Avis juridique important
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61995C0354
Conclusions de l'avocat général Léger présentées le 6 mars 1997. - The Queen contre Minister for Agriculture, Fisheries and Food, ex parte, National Farmers' Union e.a.. - Demande de décision préjudicielle: High Court of Justice, Queen's Bench Division - Royaume-Uni. - Politique agricole commune - Règlement (CEE) nº 3887/92 - Système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires - Modalités d'application - Interprétation et validité des sanctions. - Affaire
C-354/95.
Recueil de jurisprudence 1997 page I-04559
Conclusions de l'avocat général
1 La High Court of Justice, Queen's Bench Division (Royaume-Uni) (ci-après la «High Court»), vous invite à interpréter et à apprécier la validité de l'article 9 du règlement (CEE) n_ 3887/92 de la Commission, du 23 décembre 1992, portant modalités d'application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires (1) (ci-après le «règlement n_ 3887/92» ou le «règlement litigieux»).
Il vous est demandé, en substance, de dire si les sanctions, prévues à l'encontre des exploitants agricoles qui, de bonne foi, surestiment de plus de 20 % la superficie de leurs terres à l'occasion de déclarations de demandes d'aides, sont conformes au droit communautaire.
Le droit communautaire
2 La présentation de la réglementation pertinente dans cette partie de nos conclusions sera délibérément succincte. Nous reviendrons en détail sur chacun des textes adéquats à l'occasion de l'étude des réponses à donner aux questions préjudicielles soumises par la High Court.
3 En 1992, la politique agricole commune (ci-après la «PAC») a fait l'objet de réformes profondes qui comprenaient, notamment, la création ou la modification d'un certain nombre de régimes d'aides. L'objectif premier poursuivi par le législateur communautaire était de contrôler l'augmentation du coût financier de la PAC. En outre, il s'agissait d'éviter la surproduction (2).
4 Afin de mener à bien le premier objectif précédemment défini, le législateur communautaire s'est efforcé de substituer aux anciens systèmes de soutien aux prix, au sein desquels des prix artificiellement élevés étaient maintenus grâce à des mécanismes d'intervention, de nouveaux systèmes fondés sur les principes de contrôle de l'offre et de la réduction de prix, accompagnés d'une aide directe aux exploitants agricoles (3).
5 La mise en oeuvre des mécanismes destinés à éviter la surproduction a consisté à modifier radicalement les principes qui commandaient l'octroi des aides. Ainsi, depuis 1992, les aides «cultures arables» ne sont plus liées aux volumes de la production, mais à l'hectare, et le gel des terres constitue un préalable à l'éligibilité aux paiements compensatoires (4). De plus, pour le calcul des aides «aux animaux», des critères d'extensification ont été fixés (5).
6 Pour le bon fonctionnement des régimes d'aides en cause, le législateur communautaire a mis en place un système intégré de contrôle et de gestion. Pour obtenir ces aides, les agriculteurs sont tenus de respecter un certain nombre d'obligations et, notamment, de remplir des déclarations relatives à la superficie des terres pour lesquelles l'aide est réclamée (6). L'efficacité du système intégré de gestion et de contrôle relatif aux aides est subordonnée à l'exactitude des données relatives aux
superficies fournies par les agriculteurs. Le législateur communautaire a, de ce fait, prévu des mesures destinées à prévenir et à sanctionner les erreurs et les fraudes (7).
7 Deux types de législations communautaires sont en cause: une législation spécifique concernant le régime des primes agricoles pour les bovins et celui des primes aux terres, ainsi qu'une législation générale portant sur les modalités d'application du système intégré de gestion et de contrôle relatif aux aides susvisées (ci-après le «système intégré»).
I - La législation spécifique concernant les régimes d'aides applicable aux bovins et aux terres
8 L'éligibilité aux aides en cause est subordonnée au respect de certaines exigences relatives à l'utilisation des terres. En particulier, dans le cadre des paiements liés aux cultures arables ou au gel des terres (autrement nommés «aides `surfaces'»), une superficie minimale de terres doit être laissée en jachère ou utilisée à des fins non alimentaires. De même, dans le cadre des primes accordées pour les animaux (autrement nommées «aides `animaux'»), une superficie fourragère minimale par animal
est exigée, afin d'éviter le pâturage trop intensif.
A - Le régime d'aides applicable aux bovins
Le règlement (CEE) n_ 805/68 du Conseil (8)
9 Le règlement n_ 805/68, tel que modifié par le règlement n_ 2066/92, prévoit en ses articles 4a à 4l l'octroi de différentes primes dont la prime spéciale pour les bovins mâles et la prime à la vache allaitante. Le montant de ces primes est fonction du nombre d'animaux au titre duquel l'agriculteur peut en bénéficier. Pour encourager la production extensive, l'article 4g du règlement n_ 805/68 modifié a prévu que le paiement de la prime spéciale et de la prime à la vache allaitante est limité par
l'application d'un facteur de densité des animaux détenus sur l'exploitation. Ce facteur de densité est exprimé en nombre d'unités de gros bétail (ci-après «UGB») par rapport à la superficie fourragère de cette exploitation consacrée à l'alimentation des animaux en question.
Le règlement (CEE) n_ 3886/92 de la Commission (9)
10 Ce règlement établit les modalités d'application des régimes de primes prévus par le règlement n_ 805/68. L'article 42, paragraphe 1, du règlement n_ 3886/92 prévoit que, pour chaque producteur qui, au titre de la même année civile, introduit une demande d'aides «surfaces» (10) visée à l'article 6, paragraphe 1, du règlement n_ 3508/92, ainsi que, au moins, une demande de prime spéciale ou de prime à la vache allaitante, les autorités compétentes établissent le nombre d'UGB correspondant au
nombre d'animaux pour lequel une prime peut être octroyée compte tenu de la superficie fourragère de l'exploitation.
B - Le régime d'aides applicable aux cultures arables et au gel des terres
Le règlement (CEE) n_ 1765/92 du Conseil
11 Ce règlement instaure un nouveau régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables. Mis en place en 1992 et entré en vigueur à partir de la campagne de commercialisation 1993/1994, il a pour objectifs de garantir un meilleur équilibre du marché en rapprochant les prix communautaires de certaines cultures arables des prix du marché mondial, de compenser la perte de revenu résultant de la réduction des prix institutionnels par un paiement compensatoire aux producteurs qui cultivent
ces produits et d'éviter la surproduction. Ne seront donc reconsidérées comme zones éligibles, par ce nouveau régime, que les zones emblavées en cultures arables ou qui ont bénéficié d'un régime d'aides publiques en tant que terres mises en jachère (11).
12 Le montant des paiements compensatoires est fonction des caractéristiques structurelles spécifiques qui influencent les rendements de chaque culture arable (12).
13 Deux types de régimes sont prévus: un «régime général» pour tous les producteurs et un «régime simplifié» pour les seuls petits producteurs (13).
14 S'agissant du régime général (14), la volonté du législateur communautaire de subordonner l'octroi des paiements compensatoires à l'obligation absolue de geler une certaine partie des terres est clairement exprimée dans le préambule du règlement n_ 1765/92:
«considérant que, pour bénéficier des paiements compensatoires au titre du régime général, les producteurs sont tenus de geler un pourcentage préétabli de leurs terres arables...» (15); «considérant que l'obligation de gel devrait porter dans un premier temps sur 15 % des terres de l'exploitation pour lesquelles des demandes de paiement sont faites...» (16).
15 Le titre I du règlement n_ 1765/92 est consacré au paiement compensatoire. Son article 2 établit les règles générales gouvernant l'octroi de ces primes; notamment il est prévu que la même superficie ne peut ouvrir droit à des paiements compensatoires aux cultures et au gel des terres, et à des primes aux bovins, prévus par le règlement n_ 805/68. Il est, en outre, précisé que, pour pouvoir bénéficier des paiements compensatoires au titre du régime général, il est nécessaire de respecter les
prescriptions de l'article 7 du règlement n_ 1765/92. Cet article concerne exclusivement les règles applicables au gel des terres.
