La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

08/10/2008 | CJUE | N°C-431/07

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Trstenjak présentées le 8 octobre 2008., Bouygues SA et Bouygues Télécom SA contre Commission des Communautés européennes., 08/10/2008, C-431/07


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME VERICA TRSTENJAK

présentées le 8 octobre 2008 ( 1 )

Affaire C-431/07 P

Bouygues SA

et

Bouygues Télécom SA

contre

Commission des Communautés européennes

Table des matières

  I — Le cadre juridique

...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

MME VERICA TRSTENJAK

présentées le 8 octobre 2008 ( 1 )

Affaire C-431/07 P

Bouygues SA

et

Bouygues Télécom SA

contre

Commission des Communautés européennes

Table des matières

  I — Le cadre juridique
  II — Les antécédents du litige
  A — L’attribution des licences UMTS
  B — La procédure devant la Commission et la décision litigieuse
  III — La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
  IV — Demandes dans la procédure devant la Cour
  V — Pourvoi des requérantes et arguments des parties
  A — Sur le premier moyen
  B — Sur le second moyen
  C — Sur le troisième moyen
  1. Sur la première branche
  2. Sur la deuxième branche
  3. Sur la troisième branche
  D — Sur le quatrième moyen
  1. Sur la première branche
  2. Sur la deuxième branche
  3. Sur la troisième branche
  VI — Appréciation juridique
  A — Sur les troisième et quatrième moyens
  1. Le contenu de la lettre du 22 février 2001 (troisième branche du troisième moyen)
  2. La renonciation partielle aux créances sur Orange et SFR et l’exception tirée de l’économie du système (première branche du quatrième moyen)
  a) L’applicabilité et la base légale de l’exception tirée de la nature et de l’économie du système en l’espèce
  b) L’application de l’exception basée sur la nature et sur l’économie de l’encadrement communautaire
  c) Bilan
  3. Le caractère incertain des créances (deuxième branche du troisième moyen)
  4. L’avantage sélectif temporel (deuxième branche du quatrième moyen)
  a) La notion d’avantage au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE
  b) L’argument basé sur l’exception tirée de la nature et de l’économie de l’encadrement communautaire
  i) L’inévitabilité de l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR
  ii) L’inévitabilité de l’application de conditions identiques à Orange, à SFR et à Bouygues Télécom le 3 décembre 2002
  c) Bilan
  5. Le principe de non-discrimination (troisième branche du quatrième moyen)
  6. L’unicité de la procédure (première branche du troisième moyen)
  7. Bilan
  B — Sur le second moyen
  C — Sur le premier moyen
  D — Bilan
  VII — Sur les dépens
  VIII — Conclusions

«Pourvoi — Aides d’État — Article 88, paragraphe 2, CE — Conditions d’ouverture d’une procédure formelle d’examen — Difficultés sérieuses — Critères constitutifs d’une aide d’État — Ressources d’État — Principe de non-discrimination»

1.  Par son pourvoi, Bouygues SA et Bouygues Télécom SA (ci-après les «requérantes») demandent à la Cour de justice d’annuler l’arrêt du 4 juillet 2007, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission (T-475/04, ci après l’«arrêt attaqué») ( 2 ) par lequel le Tribunal de première instance des Communautés européennes a rejeté leur recours en annulation contre la décision de la Commission du 20 juillet 2004 (Aide d’État NN 42/2004 — France, ci-après la «décision litigieuse»), relative à la modification
rétroactive des redevances dues par Orange et SFR au titre des licences Universal Mobile Telecommunications System (UMTS) ( 3 ).

I — Le cadre juridique

2. Aux termes de l’article 87, paragraphe 1, CE:

«Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre États membres, les aides accordées par les États ou au moyen de ressources d’État sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions.»

3. L’article 88, paragraphe 3, CE stipule:

«La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. Si elle estime qu’un projet n’est pas compatible avec le marché commun, aux termes de l’article 87, elle ouvre sans délai la procédure prévue au paragraphe précédent. L’État membre intéressé ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale.»

4. L’utilisation du spectre radioélectrique pour la prestation des services UMTS est encadrée par la directive 97/13/CE du Parlement européen et du Conseil, du 10 avril 1997, relative à un cadre commun pour les autorisations générales et les licences individuelles dans le secteur des services de télécommunications ( 4 ) et la décision no 128/1999/CE du Parlement européen et du Conseil, du 14 décembre 1998, relative à l’introduction coordonnée dans la Communauté d’un système de communications mobiles
et sans fil (UMTS) de troisième génération ( 5 ).

5. L’article 3, paragraphe 3, de la directive 97/13 prévoit:

«Les États membres veillent à ce que les services et/ou réseaux de télécommunications puissent être fournis soit sans autorisation, soit sur la base d’une autorisation générale complétée, le cas échéant, de droits et d’obligations nécessitant une évaluation individuelle des candidatures et donnant lieu à une ou à plusieurs licences individuelles. Les États membres ne peuvent délivrer une licence individuelle que si le bénéficiaire obtient l’accès à des ressources rares, qu’elles soient physiques
ou de toute autre nature, ou s’il est soumis à des obligations particulières ou jouit de droits particuliers, conformément aux dispositions de la section III.»

6. L’article 8, paragraphe 4, de la directive 97/13 est ainsi rédigé:

«Les États membres peuvent modifier les conditions attachées à une licence individuelle dans des cas objectivement justifiés et de manière proportionnée. Ce faisant, les États membres notifient leur intention de manière appropriée et permettent aux parties intéressées de faire connaître leur point de vue sur les modifications proposées.»

7. L’article 9, paragraphe 2, de la directive 97/13 stipule:

«Lorsqu’un État membre a l’intention d’octroyer des licences individuelles:

— il les octroie selon des procédures ouvertes, non discriminatoires et transparentes et, à cette fin, soumet tous les candidats aux mêmes procédures, à moins qu’il n’existe une raison objective de leur appliquer un traitement différencié […].»

8. L’article 10, paragraphes 1, 3 et 4, de la directive 97/13 dispose:

«1.   Les États membres ne peuvent limiter le nombre de licences individuelles pour une catégorie de services de télécommunications, quelle qu’elle soit, et pour l’établissement et/ou l’exploitation des infrastructures de télécommunications, que dans la mesure nécessaire pour garantir l’utilisation efficace du spectre des radiofréquences ou durant le temps nécessaire pour permettre l’attribution de numéros en nombre suffisant, conformément au droit communautaire.

[…]

3.   Les États membres octroient ces licences individuelles sur la base de critères de sélection objectifs, non discriminatoires, transparents, proportionnés et détaillés. Lors de toute sélection, ils tiennent dûment compte de la nécessité de faciliter le développement de la concurrence et de maximiser les avantages pour les utilisateurs. […]

4.   Lorsqu’un État membre constate, de sa propre initiative ou à la suite d’une demande formulée par une entreprise, au moment de l’entrée en vigueur de la présente directive ou ultérieurement, que le nombre de licences individuelles peut être augmenté, il prend les mesures de publicité nécessaires et lance un appel à candidatures pour l’octroi de licences supplémentaires.»

9. L’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13 prévoit:

«[…] dans le cas de ressources rares, les États membres peuvent autoriser leurs autorités réglementaires nationales à imposer des redevances afin de tenir compte de la nécessité d’assurer une utilisation optimale de cette ressource. Ces redevances sont non discriminatoires et tiennent compte notamment de la nécessité de promouvoir le développement de services innovateurs et de la concurrence.»

10. La décision no 128/1999, aux termes de son article 1er, vise «à faciliter l’introduction rapide et coordonnée de réseaux et de services UMTS compatibles dans la Communauté». L’article 3, paragraphe 1, de cette décision est ainsi rédigé:

«Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour permettre, conformément à l’article 1er de la directive 97/13/CE, l’introduction coordonnée et progressive de services UMTS sur leur territoire le 1er janvier 2002 au plus tard.»

11. Par la suite, il sera fait référence aux dispositions de la directive 97/13 et de la décision no 128/1999 mentionnées ci-dessus comme l’«encadrement communautaire».

II — Les antécédents du litige

A — L’attribution des licences UMTS

12. Avec une décision du 28 juillet 2000, les autorités françaises ont ouvert un appel à candidatures pour quatre licences UMTS. Les licences devaient avoir une durée de quinze ans. La redevance pour une licence devait s’élever à un montant total cumulé de 4,95 milliards d’euros. Les quatre licences devaient être attribuées selon la procédure de la soumission «comparative». Cette méthode permettait aux autorités françaises de choisir, parmi les opérateurs s’étant déclarés prêts à payer 4,95
milliards d’euros, ceux ayant pris les engagements les plus importants au regard d’une série de critères tels que l’ampleur et la rapidité de déploiement du réseau, la qualité des services fournis et les actions visant à préserver l’environnement.

13. La date limite de dépôt des candidatures était fixée au 31 janvier 2001, les candidats pouvant retirer leurs candidatures jusqu’au 31 mai 2001. Le 31 janvier 2001, seuls deux dossiers de candidature avaient été déposés, à savoir ceux de la Société française du radiotéléphone — SFR (ci-après «SFR») et de la société France Télécom mobiles (devenue quelques mois plus tard la société Orange France, ci-après «Orange»). Les autres opérateurs ont renoncé à soumissionner surtout en raison du montant
élevé des redevances.

14. Comme conséquence, l’Autorité de régulation des télécommunications (ci-après l’«ART») a indiqué dans un communiqué de presse du 31 janvier 2001 (donc le jour de la date d’expiration du délai de dépôt de candidatures) que, afin de favoriser le développement d’une concurrence véritable, visée par les textes tant communautaires que français, un second appel complémentaire à candidatures était nécessaire pour parvenir à l’objectif de délivrance de quatre licences.

15. Au vu de cette indication, Orange et SFR ont attiré l’attention du ministre de l’Économie et des Finances et du secrétaire d’État chargé de l’industrie sur la nécessité de respecter le principe d’égalité devant les charges publiques et le principe de concurrence effective entre les opérateurs lorsqu’ils décideraient des conditions des futures licences.

16. Par deux lettres datées du 22 février 2001, aux termes identiques, le ministre de l’Économie et des Finances et le secrétaire d’État chargé de l’industrie ont assuré à SFR et à Orange que le gouvernement français partageait avec eux le double objectif du respect du principe d’égalité devant les charges publiques et du principe de concurrence effective entre les opérateurs et que les modalités du second appel à candidatures garantiraient un traitement équitable de tous les opérateurs qui se
verraient finalement attribuer une licence.

17. Le 31 mai 2001, l’ART annonçait qu’Orange et SFR étaient retenues comme candidates du premier appel. L’ART proposait au gouvernement de lancer le second appel à candidatures au plus tard le premier semestre 2002 en précisant que ce second appel à candidatures devrait prendre en compte l’exigence d’équité des conditions, notamment financières, entre tous les opérateurs.

18. Le 18 juillet 2001, les deux premières licences ont été attribuées à SFR et à Orange. Ces deux licences étaient accordées aux conditions prévues dans le premier appel à candidatures ( 6 ).

19. Le 14 décembre 2001, le second appel à candidatures a été lancé. L’ART y indiquait que les conditions de ce dernier s’inscrivaient dans la continuité des conditions du premier appel à candidatures et s’attachaient à assurer en particulier le respect du principe d’égalité entre les opérateurs. L’ART recommandait également la modification des conditions des licences des candidats du premier appel à candidatures.

20. Le 16 mai 2002, date d’expiration du délai de dépôt de candidatures pour le second appel à candidatures, uniquement Bouygues Télécom avait déposé son dossier de candidature. Le 27 septembre 2002, l’ART a décidé de retenir la candidature de Bouygues Télécom. Faute de candidat, la quatrième licence UMTS n’a pas été attribuée.

21. Par arrêtés du 3 décembre 2002, la troisième licence UMTS a été attribuée à Bouygues Télécom et les conditions des licences d’Orange et de SFR ont été alignées sur les conditions de la licence attribuée à Bouygues Télécom (ci-après la «modification litigieuse»). Toutes les licences avaient donc une durée de 20 ans et une redevance répartie en une première composante d’un montant de 619 millions d’euros, versée à l’occasion de la délivrance de la licence, et en une seconde composante, versée
annuellement au titre de l’utilisation des fréquences et calculée en pourcentage du chiffre d’affaires réalisé au titre desdites fréquences ( 7 ).

B — La procédure devant la Commission et la décision litigieuse

22. Le 4 octobre 2002, la Commission a reçu une plainte des requérantes contre la modification litigieuse. Dans leur plainte, les requérantes ont soutenu que la modification litigieuse constituait une aide d’État au sens de l’article 87 CE. Cette plainte était une parmi plusieurs plaintes des requérantes contre des mesures de l’État français concernant France Télécom.

23. Le 31 janvier 2003, la Commission a ouvert la procédure formelle d’examen ( 8 ) à l’égard de certaines de ces mesures. La modification litigieuse ne figurait pas parmi ces mesures. Le 12 novembre 2003, les requérantes ont mis en demeure la Commission de prendre position concernant leur plainte contre la modification litigieuse. Le 21 février, les requérantes ont déposé au Tribunal un recours en vue de faire constater la carence de la Commission de statuer sur la plainte. Avec une ordonnance du
14 février 2005 ( 9 ), le Tribunal a rejeté ce recours comme irrecevable.

24. Dans la décision litigieuse, la Commission a décidé de ne pas soulever d’objections à l’encontre de la modification litigieuse conformément à l’article 88, paragraphe 3, CE. Elle a basé cette décision sur la considération que la modification litigieuse ne constituait pas une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

III — La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué

25. Le 24 novembre 2004, les requérantes ont introduit un recours en annulation contre la décision litigieuse devant le Tribunal. La République française, Orange et SFR ont été admises comme intervenantes au soutien des conclusions de la Commission.

26. À l’appui de leur recours, les requérantes ont invoqué notamment deux moyens tirés, respectivement, du fait que la modification litigieuse aurait constitué une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE et que, l’affaire soulevant des difficultés sérieuses, la Commission aurait dû ouvrir la phase formelle d’examen au sens de l’article 88, paragraphe 2, CE.

27. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté le recours des requérantes.

28. Il a confirmé la conclusion de la Commission quant à l’inexistence d’un avantage sélectif en se fondant sur la motivation suivante.

29. En premier lieu, le Tribunal a examiné si les mesures des autorités françaises avaient procuré un avantage sélectif à Orange et à SFR ( 10 ). Dans ce contexte, le Tribunal a d’abord examiné si la renonciation partielle de l’État français aux créances sur Orange et SFR avait constitué un avantage sélectif ( 11 ). Il a répondu par la négative, en se basant sur le caractère incertain des créances en cause ( 12 ) et sur la constatation que la renonciation partielle avait été inévitablement due à la
nature et à l’économie du système ( 13 ).

30. Ensuite, le Tribunal a examiné si l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR avait constitué un avantage sélectif ( 14 ). Le Tribunal a de nouveau répondu par la négative, en se basant sur le manque d’avantage concurrentiel qu’Orange et SFR avaient eu sur Bouygues Télécom ( 15 ) et sur la nécessité d’éviter une discrimination entre Orange et SFR d’une part et Bouygues Télécom d’autre part, qui aurait été en méconnaissance de la directive 97/13 ( 16 ).

