualifiée d’aide d’État. Le Tribunal a donc correctement interprété le rôle de la Commission dès lors qu’il a, à maintes reprises dans l’arrêt attaqué, vérifié le caractère suffisant des preuves recueillies par la Commission ( 25 ), et ce conformément à la jurisprudence selon laquelle la Commission doit toujours examiner tous
les éléments pertinents de l’opération litigieuse et son contexte ( 26 ) pour arriver, sans commettre aucune erreur de droit, à la conclusion aux points 120 et 121 de l’arrêt attaqué. Contrairement donc à ce qu’allègue la République française, le Tribunal n’a pas procédé à un renversement de la charge de la preuve.

34. S’agissant du niveau de preuve requis ( 27 ) entendu comme le dégré d’exigence appliqué par le juge lorsqu’il examine les éléments de preuve qui lui sont soumis, il est utile de faire brièvement référence à la jurisprudence relative au droit de concurrence au sens large, ainsi qu’aux principes du «common law». En ce qui concerne la pratique du droit de la concurrence ( 28 ), sans qu’il existe une définition uniforme du niveau de preuve applicable, la Cour exige une preuve des faits «à suffisance
de droit» ( 29 ), ou des «éléments de preuve suffisamment précis et concordants» ( 30 ) et applique également la méthode du «faisceau d’indices sérieux, précis et concordants», en l’absence de documents établissant la concertation entre les producteurs ( 31 ). Dans le cadre de l’analyse prospective concernant les concentrations, la Cour retient également le critère de la «probabilité la plus forte» ( 32 ). En revanche, en «common law», la distinction se décline entre, d’une part, le «standard»
moins sévère appliqué en matière civile connu sous le nom de «balance of probabilities», ce qui signifie que la partie doit convaincre le juge que le fait qu’elle allègue est «plus probable qu’improbable», et, d’autre part, le «standard» plus sévère applicable en matière pénale désigné par l’expression «beyond a reasonable doubt» signifiant que le juge ne doit avoir aucun doute raisonnable sur la réunion des éléments constitutifs d’infraction à l’issue d’un examen rationnel des preuves ( 33 ).

35. Je considère que, dans le cas d’une garantie implicite dont l’existence se déduit d’un faisceau d’indices, le niveau de preuve doit être fondé sur celui de la probabilité sérieuse et de la suffisance des preuves. Le niveau applicable serait donc plus exigeant qu’une simple probabilité tout en étant moins exigeant que celui de l’absence de doute raisonnable. Tel me paraît être l’analyse opérée à bon droit par le Tribunal au regard des éléments apportés par la Commission.

36. Par ailleurs, cette approche me semble correspondre à une jurisprudence récente dont il ressort que la Commission doit établir un lien suffisamment direct entre, d’une part, l’avantage accordé au bénéficiaire et, d’autre part, une diminution du budget étatique, voire un risque économique suffisamment concret de charges le grevant ( 34 ), sans pour autant exiger qu’une telle diminution, voire un tel risque, corresponde ou soit équivalent audit avantage, ni que ce dernier ait pour contrepartie une
telle diminution ou un tel risque, ni qu’il soit de même nature que l’engagement de ressources d’État dont il découle ( 35 ).

37. En ce qui concerne ensuite l’intensité du contrôle exercé par le juge de l’Union, je rappelle que, si la Commission jouit d’une marge d’appréciation dans le domaine des aides d’État, dès lors que celles‑ci impliquent des évaluations complexes d’ordre économique, le contrôle que les juridictions de l’Union exercent sur les appréciations économiques complexes est un contrôle restreint qui se limite nécessairement à la vérification du respect des règles de procédure et de motivation, de
l’exactitude matérielle des faits ainsi que de l’absence d’erreur manifeste d’appréciation et de détournement de pouvoir ( 36 ). Le rôle du juge ne consiste donc pas à établir lui‑même l’existence et le montant de l’aide en se substituant à la tâche de la Commission ( 37 ).

38. Or, il est incontestable qu’établir l’existence d’une garantie implicite et illimitée ainsi que l’existence de l’avantage en découlant nécessitait, de la part de la Commission, une appréciation complexe.

39. Dans cette perspective, l’argumentation de la requérante soulevée globalement dans le deuxième moyen, et en particulier dans sa quatrième branche, doit être écartée en ce qu’elle ne comporte aucun élément permettant de reprocher au Tribunal une erreur de droit. Il ressort, en revanche, des motifs de l’arrêt attaqué que le Tribunal n’a pas méconnu les règles relatives à la charge et à l’étendue de la preuve qui viennent d’être rappelées et a pu correctement fonder sa conclusion sur le faisceau
d’indices plaidant en faveur de l’existence d’une garantie implicite d’État.

– Griefs examinés à titre surabondant

40. S’agissant des trois premières branches du deuxième moyen, j’observe, premièrement, que la critique de la requérante procède d’une lecture erronée du point 23 de l’arrêt attaqué dans lequel le Tribunal s’est limité à reproduire les éléments essentiels pour la description des faits de l’espèce sans se prononcer sur la répartition de la charge de la preuve. Deuxièmement, les arguments présentés par la République française se limitent à une critique dirigée contre la décision litigieuse, ce qui les
rend irrecevables. Par ailleurs, les points 73 et 74 de l’arrêt attaqué s’inscrivent dans le cadre du deuxième moyen en première instance, et consistent en une interprétation du droit national dont l’appréciation n’est pas soumise au contrôle de la Cour, sous réserve du cas de dénaturation ( 38 ), laquelle, en l’espèce, n’est pas démontrée par la requérante.

41. Troisièmement, s’agissant de l’interprétation de l’arrêt Commission/MTU Friedrichshafen, précité, figurant au point 119 de l’arrêt attaqué, cet arrêt établit une interdiction pour la Commission de fonder sa décision sur les présomptions négatives dans l’hypothèse d’une absence d’informations permettant d’aboutir à une conclusion contraire. Il n’est donc pas pleinement applicable en l’espèce. Toutefois, comme le relève la Commission, le Tribunal a pu la rappeler afin de souligner la difficulté de
la tâche complexe à laquelle était confrontée la Commission en vue de déceler l’existence d’un mécanisme de garantie illimitée implicite.

