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18/03/1993 | CJUE | N°C-35/92

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour, Parlement européen contre Erik Dan Frederiksen., 18/03/1993, C-35/92


Avis juridique important

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61992J0035

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 18 mars 1993. - Parlement européen contre Erik Dan Frederiksen. - Fonctionnaires - Annulation d'une décision de promotion - Pourvoi. - Affaire C-35/92 P.
Recueil de jurisprudence 1993 page I-00991

Sommaire
Parties

Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

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Avis juridique important

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61992J0035

Arrêt de la Cour (deuxième chambre) du 18 mars 1993. - Parlement européen contre Erik Dan Frederiksen. - Fonctionnaires - Annulation d'une décision de promotion - Pourvoi. - Affaire C-35/92 P.
Recueil de jurisprudence 1993 page I-00991

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

++++

1. Fonctionnaires - Vacance d' emploi - Pourvoi par voie de promotion - Examen comparatif des mérites des candidats - Pouvoir d' appréciation de l' administration - Limites - Respect des conditions posées par l' avis de vacance - Contrôle juridictionnel - Portée - Avis de vacance énonçant des conditions techniques ne pouvant être appréhendées avec les seules connaissances du juge - Désignation d' un expert - Admissibilité

2. Pourvoi - Moyens - Moyen articulé à l' encontre d' un motif de l' arrêt non nécessaire pour fonder son dispositif - Moyen inopérant

3. Pourvoi - Objet du litige - Demande reconventionnelle aux fins d' indemnisation du préjudice moral résultant de l' introduction du pourvoi - Irrecevabilité

(Règlement de procédure de la Cour, art. 116)

Sommaire

1. Si l' autorité investie du pouvoir de nomination dispose d' un large pouvoir d' appréciation pour comparer les mérites et les notations des candidats à un emploi vacant, elle est tenue d' exercer son pouvoir dans le cadre qu' elle s' est imposé à elle-même par l' avis de vacance d' emploi. Ainsi, l' exercice du pouvoir d' appréciation dont dispose l' administration en matière de nomination ou de promotion suppose qu' elle examine avec soin et impartialité tous les éléments pertinents de chaque
candidature et qu' elle observe consciencieusement les exigences énoncées dans l' avis de vacance, de sorte qu' elle est tenue d' écarter tout candidat qui ne répond pas à ces exigences.

Il appartient au Tribunal, dans l' exercice de son contrôle juridictionnel, de vérifier si le candidat choisi par l' administration pour occuper le poste vacant satisfait effectivement aux conditions de l' avis de vacance. Il est loisible au juge, dans l' hypothèse où l' avis de vacance comporte des conditions à ce point techniques qu' il ne possède pas les connaissances nécessaires pour en déterminer le contenu et la portée, de désigner un expert chargé d' établir objectivement la signification
exacte de ces exigences. La possibilité de désigner un expert permet en effet au Tribunal de procéder, conformément à sa mission, à un examen approfondi des faits qui sont à la base du litige dont il est saisi. En l' absence d' une telle possibilité, l' administration pourrait échapper à tout contrôle juridictionnel chaque fois que son pouvoir d' appréciation s' exerce dans un domaine technique dans lequel le juge ne possède pas les connaissances appropriées pour apprécier si elle est restée dans le
cadre de la légalité qui lui est imparti.

2. Dès lors que l' un des motifs retenus par le Tribunal est suffisant pour justifier le dispositif de son arrêt, les vices dont pourrait être entaché un autre motif dont il est également fait état dans l' arrêt sont, en tout état de cause, sans influence sur ledit dispositif, et le moyen qui les invoque est inopérant et doit être rejeté.

3. Il résulte de l' article 116 du règlement de procédure de la Cour, selon lequel le mémoire en réponse présenté dans le cadre d' un pourvoi ne peut modifier l' objet du litige devant le Tribunal, qu' est irrecevable la demande reconventionnelle présentée par le défendeur au pourvoi et tendant à la réparation du préjudice moral prétendument subi du fait de l' introduction du pourvoi.

