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06/03/2012 | CJUE | N°C-551/10

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Éditions Odile Jacob SAS contre Commission européenne., 06/03/2012, C-551/10


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁN MAZÁK

présentées le 6 mars 2012 ( 1 )

Affaire C‑551/10 P

Éditions Odile Jacob SAS

contre

Commission européenne

«Pourvoi — Concurrence — Opérations de concentration — Édition francophone — Règlement (CEE) no 4064/89 — Violation de l’article 3 — Détournement de pouvoir — Défaut de motivation — Principes de sécurité juridique, de confiance légitime et d’égalité — Appréciation d’une position dominante — Adéquation des engagements»>
I – Introduction

1. Par son pourvoi, Éditions Odile Jacob SAS demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 13 septemb...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁN MAZÁK

présentées le 6 mars 2012 ( 1 )

Affaire C‑551/10 P

Éditions Odile Jacob SAS

contre

Commission européenne

«Pourvoi — Concurrence — Opérations de concentration — Édition francophone — Règlement (CEE) no 4064/89 — Violation de l’article 3 — Détournement de pouvoir — Défaut de motivation — Principes de sécurité juridique, de confiance légitime et d’égalité — Appréciation d’une position dominante — Adéquation des engagements»

I – Introduction

1. Par son pourvoi, Éditions Odile Jacob SAS demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 13 septembre 2010, Éditions Odile Jacob/Commission, T‑279/04 (ci-après l’«arrêt attaqué»), par lequel cette juridiction a rejeté son recours en annulation de la décision 2004/422/CE de la Commission, du 7 janvier 2004, déclarant une opération de concentration compatible avec le marché commun et le fonctionnement de l’accord sur l’Espace économique européen (affaire no COMP/M.2978 –
Lagardère/Natexis/VUP) ( 2 ) (ci-après la «décision litigieuse»).

II – Les faits à l’origine du litige

2. Les faits à l’origine du litige sont exposés de façon très détaillée aux points 1 à 59 de l’arrêt attaqué. Nous nous bornerons donc à mentionner un certain nombre de faits pertinents afin d’expliquer brièvement les antécédents du pourvoi. Le 25 septembre 2002, Vivendi Universal SA (ci-après «VU») a décidé de céder les actifs d’édition (ci-après les «actifs cibles») détenus en Europe par sa filiale Vivendi Universal Publishing SA (ci-après «VUP»). Lagardère SCA (ci-après «Lagardère») s’est portée
candidate à l’acquisition de ces actifs. Il est toutefois apparu que le calendrier de cession établi par VU, qui désirait réaliser la vente et en recevoir le prix dans les meilleurs délais, n’était pas compatible avec la nécessité d’obtenir l’autorisation préalable, par les autorités de concurrence compétentes, de ce projet de rachat. Lagardère a donc demandé à Natexis Banques Populaires SA (ci-après «NBP») de se substituer à elle par l’intermédiaire de l’une de ses filiales créée en vue de
l’acquisition des actifs cibles auprès de VUP, de leur détention à titre provisoire, puis, une fois obtenue l’autorisation du projet de rachat des actifs cibles par Lagardère, de leur revente à celle-ci.

3. Le 3 décembre 2002, Investima 10 SAS (ci-après «Investima 10»), filiale à 100 % d’Ecrinvest 4 SA (ci-après «Ecrinvest 4»), elle-même filiale à 100 % de Segex Sarl (ci-après «Segex»), contrôlée pour sa part à 100 % par NBP, a signé en faveur de VUP une promesse d’acquisition des actifs cibles. Le même jour, Segex et Ecrinvest 4 ont conclu avec Lagardère un contrat de cession devant permettre à Lagardère, par le biais d’Ecrinvest 4, d’acquérir la totalité du capital social d’Investima 10 (ci-après
le «contrat de cession»). Aux termes du contrat de cession, la date du transfert de propriété à Lagardère des actions d’Ecrinvest 4 devait être postérieure à l’obtention par Lagardère, auprès des autorités de concurrence compétentes, de l’autorisation d’acquérir Ecrinvest 4. Conformément au contrat de cession, Lagardère a notamment payé à Segex, dès le 3 décembre 2002, le prix des actions. Lagardère s’est engagée à indemniser Segex, Ecrinvest 4 et Investima 10 de tout préjudice susceptible de
résulter de la mise en œuvre du contrat de cession. Un projet de notification du rachat des actifs cibles envisagé par Lagardère a été déposé auprès de la Commission des Communautés européennes le 10 décembre 2002. Le 20 décembre 2002, VUP a donné suite à la promesse d’acquisition que lui avait faite Investima 10 et celle-ci a conclu le même jour avec VUP le contrat d’acquisition des actifs cibles.

4. Le 14 avril 2003, Lagardère a procédé à la notification auprès de la Commission de son projet de rachat des actifs cibles, en application de l’article 4, paragraphe 1, du règlement (CEE) no 4064/89 du Conseil, du 21 décembre 1989, relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises ( 3 ). Par décision du 5 juin 2003, la Commission, constatant que le projet de concentration notifié soulevait des doutes sérieux quant à sa compatibilité avec le marché commun, a engagé le contrôle
approfondi de cette opération, sur le fondement de l’article 6, paragraphe 1, sous c), du règlement no 4064/89.

5. Investima 10 est devenue Editis SA (ci-après «Editis») le 14 octobre 2003.

6. Le 7 janvier 2004, la Commission a adopté la décision litigieuse, autorisant l’opération de concentration sous réserve d’engagements. Aux termes de ces engagements, Lagardère devait rétrocéder des actifs représentant approximativement 60 à 70 % du chiffre d’affaires mondial de VUP et 70 à 80 % du chiffre d’affaires réalisé par VUP sur les marchés francophones concernés par l’opération de concentration. La Commission a considéré que les engagements de Lagardère conduisaient à l’élimination de la
quasi-totalité des chevauchements horizontaux des activités des parties à l’opération de concentration sur l’ensemble des marchés francophones où cette opération créait ou renforçait une position dominante. La Commission a estimé que les engagements de Lagardère auraient pour effet, dans le cas d’une cession à un repreneur unique, d’éliminer la grande majorité des effets verticaux et congloméraux de l’opération analysée dans la décision litigieuse, lesquels résultaient du poids global de l’entité
issue de la concentration dans le secteur de l’édition francophone et contribuaient à la création ou au renforcement de positions dominantes sur les marchés en cause. La Commission en a conclu que, eu égard aux engagements de Lagardère, l’opération de concentration ne conduirait pas à la création ni au renforcement d’une position dominante de l’entité fusionnée sur le marché commun. Elle a donc décidé que, sous réserve du respect intégral de ses engagements par Lagardère en conformité avec les
articles 2, paragraphe 2, et 8, paragraphe 2, du règlement no 4064/89, son acquisition du contrôle unique, au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), de ce règlement, des actifs d’édition de VUP en Europe et en Amérique latine (hors Brésil), était compatible avec le marché commun et le fonctionnement de l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992 (JO 1994, L 1, p. 3).

7. Le 28 mai 2004, Lagardère et Wendel Investissement SA (ci-après «Wendel») sont convenues d’un projet de reprise des actifs rétrocédés. Par lettre du 4 juin 2004, Lagardère a demandé à la Commission d’agréer Wendel comme acquéreur des actifs en question.

8. Le 8 juillet 2004, la requérante a saisi le Tribunal de première instance des Communautés européennes (devenu le Tribunal de l’Union européenne) d’un recours dirigé contre la Commission et tendant à l’annulation de la décision litigieuse. Ce recours a été enregistré sous le numéro T‑279/04. Dans son arrêt, le Tribunal a intégralement rejeté le recours en annulation de la décision litigieuse.

III – Le pourvoi

9. La requérante invoque quatre moyens à l’appui de son pourvoi.

A – Premier moyen: violation de l’article 3 du règlement no 4064/89

1. La procédure devant le Tribunal

10. Dans le cadre de son premier moyen invoqué devant le Tribunal, la requérante soutenait que la décision litigieuse qualifiait à tort l’acquisition des actifs cibles par NBP d’acquisition de participations dans une entreprise, en vue de leur revente, relevant de l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 et qu’elle aurait dû qualifier cette acquisition de concentration ayant permis à Lagardère de prendre le contrôle des actifs cibles, soit par l’acquisition de leur contrôle unique
par l’intermédiaire de NBP, soit par l’acquisition de leur contrôle conjoint, avec NBP. En outre, la requérante faisait valoir en première instance que l’acquisition des actifs cibles par Investima 10 ne remplissait aucune des conditions cumulatives posées par l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 et que le portage des actifs cibles avait donc donné à Lagardère la possibilité d’exercer sur ces actifs une influence déterminante du mois de décembre 2002 jusqu’à leur cession à
Wendel, intervenue le 30 septembre 2004.

11. Le Tribunal a jugé que, à supposer même que l’acquisition des actifs cibles par Investima 10 ne remplisse pas toutes les conditions posées par l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89, il ne s’ensuivrait pas nécessairement que cette acquisition doive être qualifiée, au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), dudit règlement, d’acquisition de contrôle unique de ces actifs par Lagardère ou d’acquisition conjointe de ces actifs par Lagardère et NBP ( 4 ). Le Tribunal a
ensuite considéré que l’opération de portage des actifs cibles n’avait pas conféré à Lagardère, dès le mois de décembre 2002, la possibilité d’exercer sur l’activité liée à ces derniers, seule ou conjointement avec NBP, une influence déterminante, au sens de l’article 3, paragraphe 3, du règlement no 4064/89 ( 5 ). Le Tribunal a également ajouté, à titre surabondant, que, même si l’opération de portage des actifs cibles avait permis à Lagardère, comme le soutient la requérante, d’acquérir, dès
le mois de décembre 2002, leur contrôle unique ou conjoint, avec NBP, au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 4064/89, et même si, partant, l’opération en cause avait été réalisée avant même d’avoir été notifiée, une telle circonstance ne pourrait affecter la légalité de la décision litigieuse ( 6 ).

