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08/02/2007 | CJUE | N°C-254/05

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mazák présentées le 8 février 2007., Commission des Communautés européennes contre Royaume de Belgique., 08/02/2007, C-254/05


CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁn MazÀk

présentées le 8 février 2007 (1)

Affaire C-254/05

Commission des Communautés européennes

contre

Royaume de Belgique

«Système de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel sans le marquage ‘CE’ – Soumission à un agrément – Tests et vérifications déjà effectués dans un autre État membre»

1. Dans cette affaire, la Commission des Communautés européennes demande qu’il soit constaté que, en exigeant que les systèmes de

détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre et ne portan...

CONCLUSIONS DE L’AVOCAT GÉNÉRAL

M. JÁn MazÀk

présentées le 8 février 2007 (1)

Affaire C-254/05

Commission des Communautés européennes

contre

Royaume de Belgique

«Système de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel sans le marquage ‘CE’ – Soumission à un agrément – Tests et vérifications déjà effectués dans un autre État membre»

1. Dans cette affaire, la Commission des Communautés européennes demande qu’il soit constaté que, en exigeant que les systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre et ne portant pas le marquage «CE» (2): 1) soient conformes à la norme belge «NBN S21‑100»; 2) soient soumis à un agrément de type, en l’occurrence par le BOSEC (Belgian Organisation for Security Certification), cette entrave étant aggravée par
les frais disproportionnés qu’engendre cet agrément; 3) subissent des tests et des vérifications dans le cadre de cet agrément de type, qui, en substance, font double emploi avec des contrôles qui ont déjà été effectués dans le cadre d’autres procédures dans un autre État membre, le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE.

I – Le droit national

2. L’arrêté de l’Exécutif de la Communauté française du 24 décembre 1990 détermine les modalités et la procédure d’obtention de l’attestation de sécurité des établissements d’hébergement existant au 1^er janvier 1991 et fixe les normes de sécurité en matière de protection contre l’incendie spécifique à ces établissements d’hébergement (ci‑après l’«arrêté du 24 décembre 1990»).

3. Conformément aux articles 2 et 3 dudit arrêté, un établissement d’hébergement ne peut être exploité qu’après avoir obtenu la délivrance d’une attestation de sécurité, laquelle n’est délivrée qu’à condition de satisfaire aux normes de sécurité en matière de protection contre l’incendie spécifique aux établissements d’hébergement, énoncées à l’annexe 1 dudit arrêté.

4. Conformément au point 7.4.4 de l’annexe 1 dudit arrêté, une installation généralisée de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel doit être réalisée et réceptionnée conformément à la norme NBN S21‑100 et le matériel doit faire l’objet d’un agrément qui vérifie sa conformité à cette norme.

5. En ce qui concerne la Région wallonne, l’arrêté du 24 décembre 1990 a été abrogé par l’article 158 du décret du 18 décembre 2003 relatif aux établissements d’hébergement touristique. Les dispositions dudit arrêté continuent à être applicables en ce qui concerne la Région de Bruxelles-Capitale.

6. L’arrêté du gouvernement wallon du 3 décembre 1998 porte exécution du décret du 5 juin 1997 relatif aux maisons de repos, résidences-services et aux centres d’accueil de jour pour personnes âgées et portant création du Conseil wallon du troisième âge (ci-après l’«arrêté du 3 décembre 1998»).

7. L’article 27 dudit arrêté dispose:

«Les normes relatives à la protection contre l’incendie et la panique fixées à l’annexe 1 sont applicables aux maisons de repos, aux résidences-services et aux centres d’accueil de jour pour personnes âgées.»

8. Le point 7.7.1 de l’annexe 1 de l’arrêté du 3 décembre 1998 dispose:

«Les installations généralisées de détection automatique sont réceptionnées comme indiqué dans la norme belge NBN S21‑100 [...]. Toutefois les contrôles doivent porter sur la totalité des installations (détecteurs, centraux, tableaux répétiteurs, asservissements, etc.).»

9. La norme NBN S21‑100 fixe les règles de conception des installations généralisées de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel.

10. Le point 4.2 de cette norme, intitulé «Description», est rédigé comme suit:

«Une installation de détecteurs automatiques d’incendie se compose essentiellement:

– de capteurs, sensibles à une des caractéristiques spécifiques à la combustion, appelés détecteurs,

– d’un réseau de fils et de câbles électriques,

– d’un central de détection destiné à donner l’alerte, à signaler la zone de détection et les dérangements,

– de sources d’alimentation en énergie.

Ces matériels sont d’un type conforme aux spécifications des normes européennes CEN ou belges et l’installateur et le système doit être certifié par le BOSEC. Tous les composants d’un même système de détection doivent être compatibles.

Des répétiteurs, des avertisseurs manuels ou tout autre asservissement peuvent être ajoutés à l’installation, à condition qu’ils répondent aux prescriptions de la présente norme.

L’ensemble détecteur-socle ou embase est pourvu d’un signal optique d’alerte.»

11. En vertu du point 4.3.1 de la norme belge NBN S21‑100, tout type de détecteur doit être conforme aux spécifications des normes belges.

12. Les points 4.4.6 et 4.4.8.2 de ladite norme fixent les caractéristiques requises pour, respectivement, la source d’alimentation en énergie de secours et le câblage des systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel.

II – La procédure précontentieuse

13. En janvier 2003, à la suite de la réception d’une plainte d’un opérateur du Royaume-Uni qui avait eu des difficultés à commercialiser certains types de systèmes de détection d’incendie en Belgique, la Commission a adressé au gouvernement belge une lettre de mise en demeure dans laquelle elle a exposé pour quels motifs elle pensait que certaines dispositions belges étaient de nature à faire obstacle aux importations en Belgique de certains types de système de détection d’incendie.

