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03/05/2000 | CANADA | N°2000_CSC_25

Canada | Sansalone c. Wawanesa Mutual Insurance Co., 2000 CSC 25 (3 mai 2000)


Sansalone c. Wawanesa Mutual Insurance Co., [2000] 1 R.C.S. 627

Nicodemo Sansalone Appelant

c.

Wawanesa Mutual Insurance Co. Intimée

Répertorié: Sansalone c. Wawanesa Mutual Insurance Co.

Référence neutre: 2000 CSC 25.

No du greffe: 26708.

1999: 14 octobre; 2000: 3 mai.

Présents: Les juges L’Heureux‑Dubé, Gonthier, McLachlin, Iacobucci, Major, Bastarache et Binnie.

en appel de la cour d’appel de la colombie-britannique

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique (1998), 158 D.L.R. (4

th) 385, 106 B.C.A.C. 268, 172 W.A.C. 268, 48 B.C.L.R. (3d) 143, 2 C.C.L.I. (3d) 1, [1998] 9 W.W.R. 209, [1998] I.L.R. ¶I-3...

Sansalone c. Wawanesa Mutual Insurance Co., [2000] 1 R.C.S. 627

Nicodemo Sansalone Appelant

c.

Wawanesa Mutual Insurance Co. Intimée

Répertorié: Sansalone c. Wawanesa Mutual Insurance Co.

Référence neutre: 2000 CSC 25.

No du greffe: 26708.

1999: 14 octobre; 2000: 3 mai.

Présents: Les juges L’Heureux‑Dubé, Gonthier, McLachlin, Iacobucci, Major, Bastarache et Binnie.

en appel de la cour d’appel de la colombie-britannique

POURVOI contre un arrêt de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique (1998), 158 D.L.R. (4th) 385, 106 B.C.A.C. 268, 172 W.A.C. 268, 48 B.C.L.R. (3d) 143, 2 C.C.L.I. (3d) 1, [1998] 9 W.W.R. 209, [1998] I.L.R. ¶I-3568, [1998] B.C.J. No. 834 (QL), qui a accueilli un appel contre une décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique (1997), 32 B.C.L.R. (3d) 162, 42 C.C.L.I. (2d) 148, [1997] I.L.R. ¶I-3430, [1997] B.C.J. No. 38 (QL). Pourvoi rejeté.

David P. Church et Ian G. Schildt, pour l’appelant.

Mark M. Skorah et Julie K. Lamb, pour l’intimée.

Version française du jugement des juges L’Heureux-Dubé, Gonthier, McLachlin et Binnie rendu par

1 Le juge McLachlin -- J’ai lu les motifs de mon collègue le juge Iacobucci dans le présent pourvoi. Bien que je sois d’accord avec la manière dont il tranche le pourvoi et avec une grande partie de son raisonnement, je ne puis l’être avec la démarche qu’il adopte relativement au délit de voies de fait dans le contexte sexuel, pour les motifs que je donne dans l’arrêt connexe, Non-Marine Underwriters, Lloyd’s of London c. Scalera, [2000] 1 R.C.S. 551, 2000 CSC 24.

2 La portée de la clause d’exclusion prévue dans la police de l’appelant et les allégations faites contre lui sont essentiellement les mêmes que dans l’arrêt Scalera. Il s’ensuit, pour les motifs exprimés dans cet arrêt, que les allégations de la demanderesse ne pouvaient pas entraîner l’application de la garantie de la police. Par conséquent, l’intimé n’a aucune obligation de défendre.

