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12/07/2012 | CJUE | N°C‑372/11

CJUE | CJUE, Ordonnance de la Cour, Power-One Italy SpA contre Commission européenne., 12/07/2012, C‑372/11


ORDONNANCE DE LA COUR (cinquième chambre)

12 juillet 2012 (*)

«Pourvoi – Responsabilité non contractuelle – Projet cofinancé par l’instrument financier ‘LIFE’ – Développement d’un nouveau système de fourniture d’énergie pour une utilisation dans la téléphonie mobile (projet ‘Pneuma’) – Décision de la Commission de mettre un terme au projet et de récupérer l’avance versée – Réparation du préjudice prétendument subi»

Dans l’affaire C‑372/11 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de

la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 14 juillet 2011,

Power-One Italy SpA, représentée par M^es R...

ORDONNANCE DE LA COUR (cinquième chambre)

12 juillet 2012 (*)

«Pourvoi – Responsabilité non contractuelle – Projet cofinancé par l’instrument financier ‘LIFE’ – Développement d’un nouveau système de fourniture d’énergie pour une utilisation dans la téléphonie mobile (projet ‘Pneuma’) – Décision de la Commission de mettre un terme au projet et de récupérer l’avance versée – Réparation du préjudice prétendument subi»

Dans l’affaire C‑372/11 P,

ayant pour objet un pourvoi au titre de l’article 56 du statut de la Cour de justice de l’Union européenne, introduit le 14 juillet 2011,

Power-One Italy SpA, représentée par M^es R. Giuffrida et A. Giussani, avvocati,

partie requérante,

l’autre partie à la procédure étant:

Commission européenne, représentée par M. P. Oliver et M^me D. Recchia, en qualité d’agents, ayant élu domicile à Luxembourg,

partie défenderesse en première instance,

LA COUR (cinquième chambre),

composée de M. M. Safjan, président de chambre, MM. A. Borg Barthet et J.‑J. Kasel (rapporteur), juges,

avocat général: M^me E. Sharpston,

greffier: M. A. Calot Escobar,

l’avocat général entendu,

rend la présente

Ordonnance

1 Par son pourvoi, Power-One Italy SpA (ci-après «Power-One») demande l’annulation de l’ordonnance du Tribunal de l’Union européenne du 24 mai 2011, Power-One Italy/Commission (T‑489/08, ci-après l’«ordonnance attaquée»), par laquelle celui-ci a rejeté son recours tendant à la réparation du préjudice qu’elle estime avoir subi à la suite de la décision de la Commission du 24 avril 2007 de clôturer le projet intitulé «Pneuma (Pneumatic Uninterruptible Machine) System: An Uninterruptible
Pneumatic Power Generator» (LIFE04 ENV/IT/000595) visant à développer un nouveau système de fourniture d’énergie pour une utilisation dans la téléphonie mobile (ci-après le «projet Pneuma») et de récupérer l’avance versée dans le cadre du financement de ce projet sur la base du règlement (CE) nº 1655/2000 du Parlement européen et du Conseil, du 17 juillet 2000, concernant un instrument financier pour l’environnement (LIFE) (JO L 192, p. 1, ci‑après la «décision litigieuse»).

Les antécédents du litige

2 Les antécédents du litige sont exposés aux points 1 à 31 de l’ordonnance attaquée et peuvent être résumés comme suit.

3 Par décision du 2 septembre 2004, la Commission européenne a approuvé l’octroi d’un soutien financier communautaire d’un montant de 1 226 753 euros en faveur du projet Pneuma. Power-One s’est engagée à réaliser ce projet entre le 1^er janvier 2004 et le 30 juin 2006 ainsi qu’à respecter les dispositions administratives standard adoptées par la Commission. Cette dernière a versé une avance de 490 701,32 euros à Power-One en date du 8 janvier 2005.

4 Les parties ont échangé une correspondance abondante entre le mois d’avril 2005 et celui de novembre 2007, notamment au sujet des rapports à fournir et des échéances à respecter.

5 Le 19 mars 2007, la Commission a signifié à Power-One sa décision de mettre fin au projet litigieux et de procéder à la récupération de l’avance versée.

6 Par lettre recommandée du 24 avril 2007, la Commission a averti Power-One qu’elle entendait entamer la procédure de récupération des sommes versées à titre d’avance.

