La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/10/2008 | CJUE | N°C-256/07

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mazák présentées le 21 octobre 2008., Mitsui & Co. Deutschland GmbH contre Hauptzollamt Düsseldorf., 21/10/2008, C-256/07


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁN MAZÁK

présentées le 21 octobre 2008 ( 1 )

Affaire C-256/07

Mitsui & Co. Deutschland GmbH

contre

Hauptzollamt Düsseldorf

«Code des douanes communautaire — Remboursement de droits de douane — Article 29, paragraphes 1 et 3, sous a) — Valeur en douane — Règlement (CEE) no 2454/93 — Article 145, paragraphes 2 et 3 — Prise en compte, dans le cadre de la détermination de la valeur en douane, des paiements effectués par le vendeur en application d’une obl

igation de garantie prévue par le contrat de vente — Application dans le temps — Règles de fond — Règles de procédure — Rétr...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁN MAZÁK

présentées le 21 octobre 2008 ( 1 )

Affaire C-256/07

Mitsui & Co. Deutschland GmbH

contre

Hauptzollamt Düsseldorf

«Code des douanes communautaire — Remboursement de droits de douane — Article 29, paragraphes 1 et 3, sous a) — Valeur en douane — Règlement (CEE) no 2454/93 — Article 145, paragraphes 2 et 3 — Prise en compte, dans le cadre de la détermination de la valeur en douane, des paiements effectués par le vendeur en application d’une obligation de garantie prévue par le contrat de vente — Application dans le temps — Règles de fond — Règles de procédure — Rétroactivité d’une règle — Validité»

I — Introduction, les faits au principal et la procédure devant la juridiction de renvoi

1. Les questions posées par le Finanzgericht Düsseldorf (tribunal des finances de Düsseldorf) (Allemagne) donnent à la Cour la possibilité de préciser l’incidence de la nature défectueuse des marchandises sur leur valeur transactionnelle et, par conséquent, sur leur valeur douanière également.

2. La juridiction de renvoi a besoin des réponses de la Cour pour statuer sur la requête de Mitsui & Co. Deutschland GmbH (ci-après «Mitsui & Co.») dirigée contre le Hauptzollamt Düsseldorf (bureau principal des douanes de Düsseldorf, ci-après le «Hauptzollamt») au sujet d’une décision de ce dernier relative à une demande de remboursement des droits de douane présentée par Mitsui & Co.

3. Mitsui & Co. a pour activité l’achat et l’importation de véhicules de la marque Subaru sur lesquels le vendeur japonais, qui est en même temps leur fabricant, concède une garantie triennale. Le vendeur-fabricant remboursait à Mitsui & Co. les coûts au titre de cette garantie, c’est-à-dire les coûts de réparation facturés par ses propres acheteurs. En conséquence, Mitsui & Co. a sollicité auprès de l’Hauptzollamt un remboursement des droits de douane.

4. La décision litigieuse de l’Hauptzollamt porte sur des véhicules mis en libre pratique au cours du mois de juillet 2000. Par décision du 27 mai 2004, l’Hauptzollamt a fait partiellement droit à la demande de Mitsui & Co. du 13 juin 2003 tendant au remboursement des droits de douane au titre de prestations de garantie. Il a seulement pris en compte les ajustements de prix réalisés jusqu’au mois de février 2002 et a refusé d’accorder les ajustements de prix réalisés entre le mois de mars 2002 et
celui de juin 2003, invoquant l’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil établissant le code des douanes communautaire ( 2 ), tel que modifié par le règlement (CE) no 444/2002 de la Commission, du 11 mars 2002 ( 3 ).

5. L’Hauptzollamt a confirmé sa position dans une décision du 30 mars 2005, rendue suite à la réclamation de Mitsui & Co. par laquelle celle-ci indiquait que l’article 145 du règlement d’application ne s’appliquait pas à sa demande de remboursement dès lors que, dans le cas d’une garantie, il s’agissait non pas d’une modification de prix a posteriori, mais de la reconnaissance, en terme de montant, d’une obligation de garantie contractuelle, et que, en outre, en vertu d’une exclusion de principe de
la rétroactivité, ledit article 145 n’était pas applicable aux marchandises importées et mises en libre pratique avant le 19 mars 2002.