42. S’agissant du troisième moyen, j’observe que la République française critique l’interprétation des éléments d’un faisceau d’indices à laquelle s’est livré le Tribunal dans le cadre de l’appréciation de l’existence de la garantie accordée à La Poste. À cet égard, je rappelle qu’un grief tiré de l’appréciation erronée du droit national est recevable lorsqu’il est reproché au Tribunal d’avoir dénaturé ce droit ( 39 ). Ainsi, il est vrai que, pour ce qui est de l’examen, dans le cadre d’un pourvoi,
des constatations faites par le Tribunal à l’égard de la législation nationale, la Cour est compétente pour examiner, tout d’abord, si le Tribunal n’a pas dénaturé, sur le fondement des documents et des autres pièces qui lui ont été soumis, le libellé des dispositions nationales en cause ou la teneur de la jurisprudence nationale y relative ou encore de la doctrine qui s’y rapporte. Ensuite si le Tribunal ne s’est pas livré, au regard de ces éléments, à des constatations allant de façon
manifeste à l’encontre de leur contenu. Enfin, si le Tribunal n’a pas, dans l’examen de l’ensemble des éléments, attribué à l’un d’entre eux, aux fins de constater le contenu de la législation nationale en cause, une portée qui ne lui revient pas par rapport aux autres éléments, pour autant que cela ressorte de façon manifeste des pièces du dossier ( 40 ).

43. Toutefois, tel n’est pas le cas des arguments soulevés dans les trois premières branches du présent moyen. En effet, il convient d’emblée de constater que la République française cherche en réalité, même si elle invoque des erreurs de droit, à remettre en cause l’appréciation des faits effectuée par le Tribunal et, notamment, à contester l’interprétation des faits et des documents ayant amené ce dernier à conclure à l’existence de la garantie implicite. Lesdits arguments constituant en réalité
une réitération des critiques présentées devant le Tribunal, de sorte qu’ils doivent être considérés comme irrecevables. En tout état de cause, la dénaturation évoquée n’étant ni démontrée ni manifeste, il convient de rejeter lesdites allégations. S’agissant d’un défaut de motivation soulevé dans le cadre de la troisième branche du troisième moyen en relation avec la jurisprudence Société de gestion du port de Campoloro et Société fermière de Campoloro c. France de la CEDH, je relève que le
Tribunal y a répondu à suffisance de droit aux points 96 à 99 de l’arrêt attaqué. Enfin, s’agissant de la quatrième branche du troisième moyen, celle‑ci étant dirigée contre un motif surabondant, il convient de la rejeter comme inopérante.

44. Eu égard à tout ce qui précède, je considère que le Tribunal s’est correctement acquitté de son rôle au regard du contrôle restreint de l’existence de la garantie implicite. Je propose donc d’écarter les deuxième et troisième moyens du pourvoi.

B – Sur l’établissement de l’avantage découlant de la garantie implicite (quatrième moyen)

1. Prétentions des parties

45. Par son quatrième moyen, la République française soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit lorsqu’il a considéré que la Commission a établi à suffisance de droit l’existence d’un avantage qui découlerait de la prétendue garantie d’État accordée à La Poste. La requérante fait valoir, en premier lieu, que le Tribunal a méconnu les règles gouvernant la charge et le niveau de la preuve quant à la démonstration de l’existence d’un avantage, dès lors qu’il a considéré, aux points 123
et 124 de l’arrêt attaqué, que, en présence d’une aide existante, la Commission n’était pas tenue de procéder à la démonstration des effets réels de cette aide, mais pouvait les présumer. En outre, à supposer même que le droit de l’Union n’impose pas d’établir les effets réels d’une aide existante, la Commission devrait, à tout le moins, démontrer l’existence d’effets potentiels. Cela serait, d’ailleurs, à tort exclu au point 1.2 de la communication 2008. Dans cette perspective, le Tribunal
aurait ainsi également commis une erreur de droit, lorsqu’il a considéré, aux points 106 et 108, que l’analyse de la Commission était fondée.

46. À titre subsidiaire, la République française soutient que le Tribunal a dénaturé les éléments de preuve lorsqu’il a considéré, d’une part, aux points 110 et 123 de l’arrêt attaqué, que la Commission – tout en ayant fait référence aux méthodes des agences de notation seulement pour confirmer et non pas pour démontrer l’existence d’un avantage – avait fourni suffisamment d’éléments pour établir que la garantie litigieuse était constitutive d’un véritable avantage. Elle critique dans ce contexte
les points 111 à 116 dudit arrêt.

47. La requérante précise par ailleurs ne pas avoir admis, comme il ressort du point 106 de l’arrêt attaqué, que le fait qu’une entreprise se voyait soustraite, en raison de son statut légal, à une procédure de faillite ou à une procédure équivalente avait pour effet d’accorder «automatiquement» un avantage.

48. La Commission rétorque qu’il est justifié d’utiliser la même grille d’analyse pour les aides existantes et les aides nouvelles, en vertu de laquelle elle n’est pas tenue de démontrer les effets réels de telles mesures. Quant à la contestation de la communication de 2008, la Commission la considère comme irrecevable, notamment en l’absence d’exception d’illégalité soulevée au cours de la procédure devant le Tribunal. S’agissant du point 106 de l’arrêt attaqué, la Commission allègue que, sur la
base de cette déclaration, le Tribunal ne pouvait que rejeter le troisième moyen soulevé devant lui.

2. Analyse

49. Ainsi que je l’ai déjà exposé, il convient tout d’abord de partir de la prémisse selon laquelle le cas de figure à l’origine du présent contentieux constitue une «situation de droit et de fait» analogue à celle de l’existence d’une garantie explicite. En effet, puisqu’il s’agit d’une absence de mesure au sens habituel, la garantie implicite présente la particularité que la «mesure» et ses effets se confondent. Aux fins de la présente analyse, il importe donc de considérer que la garantie
implicite produit des effets équivalents à ceux découlant d’une garantie explicite, laquelle constitue une mesure directement identifiable et, par définition, susceptible de produire certains effets.