16 Les articles 4 à 6 du règlement n_ 1765/92 fixent les méthodes de calcul des paiements compensatoires, qui diffèrent selon le type de cultures arables envisagé.
17 Le gel des terres est la pierre angulaire du système. Il a ainsi deux fonctions distinctes: d'une part, il ouvre droit, au même titre qu'une culture, à un paiement compensatoire (17) et, d'autre part, son existence conditionne le droit de l'agriculteur à une aide aux cultures arables.
II - La législation générale concernant les modalités d'application des régimes d'aides
18 Afin de simplifier la gestion des régimes d'aides susvisés (18) et d'éviter la fraude (19), les règlements nos 3508/92 et 3887/92 ont mis en place un système intégré de gestion et de contrôle relatif, notamment, aux aides dont il est question dans la présente affaire.
19 La simplification de la gestion des régimes d'aides en cause, premier objectif poursuivi par le nouveau système, devait être atteinte par l'instauration d'une procédure unique pour le contrôle de toutes les demandes d'aides liées à la superficie des terres (20).
20 La lutte efficace contre la fraude, second objectif énoncé par le législateur communautaire, devait être assurée par l'introduction d'un système de sanctions échelonnées (21).
Le règlement (CEE) n_ 3508/92 du Conseil
21 Ce règlement s'applique, notamment, au régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables, établi par le règlement n_ 1765/92, et au régime de primes aux producteurs de viande bovine, établi par le règlement n_ 805/68. Son article 6 dispose que, pour être admis au bénéfice d'un ou de plusieurs régimes d'aides communautaires, chaque exploitant présente, pour chaque année, une demande d'aides «surfaces» indiquant les parcelles agricoles, y compris les superficies fourragères, faisant
l'objet d'une mesure de retrait de terres arables ainsi que celles qui ont été mises en jachère.
22 L'article 12 de ce règlement prévoit que la Commission en arrêtera les modalités d'application.
23 Cette exigence a été satisfaite par le règlement litigieux.
Le règlement (CEE) n_ 3887/92 de la Commission
24 Ce règlement définit les modalités d'application du système intégré relatif à certains régimes d'aides communautaires. Son but premier est de permettre la mise en oeuvre efficace de la réforme de la PAC et, notamment, de résoudre les problèmes administratifs relevant de l'établissement, par la réforme, de plusieurs régimes d'aides liés à la superficie (22). Le législateur communautaire a également indiqué que des moyens spécifiques doivent être mis en oeuvre pour parvenir à ce but et, notamment,
des dispositions permettant de prévenir et de sanctionner de manière efficace les irrégularités et les fraudes, en tenant compte des particularités des différents régimes.
25 L'article 4 du règlement n_ 3887/92 fixe les exigences que toute demande d'aides «surfaces» doit respecter. Son premier paragraphe prévoit ainsi que la demande d'aides «surfaces» doit contenir l'identification de l'exploitant; les éléments devant permettre l'identification de toutes les parcelles agricoles de l'exploitation, leur superficie, leur localisation, leur utilisation (23), le cas échéant s'il s'agit d'une parcelle irriguée, ainsi que le régime d'aides concerné; une déclaration du
producteur attestant avoir pris connaissance des conditions pour l'octroi des aides en cause. Son paragraphe 2 précise quelles sont les conditions à respecter pour pouvoir valablement modifier les déclarations ainsi faites. Le paragraphe 4 de l'article 4 en question dispose que la déclaration de gel des terres ainsi que la déclaration de culture prévue dans le cadre du régime des cultures en vue d'une production de produits non alimentaires sont introduites avec la demande d'aides «surfaces» ou font
partie de celle-ci.
26 L'article 5 fixe les exigences que toute demande d'aides «animaux» doit contenir.
27 Les règles relatives aux contrôles du respect des conditions relatives à l'octroi des aides et primes figurent au titre IV du règlement n_ 3887/92 (24).
28 L'article 6, point 1, du règlement n_ 3887/92 précise que les contrôles administratifs et réalisés sur place sont effectués de manière à assurer la vérification effective du respect des conditions pour l'octroi des aides et des primes.
29 L'article 9 du règlement litigieux (autrement dénommé le «texte» ou la «disposition litigieuse»), sur le détail duquel nous reviendrons, contient une série de dispositions étroitement liées établissant les règles applicables pour déterminer la superficie éligible lorsqu'il existe un écart entre la superficie déclarée dans la demande d'aides «surfaces» et la superficie effectivement déterminée à la suite du contrôle effectué par les autorités nationales compétentes.
Les règlements de la Commission (CE) n_ 229/95 (25) et n_ 1648/95 (26)
30 L'article 9 du règlement n_ 3887/92 a fait l'objet de plusieurs modifications.
31 La première modification a été mise en oeuvre par le règlement n_ 229/95. L'article 9, paragraphe 4, du règlement litigieux a été remplacé par le nouveau paragraphe 4 sous a) et b).
32 Par cette première réforme, le législateur communautaire a entendu, notamment, «... préciser la méthode de calcul de la superficie maximale éligible aux paiements compensatoires pour les producteurs de cultures arables en cas de gel insuffisant et ... prévoir, à cet égard, que l'ajustement se fait au prorata des différentes cultures» (27).
33 Le règlement n_ 1648/95 a par la suite modifié l'article 9, paragraphes 2 et 4, du règlement litigieux.
34 Comme il résulte du quatrième considérant du règlement n_ 1648/95, l'objet de ce dernier est de modifier les sanctions infligées aux producteurs de cultures arables dans l'hypothèse où ceux-ci se seraient trompés de bonne foi dans leur déclaration de superficie de terres gelées:
«considérant que, dans un souci de simplification des sanctions `surfaces' et `animaux', il convient d'en modifier les modalités d'application; que, compte tenu des modifications des règles relatives au gel des terres intervenues depuis que le règlement (CEE) n_ 3887/92 de la Commission, modifié par le règlement (CE) n_ 229/95, a été arrêté, notamment avec l'adoption de dispositions autorisant le transfert de l'obligation de gel entre producteurs et de la jachère volontaire, il convient de modifier
les sanctions» (28).
35 Cet objectif a été réalisé par l'adoption du paragraphe 4, sous a), sur le détail duquel nous reviendrons ultérieurement.
36 Dans une certaine mesure, les nouvelles dispositions adoptées par ce règlement n_ 1648/95 ont atténué la portée des sanctions administratives antérieures (29).
Cadre factuel et procédural des affaires préjudicielles
37 La National Farmers' Union (ci-après la «NFU» ou la «requérante au principal») est le syndicat professionnel national des exploitants agricoles en Angleterre et au pays de Galles. A la suite de nombreuses plaintes relatives aux sanctions infligées par le Minister for Agriculture, Fisheries and Food (ci-après le «MAFF») aux exploitants ayant, de bonne foi, commis des erreurs dans les formulaires de demandes d'aides «surfaces», la NFU ainsi que 120 de ces exploitants ont saisi la High Court de
l'application faite par le MAFF de l'article 9 du règlement n_ 3887/92.
38 Selon la juridiction de renvoi, par application dudit article, le MAFF n'octroie aucune aide liée au gel des terres ou aux cultures arables lorsque l'écart entre la superficie mise en jachère déclarée et celle déterminée après contrôle dépasse 20 %. Il résulte également de l'ordonnance de renvoi que le litige au principal ne concerne que des exploitants ayant opéré ce type d'erreur en toute bonne foi. Les exploitants sanctionnés auraient connu de graves difficultés financières en raison de
l'interprétation ainsi retenue.
39 Par lettre du 22 février 1995, les autorités britanniques ont indiqué à la Commission que le refus de tout paiement lié aux cultures arables constituait une sanction disproportionnée par rapport à la gravité de l'irrégularité commise. La Commission a répondu que de telles sanctions n'étaient pas trop sévères et a ajouté qu'elle avait rédigé un projet de modification du règlement qui permettrait aux exploitants de percevoir les paiements compensatoires pour leurs cultures arables au prorata de la
superficie de jachère effectivement déterminée (30).
