CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL
M. YVES Bot
présentées le 18 octobre 2007 (1)
Affaire C‑125/06 P
Commission des Communautés européennes
contre
Infront WM AG, anciennement KirchMedia WM AG
«Pourvoi – Radiodiffusion télévisuelle – Réglementation britannique établissant des restrictions en matière de radiodiffusion télévisuelle d’événements sportifs et d’autres événements présentant un intérêt au niveau national»
1. Le présent pourvoi a pour cadre juridique la directive 89/552/CEE du Conseil (2), qui porte sur l’activité de radiodiffusion télévisuelle dans le marché commun et qui vise à garantir la libre circulation des services télévisuels entre les États membres.
2. L’article 3 bis de la directive permet à un État membre de décider que des événements qu’il juge particulièrement importants pour la société, tels que les Jeux olympiques ou la Coupe du Monde de football, doivent être diffusés sur son territoire sur une chaîne de télévision à accès libre et accessible à une grande partie de la population. Cet article prévoit que les mesures prises par un État membre à cet effet doivent être notifiées à la Commission des Communautés européennes qui vérifie
leur conformité avec le droit communautaire.
3. Si la Commission estime que ces mesures sont conformes, elle les publie au Journal officiel des Communautés européennes et cette publication a pour effet d’obliger les autres États membres à les faire respecter par les organismes de radiodiffusion télévisuelle établis sur leur territoire et qui émettent vers l’État membre qui les a définies.
4. Dans l’arrêt du 15 décembre 2005, Infront WM/Commission (3), le Tribunal de première instance des Communautés européennes a déclaré recevable et bien fondé le recours formé par la société Infront WM AG, anciennement KirchMedia WM AG (4), contre la décision prise par la Commission dans le cadre de l’article 3 bis de la directive, en date du 28 juillet 2000, constatant la conformité avec le droit communautaire des mesures notifiées par le Royaume‑Uni de Grande‑Bretagne et d’Irlande du Nord.
5. Le Tribunal a estimé que la décision par laquelle la Commission a constaté cette conformité constituait bien un acte attaquable. Il a jugé également qu’Infront, dont l’activité consiste en l’achat et la revente des droits de transmission d’événements sportifs, était concernée directement et individuellement par cette décision, dans la mesure où Infront était détentrice des droits de transmission exclusifs de la phase finale de la Coupe du Monde de football, organisée par la Fédération
Internationale de Football Association (FIFA), pour les États du continent européen pour les années 2002 et 2006 et où ces événements figurent parmi ceux d’importance majeure cités dans les mesures notifiées à la Commission par le Royaume‑Uni.
6. Dans le cadre du présent pourvoi, la Commission ne conteste pas l’analyse du Tribunal selon laquelle la décision qu’elle est amenée à prendre dans le cadre de la procédure instituée par l’article 3 bis de la directive constitue bien un acte attaquable. En revanche, elle conteste l’appréciation selon laquelle Infront est directement et individuellement concernée par la décision constatant la conformité avec le droit communautaire des mesures notifiées par le Royaume‑Uni.
7. Dans les présentes conclusions, nous indiquerons que le Tribunal, à notre avis, n’a pas commis d’erreur de droit dans son appréciation de la qualité à agir d’Infront.
I – Le cadre juridique
8. L’article 3 bis de la directive a été introduit par la directive 97/36. Il est rédigé comme suit:
«1. Chaque État membre peut prendre des mesures, conformément au droit communautaire, pour assurer que les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de sa compétence ne retransmettent pas d’une manière exclusive des événements qu’il juge d’une importance majeure pour la société d’une façon qui prive une partie importante du public dudit État membre de la possibilité de suivre ces événements en direct ou en différé sur une télévision à accès libre. Dans ce contexte, l’État membre
concerné établit une liste des événements désignés, nationaux ou non, qu’il juge d’une importance majeure pour la société. Il établit cette liste selon une procédure claire et transparente, en temps opportun et utile. Ce faisant, l’État membre détermine également si ces événements doivent être transmis intégralement ou partiellement en direct ou, si nécessaire ou approprié pour des raisons objectives d’intérêt général, transmis intégralement ou partiellement en différé.
2. Les États membres notifient immédiatement à la Commission toute mesure prise ou envisagée en application du paragraphe 1. Dans un délai de trois mois après la notification, la Commission vérifie que ces mesures sont compatibles avec le droit communautaire et les communique aux autres États membres. Elle demande l’avis du comité [de contact] institué à l’article 23 bis [composé de représentants des autorités compétentes des États membres]. Elle publie sans délai au Journal officiel des
Communautés européennes les mesures qui sont prises et, au moins une fois par an, la liste récapitulative des mesures prises par les États membres.
3. Les États membres s’assurent par les moyens appropriés, dans le cadre de leur législation, que les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence exercent les droits exclusifs qu’ils ont achetés après la date de publication de la présente directive de manière à ne pas priver une partie importante du public d’un autre État membre de la possibilité de suivre, intégralement ou partiellement en direct ou, si nécessaire ou approprié pour des raisons objectives d’intérêt
général, intégralement ou partiellement en différé, sur une télévision à accès libre, selon les dispositions prises par cet autre État membre conformément au paragraphe 1, les événements que cet autre État membre a désignés conformément aux paragraphes précédents.»
9. La notion d’«organisme de radiodiffusion télévisuelle» est définie à l’article 1^er, sous b), de la directive comme étant la «personne physique ou morale qui a la responsabilité éditoriale de la composition des grilles de programmes télévisés au sens du point a) et qui les transmet ou les fait transmettre par une tierce partie».
II – Les faits à l’origine du litige
10. Les faits exposés dans l’arrêt attaqué, qui nous paraissent nécessaires à la compréhension des problèmes de droit soulevés par le pourvoi formé par la Commission, sont les suivants.
11. Infront exerce une activité d’acquisition, de gestion et de commercialisation de droits de transmission télévisuelle d’événements sportifs et achète habituellement ces droits aux organisateurs de ces événements. Elle revend les droits ainsi acquis aux organismes de radiodiffusion télévisuelle.
12. Infront s’est vu céder par sa société mère les droits exclusifs de transmission des matchs de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA pour les États du continent européen, à l’exception de la République fédérale d’Allemagne, ainsi que pour la République de Russie, les autres anciennes républiques de l’ex‑Union soviétique et la Turquie, que sa société mère avait acquis à la FIFA moyennant un prix minimal de 1,4 milliard de francs suisses.
13. Le Royaume‑Uni a notifié à la Commission, le 25 septembre 1998, puis par lettre du 5 mai 2000, les mesures prises conformément à l’article 3 bis, paragraphe 1, de la directive, contenant une liste d’événements d’importance majeure pour la société de cet État.
