Avis juridique important
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61996C0044
Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 16 septembre 1997. - Mannesmann Anlagenbau Austria AG e.a. contre Strohal Rotationsdruck GesmbH. - Demande de décision préjudicielle: Bundesvergabeamt - Autriche. - Marchés publics - Procédure de passation des marchés publics de travaux - Imprimerie d'Etat - Filiale exerçant des activités commerciales. - Affaire C-44/96.
Recueil de jurisprudence 1998 page I-00073
Conclusions de l'avocat général
1 Par la présente affaire préjudicielle, il vous est demandé d'interpréter le terme «organisme de droit public», utilisé par le législateur communautaire pour délimiter le champ d'application de la directive 93/37/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux (1) (ci-après la «directive»).
2 Aux termes de la directive, un «organisme de droit public» constitue un «pouvoir adjudicateur», notion désignant les entités dont la participation à la conclusion d'un contrat portant sur la réalisation de travaux détermine l'application à ce contrat du régime de la directive.
I - La législation communautaire
La directive 93/37/CEE
3 La directive 93/37, qui codifie la directive 71/305/CEE du Conseil (2), constitue la réglementation communautaire de base dans le domaine des marchés publics de travaux.
4 La directive énonce les règles communes qui s'imposent aux États membres dans le domaine technique, dans celui de la publicité qui doit être donnée au marché que les pouvoirs adjudicateurs entendent passer, et dans le domaine de la participation des entrepreneurs au marché. Elle fixe les catégories de procédures de passation des marchés auxquelles doivent recourir les pouvoirs adjudicateurs, ainsi que les obligations d'information à la charge de ces derniers en direction des candidats, des
soumissionnaires et de la Commission, ou des États membres à l'égard de celle-ci.
5 Dans son article 1er, la directive procède à la définition des principaux termes qui délimitent son domaine d'application.
6 Le point a) nonce ainsi que:
«les `marchés publics de travaux' sont des contrats à titre onéreux, conclus par écrit entre, d'une part, un entrepreneur et, d'autre part, un pouvoir adjudicateur défini au point b) et ayant pour objet soit l'exécution, soit conjointement l'exécution et la conception des travaux relatifs à une des activités visées à l'annexe II ou d'un ouvrage défini au point c), soit la réalisation, par quelque moyen que ce soit, d'un ouvrage répondant aux besoins précisés par le pouvoir adjudicateur» (3).
7 Le premier alinéa du point b) dispose ce qui suit:
«sont considérés comme `pouvoirs adjudicateurs', l'État, les collectivités territoriales, les organismes de droit public et les associations formées par une ou plusieurs de ces collectivités ou de ces organismes de droit public».
8 Les «organismes de droit public», qui sont donc des pouvoirs adjudicateurs au même titre que les collectivités publiques traditionnelles, sont ainsi définis par le deuxième alinéa du point b):
«On entend par `organisme de droit public' tout organisme:
- créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial
et
- doté de la personnalité juridique
et
- dont soit l'activité est financée majoritairement par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public, soit la gestion est soumise à un contrôle par ces derniers, soit l'organe d'administration, de direction ou de surveillance est composé de membres dont plus de la moitié est désignée par l'État, les collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public».
9 Le dernier alinéa du point b) indique:
«Les listes des organismes et des catégories d'organismes de droit public qui remplissent les critères énumérés au deuxième alinéa du présent point figurent à l'annexe I. Ces listes sont aussi complètes que possible et peuvent être révisées selon la procédure prévue à l'article 35. A cet effet, les États membres notifient périodiquement à la Commission les modifications intervenues dans leurs dites listes».
La directive 89/665/CEE
10 La directive 89/665/CEE du Conseil, du 21 décembre 1989, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l'application des procédures de recours en matière de passation des marchés publics de fournitures et de travaux (4), oblige les États membres à prendre «les mesures nécessaires pour assurer que les décisions prises par les pouvoirs adjudicateurs peuvent faire l'objet de recours efficaces et, en particulier, aussi rapides que possible ... au
motif que ces décisions ont violé le droit communautaire en matière de marchés publics ou les règles nationales transposant ce droit» (5). Son article 5 prévoit que les mesures prises par les États membres, nécessaires pour se conformer à cette directive, doivent entrer en vigueur avant le 21 décembre 1991.
Le règlement (CEE) n_ 2052/88
11 L'article 7, paragraphe 1, nouveau, intitulé «Compatibilité et contrôle», du règlement (CEE) n_ 2052/88 du Conseil, du 24 juin 1988 (6) (ci-après le «règlement»), précise que:
«Les actions faisant l'objet d'un financement par les Fonds structurels ou d'un financement de la BEI ou d'un autre instrument financier existant doivent être conformes aux dispositions des traités et des actes arrêtés en vertu de ceux-ci, ainsi que des politiques communautaires, y compris celles concernant les règles de concurrence, la passation des marchés publics et la protection de l'environnement, de même qu'à l'application du principe de l'égalité des chances entre hommes et femmes».
II - La législation nationale
12 Dans sa décision de renvoi, le Bundesvergabeamt expose que, à l'entrée en vigueur de l'accord sur l'Espace économique européen, le 1er janvier 1994, la république d'Autriche était tenue de transposer dans son ordre juridique interne les actes de la Communauté européenne cités à l'annexe XVI de cet accord. A cette date, il s'agissait notamment des directives 71/305 et 89/665 précitées (7).
13 Il ressort de la décision de renvoi qu'une transposition des directives a été réalisée, au niveau fédéral, par le Bundesvergabegesetz (loi fédérale sur la passation des marchés publics, ci-après le «BVergG») (8), entré en vigueur le 1er janvier 1994, et que, pour des raisons de répartition des compétences entre les Länder et l'État fédéral, d'autres lois de transposition ont aussi été adoptées par les Länder.
14 Des directives ne figurant pas à l'annexe XVI sont intervenues dans le domaine des marchés publics. Constatant que leur transposition dans l'ordre juridique autrichien fait défaut, le juge de renvoi indique qu'il «part cependant du principe que les dispositions du BVergG, applicables en la matière, doivent désormais être appréciées à la lumière des dispositions des directives européennes en la matière» (9). Les principales dispositions du BVergG sont les suivantes.
15 Aux termes de son article 1er, paragraphe 2, point 3:
«La présente loi fédérale s'applique aux marchés de travaux à titre onéreux qui ont pour objet
...
3) la réalisation par des tiers, par quelque moyen que ce soit, d'un ouvrage répondant aux besoins précisés par le pouvoir adjudicateur».
16 L'article 3 dispose ce qui suit:
«1) La présente loi fédérale s'applique à l'adjudication de marchés de travaux et de concessions de travaux dont le montant estimé hors TVA égale ou dépasse 5 millions d'écus.
...
3) Aucun marché de travaux ne peut être scindé en vue d'être soustrait à l'application de la présente loi fédérale».
17 L'article 6, paragraphe 1, point 3, prévoit que:
«La présente loi fédérale s'applique à la passation de marchés par des pouvoirs adjudicateurs qui sont:
...
3) (Disposition constitutionnelle) des entreprises au sens de l'article 126 b, paragraphe 2, du B-VG (10), dans la mesure où elles sont créées pour satisfaire des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial et où la participation financière de la Fédération dans ces entreprises est majoritaire - pour les autres entreprises soumises au contrôle de la Cour des comptes, dans la mesure où elles ont été créées dans le but précité, il appartient aux Länder de fixer la
réglementation relative à la passation de marchés et de veiller à son application» (11).
