La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/10/1978 | CJUE | N°33/78

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mayras présentées le 11 octobre 1978., Somafer SA contre Saar-Ferngas AG., 11/10/1978, 33/78


CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. HENRI MAYRAS,

PRÉSENTÉES LE 11 OCTOBRE 1978

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

I — Les établissements Somafer, de Uckange en Lorraine, ont soumissionné à un appel d'offre du ministère de l'intérieur du Land de Sarre en vue d'effectuer certains travaux de démolition sur le périmètre des usines Röchling-Burbach.


...

CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. HENRI MAYRAS,

PRÉSENTÉES LE 11 OCTOBRE 1978

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

I — Les établissements Somafer, de Uckange en Lorraine, ont soumissionné à un appel d'offre du ministère de l'intérieur du Land de Sarre en vue d'effectuer certains travaux de démolition sur le périmètre des usines Röchling-Burbach.

Comme les garanties de sécurité présentées par l'entrepreneur français lui paraissaient insuffisantes, la société allemande Saar-Ferngas, dont les canalisations passaient à proximité immédiate de l'ouvrage à démolir, a estimé devoir prendre elle-même des mesures supplémentaires de protection qu'elle notifia aux établissements Somafer le 16 janvier 1974.

Après avoir régulièrement avisé le Gewerbeaufsichtsamt du Land de Sarre, dont les fonctions correspondent à cet égard à celles des Ponts et Chaussées et du service des Mines en France, les établissements Somafer ont obtenu, le 29 janvier 1974, un permis de travaux du maire de Völklingen.

En vue d'être dédommagée des frais qu'elle a exposés, la société allemande a adressé sa facture aux établissements Somafer le 29 octobre 1974. Une fin de non-recevoir lui fut opposée par le représentant (Vertretung) pour la République fédérale, à Beckingen en Sarre, de la maison mère (Hauptverwaltung) de Uckange. Saar-Ferngas a alors cité les établissements Somafer devant le tribunal du lieu de cette «représentation» en République fédérale, le Landgericht de Sarrebruck. Notons en passant qu'en
France les litiges en matière de contrats administratifs et de dommages de travaux publics sont de la compétence des tribunaux administratifs.

Le rôle joué par l'échelon de Beckingen dans les discussions menées entre le ministère de l'intérieur et l'inspection du travail, d'une part, et les établissements Somafer de l'autre, fait l'objet d'assertions contradictoires des parties et c'est en vue de résoudre ce problème que la cour d'appel (Oberlandesgericht) de Sarrebruck vous saisit.

Avant d'aborder l'examen des questions qui vous sont soumises, il convient de rappeler que Saar-Ferngas avait invoqué en première instance la compétence du Landgericht de Sarrebruck en se fondant sur le fait que les établissements Somafer possédaient à Beckingen une succursale au sens du droit allemand (paragraphe 21 du Code de procédure civile allemand) et, en outre, sur le fait que ce tribunal était celui du «lieu où l'obligation a été ou doit être exécutée» au sens de l'article 5, 1), de la
convention du Bruxelles de 1968.

Le tribunal de première instance n'a retenu ni l'un ni l'autre de ces arguments, mais il s'est considéré comme compétent en vertu de l'article 5, 5), de cette convention car, à ses yeux, cette disposition va plus loin que le droit interne allemand: elle admet qu'une relation avec l'exploitation d'une simple succursale ou agence peut fonder la compétence du tribunal du lieu où sont situées cette succursale ou cette agence. Ce tribunal a estimé que Somafer possédait à Beckingen au moins une agence
au sens de l'article 5, 5), de la convention; en effet, elle s'est servie de son bureau dans cette localité pour traiter avec les tiers ou, en tout cas, elle a donné à Saar-Ferngas l'impression que ce bureau constituait une telle agence. Ce faisant, le tribunal s'est référé à des critères de droit allemand, mais il estime que ceux-ci peuvent également valoir pour l'application de l'article 5, 5), de la convention.

