ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
19 septembre 2013 ( *1 )
«Pourvoi — Dumping — Règlement (CE) no 826/2009 — Importation de certaines briques de magnésie originaires de Chine — Règlement (CE) no 384/96 — Article 2, paragraphe 10, sous b) — Comparaison équitable — Article 11, paragraphe 9 — Réexamen intermédiaire partiel — Obligation d’appliquer la même méthode que dans l’enquête ayant abouti à l’imposition du droit — Changement de circonstances»
Dans l’affaire C‑15/12 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 11 janvier 2012,
Dashiqiao Sanqiang Refractory Materials Co. Ltd, établie à Dashiqiao (Chine), représentée par Mes J.-F. Bellis et R. Luff, avocats,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant:
Conseil de l’Union européenne, représenté par M. J.-P. Hix, en qualité d’agent, assisté de Me G. Berrisch, Rechtsanwalt, et de Mme N. Chesaites, barrister,
partie défenderesse en première instance,
Commission européenne, représentée par MM. E. Gippini Fournier et H. van Vliet, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie intervenante en première instance,
LA COUR (deuxième chambre),
composée de Mme R. Silva de Lapuerta, président de chambre, MM. G. Arestis (rapporteur), J.-C. Bonichot, A. Arabadjiev et J. L. da Cruz Vilaça, juges,
avocat général: M. P. Cruz Villalón,
greffier: M. V. Tourrès, administrateur,
vu la procédure écrite et à la suite de l’audience du 10 janvier 2013,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par son pourvoi, Dashiqiao Sanqiang Refractory Materials Co. Ltd (ci-après «Dashiqiao») demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 16 décembre 2011, Dashiqiao Sanqiang Refractory Materials/Conseil (T-423/09, Rec. p. II-8369, ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation du règlement (CE) no 826/2009 du Conseil, du 7 septembre 2009, modifiant le règlement (CE) no 1659/2005 instituant un droit antidumping définitif sur les
importations de certaines briques de magnésie originaires de la République populaire de Chine (JO L 240, p. 7, ci‑après le «règlement litigieux»), dans la mesure où le droit antidumping qui y est fixé à l’égard de la requérante excède celui qui serait applicable s’il avait été déterminé sur le fondement de la méthode de calcul appliquée lors de l’enquête initiale pour tenir compte du non-remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée (ci-après la «TVA») chinoise à l’exportation.
Le cadre juridique
2 Le règlement (CE) no 384/96 du Conseil, du 22 décembre 1995, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO 1996, L 56, p. 1), a été remplacé et codifié par le règlement (CE) no 1225/2009 du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif à la défense contre les importations qui font l’objet d’un dumping de la part de pays non membres de la Communauté européenne (JO L 343, p. 51, et rectificatif JO 2010, L 7, p. 22).
Toutefois, compte tenu de la date de l’adoption du règlement litigieux, le litige doit être examiné sur le fondement du règlement no 384/96, tel que modifié par le règlement (CE) no 2117/2005 du Conseil, du 21 décembre 2005 (JO L 340, p. 17, ci-après le «règlement de base»), lequel prévoyait à son article 2, paragraphes 1, premier alinéa, 8 et 10:
«1. La valeur normale est normalement basée sur les prix payés ou à payer, au cours d’opérations commerciales normales, par des acheteurs indépendants dans le pays exportateur.
[…]
8. Le prix à l’exportation est le prix réellement payé ou à payer pour le produit vendu à l’exportation vers la Communauté.
