ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre)
11 juin 2009
Affaire F‑81/08
Zoe Ketselidou
contre
Commission des Communautés européennes
« Fonction publique – Fonctionnaires – Recours – Arrêt d’une juridiction communautaire – Fait nouveau substantiel – Absence »
Objet : Recours, introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA, par lequel M^me Ketselidou demande l’annulation de la décision de la Commission, du 10 janvier 2008, rejetant sa demande tendant à un nouveau calcul de ses annuités de pension résultant du transfert, vers le régime communautaire, de l’équivalent actuariel des droits à pension qu’elle a acquis en Grèce.
Décision : Le recours est rejeté comme manifestement non fondé. La requérante est condamnée à supporter l’ensemble des dépens.
Sommaire
1. Fonctionnaires – Recours – Délais – Réexamen d’une décision administrative devenue définitive
(Statut des fonctionnaires, art. 90 et 91)
2. Fonctionnaires – Recours – Réclamation administrative préalable – Délais – Forclusion – Réouverture – Condition – Fait nouveau
(Statut des fonctionnaires, art. 90 et 91)
1. L’existence d’un fait nouveau et substantiel peut justifier la présentation d’une demande tendant au réexamen d’une décision devenue définitive à l’expiration des délais de recours. Le fait concerné doit être susceptible de modifier de façon substantielle la situation de celui qui entend obtenir le réexamen de cette décision. En outre, il incombe à la personne concernée d’introduire sa demande administrative dans un délai raisonnable. L’intérêt qu’elle a à demander l’adaptation de sa
situation administrative à une nouvelle réglementation doit, en effet, être mis en balance avec l’impératif de sécurité juridique.
(voir points 32 à 36)
Référence à :
Cour : 26 septembre 1985, Valentini/Commission, 231/84, Rec. p. 3027, point 14 ; 13 novembre 1986, Becker/Commission, 232/85, Rec. p. 3401, point 10
Tribunal de première instance : 22 septembre 1994, Carrer e.a./Cour de justice, T‑495/93, RecFP p. I‑A‑201 et II‑651, point 20 ; 25 mars 1998, Koopman/Commission, T‑202/97, RecFP p. I‑A‑163 et II‑511, point 24 ; 14 juillet 1998, Lebedef/Commission, T‑42/97, RecFP p. I‑A‑371 et II‑1071, point 25 ; 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, Rec. p. II‑557, point 51
Tribunal de la fonction publique : 16 janvier 2007, Genette/Commission, F‑92/05, RecFP p. I‑A‑1‑0000 et II‑A‑1‑0000, point 62
2. La constatation par un arrêt d’une juridiction communautaire qu’une décision administrative de portée générale enfreint le statut ne saurait constituer, à l’égard des fonctionnaires ayant omis de faire usage en temps utile des possibilités de recours offertes par le statut, un fait nouveau justifiant la présentation d’une demande tendant au réexamen des décisions individuelles adoptées par l’autorité investie du pouvoir de nomination les concernant.
(voir point 47)
Référence à :
Tribunal de première instance : 11 juillet 1997, Chauvin/Commission, T‑16/97, RecFP p. I‑A‑237 et II‑681, points 39 à 45 ; 9 février 2000, Gómez de la Cruz Talegón/Commission, T‑165/97, RecFP p. I‑A‑19 et II‑79, point 51
ORDONNANCE DU TRIBUNAL DE LA FONCTION PUBLIQUE
(troisième chambre)
11 juin 2009 (*)
« Fonction publique – Fonctionnaires – Recours – Arrêt d’une juridiction communautaire – Fait nouveau substantiel – Absence »
Dans l’affaire F‑81/08,
ayant pour objet un recours introduit au titre des articles 236 CE et 152 EA,
Zoe Ketselidou, fonctionnaire de la Commission des Communautés européennes, demeurant à Bruxelles (Belgique), représentée par M^e S. A. Pappas, avocat,
partie requérante,
contre
Commission des Communautés européennes, représentée par M. D. Martin et M^me K. Herrmann, en qualité d’agents,
partie défenderesse,
LE TRIBUNAL (troisième chambre),
composé de MM. P. Mahoney (rapporteur), président, H. Kreppel et S. Van Raepenbusch, juges,
greffier : M^me W. Hakenberg,
rend la présente
Ordonnance
1 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 13 octobre 2008 par télécopie (l’original ayant été déposé le 16 octobre suivant), M^me Ketselidou demande l’annulation de la décision du 10 janvier 2008 par laquelle la Commission des Communautés européennes a rejeté sa demande tendant à un nouveau calcul de ses annuités de pension résultant du transfert, vers le régime communautaire, de l’équivalent actuariel des droits à pension qu’elle a acquis en Grèce.
