La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/07/1993 | CANADA | N°[1993]_2_R.C.S._857

Canada | R. c. V. (K.B.), [1993] 2 R.C.S. 857 (15 juillet 1993)


R. c. V. (K.B.), [1993] 2 R.C.S. 857

K.B.V. Appelant

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

Répertorié: R. c. V. (K.B.)

No du greffe: 22944.

1993: 16 juin; 1993: 15 juillet.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juges La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Cory, McLachlin et Iacobucci.

en appel de la cour d'appel de l'ontario

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario (1992), 8 O.R. (3d) 20, 71 C.C.C. (3d) 65, 13 C.R. (4th) 87, qui a rejeté l'appel interjeté par l'accusé contre sa déclaration de culpabilité prononc

ée relativement à une accusation d'agression sexuelle. Pourvoi rejeté, le juge Sopinka est dissident.

Philip Campb...

R. c. V. (K.B.), [1993] 2 R.C.S. 857

K.B.V. Appelant

c.

Sa Majesté la Reine Intimée

Répertorié: R. c. V. (K.B.)

No du greffe: 22944.

1993: 16 juin; 1993: 15 juillet.

Présents: Le juge en chef Lamer et les juges La Forest, L'Heureux‑Dubé, Sopinka, Cory, McLachlin et Iacobucci.

en appel de la cour d'appel de l'ontario

POURVOI contre un arrêt de la Cour d'appel de l'Ontario (1992), 8 O.R. (3d) 20, 71 C.C.C. (3d) 65, 13 C.R. (4th) 87, qui a rejeté l'appel interjeté par l'accusé contre sa déclaration de culpabilité prononcée relativement à une accusation d'agression sexuelle. Pourvoi rejeté, le juge Sopinka est dissident.

Philip Campbell, pour l'appelant.

Susan L. Reid, pour l'intimée.

//Le juge Iacobucci//

Version française du jugement du juge en chef Lamer et des juges La Forest, L'Heureux-Dubé, Cory, McLachlin et Iacobucci rendu par

Le juge Iacobucci — Le présent pourvoi est formé de plein droit. L'appelant a été déclaré coupable d'avoir agressé sexuellement son fils de trois ans en lui empoignant les parties génitales; la déclaration de culpabilité a été confirmée par la Cour d'appel de l'Ontario (1992), 8 O.R. (3d) 20, avec dissidence de la part du juge Grange sur la question de savoir si l'agression était une agression sexuelle au sens du par. 271(1) du Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C-46.

Dans l'arrêt R. c. Chase, [1987] 2 R.C.S. 293, notre Cour a examiné l'infraction d'agression sexuelle et, après avoir analysé les principes et la jurisprudence applicables, le juge McIntyre a affirmé, en rendant l'arrêt de la Cour (à la p. 302):

L'agression sexuelle est une agression, au sens de l'une ou l'autre des définitions de ce concept au par. 244(1) du Code criminel [maintenant le par. 265(1)], qui est commise dans des circonstances de nature sexuelle, de manière à porter atteinte à l'intégrité sexuelle de la victime. Le critère qui doit être appliqué pour déterminer si la conduite reprochée comporte la nature sexuelle requise est objectif: «Compte tenu de toutes les circonstances, une personne raisonnable peut‑elle percevoir le contexte sexuel ou charnel de l'agression?» [. . .] La partie du corps qui est touchée, la nature du contact, la situation dans laquelle cela s'est produit, les paroles et les gestes qui ont accompagné l'acte, et toutes les autres circonstances entourant la conduite, y compris les menaces avec ou sans emploi de la force, constituent des éléments pertinents. [. . .] L'intention ou le dessein de la personne qui commet l'acte, dans la mesure où cela peut ressortir des éléments de preuve, peut également être un facteur à considérer pour déterminer si la conduite est sexuelle. Si le mobile de l'accusé était de tirer un plaisir sexuel, dans la mesure où cela peut ressortir de la preuve, il peut s'agir d'un facteur à considérer pour déterminer si la conduite est sexuelle. Toutefois, il faut souligner que l'existence d'un tel mobile constitue simplement un des nombreux facteurs dont on doit tenir compte et dont l'importance variera selon les circonstances.

En l'espèce, le juge du procès a mentionné d'une manière générale, comme l'a fait le juge Osborne au nom de la Cour d'appel de l'Ontario, à la majorité, les observations précédentes du juge McIntyre en concluant à la culpabilité de l'appelant. Ce dernier a notamment violemment saisi, à trois reprises, le scrotum du petit garçon qui, d'après la preuve, a subi des ecchymoses et éprouvé une vive douleur. À mon avis, il était clairement loisible au juge du procès de conclure, d'après toutes les circonstances, que l'agression était de nature sexuelle et qu'elle était telle qu'il y avait eu atteinte à l'intégrité sexuelle du fils de l'appelant.

