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07/11/1991 | CJUE | N°C-22/90

CJUE | CJUE, Arrêt de la Cour du 7 novembre 1991., République française contre Commission des Communautés européennes., 07/11/1991, C-22/90


Avis juridique important

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61990J0022

Arrêt de la Cour du 7 novembre 1991. - République française contre Commission des Communautés européennes. - FEOGA - Non-reconnaissance de dépenses - Prélèvement supplémentaire sur le lait. - Affaire C-22/90.
Recueil de jurisprudence 1991 page I-05285

Sommaire


Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots ...

Avis juridique important

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61990J0022

Arrêt de la Cour du 7 novembre 1991. - République française contre Commission des Communautés européennes. - FEOGA - Non-reconnaissance de dépenses - Prélèvement supplémentaire sur le lait. - Affaire C-22/90.
Recueil de jurisprudence 1991 page I-05285

Sommaire
Parties
Motifs de l'arrêt
Décisions sur les dépenses
Dispositif

Mots clés

++++

Agriculture - Organisation commune des marchés - Lait et produits laitiers - Prélèvement supplémentaire sur le lait - Producteurs disposant de deux quantités de référence, au titre de ventes directes et de livraisons en laiterie - Possibilité de transfert de quantités de référence d' un secteur d' activité à l' autre en fonction des besoins de commercialisation - Bénéficiaires - Producteurs suspendant totalement l' une des activités pendant une campagne - Inclusion

( Règlement du Conseil n 857/84, art . 6 bis )

Sommaire

Le champ d' application de l' article 6 bis du règlement n 857/84, qui permet aux producteurs laitiers disposant de deux quantités de référence, l' une au titre de ventes directes et l' autre au titre de livraisons en laiterie, de les transférer d' un secteur d' activité à l' autre à l' intérieur d' une période de douze mois, ne saurait être limité à l' hypothèse où le producteur en cause exerce effectivement ces deux activités au cours de la même période de douze mois . L' objet de cette
disposition, qui est de permettre aux producteurs de faire face à une modification de leurs besoins de commercialisation, laquelle peut produire des effets sur plus d' une campagne, ne serait en effet pas pleinement réalisé si, par l' effet de pareille limitation, ne pouvaient en bénéficier ceux qui, confrontés à une telle modification, ont arrêté temporairement, au cours d' une campagne donnée, leurs ventes directes .

Parties

Dans l' affaire C-22/90,

République française, représentée initialement par Mme Edwige Belliard, directeur adjoint à la direction des affaires juridiques du ministère des Affaires étrangères, en qualité d' agent, et par M . Géraud de Bergues, secrétaire adjoint principal à la direction des affaires juridiques de ce même ministère, en qualité d' agent suppléant, puis par M . Philippe Pouzoulet, sous-directeur à la direction des affaires juridiques du même ministère, en qualité d' agent, et par M . Géraud de Bergues, en
qualité d' agent suppléant, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l' ambassade de France, 9, boulevard du Prince Henri,

partie requérante,

contre

Commission des Communautés européennes, représentée par M . Patrick Hetsch, membre du service juridique, en qualité d' agent, ayant élu domicile auprès de M . Roberto Hayder, représentant du service juridique, Centre Wagner, Kirchberg,

partie défenderesse,

ayant pour objet l' annulation de la décision 89/627/CEE de la Commission, du 15 novembre 1989, relative à l' apurement des comptes des États membres au titre des dépenses financées par le Fonds européen d' orientation et de garantie agricole ( FEOGA ), section "garantie", pour l' exercice financier 1987 ( JO L 359, p . 23 ) dans la mesure où cette décision a retenu un dépassement de la quantité globale garantie pour les livraisons de lait de 5 192 tonnes pour la campagne 1986/1987,

LA COUR,

composée de M . O . Due, président, Sir Gordon Slynn, MM . F . A . Schockweiler et F . Grévisse, présidents de chambre, G . F . Mancini, J . C . Moitinho de Almeida et M . Zuleeg, juges,

avocat général : M . W . Van Gerven

greffier : M . J.-G . Giraud

vu le rapport d' audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l' audience du 14 mai 1991,

ayant entendu l' avocat général en ses conclusions à l' audience du 26 juin 1991,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l'arrêt

