CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL
M. GIUSEPPE TESAURO
présentées le 18 décembre 1997 (1)
Affaire C-401/96 P
Somaco SARL
contre
Commission des Communautés européennes
«Pourvoi contre un arrêt du Tribunal de première instance – Absence de comportement préjudiciable à la concurrence en raison de pressions irrésistibles exercées par l'administration publique – Dénaturation des éléments de preuve»
1. Par le présent pourvoi, la société de droit français Somaco SARL (ci-après Somaco) demande à la Cour d'annuler l'arrêt du Tribunal de première instance du 18 septembre 1996 (2) , pour autant qu'il a rejeté ses conclusions en annulation d'une décision de la Commission du 13 octobre 1994 (ci-après la décision attaquée) et en indemnité. Somaco demande en outre à la Cour, en application de l'article 54 du statut CE de la Cour de justice, de statuer définitivement sur le litige en annulant
partiellement la décision attaquée et en condamnant la Commission à indemniser les préjudices.
Les faits pertinents
2. Le litige dont la Cour est saisie constitue l'épilogue d'un contentieux complexe entre la Commission, d'une part, et certaines entreprises exerçant en France des activités d'importation et de commerce de véhicules de production japonaise admis en libre pratique dans d'autres États membres de la Communauté, d'autre part.Les différentes étapes de cette affaire peuvent être résumées, pour autant qu'il importe, comme suit.
3. Entre 1985 et 1988, quatre importateurs parallèles de véhicules japonais en France (Asia Motor France, Cesbron, Monin Automobiles, Europe Auto Service) ont déposé une plainte auprès de la Commission pour violation des articles 30 et 85 du traité de la part de cinq importateurs accrédités de véhicules de provenance identique (Sidat Toyota France, Mazda France Motors, Honda France, Mitsubishi Sonauto et Richard Nissan SA), auxquels ils imputaient une entente illicite. Selon les plaignants, les
importateurs officiels précités auraient pris à l'égard de l'administration française l'engagement de ne pas vendre, sur le marché de la France métropolitaine, un nombre de véhicules supérieur à 3 % des immatriculations de véhicules automobiles enregistrées sur l'ensemble du territoire français au cours de l'année civile antérieure. Cet engagement aurait été assorti d'un accord de répartition du quota selon des critères préétablis. La Commission n'ayant adopté aucune mesure à l'égard des plaignants,
ceux-ci ont introduit un recours en carence et en indemnité devant le Tribunal de première instance. Par arrêt du 18 septembre 1992 (3) , le Tribunal de première instance a jugé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande, pour ce qui était de la carence (4) , et a déclaré irrecevables les autres chefs de demande, tendant à l'indemnisation du préjudice.
4. Entre-temps, plus précisément le 5 juin 1990, Somaco, qui est un importateur parallèle de véhicules japonais en Martinique, avait déposé une plainte analogue auprès de la Commission, mais en rapport avec une prétendue entente entre les sociétés CCIE, SIGAM, SAVA, SIDA et Auto GM, concessionnaires et importateurs officiels des marques Toyota, Nissan, Mazda, Honda et Mitsubishi sur le territoire de l'île de la Martinique.
5. Par décision du 5 décembre 1991, la Commission a rejeté tant les plaintes déposées en 1985 et en 1988 et relatives à la France métropolitaine que la plainte déposée le 5 juin 1990 par Somaco et relative à l'île de la Martinique.La décision était fondée sur deux motifs. Selon le premier motif, la Commission estimait que le comportement des importateurs accusés d'entente était en réalité imposé par la politique des autorités françaises en matière d'importations d'automobiles japonaises. Selon le
second motif, la Commission excluait que les plaignants aient un intérêt à voir sanctionnée l'infraction alléguée, en raison du fait que l'éventuelle application de l'article 85 ne serait pas susceptible d'apporter un remède à la situation dont les plaignants s'estimaient victimes.
6. A la suite du recours en annulation, le Tribunal de première instance a annulé la décision du 5 décembre 1991, puisque, dans la mesure où elle rejetait les plaintes au motif que les opérateurs accusés d'infraction à la concurrence n'avaient joui d'aucune autonomie ou marge de manoeuvre, elle était viciée par une erreur manifeste d'appréciation des faits, qui avait amené la Commission à commettre une erreur de droit, en particulier en ne considérant pas certains éléments de preuve précis et
circonstanciés que les plaignants lui avaient soumis (5) .
La décision attaquée devant le Tribunal
7. A la suite de cet arrêt, la Commission a repris l'instruction. A l'issue de celle-ci, elle a, par lettre du 13 octobre 1994, communiqué aux cinq entreprises plaignantes une nouvelle décision de rejet de leurs plaintes. La Commission a, en particulier, confirmé que les autorités françaises avaient instauré, à partir de 1977, un régime étatique d'importation des véhicules originaires des pays tiers. Dans ce contexte, le ministère de l'Industrie avait officiellement accrédité cinq importateurs
exclusifs, représentant autant de marques japonaises de véhicules automobiles (6) . Chacun d'eux recevait, chaque année, communication par le ministère du nombre total maximal de véhicules de sa marque dont l'importation était autorisée. Le nombre total ainsi autorisé par l'État était limité à 3 % du marché pour la France métropolitaine et à 15 % pour la Martinique. Les importateurs accrédités communiquaient aux concessionnaires en Martinique, annuellement, le nombre de ventes autorisées et
transmettaient les documents d'immatriculation nécessaires.Dans l'ensemble, selon la décision attaquée, les importateurs mis en cause, et en particulier ceux de la Martinique, ne disposaient d'aucune marge de manoeuvre dans la mise en oeuvre du régime d'importation élaboré par les autorités françaises et qui demeure, y compris dans ses modalités, exclusivement étatique. Il était par conséquent impossible d'identifier, dans le chef de ces mêmes importateurs, une quelconque violation de l'article 85
du traité. L'examen des documents en provenance de la Martinique, en particulier du procès-verbal d'une réunion tenue à la préfecture de la Martinique le 19 octobre 1987 et du protocole d'accord y annexé, n'était pas non plus de nature à modifier cette conclusion. Replacés dans leur vrai contexte, ces documents n'étaient pas susceptibles d'infléchir l'opinion suivant laquelle le régime des importations de véhicules japonais appartenant aux marques considérées est déterminé exclusivement par les
pouvoirs publics, sans que les importateurs jouissent d'une quelconque autonomie à cet égard.