50. Selon la jurisprudence, afin d’établir si une mesure constitue une aide d’État, il y a lieu de déterminer si l’entreprise bénéficiaire reçoit un avantage économique qu’elle n’aurait pas obtenu dans des conditions normales du marché ( 41 ). Or, force est de constater, selon moi, qu’une telle approche dans la recherche d’un avantage ne correspond pas à la spécificité de la garantie d’État en cause au principal ( 42 ).

51. Il est également constant que l’article 107, paragraphe 1, TFUE n’établit pas de distinction selon les causes ou les objectifs des interventions étatiques, mais définit celles‑ci en fonction de leurs effets ( 43 ). Lors de l’appréciation d’une mesure au regard de l’article 107 TFUE, il y a lieu de tenir compte des effets que celle‑ci est susceptible de produire ( 44 ) ainsi que de tous les éléments pertinents et de leur contexte ( 45 ). Toutefois, la jurisprudence ne répond pas exhaustivement
aux questions concernant la manière dont la Commission est tenue d’établir un avantage et la nature des effets d’une mesure qu’il lui incombe de prouver lorsqu’elle établit l’existence d’un avantage découlant d’une mesure implicite.

– Existence d’un avantage

52. S’agissant, tout d’abord, de la constatation du Tribunal figurant au point 124 de l’arrêt attaqué selon laquelle l’effet réel de l’avantage que procure une garantie d’État peut être présumé, le point qui est décisif pour le raisonnement du Tribunal pour confirmer l’analyse de la Commission et pour admettre l’existence d’un avantage en l’espèce ressort à titre principal du point 106, lu en combinaison avec le point 108 de l’arrêt attaqué, dans lequel le Tribunal a constaté qu’une garantie
illimitée permet à son bénéficiaire d’obtenir des conditions de crédit plus favorables que celles qu’il aurait obtenues du fait de ses seuls mérites et, partant, permet de réduire la pression qui pèse sur son budget.

53. En effet, pour le Tribunal, l’octroi d’une garantie à des conditions qui ne correspondent pas à celles du marché, telle qu’une garantie illimitée sans contrepartie, est, de manière générale, de nature à conférer un avantage à la personne qui en bénéficie, en ce sens qu’elle a pour conséquence une amélioration de la position financière du bénéficiaire par un allégement des charges qui normalement grèvent son budget ( 46 ).

54. À cet égard, je rappelle que la Cour a déjà précisé que, sous réserve de prouver l’existence d’une charge supplémentaire pour l’État destinée à accorder aux entreprises concernées un avantage déterminé qui ne saurait être déduit automatiquement ( 47 ), l’application du système dérogatoire par rapport à la procédure ordinaire de faillite ainsi que l’exclusion de toute voie d’exécution individuelle aux dettes fiscales et aux pénalités par rapport aux entreprises concernées pouvait être regardée
comme une aide d’État ( 48 ). De tels avantages, consentis par le législateur national, pourraient impliquer une charge supplémentaire pour les pouvoirs publics, sous la forme d’un renoncement effectif aux créances publiques, d’une exonération de l’obligation de paiement d’amendes ou autres sanctions pécuniaires ou d’un taux réduit d’impôt ( 49 ).

55. S’agissant en particulier du critère d’un avantage, après avoir constaté qu’«il apparaît que la réglementation en cause est susceptible de placer les entreprises auxquelles elle s’applique dans une situation plus favorable que d’autres» la Cour l’a examiné dans les affaires Ecotrade et Piaggio, précitées, sous l’angle de la possibilité pour une entreprise concernée de poursuivre l’activité économique dans des circonstances où une telle éventualité serait exclue dans le cadre de l’application des
règles ordinaires en matière de faillite. Ainsi, la jurisprudence me semble déjà admettre la possibilité de présumer l’existence d’un avantage dès lors qu’il ressort de manière plausible du cadre réglementaire national régissant le fonctionnement des entreprises en cause.

56. En outre, le cas d’espèce me paraît ne pas correspondre clairement à une aide individuelle, mais se rapproche plutôt à un régime d’aide qui, étant applicable aux EPIC, aurait une incidence sur la situation juridique de La Poste. Il conviendrait donc d’appliquer par analogie la jurisprudence portant sur les programmes d’aides, selon laquelle la Commission peut se borner à étudier leurs caractéristiques pour apprécier, dans les motifs de la décision, si, en raison des modalités que ces programmes
prévoient, ceux‑ci assurent un avantage sensible aux bénéficiaires par rapport à leurs concurrents et sont de nature à profiter essentiellement à des entreprises qui participent aux échanges entre États membres. Ce n’est qu’au stade de la récupération des aides qu’il sera nécessaire de vérifier la situation individuelle de chaque entreprise concernée ( 50 ).

57. De surcroît, je note qu’il ressort clairement de l’arrêt Residex Capital IV ( 51 ) relatif à une garantie explicite que, «lorsque le prêt octroyé par un institut de crédit à un emprunteur est garanti par les autorités publiques d’un État membre, cet emprunteur obtient normalement un avantage financier et bénéficie ainsi d’une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, dans la mesure où le coût financier qu’il supporte est inférieur à celui qu’il aurait supporté s’il avait dû se procurer ce
même financement et cette même garantie aux prix du marché».

58. Aussi, il me semble que, dans l’hypothèse où la Cour retiendrait, sur un plan général, la notion de «garantie implicite» et admettrait, en l’espèce, son existence, l’existence d’un avantage pourrait être présumée dans les mêmes conditions que s’il s’agissait d’une garantie explicite, autrement dit en considérant qu’une telle garantie est susceptible d’améliorer la situation financière de l’entreprise bénéficiaire. Il va de soi qu’il s’agit d’une présomption simple. Par conséquent, c’est à bon
droit que le Tribunal a jugé, au point 124 de l’arrêt attaqué, que les garanties sont susceptibles de procurer un avantage à leurs bénéficiaires.