40 Estimant ne pas être en mesure de statuer sur le recours sans au préalable avoir été éclairée sur l'interprétation qu'il convient de donner de la réglementation communautaire en cause ainsi que sur l'appréciation en validité de cette même réglementation, la High Court vous adresse les cinq questions préjudicielles suivantes:
Les questions préjudicielles
«1) Y a-t-il lieu d'interpréter l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement (CEE) n_ 3887/92 de la Commission (avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95) comme obligeant à refuser tout paiement lié à la superficie aux exploitants dont la superficie effectivement déterminée de gel des terres s'avère être inférieure à celle déclarée dans la demande d'aide, en présence d'un écart supérieur à 20 %, mais en l'absence d'intention délibérée ou de négligence grave?
2) L'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92 de la Commission (avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95) doit-il être interprété en ce sens qu'il interdit le versement de toute prime pour les bovins aux exploitants dont la superficie fourragère effectivement déterminée s'avère être inférieure à celle déclarée dans la demande d'aide `surface', en présence d'un écart supérieur à 20 %, mais en l'absence d'intention délibérée ou de négligence grave?
3) En cas de réponse affirmative à la question 1) et/ou 2), l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92 de la Commission (avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95) est-il invalide, en tout ou en partie, pour violation d'un principe de droit communautaire, en particulier en matière de sécurité juridique, de non-discrimination et/ou de proportionnalité?
4) En cas de réponse négative à la question 1) et/ou 2), comment faut-il interpréter l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92 de la Commission (avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95)?
5) Sans considération des réponses à donner aux questions 1) à 4), le règlement n_ 3887/92 de la Commission peut-il de manière valide et légale infliger la perte de l'intégralité du paiement lié à une superficie spécifique à un exploitant dont la superficie effectivement déterminée s'avère être inférieure à celle déclarée dans la demande d'aide, en présence d'un écart supérieur à 20 %, mais en l'absence d'intention délibérée ou de négligence grave?»
Réponses aux questions préjudicielles
I - La première question
41 La première question préjudicielle porte sur l'interprétation de l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92, lu en combinaison avec les dispositions relatives au régime d'aides applicable aux cultures arables et au gel des terres, avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95.
42 Le juge national vous demande, en substance, de dire si ce texte doit être compris comme autorisant la suppression de tout paiement lié aux surfaces «terres arables cultivées» aux exploitants dont la superficie effectivement déterminée de gel des terres à la suite du contrôle effectué par les autorités compétentes s'avère inférieure à celle déclarée dans la demande d'aides, en présence d'un écart supérieur à 20 %, mais en l'absence d'intention délibérée ou de négligence grave.
43 Le juge de renvoi limite expressément l'objet de son renvoi au régime prévu par le règlement n_ 3887/92 dans sa version initiale, avant les modifications opérées par les règlements n_s 229/95 et 1648/95. Toutefois, il convient de noter qu'un règlement n_ 2988/95 (31) est entré en vigueur postérieurement à l'ordonnance de renvoi.
44 Votre Cour a été amenée à recueillir les observations écrites des intervenants au sujet de l'incidence de cette réforme sur les réponses à donner aux questions soumises. S'il a été convenu par tous que cette réforme règle le problème soulevé par le juge national dans sa première question préjudicielle, les avis divergent en revanche sur le point de savoir si cette réforme s'applique rétroactivement au litige pendant devant la High Court.
45 Il nous faudra trancher ce point. L'examen des textes réformés pourrait éventuellement fournir au juge national des éléments utiles à la solution de son procès. Toutefois, nous devons répondre également à la question telle que formulée dans la décision de renvoi, dans la mesure où ce dernier n'a pas été interrogé sur l'intérêt de cette réforme pour la solution de son litige et que lui seul apprécie l'opportunité et la pertinence de la question qu'il pose à votre Cour (32); ce d'autant plus que
nous ignorons quelles sont les compétences précises du juge a quo dans le cadre de sa saisine (contentieux de la responsabilité ou de la légalité).
46 Nous aborderons, tout d'abord, cette première question telle que rédigée par le juge de renvoi, avant de nous interroger sur la portée des modifications opérées par les règlements de 1995.
A - L'interprétation de l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92 avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95
47 Il convient préalablement d'apporter une précision sur le libellé que nous retenons de l'article 9, paragraphe 4, premier alinéa, du règlement n_ 3887/92. Il n'est pas contesté que la version anglaise initiale de ce texte contient une erreur et qu'il convient de le lire conformément aux termes employés dans les autres versions linguistiques. Cette disposition doit donc être lue comme prévoyant que «Les superficies établies en application des paragraphes 1 3...» et non pas «1 et 3». Cette erreur a
d'ailleurs été corrigée par le règlement n_ 229/95 et désormais la version anglaise est conforme aux autres versions linguistiques.
48 L'article 9 est libellé comme suit:
«1. Lorsqu'il est constaté que la superficie effectivement déterminée est supérieure à celle déclarée dans la demande d'aides `surfaces', la superficie déclarée est prise en compte pour le calcul du montant de l'aide.
2. Lorsqu'il est constaté que la superficie déclarée dans une demande d'aides `surfaces' dépasse la superficie déterminée, le montant de l'aide est calculé sur base de la superficie effectivement déterminée lors du contrôle. Toutefois, sauf cas de force majeure, la superficie effectivement déterminée est diminuée:
- de deux fois l'excédent constaté lorsque celui-ci est supérieur à 2 % ou à 2 hectares et égal à 10 % au maximum de la superficie déterminée;
- de 30 % lorsque l'excédent constaté est supérieur à 10 % et égal à 20 % au maximum de la superficie déterminée.
Au cas où l'excédent constaté est supérieur à 20 % de la superficie déterminée, aucune aide liée à la superficie n'est octroyée.
Toutefois, s'il s'agit d'une fausse déclaration faite délibérément ou par négligence grave:
- l'exploitant en cause est exclu du bénéfice du régime d'aides concerné au titre de l'année civile en cause
et
- en cas d'une fausse déclaration faite délibérément du bénéfice de tout régime d'aides visé à l'article 1er, paragraphe 1, du règlement (CEE) n_ 3508/92 au titre de l'année civile suivante pour une superficie égale à celle pour laquelle sa demande d'aides a été refusée.
Les diminutions susvisées ne sont pas appliquées si, pour la détermination de la superficie, l'exploitant prouve qu'il s'est correctement basé sur des informations reconnues par l'autorité compétente.
Les parcelles mises en jachère pour la production de matières servant à la fabrication de produits non alimentaires, pour lesquelles l'exploitant n'a pas rempli toutes les obligations lui incombant, sont considérées comme des superficies non retrouvées lors du contrôle pour l'application du présent article.
Au sens du présent article, on entend par `superficie déterminée', celle pour laquelle toutes les conditions réglementaires ont été respectées.
3. Pour l'application des paragraphes 1 et 2, sont prises en compte seulement et séparément les superficies fourragères, les superficies relatives au gel des terres et celles relatives aux différentes cultures arables pour lesquelles un montant d'aides différent est applicable.
4. Les superficies établies en application des paragraphes 1 à 3 du présent article pour le calcul de l'aide sont utilisées:
- dans le cadre du gel des terres, pour le calcul de la superficie maximale éligible aux paiements compensatoires pour les producteurs de cultures arables,
- pour le calcul de la limite des primes visées aux articles 4g et 4h du règlement (CEE) n_ 805/68, ainsi que de l'indemnité compensatrice.
Toutefois, dans les cas visés au paragraphe 2, premier alinéa, premier et deuxième tirets, le calcul de la superficie maximale éligible aux paiements compensatoires pour les producteurs de cultures arables se fait sur base de la superficie effectivement déterminée de gel des terres...».