31. En second lieu, le Tribunal a examiné le grief des requérantes selon lequel les autorités françaises n’auraient pas respecté le principe de non-discrimination ( 17 ). Il a rejeté ce grief ( 18 ).

32. Quant au grief procédural, selon lequel la Commission aurait dû ouvrir une phase formelle d’examen, le Tribunal a estimé que l’affaire n’avait pas soulevé de difficultés sérieuses et que l’ouverture d’une phase formelle d’examen n’était donc pas nécessaire ( 19 ).

IV — Demandes dans la procédure devant la Cour

33. Le requérantes concluent à ce qu’il plaise à la Cour:

— annuler l’arrêt attaqué;

— subsidiairement, renvoyer l’affaire devant le Tribunal pour qu’il statue à nouveau en tenant compte du point de vue juridique développé par la Cour;

— condamner la Commission aux entiers dépens.

34. La Commission conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

— rejeter le pourvoi en partie comme étant irrecevable et en partie comme étant non fondé;

— condamner les requérantes à l’ensemble des dépens de l’instance.

35. La République française conclut qu’il plaise à la Cour:

— rejeter le pourvoi;

— condamner les requérantes aux dépens.

36. Orange conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

— rejeter le pourvoi dans son entièreté;

— condamner les requérantes aux entiers dépens de l’instance.

37. SFR conclut à ce qu’il plaise à la Cour:

— rejeter le pourvoi dans sa totalité;

— condamner les requérantes aux entiers dépens.

38. À l’issue de la procédure écrite, la Cour a tenu une audience le 11 septembre 2008 à laquelle ont participé les requérantes, la Commission, la République française, Orange et SFR. À l’audience, les requérantes, la Commission, la République française, Orange et SFR ont complété leurs observations écrites.

V — Pourvoi des requérantes et arguments des parties

39. Les requérantes fondent leur pourvoi sur quatre moyens.

A — Sur le premier moyen

40. Dans leur premier moyen, les requérantes soutiennent que le Tribunal a commis une violation de l’obligation de motivation.

41. Les requérantes considèrent que le Tribunal n’aurait pas suffisamment motivé son arrêt en ce qui concerne l’exception tirée de la nature et de l’économie du système. Il n’aurait pas expliqué quelles étaient la nature et l’économie du système, sa description du système n’étant pas suffisamment détaillée et contradictoire. Quant au lien de causalité, le Tribunal n’aurait pas expliqué pourquoi la nature et l’économie du système auraient rendu inévitables, d’une part, la renonciation aux créances
sur Orange et SFR et, d’autre part, l’attribution antérieure des licences à ces entreprises.

42. La Commission, le gouvernement français, Orange et SFR soutiennent que le Tribunal n’aurait pas commis de violation de l’obligation de motivation.

43. Le Tribunal aurait suffisamment motivé ce que serait l’économie du système, ainsi que le lien de causalité entre l’économie du système et, d’une part, l’abandon de la créance et, d’autre part, l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR.

B — Sur le second moyen

44. Dans leur deuxième moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal aurait confondu l’appréciation de l’existence d’une difficulté sérieuse et celle du bien-fondé de la décision litigieuse. Afin d’établir que la Commission n’était pas tenue d’ouvrir la phase formelle d’examen, le Tribunal se serait borné à ajouter formellement à la fin de l’examen du bien-fondé de chacun des arguments des parties qu’un tel examen n’était pas constitutif d’une difficulté sérieuse.

45. D’après les requérantes, l’existence de difficultés sérieuses serait confirmée par le fait que, dans l’arrêt attaqué, le Tribunal aurait substitué sa propre appréciation à celle de la Commission sur plusieurs questions complexes, en désavouant en partie l’analyse contenue dans la décision litigieuse.

46. La Commission, le gouvernement français, Orange et SFR soutiennent que le Tribunal n’aurait pas fait d’erreur concernant l’appréciation d’une difficulté sérieuse.

47. La Commission et le gouvernement français remarquent d’abord que la démarche suivie par le Tribunal aurait été conforme à l’ordre de présentation des moyens effectué par les requérantes elles-mêmes dans leur requête en annulation devant le Tribunal. La Commission en déduit que l’argument de la prétendue inversion de méthode devrait être rejeté comme irrecevable.

48. Quant au fond, la Commission soutient que la démarche suivie par le Tribunal ne serait pas contradictoire et ne relèverait pas d’une confusion. Le Tribunal aurait appliqué la jurisprudence constante que, en présence d’une difficulté sérieuse, la décision pourrait être annulée pour ce seul motif, même s’il n’était pas établi que les appréciations portées sur le fond par la Commission étaient erronées en droit ou en fait. Orange et SFR retiennent que le Tribunal aurait fait une distinction entre
les droits procéduraux et le bien-fondé de la décision litigieuse et que le Tribunal aurait considéré que l’appréciation sur le fond n’avait pas révélé de difficultés sérieuses.

49. En ce qui concerne les arguments basés sur la substitution d’appréciation, la Commission soutient d’abord que les requérantes se référeraient à des questions essentiellement factuelles, et donc non recevables dans le cadre d’un pourvoi. Enfin, la Commission, le gouvernement français, Orange et SFR estiment que le Tribunal n’aurait pas remplacé l’appréciation de la Commission par sa propre appréciation. SFR et Orange estiment que les différentes appréciations effectuées par le Tribunal ne
viseraient qu’à répondre aux arguments avancés par les requérantes dans leur recours. D’après la Commission, en tout état de cause, une telle substitution n’aurait pas de conséquences sur l’existence de difficultés sérieuses et sur la validité de l’arrêt.

C — Sur le troisième moyen

50. Dans leur troisième moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal aurait commis des erreurs dans la qualification juridique des faits. Ce moyen est divisé en trois branches. La première branche est dirigée contre la qualification juridique du Tribunal quant à l’unicité de la procédure d’octroi des licences UMTS, la deuxième branche met en cause l’appréciation du caractère incertain des créances abandonnées par l’État et la troisième branche concerne les termes de la lettre ministérielle du
22 février 2001.

1. Sur la première branche

51. Dans la première branche du troisième moyen, les requérantes soutiennent que le Tribunal aurait commis une erreur dans la qualification juridique des faits en retenant que les deux appels à candidatures consécutifs n’avaient constitué qu’une seule et même procédure unique en vue du principe de non-discrimination et que l’égalité de traitement imposait l’alignement des redevances dues par Orange et par SFR sur celles dues par Bouygues Télécom.

52. Elles estiment que l’article 11 de la directive 97/13 obligerait à raisonner au regard des seules modalités d’organisation matérielles des appels à candidatures. Dans ce contexte, elles se réfèrent aux différences des deux appels à candidatures quant aux conditions financières, à l’époque et aux candidats.

53. La Commission, le gouvernement français, Orange, et SFR proposent de rejeter cette branche.

54. La Commission considère que la qualification des deux appels à candidatures comme une procédure unique ou deux procédures distinctes n’affecterait pas la conclusion selon laquelle les trois candidats avaient été dans une situation similaire au moment de l’attribution des licences. Le Tribunal aurait basé sa motivation sur une comparaison de la situation factuelle dans laquelle se seraient trouvées Orange, SFR et Bouygues Télécom. Cette branche serait donc surabondante et n’affecterait pas la
motivation du Tribunal. De plus, le Tribunal n’aurait repris qu’une constatation des autorités françaises. D’après la Commission et Orange, cette constatation factuelle ne pourrait pas être examinée dans le cadre d’un pourvoi.

55. La Commission et le gouvernement français estiment que les deux appels à candidatures devraient être envisagés globalement, notamment en raison du caractère complémentaire du second appel et de sa continuité avec le premier. Le gouvernement français et Orange estiment que l’article 11 de la directive 97/13 ne soutiendrait pas les arguments des requérantes.

56. SFR considère que le Tribunal aurait justement apprécié l’égalité de traitement en se fondant sur le contexte du marché émergeant de l’UMTS et en retenant qu’aucun des opérateurs n’avait accédé au marché. Finalement, la Commission observe que, dans une nouvelle procédure ab initio, les mêmes opérateurs se seraient vu délivrer des licences à des conditions identiques.

2. Sur la deuxième branche

57. Dans la deuxième branche du troisième moyen, les requérantes soutiennent que le Tribunal aurait fait une erreur dans la qualification juridique des faits en qualifiant les créances de l’État français sur Orange et SFR comme incertaines.

58. Dans ce contexte, elles allèguent que, la modification des conditions des licences d’Orange et de SFR ayant eu lieu le 3 décembre 2002, Orange et SFR n’auraient plus eu la possibilité de retirer leur offre à ce moment. Les requérantes estiment que, dans ces conditions, les créances de l’État français sur Orange et SFR n’auraient pas pu être qualifiées comme incertaines.

59. La Commission, le gouvernement français, Orange et SFR estiment que les créances auraient été incertaines. Ils considèrent que, avec les lettres de garantie de traitement équitable du 22 février 2001, les autorités françaises auraient renoncé aux créances à un moment où Orange et SFR auraient encore pu retirer leur offre. En l’absence de ces lettres de garantie de traitement équitable, Orange et SFR auraient probablement retiré leur offre.

60. La Commission, le gouvernement français et Orange estiment que, en tout état de cause, il s’agirait d’un motif surabondant. D’après eux, le Tribunal s’étant basé en premier lieu sur l’inévitabilité de l’abandon de la créance du fait de la nature et de l’économie du système, une éventuelle remise en cause de l’argument basé sur la constatation selon laquelle les créances auraient été incertaines n’affecterait donc pas la conclusion du Tribunal sur l’inexistence d’un avantage sélectif.

61. Orange ajoute que, s’agissant d’autorisations d’occupation du domaine public, la faculté de retrait subsisterait après le 31 mai 2001, étant donné que les titulaires auraient pu renoncer à tout moment à leur licence et, par conséquent, cesser de payer la redevance.

3. Sur la troisième branche

62. Dans la troisième branche du troisième moyen, les requérantes allèguent que le Tribunal aurait fait une erreur dans la qualification juridique des faits en constatant que les autorités françaises avaient garanti dans la lettre du 22 février 2001 un traitement égalitaire à Orange et à SFR. Elles font valoir que les autorités françaises auraient garanti un traitement équitable, et non un traitement égalitaire. Le sens de ces deux notions serait différent. Alors qu’un traitement égalitaire
commanderait un traitement identique, un traitement équitable aurait commandé en l’espèce un décalage entre les conditions des licences attribuées à Orange et à SFR, d’une part, et les conditions de la licence attribuée à Bouygues Télécom, d’autre part.

63. La Commission, le gouvernement français, Orange et SFRestiment que, en fait, les requérantes font valoir non pas une erreur de qualification juridique des faits, mais une erreur de dénaturation des faits. Ils considèrent que le Tribunal n’a pas dénaturé les lettres du 22 février 2001. La Commission précise que les termes d’équité et d’égalité ont été utilisés comme synonymes dans l’arrêt attaqué. Comme la Commission aurait également utilisé ces termes comme synonymes, elle considère que cette
branche est irrecevable, les requérantes ayant dû avancer ce moyen déjà en première instance.

D — Sur le quatrième moyen

64. Le quatrième moyen du pourvoi est tiré d’une violation de l’article 87 CE. Il est divisé en trois branches. La première branche concerne la mise en œuvre de l’exception tirée de la nature et de l’économie du système, la deuxième branche met en cause l’appréciation de l’existence d’un avantage, et la troisième branche concerne la mise en œuvre du principe de non-discrimination.

1. Sur la première branche

65. Dans la première branche du quatrième moyen, les requérantes allèguent que l’exception tirée de l’économie du système supposerait que la différenciation soit inhérente au système dans lequel elle s’inscrit. Ce ne serait pas le cas en l’espèce. La solution favorisée par les autorités françaises n’aurait pas été inévitable. D’après les requérantes, l’économie du système en cause aurait tenu à la recherche de quatre opérateurs dans des conditions de nature à garantir le respect du principe
d’égalité. Cela aurait commandé un choix entre, d’un côté, une reprise ab initio de la procédure d’attribution avec les mêmes conditions pour tous les candidats et, d’autre part, deux appels à candidatures successifs et à des conditions différentes.

66. Le choix effectué par les autorités françaises d’organiser deux appels à candidatures successifs et d’instituer une égalité financière entre les candidats des deux appels n’aurait pas été inévitable. Par ailleurs, ce choix aurait procuré des avantages sélectifs à Orange et à SFR, notamment l’antériorité de l’attribution des licences et une garantie d’être sélectionnées comme candidates. Finalement, l’exception tirée de l’économie du système devrait être atteinte dans la mesure du possible par
des mesures de caractère général. Or, la solution favorisée par les autorités françaises n’aurait pas été une mesure de caractère général.

67. La Commission, le gouvernement français, Orange et SFR avancent que l’économie du système en cause supposerait que les différents critères retenus dans l’encadrement communautaire pour l’attribution de licences UMTS soient appliqués, notamment la création d’un marché concurrentiel et le respect du délai du 1er janvier 2002.

68. La solution proposée par les requérantes de reprendre toute la procédure d’attribution ab initio n’aurait pas pu garantir l’application de ces critères. Premièrement, elle n’aurait pas permis de respecter le délai du 1er janvier 2002. Deuxièmement, une reprise totale de la procédure d’attribution aurait impliqué le risque que les candidats du premier appel à candidatures auraient changé de stratégie et n’auraient pas déposé de candidature. Quoi qu’il en soit, l’issue d’une reprise ab initio
n’aurait pas été différente, dès lors que les seuls candidats auraient été Orange, SFR et Bouygues Télécom et que les conditions des licences attribuées lors d’une procédure reprise ab initio auraient été identiques aux conditions que les candidates ont finalement obtenues. L’autre solution proposée par les requérantes, l’organisation de deux appels à candidatures différents, mais à des conditions différentes, n’aurait pas respecté le principe d’égalité.

69. D’après la Commission, la garantie pour Orange et SFR d’être sélectionnées comme candidates serait due à la décision de Bouygues Télécom de ne pas s’être porté candidate lors du premier appel à candidatures. Finalement, les objectifs de l’encadrement communautaire pour l’attribution des licences UMTS n’auraient pas pu être atteints par des mesures de caractère général.

70. Selon Orange, cette branche est irrecevable, dans la mesure où elle vise à obtenir une nouvelle appréciation des moyens invoqués en première instance.

2. Sur la deuxième branche

71. Dans la deuxième branche du quatrième moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal aurait commis une erreur de droit dans l’application de l’article 87 CE concernant l’appréciation de l’inexistence d’un avantage temporel dû à l’antériorité de l’attribution des licences à Orange et à SFR. D’après les requérantes, le Tribunal n’aurait pas d’abord pu constater l’existence d’un avantage potentiel temporel pour Orange et SFR dû à l’attribution antérieure des licences, et ensuite conclure à
l’inexistence d’une aide, en se basant sur l’argument selon lequel Orange et SFR n’avaient, en pratique, pas tiré profit de cet avantage.