Parties

Dans l' affaire C-35/92 P,

Parlement européen, représenté par M. J. Campinos, jurisconsulte, assisté de M. D. Petersheim, membre du service juridique, en qualité d' agents, ayant élu domicile au secrétariat général du Parlement européen, Kirchberg,

partie requérante,

ayant pour objet un pourvoi formé contre l' arrêt rendu par le Tribunal de première instance des Communautés européennes (quatrième chambre), le 11 décembre 1991, dans l' affaire T-169/89 ayant opposé M. Frederiksen au Parlement européen, et tendant à l' annulation de cet arrêt ainsi qu' au rejet du recours introduit en première instance par M. Frederiksen,

l' autre partie à la procédure étant:

Erik Dan Frederiksen, fonctionnaire du Parlement européen, représenté par Me G. Vandersanden, avocat au barreau de Bruxelles, ayant élu domicile à Luxembourg en l' étude de Me A. Schmitt, 62, avenue Guillaume, qui conclut au rejet du pourvoi ainsi qu' à la condamnation du Parlement européen à réparer le dommage moral prétendument subi par M. Frederiksen,

LA COUR (deuxième chambre),

composée de MM. J. L. Murray, président de chambre, G. F. Mancini et F. A. Schockweiler, juges,

avocat général: M. W. Van Gerven

greffier: M. J.-G. Giraud

vu la requête du Parlement européen, le mémoire en réponse de M. Frederiksen, la réplique du Parlement européen et la duplique de M. Frederiksen,

vu le rapport du juge rapporteur, l' avocat général et les parties entendus conformément à l' article 120 du règlement de procédure,

ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 13 janvier 1993,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 12 février 1992, le Parlement européen (ci-après "Parlement") a, en vertu de l' article 49 du statut (CEE) et des dispositions correspondantes des statuts (CECA et CEEA) de la Cour, formé un pourvoi contre l' arrêt du Tribunal du 11 décembre 1991, Frederiksen/ Parlement (T-169/89, Rec. p. II-1403), en tant qu' il a annulé la décision du président du Parlement du 3 juillet 1989 promouvant Mme X au poste de conseiller linguistique à la division de la
traduction danoise relevant de la direction générale VII (Traduction et services généraux, ci-après "DG VII") du Parlement.

2 Il ressort de l' arrêt attaqué que les faits à l' origine de l' affaire sont les suivants.

Le 9 janvier 1989, le Parlement a publié l' avis de vacance d' emploi n 5809 concernant un poste de conseiller linguistique de grade LA 3 à la division de la traduction danoise. Parmi les qualifications et connaissances requises dans cet avis de vacance figurait la "connaissance des techniques d' informatisation appliquées aux travaux de gestion".

M. Erik Dan Frederiksen, Mme X et M. Y, tous fonctionnaires de la division de la traduction danoise du Parlement, ont posé leur candidature à la suite de cette publication.

Par note du 2 février 1989, adressée au directeur général de la DG VII, le directeur de la traduction et de la terminologie a proposé la nomination de M. Frederiksen au poste de conseiller linguistique. Il s' appuyait, entre autres, sur les compétences et l' expérience de celui-ci dans le domaine de l' informatique.

Par note du 10 mars 1989, le directeur général de la DG VII a proposé au directeur de l' administration, du personnel et des finances la promotion de Mme X au poste en question, "même si la candidate se voit pour l' instant dans l' obligation de travailler à mi-temps pour des raisons familiales". Cette proposition a fait l' objet de diverses protestations, entre autres du directeur de la traduction et de la terminologie ainsi que du chef de la division de la traduction danoise, au motif, notamment,
que Mme X n' avait pas de connaissance des techniques d' informatisation appliquées aux travaux de gestion. Le directeur général de la DG VII a néanmoins maintenu sa proposition initiale dans la note qu' il a adressée, le 7 juin 1989, au secrétaire général du Parlement.

Le 3 juillet 1989, le président du Parlement, en sa qualité d' autorité investie du pouvoir de nomination (ci-après "AIPN") a promu Mme X au poste de conseiller linguistique de grade LA 3 à la division de la traduction danoise, avec effet à compter du 1er juin 1989.

Le 12 juillet 1989, M. Frederiksen a introduit une réclamation contre la décision portant nomination de Mme X. Par lettre du 29 novembre 1989, le président du Parlement a informé M. Frederiksen du rejet de sa réclamation.