14. Le gouvernement belge a présenté ses observations à la Commission par lettre en date du 9 septembre 2003.

15. Estimant que le Royaume de Belgique ne s’était pas conformé aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE, la Commission lui a adressé le 7 juillet 2004 un avis motivé l’invitant à prendre les mesures nécessaires afin de se conformer à cet avis dans un délai de deux mois à compter de la notification de ce dernier.

16. Le gouvernement belge a répondu à cet avis motivé par lettre en date du 9 septembre 2004.

17. La réponse du gouvernement belge n’ayant pas donné satisfaction à la Commission, cette dernière a introduit le présent recours.

III – Moyens

18. La Commission soutient que les arrêtés du 24 décembre 1990 et du 3 décembre 1998 restreignent la libre circulation des systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel ne portant pas le marquage «CE», mais légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre. En exigeant la conformité à la norme NBN S21‑100, la réglementation belge exclut d’une partie du marché belge l’utilisation de certains systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel
légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre, mais qui ne sont pas pourvus du marquage «CE» s’ils ne sont pas conformes à la norme belge. En effet, aucun établissement d’hébergement ou maison de retraite n’achètera des systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre et qui présentent un niveau équivalent de protection, mais qui ne sont pas conformes à la norme belge. Ces produits sont exclus
d’une partie du marché belge au profit des produits conformes à la norme belge.

19. De la même manière, plusieurs règlements communaux relatifs à la prévention des incendies exigent la conformité des détecteurs d’incendie à la norme NBN S2l‑l00. En outre, lorsque les services incendie déterminent les mesures de prévention contre l’incendie pour un bâtiment qui n’est soumis à aucune réglementation spécifique en matière de prévention contre l’incendie, ils se référent généralement aussi à cette fin à la norme NBN S21‑100. Pour des motifs similaires à ceux énoncés en ce qui
concerne les deux arrêtés susmentionnés, ces pratiques constituent des mesures d’effet équivalent à des restrictions quantitatives.

20. En effet, en raison de la législation régionale et municipale belge ainsi que des pratiques administratives des services incendie, les opérateurs économiques fabriquant ou commercialisant des systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel, légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre, mais qui ne portent pas le marquage CE, risquent de décider de ne pas présenter leurs produits sur le marché belge ou d’être obligés de les modifier afin d’avoir accès
au marché en question.

21. La Commission soutient aussi que la norme NBN S21‑100 comporte, en particulier aux points 4.2, 4.3.1, 4.4.6 et 4.4.8.2, des spécifications relatives aux composants utilisés dans les systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel. Les fabricants sont donc obligés de modifier leurs produits s’ils ne sont pas littéralement conformes à ces spécifications. L’application de la norme NBN S21‑100 impliquera une fabrication différenciée selon la destination de ces produits et
entravera donc la circulation des produits légalement fabriqués et commercialisés dans un autre État membre qui ne portent pas le marquage «CE» et qui ne présentent pas les caractéristiques spécifiques fixées dans la norme en question.

22. En outre, la norme NBN S21‑100 soumet les systèmes de détection automatique par détecteur ponctuel à un agrément par le BOSEC. En exigeant la conformité à la norme NBN S21‑100, les arrêtés du 24 décembre 1990 et du 3 décembre 1998 soumettent les systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel, légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre que la Belgique et ne portant pas le marquage «CE», à un agrément par le BOSEC s’ils sont destinés à être utilisés
dans des locaux couverts par les deux arrêtés précités.

23. Une telle procédure d’agrément constitue non seulement en soi une mesure d’effet équivalent à une restriction quantitative interdite par l’article 28 CE, mais, de surcroît, cette entrave est aggravée par les délais et les frais disproportionnés qu’engendre cet agrément et également par le fait que le BOSEC ne prend pas en compte les tests et vérifications déjà effectués dans un autre État membre.

24. Enfin, ces obstacles à la libre circulation des marchandises ne sont pas justifiés, car les autorités belges ne démontrent pas leur nécessité et leur conformité au principe de proportionnalité.

25. Le Royaume de Belgique fait valoir que les propositions de modification, en particulier celle portant sur la suppression de l’agrément obligatoire par le BOSEC en tant qu’organisme certificateur, sont en cours et ont fait l’objet d’une enquête publique entre le 30 mars 2005 et le 30 septembre 2005. En conséquence, la norme NBN S21‑100 est désormais en conformité avec l’article 28 CE et ne constitue plus un obstacle à la libre circulation des systèmes de détection automatique d’incendie par
détecteur ponctuel non pourvus du marquage «CE» qui sont légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre.

26. De plus, la norme belge ne fait en réalité que répéter les normes européennes, à savoir la série EN‑54 de normes techniques définies par le CEN (3). Elle est conforme à ces normes et ne contient aucune exigence supplémentaire nécessitant d’adapter ou de modifier les produits composant l’ensemble du système automatique de détection d’incendie. En réalité, les contrôles prévus par la norme en question ne portent pas sur les composants des systèmes, mais seulement sur le fonctionnement du
système dans son ensemble.

27. En tout état de cause, ce contrôle est justifié par des motifs de sécurité publique et de protection de la santé et de la vie des personnes, des animaux ou des plantes. À cet égard, les autorités belges soutiennent que les dispositions de la norme NBN S21‑100 sont indistinctement applicables à tous les systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel non pourvus du marquage «CE». Le contrôle des installations de détection incendie s’ajoute à la certification par un
organisme compétent, belge ou étranger, que les composants ou appareils qui font partie de l’installation sont conformes aux normes européennes, belges ou équivalentes. Par conséquent, la norme NBN S21‑100 garantit que la conception de l’installation dans son ensemble est bonne et que le système, fait de composants testés séparément et achetés à des producteurs ou fournisseurs qui peuvent être différents, fonctionne correctement. Le gouvernement belge maintient en conséquence que les contrôles qui
sont effectués conformément à la norme NBN S21‑100 ne font pas double emploi avec ceux qui ont déjà été effectués dans d’autres États membres. Ils sont en conséquence nécessaires et proportionnés par rapport à l’objectif poursuivi.