1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 24 janvier 1990, la République française a, en vertu de l' article 173 du traité CEE, demandé l' annulation de la décision 89/627/CEE de la Commission, du 15 novembre 1989, relative à l' apurement des comptes des États membres au titre des dépenses financées par le Fonds européen d' orientation et de garantie agricole, section "garantie", pour l' exercice financier 1987 ( JO L 359, p . 23 ), pour autant que cette décision a retenu un dépassement de la
quantité globale garantie pour les livraisons de lait de 5 192 tonnes pour la campagne 1986/1987 .

2 Par la décision attaquée, la Commission a notamment mis à charge de la République française un montant de 10 669 874 FF, correspondant aux prélèvements supplémentaires applicables à la quantité de lait ( 5 192 tonnes ) qui a excédé, au cours de la troisième période d' application du régime de prélèvement supplémentaire sur le lait ( 1986/1987 ), la quantité globale garantie, fixée pour les livraisons de lait et de produits laitiers en France . Ladite quantité de 5 192 tonnes résulte de transferts,
effectués par la France, entre les quantités de référence qui avaient été attribuées à des producteurs de lait au titre de leurs ventes directes et les quantités de référence attribuées au titre de livraisons en laiterie . La décision attaquée est fondée sur la considération que ces transferts étaient intervenus en violation des règles communautaires en la matière, dans la mesure où les producteurs concernés n' avaient pas, au cours de la campagne en cause, réalisé effectivement à la fois des ventes
directes et des livraisons en laiterie .

3 A l' appui de son recours, la République française invoque deux moyens tirés de l' interprétation incorrecte par la Commission, d' une part, des règles relatives aux transferts entre quantités de référence au titre de ventes directes et quantités de référence au titre de livraisons à la laiterie et, d' autre part, des règles relatives au calcul du taux moyen de matières grasses du lait, servant de base au calcul du prélèvement supplémentaire .

4 Pour un plus ample exposé des faits du litige, du déroulement de la procédure ainsi que des moyens et arguments des parties, il est renvoyé au rapport d' audience . Ces éléments du dossier ne sont repris ci-après que dans la mesure nécessaire au raisonnement de la Cour .

Sur la réglementation communautaire applicable

5 Le régime de prélèvement supplémentaire sur le lait, institué par le règlement ( CEE ) n 856/84 du Conseil, du 31 mars 1984, modifiant le règlement ( CEE ) n 804/68 portant organisation commune des marchés dans le secteur du lait et des produits laitiers ( JO L 90, p . 10 ) est aménagé de telle sorte qu' un prélèvement est perçu sur les livraisons de lait ou d' autres produits laitiers qui dépassent une quantité de référence à déterminer . Celle-ci est, conformément à l' article 2 du règlement (
CEE ) n 857/84 du Conseil, du 31 mars 1984, portant règles générales pour l' application du prélèvement visé à l' article 5 quater du règlement n 804/68 dans le secteur du lait et des produits laitiers ( JO L 90, p . 13 ), en principe, égale à la quantité de lait ou d' équivalent lait livrée par le producteur à la laiterie ou achetée par celle-ci pendant l' année de référence, affectée d' un certain pourcentage .

6 L' article 6 du règlement n 857/84, précité, prévoit toutefois qu' une quantité de référence est également attribuée aux producteurs qui ont effectué des ventes directes, ce qui implique qu' un seul et même producteur peut bénéficier de deux quantités de référence, l' une au titre de ses livraisons en laiterie et l' autre au titre de ses ventes au consommateur . L' article 6 bis du règlement n 857/84, ajouté à ce règlement par le règlement modificatif ( CEE ) n 590/85 du Conseil, du 26 février
1985 ( JO L 68, p . 1 ), prévoit que les producteurs disposant ainsi de deux quantités de référence "obtiennent sur leur demande, pour faire face à une modification de leurs besoins de commercialisation, une augmentation de l' une des deux quantités de référence à l' intérieur d' une période de douze mois . Cette augmentation est subordonnée à une réduction du même montant de l' autre quantité de référence, pendant la même période de douze mois ".