7 Le 31 mai 2007, Power-One a donné ordre à sa banque de procéder au remboursement des sommes perçues à titre d’avance.

8 Par lettre du 27 novembre 2007, la Commission a exposé une dernière fois les raisons pour lesquelles elle avait décidé de mettre fin au projet Pneuma ainsi que de procéder à la récupération des montants versés à titre d’avance.

La procédure devant le Tribunal et l’ordonnance attaquée

9 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 17 novembre 2008, Power-One a introduit un recours en indemnité visant à obtenir réparation du préjudice qu’elle prétendait avoir subi par suite de la décision litigieuse.

10 Par acte séparé, déposé au greffe du Tribunal le 5 février 2009, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité au titre de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal, à laquelle Power-One a répondu le 12 mars 2009.

11 Par l’ordonnance attaquée, le Tribunal a rejeté le recours.

12 Le Tribunal a rappelé, aux points 43 à 45 de l’ordonnance attaquée, qu’un recours en indemnité doit être déclaré irrecevable lorsqu’il tend, en réalité, au retrait d’une décision individuelle devenue définitive et qu’il aurait pour effet, s’il était accueilli, d’annihiler les effets juridiques de cette décision. Ainsi, un recours en indemnité pourrait être considéré comme un détournement de procédure lorsqu’il a le même objet et le même effet qu’un recours en annulation, notamment lorsque le
montant de la somme dont le paiement est demandé correspond exactement à celui des droits dont la partie requérante se trouve privée du fait de la décision en cause.

13 Le Tribunal a ajouté, au point 46 de ladite ordonnance, qu’il pourrait également être conclu à l’irrecevabilité du recours en indemnité lorsque la partie requérante recherche un bénéfice plus étendu, mais incluant celui qu’elle aurait pu retirer d’un arrêt d’annulation, à condition toutefois que soit constatée l’existence d’un lien étroit entre le recours en indemnité et le recours en annulation.

14 Après avoir relevé, au point 47 de la même ordonnance, qu’un tel lien étroit existe en l’espèce entre le recours en indemnité et un éventuel recours en annulation pour ce qui concerne la partie de la demande correspondant au montant maximal du financement communautaire prévu pour le projet Pneuma, le Tribunal a conclu, au point 48 de l’ordonnance attaquée, à l’irrecevabilité du recours dans cette mesure.

15 Pour ce qui est de l’autre partie de la demande indemnitaire, laquelle porte sur l’excédent des coûts supportés aux fins de la réalisation du projet Pneuma (ci-après le «préjudice résiduel»), le Tribunal a estimé, au point 49 de l’ordonnance attaquée, qu’elle n’avait ni le même objet ni le même effet qu’un éventuel recours en annulation et qu’elle ne pouvait dès lors être déclarée irrecevable au titre d’un détournement de procédure.

16 En revanche, le Tribunal a jugé que cette partie de la demande indemnitaire était irrecevable dans la mesure où elle ne satisfaisait pas aux conditions fixées à l’article 44, paragraphe 1, sous c), de son règlement de procédure.

17 À cet égard, le Tribunal a précisé, au point 52 de l’ordonnance attaquée, que, s’agissant plus particulièrement d’un recours en indemnité, la requête devait contenir les éléments permettant d’identifier le comportement fautif reproché, le caractère et l’étendue du préjudice ainsi que le lien de causalité entre ce comportement et le préjudice allégué.

18 Le Tribunal a considéré, au point 54 de l’ordonnance attaquée, que, en admettant même que la requête de Power-One contenait certains arguments permettant d’identifier le comportement reproché à la Commission, les indications fournies par Power-One quant aux deux autres éléments nécessaires pour pouvoir engager la responsabilité de l’Union européenne étaient manifestement insuffisantes.

19 Le Tribunal a d’abord relevé, au point 55 de l’ordonnance attaquée, que la requête de Power-One se bornait à chiffrer le préjudice total, sans indiquer le caractère et l’étendue du préjudice résiduel.

20 Ensuite, le Tribunal a observé, au point 56 de l’ordonnance attaquée, que la requête ne contenait aucune indication quant à la raison pour laquelle Power-One considérait que le préjudice résiduel avait pour origine le retrait du financement communautaire prévu pour le projet Pneuma.

21 Enfin, le Tribunal a ajouté, au point 57 de l’ordonnance attaquée, que la position de Power-One sur ces deux éléments manquants ne pouvait pas non plus être déduite implicitement du contexte de la requête.