– Contexte économique

59. Toutefois, ce constat n’exempte ni la Commission ni le Tribunal de la prise en compte des conditions juridiques et économiques dans le cadre desquelles opère l’entité censée bénéficier d’un avantage ( 52 ). En effet, ainsi que je l’ai déjà évoqué, la Commission doit être en mesure d’évaluer l’avantage en question ( 53 ).

60. Or, la République française reproche au Tribunal d’avoir commis une erreur de droit en considérant que la Commission était fondée à se référer aux agences de notation afin de «confirmer», et non pas afin de «démontrer», l’existence d’un avantage dans le chef de La Poste.

61. Il est vrai que, afin de prouver que La Poste jouissait d’une position plus avantageuse découlant des conditions de crédit plus favorables que celles dont elle aurait pu disposer sans un dispositif d’une garantie illimitée de l’État français, la Commission s’est référée à titre principal aux données des agences de notation ainsi qu’aux méthodes employées par ces dernières ( 54 ). En outre, la Commission a estimé que La Poste bénéficiait également d’un profit correspondant à l’absence de prime
payée à l’État ( 55 ).

62. À cet égard, je relève tout d’abord que, eu égard à la prémisse selon laquelle l’existence d’un avantage peut être présumée en l’espèce, le caractère confirmatif des données provenant des agences de notation s’inscrirait parfaitement dans la logique de la présomption. Dès lors, le grief relatif à l’insuffisance de preuve en relation avec le recours aux méthodes et aux données des agences de notation doit être considéré comme non fondé.

63. De surcroît, c’est précisément afin d’encadrer correctement le contexte économique de la garantie litigieuse que la Commission s’est référée aux méthodes et aux données des agences de notation. À cet égard, je suis d’avis que, sous réserve de l’inapplicabilité du test de l’investisseur privé au cas d’espèce, l’éventail des instruments auxquels la Commission peut recourir afin de motiver son analyse devrait être large. Par conséquent, il convient d’admettre les conditions de crédits plus
favorables étayées par les données des agences de notation. Aussi, c’est à bon droit que le Tribunal, aux points 115 à 117 de l’arrêt attaqué, a confirmé leur pertinence, tout en écartant le reproche relatif au raisonnement circulaire soulevé devant lui. En ce que le présent grief se rattache à la problématique de la méthode à appliquer par la Commission afin d’établir l’existence d’un avantage dans le cas de garanties de l’État, j’entends toutefois y revenir ultérieurement à titre d’obiter
dictum.

– Catégorie d’effets des aides déjà accordées

64. S’agissant, en revanche, des effets d’aides nouvelles et existantes, il ressort du point 1 de la décision litigieuse que la Commission a considéré la mesure en cause comme relevant de la notion d’aide existante ( 56 ). Outre les interrogations que peut susciter de prime abord une telle qualification ( 57 ), j’observe, tout d’abord, que les effets dans le temps d’un dispositif tel que la garantie implicite sont difficiles à déterminer, dès lors que ladite garantie ne résulte pas d’un acte
ponctuel et perceptible, mais est déduite sur la base d’un faisceau d’indices concordants. Toutefois, dès lors qu’il est de jurisprudence constante que la notion d’aide répond à une situation objective qui s’apprécie à la date à laquelle la Commission prend sa décision, ce sont les appréciations portées à cette date qui doivent être prises en compte pour opérer le contrôle juridictionnel ( 58 ).

65. Au point 123 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a fait référence à la jurisprudence selon laquelle la Commission n’est pas tenue, dans sa décision, de faire la démonstration de l’effet réel d’aides déjà accordées ( 59 ). Il est vrai que la Cour a jugé que, si la Commission devait faire la démonstration de l’effet réel d’aides déjà accordées, cela aboutirait à favoriser les États membres qui versent des aides en violation de l’obligation de notification au détriment de ceux qui notifient les aides à
l’état de projet ( 60 ).

66. Toutefois, non seulement cette lignée jurisprudentielle ( 61 ) ne présente pas de lien avec l’examen des aides existantes, mais surtout la Cour se réfère spécifiquement à la manière de déterminer deux autres critères de la notion d’aide, à savoir celui de l’affectation des échanges et de la concurrence sans mentionner la problématique d’un avantage. Cela correspond en effet à l’approche classique selon laquelle la Commission est seulement tenue d’examiner si l’aide est susceptible d’affecter ces
échanges et de fausser la concurrence et non pas d’établir une incidence réelle de la mesure en cause sur ces deux critères ( 62 ).

67. Il est vrai que la Cour a déjà confirmé, s’agissant de l’affectation des échanges et de la distorsion de concurrence, que le même traitement devait être assuré aux deux typologies d’aides, à savoir les aides existantes et les aides octroyées sans avoir été préalablement notifiées à la Commission ( 63 ). En revanche, la pertinence de cette jurisprudence pour la détermination des effets d’un avantage n’est pas acquise. D’ailleurs, il ne ressort pas clairement du point 123 de l’arrêt attaqué si le
Tribunal entendait distinguer entre la détermination de l’avantage et la détermination d’autres critères, ou si la jurisprudence Boussac Saint Frères et P&O European Ferries (Vizcaya) et Diputación Foral de Vizcaya/Commission n’a, au contraire, été citée qu’afin d’exempter la Commission de l’obligation d’apporter la preuve des effets avantageux de la mesure litigieuse par analogie.

68. En outre, à la lecture de l’exposé des arguments du Tribunal, je note que, tout en écartant au point 123 de l’arrêt attaqué la nécessité de vérifier les effets réels des aides existantes et illégales, il a jugé, au point 124, que l’effet réel de l’avantage que procure une garantie de l’État peut être présumé.