II — Cadre juridique

6. À l’époque des faits au principal, la valeur en douane était traitée au chapitre III du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire ( 4 ).

7. L’article 29, paragraphe 1, du code des douanes définit «la valeur en douane des marchandises importées» comme leur valeur transactionnelle, c’est-à-dire le prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises lorsqu’elles sont vendues pour l’exportation à destination du territoire douanier de la Communauté ( 5 ).

8. Ledit article 29 définit aussi, à son paragraphe 3, sous a), «le prix effectivement payé ou à payer» comme le paiement total effectué ou à effectuer par l’acheteur au vendeur, ou au bénéfice de celui-ci, pour les marchandises importées. Il comprend tous les paiements effectués ou à effectuer, comme condition de la vente des marchandises importées, par l’acheteur au vendeur, ou par l’acheteur à une tierce personne pour satisfaire à une obligation du vendeur.

9. En vertu de l’article 249 du code des douanes, la Commission des Communautés européennes a adopté le règlement no 2454/93.

10. Ce règlement a été modifié à plusieurs reprises. Le règlement no 444/2002, qui est entré en vigueur le 19 mars 2002, constitue l’une de ces modifications.

11. Comme le rappellent les cinquième et sixième considérants du règlement no 444/2002, après la mise en libre pratique des marchandises, le prix convenu pour ces dernières entre l’acheteur et le vendeur peut, dans certains cas, être modifié afin de tenir compte de la nature défectueuse des marchandises. Par conséquent, les règles en vigueur devraient expressément prévoir que la valeur transactionnelle au sens de l’article 29 du code des douanes peut tenir compte de cette circonstance spéciale, sous
réserve de clauses de sauvegarde appropriées ainsi que de délais raisonnables.

12. Pour ces raisons, le règlement no 444/2002 a introduit le nouveau libellé de l’article 145 du règlement d’application. Dans ses paragraphes 2 et 3, cet article prévoit la possibilité, après la mise en libre pratique des marchandises, de prendre en compte, en vue de la détermination de la valeur en douane, la modification par le vendeur, en faveur de l’acheteur, du prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises.

13. L’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement d’application précise les conditions de fond de cette possibilité. Premièrement, les marchandises concernées doivent être défectueuses à la date d’acceptation de la déclaration par les autorités douanières. Deuxièmement, le vendeur doit avoir effectué la modification en application d’une obligation contractuelle de garantie prévue par le contrat de vente conclu avant la mise en libre pratique de ces marchandises. Troisièmement, le caractère
défectueux desdites marchandises doit ne pas avoir déjà été pris en compte dans le contrat de vente y afférent. Quatrièmement, la modification du prix ne peut être prise en compte que si cette modification a eu lieu dans un délai de douze mois à compter de la date d’acceptation de la déclaration de mise en libre pratique des marchandises.

III — Questions préjudicielles et procédure devant la Cour

14. Le Finanzgericht Düsseldorf a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les quatre questions préjudicielles suivantes:

«1) Les versements, effectués par le vendeur-fabricant à l’acheteur dans le cadre d’un accord de garantie et par lesquels l’acheteur est indemnisé des coûts de réparation facturés par ses propres acheteurs, diminuent-ils la valeur douanière, au sens de l’article 29, paragraphes 1 et 3, sous a), du code des douanes, déclarée sur la base du prix convenu entre le vendeur-fabricant et l’acheteur?

2) Les versements effectués par le vendeur-fabricant à l’acheteur pour lui rembourser les frais de garantie mentionnés à la première question constituent-ils une modification de la valeur transactionnelle au sens de l’article 145, paragraphe 2, du règlement d’application, tel que modifié par le règlement no 444/2002?

3) En cas de réponse positive à la première ou à la deuxième question, l’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement d’application, tel que modifié par le règlement no 444/2002, doit-il être appliqué aux importations dont les déclarations en douane ont été acceptées avant l’entrée en vigueur du règlement no 444/2002?

4) En cas de réponse positive à la troisième question, l’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement d’application, tel que modifié par le règlement no 444/2002, est-il valable?»

