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18/03/1999 | CJUE | N°C-304/97

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Fernando Carbajo Ferrero contre Parlement européen., 18/03/1999, C-304/97


Avis juridique important

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61997J0304

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 18 mars 1999. - Fernando Carbajo Ferrero contre Parlement européen. - Fonctionnaires - Concours interne - Nomination à un emploi de chef de division. - Affaire C-304/97 P.
Recueil de jurisprudence 1999 page I-01749

Sommaire

Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots...

Avis juridique important

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61997J0304

Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 18 mars 1999. - Fernando Carbajo Ferrero contre Parlement européen. - Fonctionnaires - Concours interne - Nomination à un emploi de chef de division. - Affaire C-304/97 P.
Recueil de jurisprudence 1999 page I-01749

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

Fonctionnaires - Avis de vacance d'emploi - Avis de concours - Nécessaire correspondance entre les conditions posées par ces avis

(Statut des fonctionnaires, art. 29, § 1; annexe III, art. 5)

Sommaire

L'article 29, paragraphe 1, du statut exige une correspondance entre les conditions de recrutement énoncées dans l'avis de vacance et celles précisées dans l'avis de concours interne dans le cadre d'une procédure ayant pour objet de pourvoir à un emploi vacant dans une institution et qui n'a pu l'être à l'issue de la première phase de la procédure, c'est-à-dire par voie de promotion ou de mutation. Une institution ne saurait, sans méconnaître cette disposition et l'article 5 de l'annexe III du
statut, remplacer l'énumération dans l'avis de concours des conditions relatives aux connaissances et qualifications requises des candidats par l'appréciation par le jury, à l'occasion du déroulement des épreuves de ce concours, du mérite des candidats au regard desdites conditions. Un tel remplacement a pour effet de réduire l'importance et le rôle de l'avis de concours, qui est d'informer les intéressés de façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper l'emploi
dont il s'agit afin de les mettre en mesure d'apprécier s'il y a lieu pour eux de faire acte de candidature. En outre, un tel procédé n'est pas sans effet sur le résultat du concours, puisque, en cas de non-correspondance entre les deux avis, il devient plus facile pour des candidats qui n'ont pas les qualifications et connaissances requises d'être nommés dans l'emploi à pourvoir.

Parties

Dans l'affaire C-304/97 P,

Fernando Carbajo Ferrero, fonctionnaire du Parlement européen, demeurant à Madrid, représenté par Mes Georges Vandersanden et Laure Levi, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de la fiduciaire Myson SARL, 30, rue de Cessange,

partie requérante,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes (première chambre) du 12 juin 1997, Carbajo Ferrero/Parlement (T-237/95, RecFP p. I-A-141 et II-429), et tendant à l'annulation de cet arrêt,

l'autre partie à la procédure étant:

Parlement européen, représenté par M. Norbert Lorenz, membre du service juridique, en qualité d'agent, assisté de Mes Francis Herbert et Daniel M. Tomasevic, avocats au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

LA COUR

(sixième chambre),

composée de MM. P. J. G. Kapteyn, président de chambre, G. Hirsch, G. F. Mancini, H. Ragnemalm (rapporteur) et K. M. Ioannou, juges,

avocat général: M. N. Fennelly,

greffier: M. R. Grass,

vu le rapport du juge rapporteur,

ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 17 décembre 1998,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 26 août 1997, M. Carbajo Ferrero a, en vertu de l'article 49 du statut CE et des dispositions correspondantes des statuts CECA et CEEA de la Cour de justice, formé un pourvoi contre l'arrêt du Tribunal de première instance du 12 juin 1997, Carbajo Ferrero/Parlement (T-237/95, RecFP p. I-A-141 et II-429, ci-après l'«arrêt attaqué»), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l'annulation de la décision du 21 février 1995 portant nomination de M. X
en qualité de chef de division et l'affectant au bureau d'information du Parlement européen à Madrid ainsi que de la décision correspondante de ne pas le nommer à cet emploi.

Les faits

2 M. Carbajo Ferrero, fonctionnaire de grade A 5 à la direction générale de l'information et des relations publiques du Parlement européen, est affecté au bureau d'information de Madrid depuis le 1er février 1987. Le 10 janvier 1994, le Parlement a publié l'avis de vacance d'emploi no 7424 afin de pourvoir le poste de chef de division au bureau de Madrid, de grade A 3, par voie de promotion ou de mutation.

