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07/05/1981 | CJUE | N°156/80

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Sir Gordon Slynn présentées le 7 mai 1981., Giorgio Morbelli contre Commission des Communautés européennes., 07/05/1981, 156/80


CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

SIR GORDON SLYNN,

PRÉSENTÉES LE 7 MAI 1981 ( 1 )

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Le requérant dans cette affaire est un fonctionnaire de la Commission qui a été blessé à la tête à une époque où il était assuré contre le risque d'accident, conformément au statut. Dans la présente procédure, il demande à la Cour d'annuler la communication du 30 mai 1980, par laquelle la Commission a confirmé sa propre décision antérieure, prise sur la base d'un rapport de la commission médicale,

de fixer son invalidité permanente partielle à 3 % et la consolidation de son état de santé à une dat...

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL

SIR GORDON SLYNN,

PRÉSENTÉES LE 7 MAI 1981 ( 1 )

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Le requérant dans cette affaire est un fonctionnaire de la Commission qui a été blessé à la tête à une époque où il était assuré contre le risque d'accident, conformément au statut. Dans la présente procédure, il demande à la Cour d'annuler la communication du 30 mai 1980, par laquelle la Commission a confirmé sa propre décision antérieure, prise sur la base d'un rapport de la commission médicale, de fixer son invalidité permanente partielle à 3 % et la consolidation de son état de santé à une date
postérieure d'environ deux ans à l'accident. Il demande à la Cour de déclarer qu'il y a lieu de fixer son invalidité permanente partielle à 15 %, et il réclame l'allocation d'intérêts sur la somme qui lui revient à titre d'indemnité à partir de la date de l'accident ainsi que l'adaptation de cette somme à la dépréciation de la monnaie.

Les faits sont en substance les suivants.

Giorgio Morbelli est fonctionnaire de la Commission depuis le 4 septembre 1975. A l'époque qui nous intéresse ici, il travaillait à l'Office des publications officielles de la Commission à Luxembourg.

Le samedi 21 février 1976, à 8 h 40 environ, il a eu un accident dans un bureau de poste à Luxembourg. Selon ses dires, au moment d'entrer dans le bureau de poste par l'accès situé rue du Commerce, il a été poussé violemment par le battant de la porte dont le mécanisme était défectueux et il a heurté sa tête contre la porte. Il a fait état de l'accident au guichet et il a été conduit immédiatement à la clinique du Sacré-Cœur, où on a constaté qu'il avait une déchirure au niveau du pavillon
auriculaire gauche et une contusion dans la région de la tempe droite. La déchirure au niveau du pavillon auriculaire a été dûment suturée, et après un examen radiologique du crâne qui n'a pas révélé de fracture, on l'a laissé rentrer chez lui avec la recommandation d'arrêter le travail pour dix jours.

De retour à son domicile, il s'est plaint de violentes céphalalgies accompagnées d'un sentiment de torpeur, d'une sensation de désorientation et de symptômes pathologiques plus généraux. Il a reçu d'autres soins médicaux. Par la suite il a été examiné par de nombreux médecins. Il ne semble pas nécessaire de se référer à tous ces examens. Les principaux peuvent être résumés de la manière suivante.

Fin février ou début mars 1976, il a été examiné à la clinique Sainte-Thérèse, à Luxembourg, où il est resté une semaine. Après avoir fait faire un électroencéphalogramme, ses médecins ont décelé une disrythmie asymétrique imputable à la légère commotion dont il avait été victime. A sa sortie de la clinique, il a passé environ neuf jours en convalescence. Il est retourné à Luxembourg et a repris son travail le 10 mars 1976, mais il a estimé nécessaire d'arrêter le travail de temps en temps pour
raison de santé.

Trois mois plus tard environ, il a subi d'autres examens médicaux à Milan, sous la supervision du docteur Franco Luckenbach. Ce dernier a soumis un rapport complet le 1er octobre 1976. Il n'a constaté aucun signe de lésions localisées ni de comitialité, mais il a déclaré 3ue M. Morbelli avait une tendance à la épression. Il a conclu que l'état de santé du requérant s'était consolidé dans l'intervalle et il a évalué son invalidité permanente à 10 %.

En avril 1977, M. Morbelli a subi un troisième examen important, cette fois-ci à Luxembourg, par une commission de trois médecins, les docteurs Glaesener, Stumper et Meir. Le docteur Glaesener a soumis un rapport de cet examen, daté du 28 avril. Ce rapport conclut que le requérant était atteint d'un syndrome post-traumatique subjectif, avec souffrance des structures vestibulaires centrales au niveau du tronc cérébral. Ce rapport a également évalué l'invalidité permanente du requérant à 10 %. La
Commission affirme que ce rapport a été établi en conformité avec les critères d'évaluation utilisés en vertu de la législation luxembourgeoise, le requérant ayant à cette époque engagé une action civile contre le bureau de poste.