15. Des observations écrites ont été déposées par Mitsui & Co., le gouvernement allemand et la Commission.

16. Mitsui & Co. ainsi que la Commission ont demandé à la Cour une audience, qui s’est tenue le 12 juin 2008.

IV — Appréciation

A — Sur la première question préjudicielle

17. La première question de la juridiction de renvoi a pour objet de déterminer si l’article 29, paragraphes 1 et 3, sous a), du code des douanes peut être interprété en ce sens que les versements effectués, après la mise en libre pratique des marchandises, par le vendeur à l’acheteur dans le cadre d’un accord de garantie diminuent la valeur en douane des marchandises qui est calculée sur la base de la valeur transactionnelle.

18. Toutes les parties ayant déposé des observations étaient unanimes pour considérer que les versements effectués par le vendeur à l’acheteur, tels ceux dans l’affaire au principal, diminuaient la valeur en douane des marchandises.

19. En premier lieu, il convient de rappeler que la Cour a constaté à plusieurs reprises que la réglementation communautaire relative à l’évaluation en douane visait à établir un système équitable, uniforme et neutre qui exclut l’utilisation de valeurs en douane arbitraires ou fictives ( 6 ).

20. Il découle aussi de la jurisprudence de la Cour que la valeur en douane doit refléter la valeur économique réelle d’une marchandise importée et, par conséquent, tenir compte de l’ensemble des éléments de cette marchandise qui présentent une valeur économique ( 7 ).

21. En l’espèce, il résulte d’un vice caché des véhicules importés que la valeur économique réelle de ceux-ci était plus basse que la valeur transactionnelle déclarée au moment de leur mise en libre pratique.

22. Comme l’a relevé à juste titre la Commission dans ses observations, l’article 29, paragraphes 1 à 3, du code des douanes ne spécifie pas expressément comment traiter les modifications ultérieures de la valeur transactionnelle qui est une base du calcul de la valeur en douane.

23. À cet égard, j’estime qu’il devrait être possible de s’inspirer de la jurisprudence de la Cour concernant l’ajustement du prix effectivement payé ou à payer après l’achat d’une marchandise, mais avant sa mise en libre pratique à la suite de perte ou en cas de dommage de celle-ci.

24. Dans l’arrêt Repenning ( 8 ), la Cour a admis que la valeur transactionnelle est une donnée qui doit éventuellement faire l’objet d’ajustements lorsque cette opération est nécessaire pour éviter de déterminer une valeur en douane arbitraire ou fictive.

25. Sur ce point, je partage également l’avis de l’avocat général Darmon présenté au point 20 de ses conclusions dans l’affaire ayant donné lieu à l’arrêt Hauptzollamt Hamburg-St-Amnen/Ebbe Sönnichsen ( 9 ) selon lequel la valeur en douane doit être appréciée au jour où la marchandise est mise en libre pratique dans la Communauté. Dès lors que l’on tient compte de sa valeur réelle, l’important est son état lors de l’entrée dans la Communauté.

26. À la lumière de ces éléments, il convient d’admettre que les versements effectués, après la mise en libre pratique des marchandises, par le vendeur à l’acheteur dans le cadre d’un accord de garantie diminuent la valeur en douane de ces marchandises, à condition que lesdites marchandises aient été défectueuses au moment de leur mise en libre pratique.

27. Une autre interprétation de l’article 29, paragraphes 1 et 3, sous a), du code des douanes conduirait à déterminer une valeur en douane fictive, ce qui serait contraire à l’objectif de la réglementation communautaire relative à l’évaluation en douane.

B — Sur la deuxième question préjudicielle

28. Par cette question, la juridiction de renvoi souhaite savoir, en substance, si les versements effectués par un vendeur en faveur d’un acheteur au titre d’un accord de garantie, par lesquels cet acheteur est indemnisé des coûts de réparation facturés par ses propres acheteurs, impliquent une modification de la valeur transactionnelle au sens de l’article 145, paragraphe 2, du règlement d’application, tel que modifié par le règlement no 444/2002.

29. Les avis des parties ayant déposé des observations sont partagés sur ce point.

30. Selon le gouvernement allemand et la Commission, de tels versements constituent une modification du prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises qui, en vertu de l’article 145, paragraphe 2, du règlement d’application, peut être prise en compte en vue de la détermination de leur valeur en douane en vertu de l’article 29 du code des douanes.

31. Mitsui & Co. est d’un avis contraire. Elle propose à la Cour de répondre à la deuxième question que ces versements ne constituent pas une modification de la valeur transactionnelle au sens de l’article 145, paragraphe 2, du règlement d’application.