[…]
10. Il est procédé à une comparaison équitable entre le prix à l’exportation et la valeur normale. Cette comparaison est faite, au même stade commercial, pour des ventes effectuées à des dates aussi proches que possible et en tenant dûment compte d’autres différences qui affectent la comparabilité des prix. Dans les cas où la valeur normale et le prix à l’exportation établis ne peuvent être ainsi comparés, il sera tenu compte dans chaque cas, sous forme d’ajustements, des différences constatées
dans les facteurs dont il est revendiqué et démontré qu’ils affectent les prix et, partant, leur comparabilité. On évitera de répéter les ajustements, en particulier lorsqu’il s’agit de différences relatives aux rabais, aux remises, aux quantités ou aux stades de commercialisation. Lorsque les conditions spécifiées sont réunies, les facteurs au titre desquels des ajustements peuvent être opérés sont les suivants:
[…]
b) Impositions à l’importation et impôts indirects
La valeur normale est ajustée d’un montant correspondant aux impositions à l’importation et [aux] impôts indirects supportés par le produit similaire et [par] les matériaux qui y sont physiquement incorporés, lorsque le produit est destiné à être consommé dans le pays exportateur, et qui ne sont pas perçus ou qui sont remboursés lorsque le produit est exporté dans la Communauté.
[…]
k) Autres facteurs
Un ajustement peut également être opéré au titre de différences relatives à d’autres facteurs non prévues aux points a) à j) s’il est démontré que ces différences affectent la comparabilité des prix, comme l’exige le présent paragraphe, et en particulier que les acheteurs paient systématiquement des prix différents sur le marché intérieur à cause d’elles.»
3 L’article 11 du règlement de base prévoit à ses paragraphes 3, premier alinéa, et 9:
«3. La nécessité du maintien des mesures peut aussi être réexaminée, si cela se justifie, à la demande de la Commission ou d’un État membre ou, sous réserve qu’une période raisonnable d’au moins un an se soit écoulée depuis l’institution de la mesure définitive, à la demande d’un exportateur, d’un importateur ou des producteurs de la Communauté contenant des éléments de preuve suffisants établissant la nécessité d’un réexamen intermédiaire.
[…]
9. Dans toutes les enquêtes de réexamen ou de remboursement effectuées en vertu du présent article, la Commission applique, dans la mesure où les circonstances n’ont pas changé, la même méthode que dans l’enquête ayant abouti à l’imposition du droit, compte tenu des dispositions de l’article 2, et en particulier de ses paragraphes 11 et 12, et des dispositions de l’article 17.»
Les antécédents du litige et le règlement litigieux
4 Les points pertinents du cadre factuel du litige sont exposés comme suit aux points 4 à 6 et 16 de l’arrêt attaqué:
«4 Le 11 avril 2005, la Commission des Communautés européennes a adopté le règlement (CE) no 552/2005 instituant [un droit antidumping provisoire] sur les importations de certaines briques de magnésie originaires de la République populaire de Chine (JO L 93, p. 6), qui a, notamment, institué un droit antidumping provisoire de 66,1 % applicable aux importations dans la Communauté européenne de certaines briques de magnésie produites par [Dashiqiao].
5 Par le règlement (CE) no 1659/2005, du 6 octobre 2005, instituant un droit antidumping définitif et portant perception définitive du droit provisoire institué sur les importations de certaines briques de magnésie originaires de la République populaire de Chine (JO L 267, p. 1), le Conseil de l’Union européenne a, notamment, institué un droit antidumping définitif de 27,7 % applicable aux importations dans la Communauté de certaines briques de magnésie produites par [Dashiqiao].
6 À la demande de [Dashiqiao], le règlement no 1659/2005 a fait l’objet d’un réexamen intermédiaire partiel au titre de l’article 11, paragraphe 3, du règlement de base […]. Au terme de ce réexamen, le Conseil a adopté le [règlement litigieux], par lequel le droit antidumping applicable aux importations de certaines briques de magnésie produites par [Dashiqiao] a été réduit à un taux de 14,4 %.