Suite à sa nomination, Mme X a demandé et a obtenu, le 4 décembre 1989, l' autorisation de travailler à mi-temps jusqu' au 30 septembre 1990.

3 Par requête déposée au greffe du Tribunal le 27 décembre 1989, M. Frederiksen a introduit un recours visant l' annulation de la décision par laquelle Mme X avait été promue au poste de conseiller linguistique à la division de la traduction danoise.

4 Par l' arrêt attaqué, le Tribunal a annulé la décision litigieuse du président du Parlement au motif qu' en l' espèce l' AIPN avait estimé à tort que Mme X remplissait une des qualifications requises au titre de l' avis de vacance, à savoir la "connaissance des techniques d' informatisation appliquées aux travaux de gestion" et qu' en outre l' appréciation de l' AIPN était entachée d' une erreur manifeste, tant en ce qui concerne la vérification de l' accomplissement, par Mme X, des conditions
énoncées dans l' avis de vacance que la comparaison des mérites respectifs des candidats.

5 A l' appui de son pourvoi, le Parlement invoque deux moyens tirés de la violation, par le Tribunal, des principes découlant de la jurisprudence de la Cour, selon lesquels, d' une part, le pouvoir d' appréciation de l' AIPN en matière de promotion ne saurait être remis en cause par le juge communautaire qu' en cas d' erreur manifeste et, d' autre part, les irrégularités de procédure commises lors de la comparaison des mérites des candidats ne sauraient conduire à l' annulation de la décision de
promotion que si elles ont eu une incidence décisive sur celle-ci et n' ont pas été rectifiées à un stade ultérieur de la procédure.

6 M. Frederiksen conclut au rejet du pourvoi et à la condamnation du Parlement à un franc symbolique à titre de réparation du dommage moral subi du fait du pourvoi.

7 Par ordonnance du 3 avril 1992, le président de la Cour a rejeté une demande en référé, introduite par le Parlement, visant à obtenir le sursis à l' exécution de l' arrêt attaqué et a réservé les dépens.

8 Pour un plus ample exposé des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport du juge rapporteur. Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour.

Sur les conclusions aux fins d' annulation de l' arrêt attaqué

Quant au premier moyen

9 Le premier moyen invoqué par le Parlement s' appuie sur deux arguments, qu' il convient d' examiner successivement.

10 Le premier argument avancé par le Parlement concerne les points 67, 68 et 71 à 75 de l' arrêt attaqué, dans lesquels le Tribunal a examiné la question de savoir si Mme X satisfaisait à l' une des conditions requises dans l' avis de vacance, en l' occurrence celle relative à la "connaissance des techniques d' informatisation appliquées aux travaux de gestion".

11 A cet égard, le Tribunal relève dans son arrêt que l' avis de vacance constitue le cadre de la légalité que l' AIPN s' impose à elle-même. Il estime qu' il lui incombe, en conséquence, de vérifier s' il existe une adéquation objective entre les exigences figurant dans cet avis et les qualifications du candidat retenu. Sur ce point, le Tribunal constate d' abord qu' en l' espèce l' exigence d' une connaissance des techniques d' informatisation appliquées aux travaux de gestion correspondait à une
nécessité, soulignée par l' administration elle-même, d' utiliser les nouvelles technologies afin de répondre aux problèmes de la direction de la traduction du Parlement. Il constate ensuite, sur la base d' une expertise à laquelle il avait fait procéder, que Mme X n' avait pas les connaissances en informatique requises dans l' avis de vacance, telles que celles-ci devaient objectivement être interprétées. Il conclut qu' en considérant que Mme X remplissait ces conditions l' AIPN a dépassé les
limites qu' elle s' était elle-même fixées dans l' avis de vacance. Compte tenu du libellé des conditions requises au titre de l' avis de vacance, l' AIPN n' aurait pu qu' écarter la candidature de Mme X.