32. Mitsui & Co. a précisé au cours de l’audience que ledit article 145, paragraphe 2, ne s’appliquait, selon elle, que dans les cas où le vendeur et l’acheteur conviennent d’une diminution du prix des marchandises du fait de la défectuosité de celles-ci.

33. Si l’on admettait l’interprétation de l’article 145, paragraphe 2, du règlement d’application proposée par Mitsui & Co., cela signifierait, compte tenu de ma réponse apportée à la première question posée par la juridiction de renvoi, que les versements effectués par le vendeur à l’acheteur dans le cadre d’un accord de garantie diminuent la valeur en douane des marchandises, mais non selon les conditions découlant de cet article 145, paragraphe 2.

34. Je souhaite souligner que, à mon avis, le libellé dudit article 145, paragraphe 2, confirme l’interprétation de l’article 29, paragraphes 1 et 3, sous a), du code des douanes proposée dans le cadre de la réponse apportée à la première question posée par la juridiction de renvoi.

35. L’article 145, paragraphe 2, du règlement d’application ne fonde pas la possibilité de prendre en compte la modification a posteriori, après l’importation, du prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises, en vue de la détermination de leur valeur en douane, à cause de leur défectuosité. Cette possibilité découlant directement de l’article 29, paragraphes 1 et 3, sous a), du code des douanes, ledit article 145, paragraphe 2, ne fait que confirmer son existence et préciser les
conditions de son application.

36. La question se pose dès lors de savoir si les versements effectués par un vendeur en faveur d’un acheteur au titre d’un accord de garantie, par lesquels cet acheteur est indemnisé des coûts de réparation facturés par ses propres acheteurs, constituent une «modification» du prix effectivement payé ou à payer.

37. Ma réponse à cette question est fondée sur l’hypothèse que le législateur communautaire n’a pas envisagé de limiter le champ d’application de l’article 145, paragraphe 2, du règlement d’application seulement dans l’hypothèse d’une diminution du prix des marchandises du fait de leur défectuosité. À cet égard, je me réfère à l’utilisation, à cette disposition, du terme «modification» du prix au lieu de la notion restrictive de «diminution» du prix.

38. Cette hypothèse est confirmée aussi par le commentaire no 2 du comité du code des douanes relatif à l’application de l’article 145, paragraphe 2, du règlement d’application qui décrit une situation semblable à celle dont a à connaître la juridiction de renvoi. À mon avis, ce commentaire a la même nature et la même valeur que les notes explicatives de la nomenclature combinée à l’égard desquelles la Cour a constaté qu’elles contribuent, pour leur part, de façon importante à l’interprétation du
droit douanier communautaire ( 10 ).

39. Je suis donc d’avis que l’article 145, paragraphe 2, du règlement d’application a aussi pour objet le traitement d’une telle initiative d’un vendeur face à la défectuosité des marchandises, comme en l’espèce, c’est-à-dire l’indemnisation des coûts de réparation d’un acheteur facturés par ses propres acheteurs.

C — Sur la troisième question préjudicielle

40. La troisième question de la juridiction de renvoi a pour objet de déterminer les effets dans le temps de l’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement d’application introduits par le règlement no 444/2002 avec effet au 19 mars 2002.

41. L’analyse des parties qui ont déposé des observations diverge sur ce point.

42. Mitsui & Co. et la Commission sont conformes à la réponse à cette question. Ils proposent à la Cour de répondre que l’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement d’application ne doit pas être appliqué aux importations dont les déclarations en douane ont été acceptées avant l’entrée en vigueur du règlement no 444/2002 qui l’a introduit.

43. En revanche, le gouvernement allemand estime que ledit article 145 ne comporte aucune règle de droit matériel propre, mais qu’il explicite ou précise l’article 29 du code des douanes. Pour cette raison, les déclarations en douane effectuées avant l’entrée en vigueur du règlement no 444/2002, qui a modifié l’article 145 du règlement d’application, doivent être d’emblée appréciées à l’un de leurs critères contenus dans cette disposition. Par conséquent, la règle visée à l’article 145,
paragraphe 3, du règlement d’application, selon laquelle seules peuvent être prises en compte dans le calcul de la valeur en douane les modifications de prix convenues dans un délai de douze mois à compter de la déclaration, s’applique aussi aux déclarations effectuées avant l’entrée en vigueur du règlement no 444/2002.