18 Le BVergG a mis en place deux types de recours: une procédure de conciliation devant la Bundes-Vergabekontrollkommission (commission de contrôle fédérale des adjudications) et une procédure de recours devant le Bundesvergabeamt (office fédéral des adjudications). La procédure de conciliation doit obligatoirement précéder l'introduction d'un recours devant le Bundesvergabeamt. C'est uniquement dans l'hypothèse où la procédure de conciliation n'a pas permis de régler le différend opposant le
pouvoir adjudicateur et les candidats ou soumissionnaires qu'il devient possible de saisir cette dernière instance.
III - Les faits et la procédure nationale
L'Österreichische Staatsdruckerei
19 Fondée en 1804, l'imprimerie d'État autrichienne (Österreichische Staatsdruckerei, ci-après l'«ÖStDr») était à l'origine une entreprise d'État. Depuis 1981, en vertu du Bundesgesetz vom 1. Juli 1981 über die Österreichische Staatsdruckerei (Staatsdruckereigesetz) (loi fédérale sur l'imprimerie d'État autrichienne, ci-après le «StDrG»), l'ÖStDr a changé de statut. L'article 1er du StDrG est ainsi libellé:
«1) Une entité économique propre a été créée sous la raison sociale `Österreichische Staatsdruckerei' (ci-après la `Staatsdruckerei'). Elle a son siège à Vienne et est dotée de la personnalité juridique.
2) La Staatsdruckerei possède la qualité de commerçant au sens du code de commerce. Elle doit être inscrite dans la partie A du registre du commerce du tribunal de commerce de Vienne.
3) Les activités de la Staatsdruckerei sont exercées selon les règles qui régissent le commerce».
20 Les missions de l'ÖStDr sont fixées par l'article 2 du StDrG. Selon le paragraphe 1 de ce texte, elles consistent en la production exclusive d'imprimés, pour l'administration fédérale, soumis au secret ou au respect de normes de sécurité, comme les passeports, les permis de conduire, les cartes d'identité, le journal officiel fédéral, les recueils fédéraux de lois et de décisions, les formulaires et la Wiener Zeitung. Ce domaine d'activité est communément désigné comme «obligations de service
public». Ces activités sont soumises à un office de contrôle étatique (12). Les prix sont fixés, sur demande du directeur général de l'ÖStDr, par le Conseil économique (13), composé de douze membres dont huit sont nommés par la Chancellerie fédérale ou différents ministères et quatre par le Conseil d'entreprise, selon les règles qui régissent le commerce (14).
21 En vertu de l'article 2, paragraphe 2, l'ÖStDr peut exercer d'autres activités, comme la production d'autres imprimés, ou l'édition et la distribution de livres ou de journaux.
22 Aux termes de l'article 3, «Dans le cadre de l'objet social de l'entreprise, la Staatsdruckerei est habilitée à participer à des entreprises».
La Strohal Gesellschaft et la Strohal Rotationsdruck
23 En février 1995, l'ÖStDr a acquis l'intégralité du capital de la Strohal Gesellschaft (ci-après la «SG»), laquelle a fondé la Strohal Rotationsdruck (ci-après la «SRG» ou la «défenderesse») en octobre de la même année, dont elle a conservé 999 000 ÖS des 1 000 000 d'ÖS constituant le capital social (15).
24 Il ressort des observations écrites de la défenderesse que l'acquisition de la SG par l'ÖStDr s'explique par l'expérience dont bénéficie la SG dans la pratique d'une technique d'impression étrangère aux activités de l'ÖStDr, ainsi que par l'existence d'un fonds de clientèle localisé à l'étranger (16).
25 La SRG ajoute qu'elle a été inscrite, le 4 novembre 1995, au registre des sociétés du Landgericht d'Eisenstadt, avec comme objet social la production d'imprimés selon le procédé de fabrication en question (17).
Le projet Druckzentrum Müllendorf
26 Différents marchés ont été passés par l'ÖStDr au nom de la SRG, alors en cours de fondation, afin de réduire la période transitoire précédant la mise en activité d'une usine d'impression connue sous le nom de «Druckzentrum Müllendorf», dont l'exploitation devait être confiée à la SRG (18).
27 Ainsi, le 18 octobre 1995, l'ÖStDr a-t-elle lancé un appel d'offres portant sur des équipements techniques du «Druckzentrum Müllendorf» non destinés à la production, avant de le retirer à la suite d'une procédure de conciliation engagée par la Wirtschaftskammer Österreich (chambre économique de l'Autriche).
28 Un appel d'offres restreint a ensuite été lancé, au sujet duquel l'ÖStDr a fait savoir aux soumissionnaires que la SRG était le maître de l'ouvrage responsable de l'appel d'offres et de la passation des marchés (19).
29 Une procédure de conciliation a été ouverte à la suite de la demande formée le 15 novembre 1995 par le Verband der Industriellen Gebäudetechnikunternehmen Österreichs (association autrichienne des entreprises industrielles d'équipement de bâtiments), au motif, selon cette dernière, que le projet était un marché public de travaux, au sens du BVergG, et entrait donc dans le champ d'application de cette loi (20).
30 La Bundes-Vergabekontrollkommission a conclu que, en l'absence de pouvoir adjudicateur au sens du BVergG, il n'existait pas de marché public de travaux et que, en conséquence, la question ne relevait pas de sa compétence. Elle n'a cependant pas voulu exclure l'éventuelle nécessité de respecter les dispositions de la directive dans l'hypothèse où l'entité adjudicatrice bénéficierait d'aides communautaires, conformément à l'article 7, paragraphe 1, précité (21).
31 A défaut d'accord amiable, Mannesmann Anlagenbau Austria AG, J. L. Bacon GesmbH, Haustechnische Gesellschaft für Sanitär-, Wärme- und Luft- Technische Anlagen GesmbH et Sulzer Infra Anlagen- und Gebäudetechnik GesmbH (ci-après les «demanderesses») ont engagé devant le Bundesvergabeamt, le 7 décembre 1995, une procédure de recours, conformément à l'article 92 du BVergG (22).
IV - Les questions préjudicielles
32 Le Bundesvergabeamt relève que les dispositions pertinentes du BVergG ont été adoptées en vue de la transposition de la directive 71/305, modifiée, et que, pour l'interprétation de ces dispositions, il convient dorénavant de se reporter à la directive 93/37. Il vous a, en conséquence, déféré les questions préjudicielles suivantes:
«1) Une disposition d'une loi nationale, telle que celle de l'article 3 du Staatsdruckereigesetz (loi relative à l'imprimerie d'État), visée dans la présente espèce, qui confère des droits spéciaux et exclusifs à une entreprise, est-elle de nature à imposer à cette entreprise l'obligation de satisfaire des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial au sens de l'article 1er, sous b), de la directive 93/37/CEE et à soumettre une telle entreprise dans sa totalité au
champ d'application de cette directive, même si ces activités ne constituent qu'une partie de l'activité globale de l'entreprise et que celle-ci prend, par ailleurs, part au marché en tant qu'entreprise commerciale?
2) Dans l'hypothèse où une telle entreprise ne serait soumise au champ d'application de la directive 93/37/CEE que pour ce qui concerne les droits spéciaux et exclusifs qui lui ont été conférés, faut-il considérer qu'une telle entreprise est tenue de créer, sur le plan de l'organisation, les conditions permettant d'éviter le transfert à d'autres secteurs d'activité de moyens financiers découlant des bénéfices tirés de ces droits spéciaux et exclusifs?