IV – Appréciation juridique

A – Remarques préliminaires

28. En substance, la principale objection soulevée par la Commission à l’égard des arrêtés de la Région wallonne et de la Communauté française est le fait qu’ils se réfèrent à la norme NBN S21‑100. La même objection vaut pour les règlements municipaux qui se réfèrent à cette norme ainsi que pour les pratiques administratives des services incendie qui ont tendance à appliquer celle-ci en l’absence d’autre norme. Cela aboutit à ce que la norme NBN S21‑100 joue comme une norme impérative pour les
producteurs qui souhaitent commercialiser leurs systèmes de détection d’incendie par détecteur ponctuel non pourvus du marquage «CE» sur le marché belge.

29. Selon la Commission, les principales caractéristiques de la norme NBN S21‑100 posant problème sont qu’elle exige la conformité avec certaines spécifications techniques détaillées en ce qui concerne les systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel ne portant pas le marquage «CE» ainsi qu’un agrément type par le BOSEC dans le cadre duquel ce dernier ne prendrait pas en compte les tests et vérifications déjà effectués dans l’État membre d’origine.

30. Il est donc nécessaire aux fins de la présente procédure d’examiner si ces caractéristiques constituent des mesures d’effet équivalent à des restrictions quantitatives et donc contraires à l’article 28 CE et, dans l’affirmative, si celles-ci peuvent se justifier par une des raisons d’intérêt général énumérées à l’article 30 CE ou par une des exigences impératives consacrées par la jurisprudence de la Cour dans le cas où la réglementation nationale est indistinctement applicable.

31. Avant de procéder à cet examen, il nous paraît utile de faire les deux observations suivantes.

32. Premièrement, les produits en cause dans la présente affaire sont des systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre et ne portant pas le marquage «CE». Dans ce contexte, il convient de rappeler que le marquage «CE» emporte la présomption que les produits ainsi marqués satisfont aux «exigences essentielles» en terme de résultat à atteindre et des risques à traiter, visées dans les annexes des directives
«nouvelle approche». Les produits pourvus du marquage «CE» peuvent, en conséquence, bénéficier d’une libre circulation dans toute la Communauté.

33. Les exigences essentielles visées dans les annexes des directives «nouvelle approche» définissent les résultats à atteindre et les dangers à traiter, mais elles n’indiquent ou ne prévoient aucune solution technique pour y parvenir. Par contre, les normes européennes harmonisées (également dénommées «normes européennes» ou «NE») arrêtent les solutions techniques qui, lorsqu’elles sont respectées, garantissent le respect des exigences essentielles visées par les différentes directives
«nouvelle approche». Ces normes sont généralement élaborées par les organismes européens de normalisation, en particulier le CEN, en vertu d’un mandat donné par la Commission. Alors que les exigences essentielles fixées dans les directives «nouvelle approche» sont impératives, le respect des normes reste volontaire et les fabricants peuvent prouver que leurs produits répondent aux exigences essentielles visées par les directives «nouvelle approche», et donc obtenir le marquage «CE», par tout autre
moyen de leur choix (4).

34. La deuxième observation porte sur l’existence de normes harmonisées pour les composants d’installations de détection d’incendie et l’état de l’harmonisation dans ce domaine. Les composants des installations de détection d’incendie ne sont pas encore harmonisés, mais cette harmonisation est actuellement en cours. L’harmonisation des installations de détection d’incendie est entreprise dans le cadre de la directive 89/106/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, relative au rapprochement des
dispositions législatives, réglementaires et administratives des États membres concernant les produits de construction (5). Sur la base d’un mandat donné à cet effet par la Commission (6), le CEN a élaboré des normes relevant de la série EN‑54 relative aux composants des détecteurs d’incendie.

35. Il convient également d’observer que la directive 89/106 se distingue de la plupart des autres directives «nouvelle approche» en ce qu’il est prévu que les normes harmonisées élaborées en vertu de cette directive lieront les États membres (7) après la publication de leur référence et l’expiration d’une période transitoire (8). Dès expiration de la période transitoire, les États membres ne sont plus autorisés à appliquer des normes nationales divergentes (9).

36. En ce qui concerne les normes EN 54, la première période transitoire à venir à expiration ne concernait que trois composants des installations de détection d’incendie (10) et a expiré le 30 juin 2005. Les périodes transitoires pour d’autres normes de la série EN 54 relatives à plusieurs autres composants d’installations de détection d’incendie sont fixées à différentes dates postérieures, alors que, en ce qui concerne certains composants des installations de détection d’incendie, des normes
harmonisées n’ont même pas encore été élaborées. Par conséquent, l’état de l’harmonisation des spécifications techniques relatives aux composants d’installations de détection d’incendie reste encore très inégal.

B – Conformité à la norme belge

La règle belge constitue-t-elle une mesure d’effet équivalent à une restriction quantitative?

37. La première objection que soulève la Commission en ce qui concerne la norme NBN S21‑100 est que celle-ci fixe plusieurs spécifications techniques détaillées dont, selon la Commission, certaines portent sur les composants des systèmes de détection d’incendie par détecteur ponctuel ne portant pas le marquage «CE». Par conséquent, les systèmes de détection d’incendie importés ne portant pas le marquage «CE» doivent être modifiés afin de pouvoir être commercialisés en Belgique.