L'arrêt attaqué
8. La décision du 13 octobre 1994 a été attaquée par les cinq importateurs plaignants, qui en ont demandé l'annulation auprès du Tribunal de première instance, en même temps qu'ils sollicitaient l'indemnisation du préjudice qu'ils affirmaient avoir subi.
9. L'arrêt attaqué, reprenant dans l'ordre l'objet des plaintes, a tout d'abord considéré le régime des importations en France métropolitaine et, ensuite, celui relatif à la Martinique.Pour ce qui est du territoire métropolitain, le Tribunal a constaté l'inexistence de dispositions de droit qui prescriraient aux importateurs d'adopter le comportement faisant l'objet des plaintes, en relevant, au contraire, que le mécanisme de contrôle des importations de véhicules japonais mis en place par
l'administration française a fait l'objet d'une procédure purement orale (7) . Dans ces circonstances, selon l'arrêt de première instance, la Commission ne peut légitimement rejeter les plaintes pour manque d'autonomie dans le chef des entreprises en cause que s'il apparaît, sur le fondement d'indices objectifs, pertinents et concordants, que ce comportement leur a été unilatéralement imposé par les autorités nationales par l'exercice de pressions irrésistibles telles que, par exemple, la menace de
l'adoption de mesures étatiques susceptibles de leur faire subir des pertes importantes (8) . Toutefois, le Tribunal a estimé que la Commission n'avait pas apporté d'éléments nouveaux par rapport à ceux qui sous-tendaient la décision, précédemment annulée, du 5 décembre 1991, qui puissent étayer la conclusion suivant laquelle les importateurs accrédités ne disposaient effectivement d'aucune marge d'autonomie. Les seuls éléments nouveaux concernaient, en effet, la situation en Martinique et non celle
du territoire métropolitain. Partant, le Tribunal en a déduit que la Commission avait commis une erreur manifeste d'appréciation des faits, puisque, à défaut d'éléments démontrant l'existence de pressions irrésistibles ... qui auraient forcé les importateurs à accepter une limitation de leurs importations, le comportement des importateurs qui se conforment aux souhaits de l'administration française, en tenant compte de l'ensemble des risques et avantages pertinents, doit être considéré comme
relevant de l'exercice d'un choix commercial (9) . La décision a en conséquence été annulée pour autant qu'elle rejetait les plaintes de 1985 et 1988 relatives au comportement des importateurs sur le territoire de la France métropolitaine.
10. En revanche, pour ce qui est de la Martinique, le Tribunal a considéré que la documentation résultant de la nouvelle instruction menée par la Commission était de nature à démontrer l'inexistence de toute marge d'autonomie dans le chef des concessionnaires visés par la plainte de Somaco, sans que les éléments produits par cette dernière puissent servir à prouver le contraire. En particulier, selon le Tribunal, le compte rendu de la réunion tenue le 19 octobre 1987 entre les opérateurs et
l'administration de la Martinique et le protocole d'accord y annexé, replacés dans le contexte qui se dégage de l'analyse de la documentation produite par la Commission, démontraient que les concessionnaires avaient estimé nécessaire de codifier la politique non écrite d'importation imposée unilatéralement par l'administration, en vue d'éviter à l'avenir la répétition de problèmes de gestion concrète du mécanisme, tels que celui engendré par le dépassement du quota par un concessionnaire (10) .
11. Le Tribunal a en conséquence rejeté la demande d'annulation de la décision de la Commission qui rejetait la plainte de Somaco. De même, estimant que les requérants n'avaient pas identifié, avec le degré de clarté et de précision requis, le comportement fautif imputé à la Commission ou le caractère du préjudice prétendument subi (11) , le Tribunal a rejeté la demande tendant à l'indemnisation du préjudice.
Le pourvoi formé par Somaco
12. De tous les requérants en première instance, Somaco est le seul importateur parallèle à avoir attaqué l'arrêt du Tribunal. Il soulève plusieurs moyens de cassation de cet arrêt, pour ce qui a trait tant au rejet des conclusions en annulation qu'au rejet des conclusions en indemnité.
L'exception d'irrecevabilité
13. Pour ce qui est des conclusions en annulation, la Commission soulève une exception d'irrecevabilité du pourvoi, en tant qu'il ne fait pas apparaître de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt, dont l'annulation est demandée, ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de façon spécifique cette demande. En particulier, selon la Commission, les moyens invoqués par Somaco se ramèneraient à des critiques générales, regroupées sous l'intitulé, tout aussi général: Insuffisance et
contradiction des motifs ─ Erreurs de droit, et ne satisferaient donc pas aux conditions posées par l'article 51 du statut CE de la Cour de justice et par l'article 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure de la Cour. De plus, toujours selon la Commission, le pourvoi contiendrait également des reformulations pures et simples des griefs à l'encontre de la décision de la Commission, objet du recours en première instance.
