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22/01/1987 | CJUE | N°44/85,

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mancini présentées le 22 janvier 1987., Ingfried Hochbaum et Edward Rawes contre Commission des Communautés européennes., 22/01/1987, 44/85,


Avis juridique important

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61985C0044

Conclusions de l'avocat général Mancini présentées le 22 janvier 1987. - Ingfried Hochbaum et Edward Rawes contre Commission des Communautés européennes. - Fonctionnaire - Annulation de nomination. - Affaires jointes 44/85, 77/85, 294/85 et 295/85.
Recueil de jurisprudence

1987 page 03259

Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le...

Avis juridique important

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61985C0044

Conclusions de l'avocat général Mancini présentées le 22 janvier 1987. - Ingfried Hochbaum et Edward Rawes contre Commission des Communautés européennes. - Fonctionnaire - Annulation de nomination. - Affaires jointes 44/85, 77/85, 294/85 et 295/85.
Recueil de jurisprudence 1987 page 03259

Conclusions de l'avocat général

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Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

1 . Par quatre recours introduits entre les mois de février et d' octobre 1985, MM . Ingfried Hochbaum ( affaires 44 et 294/85 ) et Edward Rawes ( affaires 77 et 295/85 ), fonctionnaires de grade A*4 à la direction générale de la concurrence ( DG*IV ) de la Commission, vous demandent d' annuler l' acte par lequel le chef de la division "monopoles d' État et entreprises publiques" a été nommé dans la même direction .

Les faits : le 30 mai 1984, après avoir examiné les candidatures présentées en vertu de l' article 29, paragraphe 1, sous a ), du statut des fonctionnaires, la Commission a décidé de pourvoir ce poste en promouvant M . Paul Waterschoot, fonctionnaire de grade A*4 de la direction générale des affaires industrielles et technologiques ( DG*III ). Contre cette mesure, M . Hochbaum a introduit une réclamation le 17 juillet en soutenant que, lorsque l' autorité investie du pouvoir de nomination a apprécié
les possibilités de promotion, elle n' avait pas pu procéder à un examen valable des mérites, comme le prescrit l' article 45 du statut; en effet, du fait qu' ils n' avaient pas encore été établis, il manquait les rapports de notation de différents candidats ( parmi lesquels lui-même et M . Waterschoot ) pour les années 1979 à 1983 . En outre, le nom de Waterschoot figurait dans un "organigramme non officiel" de la DG IV circulant au Berlaymont trois mois avant que le poste ait été déclaré vacant .
La décision avait donc été adoptée sur la base de considérations étrangères à l' intérêt du service et, en tout cas, sans tenir compte des mérites professionnels des autres candidats .

Le 30 août 1984, M . Rawes, lui aussi, a introduit une réclamation contre la nomination de M . Waterschoot en alléguant les arguments que son collègue avait déjà fait valoir et en se plaignant, en outre, du non-respect des conditions prévues par l' avis de vacance de poste .

Par des notes du 20 décembre 1984 et du 21 janvier 1985, adressées respectivement à MM . Hochbaum et Rawes, le directeur du personnel a reconnu qu' au moment de la décision contestée les dossiers de certains candidats étaient incomplets et il a ajouté que l' administration avait déjà invité les directeurs responsables à rédiger les rapports manquants, "afin que la Commission puisse procéder à un nouvel examen comparatif des mérites de l' ensemble des candidats ". Après avoir obtenu cette
documentation, le collège des commissaires a repris l' examen des candidatures en confirmant, le 30 janvier 1985, la promotion et la nomination de M . Waterschoot .

MM . Hochbaum et Rawes ne se sont pas tenus pour battus et ils ont introduit deux autres réclamations séparées contre cette décision . Les quatre procédures internes relatives à ces actes ont cependant eu une issue négative, d' où les recours que nous avons rappelés au début .