12 A propos de cette partie de l' arrêt du Tribunal, le Parlement fait valoir qu' en matière de promotion le contrôle juridictionnel doit, conformément à la jurisprudence, se limiter à l' examen de la question de savoir si l' AIPN n' a commis aucune erreur manifeste d' appréciation. Or, en l' espèce, la prétendue erreur commise par l' AIPN, lors de l' appréciation des connaissances en matière informatique de Mme X, ne saurait être qualifiée de manifeste, le Tribunal ayant dû recourir à un expert
pour vérifier si les aptitudes de la candidate en cause correspondaient aux qualifications exigées au titre de l' avis de vacance. En examinant s' il existait effectivement une adéquation entre le libellé de l' avis de vacance et les connaissances en matière informatique de Mme X, le Tribunal aurait violé la jurisprudence en substituant sa propre appréciation à celle de l' AIPN.

13 Pour statuer sur le bien-fondé de cet argument, il convient de rappeler qu' il est de jurisprudence constante (voir, par exemple, arrêts du 30 octobre 1974, Grassi/Conseil, 188/73, Rec. p. 1099, point 38, et du 7 février 1990, Culin/Commission, C-343/87, Rec. p. I-225, point 19) que, si l' AIPN dispose d' un large pouvoir d' appréciation lors de la comparaison des mérites et des notations des candidats et peut l' exercer notamment en vue du poste à pourvoir, elle est tenue de le faire dans le
cadre qu' elle s' est imposée à elle-même par l' avis de vacance d' emploi.

14 En effet, l' avis de vacance a pour but d' informer les intéressés, d' une façon aussi exacte que possible, de la nature des conditions requises pour occuper le poste dont il s' agit, afin de les mettre en mesure d' apprécier s' il y a lieu, pour eux, de faire acte de candidature (voir arrêt Grassi/Conseil, précité, point 40).

15 Ainsi, l' exercice du pouvoir d' appréciation dont dispose l' AIPN en matière de nomination ou de promotion suppose un examen scrupuleux du dossier de candidature et une observation consciencieuse des exigences énoncées dans l' avis de vacance, de sorte que celle-ci est tenue d' écarter tout candidat qui ne répond pas à ces exigences (voir arrêt Grassi/Conseil, précité). D' ailleurs, dans l' arrêt du 21 novembre 1991, Technische Universitaet Muenchen (C-269/90, Rec. p. I-5469, point 14), la Cour
a relevé, de façon générale, que le pouvoir d' appréciation dévolu à une autorité communautaire avait pour contrepartie l' obligation, pour cette autorité, d' examiner avec soin et impartialité tous les éléments pertinents du cas d' espèce.

16 Dans ces conditions, c' est à bon droit que le Tribunal a jugé dans l' arrêt attaqué que l' avis de vacance constitue le cadre de la légalité que l' AIPN s' impose à elle-même et qu' elle doit, dès lors, respecter scrupuleusement.

17 En vue de contrôler si l' AIPN n' avait pas dépassé les limites de ce cadre légal, il appartenait, en l' espèce, au Tribunal de constater d' abord quelles étaient, en l' occurrence, les conditions requises au titre de l' avis de vacance et de vérifier ensuite si le candidat choisi par l' AIPN pour occuper le poste vacant satisfaisait effectivement à ces conditions.

18 Dans l' hypothèse où l' avis de vacance comportait des conditions à ce point techniques que le juge ne possédait pas les connaissances nécessaires pour en déterminer le contenu et la portée, le Tribunal avait la faculté de désigner un expert chargé d' établir, de façon objective, la signification exacte de ces exigences.

19 En effet, la désignation d' un expert relève des pouvoirs du Tribunal de procéder, conformément à sa mission, à un examen approfondi des faits qui sont à la base des litiges dont il a à connaître. En l' absence d' une telle possibilité, l' AIPN pourrait échapper à tout contrôle juridictionnel chaque fois que son pouvoir d' appréciation s' exerce dans un domaine technique dans lequel le juge ne possède pas les connaissances appropriées pour apprécier si celle-ci n' a pas dépassé les limites du
cadre légal que constitue l' avis de vacance.

20 Il résulte des développements qui précèdent que le Tribunal n' a pas méconnu le droit communautaire en recourant, en l' espèce, à l' avis d' un expert pour déterminer la portée de la condition, requise au titre de l' avis de vacance, relative à la connaissance des techniques d' informatisation appliquées aux travaux de gestion et en jugeant, à la lumière de cette exigence telle qu' elle devait objectivement être interprétée, qu' en l' espèce l' AIPN avait clairement dépassé les limites de son
pouvoir d' appréciation en promouvant Mme X, dont les connaissances ne satisfaisaient pas aux conditions énoncées dans l' avis de vacance.