2. Argumentation

12. Le premier moyen du pourvoi est divisé en deux branches.

13. Premièrement, selon la requérante, en examinant l’opération de portage de façon isolée sans tenir compte de l’ensemble du montage juridique ayant abouti à la prise de contrôle des actifs cibles par Lagardère, le Tribunal a méconnu l’objectif du contrôle des concentrations et du droit de la concurrence en général, qui vise, ainsi que l’a confirmé l’arrêt du Tribunal Cementbouw Handel & Industrie/Commission ( 7 ), à appréhender la réalité économique qui sous-tend les transactions. De plus, en
contrevenant à l’objectif du contrôle des concentrations, et à sa propre jurisprudence en matière d’opérations complexes, le Tribunal crée une nouvelle exception, plus large que celles énumérées à l’article 3, paragraphe 5, du règlement no 4064/89. En autorisant de telles opérations de portage, quelle que soit la nature de l’«entreprise-véhicule» chargée de porter les actifs à céder, et en permettant ainsi à des transactions devant normalement faire l’objet d’une notification à la Commission
d’échapper au contrôle des concentrations, le Tribunal a également privé d’effet utile l’article 3, paragraphe 5, sous a), dudit règlement du fait de l’élimination de la condition de qualification en tant qu’établissement de crédit ou financier, voire de la condition liée au caractère temporaire de la transaction, prévue par cette disposition.

14. Deuxièmement, la requérante considère que le Tribunal a permis la création d’un «contrat de gardiennage» d’entreprise échappant au contrôle des concentrations. Le Tribunal a commis une erreur de droit en faisant une application tronquée de l’article 3, paragraphe 3, du règlement no 4064/89, se bornant à une analyse des seuls éléments contractuels, et en omettant totalement d’apprécier l’existence d’un contrôle de fait, nécessité confirmée par la pratique décisionnelle de la Commission et l’arrêt
du Tribunal Aer Lingus Group/Commission ( 8 ). En outre, selon la requérante, c’est à tort que le Tribunal a rejeté, au point 134 de l’arrêt attaqué, ses arguments relatifs à la possibilité d’exercer une influence déterminante liée au financement et à la prise en charge des risques, en déclarant qu’un tel financement est «induit par l’opération de portage elle-même». C’est également à tort que le Tribunal a écarté, au point 137 de l’arrêt attaqué, l’argument de la requérante concernant la dette
contractée par Segex et Ecrinvest 4 à l’égard de Lagardère.

15. Pour la Commission et Lagardère, ce moyen est inopérant, puisque l’objet de la décision litigieuse était non pas d’apprécier l’existence ou non d’un contrôle de fait dès décembre 2002, mais bien de contrôler la compatibilité avec le marché commun de l’opération notifiée le 14 avril 2003, qui portait sur l’acquisition par Lagardère du contrôle de VUP. Par conséquent, la qualification de l’opération de portage et les conséquences de cette qualification sont indépendantes de la légalité de la
décision du 7 janvier 2004 autorisant l’opération en cause sous conditions et n’affectent pas cette légalité. Lagardère soutient que la Commission ne peut interdire une opération de concentration que lorsque celle-ci aboutit à créer ou à renforcer une position dominante ayant comme conséquence une entrave significative à la concurrence sur le marché commun. Le défaut de notification ou la réalisation d’une concentration non autorisée ne peuvent être sanctionnés que par l’imposition d’une amende
sur le fondement de l’article 14 du règlement no 4064/89.

16. La Commission considère que la requérante fait erreur lorsqu’elle soutient, sur la base de l’arrêt Cementbouw Handel & Industrie/Commission ( 9 ), que le règlement no 4064/89 exigerait que la Commission fasse une appréciation unitaire des transactions interdépendantes constituant une concentration. La Commission ayant conclu que l’opération de concentration, moyennant l’imposition d’engagements, n’entravait pas la concurrence, le fait que l’appréciation d’une opération d’acquisition de contrôle
ne s’étende pas à l’étape du portage n’affecte pas l’objectif général du contrôle des concentrations. De surcroît, le constat du Tribunal selon lequel l’opération de portage relative aux actifs de VUP n’a pas conféré à Lagardère, à partir du mois de décembre 2002, la possibilité d’exercer une influence déterminante, seule ou conjointement avec NBP, sur les actifs concernés ne saurait être remis en cause au stade du pourvoi, sauf cas de dénaturation des faits, ce qui n’a pas été allégué. À la
lumière de l’arrêt Aer Lingus Group/Commission ( 10 ), et dès lors que la Commission a autorisé, sous conditions, l’opération portant sur l’acquisition, de façon durable, du contrôle unique par Lagardère des actifs cibles de VUP, une telle autorisation aurait également été cohérente avec une analyse qui aurait considéré le portage de VUP et d’Editis par NBP comme une «première étape» de cette opération de concentration unique, aboutissant seulement à l’issue de l’opération (la vente par NBP à
Lagardère, sous condition des engagements) au contrôle durable par Lagardère. La Commission considère que l’argument de la requérante relatif à la qualification de l’opération de portage et à la création d’une nouvelle exception pour les cas d’acquisition d’actifs à titre temporaire est inopérant, car il n’est pas décisif pour la légalité de la décision litigieuse. De plus, même si le portage avait été considéré comme étant la première étape d’une concentration, cette étape n’est pas pour
autant, en elle-même, une concentration. La Commission estime également que l’arrêt attaqué n’exclut pas la possibilité d’un contrôle de fait. Toutefois, dans ce contexte, c’est à la requérante qu’il incombe de prouver une erreur de la Commission. Il ne suffit pas d’alléguer que Lagardère exerçait un contrôle depuis décembre 2002, d’autant plus que des stipulations contractuelles ont été prévues pour exclure ce contrôle.

17. Lagardère soutient que, en tout état de cause, le présent moyen est pour partie irrecevable et pour partie mal fondé. Lagardère considère que le moyen de la requérante selon lequel le portage n’est que la première étape d’une concentration aboutissant in fine au contrôle de Lagardère constitue un argument nouveau soulevé au stade du pourvoi, contraire à la position adoptée par la requérante devant le Tribunal et, partant, irrecevable. Lagardère estime que l’argument de la requérante selon lequel
le Tribunal n’a pas analysé la possibilité d’un contrôle de fait de Lagardère sur Editis dès la période de portage est infondé, comme il ressort de l’appréciation de cette question par le Tribunal aux points 119 et suivants de l’arrêt attaqué.

3. Appréciation

18. S’agissant de l’argument selon lequel le présent moyen est inopérant, nous estimons qu’une opération de concentration, même notifiée tardivement en méconnaissance du délai d’une semaine prévu à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 4064/89 et réalisée en violation de l’obligation de suspension énoncée à l’article 7, paragraphe 1, du même règlement, qui ne crée ni ne renforce une position dominante ayant comme conséquence une entrave significative à la concurrence sur le marché commun, doit,
en vertu de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 4064/89, être déclarée compatible avec le marché commun par la Commission ( 11 ). L’absence de notification à la Commission d’une opération de concentration de dimension communautaire conformément à l’article 4 du règlement no 4064/89 ( 12 ) ou la réalisation de cette concentration non autorisée peuvent, toutefois, être sanctionnées par l’imposition d’une amende sur le fondement, respectivement, de l’article 14, paragraphe 1, sous a), et de
l’article 14, paragraphe 2, sous b), du règlement no 4064/89 ( 13 ).

19. À notre avis, il importe de souligner que cette approche repose sur la prémisse que tous les éléments factuels, juridiques et économiques susceptibles d’influencer la nature de la concentration ainsi que l’appréciation par la Commission, au titre du règlement no 4064/89, de l’incidence de cette opération sur la concurrence dans le marché commun ( 14 ) ont été ultérieurement notifiés à la Commission et que l’opération a donc été examinée par cette institution sur la base de l’ensemble des
informations utiles. Nous considérons que certaines erreurs ou omissions affectant la notification et touchant à la nature des transactions pourraient donc porter atteinte à l’évaluation correcte d’une concentration au regard du règlement no 4064/89 ( 15 ).

20. À cet égard, et dans le contexte de la présente procédure, nous estimons que le fait pour la Commission, dans sa décision approuvant une concentration, ou pour le Tribunal, dans son arrêt réexaminant cette décision, de ne pas tenir compte de l’ensemble des informations utiles et des circonstances entourant l’application de l’article 3 du règlement no 4064/89 et de ne pas les examiner correctement pourrait, le cas échéant, conduire à l’annulation de ladite décision ou de cet arrêt.

21. Toutefois, nous considérons que, même si les arguments soulevés par la requérante dans le cadre du présent moyen étaient effectivement fondés, ils ne pourraient pas conduire à l’annulation de l’arrêt attaqué. La prétendue erreur de qualification de l’opération de portage, dont la requérante reconnaît elle-même qu’elle fait partie intégrante de la concentration notifiée le 14 avril 2003 ( 16 ), ne concerne en réalité que la question de savoir si Lagardère a acquis le contrôle des actifs cibles en
décembre 2002, du fait de cette opération, ou plus tard. L’erreur alléguée n’a donc pas d’autre incidence pratique sur la nature de la concentration notifiée ou sur son effet vis-à-vis de la concurrence dans le marché commun. Cette approche est, selon nous, confortée par l’arrêt Cementbouw Handel & Industrie/Commission ( 17 ). Ainsi, comme le Tribunal l’a indiqué, l’objectif inhérent à l’appréciation du caractère unitaire par nature d’un certain nombre de transactions est, notamment, de
permettre à la Commission d’exercer un contrôle efficace sur les opérations de concentration qui sont susceptibles d’entraver de manière significative la concurrence dans le marché commun ( 18 ). La requérante ne peut donc pas faire utilement valoir, dans le cadre de la présente instance, que le Tribunal n’a pas correctement analysé l’opération de portage au regard de l’article 3 du règlement no 4064/89.