14. Par lettre du 14 juillet 2000 adressée à la Commission, Infront a fait valoir que la liste établie par le Royaume‑Uni ne saurait être approuvée en raison de son incompatibilité tant avec l’article 3 bis de la directive qu’avec d’autres dispositions du droit communautaire. Elle alléguait, notamment, que la liste concernée n’avait pas été arrêtée selon une procédure claire et transparente, que ladite liste incluait des événements ne présentant pas une importance majeure pour la société
britannique, que les processus consultatifs national et communautaire étaient entachés de graves déficiences et elle dénonçait le caractère rétroactif de la réglementation en cause.
15. Le 28 juillet 2000, le directeur général de la direction générale «Éducation et culture» de la Commission a adressé au Royaume‑Uni une lettre indiquant que les mesures notifiées par cet État membre concernant la couverture télévisée d’événements d’intérêt national au Royaume‑Uni ne soulevaient pas de contestations de la part de la Commission.
16. Par lettre du 7 novembre 2000, Infront a signalé à la Commission qu’elle avait eu connaissance de cette approbation et a dénoncé l’atteinte portée à son droit de propriété.
17. Le 18 novembre 2000, la Commission, conformément à l’article 3 bis, paragraphe 2, de la directive, a publié les mesures en cause. Ces mesures comprennent des extraits de la législation du Royaume‑Uni ainsi que la liste des événements d’importance majeure pour la société de cet État membre, parmi lesquels figure la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA.
18. Par lettre du 22 janvier 2001, cette institution, en réponse aux demandes d’Infront faites par lettres des 7 et 22 décembre 2000, a indiqué à celle‑ci que la procédure de vérification des mesures notifiées par le Royaume‑Uni était terminée et que la liste d’événements était considérée comme conforme au droit communautaire.
III – La procédure
19. Le 12 février 2001, Infront a introduit un recours devant le Tribunal visant à obtenir l’annulation partielle ou intégrale de la décision de la Commission adoptée au titre de l’article 3 bis de la directive, constatant la compatibilité avec le droit communautaire des mesures notifiées par le Royaume‑Uni.
20. Par acte du 11 juin 2001, la Commission a soulevé une exception d’irrecevabilité de ce recours au titre de l’article 114 du règlement de procédure du Tribunal.
21. Celui‑ci a joint cette exception au fond. Il a également admis le Royaume de Danemark, la République française et le Royaume‑Uni ainsi que le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne à intervenir au soutien des conclusions de la Commission.
22. Le Royaume de Danemark s’est désisté de cette intervention. Le Conseil n’a pas déposé de mémoire.
IV – L’arrêt attaqué
23. Le Tribunal a estimé que l’acte attaqué était la lettre du 28 juillet 2000, dans laquelle la Commission a informé le Royaume‑Uni de la compatibilité avec le droit communautaire des mesures prises par cet État membre en vertu de l’article 3 bis de la directive.
24. Il a rappelé que, selon une jurisprudence constante, constituent des actes ou des décisions susceptibles de faire l’objet d’un recours en annulation, au sens de l’article 230 CE, les mesures produisant des effets juridiques obligatoires de nature à affecter les intérêts du requérant, en modifiant de façon caractérisée la situation juridique de celui‑ci, indépendamment de leur forme (5).
25. Le Tribunal a estimé que la lettre attaquée produit des effets juridiques à l’égard des États membres dans la mesure où elle prévoit la publication au Journal officiel des mesures qui ont été notifiées à la Commission et que cette publication a pour effet de déclencher le mécanisme de reconnaissance mutuelle prévu à l’article 3 bis, paragraphe 3, de la directive. Il a exposé que cette publication permet aux États membres de prendre connaissance de ces mesures et de se conformer aux obligations
qui leur incombent en vertu de cette disposition (6).
26. Selon le Tribunal, l’article 3 bis, paragraphe 2, de la directive confère à la Commission un pouvoir décisionnel, bien que cette disposition n’indique pas expressément que cette institution prend une «décision» (7).
27. Le Tribunal a examiné ensuite la qualité à agir d’Infront. Il a estimé que celle‑ci était directement et individuellement concernée par la lettre attaquée pour les motifs suivants.
A – Sur le point de savoir si Infront est directement concernée
28. Le Tribunal a rappelé, tout d’abord, que, selon une jurisprudence constante, pour concerner directement un particulier au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, l’acte communautaire en cause doit produire directement des effets sur la situation juridique de l’intéressé et sa mise en œuvre doit revêtir un caractère purement automatique et découler de la seule réglementation communautaire, sans application d’autres règles intermédiaires (8).
29. Il a examiné ensuite si Infront était directement concernée, conformément à cette jurisprudence, dans les deux hypothèses envisagées par celle‑ci dans son recours, à savoir, premièrement, celle dans laquelle elle vendrait les droits de radiodiffusion télévisuelle des matchs de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA, dont elle est détentrice pour les années 2002 et 2006, aux fins de leur transmission au Royaume‑Uni, à un organisme de radiodiffusion télévisuelle relevant de la
compétence de cet État membre et, deuxièmement, celle dans laquelle elle voudrait céder ces droits à un organisme établi dans un autre État membre.
30. En ce qui concerne la première hypothèse, le Tribunal a estimé qu’Infront n’était pas directement concernée par l’acte attaqué parce que l’approbation, par la Commission, des mesures notifiées par le Royaume‑Uni est sans incidence sur leur applicabilité dans cet État membre (9).
31. Il a relevé, à cet égard, que ces mesures sont entrées en vigueur dans ledit État avant leur notification à la Commission et étaient donc susceptibles d’avoir produit des effets dans celui‑ci avant cette notification. Il en a déduit que la Commission, par la lettre attaquée, n’a pas pu accorder au Royaume‑Uni une autorisation préalable d’adopter lesdites mesures ni autoriser leur maintien rétroactif, mais a seulement permis à cet État de bénéficier de leur reconnaissance mutuelle par les
autres États membres (10).
32. En ce qui concerne la seconde hypothèse, le Tribunal a exposé que l’État membre autre que le Royaume‑Uni, sur le territoire duquel est établi l’organisme de radiodiffusion télévisuelle acquéreur des droits de transmission détenus par Infront, se trouve tenu de s’assurer que cet organisme ne se soustrait pas aux mesures approuvées par la Commission et que cette obligation découle de la lettre attaquée qui valide ces mesures, ex nunc, aux fins de leur reconnaissance mutuelle par les autres États
membres (11).