7 Les modalités d' application du régime de prélèvement supplémentaire sur le lait, visé à l' article 5 quater du règlement n 804/68, précité, ont été fixées par le règlement ( CEE ) n 1546/88 de la Commission, du 3 juin 1988 ( JO L 139, p . 12 ). L' article 5, paragraphe 5, de ce règlement dispose en substance que les producteurs, qui ont obtenu une quantité de référence au titre de leurs ventes directes et qui cessent, totalement ou partiellement, celles-ci, "peuvent livrer leur lait et leurs
produits laitiers à un acheteur ..., à condition que l' État membre soit en mesure de leur octroyer une quantité de référence dans la limite de la quantité garantie ". Le règlement n 1546/88 comporte en outre, en son article 12, des règles relatives au calcul du taux moyen de matières grasses du lait, servant de base au calcul du prélèvement supplémentaire .

Sur le premier moyen

8 Par le premier moyen, la République française reproche à la Commission d' avoir fait une application incorrecte de l' article 6 bis du règlement n 857/84, précité, tel que modifié, en retenant, dans la décision attaquée, un dépassement à concurrence de 5 192 tonnes de lait de la quantité garantie, résultant de transferts entre quantités de référence au titre de ventes directes et quantités de référence au titre de livraisons en laiterie, dans le chef de producteurs qui n' avaient pas, au cours de
la campagne en cause, réalisé à la fois des ventes directes et des livraisons en laiterie .

9 Le gouvernement français précise à cet égard que l' article 6 bis, précité, régit les transferts provisoires entre quantités de référence au titre de ventes directes et celles au titre de livraisons en laiterie . Il permet ainsi à un producteur disposant de deux quantités de référence de déplacer, pour une campagne donnée, tout ou partie de ces quantités d' une activité à l' autre, étant entendu que cette autorisation devient caduque à la fin de chaque campagne . En revanche, lorsqu' un producteur
cesse définitivement son activité de ventes directes, sa quantité de référence au titre de cette activité retombe, conformément à l' article 5, paragraphe 5, du règlement n 1546/88, précité, dans la réserve nationale et il ne peut être doté, le cas échéant, que d' une nouvelle quantité de référence déduite de la réserve nationale, au titre de ses livraisons en laiterie .

10 Le rapprochement des deux dispositions susvisées fait apparaître, selon le gouvernement français, qu' un transfert provisoire au sens de l' article 6 bis du règlement n 857/84, précité, n' est subordonné qu' à deux conditions, à savoir que le producteur intéressé dispose de deux quantités de référence, au titre de ses ventes directes et de ses livraisons en laiterie, et qu' il soit en situation de devoir faire face à une modification de ses besoins de commercialisation . En revanche, cette
disposition n' implique pas que le producteur exerce simultanément, au cours de la campagne en cause, à la fois une activité de ventes directes et une activité de livraisons en laiterie .

11 La Commission, en revanche, soutient que le mécanisme des transferts provisoires, établi par l' article 6 bis du règlement n 857/84, ne peut être mis en oeuvre que si le producteur procède effectivement à des ventes directes et à des livraisons en laiterie pendant la campagne en cause . L' objet de ladite disposition est, selon la Commission, de permettre à un producteur qui commercialise sa production laitière, pour partie, sous forme de ventes directes et, pour partie, sous forme de livraisons
en laiterie, de réorienter la destination de cette production, lorsque ses besoins de commercialisation ne correspondent plus, au cours d' une campagne donnée, à la répartition commerciale habituelle .

12 Il s' ensuit, de l' avis de la Commission, que le transfert entre quantités de référence au titre de ventes directes et quantités de référence au titre de livraisons en laiterie suppose que les producteurs exercent effectivement, au cours de la campagne en cause, une double activité de ventes directes et de livraisons en laiterie .