3) Lorsqu'un pouvoir adjudicateur commence un projet et que celui-ci doit, de ce fait, être qualifié de marché public de travaux au sens de la directive 93/37/CEE, l'apparition d'un tiers qui, à première vue, ne relève pas du champ d'application ratione personae de cette directive est-elle de nature à modifier la qualification d'un projet de marché public de travaux ou convient-il de considérer qu'une telle manière de procéder constitue une façon de tourner le champ d'application ratione personae de
la directive, incompatible avec l'objectif de la directive?
4) Lorsque, en vue de procéder à des activités commerciales, un pouvoir adjudicateur crée des entreprises dont il détient la majorité des parts, ce qui lui permet d'exercer une domination économique sur cette entreprise, la qualification de pouvoir adjudicateur s'applique-t-elle alors également à ces entreprises liées?
5) Le fait qu'un pouvoir adjudicateur transfère des moyens financiers découlant de droits spéciaux et exclusifs qui lui ont été conférés à des entreprises ayant des activités purement commerciales et dont il détient la majorité des parts implique-t-il, pour la situation juridique de l'entreprise liée, que celle-ci doit, dans sa totalité, être traitée et se comporter comme un pouvoir adjudicateur au sens de la directive 93/37/CEE?
6) Lorsqu'un pouvoir adjudicateur qui à la fois satisfait des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial et effectue des activités commerciales met en place des équipements pouvant satisfaire à l'une et à l'autre de ces finalités, convient-il de qualifier le marché portant sur la mise en place de tels équipements de marché public de travaux au sens de la directive 93/37/CEE ou y a-t-il, en droit communautaire, des critères, et, le cas échéant, lesquels, permettant
de déterminer si de tels équipements doivent être qualifiés d'équipements destinés à remplir les missions à caractère public ou d'équipements destinés à servir les activités commerciales?
7) L'article 7, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 2081/93 du Conseil, du 20 juillet 1993, modifiant le règlement (CEE) n_ 2052/88 concernant les missions des Fonds à finalité structurelle, leur efficacité ainsi que la coordination de leurs interventions entre elles et celles de la Banque européenne d'investissement et des autres instruments financiers existants, soumet-il les bénéficiaires d'aides communautaires aux procédures de recours au sens de la directive 89/665/CEE, même s'ils ne sont,
eux-mêmes, pas des pouvoirs adjudicateurs au sens de l'article 1er de la directive 93/37/CEE?»
33 Avant de traiter les questions posées, il convient d'examiner si le Bundesvergabeamt a qualité pour former une demande de décision préjudicielle.
V - Sur la recevabilité de la demande de décision préjudicielle
34 Le Bundesvergabeamt a décrit les éléments le caractérisant qui, selon lui, justifient sa qualification de «juridiction», au sens de l'article 177 du traité et, par conséquent, la recevabilité de la demande.
35 Les parties, les États membres intervenants et la Commission ne contestent pas, au demeurant, cette qualification.
36 Rappelons les critères auxquels se réfère votre jurisprudence pour reconnaître un organe juridictionnel: origine légale, caractère permanent, recours obligatoire à l'organe en cas de litige, application de règles de droit, compétence de l'organe pour trancher un litige par une décision à caractère obligatoire, indépendance de ses membres, procédure contradictoire (23).
37 Le Bundesvergabeamt a été institué en vertu de l'article 78, paragraphe 1, première phrase, du BVergG. Conformément aux articles 91 et suivants, qui définissent sa compétence, il connaît des litiges relatifs aux procédures de passation des marchés publics telles qu'elles sont organisées par le BVergG. Son origine légale comme son caractère de juridiction obligatoire ne sont donc pas douteux.
38 Le BVergG ne comporte aucune disposition laissant apparaître que le Bundesvergabeamt serait un organe à caractère provisoire. Au demeurant, son institution par la loi témoigne de l'intention de la république d'Autriche de fonder une instance durable, dont la mission est de connaître du contentieux des marchés publics sans limite de ses compétences dans le temps.
39 Par ailleurs, il ressort de l'article 78, paragraphe 2, qui rappelle que le Bundesvergabeamt exerce les pouvoirs que le BVergG lui a donnés, et des articles 91 et suivants, relatifs à sa compétence, que les décisions de ce dernier sont prises en application de règles de droit puisqu'il tranche les litiges nés de la violation du BVergG.
40 Conformément aux articles 91 et 92, paragraphe 2, du BVergG, la procédure devant le Bundesvergabeamt peut être engagée si la procédure de conciliation, préalable obligatoire à sa saisine, n'a pas abouti. Mais, contrairement aux décisions de la Bundes-Vergabekontrollkommission, celles du Bundesvergabeamt ont un caractère obligatoire, comme en témoigne, notamment, le pouvoir d'annulation dont il dispose en vertu de la loi (24).
41 L'indépendance de l'organe autrichien et celle de ses membres ne nous paraissent pas contestables. Il convient, en effet, de relever que son président et son suppléant sont des magistrats professionnels (25), que l'autorité de nomination doit veiller à ce que ses assesseurs représentent équitablement les pouvoirs adjudicateurs et les adjudicataires (26), que les motifs de révocation sont limitativement énumérés et correspondent à des hypothèses objectives ou, en ce qui concerne le motif tenant à
l'existence d'une négligence grave, à des manquements dont l'importance exigée par la loi réduit le risque d'arbitraire ou d'ingérence de la part des autorités administratives (27). Ajoutons que, selon la loi, les membres du Bundesvergabeamt sont indépendants et ne peuvent pas recevoir d'instructions (28), et que l'administration ne peut modifier ou annuler ses décisions (29).
42 Le critère tenant à l'organisation d'une procédure contradictoire semble plus incertain, en l'absence de dispositions de la loi sur ce point.
43 Le fait que la saisine du Bundesvergabeamt soit précédée d'une procédure de conciliation devant la Bundes-Vergabekontrollkommission, laquelle doit entendre les parties (30), n'assure le respect du contradictoire que devant cette autorité, non devant le Bundesvergabeamt. Par ailleurs, telle qu'elle est énoncée, la règle selon laquelle ce dernier peut obtenir toute information des adjudicateurs et des entrepreneurs (31) ne garantit nullement le droit de chaque partie d'être systématiquement
informée des moyens et des prétentions de l'autre partie puisque, selon le texte, le Bundesvergabeamt est le seul destinataire des renseignements qui lui sont communiqués sur sa demande. Or, pour être effectif, l'exercice du contradictoire suppose que les parties soient en mesure de répondre aux arguments adverses.
44 Toutefois, en l'espèce, la décision de renvoi révèle que la présente procédure est consécutive à un débat contradictoire identique à ceux que connaissent les juridictions puisque des mémoires ont été déposés par les parties et que, s'il n'est rien dit sur l'échange entre elles de ces documents, du moins une audience a-t-elle eu lieu devant le Bundesvergabeamt (32). Par suite, il nous paraît clair que, dans les faits, ce dernier a agi en tout point comme une juridiction, au sens de l'article 177
du traité.
45 Pour ces raisons, nous concluons à la recevabilité de la demande.
VI - Sur les questions préjudicielles
46 Les autorités publiques ont une tendance naturelle, peu compatible avec l'objectif de réalisation du marché intérieur, à privilégier les entreprises nationales, dans le souci de préserver l'emploi et de favoriser le développement économique dans leur propre État.
47 La législation communautaire sur les marchés publics s'est développée pour assurer, sur le plan communautaire, le respect des principes de libre concurrence, et de liberté d'établissement et de prestation de services, battus en brèche par ces comportements traditionnels et généralisés (33). L'objectif qui lui est assigné vise à garantir aux opérateurs économiques, quelle que soit leur origine, l'égalité d'accès aux marchés proposés, pour la réalisation de ses projets, par la puissance publique,
indépendamment de la forme que celle-ci peut prendre (34).