Cadre juridique
2 Aux termes de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction en vigueur antérieurement au 1^er mai 2004 (ci-après l’« ancien statut ») :
« Le fonctionnaire qui entre au service des Communautés après avoir :
– cessé ses activités auprès d’une administration, d’une organisation nationale ou internationale
ou
– exercé une activité salariée ou non salariée,
a la faculté, au moment de sa titularisation, de faire verser aux Communautés, soit l’équivalent actuariel, soit le forfait de rachat des droits à pension d’ancienneté qu’il a acquis au titre des activités visées ci-dessus.
En pareil cas, l’institution où le fonctionnaire est en service détermine, compte tenu du grade de titularisation, le nombre des annuités qu’elle prend en compte d’après son propre régime au titre de la période de service antérieur sur la base du montant de l’équivalent actuariel ou du forfait de rachat. »
3 Aux termes de l’article 4, paragraphe 4, des dispositions générales d’exécution de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII de l’ancien statut, telles que modifiées par décisions de la Commission des 4 février 1972 et 16 mars 1977 (Informations administratives n° 789, du 16 avril 1993, ci-après les « DGE »), « [l]e montant transféré au compte des [C]ommunautés dans une monnaie autre que le franc belge est – pour la détermination du nombre d’annuités – converti en francs belges
conformément aux modalités suivantes : […] pour le fonctionnaire titularisé après le 31 décembre 1971 […] le montant transféré est […] [converti] sur la base du taux actualisé moyen fixé par la Commission pour la période du 1^er janvier 1972 jusqu’à la date de la titularisation du fonctionnaire ».
4 Dans l’affaire Chatziioannidou/Commission (arrêt du Tribunal du 14 novembre 2006, Chatziioannidou/Commission, F‑100/05, RecFP p. I‑A‑1‑129 et II‑A‑1‑487, ci-après l’« arrêt Chatziioannidou/Commission »), la Commission faisait valoir que l’introduction de l’euro aurait eu pour conséquence économique et logique inévitable l’inapplicabilité de l’article 4, paragraphe 4, des DGE. Elle aurait ainsi été tenue d’abandonner le mécanisme de change moyen qu’elle avait jusqu’alors appliqué, celui-ci
étant frappé de caducité.
5 Le Tribunal a rejeté cette argumentation en considérant que la Commission avait ainsi méconnu les dispositions du règlement (CE) n° 1103/97 du Conseil, du 17 juin 1997, fixant certaines dispositions relatives à l’introduction de l’euro (JO L 162, p. 1), qui visent à garantir que l’introduction de l’euro s’effectue, au nom du principe de sécurité juridique, dans la plus grande neutralité possible (arrêt Chatziioannidou/Commission, point 36).
6 Par conséquent, le Tribunal a annulé les décisions de la Commission portant calcul de la bonification d’annuités de pension résultant du transfert vers le régime communautaire de l’équivalent actuariel des droits à pension acquis en Grèce par la requérante, M^me Chatziioannidou.
7 Par arrêt du 12 septembre 2007, Commission/Chatziioannidou (T‑20/07 P, non encore publié au Recueil, ci-après l’« arrêt Commission/Chatziioannidou »), le Tribunal de première instance des Communautés européennes a rejeté le pourvoi introduit par la Commission à l’encontre de l’arrêt Chatziioannidou/Commission.
Faits à l’origine du litige
8 La requérante, de nationalité grecque, est entrée au service de la Commission le 16 février 1992, en tant qu’agent temporaire. Elle a été nommée fonctionnaire stagiaire le 16 mars 2003 et a été titularisée le 16 décembre 2003.
9 Le 5 juillet 2002, la requérante a sollicité, au titre de l’article 11, paragraphe 2, de l’annexe VIII de l’ancien statut, le transfert, vers le régime communautaire de pension, des droits à pension acquis, avant son entrée en service à la Commission, auprès de trois organismes de pension en Grèce (TSMEDE, ELPP et TEVE).
10 Par une note du 26 février 2004, l’Office « Gestion et liquidation des droits individuels » (PMO) de la Commission a communiqué à la requérante la bonification d’annuités qui résulterait du transfert de ses droits acquis auprès des trois organismes de pension en Grèce. Ces bonifications ont été calculées à partir des montants transférables notifiés par les organismes en cause.
