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20/01/2005 | CJUE | N°C-296/03

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Glaxosmithkline SA contre État belge., 20/01/2005, C-296/03


Affaire C-296/03

Glaxosmithkline SA
contre

...

Affaire C-296/03

Glaxosmithkline SA
contre
État belge

(demande de décision préjudicielle, introduite par le Conseil d'État (Belgique))

«Directive 89/105/CEE – Médicaments à usage humain – Demande d'inscription sur une liste positive – Nature du délai pour répondre – Caractère impératif – Conséquences du dépassement du délai en cas d'annulation d'une décision de refus»

Conclusions de l'avocat général M. A. Tizzano, présentées le 30 septembre 2004

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 20 janvier 2005

Sommaire de l'arrêt

Rapprochement des législations – Produits pharmaceutiques – Directive 89/105 – Médicaments à usage humain – Demande d'inscription d'un médicament sur la liste des médicaments couverts par le système national d'assurance maladie – Caractère impératif du délai pour statuer – Annulation de la décision statuant sur la demande – Adoption d'une nouvelle décision – Admissibilité – Conditions – Respect du délai pour statuer
(Directive du Conseil 89/105, art. 6, point 1, al. 1) Le délai pour statuer sur une demande d’inscription d’un médicament sur la liste des médicaments couverts par le système national d’assurance maladie, fixé à l’article 6, point 1, premier alinéa, de la directive 89/105, concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d’application des systèmes nationaux d’assurance maladie, est un délai impératif que les
autorités nationales ne sont pas en droit de dépasser.

Il incombe aux États membres de déterminer si le dépassement de ce délai ne s’oppose pas à ce que les autorités compétentes adoptent formellement une nouvelle décision dès lors que la décision précédente a été annulée par voie juridictionnelle, une telle possibilité ne pouvant s’exercer que dans un délai raisonnable qui ne peut pas dépasser, en tout état de cause, le délai prévu audit article.

(cf. points 30, 39, disp. 1-2)

ARRÊT DE LA COUR (deuxième chambre)
20 janvier 2005(1)

«Directive 89/105/CEE – Médicaments à usage humain – Demande d'inscription sur une liste positive – Nature du délai pour répondre – Caractère impératif – Conséquences du dépassement du délai en cas d'annulation d'une décision de refus»

Dans l'affaire C-296/03,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l'article 234 CE, introduite par le Conseil d'État (Belgique), par décision du 27 juin 2003, parvenue à la Cour le 8 juillet 2003, dans la procédure

Glaxosmithkline SA

État belge,

contre

LA COUR (deuxième chambre),,

composée de M. C. W. A. Timmermans, président de chambre, M ^me R. Silva de Lapuerta (rapporteur), MM. C. Gulmann, P. Kūris et G. Arestis, juges,

avocat général: M. A. Tizzano,
greffier: M ^me M. Múgica Arzamendi, administrateur principal,

vu la procédure écrite et à la suite de l'audience du
14 juillet 2004,
considérant les observations présentées:


pour Glaxosmithkline SA, par M ^es S. Callens et S. Brillon, avocats,


pour le gouvernement belge, par M ^me E. Dominkovits, en qualité d'agent, assistée de M ^es L. Levi et L. Depré, avocats,


pour le gouvernement danois, par M. J. Molde, en qualité d'agent,


pour le gouvernement néerlandais, par M ^me H. G. Sevenster, en qualité d'agent,


pour le gouvernement finlandais, par M ^mes T. Pynnä et A. Guimaraes-Purokoski, en qualité d'agents,


pour le gouvernement norvégien, par M ^mes A. Enersen et F. Platou Amble, en qualité d'agents,


pour le Commission des Communautés européennes, par M. B. Stromsky, en qualité d'agent,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 30 septembre 2004,

rend le présent

Arrêt

1
La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 6, point 1, premier alinéa, de la directive 89/105/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d’application des systèmes nationaux d’assurance-maladie (JO 1989, L 40, p. 8, ci-après la «directive»).