33. Le Tribunal en a déduit que la présente affaire est différente de celle ayant donné lieu à l’arrêt du Tribunal du 13 décembre 2000, DSTV/Commission (12), invoquée par la Commission, concernant l’article 2 bis, paragraphe 2, second alinéa, de la directive, qui prévoit un contrôle a posteriori de compatibilité avec le droit communautaire des mesures prises par un État membre afin d’interdire la diffusion, sur son territoire, d’émissions en provenance d’autres États membres.
34. Il a indiqué, en outre, que la lettre attaquée ne laisse aux autorités nationales, dès la publication des mesures, aucune marge de manœuvre dans le cadre de la mise en œuvre de leurs obligations. En effet, selon le Tribunal, «bien que les modalités du contrôle, auxquelles les autorités nationales sont tenues de procéder dans le cadre du mécanisme de reconnaissance mutuelle, soient déterminées par chaque État membre, dans le cadre de sa législation transposant l’article 3 bis, paragraphe 3, de
la directive, il n’en demeure pas moins que ces autorités doivent s’assurer du respect, par les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence, des conditions de transmission des événements en cause telles que définies par l’État membre dans ses mesures approuvées et publiées au Journal officiel par la Commission» (13).
35. Le Tribunal a examiné ensuite l’argument de la Commission, selon lequel seuls des organismes de radiodiffusion télévisuelle établis au Royaume‑Uni auraient un intérêt à acheter à Infront les droits de diffusion de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA.
36. La Commission soutenait, en effet, que même si sa vérification préliminaire des mesures notifiées conduisait les autres États membres à s’assurer que les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de leur compétence respectent la liste des événements d’importance majeure pour la société, cela resterait sans effet en l’espèce. Selon cette institution, il ne saurait être imaginé qu’Infront concède des sous‑licences de ses droits télévisuels concernant le Royaume‑Uni à un organisme de
radiodiffusion télévisuelle non établi au Royaume‑Uni, ces droits étant concédés sur une base nationale. Au niveau national, les recettes des organismes de radiodiffusion télévisuelle proviendraient de la publicité ciblée sur le public national, des redevances de licences nationales ou des abonnements nationaux à la télévision payante. L’intérêt de ces organismes étant donc de fournir des émissions à un public national, seuls ceux touchant une large part de la population nationale accepteraient
d’acheter, à un prix très élevé, les droits de transmission télévisuelle dont Infront est titulaire. Partant, les sous‑licenciés potentiels de tels droits pour le Royaume‑Uni étant des organismes relevant de la compétence des autorités britanniques, seules les mesures nationales affecteraient directement Infront (14).
37. La Commission signalait également, dans ce contexte, que, au Royaume‑Uni, le marché de la télédiffusion est l’un des plus concurrentiels d’Europe et que 25 % des organismes de radiodiffusion télévisuelle opérant sur le secteur détiennent une licence au Royaume‑Uni (15).
38. Le Tribunal a retenu ce qui suit:
«147 Enfin, s’agissant de l’argument de la Commission selon lequel seuls des organismes de radiodiffusion télévisuelle établis au Royaume‑Uni auraient un intérêt à acheter à [Infront] les droits de diffusion de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA afin de la retransmettre au Royaume‑Uni, il y a lieu de relever qu’une telle supposition prive de tout effet utile l’article 3 bis, paragraphe 3, de la directive. Il convient en effet de rappeler que, selon les dix‑huitième et dix‑neuvième
considérants de la directive 97/36, l’objectif de cet article est de garantir au public d’accéder librement à la diffusion d’événements considérés comme étant d’une importance majeure pour la société par les États membres et, sur la base du principe de la reconnaissance mutuelle, d’exiger des États membres qu’ils s’assurent que les organismes de radiodiffusion relevant de leur compétence respectent les listes d’événements établies par un autre État membre afin de ne pas priver une partie importante
du public de cet État de la possibilité de suivre les événements désignés par ce dernier.
148 Le contexte factuel de l’affaire ayant donné lieu au jugement de la House of Lords [du 25 juillet 2001], R v. ITC, ex parte TV Danmark 1 Ltd [2001] UKHL 42 […], bien que relatif aux événements désignés par le Royaume de Danemark, confirme d’ailleurs l’existence de situations de mise en œuvre du mécanisme de reconnaissance mutuelle instauré à l’article 3 bis, paragraphe 3, de la directive. En outre, la Commission, dans son 3^e rapport de 2001 au Conseil, au Parlement européen et au Comité
économique et social [européen] concernant l’application de la directive [COM(2001) 9 final], indique que des organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence du Royaume‑Uni ont, à trois reprises, transmis des événements inscrits sur la liste du Royaume de Danemark de telle façon qu’une partie importante de la population danoise a été privée de la possibilité de suivre lesdits événements.
149 Dans ces circonstances, nonobstant les allégations non étayées de la Commission relatives à la spécificité du marché de la radiodiffusion télévisuelle au Royaume‑Uni (voir point 121 [de l’arrêt attaqué]), il ne saurait être considéré que les droits de diffusion télévisuelle dans cet État membre de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA seront nécessairement acquis par des organismes de radiodiffusion télévisuelle établis dans ce même État.»
39. Le Tribunal a déduit de ce qui précède qu’Infront est directement concernée par la lettre attaquée en ce qu’elle permet la mise en œuvre du mécanisme de reconnaissance mutuelle par les autres États membres des mesures notifiées par le Royaume‑Uni.
B – Sur le point de savoir si Infront est individuellement concernée
40. Le Tribunal a rappelé, tout d’abord, que, selon une jurisprudence constante, les sujets autres que les destinataires d’une décision ne sauraient prétendre être concernés individuellement que si cette décision les atteint en raison de certaines qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et de ce fait les individualise d’une manière analogue à celle dont le destinataire de ladite décision le serait.
41. Il a exposé ensuite qu’Infront détient à titre exclusif, pour les années 2002 et 2006, les droits de transmission télévisuelle de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA, citée parmi les événements d’importance majeure qui ont été choisis par le Royaume‑Uni et approuvés par la Commission, et que les organismes de radiodiffusion télévisuelle relevant de la compétence des autres États membres doivent nécessairement contracter avec Infront, en sa qualité de courtier des droits de
diffusion de cet événement, aux fins de l’obtention de licences de transmission télévisuelle de celui‑ci (16).
42. Il a indiqué que les mesures adoptées par le Royaume‑Uni imposent des limites à ces organismes quant aux conditions dans lesquelles ils peuvent acquérir les droits exclusifs de diffusion, de sorte que ces mesures, même si elles ne visent pas expressément Infront, entravent la faculté de celle‑ci de disposer librement de ses droits (17).
43. Il a rappelé qu’Infront a acheté, en exclusivité, les droits en cause avant l’entrée en vigueur de l’article 3 bis de la directive et, a fortiori, avant l’adoption de la lettre attaquée, de sorte que cette dernière la concerne en raison d’une qualité qui lui est particulière (18).