14. Le contrôle que la Cour est appelée à opérer sur les arrêts du Tribunal n'est pas susceptible de déboucher, dans le système voulu par le traité et, en particulier, par son article 168 A, sur un réexamen du litige. La Cour est au contraire appelée à juger par rapport à des griefs spécifiques que la partie demanderesse au pourvoi estime pouvoir soulever par rapport à certains éléments de l'arrêt prononcé en première instance. En outre, ces griefs doivent concerner exclusivement l'appréciation
juridique effectuée par le Tribunal, à l'exclusion de toute appréciation des faits.Le système ainsi décrit de manière synthétique s'exprime dans la règle, issue de l'article 168 A du traité et reprise à l'article 51 du statut CE de la Cour de justice ainsi qu'à l'article 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure de la Cour, suivant laquelle le pourvoi doit être limité aux questions de droit (articles 168 A du traité et 51 du statut), les moyens et arguments de droit invoqués devant
figurer dans l'acte introductif d'instance [article 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure].
15. La Cour a jusqu'à présent interprété les règles précitées de manière suffisamment rigoureuse pour éviter que, par le biais du pourvoi, le requérant obtienne un second examen des doléances déjà exposées devant le Tribunal de première instance.Dans toutes les décisions dans lesquelles elle a souligné que le pourvoi doit indiquer de façon précise les éléments critiqués de l'arrêt dont l'annulation est demandée, ainsi que les arguments juridiques qui soutiennent de manière spécifique cette demande
(12) , la Cour n'a toutefois conclu dans le sens de l'irrecevabilité que dans les cas où le pourvoi se bornait à répéter ou à reproduire servilement les moyens et arguments déjà présentés devant le Tribunal.
16. La situation se présente différemment, en revanche, lorsque le requérant, tout en ne recourant pas à un modèle d'une clarté exemplaire, forme un pourvoi dans lequel les griefs portent, en tout état de cause, sur certains aspects de l'arrêt de première instance. En pareille hypothèse, qui nous semble être le cas en l'espèce, il est permis à la Cour d'identifier les moyens du pourvoi et les arguments qui les sous-tendent, même s'ils ne sont pas spécifiquement mis en évidence par la partie
requérante (13) .Le pourvoi de Somaco, à l'exception du renvoi, d'ailleurs général et non pertinent, aux observations déjà développées au cours de la procédure devant le Tribunal, permet d'identifier de façon suffisamment nette deux moyens distincts à l'appui du pourvoi. Le premier, tiré de ce que la motivation de l'arrêt serait contradictoire, critique le fait que, d'une part, le Tribunal a jugé inexistantes les pressions irrésistibles exercées sur les importateurs accrédités en France
métropolitaine et, d'autre part, a jugé correcte la motivation de la décision, pour autant qu'elle identifiait de telles pressions à l'égard des concessionnaires de la Martinique, qui dépendaient des mêmes importateurs. L'autre moyen est tiré de la dénaturation des éléments de preuve qu'aurait opérée le Tribunal en constatant l'existence de pressions irrésistibles à l'encontre des concessionnaires de la Martinique.D'ailleurs, si une identification claire et correcte des moyens du pourvoi participe
également de la fonction de permettre une procédure contradictoire appropriée, force est de conclure qu'en l'espèce l'objectif a été atteint, puisque l'argumentation en défense de la Commission vise précisément à démontrer l'inexistence de toute contradiction dans la motivation du Tribunal et l'absence de dénaturation dans l'appréciation des preuves (14) .
17. La Commission invoque l'irrecevabilité du pourvoi également sous l'angle, différent, de l'erreur de fait, qui n'est pas susceptible de contrôle devant la Cour.A cet égard, il suffit d'observer que le caractère contradictoire de la motivation, comme son insuffisance, en se ramenant à une violation de l'obligation, pour le Tribunal, de motiver ses jugements, imposée par un principe général repris à l'article 190 du traité, représente une erreur de droit, pouvant, en tant que telle, être invoquée
dans le cadre d'un pourvoi formé devant la Cour (15) .
18. Quand au motif tiré de la dénaturation des éléments de preuve, il constitue la seule exception à la règle de l'impossibilité de remettre en cause l'appréciation des éléments de preuve opérée par le Tribunal. On sait en effet que, selon une jurisprudence désormais bien établie de la Cour, l'appréciation par le Tribunal des éléments de preuve produits devant cette juridiction ne constitue pas une question de droit susceptible de contrôle par la Cour. Toutefois, en matière d'appréciation des
preuves, la Cour s'est réservé un droit de contrôle sous deux angles. En premier lieu, sous l'angle purement procédural, il ressortit à la compétence de la Cour de vérifier si les preuves retenues par le Tribunal ont été régulièrement acquises et si les principes généraux et les règles de procédure quant à la charge de la preuve et à la production des preuves ont été respectés (16) . En second lieu, sous l'angle plutôt du droit au fond, la Cour s'est réservé la faculté de contrôler la dénaturation
des éléments de preuve (17) . Le pouvoir du Tribunal, par ailleurs exclusif, relativement à la constatation des faits de la cause, est donc limité dans cette hypothèse ainsi que dans le cas où l'inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui a été soumis (18) .Des considérations qui précèdent, il découle que le moyen tiré de la dénaturation des éléments de preuve est lui aussi recevable, en tant que moyen de droit.
Les griefs de fond
19. Ainsi qu'il a été rappelé, Somaco conteste à la fois la partie de la décision du Tribunal ayant rejeté ses conclusions en annulation et celle ayant écarté ses conclusions en indemnité. Nous aborderons en premier lieu les griefs dirigés contre le rejet des conclusions en annulation.