38. Le Royaume de Belgique soutient en substance que les exigences se limitent à garantir que la conception de l’installation dans son ensemble est bonne et que le système dans son ensemble fonctionne correctement. La norme belge n’apporte donc pas de restrictions à la commercialisation de systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel légalement commercialisés dans un autre État membre ne portant pas le marquage «CE».

39. Selon la jurisprudence constante de la Cour, l’interdiction des mesures d’effet équivalent à des restrictions quantitatives édictée à l’article 28 CE vise toute mesure susceptible d’entraver directement ou indirectement, actuellement ou potentiellement, le commerce intracommunautaire (11). Ce qui est donc essentiel n’est pas l’objet mais l’effet – actuel ou potentiel – d’une mesure sur le commerce intracommunautaire.

40. En outre, il y a lieu de rappeler à cet égard que, conformément à la jurisprudence Cassis de Dijon (12), constituent des mesures d’effet équivalent, interdites par l’article 28 CE, les obstacles à la libre circulation des marchandises résultant, en l’absence d’harmonisation des législations, de l’application à des marchandises en provenance d’autres États membres, où elles sont légalement fabriquées et commercialisées, de règles relatives aux conditions auxquelles doivent répondre ces
marchandises (telles que celles qui concernent leur dénomination, leur forme, leurs dimensions, leur poids, leur composition, leur présentation, leur étiquetage, leur conditionnement), même si ces règles sont indistinctement applicables à tous les produits (13).

41. La Cour a également jugé dans son arrêt du 8 mai 2003, ATRAL, qu’imposer comme condition que soit attestée la conformité des systèmes et centraux d’alarme importés à des normes ou réglementations techniques assurant un niveau de protection équivalent à celui exigé par l’État membre d’importation revient à obliger les fabricants des autres États membres à adapter leurs appareils et équipements aux exigences de l’État membre d’importation. Une telle obligation contrevient donc à l’article
28 CE (14).

42. En l’espèce, la norme belge NBN S21‑100 contient des spécifications relatives à l’installation et au fonctionnement corrects des systèmes automatiques de détection d’incendie par détecteur ponctuel, telles que les points 6.3 («Essais par foyers types»/«Beproeving door type haarden») et 6.4 («Temps de réponse»/«Reactietijd»). Il semble néanmoins que cette norme contient également des spécifications techniques relatives à la conception et à la forme des systèmes de détection d’incendie
concernés telles que le point 4.4.5.2 relatif aux composants («Équipements»/«Uitrusting») et le point 4.4.6 relatif à la source d’alimentation en énergie.

43. Par conséquent, l’État membre d’importation, en l’espèce la Belgique, n’exige pas seulement que le détecteur d’incendie importé qui ne porte pas le marquage «CE» réponde à un certain niveau de sécurité. Il exige qu’un tel détecteur d’incendie soit conforme à certaines spécifications techniques pour atteindre ce niveau de sécurité. Ce faisant, il impose aux producteurs un seul moyen de parvenir à un niveau donné de sécurité. À cet égard, il est significatif que la norme NBN S21‑100 fait
expressément état, au point 4.3.1, de ce que «tout type de détecteur doit être conforme aux spécifications des normes belges».

44. Quant à l’argument des autorités belges selon lequel la norme NBN S21‑100 ne fait que reprendre des normes européennes existantes, à savoir la série EN‑54 élaborée par le CEN, et qu’elle ne peut donc pas être considérée comme un obstacle à la libre circulation des marchandises dans la Communauté, il ne saurait être retenu. En effet, un tel argument ne pourrait prospérer que si la norme sur laquelle s’appuie l’État membre était une norme harmonisée et contraignante et si tous les États
membres pouvaient imposer à tous les producteurs une stricte conformité à cette norme.

45. Ainsi que nous l’avons évoqué dans les remarques préliminaires, l’harmonisation des composants d’installations de détection d’incendie est en cours et reste donc inégale. Aux fins de la présente affaire, l’état pertinent de l’harmonisation est celui existant au terme du délai fixé dans l’avis motivé, à savoir deux mois après sa réception par les autorités belges, laquelle peut raisonnablement être fixée autour du 15 septembre 2004. En effet, ainsi que l’a constamment jugé la Cour,
l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé (15).

46. En ce qui concerne les normes de la série EN 54 qui sont relatives aux composants des installations de détection d’incendie, les périodes transitoires à l’issue desquelles les normes harmonisées élaborées au titre de la directive 89/106 sont devenues obligatoires pour les États membres ont expiré bien après le 15 septembre 2004 (16). Cela signifie que, au moment qui vaut pour le présent examen, il n’existait aucune spécification technique relative aux détecteurs d’incendie liant tous les
États membres de l’Union européenne. Dans ces conditions, le respect par les fabricants des normes applicables de la série EN 54 reste volontaire. Il n’aboutit qu’à une présomption de conformité des produits aux exigences essentielles fixées dans la directive 89/106. Dans ces conditions, les fabricants sont libres de choisir toute solution technique qui répond aux exigences essentielles fixées dans la directive applicable.

47. En outre, au regard de son champ d’application matériel, l’harmonisation n’est jusqu’ici que partielle, puisque la série EN 54 ne couvre pour le moment qu’un nombre limité – bien que croissant – de composants d’installations de détection d’incendie, tels que les dispositifs sonores (17), les équipements d’alimentation électrique (18) ou les détecteurs de chaleur (19).