11 Le 25 mai 2004, la requérante a introduit une réclamation au titre de l’article 90, paragraphe 2, du statut des fonctionnaires des Communautés européennes, dans sa rédaction en vigueur à compter du 1^er mai 2004 (ci-après le « statut »), à l’encontre de la note du 26 février 2004. La réclamation de la requérante a été rejetée par décision de l’autorité investie du pouvoir de nomination (ci après l’« AIPN ») du 2 septembre 2004.
12 Le 27 septembre 2004, le PMO a envoyé à la requérante une note lui demandant d’accepter ou de refuser les propositions de transfert dans un délai de trois semaines. Le 13 octobre 2004, la requérante a accepté lesdites propositions. Le 30 août 2005, la Commission a envoyé à la requérante une note confirmant la bonification d’annuités qui lui était accordée, telle que celle-ci ressortait de la note du 26 février 2004.
13 Le 9 juillet 2007, la requérante a introduit une demande au titre de l’article 90, paragraphe 1, du statut, par laquelle elle sollicitait la révision du calcul des annuités de pension résultant du transfert de ses droits à pension, en faisant valoir que l’arrêt Chatziioannidou/Commission constituerait un fait nouveau substantiel justifiant le réexamen de sa situation.
14 Le 10 janvier 2008, un agent du PMO a envoyé à la requérante un courrier électronique l’informant que sa situation ne pouvait être réexaminée à la suite de l’arrêt Chatziioannidou/Commission, dans la mesure où elle n’avait pas introduit de recours juridictionnel à l’encontre de la décision rejetant sa réclamation du 25 mai 2004.
15 Le courrier électronique du 10 janvier 2008 contenait également les indications suivantes :
« [S]i vous souhaitez introduire un recours contre [la] décision [refusant le réexamen de votre situation], j’attire votre attention sur les procédures et délais à respecter afin d’introduire une réclamation (article 90, paragraphe 2, du statut). Aux fins de l’application de l’article 90, paragraphe 2, du statut, le délai commence à courir à compter de la date de ce courrier électronique. »
16 Par ailleurs, ledit courrier électronique contenait, sous les coordonnées de son émetteur, l’indication suivante :
« Veuillez noter que ce message est envoyé à titre d’information et ne constitue pas une décision de l’AIPN […] pouvant faire l’objet d’une réclamation au titre de l’article 90 du [s]tatut. »
17 Le 9 avril 2008, la requérante a introduit une réclamation à l’encontre de la décision du 10 janvier 2008 refusant le réexamen de sa situation.
18 La réclamation du 9 avril 2008 a été rejetée par décision de l’AIPN du 15 juillet 2008, au motif que les arrêts Chatziioannidou/Commission et Commission/Chatziioannidou ne constitueraient pas un fait nouveau substantiel justifiant un réexamen de la situation de l’intéressée.
Procédure et conclusions des parties
19 Par acté séparé déposé au greffe du Tribunal le 26 novembre 2008, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité sur le fondement de l’article 78, paragraphe 1, du règlement de procédure.
20 Par courrier parvenu au greffe du Tribunal le 19 décembre 2008 par télécopie (le dépôt de l’original étant intervenu le 24 décembre suivant), la requérante a fait valoir ses observations sur l’exception d’irrecevabilité.
21 La requérante conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– déclarer l’exception d’irrecevabilité inadmissible ou non fondée ;
– déclarer le recours recevable et fondé ;
– annuler la décision du 10 janvier 2008 par laquelle la Commission a rejeté sa demande ;
– condamner la Commission aux dépens.
22 La Commission conclut à ce qu’il plaise au Tribunal :
– déclarer le recours irrecevable ;
– condamner la requérante aux dépens.
En droit
23 En vertu de l’article 76 du règlement de procédure, lorsque le Tribunal est manifestement incompétent pour connaître d’un recours ou de certaines de ses conclusions ou lorsqu’un recours est, en tout ou en partie, manifestement irrecevable ou manifestement dépourvu de tout fondement en droit, le Tribunal peut, sans poursuivre la procédure, statuer par voie d’ordonnance motivée.
24 En l’espèce, le Tribunal s’estime suffisamment éclairé par les pièces du dossier et décide, en application de ces dispositions, de statuer sans poursuivre la procédure.
Arguments des parties
Arguments de la Commission
25 Dans son exception d’irrecevabilité, la Commission soulève deux fins de non-recevoir.
26 La Commission estime, premièrement, que la requête ne contiendrait pas les moyens invoqués au soutien du recours, en violation de l’article 35 du règlement de procédure.
