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20/04/1961 | CJUE | N°5,

CJUE | CJUE, Conclusions de l'avocat général Lagrange présentées le 20 avril 1961., Meroni & Co., Acciaieria Ferriera di Roma (FERAM), Società Industriale Metallurgica di Napoli (SIMET) contre Haute Autorité de la Communauté européenne du charbon et de l'acier., 20/04/1961, 5,


Conclusions de l'avocat général

M. MAURICE LAGRANGE

20 avril 1961

Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

Chacune des trois sociétés requérantes, Meroni, FERAM et SIMET, s'est pourvue, par un recours distinct, contre des décisions de la Haute Autorité du 28 octobre 1959 prises en vertu de l'article 92 du traité et condamnant ces sociétés au paiement de sommes dues au titre de la péréquation des ferrailles importées et non encore réglées, ainsi que des intérêts moratoires. La Cour a prononcé la jonction par ordonnance du 18 mai

1960.

La procédure écrite a suivi son cours normal jusqu'à la duplique. Dans celle-ci, san...

Conclusions de l'avocat général

M. MAURICE LAGRANGE

20 avril 1961

Monsieur le Président, Messieurs les Juges,

Chacune des trois sociétés requérantes, Meroni, FERAM et SIMET, s'est pourvue, par un recours distinct, contre des décisions de la Haute Autorité du 28 octobre 1959 prises en vertu de l'article 92 du traité et condamnant ces sociétés au paiement de sommes dues au titre de la péréquation des ferrailles importées et non encore réglées, ainsi que des intérêts moratoires. La Cour a prononcé la jonction par ordonnance du 18 mai 1960.

La procédure écrite a suivi son cours normal jusqu'à la duplique. Dans celle-ci, sans s'expliquer davantage au fond, la Haute Autorité a fait part à la Cour de ce qu'elle venait de signifier aux parties requérantes des décisions «révoquant» les décisions attaquées. Dans les considérants de ces décisions, dont copie était jointe à la duplique, la Haute Autorité expliquait qu'il lui paraissait opportun de reprendre l'ensemble des contributions dues (toujours provisoires d'ailleurs) en tenant compte de
nouveaux taux et de nouveaux éléments plus exacts. Les nouvelles décisions pourront naturellement être attaquées à leur tour.

De ce fait, les recours devenaient évidemment sans objet. Les requérantes auraient pu se désister et, en pareil cas, les dépens auraient été, bien entendu, mis à la charge de la Haute Autorité par l'ordonnance qui aurait donné acte du désistement (application de l'article 69, paragraphe 4). Notons, à ce sujet, que, contrairement à ce que les requérantes ont soutenu dans leurs dernières explications écrites, il s'agit ici d'un recours en annulation formé au titre de l'article 33, et non d'un recours
de pleine juridiction. La situation est la même que dans les premières affaires Meroni, 9 et 10-56, jugées le 13 juin 1958, à savoir un recours contre une décision prise au titre de l'article 92, et non contre une décision fixant une amende ou une astreinte prise en vertu de l'article 36. D'ailleurs, les conclusions des recours sont bien des conclusions à fin d'annulation. Donc le désistement n'aurait pas eu à faire l'objet d'un accord entre les parties, suivant les dispositions de l'article 77,
alinéa 1, du règlement; la procédure eût relevé de l'article 77, alinéa 2, et de l'article 78 du même règlement, qui n'exigent pas un tel accord.

Toutefois, les parties requérantes n'étaient pas obligées de se désister. Mais alors, l'ouverture de la procédure orale ne pouvait être évitée, car il est douteux qu'un non-lieu à statuer, qui est une décision au fond, puisse être prononcé autrement que par arrêt, après procédure orale régulière. C'est celle qui se déroule aujourd'hui.

Sur le fond, il est clair que les recours sont devenus sans objet, les décisions attaquées ayant été «abrogées»(revocata, dit le texte italien; il vaudrait mieux dire en français «rapportées», puisqu'il s'agit d'un acte administratif individuel et que l'acte est nécessairement anéanti avec effet rétroactif). Il convient donc de prononcer un arrêt de non-lieu.

La question des dépens est plus délicate.

L'article 69, paragraphe 5, du règlement de procédure dispose:

«En cas de non-lieu à statuer, la Cour règle librement les dépens.»

Il est certain que, dans les circonstances de l'affaire, les dépens doivent en principe être supportés par la Haute Autorité. Mais doivent-ils l'être entièrement, y compris ceux afférents à la procédure orale?

On pourrait être tenté de faire application d'une disposition du règlement, l'article 69, paragraphe 3, deuxième alinéa, aux termes de laquelle

«la Cour peut condamner une partie, même gagnante, à rembourser à l'autre partie les frais qu'elle lui a fait exposer et que la Cour reconnaît comme frustratoires ou vexatoires».

Mais cette disposition est de peu d'intérêt, car les «frais exposés» par la Haute Autorité du fait de la procédure orale sont sans doute faibles ou nuls. La question se pose pour les frais exposés, à l'occasion de la procédure orale, par les parties requérantes: Doivent-ils être mis à la charge de la Haute Autorité? La Cour a toute liberté pour se prononcer à cet égard, nous l'avons vu, aux termes du paragraphe 5 de l'article 69.

Nous pensons qu'il serait inéquitable de faire supporter ces frais par la partie défenderesse, car ils pouvaient et devaient être évités. Deux moyens se présentaient à cet effet: ou bien les requérantes se seraient désistées, ce qui eût évité la procédure orale elle-même, ou bien elles se seraient abstenues d'exposer des frais à l'occasion de la procédure orale, de tels frais, étant donnée la nature de l'affaire, apparaissant dès l'abord comme évidemment inutiles.

Nous concluons:

— à ce qu'il soit décidé qu'il n'y a lieu de statuer sur les recours,

— et à ce que les dépens soient mis à la charge de la Haute Autorité à l'exception de ceux qui sont afférents à la procédure orale, lesquels seront supportés par les sociétés requérantes.


Synthèse
Numéro d'arrêt : 5,
Date de la décision : 20/04/1961
Type de recours : Recours en annulation - non-lieu à statuer

Analyses

Sidérurgie - acier au sens large

Dispositions financières CECA

Matières CECA

Péréquation de ferrailles


Parties
Demandeurs : Meroni & Co., Acciaieria Ferriera di Roma (FERAM), Società Industriale Metallurgica di Napoli (SIMET)
Défendeurs : Haute Autorité de la Communauté européenne du charbon et de l'acier.

Composition du Tribunal
Avocat général : Lagrange
Rapporteur ?: Delvaux

Origine de la décision
Date de l'import : 23/06/2022
Fonds documentaire ?: http: publications.europa.eu
Identifiant ECLI : ECLI:EU:C:1961:7

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