22. Nous examinerons néanmoins, à titre surabondant, les arguments de la requérante relatifs au premier moyen.

23. À notre sens, l’argument de Lagardère selon lequel la première branche du présent moyen est irrecevable doit être rejeté. Il n’est guère surprenant que la requérante, dans ses écritures devant le Tribunal, n’ait pas formulé ses arguments en utilisant les termes de l’arrêt Cementbouw Handel & Industrie/Commission ( 19 ) et de la communication juridictionnelle codifiée de la Commission concernant le règlement (CE) no 139/2004 du Conseil relatif au contrôle des opérations de concentration entre
entreprises ( 20 ), puisque cet arrêt et la communication en question sont postérieurs au recours en annulation introduit contre la décision litigieuse devant le Tribunal. Toutefois, la nature de l’opération de portage des actifs cibles dans le contexte plus large de l’opération notifiée à la Commission et la nécessité d’examiner le portage dans ce contexte sont des questions que la requérante a soulevées dans ses écritures devant le Tribunal.

24. S’agissant du bien-fondé de la première branche du présent moyen, nous considérons que le Tribunal n’a pas manqué d’appréhender la réalité économique de la concentration examinée par la Commission dans la décision litigieuse ou encore les diverses transactions ayant servi de base à cette concentration. En effet, outre l’analyse approfondie de l’opération de portage proprement dite, effectuée aux points 119 à 153 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a décrit avec force détails, aux points 10 à 36 de
cet arrêt, les transactions ayant précédé la notification de la concentration, intervenue le 14 avril 2003. En outre, la requérante, dans son pourvoi, a expressément admis cette présentation des faits par le Tribunal.

25. De plus, il ressort clairement de l’arrêt attaqué que le Tribunal a examiné l’opération de portage au regard de l’article 3, paragraphe 3, du règlement no 4064/89 en réponse aux arguments spécifiques soulevés par la requérante dans le cadre de son premier moyen d’annulation devant le Tribunal. La requérante soutenait que l’acquisition par NBP des actifs cibles contrariait l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 ( 21 ) et que l’opération de portage avait conféré à Lagardère la
possibilité d’exercer sur ces actifs une influence déterminante du mois de décembre 2002 jusqu’à leur cession à Wendel, en septembre 2004 ( 22 ). Ainsi, le Tribunal, répondant directement aux arguments que la requérante lui avait soumis, a examiné en détail si Lagardère avait acquis, seule ou conjointement, le contrôle des actifs cibles dès décembre 2002. Ayant constaté que, au regard de l’article 3, paragraphe 3, du règlement no 4064/89, Lagardère n’avait pas acquis le contrôle de ces actifs
dès décembre 2002, le Tribunal n’a pas examiné en détail l’application de l’article 3, paragraphe 5, sous a), dudit règlement ( 23 ). Il semblerait donc que l’examen de l’application de l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89, au regard duquel il n’y a pas de contrôle, ait été considéré comme superflu par le Tribunal à la lumière de sa constatation de l’absence de contrôle au sens de l’article 3, paragraphe 3, dudit règlement. Nous estimons que, ce faisant, le Tribunal n’a
pas privé d’effet utile l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 ( 24 ) ni créé une nouvelle exception concernant les acquisitions de contrôle.

26. En outre, c’est selon nous à bon droit que la Commission a soutenu dans ses écritures que l’appréciation, par le Tribunal, de l’opération de portage était conforme à la fois à l’arrêt Cementbouw Handel & Industrie/Commission ( 25 ) et à la communication juridictionnelle codifiée de la Commission concernant le règlement (CE) no 139/2004 du Conseil relatif au contrôle des opérations de concentration entre entreprises ( 26 ), car cette opération peut être considérée comme une première étape,
quoique insuffisante en soi ( 27 ), s’inscrivant dans une pluralité de transactions liées ayant finalement conduit à l’obtention, par Lagardère, du contrôle des actifs cibles et, partant, à une concentration au sens du règlement no 4064/89.

27. Nous proposons donc de rejeter la première branche du présent moyen comme étant non fondée.

28. Dans le cadre de la seconde branche du présent moyen, la requérante soutient que le Tribunal a fait une application incorrecte des critères permettant d’établir l’existence d’un contrôle au titre de l’article 3, paragraphe 3, du règlement no 4064/89 et s’est borné à une analyse des éléments contractuels et formels sans apprécier l’existence d’un contrôle de fait. La requérante déclare avoir soutenu devant le Tribunal que la possibilité pour Lagardère d’exercer une influence déterminante sur les
actifs cibles découlait de trois éléments de fait, à savoir le prêt à NBP de l’intégralité du prix d’acquisition (1,116 milliard d’euros), la garantie de paiement des baux et la mise à disposition d’une somme correspondant aux besoins de trésorerie de VUP (118 millions d’euros). En outre, la requérante a indiqué au Tribunal que l’influence déterminante de Lagardère et de Segex résultait de trois mécanismes cumulatifs, à savoir le droit de veto de Segex prévu à l’annexe 7 du contrat sur toute
évolution des actifs cibles, la dépendance financière dans laquelle Investima 10 était placée par rapport à Lagardère, compte tenu de la créance de 1,2 milliard d’euros, et le transfert à Lagardère de la totalité des risques sur l’activité, ainsi que le contrôle des locaux.

29. Nous considérons que l’argument de la requérante selon lequel le Tribunal s’est borné à analyser des stipulations contractuelles sans examiner la question du contrôle de fait exercé par Lagardère sur les actifs cibles est infondé. Il ressort de l’arrêt attaqué que le Tribunal, contrairement à ce que soutient la requérante, a étudié tous les arguments soulevés par la requérante en ce qui concerne le contrôle de fait et analysé les preuves offertes par celle-ci à cet égard. Le Tribunal a examiné
en premier lieu, aux points 133 et 134 de l’arrêt attaqué, si le fait que Lagardère avait financé l’opération de portage et pris en charge l’ensemble des risques inhérents à celle-ci lui conférait la possibilité d’exercer une influence déterminante sur les actifs cibles. En deuxième lieu, le Tribunal a examiné, aux points 136 puis 138 à 142 de l’arrêt attaqué, la nature du droit de veto que l’annexe 7 du contrat de cession reconnaît à Segex et à Ecrinvest 4 sur toute décision susceptible
d’affecter les actifs cibles ( 28 ). En troisième lieu, la question de savoir si la dette contractée par Segex et Ecrinvest 4 à l’égard de Lagardère a privé Segex du pouvoir réel d’exercer les droits attachés aux actifs cibles et a transformé cette dernière en mandataire gérant ces actifs cibles pour le compte de Lagardère a été examinée au point 137 de l’arrêt attaqué. En quatrième lieu, la question de l’indépendance des membres du directoire responsables de la gestion d’Investima 10 a été
examinée au point 143 de l’arrêt attaqué ( 29 ). Il ressort de cet arrêt que le Tribunal a examiné les questions ci-dessus relatives au contrôle de fait ainsi qu’un nombre considérable de stipulations contractuelles figurant dans le contrat de cession et qu’il a considéré que ces clauses suffisaient à exclure la possibilité d’un contrôle de fait des actifs cibles par Lagardère ( 30 ).

30. En l’absence de toute démonstration du caractère erroné de l’appréciation portée par le Tribunal sur les éléments de preuve relatifs au contrôle de fait et aux stipulations du contrat de cession, nous estimons que l’argument de la requérante sur le contrôle de fait doit être rejeté comme non fondé.

31. Par ailleurs, la requérante allègue que le raisonnement du Tribunal au point 133 de l’arrêt attaqué est purement circulaire. Le Tribunal a considéré que le financement de l’opération de portage et la prise en charge de l’ensemble des risques par Lagardère ne conféraient pas à cette dernière la possibilité d’exercer une influence déterminante sur les actifs cibles, car le financement et la prise en charge des risques résultaient de l’opération de portage elle-même ou étaient inhérents à celle-ci.
La requérante soulève le même grief à l’encontre du traitement, par le Tribunal, de son argument relatif à la dette contractée par Segex et Ecrinvest 4 à l’égard de Lagardère, lequel a été rejeté au point 137 de l’arrêt attaqué.

32. À notre sens, ce grief doit être compris comme un argument tiré du défaut de motivation de l’arrêt attaqué, qui soulève une question de droit pouvant être invoquée devant la Cour dans le cadre d’un pourvoi ( 31 ). Il nous apparaît nécessaire d’examiner le caractère suffisant de la motivation fournie par le Tribunal sur les questions du financement et de la prise en charge des risques à l’aune de la constatation précédente du Tribunal, exposée avec force détails dans l’arrêt attaqué, selon
laquelle la possibilité pour Lagardère d’exercer une influence déterminante sur les actifs cibles en raison de l’opération de portage était exclue par les termes explicites du contrat de cession ( 32 ).

33. Le Tribunal a ajouté, au point 134 de l’arrêt attaqué, que le financement de l’opération de portage était induit par l’opération elle-même, puisque NBP n’aurait pas consenti au portage sans l’engagement pris par Lagardère à son égard de supporter l’intégralité des risques et de la tenir indemne de tout dommage. Le Tribunal a dès lors jugé, au point 135 de l’arrêt attaqué, que le financement de l’opération ne constituait pas, à lui seul, la démonstration de l’absence de pouvoir de Segex sur les
actifs cibles. Au point 136 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a également relevé que le droit de veto reconnu à Segex et à Ecrinvest 4 sur toute décision susceptible d’affecter les actifs cibles allait bien au-delà des prévisions de l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89. Pour les mêmes raisons, le Tribunal a rejeté, au point 137 de l’arrêt attaqué, l’argument de la requérante selon lequel la dette considérable contractée par Segex et Ecrinvest 4 à l’égard de Lagardère aurait
privé Segex de tout pouvoir réel sur les actifs cibles et aurait transformé cette dernière en mandataire gérant ces actifs pour le compte de Lagardère. À nos yeux, la motivation fournie par le Tribunal sur la question du financement et sur celle de la dette contractée est claire, compréhensible et suffisante eu égard à l’appréciation portée par cette juridiction sur les stipulations contractuelles.