72. Dans ce contexte, les requérantes soutiennent d’abord que l’existence d’un avantage potentiel serait une condition suffisante pour constater l’existence d’une aide. La notion d’aide étant une notion objective, le Tribunal n’aurait pas dû prendre en compte dans son appréciation des éléments subjectifs tenant au comportement des opérateurs sur le marché ou à l’incidence réelle des aides sur le marché. La circonstance selon laquelle la situation économique d’Orange et de SFR comme entreprises
bénéficiaires de l’avantage n’avait pas changé ne serait pas pertinente pour constater l’existence d’une aide. Le Tribunal aurait uniquement dû prendre en compte le fait qu’Orange et SFR avaient bénéficié d’un avantage réel et immédiat dû à l’attribution antérieure des licences.

73. Par ailleurs, le Tribunal aurait opéré un renversement de la charge de la preuve en exigeant que les requérantes apportent la preuve des conséquences de l’avantage effectif. Dès lors que l’existence de l’avantage temporel serait constatée, la charge de prouver qu’elle ne se serait pas concrétisée par des bénéfices effectifs incomberait aux bénéficiaires de cet avantage.

74. Finalement, le Tribunal aurait commis une erreur de droit en prenant en compte qu’aucun opérateur n’était présent sur le marché, l’article 87 CE étant applicable dans une situation de concurrence potentielle.

75. La Commission, le gouvernement français, Orange et SFR soutiennent que le Tribunal n’aurait pas fait d’erreur. Les requérantes auraient confondu l’analyse relative à l’existence d’un avantage sélectif et l’analyse du critère de l’atteinte à la concurrence. L’avantage devrait être réel. Le gouvernement français considère que la Commission pourrait prendre en compte des évolutions postérieures à la date de la mesure examinée.

76. La Commission, le gouvernement français, Orange et SFR considèrent que le Tribunal n’aurait pas commis d’erreur de droit en appréciant que les deux opérateurs n’auraient pas tiré d’avantage de l’attribution antérieure des licences du fait de ne pas avoir été sur le marché. D’après la Commission et Orange, le Tribunal a constaté à juste titre que, en raison du retard de la technologie UMTS, l’attribution antérieure des licences n’aurait pas constitué un avantage technologique. Orange et SFR
retiennent que le Tribunal aurait souverainement constaté que, en l’espèce, l’avantage potentiel n’aurait pas bénéficié à Orange et à SFR.

77. La Commission ajoute que l’argument basé sur une erreur de la notion de concurrence serait inopérant, les requérantes ayant confondu le problème de la définition du marché et celui de l’accès au marché. L’accès au marché serait le critère à prendre en compte dans le contexte en l’espèce.

78. En ce qui concerne le renversement de la charge de la preuve, la Commission considère que le Tribunal n’aurait constaté que théoriquement la présence d’un avantage effectif et qu’il incombait donc aux requérantes de prouver l’existence de l’avantage. D’après la Commission, le gouvernement français et Orange, ce serait à l’auteur d’un recours contre une décision de la Commission qu’il incomberait de démontrer que la constatation de la Commission n’est pas valide.

3. Sur la troisième branche

79. Par la troisième branche du quatrième moyen, les requérantes font valoir que le Tribunal aurait commis une erreur de droit dans l’application du principe de non-discrimination. Elles soutiennent qu’Orange et SFR, d’une part, et Bouygues Télécom, d’autre part, n’étant pas dans la même situation, leur traitement identique par les autorités françaises aurait violé le principe de non-discrimination.

80. Dans ce contexte, les requérantes font référence au principe de l’intangibilité des critères d’attribution, qui n’autoriseraient pas une modification du montant des redevances. Par ailleurs, le respect des objectifs prescrits par la directive 97/13 ne figurerait pas au nombre des dérogations limitativement énumérées à l’article 87, paragraphe 2, CE.

81. Les requérantes ajoutent que les autorités françaises auraient eu assez de temps pour reprendre la procédure ab initio avant l’échéance du délai du 1er janvier 2002.

82. En revanche, selon la Commission, le gouvernement français, Orange et SFR, le Tribunal n’aurait pas fait d’erreur dans l’application du principe de non-discrimination.

83. Orange soutient que cette branche du moyen serait irrecevable du fait que les requérantes se limiteraient à répéter les mêmes arguments qu’en première instance.

84. La Commission et Orange font valoir que les trois titulaires des licences UMTS se seraient trouvés de facto dans la même situation, Orange et SFR n’ayant pas profité matériellement de l’attribution antérieure des licences. Le gouvernement français et SFR considèrent que, dans le contexte d’une opération de sélection unique, bien qu’organisée en plusieurs phases, le principe de non-discrimination devrait s’appliquer en envisageant globalement les deux appels à candidatures.

85. D’après la Commission, les règles procédurales applicables en matière de marchés publics et de concessions ne seraient pas applicables. Quant à la licéité de la modification des conditions des licences attribuées pendant le premier appel à candidature, la Commission relève que le principe d’intangibilité ne figurerait ni dans la directive 97/13 ni dans aucune autre disposition applicable du droit communautaire. En tout état de cause, selon Orange, un tel principe ne serait pas susceptible de
remettre en cause le respect du principe de non-discrimination. Selon la Commission, SFR et Orange, la possibilité de modifier les conditions d’attributions serait expressément prévue par la directive 97/13.

86. Finalement, la Commission allègue que, lorsque l’État agit comme régulateur sur le marché, le seul fait qu’une mesure de l’État améliore la situation d’une entreprise ne mènerait pas automatiquement à l’existence d’une aide. Dans un tel cas, il y aurait lieu d’examiner, premièrement, si une entreprise aurait un avantage, et deuxièmement, si la situation des deux entreprises serait comparable au regard de l’objectif poursuivi par la mesure concernée.

87. Quant à l’argument basé sur l’article 87, paragraphe 2, CE, la Commission et Orange soulignent que les requérantes confondraient l’existence et la compatibilité d’une aide avec le marché commun.

88. Concernant l’argument selon lequel les autorités auraient eu le temps de reprendre l’ensemble de la procédure ab initio avant l’échéance du délai du 1er janvier 2002, le gouvernement français estime qu’il s’agirait d’une appréciation de faits irrecevable au stade du pourvoi. Quoi qu’il en soit, les autorités n’auraient pas disposé du temps nécessaire pour reprendre l’ensemble de la procédure ab initio.

VI — Appréciation juridique

89. Avec leurs troisième et quatrième moyens, les requérantes mettent en cause la conclusion du Tribunal sur l’inexistence d’une aide d’État. J’examinerai d’abord ces moyens (A), ensuite le deuxième moyen concernant l’existence de difficultés sérieuses (B) et finalement le premier moyen concernant l’erreur de motivation (C).

A — Sur les troisième et quatrième moyens

90. Dans leurs troisième et quatrième moyens, les requérantes mettent en cause la conclusion du Tribunal concernant le manque d’élément d’aide d’État dans la modification litigieuse. Je note que les requérantes ont classé leurs arguments dans les troisième et quatrième moyens en fonction des types d’erreur qu’elles font valoir et non en suivant la motivation du Tribunal. Je pense qu’un examen des différentes branches des troisième et quatrième moyens, qui suit l’ordre de la motivation de l’arrêt
attaqué ( 20 ), facilite l’analyse du bien-fondé de ces moyens.

91. Tout d’abord, j’analyserai la troisième branche du troisième moyen, qui concerne un élément des faits de l’affaire, l’appréciation factuelle de la lettre des autorités françaises du 22 février 2001 (1).

92. Puis, j’examinerai les branches dirigées contre la partie de l’arrêt, dans laquelle le Tribunal a constaté que la renonciation partielle de l’État français aux créances sur SFR et Orange ne constitue pas un avantage sélectif ( 21 ), donc la première branche du quatrième moyen concernant l’argument basé sur l’économie du système (2) et la deuxième branche du troisième moyen concernant l’argument basé sur le caractère incertain des créances (3).

93. Ensuite, j’apprécierai la deuxième branche du quatrième moyen, qui est dirigée contre la conclusion du Tribunal selon laquelle l’avantage potentiel temporel dû à l’attribution antérieure des licences ne constitue pas un avantage sélectif (4).

94. Enfin, j’examinerai les branches dirigées contre la partie de l’arrêt attaqué du Tribunal concernant le principe de non-discrimination, c’est-à-dire la première branche du troisième moyen (5) et la troisième branche du quatrième moyen (6).

1. Le contenu de la lettre du 22 février 2001 (troisième branche du troisième moyen)

95. La troisième branche du troisième moyen est dirigée contre le point 107 de l’arrêt attaqué. Au point 107 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que, dans les lettres du 22 février 2001, les autorités françaises ont donné une assurance aux candidats du premier appel à candidatures, Orange et SFR, qu’ils feraient l’objet d’un traitement égalitaire avec les candidats du second appel à candidatures.

96. D’après les requérantes, cette constatation constituerait une dénaturation du contenu des lettres du 22 février 2001. Les lettres du 22 février 2001 auraient contenu une garantie de traitement «équitable» entre les candidats du premier appel à candidatures et du second appel à candidatures. Or, le Tribunal aurait apprécié le contenu de ces lettres comme une garantie de traitement «identique» entre ces deux groupes de candidats.

97. Tout d’abord, il y a lieu de constater que — contrairement au titre du troisième moyen — les requérantes ne font pas valoir une erreur de qualification juridique des faits. Une erreur de qualification juridique des faits consiste en une erreur d’application d’une norme aux faits ( 22 ).

98. Or, ce que les requérantes allèguent est une erreur du Tribunal quant à l’appréciation du contenu des lettres du 22 février 2001. Il s’agit donc d’une erreur concernant l’appréciation des faits par le Tribunal et non d’une erreur de qualification juridique des faits. Dans le cadre d’un pourvoi, qui est limité à des questions de droit, les requérantes ne peuvent pas remettre en cause l’appréciation des faits par le Tribunal, sauf si elles allèguent que le Tribunal a manifestement dénaturé les
faits  ( 23 ). L’affirmation des requérantes selon laquelle les lettres du 22 février 2001 auraient en fait un autre contenu que celui retenu par le Tribunal constitue une telle allégation.

99. Une erreur qui aurait pu être, mais n’a pas été critiquée en première instance, est irrecevable au niveau du pourvoi ( 24 ). Or, comme les requérantes semblent constater non pas une erreur déjà commise par la Commission et répétée par le Tribunal, mais plutôt une erreur commise uniquement par le Tribunal, cette allégation ne me semble pas irrecevable.

100. À mon avis, cette branche est donc recevable.

101. En revanche, cette branche des requérantes n’est pas fondée. Contrairement aux allégations des requérantes, le Tribunal n’a pas constaté que les autorités françaises avaient donné une assurance aux candidats du premier appel à candidatures qu’ils feraient l’objet d’un traitement «identique» avec les candidats du second appel à candidatures.

102. Ayant mentionné le «traitement égalitaire», au point 107 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a fait référence au point 14 de l’arrêt attaqué, où il a décrit le contenu des lettres du 22 février 2001. Comme il l’a retenu au point 14 de l’arrêt attaqué, les autorités françaises avaient garanti dans ces lettres un traitement équitable entre les candidats du premier appel à candidatures et les candidats du second appel à candidatures, ainsi que le respect du principe d’égalité devant les charges
publiques et du principe de concurrence effective entre les opérateurs ( 25 ). Comme les autorités françaises semblent avoir utilisé les notions «égalitaire» et «équitable» comme synonymes dans ces lettres, le simple fait que le Tribunal a utilisé la notion de «traitement égalitaire» pour décrire le contenu de ces lettres ne constitue pas une dénaturation de faits.

103. Les requérantes n’avancent aucun autre argument sur lequel pourrait se baser leur affirmation selon laquelle le Tribunal aurait dénaturé le contenu des lettres du 22 février 2001 en les interprétant comme une garantie d’un traitement identique. Je propose donc de rejeter la troisième branche du troisième moyen comme non fondée.

2. La renonciation partielle aux créances sur Orange et SFR et l’exception tirée de l’économie du système (première branche du quatrième moyen)

104. Pour soutenir que la renonciation partielle de l’État français aux créances sur Orange et SFR n’avait pas constitué un avantage sélectif, le Tribunal s’est appuyé sur une exception tirée de la nature et de l’économie du système ( 26 ). Dans ce contexte, le Tribunal a retenu, notamment, que l’encadrement communautaire reposait sur l’égalité de traitement entre les opérateurs tant pour l’attribution des licences que pour la détermination de redevances éventuelles, mais qu’il laissait les États
membres libres de choisir la procédure d’octroi des licences, dès lors que les principes de libre concurrence et d’égalité de traitement étaient respectés ( 27 ). Ensuite, le Tribunal a relevé que l’application de la notion de redevances non discriminatoires à l’article 11, paragraphe 2 de la directive 97/13 doit prendre en compte le moment de l’accès au marché de chacun des opérateurs concernés ( 28 ). Finalement, il a retenu qu’il n’y a pas d’élément d’aide dès lors que les modalités des
licences sont accordées à l’identique à tous les opérateurs concernés ( 29 ). Il a conclu que le fait que l’État a renoncé à des ressources et qu’un avantage a pu en résulter pour les bénéficiaires de la réduction de la redevance ne suffisait pas à caractériser l’existence d’une aide d’État, l’abandon des créances étant inévitable ( 30 ).

105. D’après les requérantes, le Tribunal n’a pas suffisamment expliqué pourquoi la renonciation était inhérente à l’encadrement communautaire.

106. Tout d’abord, je note que, dans la partie de l’arrêt que la présente branche attaque ( 31 ), le Tribunal a (uniquement) examiné la question de savoir si la renonciation partielle de l’État français aux créances sur Orange et SFR devait être considérée comme un avantage sélectif. Sa conclusion sur l’inévitabilité due à la nature et à l’économie du système au point 111 de l’arrêt attaqué se limitait donc à l’inévitabilité de la renonciation partielle aux créances sur Orange et SFR ( 32 ). Dans ce
contexte, il y a donc lieu, uniquement, d’examiner le bien-fondé de la motivation du Tribunal quant à l’inévitabilité de la renonciation partielle tirée de l’exception de la nature et de l’économie du système.

107. Le Tribunal a basé sa conclusion sur l’exception tirée de la nature et de l’économie du système. L’application de cette exception, qui a été développée et appliquée dans le domaine des systèmes nationaux de charges publiques, en l’espèce mérite quelques réflexions quant à la base légale d’une telle exception (a). Ensuite, j’examinerai l’application de cette exception par le Tribunal (b).

a) L’applicabilité et la base légale de l’exception tirée de la nature et de l’économie du système en l’espèce

108. Avant de baser sa conclusion quant à l’inexistence d’un avantage sélectif sur l’exception tirée de la nature et de l’économie du système, le Tribunal a fait référence aux arrêts Italie/Commission ( 33 ), Espagne/Commission ( 34 ) ainsi que AEM et AEM Torino ( 35 ). Comme l’indiquent ces arrêts, l’exception tirée de la nature et de l’économie du système a été développée par la jurisprudence dans le domaine des systèmes nationaux de charges publiques ( 36 ). D’après cette jurisprudence, une
différence de traitement entre des entreprises ne représente pas un avantage sélectif au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, si cette différence est inhérente à la nature et à l’économie du système national de charges publiques ( 37 ), ou, pour utiliser d’autres mots, si cette différence résulte de la logique de ce système national de charges publiques ( 38 ).