44. Il importe de relever que, comme la Cour l’a déjà précisé dans l’arrêt Beemsterboer Coldstore Services ( 11 ), alors que les règles de procédure sont généralement censées s’appliquer à tous les litiges au moment où elles entrent en vigueur, une règle de fond ne doit pas, en principe, s’appliquer à des situations acquises antérieurement à son entrée en vigueur.

45. Donc, pour répondre à la question de savoir si l’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement d’application est applicable aux effets futurs d’une situation née avant l’entrée en vigueur du règlement no 444/2002, il convient de déterminer si les paragraphes 2 et 3 de cet article sont des dispositions matérielles ou procédurales.

46. Comme je l’ai déjà mentionné ( 12 ), les paragraphes 2, mais aussi 3 ne créent pas de règles nouvelles. Ils confirment l’existence du droit à la modification a posteriori, après l’importation, de la valeur transactionnelle des marchandises, en vue de la détermination de leur valeur en douane, du fait de leur défectuosité et ils précisent les conditions de l’utilisation de ce droit.

47. Cela ne signifie toutefois pas que lesdites dispositions ne pourraient pas être des dispositions matérielles. Bien au contraire, leur caractère matériel découle du fait que ces dispositions définissent les conditions pour l’application du droit à la modification de la valeur transactionnelle.

48. Il découle de la jurisprudence que, dans certaines conditions, l’effet rétroactif de dispositions matérielles de droit communautaire est néanmoins permise. Cette possibilité est subordonnée au fait qu’il ressort clairement des termes des dispositions matérielles, de leur finalité ou économie qu’un tel effet doit leur être attribué ( 13 ).

49. La Cour a cependant affirmé dans le même temps que l’effet rétroactif d’une disposition de droit matériel ne devait pas compromettre les principes fondamentaux de la Communauté, notamment les principes de sécurité juridique et de confiance légitime en vertu desquels la législation communautaire doit être claire et prévisible pour les justiciables ( 14 ).

50. Or, avant l’entrée en vigueur du règlement no 444/2002, qui a modifié le règlement, les autorités douanières allemandes, en vertu d’une pratique administrative établie, appliquaient le délai général de trois ans en cas de modification a posteriori, après l’importation, de la valeur transactionnelle des marchandises, en vue de la détermination de la valeur en douane des marchandises à cause de leur défectuosité. À mon avis, c’est donc précisément le principe de protection de la confiance légitime
qui s’oppose à l’application rétroactive de l’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement d’application.

51. Force est dès lors de constater que l’article 145, paragraphes 2 et 3 du règlement d’application tel que modifié par le règlement no 444/2002 ne s’applique pas à des situations nées antérieurement à son entrée en vigueur, c’est-à-dire aux importations dont les déclarations en douane ont été acceptées avant ladite entrée en vigueur.

D — Sur la quatrième question préjudicielle

52. Au vu de la réponse proposée à la troisième question, je partage l’avis présenté par la Commission dans ses observations écrites, à savoir qu’il n’existe pas de circonstances de nature à remettre en cause la validité de l’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement d’application tel que modifié par le règlement 444/2002.

V — Conclusion

53. À la lumière des considérations qui précèdent, je propose donc à la Cour de répondre aux questions préjudicielles déférées par la juridiction de renvoi comme suit:

«1) L’article 29, paragraphes 1 et 3, sous a), du règlement (CEE) no 2913/92 du Conseil, du 12 octobre 1992, établissant le code des douanes communautaire, doit être interprété en ce sens que les versements effectués, après la mise en libre pratique des marchandises, par le vendeur à l’acheteur dans le cadre d’un accord de garantie diminuent la valeur en douane des marchandises qui est calculée sur la base de la valeur transactionnelle, à condition que ces marchandises soient défectueuses au
moment de leur mise en libre pratique.

2) L’article 145, paragraphe 2, du règlement (CEE) no 2454/93 de la Commission, du 2 juillet 1993, fixant certaines dispositions d’application du règlement no 2913/92, tel que modifié par le règlement (CE) no 444/2002 de la Commission, du 11 mars 2002, doit être interprété en ce sens que les versements effectués, après la mise en libre pratique des marchandises, par le vendeur à l’acheteur dans le cadre d’un accord de garantie constituent une modification de la valeur transactionnelle au sens de
l’article 145, paragraphe 2, du règlement no 2454/93, tel que modifié par le règlement no 444/2002.