3 Je suis d’avis de rejeter le pourvoi avec dépens.

Version française des motifs des juges Iacobucci, Major et Bastarache rendus par

Le juge Iacobucci --

I. Introduction

4 Le présent pourvoi a été entendu de pair avec celui introduit dans l’affaire Non-Marine Underwriters, Lloyd’s of London c. Scalera, [2000] 1 R.C.S. 551, 2000 CSC 24, dont les motifs sont déposés simultanément. Les faits dont sont issus les deux pourvois sont presque identiques. Les deux appelants ont chacun fait l’objet d’une action en dommages-intérêts parce qu’ils se seraient livrés à des activités sexuelles non consensuelles avec une adolescente («la demanderesse»). Chacun d’eux était titulaire d’une police d’assurance propriétaires occupants établie par les intimés. Notre Cour doit déterminer dans les deux cas si les assureurs intimés ont l’obligation de défendre les appelants contre la poursuite intentée par la demanderesse.

5 Pour les motifs énoncés dans Scalera, précité, j’arrive à la conclusion que l’intimée n’a pas l’obligation de défendre l’appelant parce que, dans sa déclaration, la demanderesse ne formule aucune allégation susceptible d’entraîner l’indemnisation de l’appelant en application du contrat d’assurance. Comme elle ne s’est engagée à défendre l’appelant qu’à l’égard d’allégations qui pourraient donner ouverture à indemnisation, l’intimée n’a pas l’obligation de présenter une défense, et le pourvoi doit être rejeté.

II. Les faits

6 Tout comme dans l’affaire Scalera, le présent pourvoi tire son origine des allégations de la demanderesse selon lesquelles des conducteurs d’autobus de B.C. Transit l’auraient agressée sexuellement. Dans sa déclaration, la demanderesse affirme que, entre 1989 et 1992, pendant l’exercice de ses fonctions à titre d’employé de B.C. Transit, l’appelant allait régulièrement au magasin des parents de la demanderesse, où il a fait sa connaissance. Pour sa part, la demanderesse prenait régulièrement place à bord des autobus conduits par l’appelant. Selon la déclaration, les faits reprochés à l’appelant en l’espèce sont essentiellement les mêmes que ceux imputés à l’appelant dans l’affaire Scalera, mais à des dates différentes.

7 La police d’assurance propriétaires occupants de l’appelant énonçait comme suit la garantie générale accordée:

[traduction] «Sinistre» S’entend d’un accident, y compris l’exposition continue ou répétée à une situation préjudiciable essentiellement équivalente.

. . .

L’assureur versera toute somme que l’assuré est légalement tenu de payer à titre de dommages-intérêts compensatoires par suite d’un préjudice corporel ou matériel auquel s’applique le présent contrat d’assurance. L’assureur présentera une défense dans le cadre de toute action intentée contre l’assuré pour la réparation d’un préjudice corporel ou matériel et l’obtention de dommages-intérêts compensatoires, même si elle est sans fondement, fallacieuse ou frauduleuse . . .

Le montant d’assurance correspond à la somme maximale que l’assureur versera [. . .] à titre de dommages-intérêts compensatoires à l’égard d’un sinistre donné.

L’assurance s’applique à toute demande ou action visant l’assuré et portant sur ce qui suit:

(1) Responsabilité civile des particuliers: le préjudice corporel ou matériel découlant des actes de l’assuré n’importe où dans le monde. [Je souligne.]

La police renfermait également la clause d’exclusion suivante:

[traduction] Exclusions: L’assurance ne s’applique pas aux demandes ou aux actions visant l’assuré et portant sur ce qui suit:

. . .

(8) le préjudice corporel ou matériel infligé intentionnellement par l’assuré ou à son instigation; [Je souligne.]

8 Enfin, la police détenue par l’appelant renfermait un avenant facultatif pour la garantie Services de garde, dont voici un extrait:

[traduction] Lorsque les Conditions particulières précisent que la GARANTIE SERVICES DE GARDE est comprise, l’assuré bénéficie de la Garantie E -- Responsabilité légale, et de la Garantie F -- Remboursement volontaire de soins médicaux, à l’égard des demandes ou des actions visant l’assuré et faisant suite à un préjudice corporel ou matériel survenant dans le cadre de l’utilisation de ses locaux pour la prestation de services de garde.