109. D’un point de vue dogmatique, cette exception peut être assimilée à la question de savoir si cette différence de traitement constitue un avantage spécifique ( 39 ). Une autre interprétation qualifie l’exception tirée de la nature et de l’économie du système comme une application d’une «rule of reason» dans le domaine des systèmes nationaux de charges publiques ( 40 ).

110. Indépendamment de la catégorisation dogmatique, je note que la question déterminante pour l’application de l’exception tirée de la nature et de l’économie du système est de savoir si la différence de traitement en cause est inhérente à la logique interne du système national de charges publiques. L’application de cette exception en l’espèce, où il ne s’agit ni d’une différence de traitement résultant de la logique d’un système de charges publiques ni d’une différence résultant d’un système
national est donc loin d’être évidente.

111. Il est vrai que, dans l’arrêt AEM et AEM Torino, la Cour a considéré que la logique interne d’un système national de charges publiques peut être influencé par des règles de droit communautaire. Dans cet arrêt, elle a accepté qu’une différenciation dans le système national de charges publiques, qui visait à compenser un avantage généré pour certaines entreprises par la transposition d’une directive résultait de la nature et de l’économie du système de ce système de charge publique national  ( 41
). Toutefois, même en ayant égard à cet aspect de l’arrêt AEM et AEM Torino, je n’estime pas que l’exception tirée de la nature et l’économie du système de charges publiques telle que consacrée par la jurisprudence puisse être appliquée directement en l’espèce.

112. Vu les spécificités de l’espèce, je ne vois pas non plus la nécessité de recourir à une application analogue de cette exception.

113. D’après la jurisprudence de la Cour, l’article 87, paragraphe 1, CE vise les décisions des États membres par lesquelles ces derniers, en vue de la poursuite d’objectifs économiques et sociaux qui leur sont propres, mettent, par des décisions unilatérales et autonomes, à la disposition des entreprises ou d’autres sujets de droit des ressources ou leur procurent des avantages destinés à favoriser la réalisation des objectifs économiques ou sociaux recherchés ( 42 ).

114. Comme l’article 87, paragraphe 1, CE n’est pas applicable aux mesures du législateur européen ( 43 ), il s’ensuit que, pour que des avantages puissent être qualifiés d’aides au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, ces mesures doivent, notamment, être imputables à l’État ( 44 ). Une mesure d’un État membre qui est commandée par le droit communautaire ne peut donc pas être qualifiée comme une aide d’État au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. Cela soumettrait en fait cet acte légal du
législateur européen au contrôle de l’article 87, paragraphe 1, CE ( 45 ).

115. D’après l’article 10 CE, les États membres sont obligés de mettre en œuvre les règles de droit communautaire. Plus spécialement, l’article 249, paragraphe 3, CE stipule qu’une directive lie tout État membre destinataire quant au résultat à atteindre et l’article 249, paragraphe 4, CE qu’une décision est obligatoire dans tous ses éléments pour les destinataires qu’elle désigne.

116. Il y a donc lieu d’examiner si, en renonçant partiellement aux créances sur Orange et SFR, les autorités françaises n’ont fait qu’exécuter leurs obligations résultant de l’encadrement communautaire et donc des articles 10 CE et 249, paragraphes 3 et 4, CE. Il s’ensuivrait que cette mesure n’est pas imputable à l’État français, mais découle, en réalité, d’un acte du législateur européen et n’est donc pas soumise à l’article 87, paragraphe 1, CE.

117. En conclusion, j’estime que, bien que l’exception tirée de la nature et de l’économie d’un système de charges publiques national ne soit pas applicable en l’espèce, une exception basée sur l’inévitabilité d’une mesure nationale due à la nature et sur l’économie de l’encadrement communautaire peut être applicable en l’espèce. Il y avait donc lieu d’examiner, comme le Tribunal l’a fait, si la renonciation partielle résultait inévitablement de l’encadrement communautaire en l’espèce.

b) L’application de l’exception basée sur la nature et sur l’économie de l’encadrement communautaire

118. Les requérantes soutiennent que le Tribunal n’aurait pas expliqué pourquoi la renonciation partielle aux créances d’Orange et de SFR aurait été inévitable.

119. Tout d’abord, il me semble utile de rappeler que, dans la partie en cause de l’arrêt attaqué, le Tribunal n’a abordé que la question de savoir si la renonciation partielle aux créances sur Orange et SFR était inévitable ( 46 ).

120. S’étant décidées pour une procédure dite de soumission «comparative» ( 47 ), les autorités françaises ont constaté, le 31 janvier 2001, que le premier appel à candidatures avait été partiellement infructueux. Elles ont constaté que la présence de seulement deux opérateurs sur le marché n’était pas suffisante pour garantir le développement d’une concurrence véritable et que le manque de candidats était dû au montant élevé des redevances.

121. Vu l’obligation des États membres d’attribuer un maximum de licences afin de garantir le développement de la concurrence sur le marché de l’UMTS, conformément à l’article 10, paragraphe 4, de la directive 97/13, les autorités françaises ne pouvaient pas se conformer à l’attribution de deux licences UMTS à Orange et à SFR, mais étaient obligées d’attirer d’autres opérateurs en offrant des conditions plus avantageuses pour les licences, en particulier en ce qui concerne le montant des redevances.

122. En présence de cette obligation, les autorités françaises ont dû examiner quel impact la baisse du montant des redevances pour les futurs candidats allait avoir sur les conditions des licences attribuées à Orange et à SFR. Comme l’a retenu le Tribunal dans l’arrêt attaqué ( 48 ), les autorités étaient obligées de respecter le principe de non-discrimination selon l’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13. Les autorités françaises étaient donc obligées de renoncer partiellement aux
créances sur Orange et SFR dans la mesure où cette renonciation était nécessaire pour respecter le principe de non-discrimination entre Orange et SFR et les futurs candidats.

123. Comme l’a constaté le Tribunal, une discrimination consiste en l’application de règles différentes à des situations comparables ou en l’application de la même règle à des situations différentes ( 49 ). Or, l’appréciation de ces deux situations selon qu’elles sont comparables ou non au sens du principe de non-discrimination dépend notamment des objectifs de l’encadrement communautaire en cause ( 50 ).

124. Un objectif important de l’encadrement communautaire était la nécessité de promouvoir le développement de la concurrence, conformément à l’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13. Or, dans le domaine économique, jeu préservé de la concurrence et non-discrimination sont intimement liés ( 51 ).

125. Une condition élémentaire pour le développement d’une concurrence effective sur un marché est l’assurance des conditions de concurrence équitables entre les différents opérateurs. Une modification des conditions des licences d’Orange et de SFR était donc commandée par l’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13, dans la mesure où l’application des conditions initiales du premier appel à candidatures aux licences d’Orange et de SFR n’était pas apte à garantir des conditions de concurrence
équitables entre Orange et SFR, d’une part, et les futurs candidats, d’autre part.

126. À mon avis, le point de départ pour garantir des conditions de concurrence équitables entre les opérateurs sur un marché en phase d’émergence est d’abord de garantir des conditions égales à tous les opérateurs. Dans ce contexte, je note que — comme l’a constaté le Tribunal ( 52 ) — le rapport du montant des redevances exigées d’Orange et de SFR pendant le premier appel à candidature et du montant que les autorités françaises avaient considéré apte à attirer des candidats supplémentaires était
de 8 à 1. Il me semble évident ( 53 ) qu’une baisse du montant des créances qui était initialement prévu pour les candidats du premier appel à candidature était nécessaire afin de garantir des conditions de concurrence équitables entre Orange et SFR, d’une part, et les futurs candidats, d’autre part ( 54 ).

c) Bilan

127. Il résulte des considérations précédentes que le Tribunal a pu constater à bon droit au point 111 de l’arrêt attaqué que la renonciation partielle aux créances sur Orange et SFR était inévitable. Vu que ces considérations étaient assez évidentes et avaient déjà été discutées pendant la procédure devant la Commission, il ne me semble pas que le Tribunal ait manqué d’expliquer pourquoi la renonciation aux créances sur Orange et SFR était inévitable.

128. Je propose donc de rejeter la première branche du quatrième moyen, en substituant la motivation du Tribunal concernant la base légale de l’exception tirée de la nature et de l’économie du système.

3. Le caractère incertain des créances (deuxième branche du troisième moyen)

129. Le Tribunal a constaté, au point 107 de l’arrêt attaqué, que la créance de l’État n’était pas certaine, les candidats ayant encore eu la possibilité de retirer leurs candidatures jusqu’au 31 mai 2001 et, par la suite, de renoncer au bénéfice de leur licence et de cesser le payement de la redevance.

130. Les requérantes contestent cette appréciation. D’après elles, l’État français aurait renoncé partiellement aux créances sur Orange et SFR le 3 décembre 2002. À ce moment-là, Orange et SFR n’auraient plus pu retirer leurs candidatures.

131. À mon avis, la présente branche est inopérante. Une branche est inopérante si elle ne peut pas mettre en cause la conclusion attaquée ( 55 ). Le Tribunal a basé son appréciation que la renonciation partielle ne constitue pas un avantage sélectif sur deux arguments, d’une part sur le caractère incertain des créances et, d’autre part, sur l’exception tirée de la nature et de l’économie du système. Étant donné que la première branche du quatrième moyen, qui est dirigée contre la motivation du
Tribunal basée sur l’exception tirée de la nature et de l’économie du système, doit être rejetée ( 56 ), ce motif est, à lui seul, de nature à justifier à suffisance la conclusion du Tribunal. Les vices dont pourrait être entachée la motivation basée sur le caractère incertain des créances sont donc, en tout état de cause, sans influence sur le dispositif de l’arrêt attaqué. La présente branche est donc inopérante.

132. Quant au bien-fondé de la présente branche, je considère qu’il y a lieu, d’abord, de distinguer la phase allant du 31 janvier 2001 au 31 mai 2001, d’une part, et la modification litigieuse du 3 décembre 2002, d’autre part.

133. Le 31 janvier 2001, les autorités françaises ont constaté que deux candidats avaient déposé leur candidature et que cela ne serait pas suffisant pour garantir une concurrence effective sur le marché de l’UMTS. Elles ont donc annoncé qu’un second appel à candidatures allait être nécessaire. C’est après cette annonce qu’Orange et SFR ont contacté les autorités françaises en demandant le respect du principe d’égalité devant les charges publiques et du principe d’une concurrence effective entre les
opérateurs.

134. À ce moment-là, Orange et SFR auraient encore pu retirer leurs candidatures. Comme la Commission l’a constaté, la possibilité qu’Orange et SFR auraient accepté les conditions du premier appel à candidatures si les conditions du second appel à candidatures étaient beaucoup plus avantageuses était plutôt théorique ( 57 ).

135. Vu ces circonstances, j’estime que les créances de l’État français sur Orange et SFR pouvaient être qualifiées à juste titre comme incertaines, du moins à partir du moment où les autorités françaises avaient annoncé leur intention de lancer un second appel à candidatures avec des conditions nettement plus avantageuses.

136. C’est dans ces circonstances que les autorités françaises ont, à la demande explicite d’Orange et de SFR, garanti un traitement équitable avec les candidats du second appel à candidatures. Se basant sur cette garantie, Orange et SFR pouvaient partir du principe que les conditions de leurs licences allaient être modifiées dans la mesure de ce qui allait être nécessaire pour garantir un traitement équitable. Il était donc clair avant le 31 mai 2001 que les conditions des licences attribuées à
Orange et à SFR contenaient une réserve de modification. Les autorités françaises ayant annoncé que le montant des redevances allait être nettement plus bas pour les candidats du second appel à candidatures, cette réserve de modification contenait donc déjà la garantie d’une renonciation partielle aux créances sur Orange et SFR. C’est ce que la Commission a constaté dans la décision litigieuse ( 58 ), où elle a retenu que «l’alignement rétroactif découlait déjà implicitement des conditions
convenues dans les licences de première vague». Je ne considère pas que dans ces conditions il soit possible de qualifier les créances sur Orange et SFR comme ayant un caractère actuel et incontestable.

137. En conclusion, les créances sur Orange et SFR devaient donc être considérées comme incertaines avant la garantie d’un traitement équitable dans les lettres du 22 février 2001. Après ces lettres, il était clair que les conditions des licences attribuées à Orange et à SFR contenaient une réserve de renonciation partielle. Vu ces circonstances, le fait qu’Orange et SFR ne pouvaient plus retirer leurs offres le 3 décembre 2002 ne met donc pas en cause la conclusion du Tribunal au point 107 de
l’arrêt attaqué selon laquelle il s’agissait d’une renonciation partielle à des créances incertaines.

138. Je propose donc de rejeter la deuxième branche du troisième moyen comme inopérante et subsidiairement comme non fondée.

4. L’avantage sélectif temporel (deuxième branche du quatrième moyen)

139. Aux points 113 à 122 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné si l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR avait procuré un avantage sélectif temporel à ces entreprises sur Bouygues Télécom. Après avoir qualifié l’attribution antérieure des licences comme avantage potentiel ( 59 ), le Tribunal a constaté que cet avantage potentiel n’avait pas bénéficié à Orange et à SFR ( 60 ) et a conclu, au point 122 de l’arrêt attaqué, que l’antériorité de l’attribution des licences à Orange
et à SFR n’avait pas constitué un avantage concurrentiel au détriment de Bouygues Télécom.

140. Aux points 123 à 126 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a ajouté que, en tout état de cause, un avantage virtuellement accordé à Orange et à SFR était le seul moyen de procéder d’une façon conforme aux exigences de l’encadrement communautaire.

141. Dans la deuxième branche du quatrième moyen, les requérantes soutiennent que le Tribunal aurait commis une erreur de droit concernant la notion d’aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE. Le Tribunal ayant constaté, au point 113 de l’arrêt attaqué, l’existence d’un avantage potentiel, cela aurait suffi pour l’existence d’une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE.

142. Tout d’abord, cette branche me semble être inopérante ( 61 ). Le Tribunal a basé sa conclusion que l’avantage allégué temporel ne constituait pas un avantage sélectif, d’une part, aux points 113 à 122 de l’arrêt attaqué, sur l’appréciation que l’avantage n’avait pas bénéficié à Orange et à SFR et, d’autre part, aux points 123 à 125 de l’arrêt attaqué, sur la constatation que, de toute façon, la procuration d’un avantage allégué temporel était le seul moyen de procéder d’une façon conforme aux
exigences de l’encadrement communautaire. Les requérantes ne semblent pas avoir formellement mis en cause l’argument subsidiaire du Tribunal aux points 123 à 125 de l’arrêt attaqué. La présente branche me semble donc inopérante, car les vices dont pourraient être entachée la motivation aux points 113 à 122 de l’arrêt attaqué sont sans influence sur la motivation subsidiaire aux points 123 à 125 de l’arrêt attaqué et donc sur la conclusion du Tribunal.

143. Quant au bien-fondé de la présente branche, j’examinerai d’abord l’application de la notion d’avantage au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE, aux points 113 à 122 de l’arrêt attaqué (a). Ensuite, j’apprécierai si la conclusion attaquée peut être basée sur la motivation subsidiaire aux points 123 à 125 de l’arrêt attaqué, qui se fonde sur l’exception tirée de la nature et de l’économie de l’encadrement communautaire (b).

a) La notion d’avantage au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE

144. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a d’abord constaté que l’antériorité des licences d’Orange et de SFR, de l’ordre d’un an et demi, a pu en principe leur procurer un avantage sélectif par rapport à Bouygues Télécom ( 62 ). Ensuite, il a conclu que cet avantage potentiel n’avait pas bénéficié à Orange et à SFR ( 63 ) et que, à la date de la décision attaquée, la Commission était en mesure de constater qu’Orange et SFR n’avaient pas tiré profit de l’avantage temporel que constituait l’antériorité
des licences et que la Commission a donc pu considérer qu’Orange et SFR n’avaient pas effectivement disposé d’un avantage concurrentiel au détriment de Bouygues Télécom ( 64 ).