3 Cet avis de vacance décrit la nature des fonctions de la manière suivante:

«Fonctionnaire hautement qualifié, chargé de tâches de relations publiques, plus spécialement dans le secteur espagnol et comportant notamment:

- établissement et développement de contacts avec la presse et avec tout autre moyen d'information (radio, télévision, etc.) dans le secteur espagnol;

- diffusion de l'information sur les activités du Parlement européen dans les milieux spécialisés (universités, jeunesse, syndicats, etc.);

- responsabilité du bureau d'information de Madrid.

Ces travaux exigent une aptitude aux contacts avec des interlocuteurs variés et une expérience des milieux politiques.»

4 L'avis de vacance précise, en outre, les qualifications et les connaissances requises des postulants:

- études universitaires sanctionnées par un diplôme ou expérience professionnelle garantissant un niveau équivalent;

- expérience confirmée en matière de relations publiques et en matière de journalisme;

- connaissance approfondie du fonctionnement des moyens d'information et du système gouvernemental espagnol;

- très bonne connaissance des problèmes européens;

- connaissance approfondie d'une des langues officielles des Communautés européennes; très bonne connaissance d'une autre de ces langues. Pour des raisons fonctionnelles, la connaissance approfondie de la langue espagnole est exigée. La connaissance d'autres langues officielles des Communautés européennes sera prise en considération.

5 Cette procédure n'a pas abouti à une nomination. Le 9 mars 1994, a été publié l'avis de concours interne no A/88 visant à pourvoir ledit emploi de chef de division au bureau de Madrid.

6 Le titre I de cet avis de concours décrit la nature des fonctions d'une manière semblable à celle de l'avis de vacance no 7424. Le titre II énumère les conditions d'admission. Celles-ci requièrent que les candidats soient titulaires d'un diplôme universitaire, aient une certaine ancienneté au service des institutions communautaires et une parfaite maîtrise de la langue espagnole ainsi qu'une très bonne connaissance d'une autre langue de l'Union européenne.

7 Le titre III dudit avis de concours précise également les modalités du concours ainsi que la nature des épreuves, lesquelles comportent:

- un exposé sur un sujet choisi par le candidat entre plusieurs sujets à caractère général dans des domaines intéressant l'Union européenne pour apprécier le niveau de ses connaissances, ses capacités rédactionnelles et la rigueur de son raisonnement;

- une épreuve de nature pratique à partir d'un dossier remis au candidat, afin de permettre d'évaluer les capacités d'analyse et de synthèse du candidat ainsi que son aptitude au traitement d'un dossier en rapport avec la nature des fonctions concernées;

- un entretien avec le jury permettant d'apprécier, d'une part, les connaissances générales des candidats et leurs aptitudes à exercer les fonctions en question et, d'autre part, leurs qualifications et expériences professionnelles;

- une discussion de groupe afin de permettre au jury d'apprécier la capacité d'adaptation, l'aptitude à la négociation, l'esprit de décision ainsi que le comportement des candidats au sein d'un groupe; et

- une conversation libre avec le jury de nature à lui permettre de constater les connaissances des candidats dans les langues officielles de l'Union européenne autres que leur langue principale.

8 M. Carbajo Ferrero, qui a participé au concours, a été informé le 13 décembre 1994 que le jury avait décidé d'inscrire son nom en deuxième position sur la liste d'aptitude après M. X.

9 Le directeur général de la direction générale de l'information et des relations publiques du Parlement s'est ensuite entretenu avec les trois premiers lauréats. Tenant compte, en particulier, du classement des candidats à l'issue du concours, de leur expérience dans le domaine des actions d'information et dans celui de la gestion administrative des postes, le directeur général a proposé la nomination de M. Carbajo Ferrero.

10 Le secrétaire général du Parlement, ayant constaté que M. Carbajo Ferrero et M. X avaient obtenu des appréciations tout à fait comparables lors du concours et que la différence d'un point en faveur de M. X était due à sa connaissance d'une troisième langue de l'Union européenne, a considéré qu'il fallait suivre les conclusions du jury et, par conséquent, a proposé au président du Parlement la nomination de M. X sur l'emploi à pourvoir. Le 21 février 1995, l'autorité investie du pouvoir de
nomination (ci-après l'«AIPN») a nommé M. X en qualité de chef de division, au grade A 3, et l'a affecté au bureau d'information de Madrid.