49 Afin de comprendre le problème qui se pose au juge national, il nous semble utile de l'illustrer en quelques mots.
50 Le cultivateur désireux d'obtenir une aide (ou un paiement compensatoire) pour une culture arable spécifique au titre du régime général prévu par le règlement n_ 1765/92 (33) doit, conformément aux dispositions de l'article 4, paragraphe 1, du règlement n_ 3887/92, déclarer la superficie de la (ou des) parcelle(s) pour laquelle (ou lesquelles) il revendique l'allocation de l'aide «surfaces», ainsi que la localisation et l'utilisation de la (ou des) parcelle(s) en question. En outre, conformément
à l'article 4, paragraphe 4, du règlement n_ 3887/92, il est tenu de déclarer la superficie de terres gelées indispensable à la détermination de la superficie maximale éligible aux paiements compensatoires «cultures arables» en cause. Les possibilités d'erreur sur les superficies déclarées peuvent porter soit sur la superficie de la terre arable cultivée, soit sur la superficie des terres gelées, voire sur les deux. Il s'agit donc de savoir quelle sera l'incidence d'une erreur commise de bonne foi
dans la déclaration de superficie de terres gelées, et en présence d'un écart de plus de 20 % entre la superficie de terres gelées déterminée après contrôle et la superficie de terres gelées déclarée, sur le calcul de l'aide «surfaces» «cultures arables». Il est bon de rappeler, pour mémoire, que cet agriculteur peut également prétendre à une «compensation» pour le gel des terres auquel il a dû se livrer (34).
51 Le juge national se demande si l'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n_ 3887/92 qui dispose - rappelons-le - que, «... Au cas où l'excédent constaté est supérieur à 20 % de la superficie déterminée, aucune aide liée à la superficie n'est octroyée» doit être interprété, dans l'hypothèse factuelle précédemment évoquée, en ce sens que le cultivateur perd tout droit non seulement à l'aide «gel des terres», mais également à l'aide pour la culture arable sollicitée.
52 La Commission et le gouvernement du Royaume-Uni sont d'avis qu'une réponse affirmative s'impose. Selon eux, la constatation d'un écart de plus de 20 % entre la superficie déclarée de terres gelées et la superficie déterminée après contrôle a le même effet que la constatation de l'absence de toute superficie. Une erreur dans la déclaration de terres gelées emporterait des conséquences non seulement sur le régime de l'aide «terres gelées», mais également sur le régime de l'aide «cultures arables»
réclamée par l'agriculteur. Ils fondent leur interprétation sur les objectifs poursuivis par l'article 9 litigieux et sur le libellé de cette disposition replacée dans son contexte législatif.
53 La NFU ne partage pas cet avis. Elle affirme que pareille lecture emporte des conséquences extrêmement lourdes, injustes et disproportionnées pour ces agriculteurs qui se sont trompés de bonne foi. Elle propose une autre lecture qui permettrait de limiter les effets drastiques (perte des aides «terres gelées» et des aides «cultures arables» concernées) d'une telle erreur. Il conviendrait d'appliquer la règle selon laquelle le calcul de la superficie maximale éligible aux paiements compensatoires
pour ces producteurs de cultures arables se ferait sur la base de la superficie effectivement déterminée et au prorata des différentes cultures. La NFU ajoute que la superficie déterminée s'entend de celle effectivement vérifiée après contrôle, sans qu'il soit tenu compte des pénalités prévues à l'article 9, paragraphe 2, du règlement n_ 3887/92.
54 Nous pensons que la NFU ajoute au texte des prescriptions qu'il ne contient pas. En revanche, l'interprétation soutenue par la Commission et le gouvernement du Royaume-Uni nous semble devoir être retenue pour trois raisons essentielles.
55 En premier lieu, l'articulation logique des prescriptions contenues dans les différents paragraphes de cette disposition est favorable à cette thèse. Analysons cet article.
56 L'article 9, paragraphe 3, précise que, pour le calcul d'une superficie éligible (renvoi aux paragraphes 1 et 2 de l'article 9), sont prises en compte seulement et séparément les superficies fourragères, les superficies relatives au gel des terres et celles relatives aux différentes cultures arables pour lesquelles un montant d'aides différent est applicable.
57 Ainsi, dans le cas de notre exemple antérieurement exposé (35), l'agriculteur doit déclarer la superficie des terres gelées et des terres cultivées séparément en précisant notamment le type de cultures pratiquées et il sera procédé distinctement à la vérification de l'exactitude des données fournies.
58 L'article 9, paragraphe 2, définit les règles permettant d'établir la superficie à prendre en compte pour le calcul de l'aide (détermination de la superficie éligible), lorsqu'il apparaît que la superficie déclarée dans la demande d'aides «surfaces» est supérieure à celle effectivement déterminée après contrôle.
59 Dans de telles hypothèses, le principe (36) est que la superficie effectivement déterminée par l'intermédiaire des vérifications ou des contrôles est celle devant être prise en compte pour le calcul de l'aide.
60 Deux séries d'exceptions, exprimées dans le texte par les adverbes «toutefois», sont prévues afin de tenir compte de la bonne ou mauvaise foi du déclarant (37).
61 La première série d'exceptions est assortie de trois pénalités (38) et concerne exclusivement l'hypothèse du déclarant qui se trompe de bonne foi. Dans ce cas, il est tenu compte du quantum de l'erreur. C'est ainsi que la superficie éligible sera établie selon la méthode de calcul suivante:
- détermination de la superficie réelle après contrôle;
- calcul de l'écart entre cette superficie et celle qui a été déclarée dans la demande d'aides (ci-après «E»);
- détermination de la pénalité établie en fonction des prescriptions légales figurant à l'article 9, paragraphe 2, premier alinéa, deuxième phrase, premier et deuxième tirets, du règlement n_ 3887/92.
Pour que l'erreur ne soit pas de nature à empêcher la détermination d'une superficie éligible et n'empêche pas l'ouverture du droit à l'octroi d'une aide, E doit être situé entre 3 % et 20 %. Si E est supérieur à 20 %, aucune superficie éligible ne pourra être calculée dans la mesure où la pénalité consistera en une perte de l'aide liée à la superficie (39). En d'autres termes, tout E supérieur à 20 % emporte les mêmes conséquences que l'absence de toute superficie.
62 Pour reprendre notre précédent exemple (40), puisque l'agriculteur s'est trompé de plus de 20 % dans la déclaration de superficie «gel des terres» il sera censé n'avoir gelé aucune terre. Or, comme cette donnée est nécessaire au calcul de la superficie éligible au titre de l'aide «cultures arables», cette aide ne pourra lui être accordée faute de pouvoir déterminer cette superficie éligible. En conséquence, il perd droit à l'aide «cultures arables» spécifique et à l'aide «gel des terres»
correspondante, alors qu'il ne s'est trompé, de bonne foi, de plus de 20 % que sur la superficie «gel des terres». La double fonction impartie à l'obligation de gel des terres est ainsi parfaitement illustrée (41).
63 La seconde série d'exceptions est assortie de deux pénalités et concerne exclusivement les hypothèses du déclarant se livrant délibérément à une fausse déclaration ou agissant par négligence grave (42).
- Si l'agriculteur s'est livré à une fausse déclaration par négligence grave, la pénalité consistera en l'exclusion du régime d'aides concerné pour l'année correspondante (43), quel que soit l'écart entre la superficie déterminée après contrôle et la superficie déclarée;
- en revanche, en cas de déclaration délibérément fausse, une pénalité de même nature que celles prévues pour les fausses déclarations faites par négligence grave est infligée et, en outre, une exclusion de tous les régimes d'aides du système intégré pendant l'année suivante pour une superficie égale à celle pour laquelle sa demande d'aides a été refusée (c'est-à-dire la superficie qu'il avait déclarée) (44) est prévue.
64 L'article 9, paragraphe 4, définit le mode de calcul de l'aide en cas d'écart constaté entre la superficie déclarée et la superficie déterminée après contrôle.
65 Son premier alinéa, premier et deuxième tirets, fixe le principe: les superficies établies aux paragraphes 1 à 3 devront être prises en compte pour le calcul de l'aide. Les dispositions figurant à l'article 9, paragraphe 4, premier alinéa, premier et deuxième tirets, du règlement n_ 3887/92 doivent être lues en combinaison avec les paragraphes 1 et 2, premier alinéa, première phrase, de l'article 9, qui posent eux-mêmes les principes qui guident la détermination de la superficie éligible en cas
d'écart entre les superficies déclarées et les superficies déterminées.