48 C'est à la lumière de cet objectif qu'il convient d'interpréter la directive.
49 Le caractère de marché public d'un marché de travaux, dont dépend l'application de la directive, suppose que l'un des contractants réponde à la définition de «pouvoir adjudicateur», au sens de ce texte.
50 La directive a délimité son champ d'application ratione personae en fonction non seulement des entités traditionnellement qualifiées de personnes publiques, telles que l'État, les collectivités territoriales ou les établissements relevant du secteur public, mais aussi des entités publiques ou privées qui poursuivent un objectif d'intérêt général autre qu'industriel ou commercial, qualifiées d'«organismes de droit public».
51 Les questions préjudicielles qui vous ont été déférées portent sur le contenu de cette notion. La plupart d'entre elles peuvent être regroupées selon leur objet en raison des liens étroits qui les unissent.
Sur les première, deuxième et sixième questions
52 Par ces questions, la juridiction nationale tend à savoir, en substance, si une entreprise qui consacre une partie de son activité à la satisfaction de besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, et l'autre à une activité de nature commerciale, doit appliquer les termes de la directive à l'ensemble des marchés de travaux qu'elle passe ou seulement à ceux qui portent sur des équipements exclusivement affectés à la première de ses activités.
53 Il s'agit de savoir non seulement si une entreprise telle que l'ÖStDr présente les caractéristiques justifiant qu'on lui attribue la qualité d'«organisme de droit public», et donc de «pouvoir adjudicateur», mais également si, dans cette hypothèse, tous les marchés de travaux passés par elle, quelle que soit leur nature, entrent dans la catégorie des marchés publics de travaux qui, comme tels, sont soumis à la directive.
54 Nul ne défend la thèse de l'application sélective de la législation en fonction de l'activité de l'entité adjudicatrice. Les demanderesses, la Commission et, dans ses observations orales consacrées à la sixième question, le gouvernement français considèrent que, si un organisme, comme ici l'ÖStDr, exerce une activité commerciale en plus de l'objet en vue duquel il a été créé - qui serait, en l'espèce, la satisfaction de besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel et
commercial -, la partie commerciale de son activité entre aussi dans le champ de la directive, le but dans lequel l'organisme a été créé étant seul déterminant (35). Pour la défenderesse, les gouvernements autrichien et néerlandais, les critères visés à l'article 1er, sous b), deuxième alinéa, de la directive ne permettent pas de qualifier l'ÖStDr d'«organisme de droit public» et de soumettre à la directive l'une quelconque de ses activités.
La notion d'«organisme de droit public»: cumul des conditions légales
55 Rappelons que la directive s'applique aux marchés publics de travaux, qu'elle définit comme des contrats dont l'un des cocontractants est un «pouvoir adjudicateur». Cette dernière notion comprend les «organismes de droit public».
56 Dans sa première question, le juge de renvoi utilise la notion de «droits spéciaux et exclusifs» pour caractériser le statut particulier de l'ÖStDr.
57 La notion de «droits spéciaux ou exclusifs», qui figure à l'article 90, paragraphe 1, du traité, désigne les entreprises qui bénéficient d'un monopole ou se trouvent dans une situation privilégiée reconnue par l'État en contrepartie d'une situation de dépendance vis-à-vis de lui. Ce texte prescrit aux États membres de supprimer ou de s'abstenir de prendre, au sujet de telles entreprises, des mesures contraires aux règles relevant de la politique communautaire de la concurrence.
58 Même si, selon le gouvernement autrichien, «la production et l'édition des imprimés ... ont lieu dans des conditions `privilégiées'...» (36), ce qui pourrait justifier que l'on recoure à la notion de «droits spéciaux ou exclusifs» pour désigner les missions de l'ÖStDr, cette expression ne détermine pas l'application de la législation sur les marchés publics de travaux, de sorte qu'elle ne présente pas d'utilité aux fins d'interprétation de la directive.
59 La notion centrale est ici celle d'«organisme de droit public», entendue au sens d'organisme «créé pour satisfaire spécifiquement des besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial» (37).
60 Deux autres conditions s'ajoutent à cette dernière: un «organisme de droit public» doit être doté de la personnalité juridique et dépendre étroitement de l'État, de collectivités territoriales ou d'autres organismes de droit public (38).
61 Il résulte du texte même de l'article 1er, sous b), deuxième alinéa, de la directive que les trois conditions qu'il énonce ont un caractère cumulatif.
62 Les listes prévues par le troisième alinéa de l'article 1er, sous b), énumèrent les organismes qui remplissent les critères en question.
63 La définition des organismes autrichiens concernés désigne «tous les organismes soumis au contrôle budgétaire de la `Rechnungshof' (Cour des comptes) ne présentant pas un caractère industriel ou commercial» (39). Aux termes de l'article 15, paragraphe 6, du StDrG, l'ÖStDr est soumise au contrôle de la Cour des comptes. Mais l'autre critère énoncé par le texte, comparable au premier critère du deuxième alinéa de l'article 1er, sous b), doit, comme lui, être précisé.
La satisfaction de besoins d'intérêt général à caractère autre qu'industriel ou commercial
64 L'expression «besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial» n'est pas d'une compréhension aisée.
65 La notion d'«intérêt général» peut être approchée, comme l'a fait l'avocat général M. Van Gerven au sujet de celle d'«intérêt économique général», figurant à l'article 90, paragraphe 2, du traité, par l'idée d'«... activités qui bénéficient directement à la collectivité», par opposition aux intérêts individuels ou de groupes (40). Dans cette optique, il est logique de considérer que l'activité de l'ÖStDr consacrée à l'impression de documents administratifs officiels tels que des passeports, des
cartes d'identité ou des recueils de loi est destinée à la satisfaction de besoins d'intérêt général.
66 En la matière, la difficulté est surtout de déterminer la frontière qui sépare les activités d'intérêt général à caractère industriel ou commercial de celles qui n'ont pas ce caractère.
67 Votre Cour a énoncé - dans un contexte légal différent, quoique proche, puisqu'il s'agissait des relations entre l'État et les entreprises publiques - un certain nombre d'indices qui permettent de tenter de définir une ligne de partage.
68 Elle a indiqué que «... l'État peut agir soit en exerçant l'autorité publique, soit en exerçant des activités de caractère industriel ou commercial consistant à offrir des biens et des services sur le marché» (41). Dans un autre arrêt, elle a fait observer que «... les entreprises privées déterminent ... leur stratégie industrielle et commerciale en tenant compte, notamment, des exigences de rentabilité. Les décisions des entreprises publiques, par contre, peuvent subir l'impact de facteurs d'un
ordre différent, dans le cadre de la poursuite, par les autorités publiques qui peuvent influencer ces décisions, des buts d'intérêt général» (42).
69 La description ainsi faite des activités publiques et privées permet de mieux cerner le type de domaine couvert par les «organismes de droit public» désignés par la directive. Le législateur communautaire a souhaité que celle-ci s'applique aux organismes poursuivant la satisfaction de besoins d'intérêt général dont l'activité échappe, en tout ou partie, à la logique du marché. Par leur nature, qui les désigne comme relevant des missions essentielles dévolues aux pouvoirs publics, certaines
activités ne peuvent être soumises à un critère de rentabilité et n'ont donc pas de but lucratif (43). On peut penser que, si le législateur a fixé la frontière qui sépare les organismes dont l'activité est soumise à la réglementation sur les marchés publics des autres organismes, au moyen du critère tiré des «besoins d'intérêt général à caractère autre qu'industriel ou commercial», c'est parce que ces derniers se trouvent soumis à une concurrence de la part d'autres opérateurs économiques qui les
dissuade de choisir leurs cocontractants sur le fondement de critères discriminatoires. De ce fait, les contraintes posées par la législation se révèlent moins utiles.
