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08/06/1977 | CJUE | N°89-76

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Mayras présentées le 8 juin 1977., Commission des Communautés européennes contre Royaume des Pays-Bas., 08/06/1977, 89-76


CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. HENRI MAYRAS,

PRÉSENTÉES LE 8 JUIN 1977

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Le présent recours en manquement de la Commission contre le royaume des Pays-Bas tire son origine des «doutes sérieux» exprimés par les milieux professionnels néerlandais quant au caractère obligatoire, au sens du droit communautaire, des redevances perçues à l'occasion du contrôle phytosanitaire des végétaux et de certains produits d'origine végétale, destinés notamment à la plantation ou à la multiplication, expo

rtés des Pays-Bas vers d'autres États membres et, accessoirement, vers les pays tiers.

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CONCLUSIONS DE L'AVOCAT GÉNÉRAL M. HENRI MAYRAS,

PRÉSENTÉES LE 8 JUIN 1977

Monsieur le Président,

Messieurs les Juges,

Le présent recours en manquement de la Commission contre le royaume des Pays-Bas tire son origine des «doutes sérieux» exprimés par les milieux professionnels néerlandais quant au caractère obligatoire, au sens du droit communautaire, des redevances perçues à l'occasion du contrôle phytosanitaire des végétaux et de certains produits d'origine végétale, destinés notamment à la plantation ou à la multiplication, exportés des Pays-Bas vers d'autres États membres et, accessoirement, vers les pays tiers.

Dans un grand nombre de cas, le remboursement des montants ainsi perçus pendant ces dernières années a été réclamé; parfois même on a refusé d'effectuer tout autre versement.

Étant donné l'importance des sommes ainsi en cause et pour mettre fin à l'incertitude juridique actuelle, le gouvernement néerlandais a instamment prié la Commission de poursuivre sans délai la procédure qu'elle avait entamée le 15 février 1971 à son encontre au titre de l'article 169. S'il devait s'avérer que la perception de ces redevances est effectivement incompatible avec les articles 12 et 16 du traité, c'est à partir du 1er janvier 1962 ou, au plus tard, à compter de l'entrée en vigueur des
règlements portant organisation commune des marchés de ceux de ces produits qui sont couverts par ces règlements que ces redevances ont été indûment payées.

Les redevances litigieuses sont perçues à l'occasion de contrôles effectués en exécution de la Convention internationale pour la protection des végétaux, conclue sous l'égide des Nations unies, à Rome, le 6 décembre 1951.

Le préambule de ce texte se réfère à l'utilité d'une coopération internationale dans la lutte contre les maladies et ennemis des végétaux et des produits végétaux, et particulièrement contre l'introduction et la propagation de ces maladies et ennemis au-delà des frontières nationales».

En vertu de son article I, paragraphe 2, «chaque État contractant s'engage a veiller, sur son territoire à l'application des mesures prescrites par la présente convention».

L'article IV prévoit que chaque État contractant s'engage à prendre les dispositions nécessaires pour créer une organisation officielle de la protection des végétaux, principalement chargée:

1) de l'inspection des végétaux sur pied;

2) de l'inspection des envois de végétaux et produits végétaux faisant l'objet d'échanges internationaux.

A cet effet, chaque État contractant (article V) prend les dispositions nécessaires pour délivrer des certificats concernant l'état phytosanitaire et la provenance des envois de végétaux et produits végétaux, conformes à la réglementation sur la protection des végétaux en vigueur dans les autres États contractants. «Les fonctions de l'inspection des envois et de la délivrance des certificats ne pourront être remplies que par des agents techniquement compétents et dûment autorisés, ou sous leur
autorité, agissant dans des conditions et disposant de renseignements de nature à permettre aux autorités des pays importateurs d'accepter lesdits certificats comme des documents dignes de foi».