Le rejet des conclusions en annulation de la décision de la Commission
20. Par le premier moyen du pourvoi , Somaco fait grief au Tribunal d'avoir tenu un raisonnement contradictoire. En particulier, d'après la requérante, le Tribunal ne pouvait pas tenir, d'un côté, pour établie une entente relevant de l'article 85 entre les importateurs accrédités, relativement au territoire de la France métropolitaine, et, de l'autre, conclure dans le sens de l'existence de pressions étatiques irrésistibles sur les concessionnaires de la Martinique, qui dépendent de ces
importateurs, d'où l'exclusion de toute entente autonome entre lesdits concessionnaires.
21. En vue de vérifier le bien-fondé de ce moyen du pourvoi, il conviendra de reprendre le fil de l'argumentation du Tribunal. Le juge de première instance, confronté à une décision de la Commission qui rejetait les plaintes des requérants en considérant que le comportement des entreprises visées par la plainte était en réalité imposé, pour l'essentiel, par les autorités françaises, a tout d'abord vérifié, par rapport à la situation telle qu'elle se présente en France métropolitaine, l'existence de
dispositions juridiques qui prescriraient aux importateurs de véhicules japonais de se comporter de la manière décrite dans les plaintes.On sait en effet que les articles 85 et 86 ne visent que les comportements anticoncurrentiels qui ont été adoptés par les entreprises de leur propre initiative, alors que, lorsque ce comportement anticoncurrentiel est imposé aux entreprises par une législation nationale, ou que celle-ci crée un cadre juridique qui lui-même élimine toute possibilité de comportement
concurrentiel de leur part, les articles 85 et 86 ne sont pas d'application (19) . Le Tribunal a toutefois exclu l'existence de telles dispositions nationales, en rappelant la réponse, non contredite par d'autres éléments, des autorités françaises, selon lesquelles le mécanisme de contrôle des importations des véhicules japonais mis en place par la France a fait l'objet d'une procédure purement orale (20) .
22. Le Tribunal a donc estimé que la décision de la Commission de rejeter les plaintes en infraction de l'article 85 ne pouvait trouver sa justification qu'au cas où serait démontrée l'existence de pressions irrésistibles de la part des autorités nationales, destinées à imposer aux entreprises le comportement anticoncurrentiel (21) . Or, l'analyse des éléments sur lesquels s'est fondée la Commission n'a pas permis d'identifier la présence de telles pressions irrésistibles. Devant l'impossibilité,
dès lors, d'exclure un comportement autonome de la part des entreprises intéressées, la décision, qui fondait précisément sur cette exclusion le rejet des plaintes, a été, dans cette mesure, annulée par le Tribunal.En d'autres termes, l'invalidité de la décision attaquée ne présupposait pas nécessairement l'existence d'une entente interdite par l'article 85 (que le Tribunal n'a en effet pas établie), étant donné qu'il suffisait à cette fin de relever l'appréciation erronée des faits opérée par la
Commission. Cette dernière avait, en réalité, sur la base d'éléments inconsistants recueillis au cours de l'instruction (les seules déclarations des autorités françaises), estimé que la prémisse fondamentale de l'application de l'article 85, à savoir la liberté de comportement des entreprises par rapport aux pouvoirs publics, faisait également défaut.
23. Puisqu'il n'est pas vrai que le Tribunal ait établi l'existence d'une entente interdite entre les importateurs accrédités en France métropolitaine, la prétendue contradiction de l'arrêt par rapport à la constatation de pressions irrésistibles à l'égard des concessionnaires de la Martinique, qui dépendent des premiers quant aux importations dans l'île des véhicules japonais, disparaît par là même.Partant, le premier moyen d'annulation soulevé à l'encontre de l'arrêt du Tribunal ne saurait être
accueilli.
24. Par le second moyen d'annulation , Somaco fait grief à l'arrêt du Tribunal d'avoir opéré une dénaturation des preuves produites par la requérante et, en particulier, des deux documents précédemment rappelés, à savoir le compte rendu de la réunion du 19 octobre 1987 entre les concessionnaires en Martinique des marques Mazda, Nissan, Toyota, Honda et Mitsubishi, un représentant du ministère de l'Industrie et un représentant de l'administration des départements et des territoires d'outre-mer, ainsi
que le protocole d'accord signé à la même date par les mêmes concessionnaires en présence du préfet de la Martinique.Selon Somaco, les deux documents susmentionnés contiendraient des clauses et expressions littérales allant sans équivoque dans le sens de l'existence d'un accord entre les concessionnaires, sans que les pouvoirs publics n'aient imposé quoi que ce soit. Elle renvoie, en particulier, au fait que, dans le compte rendu, l'on fait état d'une décision adoptée par les concessionnaires ( il a
été décidé entre les concessionnaires présents) prévoyant en substance une autolimitation des importations à 15 % du marché global, qu'ils respecteraient au moyen d'une forme, non autrement définie, d'autocontrôle ( d'accepter une autolimitation ... à 15 % du marché global et de respecter impérativement cette autolimitation, au besoin en s'autocontrôlant). En outre, comme autre élément pertinent, Somaco rappelle que les concessionnaires ont déclaré vouloir considérer les éventuels litiges entre eux
comme une affaire dont ils se chargeraient personnellement ( les participants font des litiges entre eux leur affaire personnelle).En ce qui concerne le protocole d'accord, qui contient la répartition de la part de marché entre les différentes marques et la méthode pour résorber l'excédent de quota réalisé par Toyota, Somaco en souligne le caractère fondamentalement contractuel, comme le montreraient à l'évidence la terminologie utilisée et le fait que l'on ait prévu une sorte de clause résolutoire
destinée à jouer dans l'hypothèse d'une violation d'une obligation découlant de l'accord par l'un quelconque des contractants.