2
Cette demande a été présentée dans le cadre d'un litige opposant la société Glaxosmithkline SA (ci-après «Glaxosmithkline») à l'État belge au sujet d'une décision de refus du ministre des Affaires sociales et des Pensions (ci-après le «ministre») d'admettre au remboursement, au titre de l'assurance obligatoire soins de santé et indemnités, la spécialité pharmaceutique Infanrix Hexa. Cette décision a été prise après l'annulation par le Conseil d'État d'une précédente décision du même
ministre. Glaxosmithkline demande son annulation au motif, essentiellement, que le ministre n’était plus compétent ratione temporis pour la prendre.

Le cadre juridique

La réglementation communautaire

3
L’article 6 de la directive prévoit:

«Les dispositions suivantes sont applicables lorsqu'un médicament n'est couvert par le système national d'assurance-maladie qu'après que les autorités compétentes ont décidé d'inclure le médicament en question dans une liste positive de médicaments couverts par le système national d'assurance-maladie.

1)
Les États membres veillent à ce qu'une décision relative à une demande d'inscription d'un médicament sur la liste des médicaments couverts par le système d'assurance-maladie soit adoptée et communiquée au demandeur dans un délai de quatre‑vingt-dix jours à compter de la réception de la demande présentée, conformément aux conditions fixées dans l'État membre concerné, par le titulaire d'une autorisation de commercialisation. Lorsqu'une demande au titre du présent article peut
être faite avant que les autorités compétentes n'aient accepté le prix devant être appliqué au produit conformément à l'article 2, ou lorsqu'une décision sur le prix d'un médicament et une décision sur son inclusion dans la liste des produits couverts par le système national d'assurance-maladie sont prises au terme d'une procédure administrative unique, le délai est prorogé de quatre‑vingt‑dix jours supplémentaires. Le demandeur fournit aux autorités compétentes les
renseignements suffisants. Si les renseignements communiqués à l'appui de la demande sont insuffisants, le délai est suspendu et les autorités compétentes notifient immédiatement au demandeur quels sont les renseignements complémentaires détaillés qui sont exigés.

Lorsqu'un État membre ne permet pas qu'une demande soit faite au titre du présent article avant que les autorités compétentes n'aient accepté le prix devant être appliqué au produit, conformément à l'article 2, il veille à ce que le délai global nécessité par les deux procédures n'excède pas cent quatre‑vingt jours. Ce délai peut être prorogé conformément à l'article 2 ou suspendu selon le premier alinéa du présent point.

2)
Toute décision de ne pas inscrire un médicament sur la liste des produits couverts par le système d'assurance-maladie comporte un exposé des motifs fondé sur des critères objectifs et vérifiables, y compris, si nécessaire, les avis ou recommandations des experts sur lesquels les décisions s'appuient. En outre, le demandeur est informé des moyens de recours dont il dispose selon la législation en vigueur, ainsi que des délais dans lesquels ces recours peuvent être formés.»

La réglementation nationale

4
L'inscription sur la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables était régie, à la date de l'introduction de la demande d'admission litigieuse, par la loi coordonnée du 14 juillet 1994 relative à l'assurance soins de santé et indemnités, dans sa version résultant de la loi du 10 août 2001 portant des mesures en matière de soins de santé, entrée en vigueur le 1 ^er janvier 2002 et transposant la directive en droit belge. L’arrêté royal du 21 décembre 2001 fixant les procédures, délais
et conditions en matière d’interventions de l’assurance obligatoire soins de santé et indemnités dans le coût des spécialités pharmaceutiques, complète ce cadre juridique national.

5
L’article 35 bis, paragraphe 3, de la loi coordonnée du 14 juillet 1994, dispose:

«[...]

À défaut d’une décision dans les 180 jours, à compter de la date communiquée par le secrétariat de la [commission de remboursement des médicaments], à laquelle le dossier a été réceptionné, la décision [relative à la demande d’inscription sur la liste des spécialités pharmaceutiques remboursables] est considérée comme positive quant à la base de remboursement des médicaments, aux conditions de remboursement et à la catégorie de remboursement proposée par le demandeur [...]»

6
L’article 22, paragraphe 3, de la loi du 10 août 2001 dispose:

«Les demandes en vue d’obtenir une intervention, qui ont été introduites valablement avant le 1 ^er janvier 2002, et dont le dossier a déjà été jugé complet, continuent d’être traitées selon les règles en vigueur avant le 1 ^er janvier 2002, étant entendu que ces demandes doivent être examinées dans un délai de 90 jours, à dater de la communication du prix, comme fixé par le ministre qui a les Affaires économiques dans ses attributions, ou à dater de la communication de l’avis de la
commission de transparence, si celle-ci est faite ultérieurement.