C – Sur le fond
44. Le Tribunal a jugé que l’acte attaqué était entaché d’une violation des formes substantielles au motif qu’il avait été pris sans que le collège des membres de la Commission soit consulté et que le directeur général qui l’a signé n’avait reçu aucune habilitation spécifique de ce collège (19).
45. Aux termes du dispositif de l’arrêt attaqué, la décision de la Commission contenue dans sa lettre au Royaume‑Uni est annulée, le recours est rejeté pour le surplus, la République française, le Royaume‑Uni et le Parlement supporteront les dépens d’Infront afférents à leur intervention, la Commission supportera ses propres dépens ainsi que ceux d’Infront, à l’exclusion de ceux visés précédemment et les parties intervenantes supporteront leurs propres dépens.
V – Le pourvoi
46. La Commission demande à la Cour d’annuler l’arrêt attaqué, de statuer sur le recours d’Infront formé dans l’affaire ayant donné lieu audit arrêt en jugeant que celui‑ci est irrecevable et de condamner cette dernière aux dépens dans ladite affaire et le présent pourvoi.
47. Infront conclut, en substance, au rejet du pourvoi et à la condamnation de la Commission aux dépens et demande que cette condamnation soit prononcée, même si, le cas échéant, le pourvoi est déclaré fondé, conformément à l’article 69, paragraphe 3, du règlement de procédure, compte tenu de ce que la Commission ne conteste que partiellement l’arrêt attaqué.
48. La Commission conteste les appréciations du Tribunal selon lesquelles Infront est directement et individuellement concernée par l’acte attaqué, au sens de l’article 230, quatrième alinéa, CE, aux termes duquel toute personne physique ou morale peut former un recours contre les décisions qui, bien que prises sous la forme d’une décision adressée à une autre personne, la concernent directement et individuellement. Nous examinerons successivement ces deux griefs.
A – Sur l’appréciation selon laquelle Infront est directement concernée par l’acte attaqué
1. Moyens et arguments des parties
49. La Commission soutient que le Tribunal n’a pas démontré qu’étaient remplies les deux conditions requises par la jurisprudence selon lesquelles, d’une part, l’acte litigieux doit affecter la situation juridique du requérant et, d’autre part, la mise en œuvre de celui‑ci doit revêtir un caractère purement automatique.
50. En ce qui concerne la première condition, la Commission soutient, à titre principal, que le Tribunal n’explique pas en quoi l’acte attaqué aurait une incidence autre qu’indirecte sur la situation commerciale d’Infront.
51. Elle fait valoir, ainsi, que cet acte a pour effet d’imposer aux États membres de mettre des obligations à la charge des organismes de radiodiffusion télévisuelle qui pourraient dissuader ces derniers d’acheter les droits de transmission des événements visés dans les mesures notifiées ou les conduire à acquérir ces droits à un prix inférieur à celui qu’ils auraient accepté de payer en l’absence de celles‑ci. Une société de télévision payante pourrait renoncer à acquérir les droits de
transmission de tels événements dès lors que ceux‑ci doivent également être diffusés par un organisme de radiodiffusion télévisuelle à accès libre et couvrant 95 % du territoire du Royaume‑Uni. Infront aurait donc moins d’acquéreurs potentiels et se trouverait par conséquent dans une situation commerciale moins avantageuse. Il ne s’agirait toutefois que de conséquences économiques indirectes. Sa situation juridique demeurerait inchangée.
52. À titre subsidiaire, dans l’hypothèse où il suffirait qu’un acte affecte la situation économique du requérant pour concerner celui‑ci directement, la Commission reproche au Tribunal de n’avoir pas exposé quelles sont véritablement les conséquences commerciales de l’acte attaqué pour un courtier tel qu’Infront. En réalité, ces conséquences seraient tout à fait incertaines, parce que, à la connaissance de la Commission, il n’y aurait jamais eu d’organisme de radiodiffusion télévisuelle établi
dans un État membre autre que le Royaume‑Uni qui aurait été disposé à payer la somme escomptée par Infront pour le droit de transmettre la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA dans ce dernier État. En effet, pour réaliser un tel investissement, dans la mesure où les recettes d’un organisme de radiodiffusion télévisuelle proviennent de la publicité ciblée sur le public national, des redevances de licences nationales ou des abonnements nationaux, l’acquéreur potentiel devrait disposer d’une
couverture suffisamment large sur le territoire britannique ou être désireux de réorienter son activité en ce sens.
53. Le Tribunal aurait ainsi commis une erreur de droit en n’imposant pas à Infront de rapporter la preuve desdites conséquences économiques et en laissant entendre que la Commission n’avait pas justifié ses allégations quant à la spécificité du marché de la radiodiffusion télévisuelle au Royaume‑Uni. De même, le Tribunal, en affirmant que cette position de la Commission priverait de tout effet utile l’article 3 bis, paragraphe 3, de la directive, aurait fait une mauvaise interprétation de cette
disposition, parce que cela voudrait dire que, pour chaque événement désigné par un État membre, il devrait forcément y avoir, dans d’autres États membres, des organismes de radiodiffusion télévisuelle susceptibles d’acheter les droits de transmission exclusifs de cet événement dans le premier État.
54. En ce qui concerne la seconde condition, selon laquelle la mise en œuvre de l’acte attaqué doit revêtir un caractère purement automatique et découler de la seule réglementation communautaire, sans application d’autres règles intermédiaires, le Tribunal aurait méconnu l’effet de l’article 3 bis, paragraphe 3, de la directive.
55. Certes, selon la Commission, les événements et leur mode de transmission, en direct ou en différé, partiellement ou intégralement, seraient déterminés par l’État notifiant et, partant, par la décision constatant la conformité de ces mesures avec le droit communautaire. Toutefois, contrairement à ce que le Tribunal a affirmé au point 146 de l’arrêt attaqué, cette décision ne priverait pas les autorités nationales d’une marge d’appréciation dans le cadre de la mise en œuvre de leurs obligations.
La mise en œuvre des obligations définies par l’État notifiant dépendrait beaucoup de la législation et de la conception des autorités nationales compétentes.
56. La réalité de telles différences serait illustrée par l’affaire TV Danmark 1, ayant donné lieu à un arrêt de la Court of Appeal et à un arrêt de la House of Lords, à propos de l’exécution au Royaume‑Uni d’obligations définies par le Royaume de Danemark relativement à des événements d’importance majeure pour la société de cet État membre.