11 Le 22 février 1995, M. Carbajo Ferrero a écrit au secrétaire général afin de connaître l'état de la procédure décisionnelle. Par lettre du 2 mars suivant, le secrétaire général lui a répondu qu'une décision était intervenue en faveur de la personne classée première sur la liste d'aptitude. Considérant cette réponse comme non dénuée d'ambiguïté, M. Carbajo Ferrero a demandé au secrétaire général de lui préciser si elle contenait une prise de position définitive. Le secrétaire général a aussitôt
confirmé que le candidat classé premier avait effectivement été nommé.

12 M. Carbajo Ferrero a présenté, le 29 mai 1995, une réclamation à l'encontre de la décision de l'AIPN de ne pas le nommer à l'emploi sur lequel il avait postulé et portant nomination de M. X. Cette réclamation a été rejetée par une décision explicite du 6 octobre suivant.

L'arrêt attaqué

13 Le 29 décembre 1995, M. Carbajo Ferrero a introduit un recours devant le Tribunal ayant pour objet l'annulation, d'une part, de la décision de l'AIPN du 21 février 1995 nommant M. X à l'emploi de chef de division au bureau d'information de Madrid et, d'autre part, de la décision, contenue dans la lettre du 2 mars 1995 du secrétaire général du Parlement, de ne pas le nommer à cet emploi.

14 M. Carbajo Ferrero a invoqué sept moyens à l'appui de son recours en annulation, tirés respectivement d'un détournement de pouvoir, d'une violation de l'avis de concours, d'une violation de la procédure de pourvoi, d'une violation de l'obligation de motivation, d'une violation du principe de bonne administration et de l'intérêt du service, d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une violation du principe de non-discrimination.

15 Par son premier moyen, M. Carbajo Ferrero a soutenu que le détournement de pouvoir résulterait notamment d'une modification ad hoc de l'avis de concours par rapport à l'avis de vacance. Il s'est prévalu du fait que les trois conditions particulières quant aux qualifications et aux connaissances requises - à savoir une expérience confirmée en matière de relations publiques et de journalisme, une connaissance approfondie du fonctionnement des moyens d'information et du système gouvernemental
espagnol et une très bonne connaissance des problèmes européens - figurant dans l'avis de vacance avaient été supprimées dans l'avis de concours.

16 Au point 50 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a jugé qu'il doit y avoir une correspondance entre les conditions énoncées dans un avis de vacance, d'une part, et celles qui figurent dans les avis relatifs aux phases ultérieures, d'autre part.

17 Toutefois, au point 51 de l'arrêt attaqué, le Tribunal a conclu qu'il n'y avait pas eu de changement substantiel dans l'examen auquel ont été soumis les candidats. Les connaissances et qualifications professionnelles de ces derniers en matière de relations publiques et de journalisme, en matière de fonctionnement des moyens d'information ainsi qu'en matière de problèmes européens ont bien été testées par le jury, ne fût-ce que dans le cadre des épreuves du concours, en l'occurrence au second
stade de celui-ci, au lieu d'avoir été appréciées au premier stade, c'est-à-dire, lors de la vérification, sur la base des diplômes et des pièces justificatives, de la conformité des candidatures avec les conditions exigées par l'avis de concours.

18 Selon le Tribunal, l'avis de concours n'avait donc pas été modifié de telle sorte que la nécessaire correspondance entre les conditions énoncées dans l'avis de vacance et celles figurant dans les avis relatifs aux phases ultérieures de la procédure eût été méconnue. En tout état de cause, le Tribunal a jugé, au point 52 de l'arrêt attaqué, que l'avis de concours n'avait pas été modifié de manière à porter atteinte au droit des membres du personnel de l'institution de se présenter au concours et,
partant, à favoriser des candidatures externes.

19 En outre, selon le point 55 de l'arrêt attaqué, le requérant n'avait pas démontré que l'absence dans l'avis de concours, en tant que conditions d'admission, de l'exigence de qualifications et d'expériences en rapport avec la nature des fonctions afférentes au poste à pourvoir eût été destinée à permettre à M. X de participer au concours.

20 Le Tribunal a, en conséquence, rejeté le premier moyen et il a fait de même en ce qui concerne les autres moyens invoqués par M. Carbajo Ferrero.

Le pourvoi

21 M. Carbajo Ferrero demande, d'une part, l'annulation de l'arrêt attaqué et, en conséquence, la satisfaction de ses demandes initiales ainsi que, d'autre part, la condamnation du Parlement aux dépens des deux instances.