48. De plus, ainsi que les autorités belges l’ont admis dans leurs mémoires, à divers stades, les normes applicables élaborées par le CEN prévoient plusieurs options, parmi lesquelles les États membres peuvent choisir. Cela semble donner aux États membres une certaine marge d’appréciation dans la transposition des normes faisant partie des séries élaborées par le CEN et peut donc aboutir à des différences entre les normes nationales régissant les détecteurs d’incendie.

49. Pour l’ensemble de ces raisons, il semble que la norme NBN S21‑100 dans son ensemble ne puisse pas être considérée comme une simple transposition, sans modifications, d’une norme obligatoire et uniforme pour l’ensemble de l’Union européenne, ainsi que semblent le suggérer les autorités belges. Exiger une conformité à la norme NBN S21‑100 équivaut par conséquent à une restriction de la libre circulation des marchandises entre les États membres.

50. Enfin, le fait que l’arrêté du 24 décembre 1990 ait été abrogé par l’article 158 du décret de la Région wallonne du 18 décembre 2003 relatif aux établissements d’hébergement touristique ne modifie en rien ce constat, car les dispositions de l’arrêté du 24 décembre 1990 restent applicables dans la Région Bruxelles-Capitale.

51. Dans ces conditions, exiger que tout système automatique de détection d’incendie par détecteur ponctuel qui ne porte pas le marquage «CE» soit conforme à la norme NBN S21‑100 constitue une mesure d’effet équivalent à des restrictions quantitatives à l’importation, au sens de l’article 28 CE.

52. Toutefois, selon la jurisprudence constante de la Cour, une réglementation nationale qui entrave la libre circulation des marchandises peut être justifiée par une des raisons d’intérêt général énumérées à l’article 30 CE ou par une des exigences impératives consacrées par la jurisprudence de la Cour dans le cas où la réglementation nationale est indistinctement applicable (20).

La réglementation peut-elle être justifiée?

53. En l’espèce, le gouvernement belge soutient que la conformité à la norme NBN S21‑100 peut être justifiée par des motifs liés à la sécurité publique et à la protection de la santé et de la vie des personnes, des animaux ou des plantes.

54. Ces deux motifs sont énumérés à l’article 30 CE et il est indéniable qu’une mesure visant à garantir le bon fonctionnement d’installations de détection d’incendie joue un rôle dans la prévention des préjudices matériels et corporels et peut, par conséquent, contribuer à réaliser les objectifs fixés.

55. Il est de jurisprudence constante que, en l’absence de règles d’harmonisation, les États membres restent libres de décider du niveau auquel ils entendent assurer la protection de la santé et de la vie des personnes et de l’exigence d’une autorisation préalable à la mise sur le marché de tels produits (21).

56. Toutefois, selon la jurisprudence constante de la Cour, afin de pouvoir se prévaloir avec succès de ce que l’article 30 CE justifie une exception au principe de libre circulation des marchandises, les autorités nationales doivent démontrer que ladite exception est nécessaire pour réaliser un ou plusieurs objectifs y mentionnés, en l’occurrence la protection de la santé publique, et qu’elle est conforme au principe de proportionnalité (22).

57. En l’espèce, au vu des éléments de preuve apportés par le gouvernement belge, il est douteux qu’une stricte conformité à la norme belge NBN S21‑100 puisse être considérée comme nécessaire et proportionnée. En effet, ce qui est particulièrement problématique en ce qui concerne la norme belge est le fait que celle-ci ne se limite pas à contrôler le fonctionnement des systèmes de détection d’incendie dans leur ensemble dans un environnement donné. Elle fixe des spécifications techniques
particulières, y compris celles concernant certains composants, auxquelles doivent satisfaire les détecteurs d’incendie qui sont mis sur le marché belge. Elle impose donc ses propres spécifications techniques particulières comme étant les seules susceptibles de réaliser un niveau suffisant de sécurité.

58. Cela signifie que l’obligation stricte de devoir se conformer à la norme NBN S21‑100 n’autorise même pas les opérateurs à apporter la preuve que les appareils qu’ils importent atteignent, peut‑être par des moyens techniques différents, un degré équivalent ou supérieur de sécurité par rapport à celui fixé par la réglementation de l’État membre d’importation.

59. Imposer ainsi des spécifications techniques strictes relatives aux composants ne pourrait se justifier qu’à la condition que les autorités belges soient en mesure de démontrer que les spécifications techniques fixées dans la norme NBN S21‑100 sont les seules aptes à réaliser un niveau de protection donné. En effet, ainsi que la Cour l’a déjà jugé, une exception au principe de la libre circulation des marchandises ne peut être justifiée au titre de l’article 30 CE ou des exigences
impératives consacrées par la jurisprudence communautaire que concrètement, par rapport aux circonstances du cas d’espèce (23). En l’espèce, le caractère détaillé des exigences figurant dans la norme belge aurait donc normalement dû fournir plus d’éléments détaillés susceptibles d’apporter la preuve de la nécessité et de la proportionnalité de telles spécifications strictes et détaillées afin de réaliser l’objectif de sécurité publique et de protection de la santé et de la vie des personnes, des
animaux ou des plantes. Or, en l’espèce, les autorités belges n’ont pas rapporté cette preuve.

60. Dans ces conditions, il n’apparaît pas qu’imposer une stricte conformité à la norme NBN S21‑100 puisse être considéré comme proportionné à l’objectif de sécurité publique et de protection de la santé et de la vie des personnes, des animaux ou des plantes. En conséquence, une telle restriction à la libre circulation des systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel n’est pas justifiée par une des raisons d’intérêt général énumérées à l’article 30 CE, ni par l’une des
exigences impératives reconnues par la jurisprudence de la Cour.

C – L’exigence d’un agrément de type et ses modalités

Cela constitue-t-il une mesure d’effet équivalent à une restriction quantitative?