145. Les requérantes soutiennent notamment que l’attribution antérieure des licences aurait été per se un avantage réel et immédiat. En rejetant l’existence d’un avantage pour la raison qu’Orange et SFR n’auraient pas pu bénéficier de cet avantage, le Tribunal aurait entaché son arrêt d’une erreur de droit. Il serait indifférent pour la notion d’aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE de savoir si la situation du bénéficiaire s’était améliorée dans le temps.

146. À mon avis, ce grief n’est pas dénué de fondement.

147. L’existence d’une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE suppose qu’une mesure étatique favorise une entreprise en comparaison à une autre ( 65 ). Je note que, au moment où Orange et SFR ont reçu leurs licences, elles étaient les seules entreprises à pouvoir accéder au marché de l’UMTS. À mon avis, cette possibilité exclusive d’accéder au marché de l’UMTS constituait un traitement avantageux pour Orange et SFR sur les autres entreprises.

148. Aux points 116 à 122 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a exclu l’existence d’une aide en constatant que les bénéficiaires n’ont pas pu profiter de ce traitement avantageux. À mon avis, cette approche est erronée.

149. Premièrement, la question de savoir si les bénéficiaires ont pu profiter d’une mesure étatique me semble plutôt concerner les effets sur la relation concurrentielle entre les entreprises que l’existence de l’avantage.

150. Il est vrai qu’un avantage conféré à une entreprise présente sur un marché est susceptible de fausser la concurrence ou de menacer de la fausser au détriment des autres entreprises présentes sur le même marché. Le lien entre l’avantage et la distorsion de concurrence est donc assez évident ( 66 ). Or, une déduction, à l’inverse, selon laquelle le manque d’une distorsion de concurrence indique l’inexistence d’un avantage n’est pas conforme à l’article 87, paragraphe 1, CE. Ce dernier s’applique
tant aux aides qui faussent la concurrence qu’aux aides qui menacent de fausser la concurrence. Comme il n’est pas nécessaire qu’une aide fausse réellement la concurrence, la constatation ex posteriori qu’Orange et SFR n’aient pas bénéficié de l’antériorité de leurs licences ne permet donc pas de conclure à l’inexistence d’un avantage.

151. Deuxièmement, l’analyse de l’existence d’une aide doit se faire au moment où la mesure étatique a été prise ( 67 ). Il ne me semble donc pas possible d’exclure l’existence d’un avantage pour Orange et pour SFR en se basant sur une analyse ex posteriori du bénéfice concurrentiel qu’Orange est SFR ont tiré d’un traitement avantageux. En tout état de cause, il est erroné de prendre en compte les bénéfices concurrentiels au moment où la Commission a pris sa décision, comme le Tribunal l’a fait au
point 122 de l’arrêt attaqué. Les bénéfices concurrentiels d’une mesure étatique pouvant changer dans le temps, l’existence d’un avantage ne saurait dépendre du moment où la Commission a pris sa décision ( 68 ).

152. Troisièmement, la motivation du Tribunal ne peut pas non plus être fondée sur l’argument selon lequel il était prévisible, au moment où les licences ont été attribuées à Orange et à SFR, qu’Orange et SFR n’allaient pas bénéficier de ce traitement avantageux. Au contraire, les autorités françaises avaient décidé de ne pas reprendre toute la procédure d’attribution ab initio justement pour assurer la possibilité d’une présence d’un nombre minimum d’opérateurs sur le marché de l’UMTS à partir du
1er janvier 2002. Au moment de l’attribution des licences à Orange et à SFR il n’était donc pas possible d’exclure qu’elle permettrait à ces opérateurs d’accéder au marché de l’UMTS avant les futurs candidats.

153. En se basant sur une analyse a posteriori des bénéfices concurrentiels qu’Orange et SFR ont pu tirer de l’attribution antérieure des licences pour exclure l’existence d’un avantage sélectif, le Tribunal a donc entaché sa motivation aux points 113 à 122 de l’arrêt attaqué d’une erreur de droit.

154. Comme le Tribunal a basé sa conclusion concernant l’inexistence d’un avantage sélectif dû à l’antériorité de l’attribution des licences à Orange et à SFR non seulement sur cette motivation erronée, mais aussi sur l’exception tirée de la nature et de l’économie du système, il y a lieu d’examiner si cet argument subsidiaire est en mesure de porter la conclusion du Tribunal.

b) L’argument basé sur l’exception tirée de la nature et de l’économie de l’encadrement communautaire

155. Le Tribunal a retenu que, en tout état de cause, l’«avantage virtuellement accordé à Orange et à SFR» était le seul moyen d’éviter d’adopter une mesure en méconnaissance de l’encadrement communautaire ( 69 ). Dans ce contexte, il a fait référence, notamment, à la différence notable entre les deux régimes de redevances successivement conçues par les autorités nationales, au manque de présence d’opérateurs sur le marché de l’UMTS au moment de la modification litigieuse et à l’identité des
licences des trois opérateurs ( 70 ).

156. En constatant que l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR était inévitable, le Tribunal s’est basé à nouveau sur l’exception tirée de la nature et de l’économie de l’encadrement communautaire ( 71 ).

157. Je note que, aux points 123 à 126 de l’arrêt attaqué, le Tribunal s’est limité à expliquer que la raison de l’application des mêmes conditions était inévitable. À mon avis, la motivation du Tribunal aux points 123 à 126 de l’arrêt n’est pas suffisante.

158. Vu que l’antériorité de l’attribution des licences à Orange et à SFR était en elle-même susceptible d’affecter la relation concurrentielle entre Orange et SFR, d’une part, et les futurs candidats, d’autre part, une constatation de l’inexistence d’un avantage sélectif basé sur l’exception tirée de la nature et de l’économie de l’encadrement communautaire doit être basée sur deux éléments. Premièrement, l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR, qui a eu lieu le 18 juillet 2001,
devait être inévitable d’après l’encadrement communautaire (i). Deuxièmement, l’application de conditions de licences identiques à Orange, à SFR et à Bouygues Télécom, qui a eu lieu le 3 décembre 2002, devait être commandée par l’encadrement communautaire malgré le fait qu’Orange et SFR avaient reçu leurs licences avant Bouygues Télécom (ii).

i) L’inévitabilité de l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR

159. Comme je l’ai déjà mentionné ci-dessus, le Tribunal n’a pas motivé, aux points 123 à 126 de l’arrêt attaqué, pourquoi il était inévitable d’attribuer les licences antérieurement à Orange et à SFR. Cependant, le Tribunal l’a expliqué dans la partie de l’arrêt attaqué sur le respect du principe de non-discrimination ( 72 ).

160. Le Tribunal a retenu que, d’après la décision no 128/1999, les États membres étaient obligés de prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre l’introduction coordonnée et progressive de services UMTS sur leur territoire le 1er janvier 2002 au plus tard ( 73 ). Ce délai était l’un des éléments contraignants de l’encadrement communautaire.

161. D’après l’appréciation du Tribunal, l’organisation d’une nouvelle procédure ab initio n’aurait pas été possible avant l’échéance de ce délai ( 74 ). Les requérantes contestent ce fait. Elles font valoir que l’organisation d’une nouvelle procédure ab initio aurait été possible. Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que, étant donné qu’un pourvoi devant la Cour est limité à des questions de droit, l’appréciation des faits par le Tribunal ne peut pas être contestée dans le cadre de celui-ci (
75 ). Comme les requérantes se limitent à contester l’appréciation factuelle du Tribunal et ne font pas valoir une erreur de droit quant à l’appréciation des faits, cette contestation des requérantes doit être rejetée comme irrecevable.

162. Par ailleurs, avec une reprise de toute la procédure ab initio, les autorités auraient risqué de remettre en cause la candidature d’Orange et de SFR et donc la possibilité de la présence de ces deux candidats sur le marché de l’UMTS à partir du 1er janvier 2002 ( 76 ).

163. Vu que l’encadrement communautaire commandait aux autorités françaises de rendre possible l’accès au marché de l’UMTS à un nombre suffisant d’opérateurs, et, à défaut, à un nombre minimum d’opérateurs à partir du 1er janvier 2002, je considère que le Tribunal a constaté à bon droit que la reprise de la procédure ab initio n’aurait pas été une option conforme à l’encadrement communautaire. Au contraire, l’encadrement communautaire obligeait les autorités françaises — comme elles l’ont fait — à
attribuer d’abord les licences à Orange et à SFR pour garantir la possibilité d’un nombre minimum d’opérateurs sur le marché de l’UMTS à partir du 1er janvier 2002.

164. Je retiens donc, premièrement, que l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR du 18 juillet 2001 était une conséquence inévitable de l’encadrement communautaire.

ii) L’inévitabilité de l’application de conditions identiques à Orange, à SFR et à Bouygues Télécom le 3 décembre 2002

165. Comme je l’ai mentionné ci-dessus ( 77 ), non seulement l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR a dû être une conséquence inévitable de la nature et de l’économie de l’encadrement communautaire, mais aussi la décision des autorités françaises du 3 décembre 2002 d’appliquer les mêmes conditions aux licences d’Orange, de SFR et de Bouygues.

166. Les requérantes avancent que les autorités françaises auraient dû appliquer des conditions différentes à Orange et à SFR, d’une part, et à Bouygues Télécom, d’autre part. Il y a donc lieu d’examiner si l’application des mêmes conditions résultait inévitablement de l’encadrement communautaire ou si un traitement différencié s’imposait. Cet examen doit se faire au moment où la mesure a été prise, donc le 3 décembre 2002.

167. Comme le Tribunal l’a constaté, les autorités françaises étaient obligées de respecter le principe de non-discrimination ( 78 ). Le Tribunal a également retenu que les redevances imposées aux différents opérateurs devaient être équivalentes en termes économiques ( 79 ).

168. Je rappelle que les autorités françaises étaient obligées d’assurer des conditions de concurrence équitable entre les opérateurs sur le marché de l’UMTS ( 80 ). À mon avis, une condition élémentaire pour le développement d’une concurrence effective sur un marché est l’assurance des conditions de concurrence équitables entre les différents opérateurs. Le point de départ pour garantir des conditions de concurrence équitables entre les opérateurs sur un marché en phase d’émergence est d’abord de
garantir des conditions égales à tous les opérateurs. Il y avait donc lieu, en principe, de traiter tous les opérateurs sur le marché de la même façon, à condition qu’il n’y ait pas de circonstances qui justifiaient un traitement différencié.

169. Le fait qu’Orange et SFR aient reçu leurs licences avant Bouygues Télécom est une circonstance qui aurait pu affecter la relation concurrentielle entre les opérateurs. L’effet de cette circonstance sur la relation concurrentielle entre Orange, SFR et Bouygues devait donc être pris en compte.

170. Il y a donc lieu, premièrement, d’examiner les effets de cette circonstance et sa prise en compte par le modèle de redevance appliqué par les autorités françaises.

171. Dans ce contexte, je note d’abord que la seconde composante de ce modèle de redevance est basée sur le chiffre d’affaires réalisé avec la licence. Un accès antérieur d’Orange et de SFR au marché de l’UMTS aurait donc eu un impact sur le montant de leurs redevances. Le modèle de redevances appliqué à tous les opérateurs par les autorités françaises prenait donc en compte la possibilité d’Orange et de SFR d’accéder au marché avant les futurs candidats.

172. Il est vrai que, au 3 décembre 2001, donc au moment où les autorités françaises ont décidé d’appliquer le nouveau modèle de redevances à tous les opérateurs, aucun des opérateurs n’était présent sur le marché. Toutefois, l’application du nouveau modèle de redevance ne menait pas nécessairement à un traitement identique et indifférencié entre les opérateurs, puisqu’il pouvait prendre en compte des développements postérieurs au 3 décembre 2001. Si l’antériorité de l’attribution des licences avait
eu un impact sur l’antériorité de l’accès au marché, le nouveau modèle de redevances aurait pris cet effet en compte.

173. Ensuite, quant à la possibilité qu’avaient Orange et SFR d’accéder au marché avant le 3 décembre 2002, le Tribunal a constaté l’existence de difficultés liées à la technologie UMTS et le contexte économique peu favorable au développement de celle-ci ( 81 ). Le fait qu’Orange et SFR n’aient pas pu tirer profit de leurs licences n’était donc pas dû à un manque d’initiative ou de mérite de ces opérateurs.

174. Deuxièmement, quant aux autres avantages allégués par les requérantes, le Tribunal a constaté qu’ils n’étaient pas existants ou, en tout état de cause, n’affectaient pas la relation concurrentielle des opérateurs sur le marché de l’UMTS ( 82 ).

175. Les requérantes soutiennent que le Tribunal aurait renversé la charge de la preuve en acceptant d’abord l’existence d’un avantage temporel potentiel et en demandant ensuite que les requérantes apportent la preuve des conséquences effectives de cet avantage.

176. À mon avis, cette critique n’est pas fondée. D’abord, dans le contexte de la motivation subsidiaire aux points 123 à 126 de l’arrêt attaqué, qui se base sur l’exception tirée de la nature et l’économie du système, l’existence d’un avantage au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE n’est pas constatée ( 83 ). Ensuite, s’il y a un lien évident entre l’antériorité de l’attribution des licences et une antériorité potentielle d’accès au marché, un tel lien n’est pas évident entre l’antériorité de
l’attribution des licences et les avantages allégués par les requérantes en première instance, tels que décrits aux points 117 à 121 de l’arrêt attaqué. À mon avis, les requérantes auraient donc dû étayer les raisons pour lesquelles l’antériorité de l’attribution des licences avait mené à ces avantages allégués et quels impacts ces avantages allégués avaient eu sur la relation concurrentielle entre Orange et SFR, d’une part, et Bouygues Télécom, d’autre part. Finalement, il incombe à la
requérante comme auteur du recours contre une décision de la Commission de démontrer que la constatation de la Commission n’était pas valide ( 84 ).

177. En conclusion, je retiens que le nouveau modèle de redevance prenait en compte l’effet potentiel que l’antériorité de l’attribution des licences pouvait avoir sur le moment d’accès au marché des opérateurs et que d’autres effets sur la relation concurrentielle entre les opérateurs n’avaient pas été établis. À mon avis, le Tribunal a donc pu retenir à bon droit que le nouveau modèle de redevances n’était pas discriminatoire ( 85 ).

c) Bilan

178. L’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR et l’application du nouveau modèle de redevances à Orange, à SFR et à Bouygues Télécom étaient donc inévitables. Comme le Tribunal l’a constaté ( 86 ), la façon de procéder des autorités françaises était la seule manière d’assurer leurs obligations résultant de l’encadrement communautaire. Par conséquence, je considère que la conclusion du Tribunal quant à l’inexistence d’un avantage sélectif dû à l’attribution antérieure des licences est
correcte.