Le 12 mai 1978, à la demande de la Commission, le requérant a été examiné au bâtiment Jean Monnet à Luxembourg par le médecin-conseil des assureurs de la Commission. Le 4 juillet, ceux-ci ont informé la Commission que leur médecin-conseil avait évalué l'invalidité permanente partielle de M. Morbelli à 3 %. Le 16 juillet, la Commission a informé celui-ci qu'il en résulterait une indemnité de 95064 FB. Le requérant a refusé l'évaluation et, en conséquence, son dossier a été transmis au docteur
Semiller, chef du service médical de la Commission. Ce dernier a soumis son dossier à trois spécialistes (un ophtalmologiste, un neurochirurgien et un oto-rhino-laryngologiste) qui l'ont examiné. Après avoir reçu leurs rapports, le docteur Semiller a conclu le 10 novembre 1978 que l'évaluation de 3 % était correcte; mais il a fixé la consolidation de l'état de santé du requérant au mois de septembre 1978. Le 16 novembre 1978, la Commission a fait de nouveau une proposition à M. Morbelli pour un
montant de 95064 FB.

Le requérant n'a pas accepté cette proposition, mais il a exercé son droit de saisir la commission médicale de l'affaire. Avant la réunion de cette commission, M. Morbelli a subi un autre examen important, cette fois-ci à la clinique Mondino, à Pavie. A sa sortie, le 15 juin 1979, cette clinique a établi un rapport très détaillé qui n'explique pas l'étendue de son invalidité en termes mathématiques, mais conclut par un diagnostic concis: migraine post-traumatique («cefalea cronica post-traumatica»).

Douze jours plus tard, M. Morbelli est passé devant la commission médicale. Celle-ci était composée de trois membres: le docteur Elens, traumatologiste désigné par la Commission, le docteur Glaesener (qui avait participé à l'examen subi par le requérant en avril 1977) désigné par M. Morbelli, et le docteur Van Bever, traumatologiste. Le 27 juin 1979, ces médecins ont signé un rapport déclarant que l'invalidité permanente partielle de M. Morbelli était évaluée à 3 % et pouvait être considérée comme
consolidée le 25 février 1978. Par lettre datée du 11 septembre 1979, la Commission a transmis les conclusions de la commission médicale au requérant et a de nouveau proposé la somme de 95064 FB, que celui-ci a refusée.

Le 11 décembre 1979, M. Morbelli a introduit une réclamation au titre de l'article 90 du statut, laquelle est à l'origine du présent recours. Il demandait, entre autres, que son invalidité permanente partielle soit fixée à 15 %, et à titre subsidiaire qu'une nouvelle commission médicale soit constituée pour déterminer son degré d'invalidité.

Au milieu du mois de février 1980, il a été examiné par le professeur Zanalda de Turin. Celui-ci a produit un rapport détaillé qui contient un compte rendu complet des examens que le docteur Luckenbach, le docteur Glaesener (en avril 1977) et les médecins de Pavie ont fait subir au requérant et qui relate la décision prise par la commission médicale. Ce rapport mettait fortement l'accent sur l'état psychologique du requérant. En particulier, il déclarait que la tension nerveuse de M. Morbelli était
anormale, que la psychothérapie qu'il avait suivie avait eu pour résultat, entre autres, d'aggraver sa tendance à l'auto-dénigration et que l'utilisation d'analgési-3ues, étant donné les dosages et le laps e temps pendant lequel M. Morbelli les avait utilisés, contribuait à la détérioration de la santé de celui-ci. Le professeur Zanalda a néanmoins remarqué qu'il n'y avait aucune preuve suggérant que M. Morbelli était déjà atteint de ces troubles avant l'accident, mis à part le fait qu'il avait
toujours souffert de maux de tête dans le passé et il a conclu que l'invalidité permanente partielle de M. Morbelli devrait être évaluée à au moins 15 %. Ce chiffre prenait en compte à la fois la lésion physique et l'état hypocondriaque de ce dernier.

Le 4 mars 1980, M. Morbelli a complété sa réclamation par une note à laquelle il a joint le rapport du professeur Zanalda. Le 30 mai 1980, la réclamation a fait l'objet d'un rejet explicite par la Commission. Le 7 juillet 1980, la requête de M. Morbelli a été enregistrée à la Cour.