Les conclusions des parties

22 Par son pourvoi, Power-One demande à la Cour:

– d’annuler l’ordonnance attaquée;

– de juger que la Commission a violé l’article 10, paragraphe 2, du règlement n° 1655/2000, l’article 14 des dispositions administratives standard adoptées par la Commission dans le cadre de la gestion du programme LIFE ainsi que le principe de protection de la confiance légitime;

– de constater l’existence d’un lien de causalité entre les agissements de la Commission et les dommages subis par elle et, par voie de conséquence, de condamner l’Union, conformément à l’article 268 TFUE, à l’indemniser pour tous les dommages subis et chiffrés à 2 876 188,99 euros, soit le coût exposé pour le projet Pneuma, et

– de condamner la Commission aux dépens.

23 La Commission demande à la Cour:

– de rejeter le pourvoi en le déclarant irrecevable et, en tout état de cause, non fondé, et

– de condamner Power-One aux dépens.

Sur le pourvoi

24 En vertu de l’article 119 de son règlement de procédure, lorsque le pourvoi est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement non fondé, la Cour peut, à tout moment, sur rapport du juge rapporteur, l’avocat général entendu, le rejeter partiellement ou totalement par voie d’ordonnance motivée.

25 À l’appui de son pourvoi, Power-One invoque trois moyens. Le premier est tiré d’une violation du principe de protection de la confiance légitime ainsi que d’une motivation insuffisante et contradictoire en ce qui concerne l’existence d’un détournement de procédure. Le deuxième moyen est fondé sur une violation du principe de protection de la confiance légitime, d’une application erronée des règles en matière de charge de la preuve et d’obtention des preuves ainsi que d’une motivation
insuffisante et contradictoire en ce qui concerne les allégations relatives au préjudice résiduel. Le troisième moyen est tiré d’une violation du principe général de protection de la confiance légitime, d’une fausse application des règles en matière de charge de la preuve et d’obtention des preuves ainsi que d’un défaut d’examen des faits décisifs pour la solution du litige en ce qui concerne le lien de causalité.

Sur le premier moyen

Argumentation des parties

26 Par son premier moyen, Power-One fait grief au Tribunal d’avoir procédé, au point 47 de l’ordonnance attaquée, à une distinction arbitraire entre le montant du financement communautaire du projet Pneuma et l’ensemble des coûts supportés aux fins de la réalisation de ce projet. Power-One estime, d’une part, qu’il y a eu violation manifeste du principe de protection de la confiance légitime car les coûts exposés n’auraient jamais été investis dans leur intégralité si la Commission avait
manifesté son intention de ne pas accorder le financement. D’autre part, dans la mesure où elle accueille l’exception d’irrecevabilité, l’ordonnance attaquée ne serait pas adéquatement motivée.

27 La Commission estime que le premier moyen soulevé par Power-One vise à remettre en cause non pas la constatation, par le Tribunal, de l’existence d’un lien étroit entre, d’une part, la demande de dédommagement correspondant au montant maximal du financement communautaire du projet Pneuma et, d’autre part, l’annulation de la décision de la Commission de clôturer le projet Pneuma, mais uniquement la distinction opérée par le Tribunal entre ce montant maximal et le montant correspondant au
préjudice résiduel. Selon la Commission, l’argument relatif à la violation du principe de protection de la confiance légitime a trait au fond du recours et dépasse donc la question de la recevabilité. En tout état de cause, le moyen devrait être déclaré irrecevable en ce qu’il se borne à répéter les arguments déjà présentés par Power-One en première instance.

28 À titre subsidiaire, la Commission considère que la distinction opérée par le Tribunal est conforme à la jurisprudence applicable en la matière.

Appréciation de la Cour

29 Conformément à une jurisprudence constante, il résulte des articles 256 TFUE, 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et 112, paragraphe 1, sous c), de son règlement de procédure qu’un pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l’arrêt dont l’annulation est demandée ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande, sous peine d’irrecevabilité du pourvoi ou du moyen concerné (voir, notamment, arrêts
du 28 juin 2005, Dansk Rørindustri e.a./Commission, C‑189/02 P, C‑202/02 P, C‑205/02 P à C‑208/02 P et C‑213/02 P, Rec. p. I‑5425, point 426, ainsi que du 14 octobre 2010, Deutsche Telekom/Commission, C‑280/08 P, Rec. p. I‑9555, point 24).