3) L’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement no 2454/93, tel que modifié par le règlement no 444/2002, ne s’applique pas à des situations nées antérieurement à l’entrée en vigueur de ce dernier règlement.

4) Il n’existe pas de circonstances de nature à remettre en cause la validité de l’article 145, paragraphes 2 et 3, du règlement no 2454/93, tel que modifié par le règlement no 444/2002.»

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

( 1 ) Langue originale: le français.

( 2 ) JO L 253, p.1, ci-après le «règlement d’application».

( 3 ) JO L 68, p. 11.

( 4 ) JO L 302, p. 1, ci-après le «code des douanes». Ce code a été abrogé par le règlement (CE) no 450/2008 du Parlement européen et du Conseil, du 23 avril 2008 (JO L 145, p. 1).

( 5 ) Cette définition reprend exactement les termes de l’article 1er de l’accord relatif à la mise en œuvre de l’article VII de l’accord général sur les tarifs douaniers et le commerce et le protocole qui lui est annexé, approuvé au nom de la Communauté économique européenne par la décision 80/271/CEE du Conseil, du 10 décembre 1979, concernant la conclusion des accords multilatéraux résultant des négociations commerciales de 1973-1979 (JO L 71, p. 1).

( 6 ) Voir, notamment, arrêts du 6 juin 1990, Unifert (C-11/89, Rec. p. I-2275, point 35); du 16 novembre 2006, Compaq Computer International Corporation (C-306/04, Rec. p. I-10991, point 30), et du 28 février 2008, Carboni e derivati (C-263/06, point 60). La Cour a établi cette constatation en s’inspirant du sixième considérant (CEE) no 1224/80 du Conseil, du 28 mai 1980, relatif à la valeur en douane des marchandises (JO L 134, p. 1), qui a été abrogé par le code des douanes.

( 7 ) Arrêt Compaq Computer International Corporation, précité (point 30).

( 8 ) Arrêt du 12 juin 1986 (183/85, Rec. p. 1873, point 16).

( 9 ) Arrêt du 29 avril 1993 (C-59/92, Rec. p. I-2193), point 20).

( 10 ) Voir, en ce sens, arrêts du 16 juin 1994, Develop Dr. Eisbein (C-35/93, Rec. p. I-2655, point 21); du 15 septembre 2005, Intermodal Transports (C-495/03, Rec. p. I-8151, point 48), et du 16 février 2006, Proxxon (C-500/04, Rec. p. I-1545, point 22).

( 11 ) Arrêt du 9 mars 2006 (C-293/04, Rec. p. I-2263, points 19 et 20).

( 12 ) Voir point 35 des présentes conclusions.

( 13 ) Arrêts du 12 novembre 1981, Meridionale Industria Salumi e.a. (212/80 à 217/80, Rec. p. 2735, point 9); du 15 juillet 1993, GruSa Fleisch (C-34/92, Rec. p. I-4147, point 22); du 24 septembre 2002, Falck et Acciaierie di Bolzano/Commission (C-74/00 P et C-75/00 P, Rec. p. I-7869, point 119), et Beemsterboer Coldstore Services, précité (point 21).

( 14 ) Arrêt Beemsterboer Coldstore Services, précité (point 24).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-256/07
Date de la décision : 21/10/2008
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Finanzgericht Düsseldorf - Allemagne.

Code des douanes communautaire - Remboursement de droits de douane - Article 29, paragraphes 1 et 3, sous a) - Valeur en douane - Règlement (CEE) nº 2454/93 - Article 145, paragraphes 2 et 3 - Prise en compte, dans le cadre de la détermination de la valeur en douane, des paiements effectués par le vendeur en application d'une obligation de garantie prévue par le contrat de vente - Application dans le temps - Règles de fond - Règles de procédure - Rétroactivité d’une règle - Validité.

Union douanière

Libre circulation des marchandises


Parties
Demandeurs : Mitsui & Co. Deutschland GmbH
Défendeurs : Hauptzollamt Düsseldorf.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mazák
Rapporteur ?: Kūris

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2008:580

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award