Avis juridique important
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62000J0103
Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 30 janvier 2002. - Commission des Communautés européennes contre République hellénique. - Manquement d'Etat - Directive 92/43/CEE - Conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages - Protection des espèces. - Affaire C-103/00.
Recueil de jurisprudence 2002 page I-01147
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif
Mots clés
1. Recours en manquement - Examen du bien-fondé par la Cour - Situation à prendre en considération - Situation à l'expiration du délai fixé par l'avis motivé
(Art. 226 CE )
2. Environnement - Conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages - Directive 92/43 - Protection stricte des espèces animales figurant à l'annexe IV, point a) - Mesures nécessaires pour instaurer un système de protection
(Directive du Conseil 92/43, art. 12, § 1, b) et d), et annexe IV, point a))
Parties
Dans l'affaire C-103/00,
Commission des Communautés européennes, représentée par MM. R. Wainwright et P. Panayotopoulos, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie requérante,
contre
République hellénique, représentée par Mmes A. Samoni-Rantou et P. Skandalou, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg,
partie défenderesse,
ayant pour objet de faire constater que, en ne prenant pas et, subsidiairement, en ne communiquant pas à la Commission, dans le délai prescrit, les mesures nécessaires pour instaurer et mettre en oeuvre un système efficace de protection stricte de la tortue marine Caretta caretta à Zante (Grèce), afin d'éviter toute perturbation de cette espèce pendant la période de reproduction ainsi que toute activité de nature à endommager ou à détruire ses aires de reproduction, la République hellénique a manqué
aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CE et de l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d), de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7),
LA COUR
(sixième chambre),
composée de Mme F. Macken, président de chambre, MM. C. Gulmann (rapporteur), J.-P. Puissochet, R. Schintgen et J. N. Cunha Rodrigues, juges,
avocat général: M. P. Léger,
greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,
vu le rapport d'audience,
ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l'audience du 12 juillet 2001,
ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 25 octobre 2001,
rend le présent
Arrêt
Motifs de l'arrêt
1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 17 mars 2000, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l'article 226 CE, un recours visant à faire constater que, en ne prenant pas et, subsidiairement, en ne lui communiquant pas, dans le délai prescrit, les mesures nécessaires pour instaurer et mettre en oeuvre un système efficace de protection stricte de la tortue marine Caretta caretta à Zante (Grèce), afin d'éviter toute perturbation de cette espèce pendant la période de
reproduction ainsi que toute activité de nature à endommager ou à détruire ses aires de reproduction, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu du traité CE et de l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d), de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages (JO L 206, p. 7, ci-après la «directive»).
Le cadre réglementaire
2 Selon son article 2, paragraphe 1, la directive a pour objet de contribuer à assurer la biodiversité par la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages sur le territoire européen des États membres où le traité s'applique.
3 La directive précise, à son article 2, paragraphe 2, que les mesures prises en vertu de celle-ci visent à assurer le maintien ou le rétablissement, dans un état de conservation favorable, des habitats naturels et des espèces de la faune et de la flore sauvages d'intérêt communautaire.
4 L'article 12, paragraphe 1, de la directive dispose:
«Les États membres prennent les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l'annexe IV, point a), dans leur aire de répartition naturelle, interdisant:
a) toute forme de capture ou de mise à mort intentionnelle de spécimens de ces espèces dans la nature;
b) la perturbation intentionnelle de ces espèces notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d'hibernation et de migration;
c) la destruction ou le ramassage intentionnels des oeufs dans la nature;
d) la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos.»
5 La tortue marine Caretta caretta fait partie des espèces visées à l'annexe IV, point a), de la directive.
6 Selon l'article 23, paragraphe 1, de la directive, les États membres mettent en vigueur les dispositions législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer à cette directive dans un délai de deux ans à compter de sa notification et ils en informent immédiatement la Commission. Cette directive ayant été notifiée en juin 1992, ledit délai a expiré en juin 1994.
La procédure précontentieuse
7 Des organisations non gouvernementales ont dénoncé la détérioration des conditions de conservation de la tortue marine Caretta caretta à Zante, île dénommée «Zákynthos» en grec. Aussi, la Commission a, par lettre du 3 juillet 1998, demandé aux autorités helléniques des informations quant aux mesures de protection de ladite espèce dans cette île.