22 A l'appui de son pourvoi, M. Carbajo Ferrero invoque six moyens et soutient, notamment, que le Tribunal a mal apprécié les questions de droit soulevées par le recours.

23 Le Parlement demande à la Cour de rejeter le pourvoi comme irrecevable ou, à titre subsidiaire, comme non fondé et conclut à la condamnation de M. Carbajo Ferrero aux dépens de l'instance.

Appréciation de la Cour

24 Par son premier moyen, M. Carbajo Ferrero soutient notamment que le Tribunal a remplacé irrégulièrement sa critique relative au changement substantiel de l'avis de concours par rapport à l'avis de vacance par une analyse liée à un changement substantiel dans l'examen auquel ont été soumis les candidats. Le Tribunal aurait ainsi méconnu les différentes étapes de la procédure de concours sur titres et épreuves, telles qu'elles sont énoncées à l'article 5 de l'annexe III du statut des fonctionnaires
des Communautés européennes (ci-après le «statut»). Selon M. Carbajo Ferrero, le Tribunal a donc commis une erreur en jugeant que l'avis de concours n'avait pas été modifié de telle façon que la correspondance nécessaire entre les conditions énoncées dans l'avis de vacance et celles figurant dans les avis relatifs aux phases ultérieures de la procédure eût été méconnue.

25 Le Parlement soutient que le moyen est irrecevable, en raison du fait que M. Carbajo Ferrero ne fait que réitérer ce qu'il a invoqué devant le Tribunal ou, en tout état de cause, au motif qu'il demande à la Cour de trancher la question factuelle de savoir si un changement substantiel est intervenu entre l'avis de vacance et l'avis de concours.

26 S'agissant du fond, le Parlement prétend qu'aucun changement entre l'avis de vacance et l'avis de concours n'a été effectué et argue que la partie «qualifications et connaissances requises» contenue dans l'avis de vacance trouve sa contrepartie dans la description de la nature des épreuves dans l'avis de concours. En outre, le Parlement fait valoir que l'arrêt du 28 février 1989, Van der Stijl et Cullington/Commission (341/85, 251/86, 258/86, 259/86, 262/86, 266/86, 222/87 et 232/87, Rec. p.
511), invoqué par M. Carbajo Ferrero est fondé sur le raisonnement selon lequel les candidatures internes doivent être protégées vis-à-vis des candidatures externes. Cependant, dans la présente affaire, le problème de la protection des intérêts du personnel de l'institution ne se pose pas pour la raison que l'avis de vacance et l'avis de concours s'adressent tous les deux au personnel de l'institution. Le Parlement conclut donc que le moyen n'est pas fondé.

27 A titre liminaire, s'agissant de l'exception d'irrecevabilité soulevée par le Parlement, il y a lieu de relever que M. Carbajo Ferrero soutient, en substance, que le Tribunal a méconnu l'article 29, paragraphe 1, du statut et l'article 5 de l'annexe III de ce même statut en appréciant la correspondance entre les conditions énoncées dans l'avis de vacance et dans l'avis de concours interne au second stade du concours, en l'occurrence à l'occasion des épreuves subies par les candidats, au lieu de
l'apprécier au premier stade, c'est-à-dire lors de la vérification, sur la base des diplômes et des pièces justificatives, de la conformité des candidatures avec les conditions exigées par l'avis de concours.

28 M. Carbajo Ferrero soulève ainsi une question de droit qui est recevable dans le cadre d'un pourvoi.

29 Quant au fond, il convient de rappeler que l'article 29, paragraphe 1, du statut énumère les phases successives qui doivent être suivies lorsqu'il y a lieu de pourvoir à un poste vacant dans une institution. En vertu de cette disposition, l'AIPN doit examiner, par ordre de préférence, en premier lieu, les possibilités de promotion et de mutation au sein de l'institution où la vacance s'est produite, en second lieu, les possibilités d'organisation de concours internes à cette institution et, en
troisième lieu, les demandes de transfert de fonctionnaires d'autres institutions avant d'ouvrir la procédure de concours sur titres, sur épreuves ou sur titres et épreuves (voir arrêt du 5 décembre 1974, Van Belle/Conseil, 176/73, Rec. p. 1361, points 5 et 6).

30 Cette disposition accorde donc la priorité, dans le cadre d'une procédure comportant une série de phases successives, à ceux qui servent déjà dans l'institution (première et deuxième phases) par rapport aux fonctionnaires des autres institutions (troisième phase).