21 Dans ces conditions, le premier argument invoqué par le Parlement dans le cadre de son premier moyen doit être rejeté.

22 Le second argument avancé par le Parlement dans le cadre de ce moyen a trait au point 76 de l' arrêt attaqué.

23 Dans ce point, le Tribunal relève qu' en tout état de cause le Parlement n' a pas apporté la preuve qu' une appréciation de l' adéquation des connaissances de Mme X aux exigences de l' avis de vacance avait été opérée par l' AIPN avec l' objectivité et l' exactitude nécessaires. A cet égard, le Tribunal constate que l' AIPN ne disposait pas d' éléments suffisants pour procéder à une telle appréciation, que les appréciations portées par les instances inférieures, intervenues lors de la procédure
de promotion, reposaient sur une erreur et que le service juridique du Parlement s' est fondé sur cette même erreur, dans le cadre de la procédure qui a précédé la décision de rejet de la réclamation introduite par M. Frederiksen.

24 A cet égard, le Parlement reproche au Tribunal de s' être fondé, au point 76 de son arrêt, sur une erreur matérielle commise par le directeur général de la DG VII selon lequel les exigences en matière informatique auraient, en l' espèce, été identiques à celles qui figuraient auparavant dans les avis de concours concernant des postes de conseiller linguistique aux divisions de la traduction espagnole et portugaise du Parlement. Cette erreur n' aurait pu avoir aucun effet ni sur la décision de
promotion, puisqu' elle aurait figuré dans une note établie postérieurement à cette décision par le directeur général de la DG VII, ni sur le rejet de la réclamation de M. Frederiksen, puisque l' avis du service juridique du Parlement aurait relevé l' erreur en question et se serait fondé sur un document antérieur ne contenant pas cette erreur.

25 Même à supposer que ce grief ne tende pas à contester l' appréciation des faits du litige opérée par le Tribunal, laquelle n' est pas susceptible d' être remise en cause dans le cadre d' un pourvoi, mais puisse être compris comme visant une erreur de droit qu' avait commise le Tribunal dans la motivation de son arrêt, il suffit de relever qu' il ressort de la formulation même du point 76 que celui-ci est surabondant dans la motivation du Tribunal dans la mesure où, au point 75 de son arrêt, le
Tribunal a conclu que l' AIPN avait, en l' espèce, promu illégalement Mme X, du fait que cette candidate ne remplissait pas une des conditions requises dans l' avis de vacance.

26 Puisqu' il résulte des points 13 à 20 du présent arrêt que le Tribunal n' a pas violé le droit communautaire en aboutissant à cette conclusion, le second argument du Parlement relatif à un point subséquent du même motif et ne tendant qu' à corroborer une conclusion qui se justifie légalement par la motivation antérieure ne peut pas être retenu.

27 Dans ces conditions, le premier moyen invoqué par le Parlement doit être rejeté dans son ensemble.

Quant au second moyen

28 Le second moyen du Parlement a trait aux points 77 à 79 de l' arrêt attaqué.

29 Dans cette partie de son arrêt, le Tribunal s' attache à contrôler la manière dont l' AIPN a, en l' espèce, procédé à l' examen comparatif des mérites des candidats, prévu par l' article 45 du statut des fonctionnaires des Communautés européennes. A cet égard, le Tribunal constate que la seule appréciation comparative qui a été portée à la connaissance de l' AIPN, pour l' éclairer sur la décision de nomination à prendre, était celle figurant dans la note du 10 mars 1989 du directeur général de la
DG VII. Or, selon le Tribunal, cette note était incomplète et entachée d' erreurs manifestes, en fait et en droit. Tout d' abord, elle ne mentionnait ni les connaissances ni l' expérience des trois candidats dans le domaine de l' informatique. Ensuite, elle comportait une erreur dans la comparaison des rapports de notation, Mme X et M. Frederiksen, contrairement à ce qui est affirmé dans ladite note, se trouvant à égalité en ce qui concerne le nombre de mentions "excellent" qu' ils avaient obtenues.
Enfin, elle faisait référence, à titre de considération du moins équivalente aux autres critères dans le cadre de l' examen comparatif des mérites, à un souci d' assurer l' égalité des chances entre les femmes et les hommes. Le Tribunal en conclut qu' en l' espèce l' AIPN n' a pas procédé à l' examen comparatif des mérites des candidats avec l' objectivité et l' exactitude requises.