8 Les 16 et 17 juillet 1998, les services de la Commission ont effectué une mission à Zante afin de vérifier si des mesures de protection de la tortue marine Caretta caretta avaient été effectivement mises en oeuvre. Au cours de cette mission, les représentants de la Commission ont visité les plages de Laganas, de Kalamaki, de Sekania, de Daphni et de Gerakas, qui constituent des lieux de ponte de l'espèce. Ils ont constaté l'insuffisance de telles mesures de protection dans tous les lieux visités,
et notamment:
- l'absence de surveillance et de signalisation des plages;
- la présence de pédalos et de bateaux dans la zone maritime où leur circulation est interdite;
- la présence d'un nombre important de parasols et de chaises longues sur différentes plages (Kalamaki, Gerakas, Daphni);
- la présence de constructions illégales et de nouvelles interventions sur la plage de Daphni.
9 En réponse à la lettre de la Commission du 3 juillet 1998, les autorités helléniques ont, par lettre du 22 juillet 1998, fait état notamment de règlements portuaires adoptés au cours de la première moitié des années 90, ainsi que de la mise en oeuvre de programmes de surveillance des tortues marines et de campagnes d'information et de sensibilisation du public.
10 Considérant que la République hellénique n'avait pas pris les mesures nécessaires pour instaurer un système efficace de protection de la tortue marine Caretta caretta à Zante et qu'elle avait, par conséquent, manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d), de la directive, la Commission a, par lettre du 2 décembre 1998, mis le gouvernement hellénique en demeure de présenter ses observations à cet égard.
11 Par lettre du 17 mars 1999, les autorités helléniques ont répondu qu'un projet de décret présidentiel relatif à la création du parc maritime de Zante avait été transmis au Conseil d'État hellénique pour être finalisé. Elles ont également signalé à la Commission qu'elles avaient constitué un comité chargé de rédiger un projet de décret présidentiel spécifique, à caractère général, contenant des dispositions financières pour l'ensemble des régions naturelles protégées de Grèce. Par ailleurs, elles
ont annoncé leur intention de rédiger un troisième décret présidentiel concernant les mesures compensatoires pour le parc maritime de Zante. En outre, les autorités helléniques ont, par cette même lettre, annoncé une série de mesures, telles que, en particulier, la démolition de toutes les constructions illégales sur les plages, l'élaboration d'un cadastre national, l'interdiction d'accès des véhicules aux plages, le remplacement de l'éclairage existant qui perturbe les tortues marines et
l'enlèvement des chaises longues et des parasols. Elles ont aussi annoncé la signature d'un contrat pour la construction d'une vedette rapide destinée à la police portuaire de Zante, en vue d'assurer le respect des mesures de protection prévues.
12 Considérant que les autorités helléniques n'avaient toujours pas adopté les mesures nécessaires pour instaurer un système efficace de protection de la tortue marine Caretta caretta à Zante en créant le cadre institutionnel nécessaire à cette fin et en prenant des mesures sur le terrain afin de protéger ladite espèce, la Commission a, par lettre du 15 juin 1999, adressé à la République hellénique un avis motivé dans lequel elle réitérait les griefs contenus dans sa lettre de mise en demeure et
invitait cet État membre à se conformer à l'avis motivé dans un délai de deux mois à compter de sa notification.
13 Les 24 et 25 août 1999, les services de la Commission ont effectué une seconde mission à Zante, au cours de laquelle ils ont à nouveau inspecté les principales plages de reproduction de la tortue marine Caretta caretta. Ils ont constaté, en particulier, un certain progrès par rapport à la situation qui prévalait lors de leur mission précédente, notamment la présence de gardiens et de panneaux de signalisation sur les plages, la publication et la distribution de brochures d'information et la mise
en service d'une vedette rapide. En revanche, ils ont constaté:
- la présence de pédalos et de petits bateaux dans la zone maritime A à Gerakas et à Daphni;
- le mouillage de pédalos et de petits bateaux dans la zone maritime B à Kalamaki;
- la présence de parasols et de chaises longues sur différentes plages (Gerakas, Daphni, Kalamaki, Laganas), en nombre nettement supérieur à celui permis par le projet de décret présidentiel relatif à la création du parc maritime de Zante;
- l'augmentation du nombre de constructions illégales sur la plage de Daphni;
- la circulation de vélomoteurs sur la plage de sable à l'est de Laganas;
- l'insuffisance des mesures de surveillance sur certaines plages.