69. Eu égard à cet exposé du Tribunal caractérisé par un manque de clarté et une application confuse de la jurisprudence, il y a lieu de constater que le raisonnement figurant au point 123 de l’arrêt attaqué est entaché d’une erreur de droit. Toutefois, il ressort de la jurisprudence de la Cour qu’une erreur de droit commise par le Tribunal n’est pas de nature à invalider l’arrêt attaqué si le dispositif de celui‑ci apparaît fondé pour d’autres motifs de droit ( 64 ).

70. Or, dès lors que l’arrêt attaqué repose à bon droit sur la thèse selon laquelle l’avantage que procure une garantie peut être présumé, cette erreur ne saurait affecter le dispositif de l’arrêt attaqué. Par ailleurs, une éventuelle exception d’illégalité du point 1.2 de la communication doit être considérée comme manifestement irrecevable.

71. Enfin, dans le cadre du quatrième moyen, la requérante critique le point 106 de l’arrêt attaqué et précise de ne pas avoir affirmé à l’audience que le fait pour une entreprise d’être soustraite à une procédure de faillite engendre «automatiquement» un avantage. Je considère que cette critique procède de la lecture erronée de l’arrêt attaqué. En effet, le Tribunal n’a nullement évoqué un tel automatisme. Par ailleurs, aucune dénaturation ne ressort des allégations de la requérante, de sorte que
le présent grief ne saurait prospérer.

72. Dans ces conditions, le quatrième moyen doit être rejeté comme non fondé dans son ensemble.

– Obiter dicta sur le critère de l’investisseur privé

73. À titre d’obiter dictum, et sans vouloir mettre en cause l’arrêt attaqué, je souhaiterais aborder une question procédurale présentant un lien avec la méthode à suivre par la Commission lorsqu’elle établit l’existence d’un avantage. En effet, ainsi qu’il ressort tant de la jurisprudence que de la communication de la Commission, aux fins de déterminer si une garantie ou un régime de garantie accorde un avantage, la Commission doit se fonder sur le principe de l’«investisseur en économie de marché»
qui exige de tenir compte des possibilités pour une entreprise bénéficiaire d’obtenir des ressources financières équivalentes en ayant recours au marché des capitaux ( 65 ). Le critère de l’investisseur privé étant axé sur le critère de la rentabilité d’un niveau raisonnable, il s’agit donc de vérifier si une opération s’est déroulée dans des conditions normales d’économie de marché, tout en prenant en compte l’interaction entre les différents agents économiques ( 66 ).

74. Alors même qu’il résulte de la jurisprudence que, en adoptant des règles de conduite, la Commission s’autolimite dans l’exercice de son pouvoir d’appréciation et ne saurait se départir de ces règles sous peine de se voir sanctionner ( 67 ), le critère susmentionné n’a pas été appliqué par la Commission dans la décision litigieuse et cette carence n’a pas été censurée par le Tribunal. En conséquence, il convient de s’interroger sur le point de savoir si un tel moyen aurait pu être soulevé
d’office par le Tribunal après en avoir informé les parties ( 68 ). Dans la mesure où l’applicabilité dudit critère n’a pas été soulevée dans le cadre du présent pourvoi, une telle problématique ne pourrait être utilement évoquée par la Cour que sous l’angle de la violation de formes substantielle au sens de l’article 263 TFUE, en tant que la violation du devoir de motivation ( 69 ).

75. De surcroît, j’observe que, dans le domaine des aides d’État, la Cour opère une distinction entre deux catégories de situations: celles où l’intervention de l’État présente un caractère économique et celles où l’intervention de l’État relève des actes de puissance publique ( 70 ), le critère de l’opérateur privé ne s’appliquant que dans le premier cas. Or, la Cour a récemment jugé qu’un avantage économique, même accordé par des moyens de nature fiscale, doit être apprécié, notamment, au regard
du critère de l’investisseur privé, s’il apparaît au terme de l’appréciation globale le cas échéant requise que l’État membre concerné a néanmoins, malgré l’emploi de tels moyens relevant de la puissance publique, accordé ledit avantage en sa qualité d’actionnaire de l’entreprise lui appartenant ( 71 ).

76. À cet égard, je tiens à souligner que l’application du test de l’investisseur privé est inadaptée au cas d’une garantie implicite de l’État et devrait donc être exclue, notamment, au motif qu’une telle garantie relève des actes ou des omissions de la puissance publique au sens général, et non pas des actes adoptés en tant que détenteur d’intérêts patrimoniaux dans l’entreprise concernée, en l’espèce, dans La Poste. En revanche, je considère que le Tribunal aurait pu se prononcer sur cette
question en la soulevant d’office.

C – Sur le sens des moyens invoqués devant le Tribunal (premier moyen du pourvoi)

77. Par son premier moyen, la requérante reproche au Tribunal d’avoir considéré, aux points 53 à 57 de l’arrêt attaqué, que tous les moyens soulevés à l’appui du recours en annulation se rattachaient à la détermination de l’existence d’un avantage et que, par conséquent, l’argument tiré d’une méconnaissance de la condition relative au transfert de ressources d’État était irrecevable, dans la mesure où il constituait un moyen nouveau introduit en cours d’instance. Dans cette perspective, la
requérante fait également valoir que, contrairement à ce que prétend le Tribunal au point 57 de l’arrêt attaqué, elle n’aurait pas admis, lors de l’audience, que son argumentation ne visait que la condition relative à l’existence d’un avantage.

78. D’emblée, je constate qu’il ressort indubitablement du procès‑verbal de l’audience, dont la véracité n’a pas été mise en cause par la République française, que celle‑ci avait indiqué, en réponse à une question du Tribunal, ne pas contester qu’il s’agissait de ressources d’État, dans l’hypothèse où le Tribunal devait conclure à l’existence d’une garantie implicite illimitée. De surcroît, dans le cadre de la correspondance postérieure à l’audience devant le Tribunal ( 72 ), la République française
a confirmé que, «si le Tribunal devait conclure à l’existence d’une garantie implicite illimitée, il s’agirait de ressources d’État». Dans cette même lettre, la République française a ensuite précisé la nature des preuves à apporter, selon elle, par la Commission afin de pouvoir conclure à l’existence d’une telle garantie. J’en conclus que la République française ne nie pas sa prise de position lors de l’audience. Par ailleurs, une éventuelle dénaturation des preuves doit apparaître de façon
manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves ( 73 ). Or, tel n’est pas le cas d’espèce.