27 La Commission fait valoir, deuxièmement, que la requête serait irrecevable en raison de sa tardiveté. Selon elle, l’arrêt Chatziioannidou/Commission ne saurait constituer un fait nouveau substantiel justifiant le réexamen de la situation de la requérante. En effet, selon la jurisprudence, les effets juridiques d’un arrêt annulant un acte ne se rapporteraient, outre aux parties, qu’aux personnes directement concernées par l’acte annulé lui-même. Dès lors, un arrêt ne serait susceptible de
constituer un fait nouveau qu’à l’égard de ces personnes. Un arrêt ne saurait être invoqué par ceux qui ont omis de faire usage, dans les délais, des possibilités de recours qui leur étaient offertes par le statut.
Arguments de la requérante
28 Dans ses observations sur l’exception d’irrecevabilité, la requérante fait valoir que l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission par acte séparé, en application de l’article 78, paragraphe 1, du règlement de procédure, serait irrecevable. En effet, cet article exigerait que la partie défenderesse n’engage pas le débat au fond. Or, en l’espèce, les arguments soulevés par la Commission au soutien de son exception d’irrecevabilité seraient indissociablement liés au fond de
l’affaire. Il ne serait pas possible d’examiner la question de savoir si l’arrêt Chatziioannidou/Commission constitue un fait nouveau substantiel à l’égard de la requérante sans examiner le fond du litige.
29 S’agissant de la fin de non-recevoir tirée du non-respect des conditions de recevabilité prévues par l’article 35 du règlement de procédure, la requérante rétorque qu’il résulterait à l’évidence de la requête qu’elle aurait soulevé un moyen tiré de la violation du règlement n° 1103/97, ainsi que les moyens tirés de la méconnaissance des principes de bonne administration, d’égalité de traitement, et du devoir de sollicitude qui incombe à l’administration.
30 S’agissant de la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la requête, la requérante objecte que l’arrêt Chatziioannidou/Commission constituerait un fait nouveau substantiel justifiant le réexamen de sa situation. Elle estime, plus largement, que, en vertu des principes de bonne administration et d’égalité de traitement ainsi que du devoir de sollicitude, la Commission aurait dû, à la suite des arrêts Chatziioannidou/Commission et Commission/Chatziioannidou, retirer, de sa propre
initiative, toutes les décisions illégales qu’elle avait adoptées. Le bénéfice de la jurisprudence résultant des arrêts susmentionnés aurait dû être étendu à l’ensemble des fonctionnaires se trouvant dans une situation identique à celle de la requérante dans l’affaire F‑100/05.
Appréciation du Tribunal
Remarques préliminaires
31 En premier lieu, il convient de constater que le Tribunal n’a pas à statuer sur les conclusions de la requérante tendant à ce que le Tribunal déclare l’exception d’irrecevabilité soulevée par la Commission irrecevable, dans la mesure où il est fait application dans la présente ordonnance de l’article 76 du règlement de procédure, et non de l’article 78 dudit règlement.
32 En deuxième lieu, il importe de rappeler les conditions qui doivent être réunies pour qu’un fonctionnaire puisse demander le réexamen d’une décision le concernant devenue définitive.
33 Selon la jurisprudence, les délais prévus par les articles 90 et 91 du statut, étant destinés à assurer la sécurité des situations juridiques, sont d’ordre public et s’imposent aux parties et au juge. Dès lors, un fonctionnaire ne saurait, en saisissant l’AIPN d’une demande au sens de l’article 90, paragraphe 1, du statut, faire renaître, à son profit, un droit de recours contre une décision devenue définitive à l’expiration des délais de recours (arrêts du Tribunal de première instance du
22 septembre 1994, Carrer e.a./Cour de justice, T‑495/93, RecFP p. I‑A‑201 et II‑651, point 20, et du 14 juillet 1998, Lebedef/Commission, T‑42/97, RecFP p. I‑A‑371 et II‑1071, point 25).
34 Toutefois, l’existence d’un fait nouveau et substantiel peut justifier la présentation d’une demande tendant au réexamen d’une telle décision (voir, notamment, arrêt de la Cour du 26 septembre 1985, Valentini/Commission, 231/84, Rec. p. 3027, point 14).