70 En l'espèce, l'activité confiée à l'ÖStDr par le StDrG consiste en la production de documents administratifs officiels dont certains servent à l'identification des personnes, tandis que d'autres sont employés à la diffusion des textes législatifs, réglementaires et administratifs de l'État, de sorte que la fonction de ces documents est étroitement liée à l'ordre public et au fonctionnement institutionnel de la république d'Autriche. La nature spécifique des besoins que l'ÖStDr est chargée de
satisfaire, qui se rattachent ainsi à l'exercice de prérogatives de puissance publique, explique que son activité ait lieu dans des conditions qui échappent en grande partie à la concurrence puisque, d'une part, elle prend la forme d'un monopole (44) et, d'autre part, même s'ils sont déterminés selon les règles qui régissent le commerce, ses prix sont fixés par une autorité émanant principalement des pouvoirs publics (45). L'État doit pouvoir bénéficier, à la fois, d'une garantie d'approvisionnement
et de conditions de production qui assurent le respect de normes de confidentialité et préviennent les risques de reproduction illicite des documents imprimés.
71 Pour ces raisons, nous pensons que l'ÖStDr poursuit la satisfaction de «besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial», au sens de la directive.
Le critère finaliste
72 Il faut ensuite vérifier si l'ÖStDr a été créée «pour satisfaire spécifiquement» les besoins auxquels elle est chargée de répondre.
73 Le but de la création de l'organisme est seul déterminant, selon le texte, pour que celui-ci puisse être considéré comme un «organisme de droit public», au sens de la directive. Ce qui compte est, naturellement, l'objectif effectivement poursuivi. Le but annoncé de satisfaire des besoins industriels ou commerciaux, qui dissimulerait des activités d'intérêt général dans le dessein d'échapper aux règles contraignantes de la loi, ne saurait être retenu par le juge national.
74 Cette condition signifie que c'est l'exercice d'une telle activité qui doit avoir motivé la création de l'organisme.
75 Certes, «spécifiquement» ne veut pas dire «exclusivement», de sorte que l'organisme peut exercer d'autres activités sans pour autant échapper à la qualification d'«organisme de droit public». Mais il nous paraît nécessaire de vérifier que celui-ci doit bien son existence à la poursuite de cet objectif spécifique.
76 Si tel est le cas, la preuve sera rapportée du caractère particulier de sa mission, lequel justifie que les marchés qu'il passe soient encadrés par la législation communautaire.
77 Outre qu'il ne ressort pas du texte de la directive, le critère de la part relative d'activité de l'organisme consacrée à la satisfaction de besoins ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, défendu par les gouvernements autrichien et néerlandais (46), nous paraît de nature à faciliter la fraude à la loi. En effet, une entité peut parfaitement avoir été créée dans le but de satisfaire des besoins de nature publique, tout en exerçant des activités purement industrielles ou
commerciales. Or, si ces dernières missions dominent son activité, la lecture proposée aura pour effet de soustraire l'ensemble de l'organisme au régime de la directive. Il suffira donc, pour une collectivité publique, de recourir à cette pratique de façon systématique pour faire échapper l'ensemble des marchés publics de travaux à la législation communautaire.
78 Il ne faut certes pas négliger l'argument selon lequel l'application par extension de cette législation à des activités purement industrielles ou commerciales constitue une lourde contrainte, qui peut apparaître injustifiée puisque les organismes constitués pour exercer des activités identiques n'y sont pas soumis.
79 C'est en choisissant l'instrument juridique approprié aux objectifs poursuivis par les collectivités publiques que cet inconvénient pourra être évité. Dès lors que l'objectif assigné à la création de l'organisme détermine le régime juridique applicable aux marchés qu'il sera amené à conclure, il revient à ses concepteurs, soucieux d'éviter les effets indésirables de ce régime sur des activités qui n'en relèvent pas, de limiter son objet social. Il leur appartient aussi de le faire évoluer si,
comme en l'espèce, l'application de la législation sur les marchés publics à la partie de l'activité purement industrielle ou commerciale de l'entreprise est jugée trop contraignante.
Nature juridique de l'ÖStDr et régime applicable
80 L'ÖStDr a été fondée pour répondre aux commandes d'imprimerie de l'État (47). Elle bénéficie de la personnalité juridique (48). Elle est, par ailleurs, soumise à un office de contrôle étatique (49) ainsi qu'au contrôle de la Cour des comptes (50), ce qui s'explique, selon les déclarations faites à l'audience par la défenderesse, par le fait que la majorité des actions reste dans les mains de l'État autrichien. En conséquence, l'ÖStDr nous paraît devoir être qualifiée d'«organisme de droit
public».
81 Dès lors que l'entreprise a droit à cette qualification, l'ensemble de ses marchés de travaux est soumis aux dispositions de la directive. En effet, l'article 1er, sous a), ne définit pas les marchés publics de travaux, et ne détermine donc pas le champ d'application de la directive, selon l'activité au titre de laquelle les marchés sont passés, mais en fonction des caractéristiques de l'organisme qui a contracté avec l'entrepreneur. C'est donc en ce sens qu'il nous paraît devoir être répondu à
la première et à la sixième question.
82 Par suite, la deuxième question, posée dans l'hypothèse où l'ÖStDr ne serait soumise à la directive que pour ce qui concerne son activité à caractère public, n'appelle pas de réponse.
Sur les troisième, quatrième et cinquième questions
83 Ces questions portent, en substance, sur les conditions que doivent remplir les filiales d'un «pouvoir adjudicateur» pour être elles-mêmes qualifiées de «pouvoir adjudicateur», ainsi que sur l'incidence de l'intervention d'une filiale ne répondant pas à ces conditions sur la qualification d'un projet de marché public de travaux commencé par un «pouvoir adjudicateur».
84 Plus précisément, le juge de renvoi souhaite savoir, en premier lieu, si l'article 1er, sous b), de la directive peut être interprété en ce sens qu'il permet de qualifier d'«organismes de droit public» les entités entrant dans l'une des catégories suivantes:
- les entreprises créées, en vue de satisfaire des besoins à caractère industriel ou commercial, par un «organisme de droit public», et dont ce dernier détient plus de la moitié du capital social;
- les entreprises exerçant des activités commerciales, dont un «organisme de droit public» détient plus de la moitié du capital social, et qui reçoivent de lui des moyens financiers issus de l'exercice par celui-ci d'une activité destinée à satisfaire des besoins d'intérêt général à caractère autre qu'industriel ou commercial.
85 Le texte de la directive prend déjà en compte, dans l'énoncé de la définition des «organismes de droit public», le cas du financement majoritaire d'une personne juridique par une collectivité publique ou par un «organisme de droit public». Mais, nous l'avons vu, les trois conditions énoncées par l'article 1er, sous b), deuxième alinéa, sont cumulatives et, dès lors, il ne suffit pas qu'un organisme soit doté de la personnalité juridique et financé majoritairement par un «organisme de droit
public», pour qu'il soit qualifié d'«organisme de droit public». Encore faut-il qu'il ait été créé en vue de la satisfaction de besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial.