Les certificats concernant les végétaux destinés à la plantation ou à la multiplication, ainsi que d'autres végétaux et les produits végétaux, devront être libelles conformément au modèle reproduit en annexe à la convention. Ils portent notamment que «l'envoi est estimé conforme aux réglementations phytosanitaires actuellement en vigueur dans le pays importateur, ainsi qu'il est spécifié dans la déclaration supplémentaire ci-après ou par ailleurs». Ces certificats accompagnent les envois importés
sur le territoire de chaque État contractant

Selon l'article VI, «chaque État contractant a toute autorité pour réglementer l'importation des végétaux et des produits végétaux afin de lutter contre l'introduction des maladies et ennemis des végétaux sur son territoire».

Les Pays-Bas ont honoré leurs engagements en adoptant un arrêté du 24 septembre 1951 portant réglementation du service phytosanitaire.

L'article 3 de ce règlement dispose que les activités de ce service consistent à:

«…

b) inspecter, sur demande ou d'office, les terrains, plantes, … sous le rapport de la présence d'organismes nuisibles et à délivrer des certificats attestant que ces inspections n'ont pas révélé d'organismes nuisibles;

c) inspecter, sur demande ou d'office, les expéditions de plantes destinées à l'exportation sous le rapport de la présence d'organismes nuisibles et, après examen, a délivrer des certificats attestant que, à la connaissance du fonctionnaire chargé de l'inspection, l'expédition en cause satisfait aux exigences fixées par le pays de destination».

Aux termes de l'article 7, les inspections visées à l'article 3, b) et c), dans la mesure où elles ont lieu à la demande des intéressés, donnent lieu à perception d'une redevance, selon un tarif établi par le ministre de l'agriculture.

Le modèle de certificat phytosanitaire en usage aux Pays-Bas reproduit en substance le modèle annexe à la convention.

En application de l'article 7 susvisé, le tarif du service phytosanitaire a été fixé par arrêté ministériel du 23 juin 1967, modifié en dernier lieu le 27 juin 1975. Le préambule de ce texte se réfère également à l'article 9 de l'arrêté de 1947 sur le contrôle dés exportations des produits de l'arboriculture (pépinières), à l'article 7de l'arrêté de 1951 sur le contrôle des exportations des bulbes et oignons à fleurs et à l'article 7 de l'arrêté de 1974 sur le contrôle des exportations de pommes de
terre. Ces arrêtés interdisent l'exportation des produits en cause qui, selon les résultats d'un contrôle effectué par le service phytopathologique, ne satisfont pas aux normes requises.

A la faveur d'une jurisprudence abondante, la Cour a été amenée à développer et à affiner les principes qui régissent, au regard du traite et de la réglementation communautaire, les taxes vétérinaires, sanitaires et phytosanitaires, tant à l'importation qu'à l'exportation, que ce soit en provenance ou à destination des États membres ou des pays tiers.

En particulier, elle a été amenée à infléchir cette jurisprudence à l'occasion de l'arrêt préjudiciel Bauhuis, du 25 janvier 1977, qui a été rendu alors que la présente affaire était déjà pendante et que le mémoire en duplique du gouvernement néerlandais n'avait pas encore été déposé.

Celui-ci avait d'ailleurs déjà manifesté son intérêt pour la question en présentant des observations dans l'affaire préjudicielle Cadsky qui a donné lieu à l'arrêt du 26 février 1975 (Recueil p. 281), observations qu'il reprend et qu'il amplifie dans la présente affaire.

I — Jusqu'ici, la Cour a toujours posé comme condition pour reconnaître à une redevance du type de celle qui est ici en cause le caractère de taxe d'effet équivalant à un droit de douane qu'elle soit obligatoire.

Or, le gouvernement néerlandais soutient que la redevance en question n'est due qu'à raison d'un contrôle qui est volontaire, auquel ne serait pas légalement lié le franchissement de la frontière néerlandaise.

Mais, comme le reconnaît ce gouvernement, si l'exportateur veut avoir une chance raisonnable de voir son expédition parvenir à destination, il doit pratiquement solliciter et obtenir la délivrance d'un certificat phytosanitaire national, puisque c'est notamment à cette condition que le produit expédié pourra franchir les frontières de l'Etat importateur.