Pour les demandes pour lesquelles le demandeur aura déjà communiqué le 1 ^er janvier 2002 le prix fixé par le ministre qui a les Affaires économiques dans ses attributions, ainsi que l’avis de la commission de transparence, le délai de 90 jours est compté à partir du 1 ^er janvier 2002.

En l’absence d’une décision dans ces délais de 90 jours visés aux alinéas 1 ^er et 2, le dossier est transmis à la [commission de remboursement des médicaments].

Le Roi précise les modalités concernant cette transmission, ainsi que la procédure à suivre.»

7
En ce qui concerne les demandes visées à l’article 22, paragraphe 3, de la loi du 10 août 2001, l’article 100, paragraphe 3, de l’arrêté royal du 21 décembre 2001 dispose:

«[...]

Si aucune décision n’est prise pour ces dossiers dans le délai de 90 jours visé à l’article 22, paragraphe 3, de la loi du 10 août 2001 […], le président du [conseil technique des spécialités pharmaceutiques] les transmet au secrétariat de la [commission de remboursement des médicaments].

[…]

À défaut de décision du ministre dans un délai de 90 jours à compter de la date de la transmission, le fonctionnaire délégué en informe immédiatement les demandeurs concernés. Cette notification est assortie de la proposition de modification de la liste la plus récente du demandeur et de l’indication selon laquelle la liste sera adaptée, avec effet le premier jour du mois qui suit l’expiration d’un délai de 10 jours qui prend cours après sa publication au [ Moniteur belge ]».

Le litige au principal et la question préjudicielle

8
Le 3 décembre 2001, Glaxosmithkline a demandé à l’Institut national d’assurance maladie-invalidité (ci-après l’«INAMI») «l’admission au remboursement de la spécialité pharmaceutique Infanrix Hexa, vaccin diphtérique, tétanique, coquelucheux acellulaire, de l’hépatite B recombinant, poliomyélitique inactivé et de l’Haemophilius influenzae de type B conjugué absorbé […]».

9
Glaxosmithkline a complété son dossier avant le 1 ^er janvier 2002. Elle a transmis le 22 janvier suivant au conseil technique des spécialités pharmaceutiques (ci‑après le «CTSP») une note précisant, notamment, qu’elle demandait le remboursement de ce vaccin en catégorie A (remboursement intégral).

10
Le 7 mai 2002, le CTSP a fait savoir à Glaxosmithkline que, n’ayant pas émis de proposition définitive dans le délai qui lui était imparti par la réglementation nationale, il avait transmis la demande de remboursement en cause à la commission de remboursement des médicaments (ci-après la «CRM»), laquelle avait émis une proposition provisoire motivée le jour de l’envoi de ce courrier, le 7 mai 2002, favorable au remboursement dudit vaccin selon le critère «B‑nouveau», sous certaines
conditions.

11
Le 21 mai 2002, après que Glaxosmithkline se fut exprimée sur cette proposition, la CRM a émis une proposition définitive motivée entérinant sa proposition provisoire.

12
Le 29 mai 2002, la CRM a notifié cette proposition à Glaxosmithkline. Elle a précisé que cette proposition définitive avait été transmise au ministre et que celui-ci prendrait une décision motivée dans un délai de 90 jours à compter du transfert de ce dossier du CTSP à la CRM.

13
Par lettre du 27 juin 2002, le ministre a informé Glaxosmithkline de sa décision de refus d'inscrire le vaccin Infanrix Hexa sur la liste des médicaments remboursables, pour les motifs suivants:

«[l]es composants de ce vaccin sont déjà remboursés individuellement. La conférence interministérielle santé publique s’est prononcée en faveur d’une politique uniforme de vaccination de base à établir entre les communautés et le gouvernement fédéral. Afin de ne pas influencer les négociations futures, je ne réponds pas positivement à votre demande […]»

14
Glaxosmithkline a introduit devant le Conseil d’État, à l’encontre de cette décision, un recours en annulation et une demande de suspension.