179. Je propose donc de rejeter la deuxième branche du quatrième moyen, en substituant partiellement la motivation du Tribunal ( 87 ).

5. Le principe de non-discrimination (troisième branche du quatrième moyen)

180. Dans la troisième branche du quatrième moyen, les requérantes font valoir une erreur de droit concernant l’application de l’article 87, paragraphe 1, CE dans la mise en œuvre du principe de non-discrimination.

181. D’après Orange, ce moyen est irrecevable du fait que les requérantes se limiteraient à répéter les mêmes arguments qu’en première instance.

182. Il est correct qu’une branche qui répète les arguments déjà nommés en première instance peut être irrecevable ( 88 ). Toutefois, cela est seulement le cas si la branche demande non pas un contrôle de l’arrêt du Tribunal, mais plutôt une seconde appréciation du litige au fond ( 89 ). Dans ce cas, la branche est en fait dirigée contre l’acte juridique attaqué en première instance et non contre l’arrêt du Tribunal. Si, en revanche, comme dans l’espèce, la requérante soutient que le Tribunal aurait
fait une erreur de droit en confirmant la motivation de la Commission qui souffrirait de la même erreur, cette branche est dirigée contre l’arrêt du Tribunal et est donc recevable ( 90 ).

183. Les requérants fondent leur branche notamment sur le principe de non-discrimination, l’intangibilité des conditions du premier appel à candidatures et sur l’article 87, paragraphe 2, CE.

184. Quant au bien-fondé de l’argument basé sur le principe de non-discrimination, je rappelle qu’une discrimination consiste en l’application de règles différentes à des situations comparables ou en l’application de la même règle à des situations différentes ( 91 ).

185. Les requérantes soutiennent que la méthode appliquée par les autorités françaises serait discriminatoire. Elles allèguent qu’Orange et SFR en tant que candidates au premier appel à candidatures et Bouygues Télécom en tant que candidate au second appel à candidatures n’étaient pas dans la même situation.

186. Il faut donc examiner si Orange et SFR, d’une part, et Bouygues Télécom, d’autre part, étaient dans la même situation factuelle et juridique. Comme déjà mentionné ci-dessus ( 92 ), il n’est pas suffisant pour démontrer une discrimination de faire référence à des différences entre deux groupes. La source légale du principe de non-discrimination en cause étant l’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13, la question pertinente est de savoir si les circonstances alléguées par les requérantes
étaient pertinentes d’après les objectifs de cette directive et de l’encadrement communautaire ( 93 ).

187. Je rappelle que la renonciation partielle aux créances de l’État français sur Orange et SFR était commandée par l’encadrement communautaire ( 94 ). Dans la présente branche, il y a donc uniquement lieu d’examiner si la façon de procéder des autorités françaises de ne pas reprendre toute la procédure ab initio était discriminatoire ( 95 ).

188. Les requérantes allèguent qu’une telle façon de procéder était contraire au principe d’intangibilité et que ce principe aurait obligé les autorités françaises à appliquer un régime différent aux candidates du premier et du second appel à candidatures. Le principe d’intangibilité des conditions du premier appel à candidatures aurait placé Orange et SFR dans une situation légale différente de celle de Bouygues Télécom.

189. Dans ce contexte, je note premièrement que — comme l’a retenu le Tribunal dans l’arrêt attaqué — ni la directive 97/13 ni la décision no 128/1999 ne contiennent le principe d’intangibilité ( 96 ). Au contraire, l’encadrement communautaire contient à mon avis des éléments qui vont à l’encontre d’un principe d’intangibilité.

190. Dans l’arrêt attaqué, le Tribunal a basé sa motivation sur l’argument selon lequel l’article 8, paragraphe 4, de la directive 97/13 prévoyait une possibilité de modifier les conditions. Comme l’indique l’article 8, paragraphe 1, de la directive 97/13, les conditions visées par cet article sont les conditions énumérées aux points 2 et 4 de l’annexe à la directive 97/13. Bien que le montant des redevances ne soit pas nommé explicitement sous ces points, je note que, au point 4.9 de l’annexe, il
est précisé que la liste des conditions est sans préjudice de toute autre condition juridique qui n’est pas particulière au secteur des télécommunications. L’article 8, paragraphe 1, de la directive 97/13, en revanche, stipule que les conditions ne doivent se rapporter qu’aux situations justifiant l’octroi d’une telle licence, telles que définies à l’article 7 de la directive 97/13. Je retiens que les conditions énumérées dans cet article ne font pas explicitement référence au montant des
redevances. Vu ces dispositions, j’estime qu’il est permis de douter du bien-fondé de l’argument du Tribunal basé sur l’article 8, paragraphe 4, de la directive 97/13.

191. Néanmoins, cela n’affecte pas la conclusion du Tribunal quant à l’inapplicabilité du principe de l’intangibilité. Même dans l’hypothèse, où l’article 8, paragraphe 4, de la directive 97/13 ne viserait pas le montant des redevances, il me semble possible de déduire des dispositions de la directive 97/13 qu’une modification postérieure du montant des redevances doit être possible.

192. Comme je l’ai déjà mentionné ci-dessus ( 97 ), les États membres sont obligés d’attribuer un maximum de licences et sont obligés de lancer un appel à candidatures pour l’octroi de licences supplémentaires s’ils constatent que l’attribution d’une licence supplémentaire est possible ( 98 ). L’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13 prévoit que le montant des redevances doit prendre en compte la nécessité de promouvoir le développement des services innovateurs et de la concurrence. J’en
déduis qu’un État membre peut être obligé — comme c’était le cas dans l’espèce — de revoir le montant des redevances à la baisse, si c’est nécessaire pour attirer des candidats supplémentaires. Dans ce cas, il devra examiner si le principe de non-discrimination ( 99 ) et l’obligation de garantir des conditions de concurrence équitables ( 100 ) commandent une modification du montant des redevances pour les licences existantes. Aucune disposition dans la directive 97/13 ne commande la reprise ab
initio de l’attribution de toutes les licences dans le cas d’un octroi d’une licence supplémentaire. L’économie du système de la directive 97/13 prévoit donc, du moins implicitement, la modification du montant des redevances de licences existantes.

193. L’argument des requérantes basé sur l’intangibilité des conditions d’attribution doit donc être écarté. Vu que l’encadrement communautaire ne contient pas de principe d’intangibilité, j’estime que la circonstance selon laquelle Orange et SFR, d’une part, et Bouygues Télécom, d’autre part, étaient des candidates de deux appels à candidatures successifs ne les plaçait pas dans une situation légale différente au sens du principe de non-discrimination visé à l’article 11, paragraphe 2, de la
directive 97/13.

194. En tout état de cause, l’application du principe d’intangibilité me semble présupposer des conditions de licences d’un caractère suffisamment intangible. Or, en l’espèce, les autorités françaises avaient garanti une modification des conditions des licences attribuées à Orange et à SFR avant que ces dernières aient été attribuées à Orange et à SFR et même avant que le délai pour le droit d’Orange et de SFR de retirer leur offre était écoulé ( 101 ). Même dans l’hypothèse où un «principe
d’intangibilité» serait applicable, les conditions des licences attribuées à Orange et à SFR, qui contenaient une réserve de modification ( 102 ), ne me semblent pas suffisamment intangibles.

195. En conclusion, je considère que, vu les objectifs de l’encadrement communautaire, Orange et SFR, d’une part, et Bouygues Télécom, d’autre part, n’étaient pas dans une situation juridique différente. La méthode appliquée par les autorités françaises n’était donc pas contraire au principe de non-discrimination selon l’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13.

196. Finalement, l’argument des requérantes selon lequel le respect des objectifs de l’encadrement communautaire pour l’attribution de licences UMTS n’est pas visé à l’article 87, paragraphe 2, CE doit être écarté. Il s’agit ici de l’examen de la question de savoir s’il existe un avantage sélectif au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE et non pas la question de la compatibilité d’une aide avec le marché commun d’après l’article 87, paragraphe 2, CE.

197. Je propose donc de rejeter la troisième branche du quatrième moyen.

6. L’unicité de la procédure (première branche du troisième moyen)

198. Dans la première branche du troisième moyen, les requérantes critiquent une erreur dans la qualification juridique des faits concernant l’unicité de la procédure.

199. La Commission et Orange considèrent que cette branche est irrecevable. Il est vrai que la question de savoir si les deux appels à candidatures doivent être appréciés comme une procédure unique ou comme deux procédures distinctes peut paraître à première vue comme une constatation de fait. Néanmoins, je pense que derrière cet aspect factuel se cache une question de droit. Comme je l’ai déjà mentionné ci-dessus ( 103 ), une erreur dans la qualification juridique des faits est une erreur
d’application d’une norme à des faits. Une violation de droit peut non seulement consister dans une mauvaise interprétation d’une règle de droit, mais aussi lorsqu’une situation de fait donnée reçoit une qualification juridique erronée.

200. La norme en cause étant le principe de non-discrimination visé à l’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13, qui prohibe l’application de règles différentes à des situations comparables ou l’application de la même règle à des situations différentes, il me semble que la question de savoir s’il s’agissait d’une procédure unique ou de deux procédures distinctes doit être interprétée en fait comme la question de savoir si Orange et SFR en tant que candidates du premier appel à candidatures,
et Bouygues Télécom en tant que candidate du second, pouvaient être considérés comme étant dans la même situation au sens du principe de non-discrimination selon l’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13. Cette question est une question de droit et donc recevable.

201. Quant au bien-fondé de cette question, je rappelle qu’il n’est pas suffisant, pour démontrer une discrimination, de faire référence à des différences entre deux groupes. Il faut que ces circonstances soient pertinentes au vu des objectifs de l’encadrement communautaire ( 104 ). Vu les arguments mentionnés dans le cadre de l’examen de la troisième branche du quatrième moyen, auxquels je fais référence ( 105 ), la circonstance selon laquelle Orange et SFR étaient candidates du premier appel à
candidatures et Bouygues Télécom candidate du second ne les plaçait pas dans une situation différente au sens de l’article 11, paragraphe 2, de la directive 97/13.

202. Je propose donc de rejeter la première branche du troisième moyen.

7. Bilan

203. En conclusion, je propose de rejeter les troisième et quatrième moyens dans leur totalité, en substituant partiellement la motivation du Tribunal.

B — Sur le second moyen

204. Dans la procédure de première instance, les requérantes ont fait valoir que la plainte qu’elles avaient soumise à la Commission soulevait des difficultés sérieuses et que cette dernière aurait donc dû ouvrir la phase formelle d’examen visée à l’article 88, paragraphe 3, CE ( 106 ).

205. Aux points 86 à 93 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a abordé ce grief. Il a retenu que la phase formelle d’examen visée à l’article 88, paragraphe 3, CE revêtait un caractère indispensable dès que la Commission éprouvait des difficultés sérieuses pour apprécier l’existence d’une aide ( 107 ). Il a ensuite examiné si les arguments développés par les requérantes à l’encontre de la décision attaquée avaient soulevé une difficulté sérieuse ( 108 ). Dans le cadre de cet examen, le Tribunal a d’abord
apprécié le bien-fondé des griefs des requérantes concernant l’inexistence d’un avantage sélectif et a ensuite constaté que l’appréciation de la Commission à cet égard n’avait pas été constitutive d’une difficulté sérieuse ( 109 ). Ensuite, le Tribunal a analysé si les autorités françaises avaient respecté le principe de non-discrimination. Il a retenu que cet examen n’avait pas soulevé de difficulté sérieuse ( 110 ).

206. Les requérantes soutiennent que, en procédant ainsi, la Commission aurait confondu l’appréciation d’une difficulté sérieuse et celle du bien-fondé de la décision.

207. Tout d’abord, il y a lieu de rappeler que, d’après la jurisprudence, la Commission peut limiter l’analyse de la mesure étatique à la phase préliminaire, si, au terme d’un premier examen, elle a acquis la conviction que la mesure ne constitue pas une aide au sens de l’article 87, paragraphe 1, CE ou est, en tout état de cause, compatible avec le marché commun ( 111 ). Si, en revanche, le premier examen ne lui a pas permis de surmonter toutes les difficultés soulevées, elle est obligée d’ouvrir
la procédure formelle d’examen ( 112 ).

208. La notion de difficulté sérieuse revêt un caractère objectif. La constatation de l’existence de telles difficultés doit être recherchée tant dans les circonstances de l’adoption de la mesure étatique en cause que dans son contenu ( 113 ). Il appartient donc à la Commission de déterminer, en fonction des circonstances de fait et de droit propres à chaque affaire, si les difficultés rencontrées dans l’examen de la mesure étatique nécessitent l’ouverture de la procédure formelle d’examen ( 114 ).
Si la Commission est liée quant à la décision d’engager une procédure formelle d’examen, elle jouit néanmoins d’une certaine marge d’appréciation dans la recherche et l’examen des circonstances de l’espèce afin de déterminer si celles-ci soulèvent des difficultés sérieuses ( 115 ).

209. Bien que la Cour n’ait pas défini précisément quelles circonstances peuvent indiquer l’existence d’une difficulté sérieuse ( 116 ), je note que les trois types d’indices suivants ont été retenus par la jurisprudence.

210. Un premier type d’indice peut résulter de la teneur des discussions engagées entre la Commission et l’État membre pendant la phase préliminaire ( 117 ).

211. Dans ce contexte, je retiens que le Tribunal a fait référence à des écritures relatives à l’affaire, dans lesquelles la Commission a fait mention d’une complexité exceptionnelle ( 118 ). Cependant, le Tribunal a expliqué que ces écritures concernaient non pas la mesure litigieuse, mais d’autres mesures qui ont donné lieu à l’ouverture d’une procédure formelle d’examen. Cet indice n’indiquait donc pas l’existence de difficultés sérieuses. Je constate que les requérantes n’ont pas mis en cause
cette constatation du Tribunal ( 119 ).

212. Un deuxième type d’indice est le délai écoulé pendant la phase préliminaire d’examen en l’espèce.

213. Si celui-ci a excédé notablement le délai qu’implique normalement une phase préliminaire, cela peut être l’indice d’une difficulté sérieuse ( 120 ). Aux points 158 et 160 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, compte tenu de sa charge de travail due notamment aux autres plaintes des requérantes, la Commission n’avait pas pris un temps irraisonnable. Le Tribunal a donc constaté, du moins implicitement, que le délai écoulé n’indiquait pas une difficulté sérieuse. Cette analyse du
Tribunal n’a également pas été mise en cause par la requérante.

214. Un troisième type d’indice, qui peut indiquer l’existence de difficultés sérieuses, sont les appréciations sur lesquelles la Commission s’est fondée pour adopter une décision à la fin de la phase préliminaire. Ces appréciations peuvent soulever des difficultés de nature à justifier l’ouverture de la phase formelle d’examen ( 121 ).

215. Le contrôle de cet indice présuppose donc, à mon avis, d’identifier d’abord les appréciations matérielles sur lesquelles s’est fondée la Commission, pour ensuite contrôler si la Commission disposait des éléments nécessaires pour les appréciations sur lesquelles elle s’est basée ( 122 ).