66 Son deuxième alinéa est présenté comme une exception au principe, exprimée, là encore, par l'adverbe «toutefois». Il fixe les règles de calcul de l'aide dans les seules hypothèses où l'écart, résultant d'une erreur commise de bonne foi, se situe entre 3 % et 20 %. Ces dispositions doivent être lues en combinaison avec le paragraphe 2, premier alinéa, deuxième phrase, premier et deuxième tirets, de l'article 9. Les termes «superficie effectivement déterminée» de gel des terres contenus dans cette
disposition s'entendent de la superficie déterminée après contrôle et une fois les pénalités, prévues à l'article 9, paragraphe 2, premier alinéa, deuxième phrase, premier et deuxième tirets, appliquées, faute de quoi le renvoi à ces dispositions traitant de la détermination de la superficie éligible après application des pénalités n'aurait aucun sens.
67 Rien n'est prévu dans les autres hypothèses d'erreurs (erreur de bonne foi portant sur plus de 20 %, négligence grave, fausse déclaration faite délibérément) puisque, dans ces cas, le paragraphe 2, deuxième et troisième alinéas, de l'article 9 s'applique. Il n'y a pas lieu à calcul de l'aide faute de pouvoir déterminer une superficie éligible.
68 La deuxième raison qui milite en faveur de l'interprétation soutenue par la Commission et le gouvernement du Royaume-Uni réside dans l'objectif poursuivi par le règlement n_ 1648/95.
69 La réforme résultant du règlement n_ 1648/95 vise à modifier les sanctions imputables aux producteurs de cultures arables dans les hypothèses où ils se seraient trompés, de bonne foi, dans leur déclaration de superficie de terres gelées:
«considérant que, dans un souci de simplification des sanctions `surfaces' et `animaux', il convient d'en modifier les modalités d'application; que, compte tenu des modifications des règles relatives au gel des terres intervenues depuis que le règlement (CEE) n_ 3887/92 de la Commission, modifié par le règlement (CE) n_ 229/95, a été arrêté, notamment avec l'adoption de dispositions autorisant le transfert de l'obligation de gel entre producteurs et de la jachère volontaire, il convient de modifier
les sanctions...» (45).
70 L'article 9, paragraphe 4, sous a), deuxième alinéa, du règlement litigieux est ainsi modifié par le règlement n_ 1648/95:
«Le calcul de la superficie maximale donnant droit aux paiements compensatoires pour les producteurs de cultures arables est effectué sur la base de la superficie gelée effectivement déterminée et au prorata des différentes cultures.»
71 L'interprétation de l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92, dans sa version originelle, proposée par la NFU (46) est précisément conforme en tout point au contenu du nouveau texte. Suivre la NFU dans son interprétation reviendrait à soutenir que la réforme opérée par le règlement n_ 1648/95 était superflue.
72 L'amendement apporté à l'article 9 suffit à établir que, avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95, lorsque la superficie de terres gelées telle qu'elle était déclarée dans la demande d'aides était supérieure de plus de 20 % à celle constatée lors du contrôle, il n'y avait aucune détermination de superficie de terres gelées et, par conséquent, les exploitants en cause n'étaient pas éligibles aux paiements compensatoires au prorata de leurs cultures arables.
73 Enfin, l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement litigieux vise à atteindre les objectifs fixés par le législateur communautaire (47) en assurant le respect des obligations de gel d'une certaine superficie de terres, condition nécessaire à l'octroi des paiements compensatoires «terres arables» (48), de déclaration des parcelles de terres, et d'élimination des irrégularités et des fraudes relatives à ces obligations (49).
74 En conclusion, pour toutes les raisons précédemment évoquées, nous vous suggérons de répondre affirmativement à la première question telle que formulée par le juge de renvoi.
B - L'interprétation de l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92 après l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95
75 Les paragraphes 2, premier alinéa, deuxième phrase, premier et deuxième tirets, de l'article 9 du règlement litigieux ainsi que 4, sous a), dudit article ont été modifiés comme suit par des règlements de 1995 (50):
«2. - de deux fois l'excédent constaté lorsque celui-ci est supérieur à 3 % ou 2 hectares et égal à 20 % au maximum de la superficie déterminée (51).
...
4. a) Les superficies établies en application des paragraphes 1, 2 et 3 pour le calcul de l'aide sont utilisées pour le calcul de la limite des primes visées aux articles 4g et 4h du règlement (CEE) n_ 805/68, ainsi que pour le calcul de l'indemnité compensatrice.
Le calcul de la superficie maximale donnant droit aux paiements compensatoires pour les producteurs de cultures arables est effectué sur la base de la superficie gelée effectivement déterminée et au prorata des différentes cultures» (52).
76 Le nouvel article 9, tel qu'amendé par le règlement n_ 1648/95, atténue, dans une certaine mesure, les sanctions applicables aux agriculteurs qui se trompent, de bonne foi, dans leurs demandes d'aides.
77 Ainsi, les sanctions qui existaient sous l'empire de l'ancien texte en cas d'erreur de bonne foi sur la superficie «terre gelée» n'emportent plus application des pénalités prévues à l'article 9, paragraphe 2, premier alinéa, dernière phrase, premier et deuxième tirets, et deuxième alinéa, du règlement n_ 3887/92, modifié par le règlement n_ 1648/95, et ce quel que soit le quantum de l'erreur. Dans ces hypothèses, le calcul de la superficie maximale éligible pour la détermination du montant de
l'aide «cultures arables» se fait sur la base de la superficie gelée effectivement déterminée après contrôle et au prorata des différentes cultures. Il faut ainsi comprendre les termes «superficie gelée effectivement déterminée» comme désignant la superficie déterminée après contrôle, sans prise en compte des pénalités, faute de quoi la portée de cette réforme serait réduite à néant (53).
78 Conformément à l'article 2 du règlement n_ 1648/95, ces dispositions sont entrées en vigueur postérieurement aux faits dont est saisi le juge de renvoi.
79 Toutefois, l'entrée en vigueur du règlement n_ 2988/95 est susceptible d'éclairer opportunément le juge national.
80 Les buts poursuivis par le règlement n_ 2988/95 sont de veiller aux intérêts financiers de la Communauté, de lutter efficacement contre la fraude portant atteinte à ceux-ci (54), mais également de veiller à ce que les mesures adoptées respectent l'exigence générale d'équité et le principe de proportionnalité (55).
81 Son article 2, paragraphe 2, dispose que: «Aucune sanction administrative ne peut être prononcée tant qu'un acte communautaire antérieur à l'irrégularité ne l'a pas instaurée. En cas de modification ultérieure des dispositions portant sanctions administratives et contenues dans une réglementation communautaire, les dispositions moins sévères s'appliquent rétroactivement» (56).
82 Aux termes de son article 1er, paragraphe 2, l'«irrégularité» au sens du règlement est définie comme «... toute violation d'une disposition du droit communautaire résultant d'un acte ou d'une omission d'un opérateur économique qui a ou aurait pour effet de porter préjudice au budget général des Communautés ou à des budgets gérés par celles-ci, soit par la diminution ou la suppression de recettes provenant des ressources propres perçues directement pour le compte des Communautés, soit par une
dépense indue».
83 Le gouvernement du Royaume-Uni conteste l'application immédiate de ces mesures plus douces au litige soumis à l'appréciation de la High Court. Selon lui, aucune disposition du règlement n_ 2988/95 n'est susceptible d'entraîner l'application rétroactive de ce texte à des situations nées antérieurement à son adoption.
84 La Commission et la requérante au principal soutiennent en revanche que le règlement n_ 2988/95 contient le principe de l'application immédiate des sanctions administratives plus douces.
85 Nous partageons l'opinion de la Commission et de la NFU essentiellement pour deux raisons.
86 En premier lieu, la lecture qu'elles proposent est conforme à l'objectif poursuivi par le législateur communautaire. Ce dernier précise au dixième considérant dudit règlement que, «... en vertu de l'exigence générale d'équité et du principe de proportionnalité, ainsi qu'à la lumière du principe non bis in idem, il y a lieu de prévoir, dans le respect de l'acquis communautaire et des dispositions prévues par les réglementations communautaires spécifiques existant au moment de l'entrée en vigueur
du présent règlement, des dispositions appropriées pour éviter un cumul de sanctions pécuniaires communautaires et de sanctions pénales nationales imposées pour les mêmes faits à la même personne...» (57).