31 L'avis de vacance, qui est rédigé avant l'ouverture de la première phase de cette procédure, établit le cadre de celle-ci, en particulier en définissant la nature du poste à pourvoir et en énonçant les qualifications et connaissances requises des candidats dans l'intérêt du service.

32 L'AIPN doit donc déjà se rendre compte, au moment de la rédaction de l'avis de vacance, des conditions particulières requises pour occuper ce poste (voir arrêt du 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, point 39).

33 Si l'AIPN découvrait, après coup, que les conditions requises par l'avis de vacance étaient plus sévères que ne l'exigeaient les besoins du service, il lui était loisible de recommencer la procédure en retirant l'avis de vacance original et en le remplaçant par un avis corrigé (arrêt Grassi/Conseil, précité, point 43).

34 En revanche, il convient de constater que la modification des conditions de participation d'une phase à l'autre de la procédure prévue par l'article 29, paragraphe 1, du statut serait susceptible de vider les dispositions de cet article de leur effet.

35 Dans l'arrêt Van der Stijl et Cullington/Commission, précité, qui concernait la correspondance entre un avis de vacance et un avis de concours général, la Cour a jugé, au point 52, que la possibilité pour les institutions de modifier les conditions de participation d'une étape à l'autre de la procédure, notamment en les assouplissant, viderait de leur effet les dispositions de l'article 29 du statut, dès lors que les institutions seraient, en fait, libres d'organiser des procédures de recrutement
externe sans avoir à examiner des candidatures internes.

36 Il importe de relever que les mêmes considérations s'appliquent s'agissant de la modification des conditions de participation entre les phases de la procédure qui concernent seulement le personnel de l'institution ou des institutions en général et qui sont préalables à l'ouverture d'un concours général.

37 Ainsi que l'a souligné M. l'avocat général, au point 19 de ses conclusions, si une institution pouvait assouplir les conditions énoncées dans l'avis de vacance en passant de la première phase à l'organisation d'un concours interne, elle exclurait de la promotion ou de la mutation des fonctionnaires de l'institution concernée qui auraient pu répondre aux conditions moins strictes définies dans l'avis de concours.

38 Dans ce cas, l'institution aurait donc manqué à l'obligation contenue dans l'article 29, paragraphe 1, du statut de prendre en considération les possibilités de promotion et de mutation de ses fonctionnaires avant de prendre la décision d'organiser un concours interne.

39 En outre, il convient de relever également que, s'il était loisible à l'institution de modifier et, notamment, d'assouplir d'une étape à l'autre de la procédure les conditions relatives aux qualifications et connaissances requises des candidats qu'elle-même a fixées comme étant nécessaires dans l'intérêt du service, la procédure prévue par l'article 29, paragraphe 1, du statut ne serait guère susceptible d'aboutir à la nomination des personnes possédant les plus hautes qualités de compétence, de
rendement et d'intégrité ainsi que l'exige l'article 27 du statut.

40 Il convient donc de conclure que l'article 29, paragraphe 1, du statut exige une correspondance entre les conditions de recrutement énoncées dans l'avis de vacance et celles précisées dans l'avis de concours interne dans le cadre d'une procédure ayant pour objet de pourvoir à un poste vacant dans une institution et qui n'a pu l'être à l'issue de la première phase de la procédure.

41 Il y a lieu de rappeler que le Tribunal a jugé que la nécessaire correspondance entre les conditions énoncées dans les deux avis avait été respectée en l'espèce, au motif que les qualifications et les connaissances exigées par l'avis de vacance avaient été examinées et appréciées dans le cadre des épreuves du concours interne.

42 A cet égard, il convient de relever que l'article 5 de l'annexe III du statut prévoit que le jury d'une institution organisant un concours doit d'abord déterminer la liste des candidats qui répondent aux conditions fixées par l'avis de concours avant de procéder aux épreuves.

43 Dans ces conditions, le fait que les exigences relatives aux qualifications et connaissances requises des candidats sont utilisées, dans le cadre du déroulement des épreuves, en tant qu'éléments d'appréciation du mérite des candidats au lieu d'être explicitement énoncées dans l'avis de concours réduit l'importance et le rôle essentiel de celui-ci, qui est d'informer les intéressés d'une façon aussi exacte que possible de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s'agit afin
de les mettre en mesure d'apprécier s'il y a lieu pour eux de faire acte de candidature (voir, notamment, ordonnance du 28 novembre 1996, Ryan-Sheridan/FEACVT, C-119/96 P, Rec. p. I-6151, point 47).