25. De l'avis de Somaco, le Tribunal ne pouvait pas refuser d'accorder de l'importance auxdits documents, dans le sens de les considérer comme preuve de l'existence d'une entente illicite en vertu de l'article 85, sans commettre une dénaturation. Nous passerons donc à l'analyse de la ligne d'argumentation suivie par le Tribunal par rapport aux éléments de preuve qui lui étaient soumis, sans perdre de vue le fait que, dans son précédent arrêt Asia Motor France e.a./Commission, le Tribunal lui-même
avait précisément reconnu au protocole d'accord une forte valeur probante quant à l'existence vraisemblable d'un concours de volonté entre les concessionnaires (22) .
26. Après avoir constaté l'inexistence, également en Martinique, de dispositions réglementaires imposant aux concessionnaires le comportement dénoncé dans la plainte, le Tribunal a estimé devoir vérifier si les pouvoirs publics ont exercé des pressions irrésistibles sur les concessionnaires concernés en vue de les contraindre à adopter le comportement dénoncé dans la plainte.Au cours de cette vérification, le juge de première instance a évalué des pièces à conviction supplémentaires par rapport aux
éléments de preuve qui lui avaient été soumis par les parties, et en particulier par la Commission, dans le cadre de l'instance ayant abouti au précédent arrêt Asia Motor France e.a./Commission.
27. En particulier, le Tribunal mentionne la lettre du 19 août 1982 du secrétaire d'État auprès du ministre chargé des départements et territoires d'outre-mer, adressée au président du groupement des importateurs de véhicules étrangers Antilles-Guyane, dans laquelle il est fait état de ce que, afin de modérer la forte progression des importations de voitures japonaises dans les départements et territoires d'outre-mer, les autorités publiques avaient élaboré, à partir de 1980, un mécanisme destiné à
réduire le taux de pénétration de ces voitures dans ces départements. Toujours selon cette lettre, le mécanisme, analogue mais non identique à celui mis en place en France métropolitaine, aurait dû permettre de réduire la part des marques japonaises à 15 % (23) .Le Tribunal a en outre examiné une série de lettres échangées entre le préfet de la Région Martinique et les concessionnaires de la région, qui confirment l'existence d'une limite à l'importation des véhicules japonais fixée par
l'administration centrale française (24) et d'un mécanisme en vertu duquel celle-ci communique les quotas à la préfecture de la Martinique laquelle, à son tour, les notifie aux concessionnaires. Et c'est également l'administration centrale qui délivre les certificats de conformité nécessaires à l'immatriculation des voitures vendues. Un autre document examiné par le Tribunal est la lettre du 3 septembre 1986, adressée au préfet de la Martinique par le concessionnaire Nissan et dans laquelle ce
dernier ─ après avoir rappelé qu'un quota a été instauré depuis quelques années pour l'importation des véhicules japonais et que, par conséquent, l'importateur en France reçoit annuellement des instructions de l'administration qui l'autorisent à ne remettre qu'un certain nombre de certificats de conformité ─ se plaint de l'exiguïté de son quota, lequel serait réduit chaque année davantage. Selon le Tribunal, si les quotas de chaque concessionnaire dépendaient d'un accord entre eux, la plainte aurait
été adressée non à l'administration publique, mais aux concurrents, et tendrait à la renégociation de l'accord. Toujours selon le Tribunal, il n'est guère vraisemblable que la limitation à 15 % du marché dépende d'un choix autonome des concessionnaires: en effet, cet accord a eu pour conséquence de réduire d'environ 50 % le marché, selon les données fournies par la Commission et non contestées par Somaco.
28. A la lumière des éléments de preuve que nous venons de rappeler, le Tribunal a estimé devoir reconsidérer la signification qu'il avait, dans le précédent arrêt Asia Motor France e.a./Commission, attribuée aux documents produits par Somaco. En particulier, le compte rendu de la réunion interministérielle et le protocole d'accord du 19 octobre 1987 sont de nature à accréditer sur ce point la thèse d'une codification ─ dans le sens soutenu par la Commission ─ de la politique non écrite
d'importation imposée unilatéralement par les autorités publiques françaises depuis 1982, codification occasionnée par la nécessité de résoudre un problème qui, dans la gestion concrète de cette politique, s'était posé du fait du concessionnaire Toyota, et pour éviter que ce problème ne ressurgisse à l'avenir (25) .Le Tribunal a également examiné d'autres documents produits par Somaco, en constatant, pour certains d'entre eux, qu'ils concernent la situation en France métropolitaine, mais non celle
de la Martinique. Il en va ainsi de la lettre du 1 ^er juillet 1987 du ministère de l'Industrie relative en particulier à la position de l'un des plaignants, M. Cesbron, exclusivement intéressé au régime des importations sur le territoire métropolitain. Pour ce qui est d'autres documents, comme la lettre de janvier 1981 adressée au président de la République française par le groupement des importateurs de véhicules étrangers Antilles-Guyane, le compte rendu de la réunion du 1 ^er octobre 1987 à la
préfecture de la Martinique et le télex du 22 septembre 1987 du préfet de la Martinique, le Tribunal a observé qu'il s'agit soit de simples craintes des importateurs quant à l'instauration d'un quota non encore fixé (lettre de janvier 1981), soit de documents toujours relatifs à la recherche d'une solution au problème causé par le comportement du concessionnaire Toyota. De l'avis du Tribunal, on ne saurait en tout cas déduire, de l'un quelconque de ces éléments de preuve, l'existence d'une entente
entre les concessionnaires relevant de l'article 85.