L'entreprise sarroise a repris à son compte cet argument en appel. Elle a donc renoncé également au moyen qu'elle invoquait subsidiairement en première instance, tiré du paragraphe 23 du Code de procédure civile allemand. Cette disposition, qui constitue une règle de compétence exorbitante du droit national, prévoit que, en l'absence de tout autre tribunal compétent sur le territoire allemand, les actions patrimoniales intentées contre une personne n'ayant pas de domicile sur le territoire
national sont de la compétence du tribunal dans le ressort duquel se trouvent des biens ou l'objet litigieux; mais elle ne peut plus être invoquée en vertu même de l'article 3 de la convention de 1968.

II — Par la première question, il vous est demandé en substance si les notions d'«agence», de «succursale» ou d'«autre établissement» doivent être interprétées par renvoi au droit national ou, au contraire, faire l'objet d'une interprétation autonome.

1) En faveur d'un renvoi au droit national aux fins de déterminer le lieu de la situation de la juridiction compétente, on peut dire qu'en général il y a tout avantage à appliquer la loi de l'État dont les tribunaux sont saisis ou le droit applicable au principal: il est en effet important que les questions de compétence puissent être résolues rapidement. Un tribunal aura toujours plus de facilité à appliquer sa propre loi; en outre, presque tous les critères de compétence visés à la convention sont
liés à des notions qu'on retrouve employées dans le droit interne des États membres à des fins autres que la détermination de la compétence.

Or, pour les notions de domicile des personnes physiques ou de siège des sociétés ou des personnes morales, dont après tout les notions de l'article 5, 5), ne constituent qu'un démembrement ou une sous-catégorie, la convention se réfère expressément à l'application de la loi interne du juge saisi (article 52, alinéa 1) ou aux règles du droit international privé de ce juge (article 53).

Une interprétation autonome des notions visées à l'article 5, 5), n'aurait, à proprement parler, rien à voir avec la «simplification des formalités auxquelles sont subordonnées la reconnaissance et l'exécution réciproques des décisions judiciaires» qui représente l'objet assigné par l'article 220 à la convention; au contraire, il eût été plus expéditif pour Saar-Ferngas de citer directement Somafer devant le tribunal du lieu où est situé le siège social de cette entreprise pour obtenir, à
l'encontre de celle-ci, une condamnation qui eût été directement exécutoire en France.

Par ailleurs, on peut douter que les auteurs de la convention aient entendu donner une définition commune et autonome de la succursale, de l'agence ou de l'établissement. Pareille définition risquerait d'être dépassée par l'évolution des lois et des jurisprudences nationales. Le fait même qu'ils aient employé l'expression «tout autre» qui est une espèce de position «résiduelle», devant couvrir toutes les autres hypothèses, confirmerait qu'ils ont renoncé à donner un contenu précis, au moins à la
notion d'établissement. Un tel objectif, relevant du domaine de la législation uniforme, serait étranger à la convention.

Enfin, vous avez jugé, par arrêt du 6 octobre 1976, Tessili (Recueil p. 1474), à propos de l'interprétation de la convention en général, que, dans certaines conditions, les expressions et notions employées par la convention (il s'agissait en l'espèce, précisément, d'une notion utilisée à l'article 5, celle de «lieu où l'obligation a été ou doit être exécutée») doivent être considérées comme renvoyant aux règles matérielles du droit applicable en vertu des règles de conflit du juge premier saisi.

2) En faveur du caractère autonome des qualifications de l'article 5, 5), on peut, en revanche, invoquer les considérations ci-après:

Même si la loi interne du juge saisi ou si le droit international privé applicable au principal font dépendre la compétence de critères plus ou moins identiques à ceux qui sont visés à l'article 5, 5), de la convention, il est peu probable que la signification couramment attribuée à ces critères par ce juge national convienne aux affaires relevant de la convention.

Dans votre arrêt De Bloos du 6 octobre 1976 (Recueil p. 1497), vous avez vous-mêmes commencé à interpréter les notions visées à l'article 5, 5), de façon uniforme et autonome en cherchant à cerner le contenu de la notion de «succursale». Ce précédent ne nous paraît toutefois, pas entièrement déterminant à lui seul, car le début de définition donné dans cet arrêt est purement négatif et il a été élaboré à propos des rapports internes entre un concessionnaire d'une exclusivité de vente et son
concédant.