57. Selon le système britannique, il suffirait qu’un organisme de radiodiffusion télévisuelle à accès gratuit et touchant la majorité de la population de l’État membre notifiant ait eu une possibilité équitable d’acheter les droits exclusifs en question. Dans le système danois, en revanche, un organisme de radiodiffusion télévisuelle qui a acheté les droits de transmission exclusifs ne peut les exercer que s’il est à même de prendre des dispositions afin de garantir la couverture nécessaire par
l’intermédiaire d’autres organismes de radiodiffusion, sauf s’il peut prouver que ce n’est pas raisonnablement possible.
58. Il serait donc erroné de soutenir que l’application de la décision prise par la Commission en vertu de l’article 3 bis, paragraphe 2, de la directive est purement automatique et découle de la seule réglementation communautaire.
59. Infront conteste cette analyse et soutient que le Tribunal a estimé à bon droit que l’acte attaqué la concerne directement.
2. Appréciation
60. Ainsi que le Tribunal l’a rappelé, un particulier doit être considéré comme directement concerné par un acte communautaire lorsque celui-ci, d’une part, produit directement des effets sur la situation juridique de ce particulier et que, d’autre part, la mise en œuvre de cet acte revêt un caractère purement automatique et découle de la seule réglementation communautaire, sans application d’autres règles intermédiaires (20).
61. La Commission reproche au Tribunal de ne pas avoir démontré que chacune de ces deux conditions était satisfaite.
62. En ce qui concerne, premièrement, les effets de l’acte attaqué sur la situation d’Infront, la Commission fait valoir à titre principal que cet acte ne produirait, pour cette société, que des conséquences économiques indirectes et que la situation juridique de celle‑ci demeurerait inchangée. Nous ne partageons pas cette analyse pour les motifs suivants.
63. Comme le Tribunal l’a exposé au point 165 de l’arrêt attaqué, les mesures notifiées par le Royaume‑Uni et, par conséquent, l’acte attaqué ont pour effet de priver Infront de la faculté de disposer librement de ses droits de transmission télévisuelle de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA pour les années 2002 et 2006. En vertu de cet acte, Infront se voit empêchée d’accorder l’exclusivité de ces droits de transmission à une chaîne de télévision payante établie dans un État membre
autre que le Royaume‑Uni et souhaitant diffuser cet événement dans cet État. Elle se voit imposer l’obligation de garantir que lesdits droits soient également accessibles à un radiodiffuseur à accès libre couvrant une large partie de la population britannique.
64. L’impact de l’acte attaqué sur la situation d’Infront ne se traduit donc pas seulement par un préjudice de nature purement économique, à travers une diminution de la valeur de ses droits de transmission de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA pour les années 2002 et 2006 sur le marché. Il se manifeste également par une atteinte à son droit de propriété, à travers une entrave à son droit d’accorder des licences exclusives. Le Tribunal a donc considéré à bon droit, à notre avis, que
l’acte attaqué produisait des effets sur la situation juridique d’Infront, conformément à la jurisprudence.
65. La Commission fait également valoir, à titre subsidiaire, que l’acte attaqué, en réalité, n’a pas de conséquences pour Infront, parce qu’il n’y aurait pas d’organisme de radiodiffusion télévisuelle établi dans un État membre autre que le Royaume‑Uni qui serait susceptible d’acquérir les droits de transmission de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA pour la diffuser dans cet État. En outre, le Tribunal aurait renversé la charge de la preuve en laissant entendre que c’est à la
Commission qu’il incombait de prouver ces faits et il aurait commis une erreur de droit dans l’appréciation de la portée de l’article 3 bis de la directive.
66. Nous sommes d’avis que cette argumentation de la Commission met en cause le point de savoir si Infront avait un intérêt à agir plutôt que la condition selon laquelle celle‑ci doit être directement concernée par l’acte attaqué. En effet, ladite argumentation revient à soutenir que l’annulation de cet acte n’apporterait aucun avantage à Infront, puisque, en tout état de cause, il n’existerait pas d’acquéreur potentiel des droits de transmission détenus par celle‑ci en dehors du Royaume‑Uni.
67. Il est de jurisprudence établie que, en plus des conditions énoncées à l’article 230 CE, un particulier qui conteste un acte communautaire doit avoir un intérêt à agir, c’est-à-dire qu’il doit avoir un intérêt à son annulation. Cela suppose que le recours soit susceptible, par son résultat, de procurer un bénéfice à la partie qui l’a intenté (21).
68. Certes, comme le relève la Commission, c’est au requérant qu’il incombe de prouver qu’il remplit aussi cette condition de recevabilité de son recours (22). Le défaut d’intérêt à agir constitue également une fin de non‑recevoir d’ordre public (23). En outre, la Commission est bien fondée à soutenir qu’il ne saurait être déduit de l’article 3 bis, paragraphe 3, de la directive que, pour chaque événement désigné par un État membre, il devrait forcément y avoir, dans d’autres États membres, des
organismes de radiodiffusion télévisuelle susceptibles d’acheter les droits de transmission exclusifs de cet événement dans le premier État.
69. Il ressort, en effet, du système institué par l’article 3 bis de la directive qu’un État membre qui décide d’utiliser la faculté que lui ouvre cette disposition et d’arrêter ainsi une liste d’événements devant être diffusés sur son territoire sur une chaîne de télévision à accès libre accessible pour le plus grand nombre doit obligatoirement notifier cette liste à la Commission, indépendamment du fait que les droits exclusifs de transmission de ces événements soient susceptibles ou non d’être
acquis par des organismes de radiodiffusion télévisuelle établis sur le territoire d’un autre État membre.
70. Pour autant, nous ne croyons pas que le Tribunal ait renversé la charge de la preuve ni qu’il ait fait une mauvaise interprétation de l’article 3 bis de la directive.
71. S’agissant de la charge de la preuve, si, comme nous l’avons vu, la preuve de l’intérêt à agir incombe bien au particulier qui poursuit l’annulation d’un acte communautaire, il n’en demeure pas moins que cette exigence ne saurait dispenser la Commission d’apporter la preuve des éléments de fait qu’elle invoque, comme toute autre partie à une procédure juridictionnelle.
72. En l’espèce, la Commission a soutenu, dans le cadre de son exception d’irrecevabilité du recours formé par Infront, que le marché de la télévision au Royaume‑Uni est l’un des plus concurrentiels d’Europe et que 25 % des organismes de radiodiffusion télévisuelle détiennent une licence dans cet État membre. C’est sur le fondement de ces affirmations qu’elle a fait valoir qu’il était difficilement envisageable qu’Infront cède ses droits de transmission télévisuelle de la phase finale de la Coupe
du Monde de la FIFA à un organisme de radiodiffusion télévisuelle non établi au Royaume‑Uni.