L’assuré n’est pas protégé contre les demandes ou les actions dirigées contre lui par suite d’un préjudice corporel ou matériel découlant de l’atteinte à la pudeur, du châtiment corporel ou de la violence physique ou psychologique dont une personne a été victime par le fait de l’assuré ou à son instigation, par le fait de l’un de ses employés ou le fait d’une autre personne agissant à quelque titre que ce soit dans l’entreprise de services de garde. [Je souligne.]

9 L’appelant a demandé à la Cour suprême de la Colombie-Britannique de rendre un jugement déclaratoire selon lequel l’intimée était tenue, en vertu de la police d’assurance, d’assurer sa défense dans le cadre de l’action intentée par la demanderesse. Le juge Smith a fait droit à la requête, et la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a accueilli l’appel.

III. Les décisions judiciaires

A. Cour suprême de la Colombie-Britannique (1997), 32 B.C.L.R. (3d) 162

10 En guise de préambule à son analyse, le juge Smith a signalé qu’un contrat d’assurance doit faire l’objet d’une interprétation large favorable à l’assuré. L’application de la clause d’exclusion exigeait non seulement un acte intentionnel, mais aussi l’intention d’infliger un préjudice. Pour que la clause d’exclusion s’applique, l’assureur devait donc établir que la nature de l’acte était telle qu’un tribunal pouvait en déduire que l’appelant avait eu l’intention d’infliger un préjudice.

11 Le juge Smith a conclu que l’activité sexuelle ne constituait pas un acte de cette nature. Il a fait remarquer que cette activité n’est pas en soi préjudiciable, que la demanderesse a allégué qu’il y avait eu une activité sexuelle qui pouvait être perçue comme étant consensuelle, plutôt qu’un viol avec usage de la force, et que les actes de procédure renfermaient à première vue des allégations de négligence. Par conséquent, puisque la demande d’indemnisation était susceptible d’être visée par la garantie, l’assureur avait l’obligation de présenter une défense dans le cadre de la poursuite. Le juge Smith a donc fait droit à la requête de l’appelant.

B. Cour d’appel de la Colombie-Britannique (1998), 48 B.C.L.R. (3d) 143

(i) Le juge Hollinrake (avec l’appui du juge Proudfoot)

12 Les appels interjetés par l’intimée et par Oppenheim, intimé dans le pourvoi connexe Scalera, ont été réunis à la Cour d’appel. Ayant accepté la décision Co-operative Fire & Casualty Co. c. Saindon, [1976] 1 R.C.S. 735, comme l’arrêt de principe dans cette affaire, le juge Hollinrake a rejeté la proposition du juge Humphries selon laquelle les actes de procédure renfermaient une allégation de négligence valable. Il a demandé si le préjudice allégué par la demanderesse était la conséquence naturelle et probable des actes de l’appelant. Soulignant au par. 82, [traduction] les «nombreuses affaires, pénales et civiles, dont les tribunaux ont été saisis au cours des dernières années et où on a affirmé que l’activité sexuelle non consensuelle infligeait un préjudice psychologique», le juge Hollinrake a pris connaissance d’office du fait que le préjudice était la conséquence naturelle et probable des actes reprochés, de sorte que la clause d’exclusion s’appliquait.

(ii) Le juge Finch (dissident)

13 Selon le juge Finch, la demanderesse a allégué qu’il y avait eu voies de fait de nature sexuelle sans son consentement et manquement à une obligation découlant d’un rapport de force et de dépendance. Il a conclu à l’absence d’allégation de négligence puisque le fait que l’appelant croyait que la demanderesse était consentante ne pouvait pas changer un acte intentionnel en un acte non intentionnel.