Un peu plus tard, le 14 octobre 1976, vous avez jugé, dans l'affaire Lufttransportunternehmen (Recueil p. 1541), que la notion de «matière civile et commerciale», utilisée à l'article 1 de la convention, ne saurait être interprétée en fonction de la seule répartition de compétences entre les différents ordres Juridictionnels existant dans certains États et qu'il y avait donc lieu de considérer la notion visée comme une notion autonome qu'il faut interpréter en se référant, d'une part, aux
objectifs et au système de la convention et, d'autre part, aux principes généraux qui se dégagent de l'ensemble des systèmes de droit nationaux.

Le 14 juillet 1977, dans les affaires jointes Bavaria Fluggesellschaft Schwabe et Germanair Bedarfsluftfahrt (Recueil p. 1518), vous avez dit que votre méthode d'interprétation s'inspirait du souci d'assurer, dans le cadre du droit comunautaire, l'égalité et l'uniformité des droits et obligations qui découlent de la convention pour les États contractants et les personnes intéressées et que le principe de la sécurité juridique dans l'ordre communautaire et les objectifs poursuivis par la
convention en vertu de l'article 220 du traité, sur lequel elle se fonde, exigent une application uniforme, dans tous les États membres, des notions et qualifications juridiques dégagées par la Cour dans le cadre de la convention.

Dans l'affaire Industrial Diamond Supplies, vous avez jugé, le 22 novembre 1977 (Recueil p. 2176), qu'une interprétation de la notion de «recours ordinaire» par renvoi à un système juridique national — qu'il s'agisse de celui de l'État d'origine ou de celui de l'État de la reconnaissance ou de l'exécution — entraînerait, dans certains cas, l'impossibilité de qualifier un recours déterminé, avec le degré voulu de certitude, au regard des articles 30 et 38 de la convention et que l'interprétation
de la notion de «recours ordinaire» ne peut être recherchée utilement que dans le cadre de la convention même.

Enfin, vous avez suivi la même démarche dans votre arrêt Bertrand du 21 juin 1978, relatif à la «vente à tempérament d'objets mobiliers corporels».

Sur la base de ces précédents, nous estimons donc que la compétence pour les contestations «relatives à l'exploitation d'une succursale, d'une agence ou de tout autre établissement» devrait être déterminée de façon autonome, c'est-à dire en fonction des objectifs et du système de la convention de 1968, ainsi que des principes généraux qui se dégagent des ordres juridiques nationaux.

Cette interprétation «autonome» devrait s'inspirer des droits et jurisprudences des États membres parties à la convention quant aux conséquences, du point de vue du for, des notions de succursale, d'agence ou d'établissement, ainsi que des jurisprudences nationales relatives au for des établissements secondaires des personnes morales, prévu dans certaines conventions bilatérales passées entre les États membres avant la convention de Bruxelles.

Ces conventions bilatérales admettent ce critère de rattachement soit à titre de compétence directe, soit à titre de compétence indirecte, par le biais d'une élection de domicile. La convention de Bruxelles aurait pour ainsi dire «codifié» et multinationalisé les dispositions bilatérales, sans pour autant unifier les différentes jurisprudences relatives à leur application.

L'ancêtre direct de l'article 5, 5), de la convention de Bruxelles paraît ainsi être l'article 4, paragraphe 1, d), de la convention germano-néerlandaise du 30 août 1962 qui porte:

«Les tribunaux de l'État où la décision a été rendue sont reconnus compétents aux fins de la présente convention:

… si, dans l'État où la décision a été rendue, le défendeur a été cité au lieu de son établissement commercial ou d'une succursale pour des contestations relatives à l'exploitation dudit établissement ou de ladite succursale.»

Mais, il faut bien noter que la convention de Bruxelles établit, à son article 5, 5), un critère de rattachement à titre de compétence directe, à partir de ce qui n'était qu'un critère de compétence indirecte aux fins de reconnaissance et d'exécution et d'une présomption d'élection de domicile.

Toujours dans la ligne de ce raisonnement, nous vous proposerons de donner une réponse également négative à la question I, b), car le recours à une qualification selon le droit applicable au principal à la contestation portée devant le tribunal national conduirait en définitive à se référer à des lois nationales probablement différentes.