S'il est vrai que le contrôle n'est effectué qu'à la demande de l'exportateur et que la redevance est exigible même au titre d'un lot contrôlé sur demande, mais qui n'aurait pas été exporté par suite de circonstances imprévisibles, et, enfin, qu'il n'est pas expressément prévu — à la différence de l'affaire Cadsky — que la marchandise doit être, à la sortie de l'État exportateur, accompagnée du certificat de contrôle, l'interdiction d'importer qui, à coup sûr, sera opposée à l'indroduction de la
marchandise dans l'État destinataire équivaut à une véritable nécessité de faire accompagner l'envoi d'un tel certificat L'importation sera, en fait, refusée si elle n'est pas accompagnée d'un certificat attestant que les produits en cause ont été «jugés pratiquement indemnes d'ennemis et maladies dangereux des cultures».

Le gouvernement néerlandais le reconnaît lui-même implicitement dans sa lettre du 28 juin 1976 dans laquelle il écrit ce qui suit: «peu importe d'ailleurs à ce sujet que la législation nationale oblige à effectuer un contrôle phytosanitaire à l'exportation ou que ce contrôle n'ait lieu qu'à la demande de l'exportateur». «Ce qui importe, en effet, c'est surtout l'octroi des garanties exigées par l'État de destination» (mémoire en défense, point 10). L'État importateur n'est prêt à renoncer au
contrôle à l'importation et à «entraver le moins possible le commerce international» qu'à la condition que ce contrôle ait lieu dans l'État d'origine. Par ce biais, le contrôle est rendu, en fait sinon en droit, obligatoire. Le gouvernement néerlandais l'admet en ajoutant: «on peut toutefois concéder que réaliser une telle exportation n'aurait guère de sens». «Le fait que le système de contrôle est indispensable dans de nombreux cas constitue en tout premier lieu une vérité pour ceux qui y sont
le plus intéressés, à savoir les exportateurs».

D'un autre côté, la redevance perçue à l'occasion des contrôles phytosanitaires n'a pas été institué en exécution d'un acte communautaire et ce contrôle n'est pas exercé de façon uniforme, puisqu'il est effectué chaque fois en conformité des exigences particulières de l'État d'importation. Il ne répond donc pas à ces deux conditions qui ont été, entre autres, posées par l'arrêt Bauhuis pour qu'une taxe puisse être exemptée de l'interdiction des articles 12 et 16 du traité. Même si le contrôle a
été organisé aux Pays-Bas pour permettre à cet État de remplir les obligations qu'il avait contractées à un niveau international plus élevé, les engagements pris à ce niveau ne sont pas équivalents a des obligations communautaires, en tout cas pas dans les rapports mutuels entre les Pays-Bas et les autres États membres.

Il n'est pas sûr non plus que les contrôles systématiques à l'importation, dont la suppression était l'objectif visé par la Convention, aient disparu dans les autres États membres, même si le maintien d'un tel contrôle est contestable au regard du droit communautaire.

Les dispositions communautaires arrêtées dans le domaine de la protection phytosanitaire au moment où la Commission a saisi la Cour (trois directives du Conseil du 8 décembre 1969 concernant la lutte contre la galle verruqueuse, la lutte contre le nématode doré et la lutte contre le pou de San José, JO 1969, no L 323, p. 1, 3 et 5) obligent les États membres à prendre certaines mesures minimales pour combattre et prévenir la propagation de ces organismes nuisibles sur leur territoire, mais ne
comportent pas de prescriptions prévoyant la perception de taxes.

La directive du Conseil du 21 décembre 1976 (JO du 31 janvier 1977, p. 20), concernant les mesures de protection contre l'introduction dans les États membres d'organismes nuisibles aux végétaux et aux produits végétaux, qui a été adoptée en cours d'instance, dispose (article 7, paragraphe 2) que «les Etats membres prescrivent que les végétaux, produits végétaux ou autres objets, énumérés à l'annexe V, ne peuvent être introduits dans un autre État membre que s'ils sont accompagnés d'un certificat
phytosanitaire délivré conformément au paragraphe 1 …».