29. Après ce rappel de l'appréciation des éléments de preuve à laquelle s'était livré le Tribunal, et qui a été contestée par Somaco, il importe de vérifier si, dans le cadre de cette appréciation, le Tribunal a opéré une dénaturation des éléments de preuve. La jurisprudence de la Cour considérant ce vice comme susceptible de contrôle n'a jamais précisé, ne serait-ce que par voie d'exemples, à quel type d'erreur d'appréciation il se ramène concrètement (26) .Dès lors que le vice en cause représente
une exception à l'appréciation souveraine des faits que le Tribunal est appelé à porter à titre exclusif, nous estimons qu'il y a lieu d'en délimiter de façon restrictive les contours, afin d'éviter que l'articulation des compétences voulue par le traité dans le cadre du système juridictionnel de la Communauté finisse par être compromise (27) . Il en résulte qu'il y a lieu de ne faire rentrer dans la notion de dénaturation de la preuve que les hypothèses dans lesquelles le vice logique commis par le
Tribunal dans l'appréciation des éléments de preuve est à ce point grave et manifeste qu'il se superpose, en définitive, au moins en matière de preuves documentaires, à l'inexactitude matérielle des constatations de fait qui ressort des documents contenus dans le dossier soumis au Tribunal (28) .
30. Dans le cas faisant l'objet du présent recours, le Tribunal a considéré les documents produits par Somaco, auxquels il a par ailleurs reconnu, à première vue, la valeur d'un indice sérieux (29) , en les replaçant dans un contexte plus large, dans lequel les documents, précédemment rappelés, produits par la Commission, du reste non contestés par la requérante, ont également leur importance. De ces autres éléments de preuve, qui raisonnablement peuvent accréditer la thèse de l'existence d'une
détermination des quotas d'importation par l'administration, sans participation active des concessionnaires, le Tribunal a estimé pouvoir reconstituer un scénario permettant d'expliquer de façon cohérente même le compte rendu et le protocole d'accord du 19 octobre 1987.Semblable appréciation d'ensemble peut être partagée, ou non, sur le fond; mais elle n'apparaît affectée d'aucune dénaturation des éléments qui en constituent l'objet, de sorte qu'il y a lieu de rejeter ce grief formulé à l'encontre
de l'arrêt du Tribunal.
31. Dans le mémoire en réplique, la requérante formule un autre grief encore, relatif à l'évaluation des preuves opérée par le Tribunal. En particulier, Somaco relève que le Tribunal a commencé par analyser les preuves produites par la Commission au soutien de la thèse de l'existence de pressions irrésistibles, et que ce n'est que par la suite qu'elle en est venue à considérer les documents produits par la partie requérante. Cette façon de procéder aurait eu l'effet d'inverser la présomption posée
par l'article 85, qui postule l'existence de comportements autonomes des entreprises et non la présence de comportements issus de considérations différentes.Outre la considération qu'un tel argument est irrecevable du fait qu'il n'a été formulé qu'au stade de la réplique, il est, à l'évidence, également dépourvu de tout fondement. En premier lieu, la circonstance que le juge aborde dans son arrêt l'analyse des éléments de preuve produits par les parties dans un ordre plutôt que dans un autre ne peut
pas constituer un vice entachant la décision. En second lieu, l'article 85 ne pose aucune règle d'instruction telle que des présomptions ou autres simplifications de la preuve, en se bornant à consacrer une règle de fond. Il en résulte que, dans le cadre d'un recours en annulation d'une décision de la Commission, il incombe au requérant de fournir la preuve du bien-fondé de sa demande, alors que l'institution défenderesse a la charge de prouver les circonstances invoquées au soutien de ses moyens de
défense, destinées à démontrer la validité de l'acte adopté. Cela répond, d'ailleurs, à un principe fondamental en matière procédurale, partagé, même si c'est avec des nuances différentes, par la généralité des pratiques juridiques des États membres (30) . De ce principe, le Tribunal a fait une application scrupuleuse dans le cas d'espèce.Partant, nous estimons que ce moyen doit également être rejeté.
Le rejet des conclusions en indemnité
32. Somaco a sollicité du Tribunal une indemnisation des préjudices subis par suite du comportement de la Commission. Le Tribunal a rejeté cette demande en la considérant irrecevable. Le juge de première instance s'est en effet référé à la jurisprudence constante suivant laquelle une requête visant à la réparation de dommages causés par une institution communautaire doit contenir les éléments qui permettent d'identifier le comportement que le requérant reproche à l'institution, les raisons pour
lesquelles il estime qu'un lien de causalité existe entre le comportement et le préjudice qu'il prétend avoir subi ainsi que le caractère et l'étendue de ce préjudice (31) .En particulier, le Tribunal, confronté à un simple étalage de chiffres censés représenter le dommage subi et à l'affirmation que le préjudice imputable à la Commission s'obtiendrait en calculant l'intérêt usuel de ces sommes pour la période comprise entre la décision de classement et l'arrêt, a, à bon droit, estimé que le
comportement fautif imputé à la Commission ou le caractère du préjudice prétendument subi n'étaient pas identifiés (32) .
33. Comme on sait, il incombe directement aux parties qui invoquent la responsabilité de la Communauté de fournir des preuves concluantes au regard de l'existence et de la portée du dommage prétendument subi et de démontrer le lien de causalité entre ce préjudice et le comportement reproché aux institutions (33) .Aucun de ces éléments n'a été étayé par des preuves ou par des offres de preuve. C'est en vain que Somaco invoque, pour justifier de ce qu'elle ne s'est pas acquittée de la charge de la
preuve, la responsabilité de l'État pour violation du droit communautaire, telle qu'élaborée par la jurisprudence de la Cour. S'il est vrai que le niveau de la protection des particuliers face à un acte illégal imputable aux institutions communautaires mérite d'être équivalent à celui de la protection assuré aux citoyens sur le plan de l'indemnisation par rapport à un fait illicite imputable à l'État qui a enfreint une disposition communautaire (34) , cela ne saurait toutefois aboutir à modifier le
régime de la charge de la preuve. Il suffira de relever à cet égard que les conditions de mise en jeu de la responsabilité de l'État pour violation du droit communautaire doivent elles aussi être prouvées par le particulier qui réclame une indemnisation devant le juge national. Il s'ensuit que ce moyen du pourvoi doit également être rejeté.