34. Nous considérons donc que le premier moyen est inopérant et, en tout état de cause, infondé.

B – Deuxième moyen: erreur de droit en ce que le Tribunal n’a pas tiré les conséquences juridiques des violations procédurales accumulées par la Commission

1. Argumentation

35. Par son deuxième moyen, la requérante dénonce une erreur de droit en ce que le Tribunal n’aurait pas tiré les conséquences juridiques des violations procédurales accumulées par la Commission. En faisant échapper à tout contrôle ces infractions au règlement no 4064/89, tenant notamment à la violation de l’obligation de suspension de la concentration, à l’absence de notification de nature à fonder la compétence de la Commission et à la fraude par substitution apparente d’acquéreur, le Tribunal
aurait validé une fraude à la loi, assimilable à un détournement de pouvoir par la Commission.

36. Selon la requérante, le Tribunal a commis une erreur de droit en jugeant que, dès lors qu’une opération de concentration aurait été réalisée dès décembre 2002, c’est-à-dire avant même d’avoir été notifiée, la seule sanction dans un tel cas était l’imposition d’une amende conformément à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 4064/89, et non l’annulation de la décision litigieuse. C’est également à tort que le Tribunal a déclaré que l’absence de notification de la concentration dans les délais
prescrits par l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 4064/89 n’entraînerait pour toute sanction qu’une amende, mais n’affecterait en rien la validité de la décision adoptée. Selon la requérante, s’il est exact que les violations des articles 7, paragraphe 1, et 4, paragraphe 1, du règlement no 4064/89 par les entreprises sont uniquement passibles d’amendes, de telles sanctions ne peuvent pas, par définition, s’appliquer à la Commission elle-même. Cette institution a commis un détournement de
pouvoir en permettant à Lagardère d’invoquer à tort l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 et d’éviter de notifier, dès décembre 2002, l’opération de concentration litigieuse. En omettant d’examiner la transaction dans les délais prescrits, la Commission a conféré un avantage concurrentiel à Lagardère vis-à-vis d’autres acquéreurs potentiels, puisque celle-ci a pu verser immédiatement le prix d’achat à VUP.

37. Dans sa réplique, la requérante souligne que le présent moyen vise, avant tout, non pas les sanctions que la Commission aurait pu prendre à l’égard d’une entreprise n’ayant pas respecté certaines obligations, mais les sanctions qui doivent être imposées pour des violations commises par la Commission elle-même et, par conséquent, le sort d’une décision adoptée au mépris des dispositions d’un règlement communautaire.

38. La Commission estime que le présent moyen est inopérant et infondé. Lagardère considère que ce moyen est irrecevable, car la requérante se borne à mentionner des éléments de fait qui ont été examinés par le Tribunal, sans invoquer une dénaturation des faits.

2. Appréciation

39. Nous considérons, à la lumière de nos conclusions relatives au premier moyen, que c’est à juste titre que le Tribunal a jugé, aux points 116 à 164 de l’arrêt attaqué, que l’opération de portage ne constituait pas une opération de concentration dès décembre 2002 au motif que Lagardère n’avait pas la possibilité d’exercer une influence déterminante, seule ou conjointement avec NBP, sur les actifs cibles en raison du portage. Il s’ensuit que l’obligation de suspendre une opération de concentration,
énoncée à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 4064/89, n’a pas été violée par VUP et Lagardère du fait de l’opération de portage ( 33 ). Ainsi, en l’absence de toute violation des règles de procédure tenant à l’obligation de suspendre une opération de concentration, l’argument selon lequel le Tribunal a commis une erreur de droit en ne tirant pas les conséquences juridiques d’une telle violation doit, à notre sens, être rejeté.

40. S’agissant de la question de la notification tardive de l’opération de concentration par Lagardère ( 34 ), il n’est pas contesté que cette opération a été notifiée tardivement, en méconnaissance du délai d’une semaine prévu à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 4064/89 ( 35 ). Nous estimons néanmoins que cette irrégularité procédurale, à supposer même qu’elle ait été induite par la Commission, comme le soutient la requérante, ne pouvait pas, à elle seule, avoir une incidence sur
l’appréciation de l’opération de concentration en cause ( 36 ), notamment en l’absence de violation de l’obligation de suspendre la concentration ( 37 ). Ainsi, dès lors que le sort de la décision litigieuse n’aurait pas été différent si l’opération de concentration avait été notifiée en temps utile, il serait, à notre sens, tout à fait disproportionné d’annuler la décision de la Commission pour ce seul motif ( 38 ). C’est donc à juste titre que le Tribunal a jugé, aux points 201 et 202 de
l’arrêt attaqué, que la Commission ne pouvait pas déclarer une opération de concentration incompatible avec le marché commun conformément à l’article 8, paragraphe 3, du règlement no 4064/89 au seul motif que la concentration a été notifiée tardivement, sauf si cette opération crée ou renforce une position dominante ayant comme conséquence une entrave significative à la concurrence.

41. Nous souhaiterions également relever que, selon les points 10 et suivants de l’arrêt attaqué, VUP et Lagardère ont entamé des négociations, à la fin du mois de septembre 2002, au sujet de l’acquisition des actifs cibles par cette dernière. En outre, le 8 octobre 2002 ou après cette date, la Commission a pris connaissance des principales conditions d’acquisition des actifs cibles par NBP, et les a approuvées ( 39 ). Le 10 décembre 2002, elle a reçu un projet de notification du rachat des actifs
cibles par Lagardère ( 40 ), la véritable notification n’étant intervenue que le 14 avril 2003, avec environ quatre mois de retard. Il ressort donc du dossier soumis à la Cour que la Commission a eu des contacts préalables informels avec les parties notifiantes à la concentration envisagée. À notre sens, de tels contacts, qui permettent à la Commission et aux parties notifiantes de discuter d’une future opération de concentration et à la Commission de clarifier ses conclusions préliminaires sur
certaines questions juridiques ou autres, ou d’indiquer son avis potentiel sur cette opération, ne constituent pas un détournement de pouvoir de la part de la Commission ( 41 ).

42. Bien au contraire, ces contacts sont conformes au principe de bonne administration, puisqu’ils encouragent l’«esprit de coopération ainsi qu’une meilleure compréhension entre la DG Concurrence, d’une part, et le monde juridique et de l’entreprise, d’autre part» ( 42 ), dans l’intérêt du contrôle des concentrations. Ces contacts préalables à la notification ne visent donc pas, ni ne servent, à favoriser tel ou tel acquéreur par rapport à un autre ( 43 ).

43. Ces contacts préalables entre la Commission et les parties notifiantes revêtant un caractère clairement informel, non contraignant et préliminaire, ils n’ont pas pour but de se substituer à la procédure de notification, mais visent plutôt à la renforcer. De plus, ces contacts informels ne sont manifestement pas de nature à dispenser les parties soumises à l’exigence de notification prévue à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 4064/89 de cette obligation légale qui leur incombe à titre
exclusif.

44. Nous proposons donc de rejeter le deuxième moyen comme non fondé.

C – Troisième moyen: erreur de droit en ce que le Tribunal n’a pas tiré les conséquences juridiques d’un défaut de motivation constituant une violation des formes substantielles et une violation des principes de sécurité juridique, de confiance légitime et d’égalité

1. Argumentation

45. Par son troisième moyen, la requérante invoque l’erreur de droit que le Tribunal aurait commise en omettant de sanctionner par la nullité une violation des formes substantielles entachant la décision litigieuse. Le présent moyen porte en particulier sur le défaut de motivation relatif à la qualification de l’opération de portage en cause par la Commission et à l’applicabilité de l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 à une partie de cette opération. La requérante considère
que le Tribunal a confirmé la position (implicite car non motivée) de la Commission selon laquelle l’opération de portage ne constituait pas une opération de concentration notifiable au sens du règlement no 4064/89. Alors que cette position produit des effets juridiques en particulier à l’égard des acquéreurs potentiels tels que la requérante, le point 6 des motifs de la décision litigieuse se borne à une mention évasive sur le sujet. Contrairement à la situation qui prévalait dans l’affaire
ayant donné lieu à l’arrêt Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala ( 44 ), le défaut de motivation dans le présent cas d’espèce portait sur la compétence de la Commission et concerne donc des questions qui ne sont pas hors de propos ou secondaires par nature. La Commission aurait dû déterminer la date à laquelle l’opération aurait dû être notifiée, afin de vérifier le respect des obligations de notification et de suspension et, au besoin, imposer des sanctions en cas de violation de
ces obligations.

46. La conclusion du Tribunal, exposée aux points 231 à 233 de l’arrêt attaqué, selon laquelle la Commission n’avait pas de compétence sur l’opération de portage, car celle-ci ne lui a pas été notifiée puisqu’elle ne constituait pas une concentration, est de nature circulaire et ne saurait justifier l’absence totale de motivation permettant de déterminer en quoi cette opération ne constituait pas une concentration ou ne faisait pas partie de l’opération de concentration notifiée. En validant le
défaut de motivation relatif à l’application faite par la Commission d’une exception au titre du règlement no 4064/89, le Tribunal, au point 233 de l’arrêt attaqué, a permis une violation des principes d’égalité et de sécurité juridique. La possibilité donnée à Lagardère de se prévaloir de cette exception a placé cette entreprise dans une position plus favorable à l’égard de la vente de VUP et a donc violé le principe d’égalité. En outre, la Commission est allée à l’encontre de sa pratique
décisionnelle et de ses lignes directrices, dont elle ne pouvait se départir sans se justifier, sous peine de violer les principes de sécurité juridique et de confiance légitime.

