Avis juridique important
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61997J0208
Arrêt de la Cour (sixième chambre) du 18 juin 1998. - Commission des Communautés européennes contre République portugaise. - Manquement d'Etat - Directive 84/156/CEE - Non-transposition dans le délai prescrit. - Affaire C-208/97.
Recueil de jurisprudence 1998 page I-04017
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif
Mots clés
États membres - Obligations - Exécution des directives - Manquement non contesté
(Traité CE, art. 169)
Parties
Dans l'affaire C-208/97,
Commission des Communautés européennes, représentée par M. Francisco de Sousa Fialho, membre du service juridique, en qualité d'agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,
partie requérante,
contre
République portugaise, représentée par MM. Luís Fernandes, directeur du service juridique de la direction générale des Communautés européennes du ministère des Affaires étrangères, et João Lopes Fernandes, directeur du cabinet juridique de l'Institut national de l'eau, en qualité d'agents, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l'ambassade du Portugal, 33, allée Schaeffer,
partie défenderesse,
ayant pour objet de faire constater que, à titre principal, en ne prenant pas dans le délai fixé toutes les mesures législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux dispositions de la directive 84/156/CEE du Conseil, du 8 mars 1984, concernant les valeurs limites et les objectifs de qualité pour les rejets de mercure des secteurs autres que celui de l'électrolyse des chlorures alcalins (JO L 74, p. 49), et plus précisément en n'établissant pas les programmes
spécifiques prévus à cette directive, et, à titre subsidiaire, en ne communiquant pas immédiatement ces mesures à la Commission, la République portugaise a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 189, troisième alinéa, du traité CE ainsi que des dispositions de cette directive,
LA COUR
(sixième chambre),
composée de MM. H. Ragnemalm, président de chambre, G. F. Mancini, J. L. Murray, G. Hirsch et K. M. Ioannou (rapporteur), juges,
avocat général: M. P. Léger,
greffier: M. R. Grass,
vu le rapport du juge rapporteur,
ayant entendu l'avocat général en ses conclusions à l'audience du 2 avril 1998,
rend le présent
Arrêt
Motifs de l'arrêt
1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 30 mai 1997, la Commission des Communautés européennes a introduit, en vertu de l'article 169 du traité CE, un recours visant à faire constater que, à titre principal, en ne prenant pas dans le délai fixé toutes les mesures législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux dispositions de la directive 84/156/CEE du Conseil, du 8 mars 1984, concernant les valeurs limites et les objectifs de qualité pour les rejets de
mercure des secteurs autres que celui de l'électrolyse des chlorures alcalins (JO L 74, p. 49, ci-après la «directive»), et plus précisément en n'établissant pas les programmes spécifiques prévus à cette directive, et, à titre subsidiaire, en ne lui communiquant pas immédiatement ces mesures, la République portugaise a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 189, troisième alinéa, du traité CE ainsi que des dispositions de cette directive.
2 L'article 3 de la directive vise les normes d'émission des rejets de mercure en provenance des établissements industriels.
3 En vue d'éviter ou d'éliminer la pollution de mercure en raison des rejets d'autres établissements pour lesquels les normes d'émission ne peuvent être ni fixées ni régulièrement contrôlées à cause de la dispersion des sources, l'article 4, paragraphe 1, de la directive prévoit que les États membres doivent établir des programmes spécifiques pour les rejets de mercure effectués par des sources multiples qui ne sont pas des établissements industriels et pour lesquels les normes d'émission prévues à
l'article 3 de la directive ne peuvent être appliquées dans la pratique. Le paragraphe 3 du même article prévoit également que les programmes spécifiques s'appliquent à partir du 1er juillet 1989 et qu'ils sont communiqués à la Commission.
4 Conformément à l'article 7, paragraphe 1, de la directive, les États membres devaient mettre en vigueur les mesures nécessaires pour se conformer à la directive dans un délai de deux ans à compter de sa notification et en informer immédiatement la Commission.
5 N'ayant reçu aucune communication du ou des programmes mis en oeuvre par le gouvernement portugais et visés par la directive, la Commission a, par lettre du 4 décembre 1992, demandé à ce dernier de le ou les lui communiquer, dans un délai de deux mois.
6 N'ayant reçu aucune réponse et ne disposant d'aucun autre élément d'information lui permettant de conclure que la République portugaise avait établi ce ou ces programmes, la Commission a, par lettre du 18 juin 1993, mis en demeure la République portugaise de lui présenter ses observations dans un délai de deux mois.