Sur les dépens
34. Le rejet de tous les moyens du pourvoi entraîne, en principe, la condamnation aux dépens de la partie qui succombe et, partant, de la requérante, conformément aux dispositions de l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure. Toutefois, en vertu de l'article 69, paragraphe 3, si les parties succombent respectivement sur un ou plusieurs chefs, ou pour des motifs exceptionnels, la Cour peut décider que chaque partie supportera ses propres dépens.
35. En l'espèce, la Commission a succombé par rapport à l'exception d'irrecevabilité du pourvoi qu'elle soulevait. En outre, les particularités du cas d'espèce (35) , l'absence d'une jurisprudence de nature à clarifier la notion de dénaturation des éléments de preuve, le fait que le Tribunal ait recouru à la catégorie incertaine et inédite des pressions irrésistibles de la part des autorités publiques, propres à exclure l'autonomie du comportement des entreprises, nous amènent à suggérer à la Cour
de compenser à hauteur d'un quart les dépens.
36. A la lumière des observations qui précèdent, nous suggérons donc à la Cour de:
─
rejeter le pourvoi en tant que non fondé;
─
condamner Somaco SARL à supporter les dépens de la Commission dans la mesure des trois quarts, y compris ceux afférents à la procédure devant la Cour.
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1 –
Langue originale: l'italien.
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2 –
Asia Motor France e.a./Commission (T-387/94, Rec. p. II-961).
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3 –
Asia Motor France e.a./Commission (T-28/90, Rec. p. II-2285).
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4 –
La Commission avait en effet veillé à communiquer, au titre de l'article 6 du règlement n° 99/63/CEE de la Commission, du 25 juillet 1963, relatif aux auditions prévues à l'article 19, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 17 du Conseil (JO 1963, 127, p. 2268), son intention de ne pas donner suite à la plainte des requérantes, bien que postérieurement à l'introduction du recours. Selon une certaine jurisprudence, le recours est alors privé d'objet. Voir, en dernier lieu, l'arrêt du 18 mars
1997, Guérin automobiles/Commission (C-282/95 P, Rec. p. I-1503), et nos conclusions sur ce point non conformes, pour des considérations qui tenaient à une protection juridictionnelle efficace des particuliers.
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5 –
Arrêt du 29 juin 1993, Asia Motor France e.a./Commission (T-7/92, Rec. p. II-669, point 55).
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6 –
Il s'agit des marques mentionnées ci-dessus, au point 3 des présentes conclusions.
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7 –
Voir point 64 de l'arrêt attaqué.
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8 –
Voir point 65 de l'arrêt attaqué.
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9 –
Voir point 71 de l'arrêt attaqué.
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10 –
Voir, pour plus de détails, ci-après, point 28, notamment note 24 en bas de page.
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11 –
Voir point 110 de l'arrêt attaqué.
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12 –
La formule est répétée, avec quelques variantes lexicales, dans de nombreuses décisions: ordonnances du 26 avril 1993, Kupka-Floridi/Comité économique et social (C-244/92 P, Rec. p. I-2041, point 9); du 26 septembre 1994, X/Commission (C-26/94 P, Rec. p. I-4379, point 12); du 17 octobre 1995, Turner/Commission (C-62/94 P, Rec. p. I-3177, point 16); et arrêt du 24 octobre 1996, Viho/Commission (C-73/95 P, Rec. p. I-5457, point 25).
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13 –
Voir, en ce sens, les conclusions de l'avocat général M. Ruiz-Jarabo Colomer du 16 septembre 1997 dans l'affaire New Holland Ford/Commission (C-8/95 P, non encore publiées au Recueil, point 18).
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14 –
Pour une considération identique en faveur de la recevabilité d'un pourvoi fondé sur la violation de l'article 112, paragraphe 1, sous c), du règlement de procédure, voir l'ordonnance du président de la Cour du 30 avril 1997, Moccia Irme/Commission [C-89/97 P(R), Rec. p. I-2327, point 36].
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15 –
Voir les arrêts de la Cour du 1 ^er octobre 1991, Vidrányi/Commission (C-283/90 P, Rec. p. I-4339, point 29), et du 17 décembre 1992, Moritz/Commission (C-68/91 P, Rec. p. I-6849).
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16 –
Voir ordonnances du 17 septembre 1996, San Marco/Commission (C-19/95 P, Rec. p. I-4435, point 40), et du 16 octobre 1997, Dimitriadis/Cour des comptes (C-140/96 P, non encore publiée au Recueil, point 27).
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17 –
Voir les arrêts du 2 mars 1994, Hilti/Commission (C-53/92 P, Rec. p. I-667, point 42), et du 16 septembre 1997, Blackspur DIY e.a./Conseil et Commission (C-362/95 P, Rec. p. I-4775, point 29), et les ordonnances du 6 octobre 1997, AIUFFASS et AKT/Commission (C-55/97 P, non encore publiée au Recueil, point 25), et Dimitriadis/Cour des comptes (précitée sous la note 15, point 35).
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18 –
Voir arrêt du 1 ^er juin 1994, Commission/Brazzelli Lualdi e.a. (C-136/92 P, Rec. p. I-1981, point 49).