[…]
16 Enfin, aux considérants 29 à 32 du règlement [litigieux], figurant sous le point 4, intitulé ‘Comparaison’, il est exposé ce qui suit:
‘(29) La valeur normale moyenne et le prix moyen à l’exportation ont été comparés, pour chaque type du produit concerné, au niveau départ usine, au même stade commercial et au même niveau d’imposition indirecte. Pour que la comparaison entre valeur normale et prix à l’exportation soit équitable, il a été tenu compte, conformément à l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, des différences constatées dans les facteurs dont il a été affirmé et démontré qu’ils influençaient les prix et la
comparabilité de ceux-ci. À cet effet, des ajustements destinés à tenir compte des différences concernant les frais de transport, d’assurance, de manutention, de chargement et de crédit, ainsi que les droits antidumping effectivement payés, ont été opérés dans les cas où ils étaient applicables et justifiés.
(30) L’enquête a permis d’établir que la TVA payée sur les ventes à l’exportation n’a pas été remboursée (même partiellement, comme c’était le cas lors de l’enquête initiale). Dans les informations divulguées [à Dashiqiao] conformément à l’article 20 du règlement de base […], il a dès lors été indiqué que tant le prix à l’exportation que la valeur normale seraient établis en tenant compte de la TVA payée ou à payer. [Dashiqiao] soutient que cette méthode serait illégale. En ce qui concerne ses
arguments, il convient de noter ce qui suit.
(31) Premièrement, pour ce qui est de l’argument selon lequel une autre méthodologie a été utilisée lors de l’enquête initiale (à savoir la déduction de la TVA tant de la valeur normale que du prix à l’exportation), il importe de souligner que les circonstances qui prévalaient au cours de la période de l’enquête de réexamen n’étaient pas les mêmes que pendant la période de l’enquête initiale. Alors qu’au cours de la période d’enquête initiale, la TVA, comme il a été indiqué plus haut, était
partiellement remboursée, ce qui nécessitait qu’un ajustement soit opéré conformément à l’article 2, paragraphe 10, [du règlement de base,] aucune TVA n’a été remboursée sur les ventes à l’exportation au cours de la période d’enquête de réexamen. C’est la raison pour laquelle ni le prix à l’exportation ni la valeur normale n’ont dû faire l’objet d’un ajustement en ce qui concerne la TVA. Même si cette approche pou[vait] être qualifiée de changement de méthodologie, elle [serait] justifiée
au titre de l’article 11, paragraphe 9, du règlement de base, en raison d’un changement des circonstances.
(32) Par son second argument, [Dashiqiao] affirme que la méthode utilisée lors du présent réexamen aurait pour effet de gonfler artificiellement la marge de dumping. Cet argument ne peut pas être accepté. La méthode appliquée est neutre, car elle produit le même effet, même si, par exemple dans le cas de certains produits ou de certaines transactions, les ventes de la société à la Communauté sont effectuées à un prix d’exportation qui ne donne pas lieu à un dumping. En d’autres termes, même à
supposer que l’inclusion de la TVA des deux côtés de l’équation accroîtrait l’écart entre les deux éléments, il en irait de même pour les modèles dans lesquels il n’y aurait pas de dumping.’»
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
5 À l’appui de son recours devant le Tribunal, Dashiqiao a soulevé deux moyens tirés d’une violation, respectivement, des articles 2, paragraphe 10, et 11, paragraphe 9, du règlement de base.
6 Aucun des deux moyens invoqués par Dashiqiao au soutien de son recours n’ayant été accueilli, le Tribunal a rejeté celui-ci dans sa totalité.
Les conclusions des parties
7 Par son pourvoi, Dashiqiao demande à la Cour:
— d’annuler l’arrêt attaqué et de statuer elle-même sur le litige;
— de faire droit aux conclusions présentées en première instance et, dès lors, d’annuler le droit antidumping qui lui a été imposé par le règlement litigieux pour autant que ce droit excède celui qui serait applicable s’il avait été déterminé sur la base de la méthode appliquée lors de l’enquête initiale pour tenir compte du non-remboursement de la TVA chinoise à l’exportation, conformément à l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base;
— de condamner le Conseil au paiement des dépens des deux instances.
8 Le Conseil demande à la Cour:
— à titre principal, de rejeter le pourvoi;
— à titre subsidiaire, de renvoyer l’affaire devant le Tribunal;
— à titre plus subsidiaire, de rejeter le recours, et
— de condamner Dashiqiao aux dépens.