15
Par arrêt du 11 décembre 2002, le Conseil d’État a annulé la décision attaquée. Il a estimé en substance:


d’une part, que le ministre ne pouvait s’écarter de la proposition définitive de la CRM que sur la base d’éléments sociaux ou budgétaires, ou sur la base d’une combinaison de ces deux éléments,


d’autre part, que les motifs de la décision attaquée, pour partie, étaient matériellement inexacts et, pour le reste, n’étaient pas constitutifs d’une justification suffisante tirée d’arguments sociaux ou budgétaires.

16
Par lettre du 7 janvier 2003, Glaxosmithkline a demandé à l'INAMI qu’il soit procédé à l’inscription du vaccin Infanrix Hexa sur la liste des spécialités pharmaceutiques conformément à la proposition d’admission la plus récente. En effet, selon Glaxosmithkline, aucune décision régulière ne pouvait plus être prise au sujet de la demande d’admission au remboursement de ce vaccin, les délais fixés par le droit national pour statuer sur la demande de remboursement ayant expiré et le droit
national prévoyant que, en pareille situation, la demande d’inscription devait être automatiquement accueillie.

17
Le 17 janvier 2003, le ministre a fait savoir à Glaxosmithkline qu’il refusait l’inscription du vaccin Infanrix Hexa sur la liste des médicaments remboursables pour des motifs sociaux ou budgétaires, dont il précisait la teneur. Il estimait en outre, contrairement à Glaxosmithkline, que l’arrêt du Conseil d’État ouvrait un nouveau délai de 30 jours à compter de la notification de cet arrêt pour statuer sur la demande, le ministre n’étant pas tenu de procéder à l’inscription automatique de la
spécialité pharmaceutique sur la liste positive des médicaments remboursés.

18
Glaxosmithkline a saisi le Conseil d'État en vue d'obtenir l’annulation de cette décision du 17 janvier 2003, au motif, essentiellement, que le ministre n’était plus compétent ratione temporis pour prendre une telle décision.

19
Dans ces circonstances, le Conseil d'État (sixième chambre) a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante:

«Le délai de quatre-vingt-dix jours, de nature à être prorogé de quatre‑vingt-dix jours supplémentaires, mentionné à l’article 6, point 1, premier alinéa, de la directive 89/105/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d’application des systèmes d’assurance‑maladie, doit-il être considéré comme un délai de rigueur empêchant, dès son échéance, toute décision, même
en cas d’annulation d’une première décision prise en temps utile?»

Sur la question préjudicielle

Sur la recevabilité

20
À titre liminaire, Glaxosmithkline conteste la recevabilité de la demande de décision préjudicielle au motif que cette question ne serait pas pertinente pour la solution du litige au principal. Cette solution résulterait déjà clairement de l’article 35 bis, paragraphe 3, de la loi coordonnée du 14 juillet 1994 qui, non seulement, prévoirait un délai impératif, mais préciserait également que la violation de celui-ci entraîne l’inscription de plein droit du médicament sur la liste des produits
remboursables. Il ne serait donc pas nécessaire de rechercher dans la directive une solution qui, en réalité, ressortirait déjà clairement du droit national.

21
Cette argumentation ne saurait, toutefois, être accueillie.

22
Selon une jurisprudence constante, la Cour n’est pas compétente pour répondre à une question préjudicielle soulevée par un juge national dans les cas où il apparaît de manière manifeste que l’interprétation ou l’appréciation de la validité d’une règle communautaire, demandées par la juridiction nationale, n’ont aucun rapport avec la réalité ou l’objet du litige au principal ou lorsque le problème est de nature hypothétique ou encore lorsque la Cour ne dispose pas des éléments de fait et de
droit nécessaires pour répondre de façon utile aux questions qui lui sont posées (voir arrêts du 13 mars 2001, PreussenElektra, C-379/98, Rec. p. I-2099, point 39, et du 22 janvier 2002, Canal Satélite Digital, C‑390/99, Rec. p. I-607, point 19).