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19 –
Voir arrêts du 16 décembre 1975, Suiker Unie e.a./Commission (40/73 à 48/73, 50/73, 54/73 à 56/73, 111/73, 113/73 et 114/73, Rec. p. 1663, points 57 à 72), et, plus récemment, du 11 novembre 1997, Commission et France/Ladbroke Racing (C-359/95 P et C-379/95 P, non encore publié au Recueil, points 33 et 34). Le même principe est à la base de la jurisprudence qui déclare les articles 85 et 86 inapplicables aux réglementations nationales n'ayant aucun lien avec les comportements d'entreprises
interdits par ces dispositions, bien qu'ayant par elles-mêmes un effet restrictif sur la concurrence: voir arrêts du 17 novembre 1993, Meng (C-2/91, Rec. p. I-5751, points 14 à 22), et Ohra Schadeverzekeringen (C-245/91, Rec. p. I-5851, points 10 à 15).
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20 –
Voir point 64 de l'arrêt attaqué.
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21 –
Voir point 65 de l'arrêt attaqué. Force est d'observer, même si ce n'est qu'à titre incident (cet aspect ne constituant pas un moyen du pourvoi), le caractère singulier de la référence à un comportement anticoncurrentiel des entreprises provoqué par des moyens de coercition non normatifs, qualifiés ─ sans autre précision ─ de pressions irrésistibles. La référence, à titre de simple exemple, à la menace de l'adoption de mesures étatiques susceptibles de leur faire subir des pertes importantes
semble en effet préfigurer un comportement illicite de la part des pouvoirs publics.
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22 –
Voir arrêt du 29 juin 1993, cité à la note 4, point 43.
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23 –
Voir arrêt attaqué, point 82;
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24 –
Voir arrêt attaqué, point 83, où sont mentionnées, mais simplement à titre d'exemple, les lettres du 29 décembre 1987 et de janvier 1991.
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25 –
Voir arrêt attaqué, point 95. Il n'est pas contesté que le concessionnaire Toyota avait dépassé, entre 1982 et 1986, le quota qui lui était assigné, en recourant essentiellement à un stratagème, à savoir l'immatriculation de véhicules hors quota avec des plaques temporaires (plaques WW). Il résulte du dossier soumis au Tribunal que les autorités françaises ont, à partir de 1987, commencé à compter les immatriculations temporaires dans le quota normal assigné à chaque marque. Il se posait
néanmoins le problème de la récupération de l'excédent entre-temps commercialisé par le concessionnaire Toyota. Le compte rendu et le protocole d'accord du 19 octobre 1987 abordent précisément, pour l'essentiel, ce problème.
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26 –
Dans toutes les décisions rappelées à la note 16, la dénaturation des preuves est simplement rappelée comme une exception à l'impossibilité de contrôler l'appréciation des éléments de preuve de la part du Tribunal, mais sans jamais concrètement l'identifier.
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27 –
Dans ses conclusions dans l'affaire Hilti/Commission (précitée à la note 16), l'avocat général M. Jacobs soutient la nécessité d'une interprétation restrictive du moyen de droit, qui assure l'exclusion d'un contrôle de toute erreur de fait, même manifeste, par référence notamment aux affaires en matière de concurrence où la décision du Tribunal de première instance constitue, en elle-même, un contrôle d'une portée très étendue d'une décision motivée de la Commission (voir point 46). Cette
orientation est partagée par l'avocat général M. Ruiz-Jarabo Colomer dans ses conclusions dans l'affaire C-8/95 P, New Holland Ford/Commission (précitées à la note 12), point 16.
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28 –
Sur cette erreur, elle aussi considérée à titre exceptionnel comme erreur de droit, voir l'arrêt Brazzelli Lualdi e.a./Commission, précité à la note 17).
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29 –
Voir arrêt attaqué, point 91.
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30 –
En doctrine, voir Vandersanden, Barav, Contentieux communautaire , Bruxelles, 1977, p. 50; Lasok, The European Court of Justice . Practice and Procedure , 2 ^e éd., Londres, 1994, p. 362. Dans la jurisprudence de la Cour, voir les arrêts du 2 mars 1977, Milch, Fett- und Eier Kontor/Conseil et Commission (44/76, Rec. p. 393, point 16), et du 30 mai 1984, Favre/Commission (346/82, Rec. p. 2269, points 31 et 32).
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31 –
Voir arrêt attaqué, point 107.
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32 –
Voir arrêt attaqué, point 110.
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33 –
Ce principe correspond à une orientation bien établie de la jurisprudence de la Cour: voir arrêt du 21 mai 1976, Roquette frères/Commission (26/74, Rec. p. 677, points 22 et 23), et, plus récemment, arrêt Blackspur DIY e.a./Conseil et Commission (précité à la note 16, point 31).
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34 –
Nous avons déjà eu l'occasion de formuler ce voeu dans les conclusions présentées dans les affaires Brasserie du pêcheur et Factortame, qui ont fait l'objet de l'arrêt du 5 mars 1996 (C-46/93 et C-48/93, Rec. p. I-1029, point 66 des conclusions).
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35 –
Nous renvoyons surtout à la circonstance, d'ailleurs singulière, que la Commission, confrontée à la constatation d'un comportement des autorités qui ne trouve pas de traduction au niveau normatif et en vertu duquel certaines entreprises se voient allouer et garantir des parts de marché, n'a pas apparemment ressenti l'exigence, à la lumière de la fonction dont la Commission est investie sur la base des articles 155 et 169 du traité, de vérifier si ce comportement ne finissait pas par anéantir
l'effet utile des dispositions en matière de concurrence et, partant, ne constituait pas une hypothèse de violation, par l'État membre, de l'article 85, lu conjointement avec les articles 3 et 5 du traité.