9 La Commission conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation de Dashiqiao aux dépens.
Sur le pourvoi
10 À l’appui de son pourvoi, dirigé contre l’arrêt attaqué en tant seulement qu’il rejette le second moyen de son recours, tiré de la violation de l’article 11, paragraphe 9, du règlement de base, Dashiqiao invoque trois moyens.
Sur les deux premiers moyens
Argumentation des parties
11 Par son premier moyen, Dashiqiao soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit dans la mesure où il a refusé de trancher la question de savoir quelle méthode de comparaison entre le prix à l’exportation et la valeur normale avait été appliquée dans l’enquête initiale et où il n’a donc pas pu valablement conclure qu’il n’y avait pas eu de «changement de méthode» au sens de l’article 11, paragraphe 9, du règlement de base dans la procédure de réexamen. À cet égard, elle fait valoir qu’il
ressort de cette disposition que seul un changement de circonstances permettrait aux institutions d’appliquer une méthode différente de celle utilisée lors de l’enquête initiale.
12 Dashiqiao souligne que le Tribunal aurait confondu, au point 57 de l’arrêt attaqué, la notion de changement de «méthode d’ajustement» avec celle de changement de «méthode de comparaison». Selon elle, il est constant que le droit antidumping imposé à ses importations à la suite de la procédure de réexamen aurait été inférieur si les institutions avaient appliqué, lors de cette procédure, la même méthode de comparaison entre le prix à l’exportation et la valeur normale que celle utilisée lors de
l’enquête initiale.
13 Par son deuxième moyen, Dashiqiao soutient que le Tribunal a commis une erreur de droit dans la mesure où il a considéré que les institutions seraient tenues de ne plus appliquer la méthode de comparaison entre le prix à l’exportation et la valeur normale appliquée lors de l’enquête initiale si celle-ci conduisait à un ajustement non autorisé par l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base. Selon Dashiqiao, le Tribunal a confondu les notions d’«ajustement» et de «méthode de
comparaison». Il suffirait que la méthode de comparaison entre le prix à l’exportation et la valeur normale utilisée lors de l’enquête initiale soit conforme à cet article 2, paragraphe 10, pour que les institutions soient tenues de l’appliquer également lors de la procédure de réexamen en vertu de l’article 11, paragraphe 9, du même règlement. Toutefois, selon Dashiqiao, les institutions n’auraient pas appliqué un ajustement au sens dudit article 2, paragraphe 10, puisque la méthode de
comparaison utilisée était fondée sur une valeur normale hors TVA pour laquelle un tel ajustement n’est pas envisagé.
14 Dashiqiao fait valoir que la méthode de comparaison sur la base «TVA incluse» utilisée lors du réexamen ne permet pas de tenir compte de l’incidence de la TVA à l’exportation dans la comparaison entre le prix à l’exportation et la valeur normale. Ce serait la méthode de comparaison sur la base «hors TVA» qui serait neutre. En outre, elle conteste l’application dudit article 2, paragraphe 10, sous b), à une taxe indirecte perçue au stade de la vente finale qui sert de base à la détermination de la
valeur normale. À cet égard, elle ajoute que l’utilisation d’une valeur normale hors TVA n’est pas incompatible avec l’article 2 du règlement de base. Par conséquent, le Tribunal aurait décidé à tort que la seule méthode de comparaison conforme à cet article 2 était une méthode reposant sur un ajustement fondé sur l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base.
15 Le Conseil et la Commission contestent tant la recevabilité que le bien-fondé de ces moyens et concluent au rejet de ceux-ci.
Appréciation de la Cour
16 Selon le libellé de l’article 11, paragraphe 9, du règlement de base, dans toutes les enquêtes de réexamen au sens de cet article, la Commission applique, dans la mesure où les circonstances n’ont pas changé, la même méthode que celle utilisée lors de l’enquête initiale ayant abouti à l’imposition du droit antidumping en question, compte tenu notamment des dispositions de l’article 2 du même règlement.