13 Cette argumentation de la Commission ne peut être accueillie .

14 En effet, le libellé même de l' article 6 bis du règlement n 857/84 fait apparaître que le champ d' application de cette disposition ne saurait être limité à l' hypothèse où le producteur en cause, disposant de deux quantités de référence au titre de ventes directes et de livraisons en laiterie, exerce effectivement ces deux activités au cours de la même période de douze mois .

15 Cette interprétation, fondée sur les termes de la disposition considérée, est conforme à l' objet de celle-ci, qui est de permettre aux producteurs, bénéficiaires de deux quantités de référence, de faire face à une modification de leurs besoins de commercialisation . Étant donné que les effets d' une telle modification peuvent s' étendre sur plus d' une campagne, la réalisation de cet objet ne serait pas entièrement assurée si l' article 6 bis était interprété en ce sens que seraient exclus de
son champ d' application les producteurs ne réalisant pas effectivement, au cours d' une même campagne, à la fois des ventes directes et des livraisons en laiterie, c' est-à-dire notamment ceux qui, face à une modification de leurs besoins de commercialisation, ont arrêté temporairement, au cours d' une campagne donnée, leurs ventes directes .

16 Par ailleurs, il résulte de l' économie de la réglementation en la matière que les producteurs, qui ne relèvent pas du champ d' application de l' article 6 bis du règlement n 857/84, ne peuvent prétendre changer de mode de commercialisation qu' au titre de l' article 5, paragraphe 5, du règlement n 1546/88, régissant le régime des cessations définitives des ventes directes . Cette disposition ne permet, toutefois, que le transfert des quantités de référence au titre des ventes directes vers les
quantités de référence au titre des livraisons en laiterie et non l' inverse . Elle subordonne, en outre, les livraisons en laiterie, exemptes du prélèvement supplémentaire, à la condition que l' État membre en cause soit en mesure d' octroyer des quantités de référence dans la limite de la quantité globale garantie pour l' État membre en cause .

17 Il découle de l' ensemble des considérations qui précèdent que la décision attaquée, dans la mesure où elle retient un dépassement de la quantité globale garantie pour les livraisons de lait à concurrence de 5 192 tonnes pour la campagne 1986/1987, résultant du refus de reconnaître le bénéfice de l' article 6 bis du règlement n 857/84 aux producteurs n' ayant pas réalisé effectivement, au cours de la campagne 1986/1987, à la fois des ventes directes et des livraisons en laiterie, est fondée sur
une interprétation erronée de cette disposition et doit, dès lors, être annulée .

Sur le second moyen

18 La décision attaquée devant être annulée pour les raisons susindiquées, il n' y a pas lieu d' examiner le second moyen tiré d' une interprétation incorrecte de l' article 12 du règlement n 1546/88, précité, relatif au calcul du taux moyen de matières grasses du lait servant de base au calcul du prélèvement supplémentaire .

Décisions sur les dépenses

Sur les dépens

19 Aux termes de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens . La Commission ayant succcombé en ses moyens, il convient de la condamner aux dépens .

Dispositif

Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête :

1 ) La décision 89/627/CEE de la Commission, du 15 novembre 1989, relative à l' apurement des comptes des États membres au titre des dépenses financées par le Fond européen d' orientation et de garantie agricole, section "garantie", pour l' exercice financier 1987, est annulée pour autant qu' elle retient un dépassement de la quantité globale garantie pour les livraisons de lait à concurrence de 5 192 tonnes pour la campagne 1986/1987 .

2 ) La Commission est condamnée aux dépens .


Synthèse
Numéro d'arrêt : C-22/90
Date de la décision : 07/11/1991
Type de recours : Recours en annulation - fondé

Analyses

FEOGA - Non-reconnaissance de dépenses - Prélèvement supplémentaire sur le lait.

Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA)

Agriculture et Pêche

Produits laitiers


Parties
Demandeurs : République française
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Van Gerven
Rapporteur ?: Zuleeg

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1991:417

Source

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