Ce texte, qui exige donc un contrôle phytosanitaire dans l'État exportateur, pour autant qu'il s'agisse de produits destinés à être commercialisés dans d'autres États membres, ne prescrit ni n'autorise la perception de taxes à raison de ce contrôle.

Dans ses observations sous l'affaire Bauhuis, la Commission a d'ailleurs précisé que, lors de l'examen au Conseil de sa proposition de directive, certains États membres avaient tenté de faire insérer dans le texte proposé une disposition permettant ou imposant aux États membres de percevoir des droits pour les contrôles à l'exportation en ce qui concerne les échanges intracommunautaires, mais elle s'y est opposée et c'est peut-être la raison pour laquelle sa proposition a été si longtemps
bloquée.

De même, en matière d'échanges intracommunautaires de viandes fraîches de volailles, la directive du Conseil no 71/118 (JO no L 55 du 8 mars 1971, p. 23) ne prévoit aucune obligation de financement à la charge des opérateurs à raison des contrôles sanitaires imposés par cette directive.

Tout au plus, à l'importation de certains produits (animaux des espèces bovine et porcine et viandes de ces espèces) en provenance des pays tiers, l'article 12, paragraphe 8, de la directive du Conseil no 72/462 (JO no L 302 du 31 décembre 1972, p. 28) prévoit que «tous les frais occasionnés par l'application du présent article … sont à charge de l'expéditeur, du destinataire ou de leur mandataire sans indemnisation de l'État».

Par conséquent, si des contrôles dans l'État exportateur sont à présent imposés par le droit communautaire, il ne s'ensuit pas que la perception de taxes à l'occasion de tels contrôles soit nécessairement autorisée. L'établissement d'une différenciation en matière de réglementation des coûts est justifié selon qu'il s'agit d'échanges intracommunautaires ou d'échanges avec les pays tiers, de même que les produits commercialisés à l'intérieur de l'État ne sont pas assujettis, au cas où ils font
l'objet d'un contrôle, à redevances.

Il en résulte qu'au moment de la saisine de la Cour la taxe en question avait un caractère obligatoire et que cette obligation ne découlait d'aucun texte communautaire; elle constituait donc une «charge pécuniaire unilatéralement imposée» au sens de votre arrêt Commission/République italienne du 1er juillet 1969 (Recueil, p. 193).

II — Il est constant que la taxe en question ne relève pas d'un système général d'imposition intérieur appréhendant systématiquement et selon les mêmes critères les produits nationaux et les produits exportés; elle frappe exclusivement les marchandises présentées au contrôle en vue du franchissement des frontières de l'État importateur.

Même si, à strictement parler, le contrôle n'a pas lieu, pour des raisons pratiques évidentes, à la frontière néerlandaise et même si, en théorie, les marchandises peuvent franchir cette frontière sans être accompagnées du certificat, le contrôle doit en fait être effectué avant de quitter cette frontière et la taxe, en tout cas, est due aux Pays-Bas, alors qu'aucune contrepartie n'existe pour les produits végétaux commercialisés à l'intérieur du pays.

La redevance perçue à l'occasion de la délivrance du certificat phytosanitaire constitue donc en principe une «taxe d'effet équivalant à un droit de douane», sans préjudice de la question de savoir si elle ne constitue pas également une mesure d'effet équivalant à une restriction quantitative.

III — Il reste à examiner si, tout en constituant une «taxe d'effet équivalent», la redevance en question ne devrait pas être considérée comme compatible avec les articles 12 et 16 du traité à raison de son caractère de rétribution d'un «service effectivement rendu» à l'exportateur au sens de l'arrêt Bauhuis, par exemple à la suite d'une «opération de fumigation», de «désinfection ou d'un traitement de désinfection».