7 La République portugaise a répondu à cette demande par lettre du 6 janvier 1994, dans laquelle elle indiquait que, aucune unité effectuant les rejets de mercure dans les secteurs autres que celui de l'électrolyse des chlorures alcalins n'ayant été identifiée, elle considérait que, comme la condition déterminant l'obligation d'établir les programmes visés à l'article 4 de la directive n'existait pas, puisqu'il n'y avait ni rejet de mercure ni pollution au mercure, l'obligation d'établir lesdits
programmes ne s'appliquait pas à elle.
8 N'étant pas convaincue du bien-fondé des observations de la République portugaise, la Commission lui a adressé, par lettre du 25 octobre 1995, un avis motivé l'invitant à prendre les mesures nécessaires pour s'y conformer dans un délai de deux mois à compter de sa notification.
9 Par lettre du 18 juillet 1996, la République portugaise a répondu à l'avis motivé de la Commission en l'informant qu'elle reconnaissait la nécessité et l'urgence de mettre en pratique les programmes mentionnés, mais que leur application s'avérait particulièrement difficile en raison des problèmes que posait l'identification de sources diverses et multiples. La République portugaise a ajouté qu'elle était en train d'évaluer les possibilités et les conditions pour passer des accords avec les entités
concernées (associations professionnelles, hôpitaux, municipalités, etc.) ainsi que les conditions techniques et la définition de critères et de règles de contrôle des rejets de mercure provenant de sources multiples non industrielles. Elle indiquait enfin qu'un délai de trois mois était nécessaire pour réaliser ses projets, dont les résultats seraient communiqués à la Commission en temps opportun.
10 Depuis cette lettre, la Commission n'a reçu aucune information du gouvernement portugais lui permettant de constater que la République portugaise avait satisfait aux obligations imposées par la directive. La Commission a donc introduit le présent recours.
11 La Commission soutient qu'il ressort de la lecture de la réponse à l'avis motivé que la République portugaise ne conteste pas devoir établir les programmes spécifiques visés à l'article 4 de la directive. Elle relève toutefois que, bien que les délais prévus aient expiré, la République portugaise n'a ni établi ni appliqué les programmes spécifiques et que, de toute manière, elle ne les lui a pas communiqués. Par conséquent, elle aurait manqué aux obligations qui lui incombent en vertu tant de
l'article 189, paragraphe 3, du traité que de la directive.
12 La République portugaise ne conteste pas le manquement reproché. Elle souligne qu'elle a fait des efforts en vue de surmonter les difficultés qu'elle avait rencontrées lors de l'établissement des programmes spécifiques pour les rejets de mercure prévus à l'article 4 de la directive, en particulier en ce qui concerne l'identification des sources diverses et multiples. Cependant, en dépit de ces efforts, l'achèvement des travaux d'établissement définitif des programmes soulèverait encore certaines
difficultés, en raison de leur complexité.
13 Il résulte de ce qui précède que la transposition de la directive n'a pas été réalisée dans le délai fixé.
14 Il y a lieu dès lors, de considérer comme fondé le recours introduit par la Commission.
15 Par conséquent, il convient de constater que, en ne prenant pas dans le délai fixé toutes les mesures législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux dispositions de la directive, et plus précisément en n'établissant pas les programmes spécifiques prévus à cette directive, la République portugaise a manqué aux obligations qui lui incombent en vertu de l'article 4, paragraphe 1, de cette directive.
Décisions sur les dépenses
Sur les dépens
16 Aux termes de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. La République portugaise ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner aux dépens.
Dispositif
Par ces motifs,
LA COUR
(sixième chambre)
déclare et arrête:
1) En ne prenant pas dans le délai fixé toutes les mesures législatives, réglementaires et administratives nécessaires pour se conformer aux dispositions de la directive 84/156/CEE du Conseil, du 8 mars 1984, concernant les valeurs limites et les objectifs de qualité pour les rejets de mercure des secteurs autres que celui de l'électrolyse des chlorures alcalins, et plus précisément en n'établissant pas les programmes spécifiques prévus à cette directive, la République portugaise a manqué aux
obligations qui lui incombent en vertu de l'article 4, paragraphe 1, de cette directive.
2) La République portugaise est condamnée aux dépens.