87 Les situations nées antérieurement à l'entrée en vigueur du règlement n_ 2988/95 étaient donc présentes à l'esprit des rédacteurs et leur souci était bien de veiller à ne pas infliger des sanctions contraires aux principes d'équité et de proportionnalité. Cette législation n'a pas pour objet, et ne peut avoir pour conséquence, de bouleverser des situations acquises (c'est-à-dire définitives), mais, en revanche, a vocation à s'appliquer à des situations passées dont les conséquences ne sont pas
définitives, dans la mesure où les dispositions nouvelles sont plus favorables aux opérateurs économiques.
88 En second lieu, la disposition litigieuse figure sous le titre I du règlement n_ 2988/95 intitulé «Principes généraux». Elle doit être interprétée comme visant à transposer, dans le domaine spécifique des dispositions communautaires ayant pour objet de protéger les intérêts financiers des Communautés, le principe, existant dans la très grande majorité des États membres, de l'application immédiate des sanctions pénales ou administratives plus douces.
89 En conclusion, dans la mesure où la réforme opérée par le règlement n_ 2988/95 est susceptible de fournir des éléments utiles à la solution du litige soumis au juge de renvoi (58), il lui appartient de tenir compte de la nouvelle rédaction de l'article 9, paragraphe 4, sous a), deuxième alinéa, du règlement n_ 3887/92.
II - La deuxième question
90 Cette question porte sur l'interprétation de l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92, lu en combinaison avec les dispositions concernant le régime d'aides applicable «aux animaux», avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95. Le juge national vous demande, en substance, de dire si ce texte doit être interprété en ce sens qu'il prévoit la suppression de tout paiement lié aux «animaux» en faveur des exploitations dont la superficie fourragère effectivement déterminée à la
suite du contrôle effectué par les autorités compétentes s'avère inférieure à celle déclarée dans la demande d'aides, en présence d'un écart supérieur à 20 %, mais en l'absence d'intention délibérée ou de négligence grave.
91 Tous les intervenants s'accordent à considérer que la réponse à cette question doit être affirmative.
92 Conformément à ce que nous avons précédemment exposé (59), il n'y a qu'une superficie à déclarer dans ce cas: il s'agit de la superficie fourragère (60). L'article 9, paragraphe 4, du règlement n_ 3887/92 dispose que la superficie ainsi déterminée est utilisée «pour le calcul de la limite des primes visées aux articles 4g et 4h du règlement n_ 805/68». Ces articles du règlement n_ 805/68, modifiés par le règlement n_ 2066/92, prévoient que le paiement de la prime spéciale et de la prime à la
vache allaitante est limité par l'application d'un facteur de densité des animaux détenus sur l'exploitation. Ce facteur de densité est exprimé en nombre d'UGB par rapport à la superficie fourragère de cette exploitation consacrée à l'alimentation des animaux qui y sont détenus.
93 La superficie fourragère est donc un élément essentiel du système, puisqu'elle constitue une condition d'éligibilité aux primes ainsi prévues.
94 De plus, contrairement aux paiements compensatoires accordés aux producteurs de cultures arables, le règlement n_ 2066/92 ne prévoit pas que cette superficie fourragère ouvre droit, de façon autonome, à une aide quelconque. De ce fait, une erreur de bonne foi portant sur plus de 20 % de la superficie fourragère n'aura d'incidence que sur l'octroi des primes «animaux» liées à cette superficie.
95 Le règlement n_ 1648/95 n'ayant pas modifié la situation de ces agriculteurs, les mêmes pénalités sont applicables depuis son entrée en vigueur.
96 Par conséquent, nous vous suggérons de répondre affirmativement à la deuxième question. Du fait des réponses données aux première et deuxième questions préjudicielles, la quatrième question, relative à une autre interprétation qui pourrait être donnée au texte litigieux, devient sans objet.
III - Les troisième et cinquième questions
97 La troisième question préjudicielle précise la cinquième question préjudicielle. Le juge de renvoi vous demande d'apprécier la validité de l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92, avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95, au regard, notamment, des principes de sécurité juridique, de non-discrimination et de proportionnalité.
98 La requérante au principal soutient que les sanctions prévues par l'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92, avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95, en ce qui concerne les agriculteurs qui se trompent de bonne foi de plus de 20 % dans la déclaration de superficie de gel de leurs terres et dans la déclaration de superficie fourragère, sont contraires aux principes de sécurité juridique, de non-discrimination et de proportionnalité.
A - La violation alléguée du principe de sécurité juridique
99 La requérante au principal estime que le manque de clarté de l'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95 est de nature à la priver de ses droits aux aides en question.
100 Vous avez jugé de façon constante que le principe de sécurité juridique constitue un principe fondamental de droit communautaire (61), qui exige notamment qu'une réglementation imposant des charges au contribuable soit claire et précise afin que celui-ci puisse connaître sans ambiguïté ses droits et obligations (62).
101 En l'espèce, s'agissant des pénalités qui s'appliquent aux éleveurs qui se trompent, de bonne foi, de plus de 20 % dans leur déclaration de la superficie fourragère, le sens de la disposition litigieuse et les conséquences de son application sont clairs (63). En revanche, en ce qui concerne les pénalités applicables aux cultivateurs qui se trompent, de bonne foi, de plus de 20 % dans leur déclaration de gel des terres, il est vrai que le texte en question est complexe et sa compréhension est
subordonnée à une lecture très attentive, en raison de deux ordres de difficultés différents.
102 En premier lieu, des maladresses de rédaction et de présentation formelle rendent malaisée la lecture du texte. Par exemple, il nous paraît maladroit d'avoir posé un principe et une exception dans le même alinéa (64); à l'inverse, il est regrettable de ne pas avoir présenté dans un alinéa unique les différentes pénalités découlant des erreurs commises de bonne foi (65). Cette rédaction constitue certainement un frein à la compréhension rapide du texte litigieux, au point que la NFU a pu
légitimement s'interroger sur le respect du principe de la sécurité juridique. Toutefois, nous ne pensons pas que ces défauts purement formels aient «entaché d'ambiguïté» le contenu du texte en cause. La NFU ne le démontre d'ailleurs pas, dans la mesure où l'interprétation qu'elle propose ajoute manifestement au texte des prescriptions qu'il ne contient pas.
103 Par ailleurs et surtout, l'aridité de la lecture est due à la technicité de la matière. Ainsi que le fait justement remarquer la Commission, le droit communautaire agricole est complexe en raison de son objet même puisque, d'une part, il est constitué d'un ensemble de dispositions législatives souvent imbriquées les unes aux autres et que, d'autre part, sa mise en oeuvre nécessite l'évaluation de situations économiques délicates. De ce fait, la rédaction concise, précise et en même temps
complète d'une disposition législative s'avère tâche ardue.
104 Toutefois, ce droit est destiné à des professionnels, familiers de la matière et la pratiquant quotidiennement, et on peut considérer que ce que le non-initié appréhende péniblement posera moins de difficultés au spécialiste. L'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n_ 3887/92 n'échappe pas à cette règle et si sa lecture rapide, de façon isolée, nuit à sa bonne compréhension, en revanche, une lecture minutieuse permet de saisir le sens et les conséquences de l'application
desdites dispositions sans ambiguïté. D'ailleurs, lors de l'audience, la Commission a indiqué qu'elles avaient été appliquées sans difficulté apparente dans la plupart des États membres.
105 Il nous faut donc conclure que la violation du principe de sécurité juridique ne peut pas être retenue.
B - La violation du principe d'égalité de traitement
106 La requérante au principal soutient que l'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement litigieux permet d'infliger, au mépris du principe de l'égalité de traitement, des sanctions identiques à celles applicables à des agriculteurs commettant des erreurs de nature et d'intensité différentes.