17 Il y a lieu de relever que l’exception permettant aux institutions d’appliquer, lors de la procédure de réexamen, une méthode différente de celle utilisée lors de l’enquête initiale lorsque les circonstances ont changé doit nécessairement faire l’objet d’une interprétation stricte, une dérogation ou une exception à une règle générale devant être interprétée restrictivement (voir arrêt du 29 septembre 2011, Commission/Irlande, C‑82/10, point 44 et jurisprudence citée).
18 À cet égard, il importe de souligner que la charge de la preuve incombe aux institutions qui doivent démontrer que les circonstances ont changé afin d’appliquer, lors de l’enquête de réexamen, une méthode différente de celle mise en œuvre lors de l’enquête initiale.
19 Toutefois, s’agissant du caractère d’exception d’un tel changement de circonstances au sens de l’article 11, paragraphe 9, du règlement de base, il importe de constater que l’exigence d’une interprétation stricte ne saurait permettre aux institutions d’interpréter et d’appliquer cette disposition d’une manière incompatible avec le libellé et la finalité de celle-ci (voir, en ce sens, arrêt du 19 juillet 2012, Conseil/Zhejiang Xinan Chemical Industrial Group, C‑337/09 P, point 93). À cet égard, il
convient de relever que ladite disposition prévoit en particulier que la méthode appliquée doit être conforme aux dispositions de l’article 2 du règlement de base.
20 En l’espèce, il ressort du point 55 de l’arrêt attaqué qu’un ajustement du prix à l’exportation avait été effectué lors de l’enquête initiale, au sens de l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base, et qu’il n’a pas été procédé à un tel ajustement dans le cadre de la procédure de réexamen, au motif que les conditions prévues par cette disposition n’étaient pas réunies. Selon le point 56 du même arrêt, cette différence ne constitue pas un «changement de méthode» au sens de
l’article 11, paragraphe 9, de ce règlement.
21 Dashiqiao soutient en substance que le Tribunal, en refusant de trancher la question de savoir quelle méthode de comparaison entre le prix à l’exportation et la valeur normale avait été appliquée dans l’enquête initiale, ne pouvait pas conclure valablement qu’il n’y avait pas eu de «changement de méthode» au sens de l’article 11, paragraphe 9, du règlement de base.
22 Or, le Tribunal a répondu à la question de la méthode de comparaison entre le prix à l’exportation et la valeur normale appliquée lors de l’enquête de réexamen et lors de l’enquête initiale, et ce dans le cadre de sa réponse au premier moyen du recours, tiré de la violation de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, cette réponse étant non contestée par Dashiqiao dans le cadre du présent pourvoi. En effet, le Tribunal a relevé, au point 37 de l’arrêt attaqué, qu’il ressort du règlement
litigieux que le Conseil a considéré que, au cours de la procédure de réexamen, et contrairement à la situation qui prévalait lors de l’enquête initiale, les conditions pour un ajustement de la valeur normale et/ou du prix à l’exportation au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base n’étaient pas réunies, de sorte que cette disposition ne pouvait pas trouver application.
23 Le Tribunal a, en outre, précisé, aux points 35 et 38 de l’arrêt attaqué, d’une part, que, lors de l’enquête initiale, la valeur normale et le prix à l’exportation ont été ajustés au titre de l’article 2, paragraphe 10, sous b), dudit règlement, en tenant compte du montant de la TVA payée ou à payer et, d’autre part, que la méthode appliquée lors du réexamen consistait en une comparaison de la valeur normale et du prix à l’exportation sur une base «TVA incluse» sur le seul fondement de la
disposition générale visée à cet article 2, paragraphe 10, première et deuxième phrases.