30 Par son premier moyen, Power-One reproche au Tribunal, en premier lieu, de ne pas avoir constaté, au point 47 de l’ordonnance attaquée, une violation du principe de protection de la confiance légitime dans la mesure où, sans le support du financement communautaire, les coûts supportés aux fins de la réalisation du projet Pneuma n’auraient pas été investis.

31 Or, il convient de relever que le Tribunal a, tout d’abord, rappelé, aux points 42 à 46 de l’ordonnance attaquée, la jurisprudence pertinente en matière d’irrecevabilité d’un recours en indemnité pour cause de détournement de procédure.

32 Ensuite, au point 47 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal s’est prononcé sur les effets juridiques qu’une éventuelle annulation de la décision litigieuse aurait pu avoir sur le projet Pneuma, à savoir la restauration du projet litigieux et le reversement des montants récupérés, ainsi que sur le lien étroit existant entre l’annulation de cette décision et le versement d’une partie de la somme demandée à titre d’indemnité.

33 Enfin, le Tribunal a conclu, au point 48 de l’ordonnance attaquée, que la partie de la demande en indemnité correspondant au montant maximal du financement communautaire prévu pour le projet Pneuma tendait, en réalité, à l’annulation de la décision litigieuse et qu’elle devait être rejetée comme étant irrecevable pour cause de détournement de procédure.

34 Si le pourvoi permet certes d’identifier l’élément critiqué de l’ordonnance attaquée, à savoir le point 47 de celle-ci, l’argument relatif à la prétendue violation du principe de protection de la confiance légitime n’est toutefois pas suffisamment clair et précis. En effet, Power-One se limite à affirmer que la violation dudit principe est manifeste, dès lors que la Commission n’aurait jamais fait apparaître son intention de révoquer le financement.

35 En tout état de cause, cet argument n’est pas de nature à remettre en cause la constatation faite par le Tribunal, au point 47 de l’ordonnance attaquée, relative à l’existence d’un lien étroit entre une éventuelle annulation de la décision litigieuse et une partie de la somme demandée à titre d’indemnité.

36 Il y a lieu d’ajouter, ainsi qu’il ressort des points 53 et 54 de l’ordonnance attaquée, que l’argument tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime ne saurait être pertinent que dans le cadre de l’analyse de l’affaire quant au fond et, plus particulièrement, lorsqu’il s’agit de déterminer si le comportement de la Commission a été susceptible d’engager la responsabilité de l’Union au titre des articles 268 TFUE et 340, deuxième alinéa, TFUE.

37 Or, il est constant que l’ordonnance attaquée a rejeté le recours comme irrecevable sans entamer l’analyse de l’affaire quant au fond.

38 Dès lors que l’argument tiré de la violation du principe de protection de la confiance légitime est dirigé contre la partie de l’ordonnance attaquée relative à l’irrecevabilité du recours pour cause de détournement de la procédure, mais qu’il n’est pertinent que dans le cadre de l’analyse de l’affaire quant au fond, il doit être rejeté.

39 En second lieu, Power-One reproche au Tribunal un défaut de motivation en ce qui concerne l’analyse de l’irrecevabilité pour cause de détournement de la procédure.

40 Ainsi qu’il ressort des points 12 à 14 ainsi que 31 à 33 de la présente ordonnance, le Tribunal a, à l’appui de sa décision, rappelé la jurisprudence pertinente en matière d’irrecevabilité d’un recours en indemnité pour cause de détournement de procédure et, par la suite, appliqué ladite jurisprudence au cas d’espèce en concluant qu’une partie de la demande en indemnité tendait, en réalité, à l’annulation de la décision litigieuse.

41 L’argument tiré d’un défaut de motivation doit donc être écarté comme manifestement non fondé.

42 À cet égard, il convient de rappeler que le fait que le juge de première instance soit parvenu à une conclusion différente de celle du requérant ne saurait en soi entacher l’ordonnance attaquée d’un défaut de motivation (voir, en ce sens, arrêt du 20 mai 2010, Gogos/Commission, C‑583/08 P, Rec. p. I‑4469, point 35 et jurisprudence citée).

43 Il résulte de ce qui précède que le premier moyen doit être déclaré partiellement manifestement irrecevable et partiellement manifestement non fondé.