23
Ces conditions ne sont pas réunies en l’espèce. En effet, dans cette affaire, l’objet de l’instance au principal porte sur la signification à donner au délai de procédure prévu à l’article 6 de la directive, transposée dans l’ordre juridique belge par la loi coordonnée du 14 juillet 1994. L’interprétation de la disposition communautaire a donc clairement un rapport avec l’objet du litige au principal.

24
Il s'ensuit que la demande de décision préjudicielle est recevable.

Sur le fond

25
En vue de répondre utilement à cette question, il convient de déterminer, en premier lieu, le caractère du délai fixé à l'article 6, point 1, premier alinéa, de la directive et, en second lieu, les conséquences prévues par la directive en cas de dépassement de ce délai et, notamment, la question de savoir si ce dépassement empêche l'autorité compétente d'adopter une nouvelle décision lorsqu'elle a adopté, en temps utile, une première décision et que celle-ci a ensuite été annulée par voie
juridictionnelle.

Sur le caractère indicatif ou impératif du délai visé à l'article 6, point 1, premier alinéa, de la directive

26
S'agissant de la question de savoir si le délai figurant à l'article 6, point 1, premier alinéa, de la directive revêt un caractère indicatif ou impératif, il convient de relever, ainsi que M. l'avocat général l'a fait au point 36 de ses conclusions, qu'il ressort tant du libellé que de l'économie de cette disposition que le délai en cause doit être considéré comme ayant un caractère impératif.

27
En effet, d'une part, l’usage du verbe «veiller» dans sa forme indicative et la définition précise des modalités de calcul du délai en cause montrent que les autorités compétentes sont tenues de respecter le délai imparti lors de l'adoption de leurs décisions.

28
D'autre part, l'article 6, point 1, premier alinéa, de la directive détermine également avec précision les conditions de prorogation et de suspension du délai en cause. Or, l'indication précise de ces conditions serait dépourvue d'effet utile si les États membres étaient libres de ne pas respecter ledit délai.

29
Cette interprétation de l'article 6, point 1, premier alinéa, de la directive est corroborée par l’objectif de celle-ci, qui, ainsi qu'il ressort de son sixième considérant, est de permettre aux intéressés de s’assurer que l’inscription administrative de médicaments répond à des critères objectifs et qu’aucune discrimination n’est opérée entre les médicaments nationaux et ceux provenant d’autres États membres (voir arrêt du 12 juin 2003, Commission/Finlande, C‑229/00, Rec. p. I‑5727,
point 39).

30
Eu égard à ces considérations, il convient donc de répondre à la première partie de la question préjudicielle que le délai fixé à l’article 6, point 1, premier alinéa, de la directive est un délai impératif que les autorités nationales ne sont pas en droit de dépasser.

Sur les conséquences du dépassement du délai en cas d’annulation d'une précédente décision adoptée en temps utile

31
Considérant le caractère impératif du délai prévu à l'article 6, point 1, de la directive, la question se pose de savoir si son dépassement fait obstacle à l'adoption, par les autorités nationales, d'une nouvelle décision confirmant une décision précédente prise dans le délai imparti mais annulée par voie juridictionnelle.

32
À cet égard, il y a lieu de rappeler, d'une part, que l'article 6, point 1, de la directive fixe de manière claire et précise le délai d'adoption et de communication de la décision relative à la demande d'inscription des médicaments sur la liste des médicaments couverts par le système d'assurance-maladie et précise les cas de suspension ou de prorogation. D'autre part, ledit article précise dans son point 2 l'obligation de motivation de la décision et indique qu'il appartient à la
législation nationale de déterminer les moyens de recours et les délais dont dispose le demandeur.

33
Toutefois, la directive ne règle pas la situation dans laquelle une nouvelle décision doit être prise à la suite de l'annulation par voie juridictionnelle d'une précédente décision adoptée dans le délai prescrit.

34
Tous ceux qui ont soumis des observations dans la présente affaire ont soutenu qu'une telle situation serait régie par le droit national. Cependant, les positions divergent sur les modalités d'adoption d'une telle nouvelle décision. Pour la partie requérante au principal, l'annulation d'une décision par voie juridictionnelle interdit l'adoption de toute nouvelle décision et constitue donc une acceptation implicite de la demande d'inscription sur la liste des médicaments remboursables. En
revanche, pour les gouvernements belge et finlandais, si les conséquences du dépassement du délai sont régies par le droit national, rien ne s'oppose à l'ouverture d'un nouveau délai légal permettant aux autorités compétentes de se prononcer sur la demande d'inscription sur la liste des médicaments remboursables. À son tour, la Commission considère qu'il appartient aux États membres de réglementer les recours contre les décisions en cause et les conséquences des décisions qui en prononcent
l’annulation.