79. En outre, je considère que, en rejetant la problématique relative au critère distinct de la notion d’aide d’État tel le critère d’engagement des ressources d’État, le Tribunal n’a fait que respecter la jurisprudence portant sur l’interdiction de requalifier l’objet du recours ( 74 ). En effet, alors que certains points de la requête se rattachent au transfert de ressources d’État, il apparaît clairement du point 49 de l’arrêt attaqué, où figure le résumé des arguments de la République française,
qu’aucun des moyens soulevés devant le Tribunal ne se référait expressément à l’analyse dudit critère. Or, je considère qu’il n’appartient pas au Tribunal de reconstruire les moyens dont il est saisi sur la base de mentions fragmentaires figurant dans plusieurs parties de la requête ( 75 ). Par conséquent, le premier moyen doit également être écarté.

IV – Conclusion

80. En conclusion, je suggère à la Cour de:

— rejeter le pourvoi de la République française,

— condamner la République française à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne.

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( 1 ) Langue originale: le français.

( 2 ) JO L 274, p. 1.

( 3 ) Ainsi qu’il ressort de la décision litigieuse, l’existence de la garantie litigieuse en faveur de La Poste, assimilée à l’établissement public à caractère industriel et commercial (ci‑après l’«EPIC»), a été dérivée d’une série d’indices, dont principalement l’inapplicabilité, des procédures d’insolvabilité et de faillite et la désignation de l’État comme responsable du recouvrement des dettes contractées (voir points 20 à 36 de ladite décision).

( 4 ) La République française a soulevé trois moyens à l’appui de son recours devant le Tribunal. Le premier moyen est tiré d’une erreur de droit en ce que la Commission n’aurait pas établi à suffisance de droit l’existence d’une aide d’État. Par son deuxième moyen, la République française fait valoir que la Commission aurait commis des erreurs de droit et de fait en considérant que La Poste, de par son statut d’EPIC, bénéficiait d’une garantie implicite et illimitée de ses dettes par l’État. Le
troisième moyen a été pris de l’inexistence d’un avantage au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.

( 5 ) Arrêt du 17 septembre 2009 (C-520/07 P, Rec. p. I-8555).

( 6 ) Arrêt du 2 septembre 2010 (C-290/07 P, Rec. p. I-7763).

( 7 ) La loi du 16 juillet 1980 relative aux astreintes prononcées en matière administrative et à l’exécution des jugements par les personnes morales de droit public (JORF du 17 juillet 1980, p. 1799).

( 8 ) Arrêt du Conseil d’État du 18 novembre 2005 (Recueil des décisions du Conseil d’État, p. 515).

( 9 ) Cour eur. D. H., arrêt du 26 septembre 2006 (requête no 57516/00).

( 10 ) Voir point 139 de la décision litigieuse.

( 11 ) Communication de la Commission sur l’application des articles 87 et 88 du traité CE aux aides d’État sous forme de garanties (2008/C 155/02) (JO 2008, C 155, p. 10, point 1.2, premier alinéa, ci‑après la «communication»).

( 12 ) Voir communication, point 1.2, deuxième alinéa.

( 13 ) Voir arrêt du 19 mars 2013, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a. et Commission/France e.a. (C‑399/10 P et C‑401/10 P, point 101 et jurisprudence citée).

( 14 ) En ce sens, arrêt du 1er décembre 1998, Ecotrade (C-200/97, Rec. p. I-7907, point 41).

( 15 ) Arrêts Ecotrade, précité, point 43; du 8 décembre 2011, Residex Capital IV (C-275/10, Rec. p. I-13043, points 39 à 42), et Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a. et Commission/France e.a., précité (point 107).

( 16 ) Je relève d’emblée la complexité d’une éventuelle suppression d’une aide accordée sous forme de garantie implicite, en application de l’article 1er de la décision litigieuse. S’il est vrai que la Cour a déjà eu à connaître de mesures indirectes, le degré de difficulté résultant de la nature implicite de la mesure ici litigieuse me semble toutefois revêtir un caractère exceptionnel.

( 17 ) Je note que l’existence de la garantie implicite constitutive d’une aide incompatible est admise par la Commission en l’absence de texte de droit national permettant de clarifier le statut juridique de La Poste.

( 18 ) Ainsi que je l’ai souligné aux points 87 et 88 de mes conclusions dans l’affaire Belgique/Deutsche Post et DHL International, il convient de préserver la distinction entre la notion d’indice et la notion de preuve. Le Tribunal ne doit pas prouver certaines circonstances, mais être en mesure de tirer une conclusion logique et motivée sur la base des éléments objectifs qui lui ont été soumis (arrêt du 22 septembre 2011C-148/09 P, Rec. p. I-8573).

( 19 ) En ce qui concerne le critère de l’existence de difficultés sérieuses en matière d’ouverture de la procédure formelle par la Commission, voir arrêt du Tribunal du 15 mars 2001, Prayon‑Rupel/Commission (T-73/98, Rec. p. II-867), et, plus récemment, arrêt du 24 janvier 2013, 3F/Commission (C‑646/11 P, point 31 et jurisprudence citée).

( 20 ) Arrêt du 13 avril 1994, Allemagne et Pleuger Worthington/Commission (C-324/90 et C-342/90, Rec. p. I-1173, point 15).

( 21 ) Voir en ce sens arrêt Allemagne et Pleuger Worthington/Commission, précité, point 23.

( 22 ) Voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 2004, Espagne/Commission (C-276/02, Rec. p. I-8091, point 37).

( 23 ) Arrêt du 15 février 2005, Commission/Tetra Laval (C-12/03 P, Rec. p. I-987, point 39).