En conséquence, je suis d'avis de rejeter le pourvoi.

//Le juge Sopinka//

Version française des motifs rendus par

Le juge Sopinka (dissident) — À mon avis, le juge du procès n'a pas tenu compte, en l'espèce, de l'absence de mobile ou d'intention de la part de l'accusé de tirer un plaisir sexuel de l'acte qu'il a commis. L'importance qui doit être accordée à ce facteur pour déterminer si l'agression est de nature sexuelle dépend des circonstances de l'affaire. Voir R. c. Chase, [1987] 2 R.C.S. 293, à la p. 302. Je suis d'accord avec le juge Grange, dissident en Cour d'appel (1992), 8 O.R. (3d) 20, qui a conclu ceci (à la p. 26):

[traduction] Lorsque j'examine les circonstances non contestées de cette agression, je ne puis arriver à la même conclusion. Je ne puis convenir que l'absence d'intention de tirer un plaisir sexuel n'est pas pertinente. Elle me semble, dans les circonstances de l'espèce, très pertinente et modifie complètement le caractère de l'acte de l'appelant. Selon tous les aspects du critère, sauf en ce qui concerne la partie du corps qui a fait l'objet de l'agression, celle‑ci n'était pas de nature sexuelle.

L'agression constituait une mesure disciplinaire malencontreuse et une attaque cruelle et injustifiée contre un enfant sans défense. Elle était violente; elle était méprisable; elle méritait une punition; mais il ne s'agissait pas d'une agression sexuelle.

Compte tenu de l'arrêt R. c. Nantais, [1966] 2 O.R. 246, [1966] 4 C.C.C. 108 (C.A.), il convient de rejeter l'appel et de substituer une déclaration de culpabilité de voies de fait simples. [En italique dans l'original.]

Je suis d'avis de statuer sur le pourvoi de la manière proposée par le juge Grange.

Pourvoi rejeté, le juge Sopinka est dissident.

Procureurs de l'appelant: Copeland, Liss, Campbell, Toronto.

Procureur de l'intimée: Le ministère du Procureur général, Toronto.


Sens de l'arrêt : Le pourvoi est rejeté

Analyses

Droit criminel - Agression sexuelle - L'accusé a empoigné les parties génitales de son fils de trois ans afin de le punir - Absence de preuve de plaisir sexuel - Accusé reconnu coupable d'agression sexuelle - L'agression était‑elle une agression sexuelle?.

L'accusé a été inculpé d'agression sexuelle contre son fils de trois ans. Dans une déclaration à la police, il a expliqué avoir empoigné les parties génitales de son fils afin de le dissuader de saisir les parties génitales d'adultes et de lui montrer à quel point cela est douloureux. L'accusé a été déclaré coupable. Le juge du procès a conclu que l'absence de preuve de plaisir sexuel chez l'accusé n'était pas pertinente en l'espèce, en raison des autres indices qui amenaient à conclure que l'agression était effectivement une agression sexuelle. La Cour d'appel à la majorité a confirmé la déclaration de culpabilité de l'accusé.

Arrêt (le juge Sopinka est dissident): Le pourvoi est rejeté.

Le juge en chef Lamer et les juges La Forest, L'Heureux‑Dubé, Cory, McLachlin et Iacobucci: En l'espèce, il était clairement loisible au juge du procès de conclure, d'après toutes les circonstances, que l'agression était de nature sexuelle. Cette agression était telle qu'il y a eu atteinte à l'intégrité sexuelle de l'enfant.

Le juge Sopinka (dissident): L'absence d'intention de tirer un plaisir sexuel chez l'accusé est pertinente en l'espèce et modifie complètement le caractère de l'acte de l'accusé. Selon tous les aspects du critère applicable en matière d'agression sexuelle, sauf en ce qui concerne la partie du corps qui a fait l'objet de l'agression, celle‑ci n'était pas de nature sexuelle. Il convient de rejeter le pourvoi et de substituer une déclaration de culpabilité de voies de fait simples.


Parties
Demandeurs : Sa Majesté la Reine
Défendeurs : V. (K.B.)

Références :

Jurisprudence
Citée par le juge Iacobucci
Arrêt appliqué: R. c. Chase, [1987] 2 R.C.S. 293.
Citée par le juge Sopinka (dissident)
R. c. Chase, [1987] 2 R.C.S. 293.
Lois et règlements cités
Code criminel, L.R.C. (1985), ch. C‑46, art. 271(1).

Proposition de citation de la décision: R. c. V. (K.B.), [1993] 2 R.C.S. 857 (15 juillet 1993)


Origine de la décision
Date de la décision : 15/07/1993
Date de l'import : 06/04/2012

Numérotation
Référence neutre : [1993] 2 R.C.S. 857 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;ca;cour.supreme;arret;1993-07-15;.1993..2.r.c.s..857 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award