47. La Commission considère que le présent moyen est inopérant. La Commission et Lagardère estiment qu’il est dénué de fondement.

2. Appréciation

48. Selon une jurisprudence constante, la Commission ne viole pas son obligation de motivation si, lorsqu’elle exerce son pouvoir de contrôle des opérations de concentration, elle n’inclut pas dans sa décision de motivation précise quant à l’appréciation d’un certain nombre d’aspects de la concentration qui lui semblent manifestement hors de propos, dépourvus de signification ou clairement secondaires pour l’appréciation de cette dernière. Une telle exigence serait en effet difficilement compatible
avec l’impératif de célérité et les brefs délais de procédure qui s’imposent à la Commission lorsqu’elle exerce son pouvoir de contrôle des opérations de concentration et qui font partie des circonstances particulières d’une procédure de contrôle de ces opérations ( 45 ).

49. Il en résulte que, lorsque la Commission déclare une opération de concentration compatible avec le marché commun sur la base de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 4064/89, l’exigence de motivation est satisfaite si cette décision expose clairement les raisons pour lesquelles la Commission considère que la concentration en question, le cas échéant après modifications apportées par les entreprises concernées, ne crée pas ou ne renforce pas une position dominante ayant comme conséquence
qu’une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché commun ou une partie substantielle de celui-ci ( 46 ).

50. À cet égard, s’il est vrai que la Commission n’est pas obligée, dans la motivation des décisions adoptées en application du règlement no 4064/89, de prendre position sur tous les éléments et arguments invoqués devant elle, y compris ceux clairement secondaires pour l’appréciation à livrer, il n’en demeure pas moins qu’elle doit exposer les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de la décision. En outre, la motivation doit être logique, ne
présentant notamment pas de contradiction interne ( 47 ).

51. C’est au vu de ces principes qu’il convient d’examiner les critiques formulées par la requérante dans le cadre du troisième moyen.

52. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a jugé, aux points 231 à 233, que, dès lors que l’opération de portage elle-même ne constituait pas une opération de concentration, le portage n’avait pas à être notifié en vertu de l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 4064/89 ( 48 ). En conséquence, puisque l’opération de portage ne constituait pas l’opération de concentration examinée dans la décision litigieuse, le Tribunal a jugé que la Commission n’était pas tenue, dans ladite décision, de motiver la
qualification de cette opération de portage conformément à l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 ( 49 ).

53. Il ressort de ce qui précède que le Tribunal a considéré que, dès lors que l’opération de portage ne constituait pas en soi une opération de concentration, sa qualification revêtait une importance secondaire dans le contexte de la concentration notifiée et, partant, que la Commission n’était pas tenue de motiver, dans la décision litigieuse, sa qualification de l’opération de portage conformément à l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89. Nous considérons que cette approche
est correcte. De plus, nous estimons que, contrairement à ce que soutient la requérante, ce raisonnement n’est pas circulaire par nature. Au contraire, il est conforme tant à la lettre qu’à l’esprit du règlement no 4064/89, car la Commission n’a compétence que pour examiner les opérations au titre dudit règlement qui doivent lui être notifiées et, partant, lorsqu’elles sont réputées constituer une opération de concentration de dimension communautaire.

54. En outre, puisque la question de savoir si l’opération de portage entre dans le champ d’application de l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 n’est pas, en l’espèce, susceptible d’influer sur l’examen de la nature de la concentration notifiée ni sur l’appréciation de son incidence sur la concurrence au sens de ce règlement ( 50 ), et qu’elle est ainsi, plus particulièrement, dénuée de pertinence pour ce qui est de la question de savoir si la concentration notifiée a créé ou
renforcé une position dominante susceptible d’avoir un impact significatif sur la concurrence dans le marché commun, nous estimons que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en jugeant que la Commission, dans la décision litigieuse, a fourni une motivation suffisante à cet égard.

55. Quant à l’argument de la requérante selon lequel l’arrêt attaqué repose sur un raisonnement contradictoire en ce sens que le Tribunal, au point 142 dudit arrêt, fonde son argumentation sur l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 tout en écartant l’application de cette disposition, nous estimons que le fait pour le Tribunal de juger qu’une opération remplit certaines des conditions énoncées à l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 ne l’empêche nullement de
considérer que le contrôle des actifs cibles n’a pas été acquis au sens de l’article 3, paragraphe 3, dudit règlement. À notre avis, le raisonnement du Tribunal n’est pas contradictoire, car le respect de certaines des conditions énoncées à l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 est tout à fait compatible avec le constat selon lequel ce contrôle n’a pas été acquis au sens de l’article 3, paragraphe 3, dudit règlement, et peut même l’étayer.

56. Au vu de ce qui précède, nous considérons que l’argument de la requérante tiré d’une violation des principes d’égalité, de sécurité juridique et de confiance légitime doit être rejeté, car il dépend manifestement de la constatation d’une absence de motivation suffisante.

57. Nous estimons par conséquent que le troisième moyen doit être rejeté comme non fondé.

D – Quatrième moyen: erreur d’appréciation quant au renforcement d’une position dominante et au caractère approprié des engagements

1. Argumentation

58. Par son quatrième et dernier moyen, qui est divisé en deux branches, la requérante affirme que le Tribunal a commis une erreur de droit ainsi que des erreurs manifestes d’appréciation en méconnaissant, premièrement, les critères juridiques pertinents pour l’appréciation de la création ou du renforcement d’une position dominante et, deuxièmement, en ce qui concerne la question de savoir si les engagements étaient appropriés à la lumière du critère de restauration et de développement d’une
concurrence effective ainsi qu’au regard des constatations effectuées par la Commission quant aux effets de portefeuille et aux effets congloméraux.

59. En premier lieu, la requérante soutient qu’il n’est guère contestable que la question de savoir si une entreprise détient une position dominante est fonction du degré d’efficacité de la pression concurrentielle exercée sur elle ( 51 ). Dès lors, le Tribunal a commis une erreur de droit en considérant, au point 286 de l’arrêt attaqué, que l’argument de la requérante relatif au démantèlement d’Editis était inopérant parce qu’il ne concernait pas la question de la création ou du renforcement d’une
position dominante. Cette erreur est d’autant plus flagrante que la Commission a constaté dans la décision litigieuse que l’équilibre concurrentiel sur les différents marchés concernés reposait sur un duopole non dominant. Or, dans un tel cas de figure, c’est la rivalité entre deux concurrents de taille et de puissance égales qui constitue le moteur de la concurrence. Le Tribunal ne pouvait donc pas exclure par principe que l’affaiblissement d’un des deux concurrents, par son démantèlement,
puisse aboutir à la création d’une position dominante. En outre, le Tribunal, en déclarant, aux points 293 et 294 de l’arrêt attaqué, que l’identité du repreneur conditionnait substantiellement l’efficacité des rétrocessions d’actifs consenties par Lagardère, a reconnu que la mesure corrective proposée par celle-ci ne supprimait pas ab initio tout doute quant à l’efficacité d’une telle mesure, contrairement à ce qu’exige la communication de la Commission concernant les mesures correctives
recevables conformément au règlement (CEE) no 4064/89 du Conseil et au règlement (CE) no 447/98 de la Commission ( 52 ).

60. En second lieu, la requérante affirme que, selon le treizième considérant du règlement no 4064/89, le niveau de la concurrence effective dans le marché commun doit non seulement être maintenu, mais doit aussi, en raison de l’utilisation du terme «développer» dans ce considérant, avoir augmenté après l’opération de concentration. Le Tribunal a commis une erreur de droit au point 342 de l’arrêt attaqué en jugeant qu’il suffisait que le niveau de la concurrence soit «maintenu ou développé».

61. Le Tribunal a également commis une erreur manifeste d’appréciation dans la mesure où rien ne garantit, contrairement à ce qu’il affirme aux points 342 et 343 de l’arrêt attaqué, qu’un opérateur ayant des incitations économiques ( 53 ) pour développer ou maintenir une concurrence effective soit un concurrent actuel ou potentiel. La requérante estime que le contraste entre l’arrêt attaqué et celui rendu dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal Petrolessence et SG2R/Commission ( 54 )
est frappant, car, dans cette affaire, la Commission avait refusé d’agréer un acquéreur potentiel au motif qu’il n’était pas présent dans le secteur en cause. En l’espèce, non seulement le texte des engagements figurant dans la décision litigieuse n’imposait pas que le repreneur des actifs cibles soit un concurrent actuel ou potentiel, mais le Tribunal a retenu une interprétation a minima de la capacité du repreneur à préserver la concurrence, en acceptant, au point 345 de l’arrêt attaqué, qu’il
puisse s’agir d’un acteur dépourvu d’expérience sur le marché concerné.

62. Selon l’arrêt Petrolessence et SG2R/Commission ( 55 ), l’appréciation de la capacité du repreneur à garantir une concurrence effective et durable impose de rejeter les candidats dépourvus de l’expérience requise sur les marchés concernés. De plus, contrairement à ce qu’affirme le Tribunal au point 345 de l’arrêt attaqué, rien dans les engagements n’oblige le repreneur à conserver les dirigeants responsables de la gestion des actifs cibles. Un acquéreur industriel présente un intérêt majeur par
rapport à un acquéreur financier, car il dispose par définition d’une équipe expérimentée capable de préserver et de développer la capacité concurrentielle de l’activité cédée. La requérante considère également que c’est à tort que le Tribunal a rejeté, au point 347 de l’arrêt attaqué, son argument de l’acquéreur initial. Selon la requérante, le démantèlement d’Editis a conduit à ce que son centre de traitement perde les volumes correspondant aux quatre maisons d’édition conservées par
Lagardère. Dès lors, l’identité de l’acquéreur était essentielle à l’efficacité des engagements, ceux-ci devant permettre de s’assurer qu’il serait à même de fournir au centre de traitement des volumes similaires. La requérante en conclut que les engagements sont inefficaces en l’absence d’acquéreur initial et que, en acceptant un repreneur financier, Editis était structurellement affaiblie.

