ORDONNANCE DE LA COUR (sixième chambre)
21 mars 2013 (*)
«Pourvoi – Décision de la Commission – Non-engagement d’une procédure en manquement à l’encontre de la République de Bulgarie – Décisions prises par les autorités bulgares concernant le régime applicable aux marins – Prétendue violation du droit de l’Union»
Dans l’affaire C‑465/12 P,
ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 10 octobre 2012,
Plamen Simov, demeurant à Sofia (Bulgarie), représenté par M^e P. Danov, avocat,
partie requérante,
les autres parties à la procédure étant:
Commission européenne,
République de Bulgarie,
parties défenderesses en première instance,
LA COUR (sixième chambre),
composée de M^me M. Berger, président de chambre, MM. E. Levits (rapporteur) et J.-J. Kasel, juges,
avocat général: M. N. Jääskinen,
greffier: M. A. Calot Escobar,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de statuer par voie d’ordonnance motivée, conformément à l’article 181 du règlement de procédure de la Cour,
rend la présente
Ordonnance
1 Par son pourvoi, M. Simov demande, d’une part, l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 13 septembre 2012, Simov/Commission et Bulgarie (T‑271/12, ci-après l’«ordonnance attaquée»), par laquelle celui-ci a rejeté son recours en annulation de la décision de la Commission du 9 mars 2012 portant refus d’engager une procédure en constatation de manquement au titre de l’article 258 TFUE à l’encontre de la République de Bulgarie (ci-après la «décision litigieuse») et,
d’autre part, à ce que la Cour statue selon la procédure accélérée en application de l’article 133 de son règlement de procédure.
La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée
2 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 10 mai 2012, le requérant a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse et à ce que le Tribunal se prononce sur la prétendue violation du droit de l’Union par la République de Bulgarie.
3 Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rejeté ledit recours comme manifestement irrecevable.
4 S’agissant de la demande d’annulation de la décision litigieuse, le Tribunal a tout d’abord relevé qu’il a été reconnu par une jurisprudence constante de la Cour et du Tribunal que les particuliers ne sont pas recevables à attaquer un refus de la Commission européenne d’engager une procédure en constatation de manquement à l’encontre d’un État membre, tout en précisant que lorsque, comme en l’espèce, une décision de la Commission revêt un caractère négatif, cette décision doit être
appréciée en fonction de la nature de la demande à laquelle elle constitue une réponse.
5 Le Tribunal a ensuite rappelé que l’article 263, quatrième alinéa, TFUE prévoit que toute personne physique ou morale peut former, dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéas de cet article, un recours en annulation contre les actes dont elle est le destinataire ou qui la concernent directement et individuellement, ainsi que contre les actes réglementaires qui la concernent directement et qui ne comportent pas de mesures d’exécution.
6 Enfin, le Tribunal a précisé que, dans le cadre de la procédure en constatation de manquement régie par l’article 258 TFUE, les seuls actes que la Commission peut être amenée à prendre sont adressés aux États membres (ordonnances du Tribunal du 29 novembre 1994, Bernardi/Commission, T‑479/93 et T‑559/93, Rec. p. II‑1115, point 31, ainsi que du 19 février 1997, Intertronic/Commission, T‑117/96, Rec. p. II‑141, point 32), et qu’il résulte en outre du système prévu à l’article 258 TFUE que ni
l’avis motivé, qui ne constitue qu’une phase préalable au dépôt éventuel d’un recours en constatation de manquement devant la Cour, ni la saisine de la Cour par le dépôt effectif d’un tel recours ne sauraient constituer des actes concernant de manière directe les personnes physiques ou morales.
7 En ce qui concerne des allégations formées contre la République de Bulgarie, le Tribunal a rappelé que le contentieux de l’Union ne connaît pas de voie de droit permettant au juge de prendre position, au moyen d’une déclaration générale, sur une question dont l’objet dépasse le cadre du litige (ordonnance du Tribunal du 7 juin 2004, Segi e.a./Conseil, T‑338/02, Rec. p. II‑1647, point 48).
Les conclusions de la partie requérante devant la Cour
8 Par son pourvoi, le requérant demande à la Cour d’annuler l’ordonnance attaquée, de réexaminer l’affaire au fond ou de la renvoyer devant le Tribunal.