14 La clause d’exclusion dans la police d’assurance de l’appelant se rapportait aux préjudices causés intentionnellement, et non aux actes intentionnels causant un préjudice. Le juge Finch n’a pas voulu déduire que l’activité sexuelle entre la demanderesse et l’appelant aurait inévitablement des conséquences préjudiciables. Comme la clause d’exclusion dans Saindon était identique à la clause d’exclusion en l’espèce, il a conclu que le juge de première instance n’avait pas fait d’erreur en refusant de déduire qu’il y avait intention de causer un préjudice. Par conséquence, il était d’avis qu’il était possible, en se fondant sur les actes de procédure, de conclure à la responsabilité sans conclure que l’appelant avait l’intention d’infliger un préjudice. Puisqu’il était possible de conclure à la responsabilité relativement à des allégations d’actes non exclus de la garantie par les termes de la police, il a statué que l’intimée avait l’obligation d’assurer la défense dans le cadre de l’action.

IV. Questions en litige

15 Le présent pourvoi soulève trois questions:

1. Les clauses d’exclusion stipulées dans la police d’assurance relativement à l’acte intentionnel s’appliquent-elles de façon à soustraire l’intimée à son obligation?

2. Y a-t-il eu «accident» ou «sinistre» de nature à déclencher l’application de la garantie?

3. L’article 28 de l’Insurance Act de la Colombie-Britannique, R.S.B.C. 1996, ch. 226, décharge-t-il l’intimée de son obligation d’assurer la défense de l’appelant?

Vu ma décision concernant la première question en litige, j’estime qu’il n’est pas nécessaire d’examiner les deux autres dans le cadre du présent pourvoi.

V. Analyse

16 Puisque j’ai déjà analysé le droit applicable en l’espèce dans l’arrêt Scalera, précité, je me pencherai uniquement sur une clause qui figure seulement dans la police d’assurance détenue dans la présente affaire, puis je résumerai les conclusions tirées aux fins du présent pourvoi.

A. Interprétation de la police d’assurance en l’espèce

17 L’appelant fait valoir que la police d’assurance établie par l’intimée renferme une clause d’exclusion visant expressément les délits sexuels commis dans le cadre de la prestation de services de garde. Il soutient que, en excluant l’application de la garantie dans ce contexte précis, l’intimée accepte donc implicitement qu’il pourrait y avoir indemnisation lorsque de tels actes surviennent à l’extérieur du contexte de la prestation des services de garde.

18 Je ne puis être d’accord avec une telle interprétation du contrat. L’avenant facultatif pour les services de garde vise une situation très particulière qui ne relève pas du tout de la garantie générale propriétaires occupants. La garantie générale vise les «actes [. . .] n’importe où dans le monde» et exclut uniquement le préjudice infligé «intentionnellement par l’assuré ou à son instigation». À l’opposé, la garantie Services de garde ne s’applique qu’au préjudice «survenant dans le cadre de l’utilisation [des] locaux pour la prestation de services de garde», et elle englobe la responsabilité du fait d’autrui, celle des employés. En somme, elle protège l’assuré contre un risque dont la nature est qualitativement différente, elle exige qu’un avenant distinct et facultatif soit établi et, par conséquent, elle ne saurait servir à interpréter les clauses de la garantie générale.

19 En outre, la clause spéciale d’exclusion visant les délits sexuels commis dans le cadre de la prestation de services de garde reflète sans aucun doute la triste réalité que de tels délits sont malheureusement courants dans ce milieu. Voir Bazley c. Curry, [1999] 2 R.C.S. 534; Jacobi c. Griffiths, [1999] 2 R.C.S. 570. Même si les tribunaux doivent généralement interpréter les ambiguïtés contre l’assureur, je crois qu’il serait peu crédible de conclure que l’exclusion explicite des délits sexuels dans un contexte très spécifique implique que ceux-ci sont visés par la garantie dans tous les autres contextes. Je crois plutôt qu’il ne s’agit de rien de plus qu’une clause d’exclusion précise stipulée par excès de prudence par l’intimée.