73. Le Tribunal n’a pas renversé la charge de la preuve de l’intérêt à agir, selon nous, en constatant que lesdites affirmations en ce qui concerne la spécificité du marché de la télévision au Royaume‑Uni ne pouvaient pas être prises en considération, parce qu’elles n’étaient pas étayées.
74. Il incombait d’autant plus à la Commission de justifier le bien‑fondé de telles affirmations qu’Infront les contestait et avait, devant le Tribunal, cité plusieurs acquéreurs potentiels de ses droits de transmission établis dans des États membres autres que le Royaume‑Uni.
75. En ce qui concerne, ensuite, le motif de l’arrêt attaqué selon lequel l’argumentation de la Commission prive de tout effet utile l’article 3 bis de la directive, nous ne croyons pas qu’il constitue une mauvaise interprétation de cette disposition.
76. Ce motif répond, en effet, à l’argumentation de la Commission résumée au point 120 de l’arrêt attaqué, selon laquelle, compte tenu du fait que les recettes des organismes de radiodiffusion télévisuelle proviennent de la publicité ciblée sur le public national, des redevances de licences nationales ou des abonnements nationaux à la télévision payante, seuls des organismes touchant une large part du public national et, par conséquent, établis au Royaume‑Uni, accepteraient d’acquérir les droits
de transmission exclusifs détenus par Infront.
77. En soutenant ainsi que, eu égard au prix très élevé des droits de transmission exclusifs d’événements sportifs tels que la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA et de l’origine des ressources des organismes de radiodiffusion télévisuelle, seuls les organismes établis sur le territoire de l’État membre qui a fait usage de la faculté ouverte par l’article 3 bis de la directive sont réellement en mesure d’acheter ces droits, la Commission met en doute l’utilité réelle de la procédure de
reconnaissance mutuelle créée par cette disposition.
78. En effet, si seuls les organismes de radiodiffusion télévisuelle établis sur le territoire de l’État membre qui a décidé que des événements sportifs déterminés devaient faire l’objet d’une diffusion auprès de l’ensemble du public sont susceptibles d’acquérir les droits de transmission exclusifs de tels événements, la procédure prévue à l’article 3 bis, paragraphe 3, de la directive, visant à faire respecter les mesures prises par cet État membre par les organismes de radiodiffusion
télévisuelle établis sur le territoire des autres États membres, serait dépourvue d’utilité.
79. Le Tribunal n’a donc pas dit, comme l’indique la Commission dans son pourvoi, que l’article 3 bis, paragraphe 3, de la directive signifie que, pour n’importe quel événement désigné par un État membre, il y a nécessairement des organismes de radiodiffusion télévisuelle établis dans d’autres États membres susceptibles d’acheter les droits de transmission exclusifs de cet événement. Il a répondu à l’argumentation de celle‑ci selon laquelle, pour des événements sportifs tels que ceux dont les
droits de transmission télévisuelle sont détenus par Infront, il n’y aurait pas d’autres acquéreurs potentiels de ces droits de transmission exclusifs que les organismes de radiodiffusion télévisuelle nationaux.
80. Il s’ensuit que le Tribunal n’a pas omis de démontrer que la condition selon laquelle l’acte attaqué affecte bien la situation juridique d’Infront est satisfaite.
81. En ce qui concerne, deuxièmement, la seconde condition dégagée par la jurisprudence, selon laquelle la mise en œuvre de l’acte attaqué doit revêtir un caractère purement automatique et découler de la seule réglementation communautaire, sans application d’autres règles intermédiaires, nous sommes d’avis que le Tribunal n’a pas commis non plus d’erreur de droit dans son appréciation selon laquelle cette condition est également remplie.
82. Certes, comme la Commission le relève, l’article 3 bis, paragraphe 3, de la directive laisse aux autres États membres une marge d’appréciation dans la mise en œuvre des mesures prises par un État membre et publiées par la Commission. Toutefois, cette marge d’appréciation n’est pas de nature à mettre en cause la qualité à agir d’Infront.
83. En effet, ce qu’il importe d’apprécier dans l’examen de cette condition, c’est le lien de causalité entre les effets sur la situation juridique du requérant et l’acte communautaire dont il demande l’annulation. La condition requise par la jurisprudence est remplie lorsque ces effets sont la conséquence directe de l’acte lui‑même. Tel est le cas, selon la jurisprudence, lorsque l’acte en cause impose à ses destinataires de produire lesdits effets (24), ou encore lorsque la possibilité pour les
destinataires de cet acte de ne pas lui donner suite et de ne pas produire de tels effets est purement théorique, parce que leur volonté de tirer des conséquences conformes à celui-ci ne fait aucun doute (25).
84. En l’espèce, le Tribunal a estimé à bon droit, au point 146 de l’arrêt attaqué, que l’acte attaqué ne laisse aucune marge d’appréciation à ses destinataires, parce qu’il leur impose de produire les effets sur la situation juridique d’Infront qui sont dénoncés par celle‑ci.
85. En effet, comme nous l’avons vu précédemment, ces effets consistent en une entrave dans sa faculté de céder l’exclusivité des droits de transmission de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA à un organisme de radiodiffusion télévisuelle établi dans un État membre autre que le Royaume‑Uni. Lesdits effets apparaissent bien comme la conséquence directe de l’acte attaqué, puisqu’ils découlent directement des mesures prises par le Royaume‑Uni, visant à obtenir que cet événement soit
diffusé sur son territoire par une chaîne de télévision à accès libre et accessible à une grande partie de la population.
86. Au vu de ces éléments, nous sommes d’avis que l’appréciation du Tribunal, selon laquelle Infront est directement concernée par l’acte attaqué n’est pas entachée d’erreur de droit et que le pourvoi de la Commission sur ce point doit être rejeté comme non fondé.
B – Sur l’appréciation selon laquelle Infront est individuellement concernée
1. Moyens et arguments des parties
87. La Commission fait valoir que le raisonnement du Tribunal est difficile à comprendre.
88. Selon la Commission, Infront ne serait concernée par l’acte attaqué qu’en sa qualité objective de détentrice de droits exclusifs ayant acquis les droits de transmission d’un des événements visés dans les mesures britanniques. Elle relève que le Tribunal n’a pas indiqué que l’acte attaqué constitue, à l’égard des détenteurs, un faisceau de décisions individuelles. Elle souligne que cet acte ne vise que les organismes de radiodiffusion télévisuelle et n’impose d’obligations qu’à ces derniers.
Les détenteurs de droits ne subiraient que des conséquences économiques et le Tribunal, dans des précédentes affaires, aurait jugé que cela ne constituait pas un élément suffisant pour individualiser un particulier (26). La Commission estime, à cet égard, que la présente affaire est différente de celles ayant donné lieu aux arrêts Piraiki‑Patraiki e.a./Commission (27), Extramet Industrie/Conseil (28) et Codorniu/Conseil (29), qui correspondaient à des situations spécifiques.