La Commission fait valoir que le présent recours est irrecevable parce que, en visant l'annulation du rejet implicite, le 12 avril 1980, de sa réclamation (à titre subsidiaire le rejet explicite de sa réclamation, le 30 mai 1980), le requérant cherche à faire réexaminer la confirmation d'une décision antérieure, ce qu'il n'est pas habilité à faire. A l'appui de cette allégation, elle cite une série d'affaires.

Nous ne pensons pas que ces affaires soient de nature à étayer le point de vue de la Commission. Il est établi qu'un requérant qui omet de contester une décision dans les délais spécifiés aux articles 90 et 91 du statut ne saurait contester une communication ultérieure ayant pour seul effet de confirmer la décision précédente. Le principe est exprimé dans le sommaire de l'affaire 24/69, Theo Nebe/Commission (Recueil 1970, p. 145), «le rejet explicite d'une demande ou réclamation après que le délai
de recours contre leur rejet implicite est écoulé et ne contenant aucun élément nouveau par rapport à la situation de droit ou de fait existant au moment du rejet implicite, est un acte purement confirmatif non susceptible de faire grief».

Dans la plupart des affaires invoquées par la Commission, la Cour, en déclarant la demande irrecevable, s'est référée à l'existence d'une décision antérieure contre laquelle le requérant avait omis de faire recours en temps voulu (voir affaires jointes 50, 51, 53, 54 et 57/64, Ralph Loebisch et autres/Conseil, Recueil 1965, p. 825 et 831; affaire Theo Nebe/Commission, p. 151; affaire 58/69, Raymond Elz/Commission, Recueil 1970, p. 507 et 511; affaire 79/70, Helmut Müllers/Comité économique et social
de la CEE et de la CECA, Recueil 1971, p. 689 et 698; affaire 33/72, Monique Gunnelia/Commission, Recueil 1973, p. 475 et 481; affaire 56/71, Godelieve Goeth Van Schuerer/Commission, Recueil 1973, p. 181 et 186; affaire 1/76, Ute Wack/Commission, Recueil 1976, p. 1017 et 1023; et les affaires 33 et 75/79, Richard Kuhner/Commission, Recueil 1980, p. 1677 et 1683).

Aucune de ces considérations ne s'applique dans le cas d'espèce. La lettre qui informe M. Morbelli des conclusions de la commission médicale était datée du 11 septembre 1979. En conséquence, sa réclamation, déposée le 12 décembre, a été introduite dans le délai fixé à l'article 90, paragraphe 1, du statut. Puisque la réclamation n'a pas fait l'objet d'une réponse dans le délai des quatre mois suivants, elle doit être considérée comme ayant été rejetée implicitement, le 12 avril 1980, en vertu du
dernier alinéa de l'article 90, paragraphe 2. En vertu de l'article 91, paragraphe 3, M. Morbelli était en droit de former un recours à tout moment avant le 13 juillet 1980. Son recours devant la Cour de justice a été introduit le 2 juillet 1980.

Le recours de M. Morbelli vise explicitement la communication de la Commission du 30 mai 1980, et non pas la décision implicite de rejet de sa réclamation, le 12 avril 1980, toutefois il se situe encore dans les délais et la substance de sa réclamation est claire.

Les autres affaires invoquées par la Commission ne nous semblent pas devoir étayer les conclusions de celle-ci.

Nous pensons que le recours est recevable et qu'il y a lieu de l'examiner au fond.

Quant au fond, le requérant allègue tout d'abord que la commission médicale n'a pas été régulièrement constituée de sorte que toute décision basée sur les conclusions de la commission était invalide. Ce point a été soulevé seulement à la suite de questions posées par la Cour.

La composition de la commission médicale est régie par la réglementation adoptée en application de l'article 78 du statut. L'article 23 (1) de cette réglementation prévoit, en partie, ce qui suit:

«La commission médicale est composée de trois médecins désignés :

— le premier, par l'autorité investie du pouvoir de nomination;

— le deuxième, par le fonctionnaire ou ses ayants droit;

— le troisième, du commun accord des deux médecins ainsi désignés.»

Il n'y a pas de contestation quant au fait que l'un des membres de la commission médicale (docteur Elens) a été désigné par la Commission, et un autre (docteur Glaesener) par M. Morbelli. C'est le troisième membre (docteur Van Bever) dont la désignation est maintenant mise en cause.