14 Le 29 octobre 1999, les autorités helléniques ont répondu à l'avis motivé en informant la Commission qu'un budget de 30 millions de GRD avait été approuvé, au titre de l'été 1999, pour un programme d'information du public ainsi que pour la surveillance, le nettoyage et la protection des plages de sable du biotope du golfe de Laganas, à Zante. Ces autorités ont également indiqué que les parasols avaient été enlevés de la plage de Daphni et que leur nombre avait été considérablement réduit sur la
plage de Gerakas, de manière à ne pas excéder la limite fixée pour cette plage par le projet de décret présidentiel relatif à la création du parc maritime de Zante.
15 N'ayant reçu aucun autre élément d'information lui permettant de conclure que la République hellénique s'était conformée à ses obligations résultant de la directive, la Commission a décidé d'introduire le présent recours.
Sur le fond
16 La Commission indique que la tortue marine Caretta caretta ne pond que tous les 2 ou 3 ans. En Grèce, la période de ponte commencerait à la fin du mois de mai et s'achèverait à la fin du mois d'août. La tortue sortirait de la mer pendant la nuit et se dirigerait vers l'endroit le plus sec de la plage, où elle creuserait un trou de 40 à 60 centimètres pour y pondre en moyenne 120 oeufs. La Commission expose que, 2 mois plus tard, les oeufs éclosent et que les jeunes tortues sortent alors du sable
et courent vers la mer. Celles-ci seraient vulnérables et un grand nombre d'entre elles mourraient.
17 La Commission met en avant le fait que le golfe de Laganas, à Zante, est une région essentielle, voire la plus importante de la Méditerranée, pour la reproduction de la tortue marine Caretta caretta. Eu égard à l'intérêt du golfe de Laganas, les autorités helléniques auraient proposé de classer cette région parmi les sites d'importance communautaire pour le réseau Natura 2000.
18 À titre principal, la Commission fait grief à la République hellénique d'avoir violé les obligations résultant pour elle du traité et de l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d), de la directive, d'une part, en n'adoptant pas un cadre juridique de nature à assurer une protection stricte de la tortue marine Caretta caretta contre toute perturbation intentionnelle pendant la période de reproduction ainsi que contre toute détérioration ou destruction de ses aires de reproduction et, d'autre part,
en ne prenant pas des mesures concrètes pour éviter ces nuisances.
Sur le cadre juridique de protection de l'espèce Caretta caretta
19 Selon la Commission, le gouvernement hellénique n'a pas adopté dans le délai requis un cadre institutionnel suffisant pour assurer une protection efficace et à long terme de la tortue marine Caretta caretta.
20 Le gouvernement hellénique fait valoir que, en arrêtant, le 22 décembre 1999, un décret présidentiel qui qualifie de parc maritime national les régions terrestres et maritimes du golfe de Laganas et les îles de Strofada et de parc régional la zone côtière des communes de Zante et de Laganas (FEK D'906/22.12.1999, ci-après le «décret de 1999»), il a instauré un système de protection stricte de la tortue marine Caretta caretta.
21 Ce gouvernement soutient que, au cours des 20 dernières années, des mesures ont été progressivement arrêtées pour assurer la protection de cette espèce animale dans l'île de Zante. Il cite différents textes législatifs, réglementaires et administratifs adoptés à cette fin à partir de 1980. Le décret de 1999 ne constituerait que l'aboutissement le plus récent du processus de mise en oeuvre progressive d'un système de protection stricte de cette espèce.
22 L'absence de fondement de l'action de la Commission ressortirait également des données disponibles sur la nidification de la tortue marine Caretta caretta dans le golfe de Laganas au cours des 15 dernières années. En effet, il ne serait pas démontré que le nombre de nids y diminue.
23 Il convient de rappeler qu'il est de jurisprudence constante que l'existence d'un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l'État membre telle qu'elle se présentait au terme du délai fixé dans l'avis motivé et que les changements intervenus par la suite ne sauraient être pris en compte par la Cour (voir, notamment, arrêts du 18 mars 1999, Commission/France, C-166/97, Rec. p. I-1719, point 18, et du 11 septembre 2001, Commission/France, C-220/99, non encore publié au Recueil,
point 33).