35
À cet égard, il peut être déduit tant des termes que des objectifs poursuivis par la directive que celle-ci vise à garantir une protection juridictionnelle effective. Il en découle qu'il convient de garantir à toute personne dont la demande initiale d'inscription a été rejetée par une décision qui a ensuite été annulée le droit à ce qu'une nouvelle décision relative à cette demande d'inscription soit prise, qu'il s'agisse d'une décision implicite d'inscription due à la simple expiration du
délai initial ou de l'adoption formelle d'une nouvelle décision.

36
Dans ce dernier cas, il faut alors déterminer le délai dans lequel une telle décision doit être adoptée.

37
Bien que la directive ne règle pas cette question, il découle, toutefois, des exigences précitées d'une protection juridictionnelle effective que le droit communautaire impose une limite à la liberté des États membres en la matière, en ce sens que la nouvelle décision ne saurait intervenir dans un délai indéterminé, mais doit être prise dans un délai raisonnable ne dépassant pas, en toute hypothèse, le délai prévu à l’article 6 de ladite directive.

38
En l’absence de cette limite, l’exercice du droit du demandeur à obtenir une décision motivée dans le délai impératif de 90 jours, susceptible d’être prorogé de 90 jours supplémentaires, serait excessivement difficile (voir arrêts du 24 septembre 2002, Grundig Italiana, C-255/00, Rec. p. I-8003, point 33, et du 9 décembre 2003, Commission/Italie, C‑129/00, non encore publié au Recueil, point 25). En effet, les États membres pourraient imposer pour l’exécution de la décision d'annulation un
délai plus long que celui que la directive prévoit pour la clôture de la procédure administrative. Dans ce cas, cette décision d’annulation ne protégerait pas le droit du demandeur.

39
Il convient donc de répondre à la seconde partie de la question posée qu'il incombe aux États membres de déterminer si le dépassement du délai fixé à l'article 6, point 1, premier alinéa, de la directive ne s'oppose pas à ce que les autorités compétentes adoptent formellement une nouvelle décision dès lors que la décision précédente a été annulée par voie juridictionnelle, une telle possibilité ne pouvant s'exercer que dans un délai raisonnable qui ne peut pas dépasser, en tout état de
cause, le délai prévu audit article.

Sur les dépens

40
La procédure revêtant, à l'égard des parties au principal, le caractère d'un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l'objet d'un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (deuxième chambre) dit pour droit:

1)
Le délai fixé à l’article 6, point 1, premier alinéa, de la directive 89/105/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, concernant la transparence des mesures régissant la fixation des prix des médicaments à usage humain et leur inclusion dans le champ d'application des systèmes nationaux d'assurance-maladie, est un délai impératif que les autorités nationales ne sont pas en droit de dépasser.

2)
Il incombe aux États membres de déterminer si le dépassement du délai fixé à l’article 6, point 1, premier alinéa, de la directive 89/105 ne s'oppose pas à ce que les autorités compétentes adoptent formellement une nouvelle décision dès lors que la décision précédente a été annulée par voie juridictionnelle, une telle possibilité ne pouvant s'exercer que dans un délai raisonnable qui ne peut pas dépasser, en tout état de cause, le délai prévu audit article.

Signatures

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1 –
Langue de procédure: le français.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : C-296/03
Date de la décision : 20/01/2005
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Conseil d'État - Belgique.

Directive 89/105/CEE - Médicaments à usage humain - Demande d'inscription sur une liste positive - Nature du délai pour répondre - Caractère impératif - Conséquences du dépassement du délai en cas d'annulation d'une décision de refus.

Rapprochement des législations


Parties
Demandeurs : Glaxosmithkline SA
Défendeurs : État belge.

Composition du Tribunal
Avocat général : Tizzano
Rapporteur ?: Silva de Lapuerta

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:2005:42

Source

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