Cet argument est basé sur un passage d'une lettre que le docteur Glaesener a adressée à l'avocat de M. Morbelli, en date du 26 janvier 1981, à savoir:

«Je tiens à signaler que je n'ai pas désigné le docteur Van Bever, vu que je ne connais pas ce médecin, mais que ce médecin m'a été suggéré par le docteur J. F. Elens. Je n'ai pas vu de difficulté de donner mon accord au docteur Elens, quant à la nomination du docteur Van Bever comme expert dans l'affaire susmentionnée.»

Il a été suggéré que le docteur Glaesener avait simplement acquiescé à la désignation du docteur Van Bever, et que cela ne suffisait pas pour constituer une désignation par commun accord. Nous pensons que cet argument est indéfendable, mais l'avocat de M. Morbelli a finalement concédé que le docteur Glaesener avait donné son accord à la désignation. Nous pensons que ce point n'est pas fondé.

Un deuxième argument à été avancé pour le compte de M. Morbelli afin de tenter de récuser la composition de la commission médicale: on a dit que le docteur Van Bever est désigné fréquemment en qualité d'expert par la compagnie qui assure les fonctionnaires contre le risque de lésions résultant d'accidents. Toutefois, la Cour a été imformée par la Commission que, bien que le docteur Van Bever exerce une fonction de médecin-conseil pour une compagnie d'assurance française importante, il n'a aucun lien
avec la compagnie concernée dans la présente affaire. Rien n'indique que cela soit inexact ou que le docteur Van Bever se soit comporté de manière partiale.

Un certain nombre de critiques ont été faites quant à la manière dont la commission médicale avait accompli sa tâche. On a dit que l'examen pratiqué par elle avait été superficiel, qu'aucun des médecins n'avait vraiment la connaissance requise pour comprendre certains des rapports médicaux rédigés en italien et que certains tests avaient été effectués par des auxiliaires paramédicaux. En outre, on a dit que la décision était en conflit avec d'autres évaluations faites par d'autres médecins.

Nous pensons que la Cour a déjà dit clairement que lorsqu'une commission médicale est chargée d'une évaluation, la Cour n'intervient normalement pas dans ce qui, par essence, est une décision médicale, dès lors que la commission est régulièrement constituée et procède, en conformité avec les règles posées et de manière impartiale, à la résolution du problème essentiel qui est posé. Nous pensons que si le comité n'est pas régulièrement constitué ou si les règles imperatives ne sont pas suivies, la
Cour peut intervenir. De même, s'il apparaît clairement que la décision de la commission a été prise sur une base erronée (soit parce que des éléments essentiels n'ont pas été pris en compte soit parce que des éléments non pertinents l'ont été), la Cour peut intervenir.

D'après les éléments dont dispose la Cour, aucune des critiques mentionnées ci-dessus ne peut, nous semble-t-il, amener la Cour à déclarer qu'il y a eu erreur de droit. La commission médicale est manifestement en droit d'employer des auxiliaires paramédicaux si elle l'estime opportun. La lenteur de la délibération de la commission relève de l'appréciation médicale et non pas de règles de droit. Nous ne sommes pas convaincu qu'il soit établi que la commission n'a pas compris les rapports médicaux
rédigés en italien ou que, même si ceux-ci n'ont pas été examinés dans la version traduite, cela soit de nature à vicier la décision de la commission. Le fait que cette commission soit en désaccord avec les conclusions soumises par d'autres médecins, à la fois avant et après sa propre décision, ne signifie pas que la commission se soit trompée de manière telle qu'il y aurait lieu pour la Cour d'intervenir dans la présente espèce.

Selon nous, le point principal qui semble devoir être tranché dans la présente affaire est la suggestion selon laquelle le docteur Glaesener a été persuadé de signer par les autres médecins, ceux-ci estimant que la lésion psychologique n'avait pas à être prise en compte. Si tel était le cas cela signifierait que non seulement le docteur Glaesener mais également les autres membres de la commission ont agi sur une base erronée et que l'affaire aurait dû être examinée par une autre commission. Le
barème annexé à la réglementation relative à la couverture des risques d'accident et de maladie professionnelle des fonctionnaires des Communautés européennes prévoit une indemnisation pour aliénation mentale incurable au taux de 100 % et ajoute que, pour les cas d'invalidité permanente partielle non prévus ci-dessus, le degré d'invalidité est déterminé par analogie avec le tableau qui précède. La Cour a déjà décidé dans l'affaire 152/77, Miss B./Commission (Recueil 1979, p. 2819 et 2834-35), qu'une
lésion psychique peut être considérée comme relevant de la notion d'invalidité, même si elle affecte la seule sphère affective. L'agent de la Commission a d'ailleurs reconnu que cette approche était correcte.