Avant cet arrêt, la Cour avait jugé que la circonstance qu'une taxe ne couvrait que les frais réels du contrôle sans les dépasser et qu'elle était répercutée sur l'importateur demeurait sans importance pour sa qualification, dès lors que tous les autres critères d'une taxe d'effet équivalent étaient réunis (arrêt Rewe du 11 octobre 1973, Recueil, p. 1039; arrêt Bresciani du 5 février 1976, Recueil, p. 129). Dans l'arrêt Cadsky du 26 février 1975, la Cour avait encore jugé (attendu no 8) que
«l'avantage ainsi conféré aux produits nationaux relève de l'intérêt général de l'ensemble des exportateurs, de sorte que l'intérêt personnel de chacun d'eux est à ce point incertain qu'une charge perçue pour ce contrôle ne saurait être considérée comme la contrepartie d'un avantage déterminé, effectivement et individuellement rendu».

Mais, l'attendu no 6 de ce même arrêt précise qu'il «n'est pas exclu que, dans certaines hypothèses, un service déterminé, effectivement rendu, puisse faire l'objet d'une éventuelle contrepartie proportionnée audit service …; mais il ne peut s'agir que de cas d'espèces qui ne sauraient conduire à tourner les dispositions des articles 9 et 16 du traité».

Notons, en premier lieu, que la redevance ne pourrait éventuellement être considérée comme échappant à l'interdiction des articles 12 et 16 que s'il était établi que, dans tous les cas, l'exportateur était assuré de pouvoir répercuter sur le destinataire étranger le montant de la redevance. Or, ce n'est nullement le cas.

En admettant même que la redevance constitue la contrepartie d'un service officiel qui permettrait à l'exportateur de «gagner du temps et de l'argent», elle est également perçue dans l'intérêt général des Pays-Bas, qui n'ont souscrit aux engagements prévus par la convention que parce que les produits végétaux exportés des autres États membres font l'objet d'un contrôle phytosanitaire avant leur exportation.

Dans ces conditions, l'évaluation chiffrée de l'avantage prétendument conféré à l'exportateur varie selon chaque exportation et pour chaque produit; elle suppose une connaissance de la situation du marché et des conditions du contrat. Comme le faisait justement remarquer M. l'avocat général Reischl dans ses conclusions sur affaire Bauhuis, à propos des animaux, on peut se demander s'il est juste et équitable que les frais de mesures qui servent à prévenir des maladies et qui sont donc prises
également dans l'intérêt des producteurs, soient mis à la charge du commerce et donc finalement du consommateur.

En réalité, la redevance est la contrepartie forfaitaire du contrôle qu'effectuent les autres États membres sur les produits qui sont exportés à partir de ces États vers les Pays-Bas.

Il ne s'agit donc pas d'un avantage spécifique à l'exportateur, évaluable concrètement, ne dépassant pas le coût réel du contrôle à l'occasion duquel la redevance est payée. A supposer même qu'il s'agisse d'un service effectivement rendu à l'exportateur, il est impossible de savoir si le montant de la redevance est exactement proportionné audit service, et notamment si la valeur du service n'est pas inférieure au montant de la redevance perçue.

Il faudrait, par ailleurs, que l'obligation de contrôle phytosanitaire soit imposée et appliquée de façon égale dans tous les États membres et que les modalités de ce contrôle soient uniformes. Tel n'était précisément pas le cas sous l'empire de la convention, puisque les contrôles au départ étaient effectués conformément à la réglementation phytosanitaire propre aux pays importateurs.

Même lorsque tous les États membres se seront conformés aux dispositions de la directive du 21 décembre 1976, ce qui peut exiger de deux à quatre ans, ces contrôles ne seront en tout cas pas identiques à ceux effectués à l'occasion de la commercialisation et du transport des mêmes produits sur le territoire de l'État membre d'origine, contrôles qui n'existent pas, ou du moins pas dans la même mesure, aux Pays-Bas.

Il faudrait également que les contrôles précédemment effectués par l'État importateur soient effectivement remplacés par les contrôles effectués par l'État expéditeur (attendu no 46 de l'arrêt Bauhuis); or, il n'existe, à cet égard, que des certitudes «raisonnables».