24 Or, force est de constater que le décret de 1999, auquel le gouvernement hellénique a consacré une partie importante de ses mémoires, a été adopté après l'expiration du délai de deux mois imparti dans l'avis motivé.
25 Dès lors, il n'y a pas lieu d'examiner si le système de protection de la tortue marine Caretta caretta prévu par ledit décret satisfait aux exigences de protection définies à l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d), de la directive.
26 S'agissant des autres mesures visant, selon le gouvernement hellénique, à mettre en place un système efficace de protection de cette espèce, il importe de rappeler que l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d), de la directive impose l'adoption des mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte des espèces animales figurant à l'annexe IV, point a), de cette directive, dans leur aire de répartition naturelle, interdisant, d'une part, la perturbation intentionnelle desdites
espèces notamment durant la période de reproduction, de dépendance, d'hibernation et de migration, et, d'autre part, la détérioration ou la destruction des sites de reproduction ou des aires de repos.
27 À cet égard, premièrement, il est constant que le golfe de Laganas est une région essentielle pour la reproduction de l'espèce protégée Caretta caretta.
28 Deuxièmement, selon les constatations effectuées par le Conseil d'État hellénique dans un rapport de 1999 annexé au projet de décret présidentiel portant création du parc maritime de Zante, les dispositions en vigueur à l'époque ne permettaient pas d'assurer, dans la mesure nécessaire, la protection efficace des zones maritimes et terrestres du golfe de Laganas. En particulier, compte tenu des pressions et de l'érosion que subissaient les plages de reproduction de Daphni, de Gerakas et de
Kalamaki en raison de la construction de routes d'accès à celles-ci, ainsi que compte tenu du bruit dû aux activités humaines, le Conseil d'État préconisait l'interdiction non seulement de l'ouverture de nouvelles voies d'accès à ces plages, mais également de la création d'infrastructures telles que des kiosques, des tentes ou des plages de stationnement. Le gouvernement hellénique ne conteste pas ces considérations.
29 Troisièmement, il échet de relever que, pendant la phase précontentieuse, le gouvernement hellénique a particulièrement insisté sur le fait que l'adoption d'un décret portant création d'un parc maritime à Zante mettrait en vigueur un système de protection stricte de la tortue marine Caretta caretta. Dans sa défense, ce gouvernement a fait valoir que, s'agissant de ladite espèce, le décret de 1999 réalisait les objectifs de protection définis à l'article 12 de la directive. Dans sa duplique, le
gouvernement hellénique a, pour la première fois, soutenu que les mesures nécessaires pour instaurer un système de protection stricte de cette espèce, conformément à l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d), de la directive, avaient été prises avant le 14 août 1999, date d'expiration du délai imparti par la Commission dans l'avis motivé. À l'audience, ce gouvernement a cependant reconnu que le décret de 1999 avait instauré un système créant une protection plus stricte que celle résultant du système
de protection en vigueur précédemment. Il convient en outre de relever que, invité par la Cour à préciser, en reproduisant leur libellé, les dispositions spécifiques de son ordre juridique en vigueur au 14 août 1999, dont il estime qu'elles sont de nature à remplir les exigences imposées par l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d), de la directive, le gouvernement hellénique s'est contenté d'énumérer une série d'actes législatifs, réglementaires et administratifs, sans indiquer aucune disposition
spécifique susceptible de remplir lesdites exigences.
30 Compte tenu de ce qui précède, force est de constater que la République hellénique n'a pas adopté, dans le délai prescrit, un cadre juridique de nature à assurer une protection stricte de la tortue marine Caretta caretta contre toute perturbation intentionnelle pendant la période de reproduction ainsi que contre toute détérioration ou destruction de ses aires de reproduction. Le recours de la Commission doit donc être accueilli sur ce point.
31 La circonstance qu'il n'apparaît pas que le nombre de nids de cette espèce ait diminué au cours des 15 dernières années ne saurait, par elle-même, remettre en cause cette constatation.