2 . Par ordonnance du 12 juin 1986, la deuxième chambre de la Cour a décidé la jonction des quatre affaires pour les débats et pour l' arrêt . Au cours de la procédure, cependant, l' institution défenderesse a affirmé que les recours contre la première décision ( affaires 44 et 77/85 ) doivent être considérés comme dépourvus d' objet . Illégal pour manque de la documentation nécessaire, cet acte a, en effet, été remplacé par une nouvelle nomination à laquelle la Commission a procédé en respectant
pleinement le statut; il s' ensuit que la seconde mesure est, le cas échéant, susceptible de recours, parce qu' elle est la seule qui puisse avoir causé un préjudice aux candidats au poste de chef de la division "monopoles ".

La décision du 30 janvier 1985, observent, en revanche, les requérants, est dépourvue d' autonomie juridique, puisqu' il s' agit d' un acte visant à "confirmer" ( le terme a été employé par l' autorité investie du pouvoir de nomination elle-même ) une décision précédente et invalide . Ils ne pouvaient donc pas l' attaquer isolément, de sorte qu' ils n' ont introduit les recours 294 et 295/85 que par mesure de prudence; en effet, l' acte de confirmation tombe automatiquement avec l' annulation de
celui auquel il se rattache et qu' il confirme .

Cette thèse ne peut pas être partagée . Une règle de bonne administration et un principe commun aux droits des États membres sont de permettre à l' autorité qui a adopté un acte vicié, et donc annulable, de le révoquer, ou mieux, de le régulariser rétroactivement, en évitant ainsi la prolongation des effets préjudiciables auxquels l' irrégularité peut donner lieu ( arrêts du 12 juillet 1957, affaires jointes 7/56 et 3 à 7/57, Algera et autres/Assemblée Commune, Rec . 1957, p.*83, et du 22 mars 1961,
affaires jointes 42 et 49/59, Snupat/Haute Autorité, Rec . 1961, p.*97 ). La régularisation doit cependant intervenir avant que l' acte illégal devienne définitif et, donc, avant que le délai pour l' attaquer soit venu à expiration ou, si un recours a déjà été introduit, avant la décision du juge .

Dans notre cas, il n' est pas douteux que la décision du 30 janvier 1985, expressément adoptée par l' autorité investie du pouvoir de nomination pour corriger un défaut de la décision précédente, est intervenue bien avant que cette dernière soit attaquée . La confirmation de M . Waterschoot est donc, au sens technique, une "validation", c' est-à-dire une nouvelle mesure de nomination entraînant l' élimination du premier acte, et, s' il en est ainsi, les requérants n' ayant pas intérêt à obtenir l'
annulation d' un acte retiré, les recours relatifs aux affaires 44 et 77/85 doivent être déclarés irrecevables .

3 . A l' appui de leurs demandes dans les affaires 294 et 295/85, MM . Hochbaum et Rawes invoquent essentiellement trois moyens : a ) la violation des articles 45, 25 et 27, alinéa 3, du statut des fonctionnaires; b ) le non-respect des conditions prescrites dans l' avis de poste vacant; c ) l' excès de pouvoir . Nous nous occuperons uniquement du premier, qui est assurément fondé .

Voyons pourquoi . En rejetant les réclamations introduites contre la décision du 30 janvier 1985, le commissaire M . Christophersen a affirmé que, lors de la confirmation du premier acte, l' autorité investie du pouvoir de nomination n' avait pas estimé nécessaire de "saisir une deuxième fois" le comité consultatif des nominations aux grades A*2 et A*3 . En effet, cet organe "dont le rôle est consultatif ( avait déjà )*... émis son avis le 25 mai 1984 ". Mais - et voici le point - cette manière de
procéder était-elle légitime?

Nous rappelons que le comité visé par M . Christophersen est prévu dans la décision de la Commission du 23 juillet 1980 . Connu sous le nom de "groupe Noël" et composé de quatre membres ( le secrétaire général de l' institution, le directeur général du personnel, un directeur désigné par le président et un représentant du commissaire chargé des affaires du personnel ), il examine les candidatures ainsi que les dossiers qui s' y rapportent et, après avoir apprécié les capacités des candidats et leurs
aptitudes à exercer les fonctions qui s' attachent au poste, il émet un avis non obligatoire dans lequel il indique le ou les fonctionnaires qui répondent le mieux aux qualifications requises . Cet acte, accompagné des demandes et des dossiers, est ensuite transmis au collège des commissaires pour la décision finale ( sur la procédure ainsi décrite, voir l' arrêt du 23 octobre 1986, affaire 26/85, Vaysse/Commission, Rec . p.*3131 ).