III — Au cas où la compétence relative à l'exploitation d'une succursale, d'une agence ou de tout autre établissement devrait être déterminée de façon autonome, le juge national voudrait savoir, par sa deuxième question, quels critères d'interprétation il convient d'appliquer pour les notions de «succursale» et d'«agence», eu égard à l'autonomie de décision (notamment à la passation d'affaires) et à l'importance des installations matérielles. Il faut noter que la demande ne porte pas sur
l'établissement, mais il nous paraît nécessaire d'inclure cette notion dans notre examen.

Deux observations nous guideront dans cette démarche. Tout d'abord, quel que soit le point de rattachement choisi, les notions visées à la section 2 de la convention («compétences spéciales»), et notamment à son article 5, 5), doivent faire l'objet d'une interprétation restrictive puisqu'il ne faut pas perdre de vue qu'il existe un autre critère général de compétence, celui du domicile du défendeur (article 2). Cette règle résulte de votre arrêt Bier du 30 novembre 1976 (Recueil p. 1735).

En second lieu, d'une façon générale, il est difficile de déterminer les caractéristiques d'un établissement ou d'une agence auxquels s'applique la règle de compétence de l'article 5, 5). Si la notion de succursale a des contours relativement précis, les concepts d'agence ou d'établissement sont le plus souvent fortement teintés de questions de fait qui, dans les jurisprudences nationales, sont généralement abandonnées à l'appréciation souveraine du juge du fond. Même si l'on décide que les
notions de l'article 5, 5), ont un contenu autonome, il est inévitable, par conséquent, que, pour en préciser le contenu, il taille éclaircir des points de fait et que cette tâche revienne au juge national.

1) La question porte autant, sinon plus, sur la notion d'exploitation que sur celle de succursale, d'agence ou d'établissement. Il faut donc qu'il s'agisse bien d'une contestation relative à l'exploitation d'une de ces entités et non d'une contestation relative à ce qui relèverait simplement de l'activité de la maison mère ou se confondrait avec celle-ci. En d'autres termes, il importe que la société commerciale étrangère exploite son objet en République fédérale et il faut que l'entité en question
puisse y développer une activité propre, distincte de celle de la société mère, sans pour autant jouir de la personnalité morale.

La convention témoigne d'une absence remarquable de formalisme: elle parle non seulement de succursale ou d'agence, qui sont toujours dépourvues de la personnalité morale, bien qu'elles aient un statut juridique relativement précis, tout du moins la succursale, mais encore de «tout autre» établissement. Le point commun des notions auxquelles se réfère l'article 5, 5), est donc qu'il s'agit d'entités ne possédant pas la personnalité morale; il faut noter, en particulier, que n'est pas visée la
filiale d'une entreprise pour la bonne raison qu'une telle filiale est dotée de la personnalité morale et peut donc être attraite en justice au lieu où elle est établie.

Par conséquent, il faut que la société dispose à l'étranger d'installations matérielles, industrielles ou commerciales d'une consistance suffisante pour qu'il y ait exploitation. Certains critères, consacrés par la convention sur la reconnaissance mutuelle des sociétés et personnes morales du 29 février 1968, pourraient être retenus par analogie, avec les adaptations nécessaires, bien que cette convention ait un objet différent et qu'elle ne soit pas encore entrée en vigueur: pour pouvoir
bénéficier de la reconnaissance, il faut (article 3) que la société ou personne ait un lien sérieux avec l'économie de l'un des territoires auxquels s'applique cette convention; la société ou la personne morale en question doit démontrer qu'elle a exercé effectivement son activité pendant un temps raisonnable dans l'État contractant, en conformité de la loi duquel elle s'est constituée (article 4).

2) Si l'entité visée à l'article 5, 5), doit jouir d'une certaine autonomie de décision et si, notamment, elle doit être habilitée à conclure des opérations pour le compte de la société mère, engageant celle-ci, il faut, toutefois, qu'elle soit soumise à son contrôle et à sa direction.

Vous avez posé ce principe dans votre arrêt De Bloos déjà cité:

«Un des éléments essentiels qui caractérisent les notions de succursale et d'agence est la soumission à la direction et au contrôle de la maison mère» (attendu no 20).