( 24 ) Voir, en ce sens, arrêt Commission/Scott, précité (point 90).

( 25 ) Voir notamment, s’agissant du deuxième moyen devant le Tribunal, points 66, 71, 78, 82, 87, 92 à 94 de l’arrêt attaqué.

( 26 ) Arrêts du Tribunal du 6 mars 2003, Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein‑Westfalen/Commission (T-228/99 et T-233/99, Rec. p. II-435, point 270), et du 17 décembre 2008, Ryanair/Commission (T-196/04, Rec. p. II-3643, point 59).

( 27 ) S’agissant de la distinction à préserver entre charge de la preuve et niveau de preuve, voir conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Akzo Nobel e.a./Commission (arrêt du 10 septembre 2009, C-97/08 P, Rec. p. I-8237), point 74 et note 64.

( 28 ) Le terme «niveau de preuve» («standard of proof») est apparu expressément dans la jurisprudence de la Cour avec de grands arrêts dans les affaires Commission/Tetra Laval, précitée; du 25 janvier 2007, Sumitomo Metal Industries et Nippon Steel/Commission (C-403/04 P et C-405/04 P, Rec. p. I-729); du 10 juillet 2008, Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala (C-413/06 P, Rec. p. I-4951), ainsi que du 6 octobre 2009, GlaxoSmithKline Services e.a./Commission e.a. (C-501/06 P, C-513/06 P,
C-515/06 P et C-519/06 P, Rec. p. I-9291, point 87).

( 29 ) Arrêt du 25 octobre 1983, AEG‑Telefunken/Commission (107/82, Rec. p. 3151, point 136).

( 30 ) Arrêt du 28 mars 1984, Compagnie royale asturienne des mines et Rheinzink/Commission (29/83 et 30/83, Rec. p. 1679, point 20).

( 31 ) Arrêt du 31 mars 1993, Ahlström Osakeyhtiö e.a./Commission (C-89/85, C-104/85, C-114/85, C-116/85, C-117/85 et C-125/85 à C-129/85, Rec. p. I-1307, points 70 et 127).

( 32 ) Voir arrêt Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala, précité (points 47, 51 et 52). Le critère a été repris par le Tribunal dans l’arrêt du 14 décembre 2005, General Electric/Commission (T-210/01, Rec. p. II-5575), aux points 64 et 65 «selon toute vraisemblance», au point 331 «prévisible avec un degré de probabilité suffisant» et au point 340 «[…] la Commission n’a pas démontré sur la base de preuves solides, et avec un degré de probabilité suffisant, que l’entité fusionnée aurait
utilisé la puissance commerciale de GECAS ainsi que la puissance financière du groupe résultant de la position de GE Capital […] à l’avenir».

( 33 ) Sibony, A., et Barbier de La Serre, E., «Charge de la preuve et théorie du contrôle en droit communautaire de la concurrence», RTD Eur. 2007, p. 205.

( 34 ) Voir, en ce sens, arrêt du 8 septembre 2011, Commission/Pays‑Bas (C-279/08 P, Rec. p. I-7671, point 111).

( 35 ) Arrêt Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a. et Commission/France e.a., précité (points 109 à 110).

( 36 ) Arrêt Commission/Scott, précité (points 64 à 66).

( 37 ) Voir arrêt du Tribunal du 3 mars 2010, Bundesverband deutscher Banken/Commission (T-163/05, Rec. p. II-387, point 38).

( 38 ) Voir en ce sens, notamment, arrêts du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission (C-204/00 P, C-205/00 P, C-211/00 P, C-213/00 P, C-217/00 P et C-219/00 P, Rec. p. I-123, point 49), ainsi que du 23 mars 2006, Mülhens/OHMI C-206/04 P, Rec. p. I-2717, point 28).

( 39 ) Voir arrêt du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris/Commission (C-82/01 P, Rec. p. I-9297, points 56 et 63).

( 40 ) Arrêt du 5 juillet 2011, Edwin/OHMI (C-263/09 P, Rec. p. I-5853, point 53).

( 41 ) Voir, ex multis, arrêts du 11 juillet 1996, SFEI e.a. (C-39/94, Rec. p. I-3547, point 60), et du 22 décembre 2008, British Aggregates/Commission (C-487/06 P, Rec. p. I-10515, point 82).

( 42 ) En outre, je note que l’identification de l’avantage en matière de garanties se distingue également en ce que la garantie peut bénéficier soit cumulativement au prêteur et à l’emprunteur, soit exclusivement à ce dernier. Voir, à ce sujet, point 33 et suiv. des conclusions de l’avocat général Kokott dans l’affaire Residex Capital IV, précitée, ainsi qu’arrêt du 24 octobre 1996, Allemagne e.a./Commission (C-329/93, C-62/95 et C-63/95, Rec. p. I-5151, point 56).

( 43 ) Arrêt du 5 juin 2012, Commission/EDF (C‑124/10 P, point 77 et jurisprudence citée).

( 44 ) Voir conclusions de l’avocat général Mengozzi dans l’affaire Bouygues et Bouygues Télécom/Commission e.a. et Commission/France e.a., précitée, et jurisprudence citée au point 47, notamment, arrêts du 2 juillet 1974, Italie/Commission (173/73, Rec. p. 709, point 27); du 24 février 1987, Deufil/Commission (310/85, Rec. p. 901, point 8), et du 26 septembre 1996, France/Commission (C-241/94, Rec. p. I-4551, point 20).

( 45 ) Arrêt Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein‑Westfalen/Commission, précité (point 270).

( 46 ) Point 106 de l’arrêt attaqué.

( 47 ) Voir, en ce sens, arrêt du 17 mars 1993, Sloman Neptun (C-72/91 et C-73/91, Rec. p. I-887, point 21).

( 48 ) Voir, en ce sens, arrêt Ecotrade, précité, point 45.

( 49 ) Arrêt du 17 juin 1999, Piaggio (C-295/97, Rec. p. I-3735, point 42).