24 Partant, le premier moyen manquant en fait doit être rejeté comme non fondé.
25 S’agissant du deuxième moyen du pourvoi, il y a lieu de relever que, au point 56 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a conclu que la différence dans l’approche du Conseil contestée par Dashiqiao ne résulte pas d’un «changement de méthode» au sens de l’article 11, paragraphe 9, du règlement de base. Au point 57 du même arrêt, le Tribunal a jugé que les notions de «méthode» et d’«ajustement» ne coïncident pas et que la seule renonciation à un ajustement non justifié au regard des circonstances de
l’espèce ne peut être considérée comme un changement de méthode au sens de cette disposition.
26 Le Tribunal a également relevé à ce même point 57 que, dans ces circonstances, les conditions de l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base n’étaient plus réunies. Le Tribunal a en outre considéré, au point 58 de l’arrêt attaqué, que l’article 11, paragraphe 9, du même règlement prévoit que la méthode appliquée doit être conforme aux dispositions de l’article 2 de ce règlement et que, s’il devait s’avérer, au stade du réexamen, que l’application de la méthode utilisée lors de
l’enquête initiale n’était pas conforme à cet article 2, paragraphe 10, sous b), les institutions seraient tenues de ne plus appliquer cette méthode.
27 Or, c’est à bon droit que le Tribunal a jugé, au point 59 de l’arrêt attaqué, que, étant donné que l’article 11, paragraphe 9, du règlement de base requiert expressément que la méthode appliquée lors du réexamen respecte les exigences de l’article 2 de ce règlement, un tel réexamen ne peut pas avoir pour résultat un ajustement non autorisé, notamment, par l’article 2, paragraphe 10, sous b), dudit règlement.
28 C’est dans ce contexte que le Tribunal a également considéré, au point 60 de l’arrêt attaqué, que, dans ces conditions, il n’était pas nécessaire de trancher la question de savoir si, en l’espèce, la méthode appliquée lors de l’enquête initiale était conforme à l’article 2, paragraphe 10, sous b), du règlement de base dès lors que, lors du réexamen, une telle application n’était pas conforme à cette disposition, car les conditions exigées n’étaient pas réunies.
29 En effet, le rétablissement de la symétrie entre la valeur normale et le prix à l’exportation, qui est la finalité de tout ajustement au titre de l’article 2, paragraphe 10, du règlement de base, n’était plus nécessaire lors du réexamen, dès lors qu’avait disparu l’asymétrie ayant motivé l’ajustement effectué lors de l’enquête initiale, à savoir le remboursement partiel de la TVA à l’exportation.
30 Par conséquent, l’affirmation de Dashiqiao selon laquelle le Tribunal aurait commis une erreur de droit en jugeant que la seule méthode de comparaison applicable lors du réexamen, qui est conforme à l’article 2 du règlement de base, est celle consistant à procéder à un ajustement fondé sur le paragraphe 10, sous b), de cet article est inopérante à l’encontre de la simple constatation effectuée par le Tribunal selon laquelle plus aucun ajustement n’était en soi nécessaire.
31 Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de rejeter les deux premiers moyens du pourvoi comme non fondés.
Sur le troisième moyen
Argumentation des parties
32 Dashiqiao conteste la conclusion du Tribunal, au point 62 de l’arrêt attaqué, selon laquelle le Conseil a démontré que les circonstances avaient changé entre les deux enquêtes et que ce changement était de nature à justifier de renoncer à l’application de l’ajustement qui avait été utilisé lors de l’enquête initiale. Selon elle, cette conclusion est manifestement erronée dans la mesure où le changement de circonstances invoqué par le Conseil, tel que résumé au paragraphe 63 du même arrêt, ne
permettrait nullement de conclure qu’il aurait rendu inapplicable la méthode de comparaison utilisée dans l’enquête initiale. En effet, Dashiqiao soutient que, comme elle l’a mentionné dans le cadre de l’argumentation développée à l’appui de son premier moyen, le fait que le taux de la TVA chinoise à l’exportation effectivement perçue soit passé de 4 à 17 % entre l’enquête initiale et la procédure de réexamen a pour seule conséquence que l’ajustement du prix à l’exportation à effectuer en
application de l’article 2, paragraphe 10, sous k), serait de 17 % plutôt que de 4 %. La différence du taux de remboursement de la TVA aurait donc pu parfaitement être appréhendée par la méthode de comparaison appliquée lors de l’enquête initiale. En outre, elle considère que cette approche n’est pas conforme à l’exigence selon laquelle l’exception pour changement de circonstances, mentionnée au point 54 dudit arrêt, doit être interprétée strictement.