Vous avez étendu ce critère à l'établissement:

«En ce qui concerne la notion d'“établissement” figurant dans ledit article, il ressort tant du but que de la lettre de cette disposition qu'une telle notion repose, dans l'esprit de la convention, sur les mêmes éléments essentiels que ceux de succursale ou d'agence» (attendu no 21).

Cependant, on ne saurait en déduire automatiquement a contrario que, dans ses rapports avec les tiers, toute «représentation» qui est liée par les instructions émanant de la maison mère ne peut être qualifiée que de succursale ou d'agence.

Ici se pose une délicate question de charge de la preuve: à qui incomberait-il de démontrer l'existence de ce contrôle et de cette direction de la société mère? Faut-il exiger que ce contrôle et cette direction découlent des statuts internes de la société mère et de l'entité subordonnée, que donc cette dernière soit légalement capable de l'engager, ou suffit-il qu'aux yeux des tiers la compétence de la succursale, de l'agence ou de l'établissement résulte du comportement de ces derniers, même si,
en droit, ils ont dépassé leur mandat? La réponse à cette question se recoupe ainsi avec l'examen de la troisième question posée par le juge national.

IV — Nous pensons que, compte tenu du caractère spécial de la compétence de l'article 5, 5), il convient de rechercher la réalité des choses au-delà des apparences et qu'il appartiendrait aux tiers qui entendent se prévaloir de cette exception de rapporter la preuve que l'entité qu'ils veulent attraire en justice était bien soumise au contrôle et à la direction de la société mère, qu'en particulier l'opération à propos de laquelle la contestation est née était bien du ressort de la succursale ou de
l'agence et présentait un lien suffisant avec leur exploitation.

En l'espèce, il appartiendrait à la société sarroise de démontrer que le gérant sarrois du bureau de la société lorraine n'était pas un simple exécutant ou agent technique, mais avait pouvoir et qualité pour conclure l'opération et que la discussion en a bien été menée par ce représentant et non par le siège social.

A cet égard, il n'est pas inutile de rappeler une disposition du traité franco-allemand sur la Sarre du 26 octobre 1956, bien que cette disposition ne crée qu'une compétence indirecte et qu'elle ne soit plus en vigueur. Il s'agit de l'article 46 de ce traité qui disposait:

«Lorsqu'un Français possède en Sarre ou lorsqu'un Sarrois possède en France un établissement ou une succursale de nature industrielle, commerciale ou autre, ils peuvent être assignés à raison des contrats directement conclus par cet établissement ou cette succursale devant les juridictions du pays où se trouvent ces derniers.»

Dans ces conditions, nous estimons qu'il faut écarter la thèse de l'apparence à laquelle se réfère le juge dans sa dernière question. Nous ne savons pas exactement dans quelle mesure une telle théorie est admise en droit allemand pour les simples établissements, et même si l'on admet que le problème des «effets pratiques» des apparences ne constitue pas une particularité propre à ce droit, il nous paraît douteux qu'elle fasse partie de l'ordre juridique de tous les États membres parties à la
convention. Surtout, faire appel à un tel critère laisserait en fait la porte ouverte à toutes les interprétations et renationaliserait pour ainsi dire une qualification qui se veut par hypothèse autonome. Nous croyons pouvoir trouver également une indication dans le fait que, selon votre jurisprudence, le comportement révélateur d'une partie à un contrat ne saurait remplacer la prorogation expresse de compétence visée à l'article 17 de la convention (Estasi, 14 décembre 1976, Recueil p. 1832
et Segoura, même date, Recueil p. 1852).

Nous concluons à ce que vous disiez pour droit que, en matière civile et commerciale, aux fins de l'article 5, 5), de la convention de Bruxelles de 1968, il suffit que l'entité qui est visée à cette disposition ait conclu directement le contrat qui sert de base à la demande.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 33/78
Date de la décision : 11/10/1978
Type de recours : Recours préjudiciel

Analyses

Demande de décision préjudicielle: Oberlandesgericht Saarbrücken - Allemagne.

Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968

Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 - Compétence


Parties
Demandeurs : Somafer SA
Défendeurs : Saar-Ferngas AG.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mayras
Rapporteur ?: Mertens de Wilmars

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1978:176

Source

Voir la source

Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award