ARRÊT DE LA COUR (septième chambre)
29 novembre 2007 (*)
«Manquement d’État – Directive 2003/109/CE – Ressortissants de pays tiers résidents de longue durée – Non-transposition dans le délai prescrit»
Dans l’affaire C‑34/07,
ayant pour objet un recours en manquement au titre de l’article 226 CE, introduit le 30 janvier 2007,
Commission des Communautés européennes, représentée par M^me M. Condou‑Durande, en qualité d’agent, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
contre
Grand-Duché de Luxembourg, représenté par M. C. Schiltz, en qualité d’agent,
partie défenderesse,
LA COUR (septième chambre),
composée de M. U. Lõhmus, président de chambre, MM. J. Klučka (rapporteur) et A. Ó Caoimh, juges,
avocat général: M^me E. Sharpston,
greffier: M. R. Grass,
vu la procédure écrite,
vu la décision prise, l’avocat général entendu, de juger l’affaire sans conclusions,
rend le présent
Arrêt
1 Par sa requête, la Commission des Communautés européennes demande à la Cour de constater que, en n’ayant pas pris les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2003/109/CE du Conseil, du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée (JO 2004, L 16, p. 44), ou, à tout le moins, en ne lui ayant pas communiqué lesdites dispositions, le Grand-Duché de Luxembourg a manqué aux
obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.
2 L’article 26 de ladite directive prévoit que les États membres transposent cette directive dans leurs droits nationaux au plus tard le 23 janvier 2006 et qu’ils en informent immédiatement la Commission.
3 N’ayant pas été informée des mesures prises par le Grand-Duché de Luxembourg pour assurer la transposition de la directive 2003/109 dans son ordre juridique national dans le délai prescrit, la Commission a engagé la procédure en manquement prévue à l’article 226 CE et a, le 27 mars 2006, mis cet État membre en demeure de présenter ses observations.
4 Par lettre du 24 mai 2006, le Grand-Duché de Luxembourg a informé la Commission que la transposition de ladite directive se ferait dans le cadre d’une réforme de la législation relative à l’entrée et au droit de séjour des étrangers et que le vote définitif de la loi ne devrait pas intervenir avant la fin du deuxième semestre de l’année 2007.
5 Considérant que la transposition de la directive 2003/109 dans l’ordre juridique national n’avait pas été effectuée, la Commission a, le 28 juin 2006, émis un avis motivé invitant le Grand-Duché de Luxembourg à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à ses obligations résultant de cette directive, dans un délai de deux mois à compter de la réception dudit avis.
6 Le 30 janvier 2007, la Commission a introduit le présent recours.
7 La Commission constate, dans sa requête, que le Grand-Duché de Luxembourg n’a pas répondu à l’avis motivé et que, à ce jour, elle n’a obtenu aucune nouvelle information de la part de cet État membre. Elle indique ne disposer d’aucun élément d’information lui permettant de conclure que les mesures nécessaires à la transposition de la directive 2003/109 ont été définitivement prises.
8 Dans sa défense, le Grand-Duché de Luxembourg fait valoir, d’une part, en se référant notamment à sa lettre du 3 août 2006, que la Commission ne saurait nier qu’il a répondu à l’avis motivé et que, conformément au principe de coopération loyale qui s’impose également à la Commission, cette dernière ne saurait non plus ignorer une réponse transmise, dans les délais, par les États membres.
9 D’autre part, ce même État membre ne conteste pas le manquement allégué par la Commission, mais soutient que, dans la pratique administrative luxembourgeoise, un traitement égalitaire est déjà accordé aux personnes qui peuvent bénéficier du statut de ressortissant de longue durée au sens de la directive 2003/109.
10 La Commission reconnaît, dans sa réplique, que le Grand-Duché de Luxembourg a répondu à l’avis motivé. Elle fait valoir que ces réponses n’affectent aucunement les termes de la requête, dès lors qu’elles se limitent à communiquer l’état d’avancement du processus d’adoption des mesures de transposition de la directive 2003/109 et que le fait que la Commission n’a pas mentionné dans sa requête lesdites réponses ne signifie pas qu’elle n’en a pas tenu compte.
11 Dans sa duplique, le Grand-Duché de Luxembourg s’interroge sur la prise en compte par la Commission des arguments qu’il avait formulés dans sa réponse à l’avis motivé. Il rappelle en outre qu’un avant-projet de loi sur la libre circulation et l’immigration a été soumis au Conseil de gouvernement en juin de l’année 2007 et que le projet de loi sera déposé dès la rentrée de la Chambre des députés en septembre de cette même année.
12 À cet égard, il convient de rappeler que, selon une jurisprudence constante, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts du 6 mars 2003, Commission/Luxembourg, C‑211/02, Rec. p. I‑2429, point 6; du 18 juillet 2007, Commission/Luxembourg, C‑61/07, non publié au
Recueil, point 7, et du 27 septembre 2007, Commission/Luxembourg, C‑529/06, non publié au Recueil, point 7).
13 De même, il découle d’une jurisprudence constante qu’un État membre ne saurait exciper de dispositions, de pratiques ou de situations de son ordre juridique interne pour justifier l’inobservation des obligations et des délais prescrits par une directive (voir, notamment, arrêts du 2 mai 1996, Commission/Allemagne, C‑253/95, Rec. p. I‑2423, point 12, et du 6 mars 2003, Commission/Luxembourg, précité, point 7).
14 En l’espèce, dès lors qu’il est constant que, à l’expiration du délai imparti dans l’avis motivé, le Grand-Duché de Luxembourg n’avait pas adopté les mesures nécessaires pour assurer la transposition de la directive 2003/109 dans son ordre juridique national, le recours introduit par la Commission doit être considéré comme fondé.
15 Par conséquent, il convient de constater que, en n’ayant pas adopté, dans le délai prescrit, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2003/109, le Grand-Duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.
Sur les dépens
16 Aux termes de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation du Grand‑Duché de Luxembourg et celui-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens.
Par ces motifs, la Cour (septième chambre) déclare et arrête:
1) En n’ayant pas adopté, dans le délai prescrit, les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à la directive 2003/109/CE du Conseil, du 25 novembre 2003, relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée, le Grand-Duché de Luxembourg a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de cette directive.
2) Le Grand-Duché de Luxembourg est condamné aux dépens.
Signatures
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* Langue de procédure: le français.