89. La Commission soutient qu’Infront ne se trouverait pas dans une situation différente de celle des autres détenteurs de droits exclusifs de transmission des différents événements désignés par le Royaume‑Uni. Elle serait confrontée à un risque commercial normal, ce qui ne suffirait pas à lui conférer un droit de recours.
90. Enfin, la Commission fait valoir qu’Infront aurait pu contester les mesures britanniques devant une juridiction du Royaume‑Uni, de sorte que l’irrecevabilité de son action devant le juge communautaire ne la priverait pas du droit d’exercer un recours juridictionnel.
91. Infront conteste les arguments de la Commission et soutient que le Tribunal a retenu à bon droit qu’elle est individuellement concernée par l’acte attaqué.
2. Appréciation
92. Nous ne partageons pas l’appréciation de la Commission sur le manque de clarté du raisonnement du Tribunal ni sur le contenu de celui‑ci.
93. Le Tribunal a rappelé à bon droit, tout d’abord, que les particuliers autres que les destinataires d’une décision ne sauraient prétendre être concernés individuellement par cette décision que si celle‑ci les atteint en raison de qualités qui leur sont particulières ou d’une situation de fait qui les caractérise par rapport à toute autre personne et, de ce fait, les individualise d’une manière analogue à celle dont les destinataires de ladite décision le seraient (30).
94. Il a exposé ensuite, rappelons‑le, qu’Infront remplissait cette condition au terme d’une analyse qui repose, en substance, sur les trois points suivants. Premièrement, Infront détient, à titre exclusif, les droits de transmission télévisuelle de la phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA pour les années 2002 et 2006, qui est l’un des événements visés dans la liste des événements d’importance majeure pour la société adoptée par le Royaume‑Uni et approuvée par la Commission dans l’acte
attaqué. Deuxièmement, elle a acquis ces droits avant l’adoption de cet acte et même avant l’entrée en vigueur de l’article 3 bis de la directive. Troisièmement, ledit acte, bien qu’il ne vise pas Infront, entrave la faculté de celle‑ci de disposer librement desdits droits avec un organisme de radiodiffusion télévisuelle établi dans un État membre autre que le Royaume‑Uni.
95. Nous sommes d’avis que cette appréciation du Tribunal n’est entachée d’aucune erreur de droit.
96. Il ressort, en effet, de la jurisprudence qu’un particulier, pour pouvoir être considéré comme individuellement concerné par un acte communautaire dont il n’est pas le destinataire, doit avoir été identifié ou avoir été identifiable au moment de l’adoption de cet acte (31). Il résulte de l’analyse du Tribunal qu’Infront était bien identifiable par la Commission au moment de l’adoption de l’acte attaqué, puisque cette société était détentrice, en exclusivité, des droits de transmission de la
phase finale de la Coupe du Monde de la FIFA pour les années 2002 et 2006, l’un des événements visés dans la liste des mesures notifiées par le Royaume‑Uni.
97. Ensuite, si, comme le soutient la Commission, un préjudice de nature purement économique ne suffit pas, en principe, pour ouvrir à un particulier un droit de recours en annulation contre un acte communautaire, il convient de rappeler que le Tribunal n’a pas estimé qu’Infront était individuellement concernée par l’acte attaqué pour la seule raison que celui‑ci entraînerait pour elle des conséquences économiques négatives. Il a exposé, au point 165 de l’arrêt attaqué, que ledit acte entravait la
faculté d’Infront de céder librement l’exclusivité de ses droits de transmission de l’événement concerné à une chaîne payante établie en dehors du Royaume‑Uni et souhaitant diffuser cet événement dans cet État.
98. En d’autres termes, le Tribunal a constaté que l’acte attaqué affectait le droit de propriété d’Infront.
99. L’admission de la recevabilité du recours d’Infront nous semble pouvoir s’inscrire dans une jurisprudence bien établie, selon laquelle un particulier est admis à contester la légalité d’un acte communautaire lorsque cet acte modifie les droits acquis par ce particulier antérieurement à son adoption.
100. La Cour l’a décidé dans l’arrêt Toepfer et Getreide‑Import Gesellschaft/Commission, précité, dans lequel elle a admis pour la première fois qu’un particulier pouvait être individuellement concerné par une décision adressée à un État membre (32). Elle a également adopté cette solution dans l’arrêt Bock/Commission (33), ainsi que dans les arrêts Agricola commerciale olio e.a./Commission et Savma/Commission (34).
101. Dans l’arrêt CAM/CEE (35), la Cour a également admis qu’un particulier avait qualité à agir lorsque la mesure attaquée porte sur une situation en cours au moment de son adoption et met en cause le bénéfice de droits acquis pour des opérations à venir (36).
102. Une expression de cette jurisprudence peut également être trouvée dans l’arrêt Codorniu/Conseil, précité, auquel la Commission se réfère, dans lequel une société de droit espagnol, titulaire de la marque Gran Cremant de Codorniu depuis 1924, demandait l’annulation de l’article d’un règlement du Conseil lui interdisant, à terme, d’utiliser la mention «crémant» (37).
103. Cette jurisprudence nous semble transposable en l’espèce, puisque Infront était entrée en possession des droits de transmission exclusifs de la Coupe du Monde de la FIFA avant l’adoption de l’acte attaqué et même, comme le Tribunal l’a souligné, avant l’entrée en vigueur de l’article 3 bis de la directive, sur le fondement duquel cet acte a été adopté.
104. C’est pourquoi nous sommes d’avis que, au vu de ladite jurisprudence, le Tribunal a jugé à bon droit qu’Infront était individuellement concernée par la lettre attaquée. Le pourvoi doit également être rejeté comme non fondé en ce qu’il porte sur cette appréciation.
C – Sur les dépens
105. Conformément à l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 118 du même règlement, et au vu des conclusions d’Infront, la Commission, si la Cour suit notre analyse, devra supporter les dépens.
VI – Conclusion
106. Au vu des considérations qui précèdent, nous proposons que la Cour déclare et arrête:
«1) Le pourvoi est rejeté.
2) La Commission des Communautés européennes supporte les dépens.»
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1 – Langue originale: le français.
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2 – Directive du 3 octobre 1989, visant à la coordination de certaines dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres relatives à l’exercice d’activités de radiodiffusion télévisuelle (JO L 298, p. 23), telle que modifiée par la directive 97/36/CE du Parlement européen et du Conseil, du 30 juin 1997 (JO L 202, p. 60, ci‑après la «directive»).