61. Outre plusieurs spécifications techniques détaillées, la norme NBN S21‑100 impose un agrément par le BOSEC des systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel. La conformité à la norme NBN S21‑100 étant prescrite en ce qui concerne les systèmes de détection d’incendie par détecteur ponctuel ne portant pas le marquage «CE», par le biais de différents éléments de la législation belge, l’agrément par le BOSEC est rendu nécessaire afin de commercialiser de tels systèmes,
tout au moins ceux destinés à certaines utilisations tombant sous le coup de la législation belge applicable, telles qu’une utilisation dans des établissements d’hébergement touristique ou des résidences d’accueil pour personnes âgées.

62. Les autorités belges ne contestent pas que la norme NBN S21‑100, à laquelle les producteurs sont tenus de se conformer du fait des deux arrêtés contestés, impose un agrément de type par le BOSEC. Toutefois, elles ne considèrent pas qu’un tel agrément constitue une entrave à la libre circulation des marchandises, car, en se bornant à contrôler que le système de détection dans son ensemble fonctionne, il ne fait pas double emploi avec les contrôles effectués dans l’État membre d’origine des
marchandises.

63. Il ressort d’une jurisprudence bien établie qu’un produit, légalement commercialisé dans un État membre, doit en principe pouvoir être commercialisé dans tout autre État membre, sans être soumis à des contrôles supplémentaires, sous réserve des exceptions prévues ou admises par le droit communautaire (24).

64. À cet égard, selon la jurisprudence constante de la Cour, constitue une mesure d’effet équivalent à une restriction quantitative au sens de l’article 28 CE le fait pour un État membre d’interdire de mettre dans le commerce, d’acquérir, d’offrir, d’exposer ou de mettre en vente, de détenir, de préparer, de transporter, de vendre, de remettre à titre onéreux ou à titre gratuit, d’importer ou d’utiliser des produits qui n’ont pas été préalablement autorisés (25).

65. En outre, s’agissant de la commercialisation dans un État membre de produits légalement fabriqués et commercialisés dans un autre État membre, et en l’absence d’une harmonisation communautaire, une disposition nationale qui impose que les produits importés subissent les mêmes contrôles que des produits mis pour la première fois sur le marché et soient préalablement approuvés constitue une mesure d’effet équivalent à une restriction quantitative à l’importation, au sens de l’article
28 CE (26).

66. Plus précisément, le rejet, dans ce cadre, d’une reconnaissance de l’équivalence des certificats délivrés dans un autre État membre restreint l’accès au marché de l’État membre d’importation et doit donc être considéré comme une mesure ayant un effet équivalent à une restriction quantitative à l’importation au sens de l’article 28 CE (27).

67. En l’espèce, la norme NBN S21‑100 exige de manière systématique un agrément de type des systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel qui ne portent pas le marquage «CE», même lorsqu’ils ont été légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre. De fait, en vertu d’un addendum de la norme NBN S21‑100 en date du 2 avril 1996, celle-ci prévoit au point 4.2 que «le système doit être certifié par le BOSEC».

68. En outre, il n’est pas contesté que, en l’absence d’accord bilatéral avec l’organisme certificateur de l’État membre d’origine, les contrôles effectués dans l’État membre d’origine n’ont pas été pris en compte par le BOSEC dans le cadre de l’agrément au titre de la norme NBN S21‑100. En conséquence, dans le cadre de la procédure d’agrément de type par le BOSEC, les systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel, légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État
membre mais ne portant pas le marquage «CE», doivent se soumettre à des tests et vérifications qui ont déjà été effectués dans l’État membre d’origine.

69. Dans ces conditions, l’exigence d’un agrément de type par la norme belge NBN S21‑100 constitue une mesure d’effet équivalent à une restriction quantitative à l’importation, au sens de l’article 28 CE. Il est donc nécessaire de déterminer si l’exigence d’un agrément de type et les modalités selon lesquelles il est effectué peuvent être justifiées par une des raisons d’intérêt général énumérées à l’article 30 CE ou par une des exigences impératives consacrées par la jurisprudence de la Cour.

L’agrément de type par le BOSEC peut-il être justifié?

70. En l’espèce, le gouvernement belge maintient que l’agrément des détecteurs d’incendie conformément à la norme NBN S21‑100 est justifié par des motifs liés à la sécurité publique et à la protection de la santé et de la vie des personnes, des animaux ou des plantes.

71. Il est indéniable que ces derniers constituent des motifs sur le fondement desquels des mesures d’effet équivalent à des restrictions quantitatives peuvent être justifiées en vertu de l’article 30 CE, à conditions que ces mesures soient nécessaires et proportionnées par rapport au but poursuivi.

72. Toutefois, si un État membre est libre de soumettre un produit du type de celui en cause ayant déjà fait l’objet d’un agrément dans un autre État membre à une nouvelle procédure d’examen et d’agrément, les autorités des États membres sont néanmoins tenues de contribuer à un allégement des contrôles dans le commerce intracommunautaire et de prendre en considération les analyses techniques ou chimiques ou les essais de laboratoire déjà effectués dans un autre État membre (28). Par conséquent,
une mesure instituée par un État membre ne saurait être considérée comme n’allant pas au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi si elle fait double emploi avec des contrôles qui ont déjà été effectués dans le cadre d’autres procédures soit dans ce même État, soit dans un autre État membre (29).