107 Elle fait ainsi valoir que, s'agissant de l'agriculteur exploitant un type unique de culture arable pour laquelle il demande l'octroi d'un seul type d'aide, ou encore dans l'hypothèse d'un éleveur de bovins ne se livrant qu'à ce type d'activité pour laquelle il ne demande l'octroi que de l'aide «animal» particulière, l'erreur commise de bonne foi portant sur plus de 20 % de la superficie de gel des terres ou fourragère aura la même conséquence (66) que celle infligée au cultivateur et à
l'éleveur commettant une fausse déclaration par négligence grave dans la déclaration de superficies (67). Ces sanctions sont constituées par la suppression de l'aide «surface» ou l'aide «animal» pour l'année civile en cause, en fait pour les premiers, en droit pour les seconds.
108 Elle fait remarquer que la nature des erreurs est pourtant différente puisque, dans le premier cas, le comportement de l'agriculteur n'est pas fautif, à l'inverse du second cas et que ces erreurs, quoique de nature et d'intensité différentes, emportent cependant les mêmes conséquences. Elle en conclut que le principe général d'égalité de traitement en droit communautaire est violé.
109 Selon votre jurisprudence constante, l'interdiction de discrimination énoncée à l'article 40, paragraphe 3, du traité CE n'est qu'une expression spécifique du principe général d'égalité, qui veut que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu'un tel traitement soit objectivement justifié (68).
110 Ainsi que l'observent le gouvernement du Royaume-Uni et la Commission, les conditions de mise en oeuvre des sanctions applicables aux deux groupes distincts d'agriculteurs susdécrits par la NFU ne sont pas comparables.
111 En effet, selon l'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n_ 3887/92, l'aide sollicitée par le cultivateur pour une culture arable spécifique sera refusée seulement s'il se trompe de plus de 20 % dans la déclaration de gel des terres ou encore si cette surestimation porte sur la déclaration de terre arable particulière. De la même façon, l'éleveur ne se verra refuser l'aide spécifique «animal» que s'il commet une erreur de plus de 20 % dans la déclaration de superficie fourragère.
112 En revanche, selon l'article 9, paragraphe 2, troisième alinéa, premier tiret, du règlement litigieux, les aides réclamées par le cultivateur et l'éleveur ne leur seront pas octroyées dès lors qu'ils se sont livrés à une fausse déclaration par négligence grave, et ce quel que soit l'excédent constaté entre la superficie déclarée et celle déterminée après contrôle.
113 Il ressort de ce qui précède que la situation des deux groupes d'agriculteurs susmentionnés par la NFU n'est pas comparable et qu'elle n'est pas traitée de manière égale.
114 En conséquence, le grief tiré d'une violation du principe de non-discrimination doit être rejeté.
C - Le moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité
115 La NFU et le gouvernement du Royaume-Uni soutiennent que les sanctions prévues à l'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n_ 3887/92 ne respectent pas le principe de proportionnalité.
116 Ce principe général du droit communautaire exige que les actes des institutions communautaires ne dépassent pas les limites de ce qui est approprié et nécessaire à la réalisation des objectifs légitimement poursuivis par la réglementation en cause, étant entendu que, lorsqu'un choix s'offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante et que les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux buts visés (69).
117 Il résulte également de votre jurisprudence constante que, s'agissant de l'évaluation d'une situation économique complexe, ce qui est le cas en matière de PAC, les institutions communautaires jouissent d'un large pouvoir d'appréciation (70). Ainsi, en contrôlant la légalité de l'exercice d'une telle compétence, le juge doit se limiter à examiner si elle n'est pas entachée d'une erreur manifeste, ou de détournement de pouvoir, ou si l'institution, auteur de l'acte litigieux, n'a pas manifestement
dépassé les limites de son pouvoir d'appréciation (71).
118 La sanction consistant en la suppression de toute aide à la surface dès lors que l'agriculteur a commis, de bonne foi, une erreur portant sur plus de 20 % dans la déclaration de superficie de terres gelées ou fourragère n'est-elle pas manifestement inappropriée aux objectifs poursuivis?
119 En ce qui concerne les objectifs poursuivis par la mesure litigieuse, il ressort du règlement en cause qu'elle est destinée à sanctionner de manière efficace les irrégularités et les fraudes et, à cette fin, le législateur communautaire a précisé qu'il fallait prévoir des sanctions échelonnées selon la gravité de l'irrégularité commise allant jusqu'à l'exclusion totale du bénéfice d'un régime pour l'année concernée et l'année suivante (72).
120 Il ressort donc des objectifs ainsi exposés que l'exclusion totale d'une aide est, dans l'échelle des peines prévues, la sanction la plus lourde. Une telle sanction doit, selon le législateur communautaire, être réservée aux comportements les plus graves.
121 Trois types de comportement condamnable auxquels un agriculteur peut se livrer au moment de la déclaration de superficie sont répertoriés: l'erreur de bonne foi, la négligence grave et la fausse déclaration faite délibérément.
122 Il est incontestable qu'un agriculteur qui se trompe, de bonne foi, c'est-à-dire sans intention de fraude, ne se livre pas à un comportement malhonnête et que, dans ce cas, lui infliger une des plus lourdes sanctions prévues (73) est incompatible avec les objectifs poursuivis et donc nécessairement et manifestement inapproprié.
123 En outre, le texte, en infligeant les mêmes sanctions à des agriculteurs qui se sont livrés à des irrégularités de nature différente, assimile l'agriculteur honnête à un agriculteur négligent ou de mauvaise foi. En d'autres termes, au-delà d'un certain seuil d'erreur, il est prévu de faire peser sur l'agriculteur de bonne foi une présomption de mauvaise foi en contradiction avec les termes mêmes du texte (74).
124 Les irrégularités reprochées, en l'espèce, aux opérateurs concernés étant de gravité considérablement diverse, le législateur communautaire aurait dû en tenir compte (75).
125 L'article 9, paragraphe 2, du règlement litigieux ne traduit donc pas fidèlement les objectifs poursuivis par le législateur communautaire.
126 Enfin, il nous semble que d'autres mesures aussi efficaces et moins contraignantes auraient pu être mises en oeuvre pour atteindre ces buts. Par exemple, prévoir que seule une aide forfaitaire fixée au niveau communautaire puisse être accordée, en l'absence de toute volonté malveillante ou de fraude de la part de l'agriculteur et au-delà d'un certain seuil d'écart constaté entre la superficie déclarée et la superficie déterminée après contrôle.
127 En conséquence, nous pensons que le grief tiré d'une violation du principe de proportionnalité doit être accueilli.
128 Nous vous invitons donc à déclarer invalide l'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n_ 3887/92 (avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95).
Conclusion
129 Au bénéfice des observations qui précédent, nous vous proposons de répondre comme suit aux questions déférées par la juridiction de renvoi:
«1) L'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement (CEE) n_ 3887/92 de la Commission, du 23 décembre 1992, portant modalités d'application du système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires, avant l'entrée en vigueur du règlement (CE) n_ 1648/95 de la Commission, du 6 juillet 1995, modifiant le règlement n_ 3887/92 précité, doit être interprété en ce sens qu'il interdit toute aide liée à la surface en faveur des agriculteurs dont la superficie effectivement
déterminée de gel de terres s'avère être inférieure à celle déclarée dans la demande d'aides, en présence d'un écart supérieur à 20 %, mais en l'absence d'intention délibérée ou de négligence grave.
2) L'article 9, paragraphes 2 à 4, du règlement n_ 3887/92, avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95, doit être interprété en ce sens qu'il interdit le versement de toute prime pour les bovins en faveur des agriculteurs dont la superficie fourragère effectivement déterminée s'avère être inférieure à celle déclarée dans la demande d'aides `surfaces', en présence d'un écart supérieur à 20 %, mais en l'absence d'intention délibérée ou de négligence grave.
3) L'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement n_ 3887/92, avant l'entrée en vigueur du règlement n_ 1648/95, est invalide en ce qu'il interdit le versement de toute aide liée à la surface et de toute prime pour les bovins en faveur des agriculteurs qui se trompent de plus de 20 % dans la déclaration de superficie de gel des terres et dans la déclaration de superficie fourragère, en l'absence d'intention délibérée ou de négligence grave.»