35 Selon les exigences de la jurisprudence, le fait concerné doit être susceptible de modifier de façon substantielle la situation de celui qui entend obtenir le réexamen d’une décision devenue définitive (voir, en ce sens, arrêt de la Cour du 13 novembre 1986, Becker/Commission, 232/85, Rec. p. 3401, point 10 ; arrêt du Tribunal de première instance du 7 février 2001, Inpesca/Commission, T‑186/98, Rec. p. II‑557, point 51).
36 En outre, pour pouvoir utilement invoquer un fait nouveau et substantiel, il incombe au fonctionnaire d’introduire sa demande administrative dans un délai raisonnable. L’intérêt du fonctionnaire à demander l’adaptation de sa situation administrative à une nouvelle réglementation doit, en effet, être mis en balance avec l’impératif de sécurité juridique (ordonnance du Tribunal de première instance du 25 mars 1998, Koopman/Commission, T‑202/97, RecFP p. I‑A‑163 et II‑511, point 24 ; arrêt du
Tribunal du 16 janvier 2007, Genette/Commission, F‑92/05, RecFP p. I‑A‑1‑1 et II‑A‑1‑1, point 62).
37 En troisième lieu, il convient de préciser l’objet du litige.
38 À cet égard, il doit être constaté que la requérante demande l’annulation de la décision implicite de rejet par laquelle la Commission a refusé de faire droit à sa demande tendant à ce que soit réexaminée la décision fixant les annuités de pension résultant du transfert, vers le régime communautaire, de l’équivalent actuariel des droits à pension qu’elle a acquis en Grèce. La demande de la requérante se distingue donc d’une demande qui tendrait à l’annulation de cette dernière décision.
39 Par conséquent, l’objet du litige réside simplement dans la question de savoir si la requérante avait droit, à la suite de l’arrêt Chatziioannidou/Commission, à un réexamen de la décision fixant les annuités de pension résultant du transfert de l’équivalent actuariel de ses droits à pension acquis en Grèce.
40 S’agissant des deux conditions cumulatives qui doivent être réunies pour qu’un fonctionnaire ou agent puisse obtenir le réexamen d’une décision le concernant devenue définitive, à savoir l’existence d’un fait nouveau substantiel et l’introduction d’une demande dans un délai raisonnable, il y a lieu de préciser que la première de ces conditions a trait au fond de la demande, tandis que la seconde concerne la recevabilité de celle-ci.
41 Il est vrai que, dans des cas similaires, dans lesquels l’institution défenderesse avait introduit une exception d’irrecevabilité par acte séparé, c’est dans le cadre de l’examen de ladite exception, et en particulier de l’examen de la recevabilité du recours au regard des délais, que le Tribunal de première instance a analysé la question de savoir si un arrêt constituait un fait nouveau substantiel à l’égard des fonctionnaires concernés (voir, en ce sens, ordonnances du Tribunal de première
instance du 11 juillet 1997, Chauvin/Commission, T‑16/97, RecFP p. I‑A‑237 et II‑681 ; du 19 août 1998, Gevaert/Commission, T‑160/97, RecFP p. I‑A‑465 et II‑1363, et du 11 décembre 2001, Stols/Conseil, T‑99/97, RecFP p. I‑A‑233 et II‑1061).
42 Toutefois, une telle analyse est concevable uniquement lorsque la juridiction communautaire constate que le fait invoqué par le requérant ne peut pas être qualifié de nouveau et substantiel.
43 En effet, si, au terme de son analyse relative à la question de savoir si un fait invoqué par un requérant constitue un fait nouveau substantiel, le Tribunal donnait une réponse positive à cette question et jugeait le recours par conséquent recevable, il ne resterait plus rien à juger s’agissant du fond du litige.
44 L’existence d’un fait nouveau substantiel ne peut donc pas être analysée comme une condition de recevabilité d’une demande tendant à l’annulation d’une décision ayant refusé le réexamen d’une décision administrative individuelle, mais doit être analysée comme une condition de fond pour qu’il soit fait droit à une telle demande. Parmi les deux conditions requises par la jurisprudence pour autoriser le réexamen d’une décision administrative devenue définitive, seule la condition selon laquelle
la demande tendant au réexamen doit être présentée dans un délai raisonnable à compter du fait que le requérant invoque comme étant nouveau et substantiel est une condition de recevabilité de la demande.
Sur le fond
45 En l’espèce, il n’est pas nécessaire d’examiner si la requérante a introduit sa demande dans un délai raisonnable, dans la mesure où le recours est en toute hypothèse manifestement non fondé.