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3 – T‑33/01, Rec. p. II‑5897, ci‑après l’«arrêt attaqué».
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4 – Ci‑après «Infront».
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5 – Point 89.
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6 – Points 94 et 95.
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7 – Point 107.
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8 – Point 130.
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9 – Point 133.
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10 – Points 134 et 135.
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11 – Points 138 à 143.
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12 – T‑69/99, Rec. p. II‑4039.
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13 – Point 146.
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14 – Point 120.
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15 – Point 121.
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16 – Points 160 et 161.
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17 – Points 162 à 165.
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18 – Points 166 et 167.
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19 – Point 177.
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20 – Arrêt du 5 mai 1998, Dreyfus/Commission (C‑386/96 P, Rec. p. I‑2309, point 43 et jurisprudence citée).
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21 – Voir, notamment, arrêt du Tribunal du 28 septembre 2004, MCI/Commission (T‑310/00, Rec. p. II‑3253, point 44 et jurisprudence citée).
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22 – Ordonnance du 31 juillet 1989, S./Commission (206/89 R, Rec. p. 2841, point 8).
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23 – Arrêt MCI/Commission, précité (point 45).
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24 – Arrêt Dreyfus/Commission, précité (point 43 et jurisprudence citée).
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25 – Ibidem (point 44 et jurisprudence citée).
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26 – La Commission se réfère à l’ordonnance du Tribunal du 15 décembre 2000, Galileo et Galileo International/Conseil (T‑113/99, Rec. p. II‑4141), ainsi qu’à l’arrêt du Tribunal du 6 décembre 2001, Emesa Sugar/Conseil (T‑43/98, Rec. p. II‑3519).
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27 – Arrêt du 17 janvier 1985 (11/82, Rec. p. 207).
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28 – Arrêt du 16 mai 1991 (C‑358/89, Rec. p. I‑2501).
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29 – Arrêt du 18 mai 1994 (C‑309/89, Rec. p. I‑1853).
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30 – Arrêt Piraiki‑Patraiki e.a./Commission, précité (point 11).
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31 – Arrêts de la Cour du 1^er juillet 1965, Toepfer et Getreide‑Import Gesellschaft/Commission (106/63 et 107/63, Rec. p. 525, 533); Piraiki‑Patraiki e.a./Commission, précité (points 21, 28 et 31); du 26 juin 1990, Sofrimport/Commission (C‑152/88, Rec. p. I‑2477, point 11); du 11 février 1999, Antillean Rice Mills e.a./Commission (C‑390/95 P, Rec. p. I‑769, points 25 à 30), ainsi que arrêts du Tribunal du 14 septembre 1995, Antillean Rice Mills e.a./Commission (T‑480/93 et T‑483/93, Rec.
p. II‑2305, point 67), et du 17 janvier 2002, Rica Foods/Commission (T‑47/00, Rec. p. II‑113, point 41).
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32 – La Cour a déclaré recevable le recours intenté par deux sociétés importatrices de céréales en Allemagne contre la décision de la Commission qui autorisait rétroactivement cet État membre à prendre des mesures de sauvegarde en vertu desquelles leur demande de certificats d’importation avait été rejetée.
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33 – Arrêt du 23 novembre 1971 (62/70, Rec. p. 897). Dans cet arrêt, la Cour a déclaré recevable le recours introduit par une société importatrice de denrées alimentaires à l’encontre d’une décision de la Commission autorisant la République fédérale d’Allemagne à exclure du traitement communautaire certains produits originaires de Chine et mis en libre pratique dans les États du Benelux, en ce que cette décision portait également sur les importations de produits dont les demandes de licence étaient
en instance auprès de l’administration allemande lors de l’entrée en vigueur de ladite décision. Ainsi, le 4 septembre 1970, la requérante avait demandé à l’autorité allemande compétente une licence d’importation pour un lot de conserves de champignons chinois mis en libre pratique aux Pays‑Bas. Le 11 septembre suivant, cette autorité l’avait avertie qu’elle rejetterait cette demande dès que la Commission aurait délivré une autorisation en ce sens. Par décision du 15 septembre 1970, la Commission a
autorisé la République fédérale d’Allemagne à exclure du traitement communautaire non seulement les demandes de licence d’importation futures de champignons noirs originaires de Chine, mais également les demandes de licence d’importation pendantes.
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34 – Arrêts du 27 novembre 1984 (232/81, Rec. p. 3881, et 264/81, Rec. p. 3915). Il s’agissait de recours introduits par des entreprises adjudicataires à l’encontre d’un règlement de la Commission abrogeant un règlement antérieur sur la base duquel l’organisme d’intervention italien avait mis en vente une certaine quantité d’huile d’olive. La Cour a relevé que, la situation étant fixée entre les parties à la vente, «toute intervention de la part des institutions communautaires, empêchant
[l’organisme d’intervention italien] d’exécuter ses obligations vis‑à‑vis des soumissionnaires désignés par le tirage au sort, constituait nécessairement un acte concernant ceux‑ci de manière directe et individuelle» [arrêts précités Agricola commerciale olio e.a./Commission (point 11), et Savma/Commission (point 11)].
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35 – Arrêt du 18 novembre 1975 (100/74, Rec. p. 1393).
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36 – Il s’agissait d’une société qui avait obtenu, le 19 juillet 1974, un certificat d’exportation pour 10 000 tonnes d’orge, valable jusqu’au 16 octobre 1974. En vertu d’un règlement du Conseil, les prix indicatif et d’intervention applicables notamment aux céréales devaient bénéficier d’une augmentation de 5 % à compter du 7 octobre 1974. Toutefois, la Commission, par un règlement du 4 octobre 1974, a prévu que cette mesure ne s’appliquerait pas aux certificats d’exportation délivrés avant le 7
octobre, privant ainsi la requérante du bénéfice de l’augmentation prévue par le Conseil pour les 3 978 tonnes qu’elle devait encore exporter entre le 7 et le 16 octobre. La Cour a admis la recevabilité du recours de la requérante à l’encontre du règlement de la Commission. Elle a jugé que ce règlement, en refusant à une catégorie d’opérateurs économiques et pour des exportations déterminées le bénéfice de l’augmentation du montant de la restitution, visait un nombre déterminé et connu
d’exportateurs de céréales et que cette mesure, même si elle faisait partie d’un acte à caractère normatif, affectait ces exportateurs en raison d’une situation de fait qui les caractérisait par rapport à toute autre personne.
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37 – Voir, au soutien de cette analyse, thèse de Cassia, P., L’accès des personnes physiques ou morales au juge de la légalité des actes communautaires, Dalloz, Paris, 2002, p. 752, points 964 et suiv.