Or, l' avis émis le 25 mai 1984 affirme que, "parmi les ( seize ) candidats qui se sont présentés, MM . Argyris, Hochbaum, Van Ginderachter et Waterschoot, cités dans l' ordre alphabétique, devraient être pris particulièrement en considération ". Toutefois, comme nous le savons, cette proposition a été formulée à défaut d' une appréciation des mérites professionnels acquis par les différents aspirants au cours des cinq dernières années de service, et cette circonstance rend l' avis invalide non
seulement en ce qui concerne la nomination du 30 mai 1984, mais également aux fins de la décision de confirmation . En effet, en adoptant cette dernière, l' autorité investie du pouvoir de nomination aurait dû entamer une nouvelle procédure en renvoyant au comité toute la documentation, désormais complète .

On objectera que, comme l' affirme l' arrêt du 18 décembre 1980 dans les affaires jointes 156/79 et 51/80 ( Gratreau/Commission, Rec . 1980, p.*3943, attendu*24 ), l' absence d' un rapport de notation "ne suffit pas pour annuler les promotions *... sauf s' il est établi que cette circonstance a pu avoir une incidence décisive sur la procédure de promotion ". Toutefois, dans le cas d' espèce, il manquait non seulement le rapport d' un seul candidat, mais les rapports de plusieurs candidats, parmi
lesquels celui du fonctionnaire promu . En outre, il résulte des dossiers de l' affaire que, au cours de la période de cinq ans dont lesdits rapports auraient dû faire état, certains fonctionnaires - et surtout M . Hochbaum - avaient acquis des expériences et des titres particulièrement pertinents pour les fonctions de chef de la division "monopoles ". L' insuffisance de l' avis que le comité a donné sur les capacités et les aptitudes des aspirants était, en somme, trop grave pour ne pas faire
apparaître indispensable un nouvel examen d' ensemble de sa part .

Que l' on ne dise pas non plus que cet examen a été correctement effectué par l' autorité investie du pouvoir de nomination et que, par conséquent, le fait que le "groupe Noël" n' a pas été consulté ne constitue pas une irrégularité susceptible de justifier l' annulation de la seconde décision . A cet égard, la Cour a en effet déclaré que, "dès lors que l' autorité investie du pouvoir de nomination institue volontairement, par une mesure d' ordre interne, une procédure consultative obligatoire, non
prescrite par le statut, le respect d' une telle procédure s' impose à elle et cette procédure ne saurait être considérée comme dépourvue de toute valeur juridique" ( arrêt du 21 avril 1983 dans l' affaire 282/81, Ragusa/Commission, Rec . 1983, p.*1245, attendu*18 ).

En définitive, puisque le "groupe Noël" a été institué précisément pour assurer une application correcte de l' article 45 du statut, il est évident qu' une promotion conférée sans avoir valablement consulté cet organe viole la règle citée . La décision du 30 janvier 1985 est donc illégale .

4 . A la lumière des considérations développées jusqu' ici, nous vous proposons :

a ) de déclarer irrecevables les recours introduits par MM . Ingfried Hochbaum et Edward Rawes contre la Commission des Communautés européennes dans les affaires 44 et 77/85;

b ) en accueillant les recours introduits par les mêmes fonctionnaires dans les affaires 294 et 295/85, d' annuler la décision du 30 janvier 1985 .

La défenderesse doit être condamnée aux dépens en application de l' article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure .

(*) Traduit de l' italien .


Synthèse
Numéro d'arrêt : 44/85,
Date de la décision : 22/01/1987
Type de recours : Recours de fonctionnaires - fondé

Analyses

Fonctionnaire - Annulation de nomination.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Ingfried Hochbaum et Edward Rawes
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mancini
Rapporteur ?: O'Higgins

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1987:26

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