63. D’après la requérante, le Tribunal, dans l’arrêt attaqué, a jugé que la décision litigieuse contenait une analyse correcte des effets de portefeuille et des effets congloméraux, mais s’est abstenu de vérifier le caractère juridiquement approprié des engagements proposés par Lagardère. Le Tribunal a ainsi validé l’approche fragmentée consistant à ne vérifier que les chevauchements marché par marché, sans prendre en compte de façon plus globale les effets de l’opération sur l’ensemble des marchés
concernés, ainsi que la Cour l’a fait dans l’arrêt Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala ( 56 ).

64. La Commission et Lagardère considèrent que le présent moyen est dénué de fondement.

2. Appréciation

65. Le présent moyen porte sur l’examen par le Tribunal des engagements acceptés par la Commission dans la décision litigieuse.

66. S’agissant de la première branche du présent moyen ( 57 ), c’est selon nous à bon droit que le Tribunal a jugé, au point 284 de l’arrêt attaqué, qu’une opération de concentration ne peut être déclarée incompatible avec le marché commun conformément à l’article 8, paragraphe 3, du règlement no 4064/89 que pour autant qu’elle crée ou renforce une position dominante ayant comme conséquence qu’une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché commun ( 58 ). Les
engagements que les entreprises concernées proposent à la Commission conformément à l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 4064/89, s’ils sont acceptés par cette dernière, constituent la base de la décision prise au titre de cet article ( 59 ). Nous considérons que, lorsque des engagements ont été proposés à la Commission, l’appréciation globale de la question de savoir si l’opération de concentration crée ou renforce une position dominante ne saurait être séparée de l’analyse des
engagements ( 60 ). Lorsque des engagements sont acceptés par la Commission, ils font donc partie intégrante de l’opération de concentration et, par voie de conséquence, de l’appréciation globale et finale portée par la Commission sur cette opération. En outre, la question de la position dominante et, partant, les engagements proposés doivent toujours être évalués par rapport aux marchés pertinents définis. À notre sens, en juger autrement reviendrait à priver l’appréciation des opérations de
concentration de sa nécessaire rigueur. Par conséquent, bien que la question de savoir si une entreprise détient une position dominante, que ce soit au regard de l’article 102 TFUE ou du règlement no 4064/89, dépende indubitablement du degré de pression concurrentielle exercée sur ladite entreprise, cette appréciation doit toujours être effectuée dans le cadre de marchés pertinents définis.

67. Nous considérons donc comme judicieuse la conclusion du Tribunal selon laquelle la Commission ne pouvait pas constater l’incompatibilité de l’opération de concentration au seul motif qu’elle avait pour conséquence de modifier la position initiale des parties en cause sur les marchés pertinents ( 61 ). En outre, il ressort d’une lecture attentive des points 285 et 286 de l’arrêt attaqué que, contrairement à ce que soutient la requérante, le Tribunal n’a pas considéré que la rétrocession des
actifs cibles à l’origine de 60 % du chiffre d’affaires global de VUP et la conservation par Lagardère des actifs cibles résiduels étaient sans importance pour déterminer s’il y avait création ou renforcement d’une position dominante ayant comme conséquence qu’une concurrence effective serait entravée de manière significative dans le marché commun. Le Tribunal s’est borné à indiquer que le démantèlement d’Editis ne constituait pas en soi un critère susceptible de permettre la constatation du
nécessaire effet anticoncurrentiel. C’est également à bon droit que le Tribunal a ajouté, au point 288 de l’arrêt attaqué, que les chiffres d’affaires globaux de deux entités ne pouvaient pas servir d’indications pertinentes, dès lors que l’appréciation d’une position dominante doit s’effectuer par rapport à des marchés bien définis. Le Tribunal n’a donc pas exclu par principe, contrairement à ce que soutient la requérante, que l’affaiblissement d’un des deux concurrents, par son démantèlement,
puisse aboutir à la création d’une position dominante. Nous ajouterons, ainsi que Lagardère l’a indiqué dans ses écritures, que le Tribunal a jugé, au point 290 de l’arrêt attaqué, que l’allégation de démantèlement d’Editis n’était nullement étayée, puisque les engagements exigeaient la rétrocession de la quasi-totalité des actifs cibles.

68. Quant au grief dirigé par la requérante contre l’affirmation du Tribunal figurant aux points 293 et 294 de l’arrêt attaqué, nous estimons que l’utilisation de l’expression «en tout état de cause» ( 62 ) au début du point 293 dudit arrêt, ainsi que le contenu même des points 293 et 294, où le Tribunal déclare que les éléments de preuve nécessaires à l’appréciation in concreto des effets du démantèlement d’Editis sur la concurrence ne lui ont pas été présentés dans le cadre du recours dont il
était saisi, démontrent qu’ils n’ont été inclus qu’à titre surabondant.

69. En effet, le Tribunal a considéré que la requérante ne pouvait reprocher à la Commission d’avoir omis d’apprécier les conséquences du démantèlement d’Editis sur la capacité de celle-ci à exercer une pression concurrentielle semblable à celle qui prévalait avant l’opération de concentration, dès lors qu’une telle appréciation dépendait de la capacité du repreneur des actifs en cours de cession à maintenir ou à développer une concurrence effective, conformément aux engagements. Le Tribunal a
déclaré qu’il n’avait pas examiné cette question parce qu’il n’avait pas été, dans le cadre du litige, destinataire des informations nécessaires à l’identification des ressources requises pour concurrencer efficacement Lagardère. Il y a lieu de relever que, dans le cadre de la présente procédure, la requérante n’a pas contesté la conclusion du Tribunal selon laquelle celui-ci n’a pas reçu suffisamment de preuves.

70. Selon une jurisprudence constante, les griefs dirigés contre des motifs surabondants d’un arrêt du Tribunal doivent être rejetés d’emblée, puisque ceux-ci ne sauraient entraîner son annulation ( 63 ).

71. Nous souhaiterions ajouter, à titre surabondant, que le fait pour le Tribunal d’avoir déclaré, au point 294 de l’arrêt attaqué, que l’identité du repreneur conditionnait substantiellement l’efficacité des rétrocessions d’actifs ne signifie pas qu’il ait reconnu que la mesure corrective proposée par Lagardère n’éliminait pas d’emblée toute incertitude quant à son efficacité, comme l’exige le point 7 de la communication de la Commission sur les mesures correctives ( 64 ). Si le point 7 de cette
communication prévoit qu’il incombe aux parties à une opération de concentration d’éliminer d’emblée toute incertitude liée à l’un ou l’autre des éléments concernés, qui serait susceptible d’amener la Commission à repousser la mesure corrective proposée, à notre sens, les engagements ne doivent pas nécessairement être mis en œuvre avant que la décision d’autorisation ne soit arrêtée. De fait, il ressort du point 5 de ladite communication que, si ces engagements «peu[vent] être proposé[s] et mis
en œuvre avant que la décision d’autorisation ne soit arrêtée», «il est plus courant que les parties prennent des engagements propres à rendre la concentration compatible avec le marché dans un délai précis à compter de la date de la décision d’autorisation».

72. Selon le point 19 de la même communication, qui concerne la cession, pour que la Commission autorise une opération, il faut qu’une activité viable soit cédée à un acquéreur approprié dans un délai précis. Ainsi, en cas de cession, le caractère approprié et, partant, l’identité de l’acquéreur sont toujours pertinents. Dans de tels cas de cession, il suffit toutefois selon nous que la décision autorisant l’opération de concentration soit subordonnée à des engagements qui spécifient, notamment, les
critères adéquats pour le choix d’un acquéreur approprié des actifs en question dans un délai raisonnable. Cependant, un acquéreur initial ( 65 ) n’est exigé par la Commission que lorsqu’une partie seulement ( 66 ) d’une activité est cédée ( 67 ). Étant donné que, en l’espèce, le Tribunal a considéré, au point 290 de l’arrêt attaqué, que Lagardère avait accepté de rétrocéder la quasi-totalité des actifs cibles et, partant, 80 % des actifs francophones, il apparaît que ces actifs constituent en
soi une activité viable ( 68 ). Nous estimons donc que l’exigence d’un acquéreur initial pour ces actifs serait disproportionnée.

73. Il s’ensuit que la première branche du quatrième moyen doit, selon nous, être écartée comme infondée.

74. En ce qui concerne l’argument selon lequel le Tribunal n’a pas tenu compte de la nécessité de maintenir et de développer une concurrence effective, nous souhaiterions réitérer qu’il suffit, aux fins de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 4064/89, que l’opération de concentration notifiée, telle que modifiée par les engagements proposés par les entreprises concernées, ne crée ni ne renforce une position dominante. C’est à bon droit que la Commission et Lagardère ont indiqué dans leurs
écritures que les engagements proposés à la Commission par les entreprises concernées en vertu de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 4064/89 n’ont donc pas à améliorer la situation concurrentielle initiale antérieure à l’opération de concentration. En décider autrement reviendrait, selon nous, à enfreindre le principe de proportionnalité ( 69 ). En outre, ainsi que la Commission l’a souligné avec raison dans ses écritures, la procédure de contrôle des opérations de concentration, et en
particulier l’appréciation des engagements proposés par les entreprises, ne saurait être utilisée par cette institution comme le moyen ou l’occasion de mettre en place une «ingénierie des marchés» ou une «planification économique».