46 En effet, selon une jurisprudence établie, un arrêt d’annulation d’une juridiction communautaire n’est susceptible de constituer un fait nouveau permettant la réouverture des délais de recours qu’à l’égard, d’une part, des parties à la procédure et, d’autre part, des autres personnes directement concernées par l’acte annulé (arrêts de la Cour du 17 juin 1965, Müller/Conseils, 43/64, Rec. p. 499 ; du 14 décembre 1965, Pfloeschner/Commission, 52/64, Rec. p. 1211, 1219 ; du 21 février 1974,
Kortner e.a./Conseil e.a., 15/73 à 33/73, 52/73, 53/73, 57/73 à 109/73, 116/73, 117/73, 123/73, 132/73 et 135/73 à 137/73, Rec. p. 177, point 38 ; du 8 mars 1988, Brown/Cour de justice, 125/87, Rec. p. 1619, point 13, et du 14 septembre 1999, Commission/AssiDomän Kraft Products e.a., C‑310/97 P, Rec. p. I‑5363, point 62).
47 En particulier, il a été jugé de manière constante que la constatation par un arrêt d’une juridiction communautaire qu’une décision administrative de portée générale enfreignait le statut ne saurait constituer, à l’égard de fonctionnaires qui ont omis de faire usage en temps utile des possibilités de recours qui leur sont offertes par le statut, un fait nouveau justifiant la présentation d’une demande tendant au réexamen des décisions individuelles adoptées par l’AIPN les concernant (voir,
en ce sens, ordonnances du Tribunal de première instance Chauvin/Commission, précitée, points 39 à 45, et du 9 février 2000, Gómez de la Cruz Talegón/Commission, T‑165/97, RecFP p. I‑A‑19 et II‑79, point 51).
48 Cette jurisprudence souligne en effet, d’une part, qu’un tel arrêt n’annule pas la décision administrative de portée générale en cause, bien qu’elle juge inapplicables certaines de ses dispositions dans le cas concret, et, d’autre part, que les effets juridiques d’un arrêt annulant un acte ne se rapportent, outre aux parties, qu’aux personnes concernées directement par l’acte annulé lui-même (ordonnance Chauvin/Commission, précitée, points 42 et 43 ainsi que la jurisprudence citée).
49 En l’espèce, la requérante ne prétend pas avoir été concernée directement, au sens de la jurisprudence mentionnée au point 46 du présent arrêt, par l’acte annulé par l’arrêt Chatziioannidou/Commission. Cet arrêt ne saurait, dès lors, être considéré comme un fait nouveau substantiel susceptible d’autoriser la requérante à présenter une demande de réexamen de sa situation. Rien n’empêchait l’intéressée de contester la décision par laquelle la Commission a calculé les annuités de pension
résultant du transfert vers le régime communautaire des droits à pension qu’elle a acquis en Grèce, en faisant valoir, à l’instar de M^me Chatziioannidou, que cette décision était fondée sur une interprétation illégale de l’article 4, paragraphe 4, des DGE. L’arrêt Chatziioannidou/Commission ne saurait être invoqué par des fonctionnaires qui ont omis de faire usage, en temps utile, des possibilités de recours qui leur sont offertes par le statut.
50 Ainsi, compte tenu de la jurisprudence constante susmentionnée, c’est à bon droit que la Commission a pu refuser de réexaminer la situation de la requérante.
51 Il s’ensuit que le recours dirigé contre la décision refusant de procéder à un tel réexamen doit être rejeté comme manifestement non fondé.
Sur les dépens
52 Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, du règlement de procédure, sous réserve des autres dispositions du chapitre huitième du titre deuxième dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. En vertu du paragraphe 2 du même article, le Tribunal peut décider, lorsque l’équité l’exige, qu’une partie qui succombe n’est condamnée que partiellement aux dépens, voire qu’elle ne doit pas être condamnée à ce titre.
53 Il résulte des motifs ci-dessus énoncés que la requérante est la partie qui succombe. En outre, la Commission a, dans ses conclusions, expressément demandé qu’elle soit condamnée aux dépens. Les circonstances de l’espèce ne justifiant pas l’application des dispositions de l’article 87, paragraphe 2, du règlement de procédure, il y a donc lieu de condamner la requérante aux dépens.
Par ces motifs,
LE TRIBUNAL (troisième chambre)
ordonne :
1) Le recours est rejeté comme manifestement non fondé.
2) M^me Ketselidou est condamnée à supporter l’ensemble des dépens.
Fait à Luxembourg, le 11 juin 2009.
Le greffier Le président
W. Hakenberg P. Mahoney
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* Langue de procédure : le français.