( 50 ) Arrêt du 9 juin 2011, Comitato «Venezia vuole vivere» e.a./Commission (C-71/09 P, C-73/09 P et C-76/09 P, Rec. p. I-4727, point 63).

( 51 ) Arrêt précité, point 39.

( 52 ) Voir arrêt du 1er juillet 2008, Chronopost et La Poste/UFEX e.a. (C-341/06 P et C-342/06 P, Rec. p. I-4777, point 128 a contrario).

( 53 ) Voir, par analogie, arrêt Belgique/Deutsche Post et DHL International, précité (points 84 à 87).

( 54 ) Au reste, cela reflète une approche déjà suivie par la Commission aux fins de l’adoption d’une décision semblable relative à EDF qui possédait alors le statut d’EPIC [voir points 67 à 72 de la décision 2005/145/CE de la Commission, du 16 décembre 2003, relative aux aides d’État accordées par la France à EDF et au secteur des industries électriques et gazières (JO L 49, p. 9). Cette décision n’a fait l’objet d’aucun recours].

( 55 ) Point 2.2 de la décision litigieuse.

( 56 ) Au motif que la garantie existait avant 1958, la Commission a appliqué l’article 1er, sous b), du règlement (CE) no 659/1999 du Conseil, du 22 mars 1999, portant modalités d’application de l’article 93 du traité CE (JO L 83, p. 1).

( 57 ) Il ressort du dossier que ce n’est qu’en 1990 que l’ancienne direction générale de la poste et des télécommunications a été transformée à compter du 1er janvier 1991 en deux personnes morales de droit public: France Télécom et La Poste. Ainsi qu’il ressort du point 3 de l’arrêt attaqué, par arrêt du 18 janvier 2001, la Cour de cassation a retenu le principe selon lequel La Poste était assimilée à un EPIC. J’observe que la thèse de l’aide existante implique qu’avant 1990 le mécanisme de la
garantie implicite était en vigueur du fait qu’il s’agissait d’une entité relevant de l’État lui‑même. Ainsi, à la lumière de cette interprétation, l’État a été son propre garant.

( 58 ) Arrêt Chronopost et La Poste/UFEX e.a., précité (point 144).

( 59 ) Arrêt du 1er juin 2006, P&O European Ferries (Vizcaya) et Diputación Foral de Vizcaya/Commission (C-442/03 P et C-471/03 P, Rec. p. I-4845, point 110).

( 60 ) Arrêt du 14 février 1990, France/Commission, dit «Boussac Saint Frères» (C-301/87, Rec. p. I-307, points 32 et 33).

( 61 ) Voir, arrêts P&O European Ferries (Vizcaya) et Diputación Foral de Vizcaya/Commission, précité, et du 29 avril 2004, Italie/Commission (C-298/00 P, Rec. p. I-4087, point 49).

( 62 ) Voir point 4 des conclusions de l’avocat général Capotorti présentées dans l’affaire Philip Morris Holland/Commission (arrêt du 17 septembre 1980, 730/79, Rec. p. 2671). Voir, également, arrêts Westdeutsche Landesbank Girozentrale et Land Nordrhein‑Westfalen/Commission, précité (point 296 et jurisprudence citée), et du 10 janvier 2006, Cassa di Risparmio di Firenze e.a. (C-222/04, Rec. p. I-289, point 140).

( 63 ) Arrêt du 29 avril 2004, Italie/Commission (C-372/97, Rec. p. I-3679, points 44 et 45).

( 64 ) En ce sens, arrêts du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France (C-367/95 P, Rec. p. I-1719, point 47), ainsi que du 29 mars 2011, ThyssenKrupp Nirosta/Commission (C-352/09 P, Rec. p. I-2359, point 136).

( 65 ) Arrêt du 16 mai 2002, France/Commission, dit «Stardust» (C-482/99, Rec. p. I-4397), et communication, point 4.1.

( 66 ) Voir, en ce sens arrêt Bundesverband deutscher Banken/Commission, précité (points 36 et suiv.).

( 67 ) Arrêt du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission (C-189/02 P, C-202/02 P, C-205/02 P à C-208/02 P et C-213/02 P, Rec. p. I-5425, points 211 à 213).

( 68 ) Voir arrêt du 2 décembre 2009, Commission/Irlande e.a. (C-89/08 P, Rec. p. I-11245).

( 69 ) Ibidem, points 34 et 35.

( 70 ) Voir, en ce sens, arrêt du 14 septembre 1994, Espagne/Commission (C-278/92 à C-280/92, Rec. p. I-4103, point 22), ainsi que point 20 des conclusions de l’avocat général Léger dans l’affaire Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (arrêt du 24 juillet 2003, C-280/00, Rec. p. I-7747).

( 71 ) Arrêt Commission/EDF, précité (point 92).

( 72 ) Annexe 3 du pourvoi devant la Cour: lettre du gouvernement français adressée au greffe du Tribunal le 15 juin 2012.

( 73 ) Notamment, arrêt du 18 mars 2010, Trubowest Handel et Makarov/Conseil et Commission (C-419/08 P, Rec. p. I-2259, points 30 à 32 et jurisprudence citée).

( 74 ) Arrêt du 29 novembre 2007, Stadtwerke Schwäbisch Hall e.a./Commission (C‑176/06 P).

( 75 ) Ainsi que je l’ai déjà proposé dans mes conclusions dans l’affaire Belgique/Deutsche Post et DHL International, précitée.


Synthèse
Formation : Première chambre
Numéro d'arrêt : C-559/12
Date de la décision : 21/11/2013
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé, Pourvoi - irrecevable
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi – Aide d’État – Aide sous forme d’une garantie implicite illimitée en faveur de La Poste résultant de son statut d’établissement public – Existence de la garantie – Présence de ressources étatiques – Avantage – Charge et niveau de la preuve.

Aides accordées par les États

Concurrence


Parties
Demandeurs : République française
Défendeurs : Commission européenne.

Composition du Tribunal
Avocat général : Jääskinen

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2013:766

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