30 A l' appui de son moyen, le Parlement fait grief au Tribunal d' avoir violé le droit communautaire en jugeant, à propos de l' examen comparatif des mérites des candidats, que la décision de promotion litigieuse était viciée par plusieurs irrégularités de procédure, alors que la comparaison des mérites aurait été effectuée par l' administration avec soin et objectivité et que, de toute façon, les erreurs commises auraient été corrigées lors de la procédure de réclamation, au terme de laquelle l'
AIPN aurait entièrement confirmé sa décision initiale.

31 A cet égard, il suffit de constater qu' il résulte du point 20 du présent arrêt que c' est à juste titre que le Tribunal a estimé, en l' espèce, que l' AIPN avait clairement dépassé les limites de son pouvoir d' appréciation en promouvant Mme X, dont les connaissances ne satisfaisaient pas aux conditions énoncées dans l' avis de vacance. Ce motif est, à lui seul, suffisant pour justifier légalement l' annulation de la décision de promotion de Mme X. Dans ces conditions, les vices dont pourrait
être entaché l' autre motif du Tribunal, relatif à la comparaison des mérites des candidats, sont, en tout état de cause, sans influence sur le dispositif de l' arrêt attaqué. Le moyen invoqué par le Parlement par lequel celui-ci conteste ce dernier motif est, en conséquence, inopérant et doit, dès lors, être rejeté.

32 Il résulte de l' ensemble des considérations qui précèdent que le pourvoi du Parlement n' est pas fondé et doit donc être rejeté.

Sur la demande reconventionnelle aux fins d' indemnisation du préjudice moral

33 Dans ses mémoires, M. Frederiksen a fondé ses conclusions tendant à la condamnation du Parlement à un franc symbolique, à titre de réparation du dommage moral subi, sur la circonstance que le pourvoi formé par le Parlement serait dilatoire et vexatoire.

34 Pour statuer sur cette demande, il convient de rappeler qu' aux termes de l' article 116 du règlement de procédure:

"1. Les conclusions du mémoire en réponse tendent:

- au rejet total ou partiel du pourvoi ou à l' annulation totale ou partielle de la décision du Tribunal;

- à ce qu' il soit fait droit, en tout ou en partie, aux conclusions présentées en première instance, à l' exclusion de toute conclusion nouvelle.

2. Le mémoire en réponse ne peut modifier l' objet du litige devant le Tribunal."

35 Il en résulte que, dans le cadre d' un pourvoi, l' autre partie à la procédure n' a pas la possibilité de conclure à la réparation du préjudice prétendument subi par elle du fait de l' introduction du pourvoi par la partie requérante.

36 Dans ces conditions, les conclusions de M. Frederiksen tendant à la condamnation du Parlement à réparer le préjudice prétendument subi par M. Frederiksen du fait de l' introduction du pourvoi doivent être rejetées comme irrecevables.

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

37 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens. Le Parlement ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens de la présente instance, y compris ceux relatifs à la procédure en référé.

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR (deuxième chambre)

déclare et arrête:

1) Le pourvoi est rejeté comme non fondé.

2) La demande reconventionnelle est rejetée comme irrecevable.

3) Le Parlement européen est condamné aux dépens de la présente instance, y compris ceux relatifs à la procédure en référé.


Synthèse
Formation : Deuxième chambre
Numéro d'arrêt : C-35/92
Date de la décision : 18/03/1993
Type d'affaire : Pourvoi - non fondé
Type de recours : Recours de fonctionnaires

Analyses

Fonctionnaires - Annulation d'une décision de promotion - Pourvoi.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Parlement européen
Défendeurs : Erik Dan Frederiksen.

Composition du Tribunal
Avocat général : Van Gerven
Rapporteur ?: Schockweiler

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1993:104

Source

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