Sur le deuxième moyen

Argumentation des parties

44 À l’appui de son deuxième moyen, Power-One fait valoir que le Tribunal a estimé, à tort, aux points 55 et 56 de l’ordonnance attaquée, que la requête ne contenait pas les indications nécessaires concernant le caractère et l’étendue du préjudice résiduel ainsi que le lien de causalité entre le préjudice résiduel et le retrait du financement du projet Pneuma. Selon Power-One, le Tribunal a commis une erreur de droit en ne retenant pas la violation du principe de la protection de la confiance
légitime alors que le préjudice subi est dû aux attentes que la Commission a fait naître au cours de la procédure.

45 La Commission estime que le deuxième moyen confond, de nouveau, la question de la recevabilité du recours et l’analyse du fond de l’affaire. L’ordonnance attaquée se limitant à la question de la recevabilité de la requête, les arguments quand au fond, présentés dans le cadre du présent moyen, seraient irrecevables.

46 À titre subsidiaire, la Commission considère que le Tribunal n’a commis aucune erreur de droit en jugeant insuffisants, au regard de l’article 44, paragraphe 1, sous c), de son règlement de procédure, les éléments contenus dans la requête introductive d’instance.

Appréciation de la Cour

47 Ainsi qu’il ressort du point 36 de la présente ordonnance, le Tribunal a retenu que l’argument relatif à la violation du principe de la protection de la confiance légitime ne saurait être pertinent que dans le cadre de l’analyse de l’affaire quant au fond, notamment lorsqu’il s’agit d’identifier le comportement reproché à la Commission. Le Tribunal a toutefois ajouté que les indications indispensables aux deux autres éléments nécessaires pour engager la responsabilité de l’Union faisaient
défaut.

48 Par conséquent, le Tribunal a rejeté le recours comme irrecevable sans entamer l’analyse de l’affaire quant au fond.

49 Étant donné que le présent moyen, qui se rattache à l’analyse de l’affaire quant au fond, est dirigé contre la partie de l’ordonnance attaquée relative à l’irrecevabilité du recours pour non-conformité de la requête avec l’article 44, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure du Tribunal, il doit être rejeté comme dépourvu de pertinence.

50 De surcroît, le présent moyen se limite à invoquer la violation du principe de protection de la confiance légitime sans expliquer en quoi consiste l’erreur de droit prétendument commise par le Tribunal aux points 55 et 56 de l’ordonnance attaquée.

51 Il résulte de ce qui précède que, pour les mêmes motifs que ceux déjà avancés dans le cadre de l’analyse du premier moyen, le deuxième moyen doit être déclaré manifestement irrecevable.

Sur le troisième moyen

Argumentation des parties

52 Par son troisième moyen, Power-One fait valoir que le Tribunal a commis une erreur matérielle dans l’appréciation des faits ressortant du dossier soumis à son examen en déclarant, au point 57 de l’ordonnance attaquée, que le contexte de la requête ne permettait pas de fournir une indication implicite quant à l’incidence du comportement en cause sur le fait que Power-One a supporté des coûts excédant le montant maximal pour lequel la Commission s’était engagée.

53 Selon Power-One, le Tribunal a dénaturé les éléments de preuve produits en ne prenant pas en compte, dans la motivation de sa décision, différentes circonstances factuelles déjà invoquées dans la requête introductive d’instance ainsi que dans les observations sur l’exception d’irrecevabilité.

54 La Commission estime, quant à elle, que le troisième moyen confond également la question de la recevabilité du recours et l’analyse de l’affaire quant au fond.

55 À titre subsidiaire, la Commission fait valoir que le troisième moyen n’est pas fondé, dès lors qu’il procède d’une lecture erronée du point 57 de l’ordonnance attaquée. En effet, l’analyse et la motivation de la constatation du défaut d’éléments relatifs au lien de causalité figureraient au point 56 de l’ordonnance attaquée, tandis que le point 57 de cette dernière ne concernerait que les éléments de la requête comportant des indications implicites à ce sujet.

Appréciation de la Cour

56 Conformément à une jurisprudence constante, le Tribunal est seul compétent pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, ainsi que pour apprécier les éléments de preuve retenus. La constatation de ces faits et l’appréciation de ces éléments ne constituent donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (voir en ce
sens, notamment, arrêts du 2 octobre 2001, BEI/Hautem, C‑449/99 P, Rec. p. I‑6733, point 44, ainsi que du 29 avril 2004, Parlement/Ripa di Meana e.a., C‑470/00 P, Rec. p. I‑4167, point 40 et jurisprudence citée).