Sur le pourvoi
9 En vertu de l’article 181 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi, principal ou incident, est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, décider de rejeter ce pourvoi totalement ou partiellement, par voie d’ordonnance motivée.
10 Au soutien de sa demande, le requérant invoque un «flagrant déni de justice du fait de [l’ordonnance attaquée], ordonnance motivée par un défaut de conclusions des requérants [devant le Tribunal] et cela délibérément en vue de barrer l’accès à la justice européenne par le biais d’une violation inacceptable de l’article 47 de la charte des droits [fondamentaux de l’Union européenne] et de l’article 6 de la convention européenne [de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés
fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950], relatifs au droit à un procès équitable».
11 Le requérant indique que les «vices manifestes constatés dans l’ordonnance [attaquée] sont exposés dans la lettre de protestation au président du Tribunal du 25 septembre 2012».
12 À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, il résulte des articles 256 TFUE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et 168, paragraphe 1, sous d), de son règlement de procédure qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt ou de l’ordonnance dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande (voir, notamment, arrêts du 4
juillet 2000, Bergaderm et Goupil/Commission, C‑352/98 P, Rec. p. I‑5291, point 34; du 8 janvier 2002, France/Monsanto et Commission, C‑248/99 P, Rec. p. I‑1, point 68, ainsi que du 14 octobre 2010, Nuova Agricast et Cofra/Commission, C‑67/09 P, Rec. p. I‑9811, point 48). Ne répond pas à cette exigence le pourvoi qui ne contient aucune argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt ou l’ordonnance en question (voir ordonnances du 1^er février 2001,
Area Cova e.a./Conseil, C‑300/99 P et C‑388/99 P, Rec. p. I‑983, point 37, ainsi que du 29 novembre 2007, Weber/Commission, C‑107/07 P, point 24).
13 La Cour a également souligné que la seule énonciation abstraite des moyens dans la requête introductive d’instance ne répond pas aux exigences des articles 58 du statut de la Cour et 168, paragraphe 1, sous d), de son règlement de procédure (voir arrêts du 15 décembre 1961, Fives Lille Cail e.a./Haute Autorité, 19/60, 21/60, 2/61 et 3/61, Rec. p. 559, 588; du 5 mars 1991, Grifoni/CEEA, C‑330/88, Rec. p. I‑1045, point 18; ordonnances du 12 décembre 2006, Autosalone Ispra/Commission,
C‑129/06 P, point 30, ainsi que Weber/Commission, précitée, point 25).
14 En l’espèce, il convient d’observer que le pourvoi se limite à des affirmations générales selon lesquelles le Tribunal aurait méconnu le droit au procès équitable et ne contient pas non plus d’indications précises relatives aux considérants de l’ordonnance attaquée qui seraient éventuellement entachés d’une erreur de droit.
15 Or, un pourvoi revêtu de telles caractéristiques n’est pas susceptible de faire l’objet d’une appréciation juridique permettant à la Cour d’exercer la mission qui lui incombe dans le domaine considéré et d’effectuer son contrôle de légalité (voir, en ce sens, arrêt du 8 juillet 1999, Hercules Chemicals/Commission, C‑51/92 P, Rec. p. I‑4235, point 113; ordonnances Weber/Commission, précitée, point 28, et du 10 février 2009, Correia de Matos/Commission, C‑290/08 P, point 21).
16 Dans ces conditions, en application de l’article 181 du règlement de procédure, le pourvoi doit être rejeté comme manifestement irrecevable, sans qu’il soit nécessaire de le signifier aux parties défenderesses.
17 Étant donné l’adoption de la présente ordonnance, il n’y a plus lieu de statuer sur la demande d’une procédure accélérée présentée au titre de l’article 133, paragraphe 1, du règlement de la procédure.
Sur les dépens
18 Aux termes de l’article 137 du règlement de procédure, rendu applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, du même règlement, il est statué sur les dépens dans l’ordonnance qui met fin à l’instance.
19 La présente ordonnance étant adoptée avant la notification de la requête aux parties défenderesses et, par conséquent, avant que celles-ci n’aient pu exposer des dépens, le requérant supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (sixième chambre) ordonne:
1) Le pourvoi est rejeté.
2) M. Plamen Simov est condamné aux dépens.
Signatures
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* Langue de procédure: le bulgare.