75. Notons également que la «nécessité de préserver et de développer une concurrence effective» est mentionnée non seulement au treizième considérant du règlement no 4064/89, comme l’indique la requérante, mais également à l’article 2, paragraphe 1, sous a), dudit règlement. À notre sens, l’utilisation de ces termes à l’article 2, paragraphe 1, sous a), du règlement no 4064/89 souligne la nécessité pour la Commission d’analyser les marchés de manière dynamique et prospective. Cela ressort tout
particulièrement de la référence à la concurrence potentielle dans cette même disposition. Toutefois, ces dispositions ne sauraient être invoquées hors contexte et d’une manière qui dénaturerait manifestement à la fois leur esprit et le libellé clair d’autres dispositions du règlement no 4064/89 telles que son article 8, paragraphes 2 et 3.

76. La requérante soutient que le Tribunal a commis une erreur manifeste dans son appréciation de la capacité d’un repreneur financier à constituer un concurrent actuel ou potentiel ( 70 ). Elle considère en effet que, à la lumière de l’arrêt Petrolessence et SG2R/Commission ( 71 ), les candidats dépourvus d’expérience sur le marché en question doivent être écartés.

77. Nous estimons que le Tribunal n’a pas commis d’erreur en constatant qu’un repreneur financier serait un concurrent potentiel s’il disposait d’une réelle capacité à maintenir ou à préserver une concurrence effective sur le marché en question, même en étant dépourvu de toute expérience sur ce marché. Le Tribunal a ajouté à juste titre qu’un repreneur financier pouvait s’appuyer sur son expérience d’autres marchés ( 72 ) ou, en tout état de cause, conserver, s’il le souhaitait, les dirigeants en
place, et donc expérimentés, responsables de la gestion de l’entité cédée ( 73 ).

78. Il nous apparaît que chaque opération de concentration, de même que la viabilité d’éventuels engagements y étant attachés, doit être appréciée sur le fond et à titre individuel. La circonstance que tel ou tel acquéreur d’actifs cédés n’ait pas été jugé acceptable dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Petrolessence et SG2R/Commission, précité, ne permet nullement de préjuger l’issue de la présente opération de concentration. De plus, nous ne pouvons qu’insister sur les différences factuelles
considérables existant entre la présente affaire et celle qui a donné lieu à l’arrêt Petrolessence et SG2R/Commission, précité, et notamment sur le fait que l’acquéreur, dans cette dernière affaire, souhaitait acheter une très faible part des actifs à céder.

79. S’agissant des arguments de la requérante visant la conclusion du Tribunal exposée au point 347 de l’arrêt attaqué, relative à la question d’un acquéreur initial, nous renvoyons aux développements consacrés, au point 72 des présentes conclusions, à l’application des points 19 et 20, entre autres, de la communication de la Commission sur les mesures correctives ( 74 ). En outre, nous sommes d’avis que l’argument de la requérante concernant l’affaiblissement structurel d’Editis, dont le Tribunal a
estimé, au point 290 de l’arrêt attaqué, qu’il n’était pas fondé, revient à contester une appréciation factuelle du Tribunal et qu’il doit être rejeté comme irrecevable en l’absence de toute allégation relative à la dénaturation des faits.

80. Quant à la question des effets de portefeuille et des effets congloméraux, nous estimons également que la requérante conteste en réalité l’appréciation factuelle du Tribunal à cet égard et, partant, que l’argument de la requérante doit être rejeté comme irrecevable en l’absence de tout grief tiré d’une dénaturation des faits. En tout état de cause, nous considérons que le Tribunal n’a pas retenu une approche fragmentée sur ce point, exclusivement fondée sur des chevauchements de parts de
marché ( 75 ). Le Tribunal a jugé, au point 314 de l’arrêt attaqué, que la Commission n’avait pas commis d’erreur manifeste en estimant que les effets congloméraux identifiés de l’opération de concentration ne pourraient pas apparaître, étant donné le montant limité des actifs conservés, lesquels s’ajouteraient aux ressources conglomérales de Lagardère. Le Tribunal a examiné, au point 315 de l’arrêt attaqué, les constatations de la Commission figurant aux points 996 et suivants des motifs de la
décision litigieuse, relatives aux effets verticaux et congloméraux de l’opération de concentration, et a confirmé la conclusion générale de la Commission, énoncée audit point 996, selon laquelle la cession de 60 à 70 % du chiffre d’affaires de VUP sur les marchés francophones aurait pour effet de supprimer, notamment, la grande majorité des effets verticaux et congloméraux résultant du poids global de l’entité issue de la concentration dans le secteur de l’édition francophone. Au point 316 de
l’arrêt attaqué, le Tribunal a déclaré que l’élimination de la quasi-totalité des chevauchements horizontaux entre les activités de Lagardère et d’Editis sur les marchés francophones affectés conduirait à la suppression corrélative des effets de gammes et de cumul de marques auprès de l’entité résultant de l’opération de concentration telle qu’autorisée.

81. Nous proposons par conséquent que la deuxième branche du quatrième moyen du pourvoi soit rejetée comme non fondée.

IV – Sur les dépens

82. Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 de celui-ci, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission et Lagardère ayant conclu à la condamnation de la requérante et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.

V – Conclusion

83. Eu égard aux considérations qui précèdent, nous suggérons à la Cour de statuer comme suit:

«1) Le pourvoi est rejeté.

2) Éditions Odile Jacob SAS est condamnée à supporter ses propres dépens ainsi que ceux exposés par la Commission européenne et par Lagardère SCA.»

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( 1 ) Langue originale: l’anglais.

( 2 ) JO L 125, p. 54 [notifiée sous le numéro C(2003) 5277].

( 3 ) JO L 395, p. 1.

( 4 ) Voir point 117 de l’arrêt attaqué.

( 5 ) Voir points 144 et 153 de l’arrêt attaqué. Le Tribunal n’a pas examiné si les dispositions de l’article 3, paragraphe 5, sous a), de ce règlement étaient remplies.

( 6 ) Voir points 154 à 164 de l’arrêt attaqué.

( 7 ) Arrêt du 23 février 2006 (T-282/02, Rec. p. II-319). Voir, en particulier, points 104 à 109 de cet arrêt.

( 8 ) Arrêt du 6 juillet 2010 (T-411/07, Rec. p. II-3691, point 61).

( 9 ) Précité à la note 7.

( 10 ) Précité à la note 8 (point 61).

( 11 ) Voir, également, article 2, paragraphe 2, du règlement no 4064/89. En revanche, en vertu de l’article 8, paragraphe 4, dudit règlement, la Commission peut ordonner toute action appropriée pour rétablir la concurrence si une opération de concentration qui crée ou renforce une position dominante ayant comme conséquence une entrave significative à la concurrence a été réalisée. Voir, également, article 2, paragraphe 3, du règlement no 4064/89. Cette action peut aller jusqu’à la dissolution d’une
concentration déjà réalisée. Voir arrêt Aer Lingus Group/Commission (précité à la note 8, points 58 à 61).

( 12 ) Cette notification doit intervenir dans un délai d’une semaine à compter de la conclusion de l’accord ou de la publication de l’offre d’achat ou d’échange ou de l’acquisition d’une participation de contrôle.

( 13 ) En vertu de l’article 7, paragraphe 4, du règlement no 4064/89, il est possible, dans certaines circonstances, de demander à la Commission une dérogation à l’obligation de suspendre une concentration, prévue à l’article 7, paragraphe 1, dudit règlement.

( 14 ) À cet égard, la question déterminante est de savoir s’il y a concentration de dimension communautaire créant ou renforçant une position dominante ayant comme conséquence une entrave significative à la concurrence sur le marché commun. Voir articles 1er, 2 et 3 du règlement no 4064/89.

( 15 ) Voir, par analogie, arrêt Cementbouw Handel & Industrie/Commission (précité à la note 7, points 108 et 109). La Commission doit pouvoir exercer un contrôle efficace sur les opérations de concentration.

( 16 ) Voir, par exemple, points 23, 24, 27 et suiv. du pourvoi.

( 17 ) Précité à la note 7.

( 18 ) Voir arrêt Cementbouw Handel & Industrie/Commission, précité (point 108).

( 19 ) Précité à la note 7.

( 20 ) JO 2008, C 95, p. 1.

( 21 ) Voir points 94 à 102 de l’arrêt attaqué.

( 22 ) Voir point 103 de l’arrêt attaqué.

( 23 ) Voir toutefois, à cet égard, points 138 et 142 de l’arrêt attaqué, où le Tribunal a constaté que certains aspects de l’opération de portage rempliraient en tout état de cause les conditions énoncées à l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89.

( 24 ) Qu’il nous soit également permis de noter que l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 porte sur l’acquisition de participations, et non sur l’acquisition d’actifs. Nous sommes donc d’avis que l’opération de portage des actifs cibles ne pouvait en aucun cas relever de cette disposition.

( 25 ) Voir point 109 dudit arrêt (précité à la note 7), selon lequel «[u]ne opération de concentration, au sens de l’article 3, paragraphe 1, du règlement no 4064/89, peut se réaliser même en présence d’une pluralité de transactions juridiques formellement distinctes dès lors que ces transactions sont interdépendantes de sorte qu’elles ne seraient pas réalisées les unes sans les autres et dont le résultat consiste à conférer à une ou à plusieurs entreprises le contrôle économique, direct ou
indirect, sur l’activité d’une ou de plusieurs autres entreprises».

( 26 ) Précité à la note 20. Voir, notamment, partie 1.5 («Opérations interdépendantes»). Cette communication ne lie pas la Cour et n’est d’ailleurs pas applicable ratione temporis, de sorte qu’elle ne lie pas non plus la Commission.

( 27 ) Voir, par analogie, arrêt Aer Lingus Group/Commission (précité à la note 8, point 65). Dans l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, l’acquisition d’une participation minoritaire n’avait pas abouti à l’acquisition du contrôle. D’autres acquisitions d’actions pouvaient cependant avoir cet effet.