33 Le Conseil fait valoir que le troisième moyen est à la fois inopérant, irrecevable et non fondé. Pour la Commission, ce moyen est inopérant et non fondé.
Appréciation de la Cour
34 Il convient de relever que, au point 62 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé que, en tout état de cause, à supposer que, lors de la procédure de réexamen, le Conseil ait adopté une autre méthode de comparaison que celle appliquée lors de l’enquête initiale, cette institution a démontré que, d’une part, entre l’enquête initiale et la procédure de réexamen, les circonstances avaient changé et que, d’autre part, ce changement était de nature à justifier de renoncer à un tel ajustement. Le Tribunal
a lui-même relevé au point 63 dudit arrêt que, si, lors de l’enquête initiale, la TVA chinoise était partiellement remboursée sur les ventes à l’exportation des produits concernés, alors qu’elle était pleinement perçue sur les ventes domestiques, ce n’était plus le cas durant la période couverte par la procédure de réexamen, de sorte qu’était intervenu un changement de circonstances au sens de l’article 11, paragraphe 9, du règlement de base.
35 Le Tribunal a pu, sans commettre d’erreur de droit, déduire de cette constatation, au point 64 de l’arrêt attaqué, que, compte tenu de ce changement de circonstances, le Conseil était en droit de renoncer, lors de la procédure de réexamen, à ajuster la valeur normale et le prix à l’exportation, dès lors qu’il lui était possible de procéder à une comparaison équitable entre cette valeur et ce prix sur une base «TVA incluse».
36 En effet, il suffit de relever que l’ajustement auquel les institutions ont procédé lors de l’enquête initiale était destiné à tenir compte du remboursement partiel de la TVA chinoise à l’exportation engendrant une asymétrie entre la valeur normale et le prix à l’exportation, ce que Dashiqiao ne conteste pas.
37 Or, ainsi qu’il a été relevé au point 28 du présent arrêt, à partir du moment où l’élément qui causait l’asymétrie lors de l’enquête initiale, à savoir le remboursement partiel de la TVA à l’exportation, a cessé d’exister, aucun rétablissement de cette asymétrie, et donc aucun ajustement n’était plus nécessaire, indépendamment de la méthode d’ajustement effectivement appliquée.
38 Dès lors, les circonstances ayant justifié un ajustement ayant changé, c’est à bon droit que le Tribunal a constaté, à titre principal, qu’il ne s’agissait pas d’un changement de méthode, mais plutôt que les conditions d’un tel ajustement n’étaient pas remplies et, à titre surabondant, que, à supposer même qu’il se fût agi d’un changement de méthode, celui-ci aurait été justifié par un changement de circonstances.
39 Aucun des trois moyens invoqués par Dashiqiao au soutien de son pourvoi n’étant susceptible d’être accueilli, celui-ci doit être rejeté.
Sur les dépens
40 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Dashiqiao ayant succombé en ses moyens et le Conseil ayant conclu à sa condamnation, il y a lieu de la condamner aux dépens du pourvoi. Conformément à l’article 140, paragraphe 1, dudit règlement, également applicable à la procédure de pourvoi en vertu
du paragraphe 1 dudit article 184, il convient de décider que la Commission supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) déclare et arrête:
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Dashiqiao Sanqiang Refractory Materials Co. Ltd est condamnée aux dépens afférents à la présente procédure.
3) La Commission européenne supporte ses propres dépens.
Signatures
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( *1 ) Langue de procédure: le français.