86 La notion de «pouvoir adjudicateur» a reçu une acception plus large, en 1989, afin de ne pas limiter la réglementation communautaire aux seules personnes morales de droit public (51), alors que de nombreuses entités juridiques, tout en échappant à ce critère formel, étaient investies de compétences relevant des missions traditionnelles des collectivités publiques. Le législateur communautaire a ainsi confirmé l'approche de votre jurisprudence caractérisée par une interprétation fonctionnelle de
la notion de «pouvoir adjudicateur» (52). La même logique veut que celle-ci ne comprenne pas les organismes qui, bien qu'étant dans la dépendance d'un tel pouvoir, exercent des activités purement privées (53).
87 En conséquence, pas plus que la domination économique d'une entreprise par un «pouvoir adjudicateur», l'apport à cette entreprise de moyens financiers par le «pouvoir adjudicateur» ne la soumet au régime de la législation sur les marchés publics, dès lors que son activité reste purement commerciale. Comme le souligne justement le gouvernement autrichien, un tel apport relève davantage du domaine du droit communautaire sur les aides d'État (54).
88 Le juge autrichien vous demande également si la qualification de marché public de travaux conférée à un projet de travaux peut être modifiée à la suite de l'intervention d'un tiers qui n'a pas la qualité de «pouvoir adjudicateur», au sens de la directive, au risque que cette façon de procéder constitue un moyen d'échapper à l'application de la directive.
89 La réponse à cette question suppose que les circonstances exactes de «l'apparition» du tiers - pour reprendre la terminologie utilisée par le juge national - dans l'exécution du projet soient précisées.
90 Il résulte de la décision de renvoi que l'appel d'offres à l'origine de la présente affaire préjudicielle a été lancé par la défenderesse, l'ÖStDr ayant retiré l'appel d'offres précédent.
91 La SRG est donc l'entité adjudicatrice chargée de conclure le contrat constitutif du marché de travaux litigieux. Or, celle-ci ne présente pas, selon le juge de renvoi, les caractéristiques d'un «pouvoir adjudicateur», ce qui exclut l'application du régime de la directive.
92 Nous l'avons dit, la conclusion par l'ÖStDr, dans le cadre du même projet, des marchés précédant celui-ci était justifiée par le souci de réduire la période transitoire précédant la mise en activité de l'usine d'impression de la SRG, en cours de fondation. Par ailleurs, l'ÖStDr aurait prévu «une clause dans tous les contrats de prestations, aux termes de laquelle [elle] pourrait à tout moment ... transférer à un tiers de son choix tous les droits et obligations découlant des contrats de
prestations» (55).
93 Ces faits tendent à démontrer que, dès l'origine, le projet en cause entrait dans le domaine d'activité de la SRG, ce qui permet de situer différemment l'action de l'ÖStDr puisque, selon toute vraisemblance, celle-ci concourait à la réalisation d'un projet relevant, dans son intégralité, de l'objet social de sa filiale.
94 La passation du marché de travaux ne paraît donc pas avoir eu lieu pour le compte de l'ÖStDr mais, au contraire au profit de la SRG, ce qui justifierait qu'un tel marché ne relève pas du domaine de la directive.
95 Le Bundesvergabeamt évoque le risque de fraude à la loi que peut constituer le recours à un tiers pour échapper à la législation communautaire des marchés publics.
96 Dans la mesure où la législation communautaire sur les marchés publics de travaux délimite son champ d'application en fonction, notamment, de la qualité des signataires du contrat, un tel risque n'est pas totalement à exclure.
97 Nous avons déjà relevé, cependant, qu'il appartenait au juge saisi du litige de contrôler la réalité des motifs invoqués à l'origine de la création de l'organisme qui conclut le marché litigieux. L'appréciation des faits à laquelle il se livrera décidera de la qualification juridique pertinente (56).
98 Ainsi est-il utile que le juge vérifie in concreto si une entreprise n'a pas été constituée par un «pouvoir adjudicateur» pour conclure des marchés de travaux à seule fin d'éviter l'application de la législation communautaire. Le but effectif de la création de l'entreprise, qui serait, dans cette hypothèse, de conclure des marchés publics de travaux, peut ainsi conduire la juridiction à décider que le marché litigieux a été passé pour le compte du «pouvoir adjudicateur», ce qui justifierait
l'application de la directive.
99 Le «pouvoir adjudicateur» peut aussi choisir de s'adresser à une entreprise déjà constituée. Dans ce cas, la fraude à la loi apparaît plus difficilement discernable si, comme il est vraisemblable, l'entreprise est choisie parmi celles dont la constitution n'est nullement destinée à l'exercice d'une activité visant à la satisfaction de besoins d'intérêt général ayant un caractère autre qu'industriel ou commercial, car alors les marchés qu'elle passe échappent traditionnellement à la législation
communautaire.
100 Le juge vérifiera qu'il existe bien un lien entre les travaux envisagés et l'objet social de l'entreprise. Il est clair qu'une entreprise qui conclut un marché pour la réalisation de travaux qui ne contribuent pas à sa propre activité doit être présumée agir pour le compte d'autrui. Dans l'hypothèse où un «pouvoir adjudicateur» peut être identifié comme étant ce bénéficiaire, les dispositions communautaires relatives aux marchés publics trouvent logiquement à s'appliquer.
Sur la septième question
101 Par cette question, le juge national cherche à savoir si le financement communautaire d'un projet de travaux est subordonné au respect, par l'entreprise qui en est le bénéficiaire, de la législation communautaire sur les marchés publics, même si celle-ci, en l'espèce la SRG, n'est pas un «organisme de droit public» et n'a donc pas la qualité de «pouvoir adjudicateur».
102 Le texte de l'article 7, paragraphe 1, du règlement peut être compris de deux manières différentes. Soit la Communauté, lorsqu'elle procède au financement d'une action, s'assure que les destinataires de l'aide respectent la législation communautaire qui leur est applicable. Soit la législation communautaire visée par le texte devient applicable aux opérateurs qui bénéficient de ce financement alors même que, dans d'autres circonstances, il n'en relèveraient pas.
103 La première lecture nous paraît être la seule possible.
104 Le texte ne dit pas que les dispositions communautaires concernant la passation des marchés publics s'imposent désormais à tous les opérateurs économiques qui souhaitent bénéficier d'un financement communautaire pour la mise en oeuvre des actions relevant du règlement.
105 Il se réfère à la «compatibilité» et à la «conformité», avec la législation communautaire sur les marchés publics, des actions prétendant à un financement de la Communauté. La conformité des actions suppose d'abord que celles-ci entrent dans le champ d'application défini par chacun des textes communautaires applicables. L'action d'un organisme qui ne réunit pas les caractéristiques légales d'un «organisme de droit public», au sens de la directive, est à l'évidence compatible avec cette dernière
puisqu'il ne se trouve pas soumis au régime qu'elle édicte.
106 Le caractère très général du renvoi plaide également en ce sens. L'extension indifférenciée de la législation à tous les opérateurs agissant dans le cadre d'actions financées par la Communauté risque de créer des difficultés d'interprétation des textes peu conformes à la sécurité juridique.
107 Surtout, l'application des directives sur les marchés publics à des organismes dont l'activité est purement industrielle ou commerciale serait difficilement justifiable au regard de la finalité de cette législation, qui est, rappelons-le, de garantir l'égalité d'accès des opérateurs économiques aux marchés proposés par des collectivités publiques ou par des organismes exerçant des activités à caractère public.
108 Le souci du législateur semble être plutôt de veiller à ce que les dépenses exposées par la Communauté dans le cadre des politiques structurelles soient strictement limitées aux opérateurs respectueux des règles du droit communautaire et ne servent pas à cautionner des comportements qui lui seraient contraires.
109 Dès lors, il y a lieu de considérer que l'organisme bénéficiaire d'un financement communautaire, qui n'a pas la qualité d'«organisme de droit public», au sens de la directive 93/37, n'est pas tenu par les dispositions de la directive, précitée, relative aux procédures de recours en matière de marchés publics.