( 28 ) Le Tribunal a jugé que le droit de veto était conforme aux dispositions de l’article 3, paragraphe 5, sous a), du règlement no 4064/89 et que l’article 4, paragraphe 2, du contrat de cession, relatif aux pouvoirs des organes sociaux d’Ecrinvest 4 et d’Investima 10, excluait toute intervention de Lagardère, sous réserve de celle induite par la nature même du portage.

( 29 ) Le Tribunal a déclaré que la requérante n’avait pas produit d’éléments de preuve permettant de remettre en cause l’indépendance d’Investima 10 telle qu’elle résulte des stipulations contractuelles.

( 30 ) Voir points 120 à 144 de l’arrêt attaqué.

( 31 ) Voir arrêt du 11 janvier 2007, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission (C‑404/04 P, point 90).

( 32 ) Points 120 à 144 de l’arrêt attaqué.

( 33 ) En outre, il ressort des stipulations du contrat de cession que le transfert de propriété à Lagardère des actions d’Ecrinvest 4 devait être postérieur à l’obtention de l’autorisation auprès des autorités de concurrence compétentes. Voir points 24 et 25 de l’arrêt attaqué.

( 34 ) En vertu de l’article 4, paragraphe 2, du règlement no 4064/89, l’obligation de notifier la concentration en question incombait à Lagardère.

( 35 ) Voir point 200 de l’arrêt attaqué.

( 36 ) Cette irrégularité ne pouvait pas non plus avoir une incidence sur la question de savoir si cette opération créait ou renforçait une position dominante.

( 37 ) Selon le dix-septième considérant du règlement no 4064/89, les exigences tenant à la notification préalable et à la suspension des opérations de concentration sont imposées dans le but d’assurer une surveillance efficace des entreprises par la Commission. Ces deux obligations poursuivent donc le même objectif prioritaire fixé par le règlement no 4064/89. De plus, l’obligation de suspendre une opération de concentration en vertu de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 4064/89 vise à
écarter la nécessité de dissoudre a posteriori des concentrations anticoncurrentielles en application de l’article 8, paragraphe 4, dudit règlement. En outre, et comme l’affirme la Commission, nous estimons que l’obligation de notifier une opération de concentration dans un délai d’une semaine à compter de la conclusion de l’accord, conformément à l’article 4, paragraphe 1, du règlement no 4064/89, vise également à empêcher que des opérations de concentration susceptibles d’entraver la concurrence
sur le marché commun soient réalisées avant d’avoir été examinées par la Commission. Les obligations de notification et de suspension des opérations de concentration de dimension communautaire, énoncées par le règlement no 4064/89, ont donc pour but d’anticiper certaines modifications structurelles d’entreprises qui pourraient affecter la concurrence sur le marché commun.

( 38 ) Voir, par analogie, arrêt du 11 novembre 1987, France/Commission (259/85, Rec. p. 4393, point 13).

( 39 ) Voir point 15 de l’arrêt attaqué.

( 40 ) Voir point 35 de l’arrêt attaqué.

( 41 ) Il est de jurisprudence constante qu’un acte n’est entaché de détournement de pouvoir que s’il apparaît, sur la base d’indices objectifs, pertinents et concordants, avoir été pris dans le but exclusif, ou à tout le moins déterminant, d’atteindre des fins autres que celles excipées ou d’éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’espèce. Voir à cet égard, notamment, arrêt du 10 mars 2005, Espagne/Conseil (C-342/03, Rec. p. I-1975, point 64 et
jurisprudence citée).

( 42 ) Direction générale «Concurrence» – Code de bonnes pratiques sur le déroulement de la procédure de contrôle des concentrations.

( 43 ) En dehors du champ d’application des engagements imposés au titre de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 4064/89, la Commission ne dispose d’aucun pouvoir en matière d’approbation des acquéreurs.

( 44 ) Arrêt du 10 juillet 2008 (C-413/06 P, Rec. p. I-4951, point 167).

( 45 ) Arrêt Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala (précité à la note 44, point 167).

( 46 ) Arrêt Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala (précité à la note 44, point 168).

( 47 ) Arrêt Bertelsmann et Sony Corporation of America/Impala (précité à la note 44, point 169).

( 48 ) Comme nous l’avons indiqué dans notre réponse au premier moyen, nous considérons que c’est à bon droit que le Tribunal a conclu que l’opération de portage ne constituait pas en soi une opération de concentration et n’était donc pas soumise à notification au titre du règlement no 4064/89.

( 49 ) Aux points 5 à 8 des motifs de la décision litigieuse, la Commission a décrit l’opération de concentration notifiée comme l’acquisition, par Lagardère, du contrôle unique des actifs d’édition de VUP en Europe et en Amérique latine (hors Brésil) au sens de l’article 3, paragraphe 1, sous b), du règlement no 4064/89.

( 50 ) Voir point 21 des présentes conclusions.

( 51 ) Voir, en particulier, arrêts du 14 février 1978, United Brands et United Brands Continentaal/Commission (27/76, Rec. p. 207, point 65), ainsi que du 13 février 1979, Hoffmann-La Roche/Commission (85/76, Rec. p. 461, point 38).

( 52 ) JO 2001, C 68, p. 3 (ci-après la «communication de la Commission sur les mesures correctives»). Voir, également, point 7 de ladite communication.

( 53 ) Parfois dénommé «repreneur financier».

( 54 ) Arrêt du 3 avril 2003 (T-342/00, Rec. p. II-1161).

( 55 ) Précité à la note 54.

( 56 ) Précité à la note 44 (point 125).

( 57 ) La requérante soutenait devant le Tribunal que la Commission s’était abstenue d’analyser les conséquences du démantèlement de VUP en deux entités inégales, du fait de l’achat des actifs assorti d’une revente de 60 % de ces derniers. Voir point 276 de l’arrêt attaqué.

( 58 ) Voir également article 2, paragraphe 3, du règlement no 4064/89.

( 59 ) Voir article 18, paragraphe 2, du règlement (CE) no 447/98 de la Commission du 1er mars 1998 relatif aux notifications, aux délais et aux auditions prévus par le règlement no 4064/89 (JO L 61, p. 1).

( 60 ) Voir point 6 de la communication de la Commission sur les mesures correctives (précitée à la note 52), selon lequel «[c’]est à la Commission qu’il appartient de prouver qu’une opération de concentration crée ou renforce des structures de marché susceptibles d’entraver de façon significative une concurrence effective dans le marché commun, mais c’est aux parties qu’il incombe de démontrer que les engagements proposés, une fois mis en œuvre, élimineront le problème de création ou de
renforcement d’une position dominante soulevé par la Commission. À cet effet, les parties sont tenues de démontrer avec précision que les mesures correctives rétabliront durablement les conditions d’une concurrence effective dans le marché commun, les arguments présentés par les parties devant être de nature à satisfaire la Commission, conformément aux obligations qui lui incombent en vertu du règlement sur les concentrations».

( 61 ) Voir point 285 de l’arrêt attaqué.

( 62 ) Note sans objet pour la version française des présentes conclusions.

( 63 ) Voir arrêts du 24 octobre 2002, Aéroports de Paris/Commission (C-82/01 P, Rec. p. I-9297, point 41 et jurisprudence citée), ainsi que du 2 avril 2009, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission (C-431/07 P, Rec. p. I-2665, point 148 et jurisprudence citée).

( 64 ) Citée à la note 52.

( 65 ) C’est-à-dire un acquéreur ayant notamment été approuvé par la Commission avant la réalisation de l’opération notifiée.

( 66 ) La cession d’une partie de l’activité ne peut être viable, du point de vue de la concurrence, qu’en raison de l’identité d’un acquéreur spécifique et identifié, par opposition à un acquéreur défini abstraitement.

( 67 ) Voir point 20 de la communication de la Commission sur les mesures correctives (précitée à la note 52), selon lequel «[d]ans certains cas, la viabilité de l’ensemble à céder dépend dans une large mesure, compte tenu des actifs qui en font partie, de l’identité de l’acquéreur. La Commission n’autorisera alors la concentration que si les parties s’engagent à ne pas réaliser l’opération notifiée avant d’avoir signé un accord contraignant sur la cession avec un acquéreur (dit ‘acquéreur initial’)
approuvé par la Commission» (caractères italiques ajoutés par nos soins).

( 68 ) Voir, également, point 291 de l’arrêt attaqué.

( 69 ) C’est à juste titre selon nous que le Tribunal, au point 307 de l’arrêt Cementbouw Handel & Industrie/Commission (précité à la note 7), a jugé que, «pour pouvoir être acceptés par la Commission dans l’optique de l’adoption d’une décision au titre de l’article 8, paragraphe 2, du règlement no 4064/89, les engagements des parties doivent non seulement être proportionnés au problème de concurrence identifié par la Commission dans sa décision, mais le résoudre intégralement».

( 70 ) Voir point 49 de la communication de la Commission sur les mesures correctives (précitée à la note 52).

( 71 ) Précité à la note 54 (point 65).

( 72 ) Voir point 344 de l’arrêt attaqué.

( 73 ) Voir point 345 de l’arrêt attaqué.

( 74 ) Citée à la note 52.

( 75 ) Voir notamment, sur la question des chevauchements de parts de marché, point 310 de l’arrêt attaqué.


Synthèse
Formation : Grande chambre
Numéro d'arrêt : C-551/10
Date de la décision : 06/03/2012
Type d'affaire : Pourvoi - irrecevable, Pourvoi - non fondé
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi - Opérations de concentration d’entreprises sur le marché de l’édition des livres - Règlement (CEE) nº 4064/89 - Convention de portage - Motifs inopérants.

Concentrations entre entreprises

Concurrence


Parties
Demandeurs : Éditions Odile Jacob SAS
Défendeurs : Commission européenne.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mazák

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2012:125

Source

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