B. Application de la clause d’exclusion en l’espèce

20 Les principes juridiques applicables sont énoncés dans les motifs de l’arrêt Scalera, précité, et il n’y a pas lieu de les répéter. Notre Cour doit déterminer si l’une ou l’autre des allégations formulées par la demanderesse contre l’appelant pourrait donner ouverture à indemnisation en vertu de la police d’assurance établie par l’intimée. Plus précisément, la question est de savoir si la clause du contrat d’assurance qui exclut l’application de la garantie à l’égard du [traduction] «préjudice corporel ou matériel infligé intentionnellement par l’assuré» fait obstacle à l’indemnisation de l’appelant pour les actes qui lui sont reprochés. S’il ne saurait y avoir d’indemnisation même dans le cas où la demanderesse aurait gain de cause, l’assureur n’a pas l’obligation de défendre l’assuré.

21 Les faits reprochés à l’appelant sont essentiellement identiques à ceux imputés à Vincent Scalera. La demanderesse allègue des voies de fait de nature sexuelle, la négligence et le manquement à l’obligation fiduciaire. Comme indiqué dans Scalera, précité, aucune de ces allégations ne pourrait donner ouverture à indemnisation.

22 Pour faire la preuve des voies de fait de nature sexuelle, la demanderesse devra établir qu’une personne raisonnable aurait dû savoir qu’elle n’a pas donné un consentement valable à l’activité sexuelle. À défaut d’une telle preuve, elle sera déboutée et l’assureur n’aura aucune obligation d’indemniser l’assuré. Si cette preuve est faite, étant donné le caractère intrinsèquement préjudiciable de l’activité sexuelle non consensuelle, tout préjudice en résultant sera présumé être de nature intentionnelle. La clause d’exclusion s’appliquerait donc, et l’assureur ne serait pas tenu d’indemniser l’appelant.

23 Les allégations de voies de fait imputables à la négligence et de manquement à l’obligation fiduciaire sont subsumées sous celle de voies de fait de nature sexuelle. Elles se fondent sur les mêmes faits et ont causé le même préjudice à la demanderesse. Le simple fait que la négligence soit invoquée ne change rien, aux fins du présent pourvoi, à la nature délibérée des actes. Par conséquent, la clause d’exclusion s’applique également à ces allégations.

24 Comme le montre ce qui précède, l’intimée ne pourrait, dans aucune combinaison possible de circonstances, être tenue d’indemniser l’appelant relativement à l’une ou l’autre des allégations de la demanderesse. Elle n’a donc aucune obligation de présenter une défense.

VI. Dispositif

25 Pour ces motifs, je suis d’avis de rejeter le pourvoi avec dépens.

Pourvoi rejeté avec dépens.

Procureurs de l’appelant: Camp Church & Associates, Vancouver.

Procureurs de l’intimée: Skorah Doyle Khanna, Vancouver.


Synthèse
Référence neutre : 2000 CSC 25 ?
Date de la décision : 03/05/2000
Sens de l'arrêt : Le pourvoi est rejeté

Analyses

Assurance - Assurance propriétaires occupants - Obligation de défendre de l’assureur - Action intentée par la demanderesse contre l’assuré pour voies de fait, voies de fait imputables à la négligence, déclaration inexacte faite par négligence et manquement à l’obligation fiduciaire - Exclusion de la garantie de la police d’assurance prévue pour préjudice corporel infligé intentionnellement par l’assuré - L’assureur a-t-il une obligation de défendre?.

Assurance - Assurance propriétaires occupants - Obligation de défendre de l’assureur - Avenant facultatif pour services de garde prévoyant l’exclusion de la garantie en cas d’atteinte à la pudeur - L’exclusion prévue dans l’avenant signifie-t-elle que la garantie s’applique dans les dispositions générales?.

Responsabilité délictuelle - Délits intentionnels - Voies de fait - Preuve - Fardeau de la preuve - Consentement - Incombe-t-il à la demanderesse de prouver l’absence de consentement?.