73. Cela signifie que, pour qu’une procédure d’agrément soit proportionnée, le mécanisme de contrôle de l’État membre d’importation doit être suffisamment flexible afin de pouvoir tenir compte du point de savoir si les effets pratiques du contrôle effectué dans l’État membre d’origine satisfont aux exigences de l’État membre d’importation quant à la protection de sécurité publique et de la santé. En exigeant une stricte conformité à la norme belge, laquelle, ainsi que nous l’avons déjà
démontré, va bien au‑delà d’une simple vérification du bon fonctionnement des installations de détection d’incendie dans un environnement donné, et en ne prenant pas en compte les contrôles effectués dans un autre État membre selon des normes nationales différentes, la procédure d’agrément de type conduite par le BOSEC ne satisfait très clairement pas à cette exigence de flexibilité.

74. En outre, ainsi que l’a déjà jugé la Cour, pour être conforme aux principes fondamentaux de la libre circulation des marchandises et de la libre prestation des services, une procédure d’autorisation préalable ne doit pas, à cause de sa durée, du montant des frais qu’elle engendre ou d’une imprécision des conditions qui doivent être remplies, être susceptible de dissuader les opérateurs concernés de poursuivre leur projet (30).

75. En l’espèce, selon la Commission, les frais de certification s’élèvent à 24 800 euros. Ces frais relativement élevés sont en pratique susceptibles de dissuader un producteur étranger de commercialiser ses produits sur le marché belge. En effet, dans le cas d’un producteur étranger, les frais pour obtenir un agrément en Belgique s’ajouteront à ceux exposés par le fabricant dans l’État membre dans lequel le détecteur d’incendie a été fabriqué ou commercialisé pour la première fois. Par
conséquent, l’argument du gouvernement belge selon lequel les frais d’agrément sont moins élevés en Belgique que dans d’autres États membres, tel que par exemple le Royaume-Uni, n’est pas pertinent.

76. En tout état de cause, ainsi que cela été préalablement évoqué, une exception au principe de la libre circulation des marchandises ne peut être justifiée au titre de l’article 30 CE ou des exigences impératives consacrées par la jurisprudence communautaire que concrètement, par rapport aux circonstances du cas d’espèce (31). En conséquence, même si, en principe, la nécessité d’une vérification appropriée du bon fonctionnement des appareils de détection d’incendie dans un environnement donné
peut être admise, la procédure susmentionnée pour obtenir du BOSEC un agrément de type devrait être justifiée de manière plus détaillée par les autorités belges pour pouvoir être considérée comme proportionnée. Les autorités belges n’ont cependant pas rapporté une telle preuve.

77. Enfin, pour répondre à l’argument du gouvernement belge relatif aux modifications en cours des mesures nationales exigeant un agrément de type par le BOSEC, il suffit de rappeler que, selon la jurisprudence constante, l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présentait au terme du délai fixé dans l’avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (32).

78. Dans ces conditions, l’obligation pour les systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel, légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre et ne portant pas le marquage «CE», de faire l’objet d’un agrément de type par le BOSEC sans que les tests et vérifications effectués dans l’État membre d’origine soient pris en compte de manière adéquate, ne paraît pas proportionnée à l’objectif de sécurité publique et de protection de la santé et de la vie des
personnes, des animaux ou des plantes et ne peut donc pas être justifiée par une des raisons d’intérêt général énumérées à l’article 30 CE ou par une des exigences impératives consacrées par la jurisprudence de la Cour.

V – Sur les dépens

79. En vertu de l’article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, la partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il a été conclu en ce sens par la partie qui a eu gain de cause. La Commission a conclu en ce sens.

VI – Conclusion

80. En conséquence, nous sommes d’avis que la Cour devrait:

1) constater que, en exigeant que les systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel légalement fabriqués ou commercialisés dans un autre État membre et ne portant pas le marquage «CE»: 1) soient conformes à la norme belge «NBN S21‑100»; 2) soient soumis à un agrément de type, en l’occurrence par le BOSEC (Belgian Organisation for Security Certification), cette entrave étant aggravée par les frais disproportionnés qu’engendre cet agrément; 3) subissent des tests et des
vérifications dans le cadre de cet agrément de type, qui, en substance, font double emploi avec des contrôles qui ont déjà été effectués dans le cadre d’autres procédures dans un autre État membre, le Royaume de Belgique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l’article 28 CE;

2) condamner le Royaume de Belgique aux dépens.

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1 – Langue originale: l’anglais.

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2 – Le marquage «CE» emporte la présomption que les produits ainsi marqués satisfont aux «exigences essentielles» en terme de résultat à atteindre et des risques à traiter, visées dans les annexes des directives «nouvelle approche» et peuvent, en conséquence, bénéficier d’une libre circulation dans toute la Communauté. Les exigences essentielles visées dans les annexes des directives «nouvelle approche» définissent les résultats à atteindre et les dangers à traiter, mais elles n’indiquent ou ne
prévoient aucune solution technique pour y parvenir. Voir Commission européenne, Guide relatif à la mise en application des directives élaborées sur la base de la nouvelle approche ou de l’approche globale, 2000, p. 27 et suiv.

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3 – Comité Européen de Normalisation (le reste de la note ne présente pas de pertinence pour la version française).

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4 – Voir Guide relatif à la mise en application des directives élaborées sur la base de la nouvelle approche ou de l’approche globale, précité à la note 2. Voir aussi conclusions de l’avocat général Sharpston du 21 novembre 2006 dans l’affaire Medipac‑Kazantzidis (C‑6/05, pendante devant la Cour, note 5).

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5 – JO L 40, p. 12.

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6 – Les installations de détection d’incendie font l’objet d’un mandat donné par la Commission en vertu de l’article 7 de la directive 89/106.

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7 – Voir Guide relatif à la mise en application des directives élaborées sur la base de la nouvelle approche ou de l’approche globale, précité à la note 2.