La commission médicale a déclaré dans son rapport qu'elle avait pris en compte l'état de santé de M. Morbelli dans sa totalité et il semble que ses conclusions incluent l'évaluation de la lésion psychologique, puisque nous n'avons connaissance d'aucune lésion purement physique de nature permanente résultant de l'accident.

Il reste, semble-t-il, la suggestion selon laquelle le résultat final serait vicié, en raison du fait que le docteur Glaesener aurait été persuadé par les deux autres médecins de changer d'avis. Dès lors que l'approche de la majorité des membres de la commission était correcte, il ne semble exister aucun motif justifiant l'annulation de la décision de la commission.

Pour ces raisons, nous sommes d'avis qu'il n'y a pas lieu de mettre en cause les conclusions de la commission médicale.

L'avocat de M. Morbelli a attiré l'attention de la Cour sur le fait que le docteur Semiller a fixé la consolidation de l'état de santé du requérant au mois de septembre 1978, alors que la commission médicale a fixé celle-ci à une date remontant au mois de février de la même année. La différence est toutefois sans importance pour l'évaluation de la somme qui est due à M. Morbelli en vertu de la réglementation relative à l'assurance des fonctionnaires. Il peut, tout au plus, être pertinent de
déterminer si le requérant peut prétendre à des arriérés d'intérêts sur le capital qui lui est dû en vertu de la réglementation ou à une compensation au titre de la dépréciation de la monnaie intervenue dans l'intervalle.

Le principe régissant l'octroi d'intérêts dans des cas comme celui de l'espèce a été énoncé par la Cour dans l'affaire 101/74, Kurrer/Conseil, Recueil 1976, p. 259 et 269:

«En l'absence d'une disposition du statut ou de la police d'assurance prévoyant expressément le paiement d'intérêts, il appartient au requérant d'établir que le retard dans le paiement de l'indemnité constitue, de la part de [la Commission] une faute qui lui a effectivement causé un préjudice.»

Le laps de temps écoulé entre l'accident et l'audience de la Cour est substantiel: mais ce fait à lui seul ne permet pas de conclure que la Commission a commis une faute. Il semble que, si on adopte le point de vue le plus favorable à M. Morbelli, moins de cinq mois se soient écoulés entre la consolidation de l'état de santé de M. Morbelli et le 6 juillet 1978, date à laquelle il a reçu pour la première fois une proposition d'indemnisation d'un montant de 95064 FB. Son examen par trois spécialistes
désignés par la Commission et la réitération de la première proposition d'indemnisation se sont suivis dans un intervalle d'un peu plus de quatre mois. Ensuite, la convocation de la commission médicale et le dépôt des conclusions de celle-ci sont intervenus dans le délai d'un an. Cette chronologie n'est pas de nature à conduire, sans plus, à la conclusion que la Commission a commis une faute.

Enfin, le requérant demande à la Cour de l'indemniser pour la perte subie par lui en raison de la dépréciation du pouvoir d'achat du franc belge. Il a avancé cet argument à la lumière de l'article 73 du statut qui prévoit qu'en cas d'invalidité permanente partielle, le fonctionnaire a droit au paiement d'une indemnité évaluée sur la base des traitements mensuels alloués pour les douze mois précédant l'accident. A moins qu'il ne soit en mesure de démontrer (ce qu'il n'a pas fait) que la Commission a
commis une faute en ne lui offrant pas, avant le 6 juillet 1978, l'indemnité à laquelle il avait droit, cet argument nous semble indéfendable. Nous ne pensons pas qu'il soit nécessaire de trancher la question de savoir si celui-ci pourrait éventuellement être de nature à fonder un recours.

Nous concluons donc en vous proposant de déclarer le recours recevable mais non fondé. Il s'ensuit, à notre avis, que M. Morbelli doit supporter ses dépens, conformément à l'article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure et que la Commission doit supporter ses propres dépens, conformément à l'article 70 de celui-ci.

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( 1 ) Traduit de l'anglais.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 156/80
Date de la décision : 07/05/1981
Type de recours : Recours de fonctionnaires - non fondé

Analyses

Statut du personnel - Couverture des risques d'accident.

Statut des fonctionnaires et régime des autres agents


Parties
Demandeurs : Giorgio Morbelli
Défendeurs : Commission des Communautés européennes.

Composition du Tribunal
Avocat général : Sir Gordon Slynn
Rapporteur ?: Pescatore

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1981:99

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