Sur les mesures concrètes de protection de l'espèce Caretta caretta
32 La Commission rappelle que, lors d'une visite, fin août 1999, des plages de reproduction des tortues marines Caretta caretta situées sur l'île de Zante, ses services ont constaté, notamment, la circulation de vélomoteurs sur la plage de sable à l'est de Laganas, la présence de pédalos et de petits bateaux dans la zone maritime de Gerakas et de Daphni ainsi que la présence de constructions illégales sur la plage de Daphni.
33 Le gouvernement hellénique ne conteste pas l'exactitude de ces constatations.
34 Il est constant, d'abord, que la circulation de vélomoteurs sur une plage de reproduction de la tortue Caretta caretta est, notamment en raison des nuisances sonores, de nature à perturber cette espèce durant la ponte, l'incubation et l'éclosion des oeufs ainsi que durant le déplacement vers la mer des jeunes tortues. Ensuite, il est avéré que la présence d'embarcations à proximité des plages de reproduction constitue une source de danger pour la vie et l'intégrité physique des spécimens.
35 Il ressort du dossier que, à l'époque des faits constatés par les services de la Commission, la circulation de vélomoteurs sur les plages de reproduction était interdite et que des panneaux signalant la présence de nids de tortues sur ces plages avaient été plantés. Quant à la zone maritime de Gerakas et de Daphni, elle avait été classée comme zone de protection absolue et avait fait l'objet d'une signalisation spéciale.
36 Il s'ensuit que la circulation de vélomoteurs sur la plage de sable à l'est de Laganas et la présence de pédalos et de petits bateaux dans la zone maritime de Gerakas et de Daphni constituent des actes de perturbation intentionnelle de l'espèce en cause durant la période de reproduction, au sens de l'article 12, paragraphe 1, sous b), de la directive.
37 De plus, il s'agit d'actes non isolés. En effet, quant à la circulation de vélomoteurs sur les plages de reproduction, cela ressort de l'affirmation du gouvernement hellénique selon laquelle la surveillance nocturne de la partie orientale de la plage de Laganas était, à l'époque des faits, particulièrement difficile à assurer, compte tenu de son étendue, du grand nombre de points d'accès et du petit nombre de gardiens. En ce qui concerne la présence d'embarcations dans la zone maritime concernée,
il importe de souligner qu'elle a été constatée à l'occasion des deux visites effectuées à Zante par les services de la Commission, ainsi qu'il a été exposé aux points 8 et 13 du présent arrêt.
38 Enfin, il n'est pas douteux que la présence de constructions sur une plage de reproduction telle que celle de Daphni est de nature à entraîner une détérioration ou une destruction du site de reproduction au sens de l'article 12, paragraphe 1, sous d), de la directive.
39 Dès lors, il y a lieu de constater que la République hellénique n'a pas pris, dans le délai prescrit, toutes les mesures concrètes nécessaires pour éviter, d'une part, la perturbation intentionnelle de la tortue marine Caretta caretta pendant la période de reproduction et, d'autre part, la détérioration ou la destruction de ses aires de reproduction. Dès lors, le recours de la Commission doit également être accueilli sur ce point.
40 Au vu de ce qui précède, il convient de constater que, en ne prenant pas, dans le délai prescrit, les mesures nécessaires pour instaurer et mettre en oeuvre un système efficace de protection stricte de la tortue marine Caretta caretta à Zante, afin d'éviter toute perturbation intentionnelle de cette espèce pendant la période de reproduction ainsi que toute activité de nature à endommager ou à détruire ses aires de reproduction, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent
en vertu de l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d), de la directive.
Décisions sur les dépenses
Sur les dépens
41 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de la République hellénique et celle-ci ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Dispositif
Par ces motifs,
LA COUR
(sixième chambre)
déclare et arrête:
1) En ne prenant pas, dans le délai prescrit, les mesures nécessaires pour instaurer et mettre en oeuvre un système efficace de protection stricte de la tortue marine Caretta caretta à Zante, afin d'éviter toute perturbation intentionnelle de cette espèce pendant la période de reproduction ainsi que toute activité de nature à endommager ou à détruire ses aires de reproduction, la République hellénique a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 12, paragraphe 1, sous b) et d),
de la directive 92/43/CEE du Conseil, du 21 mai 1992, concernant la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvages.
2) La République hellénique est condamnée aux dépens.