Quant à l'argument tiré de ce que, selon le gouvernement des Pays-Bas, la réglementation en cause contribuerait à libérer les échanges intracommunautaires, bornons-nous à lui répondre que ces échanges seraient encore plus facilités en l'absence de toute charge financière.

Même si l'apposition d'une marque nationale à l'exportation — à supposer qu'elle fût licite en l'absence d'un régime communautaire relatif à la qualité des produits — est de nature à promouvoir l'exportation de produits nationaux, cet avantage n'a pas été considéré par l'arrêt Cadsky comme un service rendu à l'exportateur.

Le gouvernement néerlandais allègue enfin que la suppression de toute contribution des opérateurs et un financement opéré au moyen de ressources étatiques constitueraient en réalité une aide déguisée. Il n'est pas exclu que la circonstance que les coûts entraînés par les contrôles à l'exportation soient couverts directement par les fonds publics plutôt qu'à l'aide de recettes de taxes parafiscales puisse donner lieu à des distorsions de la concurrence. Mais, d'une certaine manière, les «aides»
ainsi accordées par les États membres se neutralisent mutuellement si chaque État membre prend à sa charge le financement de contrôles analogues.

Si les distorsions de concurrence subsistent malgré tout, elles ne peuvent être supprimées au moyen d'une dérogation à l'interdiction des articles 12 et 16, mais par une harmonisation du droit. Comme le dit la Commission, «il y a là pour le législateur communautaire une tâche à entreprendre».

En définitive, suivant la nature des textes en vertu desquels la redevance est perçue, deux hypothèses doivent être distinguées:

— ou bien le contrôle est unilatéralement imposé par un Etat membre au titre de l'article 36, comme c'est, selon nous, le cas en l'espèce: dans cette hypothèse, il ne justifie pas la perception de redevances sur les marchandises assujetties audit contrôle et destinées à couvrir les frais de celui-ci: cette perception n'est pas intrinsèquement nécessaire à l'exercice de la compétence prévue à l'article 36 (attendus nos 13 et 14 de l'arrêt Bauhuis);

— ou bien le contrôle est imposé par une disposition communautaire et ce contrôle est uniforme, ce qui sera réalisé lorsque les États membres se seront conformés à la directive du 21 décembre 1976: en ce cas, les redevances perçues à l'occasion de ce contrôle ne constitueraient pas des taxes d'effet équivalant à des droits de douane à l'exportation, à condition que leur montant ne dépasse pas le coût réel du contrôle à l'occasion duquel elles sont perçues.

Mais c'est de la première de ces situations que vous avez à connaître: étant donné l'incertitude touchant la réalité et le caractère mesurable de l'avantage ainsi conféré et compte tenu de l'absence d'uniformisation des contrôles, le principe de la libre circulation des marchandises, dont vous avez toujours souligné jusqu'ici l'importance, devrait l'emporter.

Nous sommes ainsi amené à conclure que, quel que soit leur montant, les charges pécuniaires auxquelles donne lieu aux Pays-Bas, conformément aux dispositions de l'article 1er de l'arrêté du ministre de l'agriculture et de la pêche du 23 juin 1967, le contrôle phytosanitaire des seuls envois de végétaux et de produits végétaux destinés aux autres États membres sont à considérer comme des taxes d'effet équivalant à des droits de douane.

Nous concluons, en outre, à ce que les dépens soient mis à la charge du royaume des Pays-Bas.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 89-76
Date de la décision : 08/06/1977
Type de recours : Recours en constatation de manquement - non fondé

Analyses

Contrôles phytosanitaires à l'exportation.

Taxes d'effet équivalent

Agriculture et Pêche

Législation phytosanitaire

Union douanière

Libre circulation des marchandises


Parties
Demandeurs : Commission des Communautés européennes
Défendeurs : Royaume des Pays-Bas.

Composition du Tribunal
Avocat général : Mayras
Rapporteur ?: Pescatore

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1977:97

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