En 1996, une demanderesse a intenté une action au civil contre cinq conducteurs d’autobus de B.C. Transit, dont l’appelant, par suite de différentes agressions sexuelles qui auraient été perpétrées entre 1988 et 1992. Les allégations portaient, entre autres, sur des voies de fait, voies de fait imputables à la négligence, déclaration inexacte faite par négligence et manquement à l’obligation fiduciaire. L’appelant était titulaire d’une police propriétaires occupants établie par l’intimée. Dans la police, l’intimée convenait de «présente[r] une défense dans le cadre de toute action intentée contre l’assuré pour la réparation d’un préjudice corporel ou matériel et l’obtention de dommages-intérêts compensatoires» découlant des actes personnels de l’assuré, à l’exclusion du «préjudice corporel ou matériel infligé intentionnellement par l’assuré ou à son instigation». L’appelant n’a pas souscrit à un avenant facultatif pour services de garde, qui excluait expressément les réclamations pour atteinte à la pudeur. La Cour suprême de la Colombie-Britannique a accordé à l’appelant un jugement déclaratoire selon lequel l’intimée était tenue, en vertu de la police d’assurance, d’assurer sa défense dans le cadre de l’action intentée par la demanderesse. La Cour d’appel a accueilli l’appel de l’intimée. Les questions en litige dans le présent pourvoi étaient essentiellement les mêmes que dans Non-Marine Underwriters, Lloyd’s of London c. Scalera, [2000] 1 R.C.S. 551, 2000 CSC 24.

Arrêt: Le pourvoi est rejeté.

Les juges L’Heureux-Dubé, Gonthier, McLachlin et Binnie: Pour les motifs énoncés dans Scalera, les allégations de la demanderesse ne sont pas susceptibles d’entraîner la garantie prévue dans la police d’assurance. Par conséquent, l’intimée n’a pas d’obligation de défendre. Les motifs du juge Iacobucci sont acceptés pour l’essentiel, mais sa démarche relativement au délit de voies de fait dans le contexte sexuel est rejetée.

Les juges Iacobucci, Major et Bastarache: Pour les motifs énoncés dans Scalera, l’intimée n’a aucune obligation de défendre l’appelant parce que, dans sa déclaration, la demanderesse ne formule aucune allégation susceptible d’entraîner l’indemnisation en application du contrat d’assurance. Comme elle ne s’est engagée à défendre l’appelant qu’à l’égard des sinistres pour lesquels il pourrait être indemnisé, l’intimée n’a pas l’obligation de présenter une défense.

L’avenant facultatif pour services de garde dans la police de l’appelant ne saurait servir à interpréter les clauses de la garantie générale. L’exclusion explicite des délits sexuels dans un contexte donné n’implique pas que ceux-ci sont visés par la garantie dans tous les autres contextes.


Parties
Demandeurs : Sansalone
Défendeurs : Wawanesa Mutual Insurance Co.

Références :

Jurisprudence
Citée par le juge McLachlin
Arrêt suivi: Non-Marine Underwriters, Lloyd’s of London c. Scalera, [2000] 1 R.C.S. 551, 2000 CSC 24.
Citée par le juge Iacobucci
Arrêts mentionnés: Non-Marine Underwriters, Lloyd’s of London c. Scalera, [2000] 1 R.C.S. 551, 2000 CSC 24
Co-operative Fire & Casualty Co. c. Saindon, [1976] 1 R.C.S. 735
Bazley c. Curry, [1999] 2 R.C.S. 534
Jacobi c. Griffiths, [1999] 2 R.C.S. 570.
Lois et règlements cités
Insurance Act, R.S.B.C. 1996, ch. 226, art. 28.

Proposition de citation de la décision: Sansalone c. Wawanesa Mutual Insurance Co., 2000 CSC 25 (3 mai 2000)


Origine de la décision
Date de l'import : 06/04/2012
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;2000-05-03;2000.csc.25 ?
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