44 En outre, ainsi que l'a relevé M. l'avocat général au point 23 de ses conclusions, un tel procédé n'est pas sans effet sur le résultat du concours. En effet, en cas de non-correspondance entre les deux avis, il deviendrait plus facile pour des candidats qui n'ont pas les qualifications et connaissances requises d'être nommés dans l'emploi à pourvoir.

45 Enfin, il convient d'ajouter qu'il serait très difficile dans ce cas pour les juridictions communautaires, dans le cadre du contrôle de la légalité des actes des autorités communautaires, de vérifier si, dans un litige particulier, la nécessaire correspondance entre l'avis de vacance et l'avis de concours a été respectée par l'institution.

46 Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que le Tribunal a méconnu l'article 29, paragraphe 1, du statut ainsi que l'article 5 de l'annexe III de ce même statut, en jugeant que l'énumération dans l'avis de concours interne des conditions relatives aux connaissances et qualifications requises des candidats pouvait être remplacée par l'appréciation par le jury, à l'occasion du déroulement des épreuves de ce concours, du mérite des candidats au regard desdites conditions.

47 Dès lors, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens soulevés par le requérant, il y a lieu de faire droit à celui tiré d'une modification irrégulière de l'avis de concours par rapport à l'avis de vacance et d'annuler l'arrêt attaqué.

48 Conformément à l'article 54, premier alinéa, seconde phrase, du statut CE de la Cour de justice, celle-ci, en cas d'annulation de la décision du Tribunal, peut statuer définitivement sur le litige lorsqu'il est en état d'être jugé. La Cour estime que tel est le cas dans la présente affaire.

49 Il convient de rappeler que la plupart des conditions relatives aux qualifications et connaissances requises des candidats figurant dans l'avis de vacance d'emploi no 7424 - à savoir une expérience confirmée en matière de relations publiques et de journalisme, une connaissance approfondie du fonctionnement des moyens d'information et du système gouvernemental espagnol ainsi qu'une très bonne connaissance des problèmes européens - avaient été supprimées dans l'avis de concours interne no A/88.

50 Dans ces conditions, il y a lieu de conclure que la nécessaire correspondance entre les conditions énoncées dans l'avis de vacance et celles de l'avis de concours n'a pas été respectée.

51 Dès lors, la décision de l'AIPN, du 21 février 1995, portant nomination de M. X en qualité de chef de division et l'affectant au bureau d'information du Parlement européen à Madrid doit être annulée.

52 S'agissant, enfin, de la demande de M. Carbajo Ferrero tendant à l'annulation de la prétendue décision, contenue dans la lettre du 2 mars 1995 du secrétaire général du Parlement, de ne pas le nommer dans l'emploi dont il s'agit, il suffit de relever que le fait que M. Carbajo Ferrero n'a pas été nommé à cet emploi n'est qu'une conséquence nécessaire de la décision portant nomination de M. X. Il n'y a donc pas lieu de statuer sur cette demande.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

53 Aux termes de l'article 122, premier alinéa, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi est fondé et que la Cour juge elle-même définitivement le litige, elle statue sur les dépens. Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du même règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l'article 118, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s'il est conclu en ce sens. Le Parlement ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner à supporter, outre ses propres dépens,
la totalité des dépens exposés par M. Carbajo Ferrero, tant devant le Tribunal que devant la Cour.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR

(sixième chambre)

déclare et arrête:

54 L'arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes du 12 juin 1997, Carbajo Ferrero/Parlement (T-237/95), est annulé.

55 La décision du 21 février 1995, portant nomination de M. X en qualité de chef de division à la direction générale de l'information et des relations publiques du Parlement européen, et l'affectant au bureau d'information du Parlement pour l'Espagne à Madrid, est annulée.

56 Le Parlement européen est condamné à l'ensemble des dépens des instances devant le Tribunal et la Cour.


Synthèse
Formation : Sixième chambre
Numéro d'arrêt : C-304/97
Date de la décision : 18/03/1999
Type d'affaire : Pourvoi - fondé
Type de recours : Recours de fonctionnaires - fondé

Analyses

Fonctionnaires - Concours interne - Nomination à un emploi de chef de division.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Fernando Carbajo Ferrero
Défendeurs : Parlement européen.

Composition du Tribunal
Avocat général : Fennelly
Rapporteur ?: Ragnemalm

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1999:152

Source

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