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8 – La Commission publie régulièrement les titres et les références des normes harmonisées au titre de la directive 89/106 au JO sous l’intitulé «Communication de la Commission dans le cadre de la mise en œuvre de la directive 89/106». Voir par exemple, comme cité par la Commission, JO 2002, C 320, p. 5, et, pour une version plus récente, JO 2006, C 134, p. 1. Chaque communication intègre et met à jour le contenu de la précédente communication.

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9 – Les communications de la Commission dans le cadre de la mise en œuvre de la directive 89/106 déclarent régulièrement que: «La date de fin de la période de coexistence est la même que la date de retrait des spécifications techniques nationales conflictuelles dont la présomption de conformité doit être basée sur des spécifications européennes harmonisées». Voir, par exemple, JO 2002, C 320, p. 5, et JO 2006, C 134, p. 1.

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10 – Il s’agit des trois normes suivantes: EN 54‑3 (dispositifs sonores), EN 54‑5 (détecteurs de chaleur – détecteurs ponctuels) et EN 54‑7 (détecteurs de fumée – détecteurs ponctuels fonctionnant suivant le principe de la diffusion de la lumière, de la transmission de la lumière ou de l’ionisation).

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11 – Voir, notamment, arrêts du 11 juillet 1974, Dassonville (8/74, Rec. p. 837, point 5); du 12 mars 1987, Commission/Allemagne, dit «Loi de pureté pour la bière» (178/84, Rec. p. 1227, point 27); du 24 novembre 1993, Keck et Mithouard (C‑267/91 et C‑268/91, Rec. p. I‑6097, point 11); du 23 septembre 2003, Commission/Danemark (C‑192/01, Rec. p. I‑9693, point 39); du 5 février 2004, Commission/Italie (C‑270/02, Rec. p. I‑1559, point 18); du 24 novembre 2005, Schwarz (C‑366/04, Rec. p. I‑10139,
point 28), et du 14 septembre 2006, Alfa Vita Vassilopoulos et Carrefour Marinopoulos (C‑158/04 et C‑159/04, Rec. p. I‑8135, point 15).

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12 – Arrêt du 20 février 1979, Rewe-Zentral, dit «Cassis de Dijon» (120/78, Rec. p. 649, point 14).

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13 – Voir, par exemple, arrêt du 15 septembre 1994, Houtwipper (C-293/93, Rec. p. I‑4249, point 11), et du 14 juin 2001, Commission/France (C‑84/00, Rec. p. I-4553, point 24).

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14 – C-14/02, Rec. p. I-4431, point 63.

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15 – Voir, entre autres, arrêts du 30 novembre 2000, Commission/Belgique (C‑384/99, Rec. p. I‑10633, point 16); du 15 mars 2001, Commission/France (C‑147/00, Rec. p. I‑2387, point 26), et du 15 juillet 2004, Commission/Portugal (C‑272/01, Rec. p. I‑6767, point 29).

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16 – Voir ci-dessus, point 36.

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17 – Norme EN 54-3.

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18 – Norme EN 54-4.

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19 – Norme EN 54-5.

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20 – Voir, par exemple, arrêt Alfa Vita Vassilopousos et Carrefour Marinopoulos (précité à la note 11, point 20 et jurisprudence citée).

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21 – Voir arrêts du 27 juin 1996, Brandsma (C‑293/94, Rec. p. I‑3159, point 11), et du 10 novembre 2005, Commission/Portugal (C‑432/03, Rec. p. I‑9665, point 44).

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22 – Voir arrêts du 30 novembre 1983, Van Bennekom (227/82, Rec. p. 3883, point 39), et du 13 mars 1997, Morellato (C‑358/95, Rec. p. I‑1431, point 14).

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23 – Voir, en ce sens, arrêt ATRAL (précité à la note 14, point 67).

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24 – Voir, en ce sens, arrêt du 22 janvier 2002, Canal Satélite Digital (C‑390/99, Rec. p. I‑607, point 37 et jurisprudence citée).

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25 – Voir, par exemple, arrêts Brandsma (précité à la note 21, point 6) et du 17 septembre 1998, Harpegnies (C‑400/96, Rec. p. I‑5121).

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26 – Voir, en ce sens, arrêts ATRAL (précité à la note 14, point 62) et Canal Satélite Digital (précité à la note 24, points 12, 25 et 29).

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27 – Voir arrêt du 10 novembre 2005, Commission/Portugal (précité à la note 21, point 41).

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28 – Voir arrêts du 17 décembre 1981, Frans-Nederlandse Maatschappij voor Biologische Producten (272/80, Rec. p. 3277, point 14), et Brandsma (précité à la note 21, point 12).

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29 – Voir arrêts Canal Satélite Digital (précité à la note 24, point 36) et du 10 novembre 2005, Commission/Portugal (précité à la note 21, point 45).

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30 – Voir en ce sens, arrêt Canal Satélite Digital (précité à la note 24, point 41).

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31 – Voir arrêt ATRAL (précité à la note 14, point 67).

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32 – Voir, notamment, arrêts Commission/Belgique (précité à la note 15, point 16); du 15 mars 2001, Commission/France (précité à la note 15, point 26), et du 15 juillet 2004, Commission/Portugal (précité à la note 15, point 29).


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-254/05
Date de la décision : 08/02/2007
Type de recours : Recours en constatation de manquement - fondé

Analyses

Manquement d’État - Articles 28 CE et 30 CE - Restrictions quantitatives à l’importation - Mesures d’effet équivalent - Systèmes de détection automatique d’incendie par détecteur ponctuel - Exigence de conformité à une norme nationale - Procédure nationale d’agrément.

Libre circulation des marchandises

Mesures d'effet équivalent

Restrictions quantitatives


Parties
Demandeurs : Commission des Communautés européennes
Défendeurs : Royaume de Belgique.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mazák
Rapporteur ?: Silva de Lapuerta

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2007:85

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