57 Or, ladite dénaturation doit apparaître de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (voir arrêts du 6 avril 2006, General Motors/Commission, C‑551/03 P, Rec. p. I‑3173, point 54, ainsi que du 18 mars 2010, Trubowest Handel et Makarov/Conseil et Commission, C‑419/08 P, Rec. p. I‑2259, point 32).

58 En outre, il ressort de la jurisprudence de la Cour que, lorsqu’un requérant allègue une dénaturation des éléments de preuve par le Tribunal, il doit indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par celui-ci et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation (voir, en ce sens, arrêt du 20 octobre 2011, PepsiCo/Grupo Promer Mon Graphic, C‑281/10 P, non encore publié au Recueil, point 78).

59 Par son troisième moyen, Power-One se borne à faire valoir que le Tribunal, en omettant de prendre en compte les éléments de preuve qu’elle a produits en première instance, a commis, au point 57 de l’ordonnance attaquée, une dénaturation de ces éléments de preuve.

60 Or, au point 57 de l’ordonnance attaquée, le Tribunal a jugé, d’une part, que la requête de Power-One ne contenait manifestement pas d’indications concrètes quant au caractère et à l’étendue du préjudice résiduel ainsi qu’à l’existence d’un lien de causalité entre celui-ci et le comportement en cause et, d’autre part, qu’il n’était pas non plus possible de déduire de manière implicite de la requête de Power‑One l’existence de ces deux éléments manquants pour pouvoir engager la responsabilité
de l’Union.

61 À cet égard, le Tribunal a procédé, aux points 58 à 60 de l’ordonnance attaquée, à l’analyse de certains éléments de preuve contenus dans la requête introductive d’instance. En premier lieu, il a relevé que ladite requête ne contenait aucune précision sur les prétendues demandes en dédommagement présentées par les partenaires stratégiques de Power-One. En deuxième lieu, il a estimé que la requête ne faisait pas ressortir le motif pour lequel la Commission, dont l’engagement financier ne
couvrait qu’une partie des coûts exposés, devait être tenue pour responsable de l’intégralité de ces coûts. En troisième lieu, le Tribunal a jugé que les affirmations de Power-One relatives à l’atteinte à son image, dans la mesure où elles constituaient un argument supplémentaire quant au fond du litige, ne pouvaient être prises en compte dans le cadre de l’analyse de la recevabilité de la requête.

62 Loin de critiquer de manière précise les développements du Tribunal figurant aux points 57 à 60 de l’ordonnance attaquée, le troisième moyen de Power-One se borne à reprendre des éléments déjà invoqués dans la requête introductive d’instance ainsi que dans les observations sur l’exception d’irrecevabilité.

63 Ainsi, bien qu’elle invoque une dénaturation des éléments de preuve, Power-One vise en réalité à obtenir une nouvelle appréciation de ceux‑ci, ce qui échappe à la compétence de la Cour, conformément à la jurisprudence citée au point 56 de la présente ordonnance.

64 Par conséquent, le troisième moyen doit être déclaré manifestement irrecevable.

65 Il résulte de l’ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi doit, en application de l’article 119 du règlement de procédure de la Cour, être rejeté dans son intégralité.

Sur les dépens

66 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure de la Cour, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de Power-One et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

Par ces motifs, la Cour (cinquième chambre) ordonne:

1) Le pourvoi est rejeté.

2) Power-One Italy SpA est condamnée aux dépens.

Signatures

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* Langue de procédure: l’italien.


Synthèse
Formation : Cinquième chambre
Numéro d'arrêt : C‑372/11
Date de la décision : 12/07/2012
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé, Pourvoi - irrecevable
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi – Responsabilité non contractuelle – Projet cofinancé par l’instrument financier ‘LIFE’ – Développement d’un nouveau système de fourniture d’énergie pour une utilisation dans la téléphonie mobile (projet ‘Pneuma’) – Décision de la Commission de mettre un terme au projet et de récupérer l’avance versée – Réparation du préjudice prétendument subi.

Environnement


Parties
Demandeurs : Power-One Italy SpA
Défendeurs : Commission européenne.

Composition du Tribunal
Avocat général : Sharpston
Rapporteur ?: Kasel

Origine de la décision
Date de l'import : 30/06/2023
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2012:462

Source

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