216. Vu les considérations précédentes, il me semble plutôt que le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en procédant comme il l’a fait en l’espèce. Il me semble plutôt que la méthode appliquée par le Tribunal s’impose. Comme il appartient à la Commission de choisir les motifs sur lesquels elle fonde une décision, il faut d’abord identifier les appréciations sur lesquelles la Commission a fondé sa décision, avant d’apprécier si elle avait assez d’éléments à sa disposition pour établir les
appréciations pertinentes.

217. Quant à la critique selon laquelle cette constatation n’aurait été que formelle, je ne considère pas qu’une motivation extensive soit nécessaire, si l’analyse matérielle des appréciations de la Commission relève qu’elle avait tous les éléments nécessaires à sa disposition.

218. En conclusion, je retiens que le Tribunal a pris en compte les trois indices typiques qui sont susceptibles d’indiquer une difficulté sérieuse et qu’aucun de ces indices n’indiquait la présence d’une difficulté sérieuse. En ce qui concerne le troisième indice soulevé par les requérantes, il me semble que la méthode appliquée par le Tribunal n’a pas entaché son arrêt d’une erreur de droit.

219. En outre, les requérantes allèguent que le Tribunal aurait désavoué en partie la décision litigieuse en recherchant lui-même des appréciations de substitution complexes. Cela aurait indiqué qu’une procédure formelle d’examen aurait été nécessaire.

220. Dans ce contexte, je note premièrement que ce n’est pas le fait que des appréciations nécessaires soient complexes qui commande l’ouverture d’une procédure formelle d’examen ( 123 ). L’ouverture d’une procédure formelle d’examen est seulement nécessaire si la Commission rencontre des difficultés sérieuses à l’égard des appréciations sur lesquelles elle fonde sa décision. C’est donc seulement dans des cas où la Commission n’a pas été capable de surmonter ces difficultés pendant la phase
préliminaire d’examen qu’une procédure formelle d’examen est nécessaire.

221. Deuxièmement, les requérantes allèguent que le Tribunal aurait désavoué la motivation de la Commission et l’aurait substituée par sa propre motivation. Si cette allégation était fondée, elle constituerait en elle-même une erreur de droit susceptible de mener à l’annulation de l’arrêt attaqué. Le Tribunal n’a pas l’autorité de substituer la motivation de la Commission par sa propre motivation ( 124 ). Il y a donc lieu d’examiner le bien-fondé de cette allégation.

222. D’abord, quant à la critique des requérantes selon laquelle le Tribunal aurait mis en cause le raisonnement de la Commission concernant la valeur économique des licences, je note que cette critique concerne des arguments avancés par la Commission pendant l’audience ( 125 ). La décision de la Commission, cependant, était basée sur le caractère incertain des licences ( 126 ), sur l’inévitabilité des mesures des autorités françaises due à la nature et à l’économie de l’encadrement communautaire (
127 ) et sur l’argument selon lequel les licences ne devaient pas être cédées à des prix de marché ( 128 ). La mise en cause des arguments concernant la valeur économique des licences n’affecte donc pas la motivation de la décision litigieuse.

223. Ensuite, les requérantes avancent que le Tribunal aurait substitué aux points 113 à 121 de l’arrêt attaqué son appréciation sur l’inexistence d’un avantage sélectif dû à l’antériorité des créances à l’appréciation de la Commission. Dans ce contexte, je retiens que la motivation du Tribunal aux points 113 à 121 est erronée. Or, autant d’après la motivation subsidiaire du Tribunal aux points 123 à 125 de l’arrêt attaqué que d’après la motivation de la Commission dans la décision litigieuse ( 129
), l’inexistence d’un avantage sélectif est basée sur l’argument selon lequel l’application des mêmes conditions à tous les opérateurs était inévitable d’après les règles de l’encadrement communautaire.

224. En outre, quant à la différence des risques assumés par Orange et SFR en tant que candidates au premier appel à candidatures par rapport à Bouygues Télécom, décrite aux points 131 et 132 de l’arrêt attaqué, il s’agit d’un argument subsidiaire du Tribunal, l’argument décisif étant l’inévitabilité de la renonciation partielle et de l’application des conditions identiques d’après l’économie de l’encadrement communautaire.

225. Enfin, quant à l’analyse des diverses options qui s’ouvraient aux autorités françaises, je note que la Commission avait pris en compte ces options notamment aux points 11, 12, 22, 23 et 26 à 28 de la décision litigieuse et que le Tribunal n’a donc pas substitué la motivation de la Commission par sa propre motivation.

226. Il résulte des considérations précédentes que la critique de la substitution des motifs n’est pas fondée. Les requérantes ne peuvent donc pas se fonder sur cet argument pour soutenir que la Commission aurait rencontré des difficultés sérieuses.

227. Je propose donc de rejeter le second moyen des requérantes comme non fondé.

C — Sur le premier moyen

228. D’après les requérantes, le Tribunal a violé l’obligation de motivation.

229. Il y a lieu de rappeler que la motivation d’un arrêt du Tribunal doit faire apparaître de façon claire et non équivoque le raisonnement, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications pour l’arrêt qu’il a rendu et à la juridiction compétente d’exercer son contrôle judiciaire ( 130 ).

230. Les requérantes critiquent premièrement que le Tribunal se soit basé sur l’exception tirée de la nature et de l’économie du système, sans décrire suffisamment l’économie du système. Sa description du système n’aurait pas été suffisamment détaillée et elle aurait été contradictoire.

231. Bien que je considère que toute exception tirée de la nature et de l’économie du système doit être motivée d’une manière explicite, la critique des requérantes ne me semble pas fondée en l’espèce.

232. Le Tribunal a décrit les éléments pertinents de l’encadrement communautaire et les obligations qui en résultaient pour les autorités françaises ( 131 ). Comme l’encadrement communautaire poursuivait plusieurs objectifs (notamment la recherche de quatre opérateurs afin d’assurer une concurrence suffisante ( 132 ), le respect du principe de non-discrimination ( 133 ) et du principe de libre concurrence ( 134 ), ainsi que le respect du délai du 1er janvier 2002 ( 135 )), le fait que le Tribunal
ait fait référence aux différents objectifs de ce système ne rend pas sa motivation contradictoire.

233. Deuxièmement, les requérantes font valoir que Tribunal n’aurait pas suffisamment détaillé le lien de causalité entre la nature et l’économie du système et la renonciation partielle aux créances sur Orange et SFR.

234. Dans ce contexte, je retiens que, pour expliquer le caractère inévitable de la renonciation partielle aux créances sur Orange et SFR due à la nature et à l’économie du cadre communautaire, il n’était pas nécessaire de faire référence à tous les éléments de l’encadrement communautaire. Dans ce contexte, il suffisait de faire référence aux principes de l’égalité de traitement entre les opérateurs pour la détermination de redevances et à la nécessité du développement d’une concurrence effective (
136 ).

235. Troisièmement, bien que les requérantes ne critiquent pas explicitement le fait que le Tribunal n’aurait pas suffisamment détaillé le lien de causalité entre la nature et l’économie du système et l’attribution antérieure des licences à Orange et à SFR, j’aborderai aussi ce grief par souci d’exhaustivité.

236. Il est vrai que le Tribunal n’a pas expliqué aux points 123 à 125 de l’arrêt attaqué pourquoi l’attribution antérieure était inévitable ( 137 ). Néanmoins, le Tribunal a fourni cette explication aux points 139 à 142 de l’arrêt attaqué, où il a fait référence à l’obligation des autorités françaises de respecter le délai du 1er janvier 2002. Les requérantes avaient donc la possibilité de connaître la raison de l’inévitabilité de l’attribution antérieure des licences et la Cour avait la
possibilité d’exercer son contrôle judiciaire. Comme conséquence, le fait que le Tribunal n’ait pas mentionné la raison de l’inévitabilité aux points 139 à 142 de l’arrêt attaqué ne représente donc pas une violation substantielle de l’obligation de motivation.

237. À mon avis, le premier moyen n’est donc pas fondé. Je propose donc de le rejeter.

D — Bilan

238. À mon avis, tous le moyens des requérantes doivent être rejetés. Le pourvoi des requérantes doit donc être rejeté dans son ensemble.

VII — Sur les dépens

239. Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. Le paragraphe 4, premier alinéa, de cet article 69 prévoit que les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens.

240. La Commission, le gouvernement français, Orange et SFR ayant conclu à la condamnation de Bouygues et de Bouygues Télécom et ces dernières ayant succombé en leurs moyens, il y a lieu de les condamner aux dépens.

241. La République française supporte ses propres dépens.

VIII — Conclusions

242. Par ces motifs, je propose à la Cour de statuer comme suit:

1) rejeter le pourvoi;

2) condamner les requérantes aux dépens;

3) la République française supporte ses propres dépens.

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------

( 1 ) Langue originale: le français.

( 2 ) Rec. p. II-2097.

( 3 ) JO 2005, C 275, p. 3.

( 4 ) JO L 117, p. 15.

( 5 ) JO 1999, L 17, p. 1.

( 6 ) Voir point 12 de ces conclusions.

( 7 ) Pour d’autres modifications des conditions de nature technique, voir point 17 de la décision litigieuse.

( 8 ) Procédure visée à l’article 88, paragraphe 2, CE.

( 9 ) Ordonnance 14 février 2005, Bouygues et Bouygues Télécom/Commission (T-81/04).

( 10 ) Voir points 95 à 126 de l’arrêt attaqué.

( 11 ) Voir points 106 à 112 de l’arrêt attaqué.

( 12 ) Voir point 107 de l’arrêt attaqué.

( 13 ) Voir points 108 à 112 de l’arrêt attaqué.

( 14 ) Voir points 113 à 125 de l’arrêt attaqué.

( 15 ) Voir points 115 à 122 de l’arrêt attaqué.

( 16 ) Voir points 123 à 125 de l’arrêt attaqué.

( 17 ) Voir points 127 à 154 de l’arrêt attaqué.

( 18 ) Voir point 155 de l’arrêt attaqué.

( 19 ) Voir points 86 à 93, 126 et 155 à 160 de l’arrêt attaqué.

( 20 ) Voir la description aux points 27 à 32 de ces conclusions.

( 21 ) Voir points 95 à 126 de l’arrêt attaqué.

( 22 ) Voir point 3 des conclusions de l’avocat général Van Gerven présentées le 26 juin 1991 dans l’affaire Costacurta/Commission (arrêt du 21 novembre 1991, C-145/90 P, Rec. p. I-5449); Lenaerts, K., Arts, D., Maselis, I., Procedural Law of the European Union, 2e édition, Londres 2006, p. 457, point 16-007.

( 23 ) Arrêt de la Cour du 1er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a. (C-136/92 P, Rec. p. I-1981, point 49); du 2 mars 1994, Hilti/Commission (C-53/92 P, Rec. p. I-667, point 42); Lenaerts, K., Arts, D., Maselis, I., op. cit. (voir note 22), p. 455, point 16-005.

( 24 ) Lenaerts, K., Arts, D., Maselis, I., op. cit. (voir note 22), p. 457, point 16-006.

( 25 ) Voir point 14 de l’arrêt attaqué.

( 26 ) Voir points 108 à 112 de l’arrêt attaqué.

( 27 ) Voir point 108 de l’arrêt attaqué.

( 28 ) Voir points 109 et 110 de l’arrêt attaqué.

( 29 ) Voir point 110 de l’arrêt attaqué.

( 30 ) Voir point 111 de l’arrêt attaqué.

( 31 ) Voir points 108 à 111 de l’arrêt attaqué.

( 32 ) Elle ne portait pas sur l’inévitabilité des autres avantages allégués par les requérantes, tels que l’avantage allégué temporel dû à l’antériorité de l’attribution des licences ou sur l’avantage allégué d’une sélection garantie.

( 33 ) Arrêt du 2 juillet 1974, Italie/Commission (173/73, Rec. p. 709, point 33).

( 34 ) Arrêt du 26 septembre 2002, Espagne/Commission (C-351/98, Rec. p. I-8031, point 42).

( 35 ) Arrêt du 14 avril 2005, AEM et AEM Torino (C-128/03 et C-129/03, Rec. p. I-2861, point 39).

( 36 ) La Cour a retenu l’existence de cette exception pour la première fois dans l’arrêt Italie/Commission (précité à la note 33, point 33).

( 37 ) Arrêts Italie/Commission (précité à la note 33, point 33); du 5 octobre 1999, France/Commission (C-251/97, Rec. p. I-6639, point 36); du 17 juin 1999, Belgique/Commission (C-75/97, Rec. p. I-3671, point 33).

( 38 ) Arrêt du Tribunal du 6 mars 2002, Diputación Foral de Ávala/Commission (T-92/00 et T-103/00, Rec. p. II-1385, point 60).

( 39 ) Voir, notamment, arrêts du 10 janvier 2006, Cassa di Risparmio di Firenze e.a. (C-222/04, Rec. p. I-289, points 137 et 138); du 15 décembre 2005, Unicredito Italiano (C-148/04, Rec. p. I-11137, point 51); du 22 juin 2006, Belgique et Forum 187/Commission (C-182/03 et C-217/03, Rec. p. I-5479, point 119), et du 15 décembre 2005, Italie/Commission (C-66/02, Rec. p. I-10901, points 94 à 102). Cependant, il y a lieu de constater que, dans certains arrêts, la nature sélective d’une mesure et
l’exception tirée de la nature et de l’économie du système sont examinées séparément, voir arrêt de la Cour du 22 novembre 2001, Ferring (C-53/00, Rec. p. I-9067, points 17 et 18), et arrêt du Tribunal du 10 avril 2008, Pays-Bas/Commission (T-233/04, Rec. p. II-591, points 97 à 99), ainsi que les points 315 à 319 des conclusions de l’avocat général Léger du 9 février 2006 dans l’affaire Belgique et Forum 187/Commission, précitée.

( 40 ) Voir Heidenhain, Handbuch des Europäischen Beihilfenrecht, Munich, 2003, p. 163.

( 41 ) Voir points 39 à 43 de l’arrêt AEM et AEM Torino (précité à note 35).

( 42 ) Arrêt de la Cour du 27 mars 1980, Denkavit italiana (61/79, Rec. p. 1205, point 31), et du Tribunal du 5 avril 2006, Deutsche Bahn/Commission (T-351/02, Rec. p. II-1047, point 100).

( 43 ) Arrêt du 13 octobre 1982, Norddeutsches Vieh- und Fleischkontor Will e.a. (213/81 à 215/81, Rec. p. 3583, point 22); Heidenhain, op. cit. (voir note 40), p. 23.

( 44 ) Voir arrêts du 16 mai 2002, France/Commission (C-482/99, Rec. p. I-4397, point 24 et jurisprudence citée), et Deutsche Bahn/Commission (précité à la note 42, point 100).

( 45 ) Une approche comparable a été appliquée par le Tribunal dans son arrêt Deutsche Bahn/Commission (précité à la note 42, points 100 à 105).

( 46 ) Voir point 106 de ces conclusions.

( 47 ) Le Tribunal a retenu que l’encadrement communautaire n’obligeait pas les autorités françaises à recourir à des enchères publiques, voir point 108 de l’arrêt attaqué.

( 48 ) Point 108 de l’arrêt attaqué.

( 49 ) Point 129 de l’arrêt attaqué.