(1) - JO L 391, p. 36.
(2) - Deuxième considérant du règlement (CEE) n_ 1765/92 du Conseil, du 30 juin 1992, instituant un régime de soutien aux producteurs de certaines cultures arables (JO L 181, p. 12); premier et quatrième considérants du règlement (CEE) n_ 2066/92 du Conseil, du 30 juin 1992, modifiant le règlement (CEE) n_ 805/68, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la viande bovine et abrogeant le règlement (CEE) n_ 468/87 établissant les règles générales du régime de prime spéciale en
faveur des producteurs de viande bovine ainsi que le règlement (CEE) n_ 1357/80 instaurant un régime de prime au maintien du troupeau de vaches allaitantes (JO L 215, p. 49).
(3) - Deuxièmes considérants des règlements nos 1765/92 et 2066/92.
(4) - Treizième considérant du règlement n_ 1765/92.
(5) - Dixième considérant du règlement n_ 2066/92.
(6) - Septième considérant du règlement (CEE) n_ 3508/92 du Conseil, du 27 novembre 1992, établissant un système intégré de gestion et de contrôle relatif à certains régimes d'aides communautaires (JO L 355, p. 1); troisième et quatrième considérants du règlement litigieux.
(7) - Premier considérant du règlement n_ 3508/92; neuvième considérant du règlement n_ 3887/92.
(8) - Règlement du 27 juin 1968, portant organisation commune des marchés dans le secteur de la viande bovine (JO L 148, p. 24).
(9) - Règlement du 23 décembre 1992, établissant modalités d'application relatives aux régimes de primes prévus par le règlement n_ 805/68 et abrogeant les règlements (CEE) n_ 1244/82 et (CEE) n_ 714/89 (JO L 391, p. 20).
(10) - C'est-à-dire une aide dont le régime est lié à la déclaration de superficie des parcelles agricoles.
(11) - Deuxième considérant du règlement n_ 1765/92.
(12) - Ibidem, cinquième considérant.
(13) - Ibidem, onzième et douzième considérants.
(14) - En revanche, aux termes du seizième considérant du règlement n_ 1765/92, aucune obligation de gel des terres n'incombe aux petits producteurs.
(15) - Treizième considérant du règlement n_ 1765/92, souligné par nous.
(16) - Ibidem, quatorzième considérant, souligné par nous.
(17) - Ibidem, quinzième considérant.
(18) - Premier considérant du règlement n_ 3887/92.
(19) - Premier considérant du règlement n_ 3508/92.
(20) - Troisième considérant du règlement n_ 3508/92, ainsi que le septième considérant du règlement litigieux.
(21) - Neuvième considérant du règlement litigieux.
(22) - Ibidem, premier considérant.
(23) - C'est-à-dire le type de culture, ou de couverture végétale, ou l'absence de culture.
(24) - Articles 6 à 16 du règlement litigieux.
(25) - Règlement du 3 février 1995, modifiant le règlement n_ 3887/92 et le règlement (CE) n_ 762/94 (JO L 27, p. 3).
(26) - Règlement du 6 juillet 1995, modifiant le règlement n_ 3887/92 (JO L 156, p. 27).
(27) - Troisième considérant du règlement n_ 229/95, souligné par nous.
(28) - Souligné par nous.
(29) - Voir points 75 à 89 de nos conclusions.
(30) - Ordonnance de renvoi, traduction en français, p. 7.
(31) - Règlement (CE, Euratom) n_ 2988/95 du Conseil, du 18 décembre 1995, relatif à la protection des intérêts financiers des Communautés européennes (JO L 312, p. 1).
(32) - Votre jurisprudence constante depuis l'arrêt du 5 février 1963, Van Gend en Loos (26/62, Rec. p. 1).
(33) - Articles 2 et 7.
(34) - Ibidem, article 2, paragraphe 5, deuxième alinéa.
(35) - Point 50 de nos conclusions.
(36) - Article 9, paragraphe 2, premier alinéa, première phrase, du règlement n_ 3887/92.
(37) - Ibidem, article 9, paragraphe 2, premier alinéa, deuxième phrase, premier et deuxième tirets, et deuxième alinéa, d'une part, et article 9, paragraphe 2, troisième alinéa, premier et deuxième tirets, d'autre part.
(38) - Ibidem, article 9, paragraphe 2, premier alinéa, deuxième phrase, premier et deuxième tirets, et deuxième alinéa, du règlement n_ 3887/92.
(39) - Ibidem, article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa.
(40) - Point 50 de nos conclusions.
(41) - Voir points 14 à 17 de nos conclusions.
(42) - Article 9, paragraphe 2, troisième alinéa, premier et deuxième tirets, du règlement n_ 3887/92.
(43) - Ibidem, article 9, paragraphe 2, troisième alinéa, premier tiret.
(44) - Ibidem, article 9, paragraphe 2, troisième alinéa, deuxième tiret.
(45) - Quatrième considérant du règlement n_ 1648/95, souligné par nous.
(46) - Voir point 53 de nos conclusions.
(47) - Voir points 3 à 6 de nos conclusions.
(48) - Voir point 14 de nos conclusions.
(49) - Voir point 24 de nos conclusions.
(50) - Règlements n_s 229/95 et 1648/95.
(51) - Modification résultant de l'article 1er, point 5, du règlement n_ 1648/95.
(52) - Modification résultant de l'article 1er, point 6, du règlement n_ 1648/95.
(53) - A la différence de l'acception donnée à cette expression sous l'empire de l'ancien texte, voir point 66 de nos conclusions.
(54) - Troisième, quatrième, cinquième, sixième considérants du règlement n_ 2988/95.
(55) - Ibidem, dixième considérant.
(56) - Souligné par nous.
(57) - Souligné par nous.
(58) - Voir point 45 de nos conclusions.
(59) - Voir points 9, 10 et 15 de nos conclusions.
(60) - Article 9, paragraphe 3, du règlement n_ 3887/92.
(61) - Voir, en ce sens, l'arrêt du 21 septembre 1983, Deutsche Milchkontor e.a. (205/82 à 215/82, Rec. p. 2633).
(62) - Arrêts du 9 juillet 1981, Gondrand Frères et Garancini (169/80, Rec. p. 1931); du 22 février 1989, Commission/France et Royaume-Uni (92/87 et 93/87, Rec. p. 405, point 22), et récemment l'arrêt du 13 février 1996, Van Es Douane Agenten (C-143/93, Rec. p. I-431, point 27).
(63) - Voir points 92 à 96 de nos conclusions.
(64) - Article 9, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement litigieux.
(65) - Les pénalités infligées à l'agriculteur qui se trompe, de bonne foi, dans la déclaration de superficie figurent à l'article 9, paragraphe 2, premier alinéa, deuxième phrase, premier et deuxième tirets, d'une part, et à l'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement litigieux, d'autre part.
(66) - Aux termes de l'article 9, paragraphe 2, deuxième alinéa, du règlement litigieux.
(67) - Aux termes de l'article 9, paragraphe 2, troisième alinéa, premier tiret, du règlement litigieux.
(68) - Voir un des derniers arrêts, en date du 12 décembre 1996, Accrington Beef e.a. (C-241/95, Rec. p. I-6699, point 49).
(69) - Voir, par exemple, l'arrêt du 29 février 1996, France et Irlande/Commission (C-296/93 et C-307/93, Rec. p. I-795, points 22 et 30).
(70) - Voir, notamment, l'arrêt du 20 octobre 1977, Roquette Frères (29/77, Rec. p. 1835, points 19 et 20).
(71) - Arrêt France et Irlande/Commission, précité, point 31.
(72) - Neuvième considérant du règlement litigieux.
(73) - Ce qui est le cas pour les agriculteurs se trouvant dans les situations décrites au point 107 de nos conclusions.
(74) - Voir points 61 et 63 de nos conclusions.
(75) - Par analogie, voir notamment l'arrêt du 17 septembre 1996, Cooperativa Agricola Zootecnica S. Antonio e.a. (C-246/94, C-247/94, C-248/94 et C-249/94, Rec. p. I-4373, point 32).