Conclusion
110 Au regard de ces considérations, nous vous proposons de répondre aux questions posées de la façon suivante:
«1) La directive 93/37/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux, doit être interprétée en ce sens que:
- constitue un `organisme de droit public', au sens de l'article 1er, sous b), de ce texte, une imprimerie dotée de la personnalité juridique, créée en vue de la production exclusive de documents administratifs officiels destinés à l'État, qui en assure le contrôle, notamment par la détention de plus de la moitié de son capital social, et fixe les prix desdits documents, même si cette partie de son activité est devenue minoritaire au regard de son activité globale;
- ses dispositions sont applicables à l'ensemble des marchés de travaux passés par un `organisme de droit public', au sens de l'article 1er, sous b), de ce texte.
2) L'article 1er, sous b), de la directive 93/37 doit être interprété en ce sens que ne constitue pas un `organisme de droit public', au sens de ce texte, l'entreprise créée, à seule fin de satisfaire des besoins à caractère industriel ou commercial, par un `organisme de droit public' qui détient plus de la moitié de son capital social, même si cette entreprise reçoit dudit organisme des moyens financiers issus de l'exercice par celui-ci d'une activité consacrée à la satisfaction de besoins
d'intérêt général à caractère autre qu'industriel ou commercial. Le fait, pour une telle entreprise, de conclure un contrat portant sur des travaux, dans le cadre d'un projet global conduit à l'origine par un `organisme de droit public', n'a pas pour conséquence de soumettre ledit contrat aux prescriptions de la directive 93/37, à moins que le contrat n'ait été conclu pour le compte de l'`organisme de droit public'.
3) L'article 7, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 2052/88 du Conseil, du 24 juin 1988, concernant les missions des Fonds à finalité structurelle, leur efficacité ainsi que la coordination de leurs interventions entre elles et celles de la Banque européenne d'investissement et des autres instruments financiers existants, tel que modifié par l'article 1er du règlement (CEE) n_ 2081/93 du Conseil, du 20 juillet 1993, doit être interprété en ce sens qu'une entreprise bénéficiaire d'un financement
communautaire n'est pas soumise aux procédures de recours prescrites par la directive 89/665/CEE du Conseil, du 21 décembre 1989, portant coordination des dispositions législatives, réglementaires et administratives relatives à l'application des procédures de recours en matière de passation des marchés publics de fournitures et de travaux, si elle ne constitue pas un `organisme de droit public', au sens de l'article 1er, sous b), de la directive 93/37.»
(1) - JO L 199, p. 54. Les termes «pouvoirs adjudicateurs» et «organisme de droit public» apparaissent également dans la directive 92/50/CEE du Conseil, du 18 juin 1992, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de services [JO L 209, p. 1, article 1er, sous b)], et dans la directive 93/36/CEE du Conseil, du 14 juin 1993, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de fournitures [JO L 199, p. 1, article 1er, sous b)], ce qui confère à
l'interprétation de ces notions une portée dépassant le seul cadre de la législation sur les marchés publics de travaux.
(2) - Directive du 26 juillet 1971, portant coordination des procédures de passation des marchés publics de travaux (JO L 185, p. 5), modifiée en dernier lieu par la directive 90/531/CEE, du 17 septembre 1990, relative aux procédures de passation des marchés dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des télécommunications (JO L 297, p. 1).
(3) - L'annexe II énumère les activités professionnelles relevant du domaine du bâtiment et du génie civil. Le point c) définit un «ouvrage» comme étant «le résultat d'un ensemble de travaux de bâtiment ou de génie civil destiné à remplir par lui-même une fonction économique ou technique».
(4) - JO L 395, p. 33.
(5) - Article 1er.
(6) - Règlement concernant les missions des Fonds à finalité structurelle, leur efficacité ainsi que la coordination de leurs interventions entre elles et celles de la Banque européenne d'investissement et des autres instruments financiers existants (JO L 185, p. 9). Le présent article 7, paragraphe 1, a été modifié par l'article 1er du règlement (CEE) n_ 2081/93 du Conseil, du 20 juillet 1993, modifiant le règlement précité (JO L 193, p. 5).
(7) - Pages 2 et 3, point 1.1, de la traduction en français.
(8) - BGBl. n_ 462/1993.
(9) - Page 4 de la traduction en français.
(10) - Loi constitutionnelle fédérale autrichienne.
(11) - Le juge de renvoi indique que, dans ce texte, «... il est question d'entreprises au sens de l'article 126 b, paragraphe 2, du B-VG. Il s'agit d'entreprises auxquelles participe la Fédération, seule ou en commun avec d'autres personnes morales relevant de la compétence de la Cour des comptes, à concurrence d'au moins 50 % du capital social, initial ou propre, ou que dirige la Fédération, seule ou avec d'autres personnes morales de ce type. Est réputée équivalente à une telle participation
financière la domination d'une entreprise par d'autres moyens financiers, économiques ou structurels. La compétence de la Cour des comptes s'étend également aux entreprises en aval qui remplissent les conditions fixées au présent paragraphe» (p. 13 de la traduction en français).
(12) - Article 13, paragraphe 1, du StDrG.
(13) - Ibidem, article 12. Plus précisément, la fixation des prix est confiée par le Conseil économique à un comité composé de trois de ses membres: le président du Conseil économique, un des membres désignés par la Chancellerie fédérale et un des membres désignés par le ministère chargé des finances.
(14) - Ibidem, article 12, paragraphe 2.
(15) - ÖS: schilling autrichien.
(16) - Point 16.
(17) - Ibidem, point 17.
(18) - Ibidem, points 21 à 23. Pages 7 et 8 de la traduction en français de la décision de renvoi.
(19) - Page 9 de la traduction en français de la décision de renvoi.
(20) - Ibidem.
(21) - Pages 9 et 10 de la traduction en français de la décision de renvoi.
(22) - Ibidem, p. 10. Selon le juge de renvoi, «Le 21 décembre 1995, les demanderesses ont émis un mémoire complémentaire dans lequel elles ont indiqué qu'elles avaient été informées le 7 décembre 1995 par l'entité adjudicatrice que l'appel d'offres restreint en cause avait été annulé». Il ajoute que «Simultanément, on a laissé entrevoir aux demanderesses la mise en oeuvre d'une `procédure ouverte accélérée'». Les demanderesses confirment l'exposé des faits de l'ordonnance de renvoi. Toutefois, la
défenderesse indique qu'elle «a lancé ... un appel d'offres sous la forme de la procédure ouverte accélérée, publié dans le journal officiel ... du 7 au 10 décembre 1995...» et que «c'est à l'encontre de cet appel d'offres que les demanderesses ont introduit auprès du Bundesvergabeamt ... la procédure ... qui a donné lieu à la présente procédure préjudicielle» (p. 15 de la traduction en français de ses observations). S'il existe donc des divergences dans la description de la procédure nationale à
l'origine de la présente affaire, il n'apparaît pas qu'elles soient de nature à gêner la tâche de votre Cour dans la mesure où, en l'état des informations portées à notre connaissance, les caractéristiques des deux procédures d'appel d'offres invoquées ne modifient pas les termes du débat que la juridiction de renvoi souhaite vous soumettre.
(23) - Voir, notamment, les arrêts du 30 juin 1966, Vaassen-Göbbels (61/65, Rec. p. 377); du 27 avril 1994, Almelo e.a. (C-393/92, Rec. p. I-1477), et du 12 décembre 1996, Procédures pénales contre X (C-74/95 et C-129/95, Rec. p. I-6609).