( 50 ) Herny, R., «Principe d’égalité et principe de non-discrimination dans la jurisprudence de la Cour de justice des Communautés européennes», LGDJ, 2003, p. 357, retient qu’il n’y a pas de similarité ou de singularité des situations en soi, mais que l’appréciation de la situation se fait uniquement en fonction de l’objet et du but de la règle. Voir aussi arrêts du 13 février 2003, Espagne/Commission (C-409/00, Rec. p. I-1487, point 47); du 8 novembre 2001, Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer &
Peggauer Zementwerke (C-143/99, Rec. p. I-8365, points 41 et 42), et du 3 mars 2005, Heiser (C-172/03, Rec. p. I-1627, point 40). Il est vrai que ces arrêts se réfèrent à l’interprétation de l’article 87, paragraphe 1, CE. Néanmoins, j’estime que l’on peut déduire de cette jurisprudence que l’évaluation de deux situations afin de déterminer si elles sont comparables ou différentes doit se faire en prenant en compte les objectifs de l’encadrement communautaire.

( 51 ) Herny, R., op. cit. (voir note 50) p. 263.

( 52 ) Point 145 de l’arrêt attaqué.

( 53 ) Dans leur pourvoi, les requérantes ne semblent d’ailleurs pas mettre en cause le principe selon lequel les autorités françaises aient pu renoncer partiellement aux créances sur Orange et SFR. D’après elles, une des options des autorités françaises aurait été de reprendre toute la procédure ab initio, ce qui aurait mené à des conditions identiques pour tous les candidats retenus pendant cette nouvelle procédure. Ce que les requérantes critiquent, en revanche, est que la façon de procéder des
autorités françaises a procuré à Orange et à SFR un avantage sous forme d’une attribution antérieure des licences et d’une garantie d’être sélectionnées.

( 54 ) Comme je l’ai déjà mentionné ci-dessus (voir points 106 et 119 de ces conclusions), cet examen ce limite à la question de savoir si la renonciation partielle aux créances sur Orange et SFR était inévitable. Une autre question est d’évaluer la façon de procéder des autorités françaises d’organiser deux appels à candidatures successifs et d’appliquer rétroactivement des conditions identiques aux candidats des deux appels. Cette question sera examinée ultérieurement (voir points 144 à 179 de ces
conclusions).

( 55 ) Arrêt du 12 juillet 2001, Commission et France/TF1 (C-302/99 P et C-308/99 P, Rec. p. I-5603, points 26 à 29); Lenaerts, K., Arts, D., Maselis, I., op. cit. (voir note 21), p. 465, point 16-019.

( 56 ) Voir points 104 à 128 de ces conclusions.

( 57 ) Point 27 de la décision litigieuse.

( 58 ) Voir point 27 de la décision litigieuse.

( 59 ) Voir points 113 à 115 de l’arrêt attaqué.

( 60 ) Voir points 115 à 121 de l’arrêt attaqué.

( 61 ) Comme mentionné ci-dessus (voir point 131 de ces conclusions), une branche est inopérante si la conclusion attaquée peut être fondée sur une motivation alternative et que la branche ne peut donc pas mettre en cause la conclusion attaquée.

( 62 ) Voir points 113 et 114 de l’arrêt attaqué.

( 63 ) Voir points 115 à 121 de l’arrêt attaqué.

( 64 ) Voir point 122 de l’arrêt attaqué.

( 65 ) Arrêts du 27 janvier 1998, Ladbroke Racing/Commission (T-67/94, Rec. p. II-1, point 52), et du 7 juin 2006, Ufex e.a./Commission (T-613/97, Rec. p. II-1531, point 67).

( 66 ) Cremer, W., «Artikel 87», dans Callies, Ch., et Ruffert, M., Kommentar zu EU-Vertrag und EG-Vertrag, éd. Beck, 3e édition, 2007, p. 1176, point 21.

( 67 ) Voir, en ce sens, arrêt du 16 mai 2002, France/Commission (précité à la note 44, point 71). D’après cet arrêt, «il y a lieu de se replacer dans le contexte de l’époque au cours de laquelle les mesures […] ont été prises […] et donc de s’abstenir de toute appréciation fondée sur une situation postérieure». Bien que ce point se réfère à l’application du critère de l’investisseur avisé dans une économie de marché, j’estime que, en ce qui concerne le moment pertinent, cette règle peut être
appliquée à l’espèce. Voir également arrêt Adria-Wien Pipeline et Wietersdorfer & Peggauer Zementwerke (note de bas de page précitée à la note 50, point 41), d’après lequel il est indifférent que la situation du bénéficiaire n’ait pas connu d’évolution dans le temps. Il y a donc lieu d’examiner les conditions d’application au moment où la mesure étatique a été prise.

( 68 ) Une telle approche ne serait d’ailleurs pas conforme au principe de notification antérieure des aides d’États.

( 69 ) Voir point 123 de l’arrêt attaqué.

( 70 ) Voir point 123 de l’arrêt attaqué.

( 71 ) Quant à la base juridique de cette exception, je renvoie aux points 108 à 117 de ces conclusions.

( 72 ) Voir points 127 à 154 de l’arrêt attaqué. Dans ce contexte, je retiens que l’approche du Tribunal d’examiner séparément l’existence d’un avantage sélectif aux points 95 à 126 de l’arrêt attaqué et le respect du principe de non-discrimination aux points 127 à 154 de l’arrêt attaqué me semble erronée. L’attestation de l’existence ou de l’inexistence d’une aide dépend de la question de savoir si les mesures des autorités françaises étaient commandées par l’encadrement communautaire. Le principe
de non-discrimination étant un élément de cet encadrement communautaire, le Tribunal aurait dû examiner le principe de non-discrimination comme un élément de l’encadrement communautaire.

( 73 ) Voir points 141 et 142 de l’arrêt attaqué.

( 74 ) Voir point 141 de l’arrêt attaqué.

( 75 ) Arrêt Commission/Brazzelli Lualdi e.a. (précité en note 23); Lenaerts, K., Arts, D., Maselis, I., op. cit. (voir note 22), p. 453, point 16-003.

( 76 ) Voir point 146 de l’arrêt attaqué.

( 77 ) Voir point 158 de ces conclusions.

( 78 ) Voir point 123 de l’arrêt attaqué.

( 79 ) Point 109 de l’arrêt attaqué avec référence à l’arrêt du 22 mai 2003, Connect Austria (C-462/99, Rec. p. I-5197, point 90).

( 80 ) Voir article 10, paragraphe 3 et article 11, paragraphe 2 de la directive 97/13/CE.

( 81 ) Voir point 116 de l’arrêt attaqué.

( 82 ) Voir points 117 à 126 de l’arrêt attaqué.

( 83 ) L’argument des requérantes est dirigé contre le raisonnement erroné du Tribunal aux points 113 à 122 de l’arrêt attaqué.

( 84 ) Arrêt du 10 mai 1990, Sens/Commission (T-117/89, Rec. p. II-185, point 20).

( 85 ) Voir point 109 de l’arrêt attaqué avec référence à l’arrêt du 22 mai 2003, Connect Austria (précité à la note 79, point 90).

( 86 ) Voir point 148 de l’arrêt attaqué.

( 87 ) Une substitution de la motivation du Tribunal permettrait aussi de remédier à l’approche erronée du Tribunal d’avoir examiné séparément l’existence d’un avantage sélectif aux points 95 à 126 de l’arrêt attaqué et le respect du principe de non-discrimination aux points 127 à 154 de l’arrêt attaqué (voir note 72).

( 88 ) Lenaerts, K., Arts, D., Maselis, I., op. cit. (voir note 22), p. 463, point 16-017.

( 89 ) Ordonnance du 23 mai 2007, Smanor e.a./Commission (C-99/07 P, points 34 à 36).

( 90 ) Ordonnance du 11 novembre 2003, Martinez/Parlement (C-488/01 P, Rec. p. I-13355, points 39 à 41).

( 91 ) Voir la jurisprudence citée au point 129 de l’arrêt attaqué, arrêts de la Cour du 14 février 1995, Schumacker (C-279/93, Rec. p. I-225, point 30), et du 13 février 1996, Gillespie e.a. (C-342/93, Rec. p. I-475, point 16).

( 92 ) Voir point 123 de ces conclusions.

( 93 ) Voir point 123 de ces conclusions.

( 94 ) Voir points 104 à 128 de ces conclusions.

( 95 ) Comme je l’ai déjà mentionné ci-dessus (voir note 72), le Tribunal aurait dû examiner le respect du principe de non-discrimination dans le cadre de l’examen sur l’existence d’un avantage sélectif. Cependant, les requérantes n’ont pas attaqué cet élément de l’arrêt.

( 96 ) Voir point 135 de l’arrêt attaqué.

( 97 ) Voir point 121 de ces conclusions.

( 98 ) Voir article 10, paragraphe 4 de la directive 97/13.

( 99 ) Voir article 10, paragraphe 3, de la directive 97/13.

( 100 ) Voir article 10, paragraphe 3, CE.

( 101 ) Voir points 132 à 137 de ces conclusions.

( 102 ) Voir point 137 de ces conclusions.

( 103 ) Voir point 97 de ces conclusions.

( 104 ) Voir points 123 et 186 de ces conclusions.

( 105 ) Voir points 180 à 197 de ces conclusions.

( 106 ) Voir point 87 de l’arrêt attaqué.

( 107 ) Voir points 89 à 91 de l’arrêt attaqué.

( 108 ) Voir point 93 de l’arrêt attaqué.

( 109 ) Voir point 126 de l’arrêt attaqué.

( 110 ) Voir point 155 de l’arrêt attaqué.

( 111 ) Arrêts de la Cour du 2 avril 1998, Commission/Sytraval et Brink’s France (C-367/95 P, Rec. p. I-1719, points 38 et 39); du Tribunal du 12 février 2008, BUPA e.a./Commission (T-289/03, Rec. p. II-81, point 329); du 1er décembre 2004, Kronofrance/Commission (T-27/02, Rec. p. II-4177, point 52), et du 8 novembre 1990, Barbi/Commission (T-73/89, Rec. p. II-619, point 42). Pour une analyse approfondie de la relation entre la phase préliminaire et la procédure formelle d’examen, voir points 17 à
19 des conclusions de l’avocat général Tesauro présentées le 31 mars 1993 dans l’affaire Cook/Commission (arrêt du 19 mai 1993, C-198/91, Rec. p. I-2487) et les points 37 et 38 des conclusions de l’avocat général Van Gerven présentées le 28 avril 1993 dans l’affaire Matra/Commission (arrêt du 15 juin 1993, C-225/91, Rec. p. I-3203).

( 112 ) Arrêts du 15 septembre 1998, BP Chemicals/Commission (T-11/95, Rec. p. II-3235, point 166); du 18 septembre 1995, SIDE/Commission (T-49/93, Rec. p. II-2501, point 58), et du 15 mars 2001, Prayon-Rupel/Commission (T-73/98, Rec. p. II-867, point 42).

( 113 ) Arrêt Prayon-Rupel/Commission (précité à la note 112, point 47).

( 114 ) Arrêt Prayon-Rupel/Commission (précité à la note 112, point 43).

( 115 ) Arrêt Prayon-Rupel/Commission (précité à la note 112, point 43).

( 116 ) Voir point 43 des conclusions de l’avocat général Alber, présentées le 18 mai 2000, dans l’affaire Portugal/Commission (arrêt du 3 mai 2001, C-204/97, Rec. p. I-3175).

( 117 ) Voir point 45 des conclusion de l’avocat général Van Gerven du 28 avril 1993 dans l’affaire Matra/Commission (précitée à la note 111); arrêt du Tribunal du 10 mai 2000, SIC/Commission (T-46/97, Rec. p. II-2125, point 4).

( 118 ) Voir point 157 de l’arrêt attaqué.

( 119 ) Dans leur pourvoi, les requérantes se réfèrent uniquement aux points 93, 94, 126 et 155 de l’arrêt attaqué.

( 120 ) Arrêts du 20 mars 1984, Allemagne/Commission (84/82, Rec. p. 1451, points 15 à 17); SIC/Commission (précité à la note 117, points 102 à 107); Prayon-Rupel/Commission (précité à la note 112, points 53 à 85); conclusions de l’avocat général Alber, du 18 mai 2000, dans l’affaire Portugal/Commission (précitée à la note 116, point 43).

( 121 ) Arrêts Cook/Commission (précité à la note 111, point 31); SIC/Commission (précité à la note 116, points 74 à 85); Prayon-Rupel/Commission (précité à la note 112, points 86 à 107); conclusions de l’avocat général Alber dans l’affaire Portugal/Commission (précitée à la note 116, points 45 à 51).

( 122 ) Voir la façon de procéder du Tribunal dans l’arrêt du 13 janvier 2004, Thermenhotel Stoiser Franz e.a./Commission (T-158/99, Rec. p. II-1).

( 123 ) Arrêt BUPA e.a. (précité à la note 111, point 333).

( 124 ) Lenaerts, K., Arts, D., Maselis, I., op. cit. (voir note 22), p. 456, point 16-005.

( 125 ) Comme le Tribunal l’a retenu explicitement au point 105 de l’arrêt attaqué, il a mis en cause les arguments avancés par la Commission pendant l’audience. Il n’a pas fait référence à la motivation de la décision litigieuse.

( 126 ) Voir point 27 de la décision litigieuse.

( 127 ) Voir point 28 de la décision litigieuse.

( 128 ) Voir point 29 de la décision litigieuse.

( 129 ) Voir point 28 de la décision litigieuse.

( 130 ) Arrêts du 20 février 1997, Commission/Daffix (C-166/95 P, Rec. p. I-983, point 24); du 7 mai 1998, Somaco/Commission (C-401/96 P, Rec. p. I-2587, point 53), et du 13 décembre 2001, Cubero Vermurie/Commission (C-446/00 P, Rec. p. I-10315, point 20); Lenaerts, K., Arts, D., Maselis, I., op. cit. (voir note 22), p. 457, point 16-008.

( 131 ) Voir notamment la description de l’encadrement communautaire aux points 2 à 8 de l’arrêt attaqué, ainsi qu’aux points 108 à 112, 123 à 125 et 134 à 148 de l’arrêt attaqué.

( 132 ) Voir notamment point 134 de l’arrêt attaqué.

( 133 ) Voir notamment point 108 de l’arrêt attaqué.

( 134 ) Voir notamment points 108 et 134 de l’arrêt attaqué.

( 135 ) Voir notamment points 141 et 142 de l’arrêt attaqué.

( 136 ) Voir points 106, 107 et 118 à 124 de ces conclusions.

( 137 ) Comme mentionné ci-dessus (voir point 157 de ces conclusions), le Tribunal s’est limité, dans ces points, à expliquer pourquoi l’application de conditions identiques pour les licences d’Orange, de SFR et de Bouygues Télécom était inévitable.


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-431/07
Date de la décision : 08/10/2008
Type d'affaire : Pourvoi - irrecevable, Pourvoi - non fondé
Type de recours : Recours en annulation

Analyses

Pourvoi - Aides d'État - Article 88, paragraphe 2, CE - Conditions d'ouverture d'une procédure formelle d'examen - Difficultés sérieuses - Critères constitutifs d'une aide d'État - Ressources d'État - Principe de non-discrimination.

Aides accordées par les États

Concurrence


Parties
Demandeurs : Bouygues SA et Bouygues Télécom SA
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Trstenjak
Rapporteur ?: Tizzano

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2008:545

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award