(24) - Article 94, paragraphe 1, du BVergG.
(25) - Article 78, paragraphe 4.
(26) - Ibidem, article 78, paragraphe 5.
(27) - Ibidem, article 79.
(28) - Ibidem, article 80, paragraphe 1.
(29) - Ibidem, article 78, paragraphe 1.
(30) - Ibidem, article 88, paragraphe 1.
(31) - Ibidem, article 84, paragraphe 1.
(32) - Page 19 de la traduction en français de la décision de renvoi.
(33) - Deuxième considérant de la directive. Voir aussi, sur le but poursuivi par la directive - à l'époque de ces affaires, il s'agissait de la directive 71/305 -, les arrêts du 20 septembre 1988, Beentjes (31/87, Rec. p. 4635, point 11), et du 22 juin 1989, Fratelli Costanzo (103/88, Rec. p. 1839, point 18).
(34) - Voir, sur les raisons justifiant l'adoption d'une réglementation en matière de marchés publics, Brunelli, P.: Marchés publics et Union européenne - Nouvelles règles communautaires, 1995, p. 9 et suiv. Sur la priorité donnée au critère matériel sur le critère formel, votre Cour a jugé, dans une affaire dont la solution dépendait du sens donné à la notion d'État, que cette notion «[devait] recevoir une interprétation fonctionnelle» et que «le but de la directive ... serait en effet compromis si
l'application du régime de la directive devait être exclue du seul fait qu'un marché public de travaux est adjugé par un organisme qui, tout en ayant été créé pour exécuter des tâches que la loi lui confère, n'est pas formellement intégré à l'administration de l'État» (arrêt Beentjes, précité, point 11).
(35) - Voir, notamment, p. 16 de la traduction en français des observations écrites de la Commission.
(36) - Page 6 de la traduction en français de ses observations écrites.
(37) - Article 1er, sous a) et b).
(38) - Ce lien de dépendance peut être de différente nature: la subordination financière de l'organisme, le contrôle de sa gestion, ou la nomination de membres de son organe d'administration, de direction ou de surveillance [voir l'article 1er, sous b), deuxième alinéa, troisième tiret, précité].
(39) - Annexe I, XI, E.1, b), de l'acte relatif aux conditions d'adhésion du royaume de Norvège, de la république d'Autriche, de la république de Finlande et du royaume de Suède et aux adaptations des traités sur lesquels est fondée l'Union européenne (JO 1994, C 241, p. 21).
(40) - Point 27 de ses conclusions sous l'arrêt du 10 décembre 1991, Merci convenzionali porto di Genova (C-179/90, Rec. p. I-5889). Dans son article «La notion de `pouvoir adjudicateur' en matière de marchés de travaux», Valadou P. donne cette définition: «Le besoin d'intérêt général peut donc être défini comme l'exigence manifestée par la société (locale ou nationale) dans son intérêt collectif». Il ajoute qu'«il y a intérêt général dès l'instant que l'intérêt en cause ne se confond pas avec
l'intérêt propre et exclusif d'une personne ou d'un groupement de personnes bien déterminé». Semaine juridique, Éd. E, n_ 3, 1991, p. 33.
(41) - Arrêt du 16 juin 1987, Commission/Italie (118/85, Rec. p. 2599, point 7). Notons que la distinction entre les activités qui relèvent de la puissance publique et celles qui, bien qu'exercées par des personnes publiques, entrent dans le domaine privé procède surtout des arrêts rendus par votre Cour au sujet du caractère applicable à certaines activités des règles de concurrence du traité. Voir, par exemple, les arrêts du 19 janvier 1994, SAT Fluggesellschaft (C-364/92, Rec. p. I-43), et du 18
mars 1997, Diego Calì et Figli (C-343/95, Rec. p. I-1547).
(42) - Arrêt du 6 juillet 1982, France, Italie et Royaume-Uni/Commission (188/80, 189/80 et 190/80, Rec. p. 2545, point 21).
(43) - Sur cette question, voir notamment l'article, précité, de Valadou P., point 12; Flamme M.-A., Flamme P., «Enfin l'Europe des marchés publics», Actualité juridique - Droit administratif, 20 novembre 1989, p. 653; Lee P., Public procurement, 1992, p. 56 et 57.
(44) - Page 6 de la traduction en français des observations écrites du gouvernement autrichien.
(45) - Voir point 20 des présentes conclusions. Il s'agit donc d'une fixation administrative des prix, ce qui veut dire que ces derniers ne peuvent pas être modifiés sans une décision formelle de l'autorité publique. De plus, la décision de fixation des prix semble devoir tenir compte de considérations se rapportant à la mission spécifique de l'ÖStDr. Ainsi, dans une formulation quelque peu sibylline, la StDrG précise que les prix tiennent compte «des capacités de disponibilités nécessaires», ce qui
laisse entendre que leur niveau couvre les coûts engendrés par le maintien d'une capacité de production suffisamment importante pour satisfaire les besoins de l'État, même si ces facteurs de production restent parfois sous-employés.
(46) - Pour défendre l'idée que l'ÖStDr n'est pas un «organisme de droit public», le gouvernement autrichien indique, notamment, que «... la part des activités `privilégiées' de l'ÖStDr ne représente plus que 15 à 20 % de son activité globale» (p. 7 de la traduction en français de ses observations écrites).
(47) - Points 2 et suiv. des observations écrites de la défenderesse.
(48) - Voir point 19 des présentes conclusions.
(49) - Voir point 20 des présentes conclusions.
(50) - Voir point 63 des présentes conclusions.
(51) - La directive 71/305 qualifiait de «pouvoirs adjudicateurs» l'État, les collectivités territoriales et certaines personnes morales de droit public. La directive 89/440/CEE du Conseil, du 18 juillet 1989, modifiant la directive 71/305/CEE (JO L 210, p. 1), a notamment substitué à la notion de «personnes morales de droit public» celle d'«organismes de droit public» tels que mentionnés dans la directive 93/37.
(52) - Arrêt Beentjes, précité.
(53) - Voir points 64 et suiv. des présentes conclusions.
(54) - Page 11 de la traduction en français des observations écrites. Ajoutons toutefois, pour être complet, que, en vertu de l'article 2 de la directive, des entités qui n'ont pas la qualité de «pouvoirs adjudicateurs» peuvent être soumises aux dispositions de ce texte lorsque les marchés de travaux qu'elles ont passés sont subventionnés directement à plus de 50 % par un «pouvoir adjudicateur». Encore faut-il que les marchés en question «figur[ent] dans la classe 50 groupe 502 de la nomenclature
générale des activités économiques dans les Communautés européennes (NACE)» ou «portent sur les travaux de bâtiments relatifs aux hôpitaux, aux équipements sportifs, récréatifs et de loisirs, aux bâtiments scolaires et universitaires et aux bâtiments à usage administratif» (article 2, paragraphe 2). Il s'agit là d'une dérogation au principe selon lequel la directive s'applique aux marchés de travaux passés par un «pouvoir adjudicateur». S'il envisage de se prononcer sur l'application de cette
disposition à l'affaire dont il est saisi, le juge national devra examiner si le marché de travaux litigieux, qui, manifestement, ne porte pas sur la construction de bâtiments du type de ceux énumérés à la fin du paragraphe 2 de l'article 2, entre dans le groupe 502, précité, de la NACE, lequel comprend notamment les entreprises de génie civil. Il lui appartiendra aussi de vérifier le niveau des subventions éventuellement versées par l'ÖStDr à la SRG.
(55) - Page 8 de la traduction en français de la décision de renvoi.
(56) - Voir les points 72 et 73 des présentes conclusions.